v M. ÄX - w- 1 ! \ . t .rj^ v'.- ■ tTAT CIVIL, POLITIQUE ET COMMERgANT, DU BENGALETOME PREMIER. / T -L"?' i i Ki i ETAT civil; POLITIQUE ET COMMERgANT, DU BENGALE^ o u Hifloire des Conquetes & de l'Admmiß' trationdtla Compagnie Angloifc dans ce pays. Ouvrage traduit de TAnglois de M. Boxts , Alderman ou Juge de la Cour du Mair« de Calcutta. Par M. Demeunier. TOME PREMIER. \ > If . A LA HAT E^- Chez Gosse, t'ils. M. DCC. LXXV. I iT*"^ € T . -J ' « . J - ^ yj ' ■■• V: \j ' u^ irr t! • i:- • * - ;: ■■ » " o "J* U {u ..i ■[ , y ' f ■ ; " v. A v -i > '—. o d M . preface U IRADUCT E UR: ji E phenomene politique qui fait la matiere dc ce Livre, eft le plus extraordinaire de tous ceux que prefente I'Hiftoire des Nations. Des Marchands Europeens , par une revolution qu'on a peine acon-cevoir, ont mis fous leur domination plus de peuples que n'en con-quirent ä 1'Anden ne Rome Sdpion, Lucullus & Pompee. Iis pof-fedent ä quaere milles lieues de leur Patrie des Etats d'une immenfe etendue , ils y exercenc depuis a iij vj p R t F A C E quelques annees tous les droirs de Ja Souverainece. Enfin pour cenir en efclavagequinze millions de fu-jets (i)J ils foudoyenc une armee de dix mille Anglois & de cinquante mille Cipayes. Comment une Societe de commerce pourroic-elle gouverner d'u-ne maniere equitable des contrees aufli vaftes ? Les Peuples du Bengale & des Provinces de ßaliar & d'Orixa, gemilfent en eflPet fbus une tyrannic infupportable, & Ton a vu plufieurs de ces malheureux fe couper eux-memes les pouccs ^ afin que devenus inutiles dans les Manufadures , i avidice infatiable (i) Voyez d plan for the Gouvernment of ehe Provinces of che Bengal, London , 1772.. DU TRADUCTEUR. vi] «ie Icurs maitres ne les force plus a im travail excefTif. Si I'Empereur de Perfe avoic en-vahi le Bengale, on ne feroit pas cconne qii'il vexat fes nouveaux Su-fErs; maisla domination dun Peu-ple libre eft encore plus dure que Celle d un defpote. II femble que refprit de tyrannic foir U nacurel aux hommes, que ceux memes qui fe revoltent contre le joug qu'oa voudroit leur impofer , ne rougif-fenr pas de rimpofer aux autres. L'Angleterre a conferve fa liberte au milieu de TEurope, & ces memes Republicains, qui font cliaque jour des efforts pour affermir leur Conf-titucion , veulent aiTervir les Colonies de I'Amerique Septentrio-nale , & ils fouffrent que des Marchands autorifes par la Legifla- a iv viij PREFACE tion , oppriment impunemenc les IncJous. On aprecendu que ]e commerce Sc la fouverainece du Bengale cn-ricIiifTenc la Grande-Bretagne; mais il eft sur qu'iis ruinent les Adion-naires , & il faut avoucr que les vexations de la Compagnie An-gloife ne lui ont pas procure beau-coup davantages. Je vais rcfumer en peu de mots Thiftoire de fa decadence & des refolutions du Par-lemenc Tur cetce maticre. Immediatement apres la conque-te, le Gouvernement fit quelques xentatives pour Ce meler des affaires dela Compagnie ; mais il reconnut bien - tot qu'il ne le pouvoit pas fans blelTer la propriete des parti-culiers; de comme on vouloit d ail-leursperfuader a l'Europe & a TAfie VU TRADUCTEUR, ix que les Nababs du Bengale ecoient encore Souvieiains de ce pays , il renon^a d'abord ä fes precencions. Le Miniftere chercboic cepen-danc ä s'approprier ces Domaincs, ou du moins a en partager les revenus ; & on menaca la Coni-pagnie de lui ocer fcs privileges , parce qu'en faifant des conqueces, eile avoit outrepafle les bornes du pouvoir que lui accordoit la Char-tre. Deux ans apres r3cqui{ition du Dewanee j eile fut en etat de payer a fes Ačtionnaires un dividendede 600 pour cent, & le Chancelier de TEchiquier ordonna aux DiretSteurs de ne pas Taugmencer avant les deliberations duParlement. Le Parle-mene fe vit alors contraint de pro-noncer, & on exigea de la Com-pagnie une fomine annuelle dcn-viron neuf millions cournois. z PREFACE Les depenfes de guerre & lei frais d'adminiftration abforberent bien-cot ime partie des revenus, S^ depuis lepoque done on vient de parier, les dividendes des Ačlion-naires one dimiflue fans interruption. Le defordre des affaires de la Compagnie delata, & le bruit des opprellions qu eile exercoic dans le Bengale, parvint jufqu en Angle-cerre. Enfin Ü ie crouva en 1771 un homme qui avoit ete dans I'lnde le temoin de fes cruauces, & qui cut le courage de les devoiler a la Nation. Son ouvrage fitunegrande impreilion , Sc le Parlement pric la refolution d'examiner avec foin 1 erat de la Compagnie & les abus de Ton adminiftration. Les premieres decouvertes du Comite ne furent pas en faveur DU TRADUCTEUR. xj de la Compagnie. Les Direčteurs one en vainrenouvelleleursancien-nes plaintes^en vain ils one pretendu ^ue la Compagnie pent reule prendre connoifTance de fes affaires, que les Charrres font formelles la-defliis J & que fans enfreindre les Loix, il neft pas permis den agir autremenc. Le Comite a continue fes operations , & fes rapports ont juftifie les accufations de M. Boks. II a declare publiqucment a la Chambre des Communes, que Ics Agens dela Compagnie dans I'lndc concreviennent formellement aux ordres des Direčteurs ; que chaquc annee les Employes fuperieurs le-venc fur les Natureis du pays un impot extraordinaire de plus dc vingc - deux millions ; que les xij PREFACE, Gouverneurs sapproprient la plus granfle partie de cette fbrnme ; que cec impoc a ece perqu pendant cinc] ans, fans qu'on cn ait rien f^u en Anglcrerre; que lesTribunaux de Juftice font corrompus, que le Bengale efl en proie au monopole & aux vexations. Sur ces entrefaites , la Compa-^nie s eft trouvee hers d'etat de donner au Gouvernement les neuf millions qu'il en exigeoit. Le Par-lement I'a difpenfee de les payer da-vantage ; & pour venir a Ton fe-cours, il a decide que les revenus rerritoriaux refteroient entre les mains des Adtionnaires pendant fix ans; que le Gouvernement lui pre-teroit 3 i millions; que dans I'in-tervalle des fix annees la Compa-gniepourroit dabord accorder aux DU TRADUCTEUR. xiij Ačtionnaires un dividende de fix pour cent jufqu au rembourfemenc des 3 I millions,enruice 7, & enfin 8 pour cent des qu eile auroic re-duic ä 3 3 millions fes deuces qui confiftent en obligations autori-fees ; qu'alors elle auroir le quart des rcvcnus territoriaux, & que le Gouvernement jouiroit du refte. Pour lever les trence-un millions qu'on pretera a la Compagnie, les Chambres des Communes des Pairs ont autorife le Roi a emprun-ter cetre fomme par des billets d'E-chiquier afFečies fur des fonds qui feront appliques au payenient du principal & des interecs de ces billets ; & fi ces fonds ne fuffifent pas pour les eteindre entierenient avanc le 6 Avril 1779 , ces billets feront afFečtes fur les fubfides qu'on ac- Xlv PREFACE. cordern pour i'annee 1779, & alors iJs Teronc echang^ &c remis au paye-m en t de la maniere done ceux dc I'Echiqiiier Tone ete jufqu a ce jour. Le Parlement cherchoit en oucre les moyens de fupprimer quelques-uns des abiis revokans qui fe font glides dans Texploitacion du commerce & la perception des revenus du Bengale, lorfque cette difcuflion a ece incerrompuc par les pretentions des Colonies d'Amerique. Voici letacaduel de la Compa-gnie AngloifeXesmefuresquerAd-miniftration a prifes, lui otent la fouverainete quelle exer^oic dans J'Inde, & on eft perfuade que fa Chartre ne fera point renouvellee a Ton expiration. En rafTemblant d un cote fes dettes & de lautre la valeur de fes etabliflemens, de les Du TRADUCTEUR. XV inarchanclifes, de fes effets & de l'argenc qui eft dans fon trefor, eile a faic une perte de plus de 6 millions fur fon fond capital, & les Ačlionnaires ne pourroient pas au: jourd'hui retrouver leur mife. Tels font les defauts de fa conftimcion, quelle sappauvritpar les memes moyens qui enrichiroient tout autre Souverain. Quoiqu'elle air envahie une contree habitee par des peuples qui n'onc point de ter-res en propriete; les impots, les depiedacions, les revenus de TEtac & les profits de fes monopoles n'ont pu retarder fa ruine ; cette Comr pagnie, la plus opulente de Celles de i'Europe avant fes conqueres , a perdu fa fuperiorite depuis qu elle eft devenue la puilTance legiflative, executrice, judiciaire, fifcale & nii-Ucaire du Bengale. xvj PREFACE JDes AuceursrerpcčlabIes(i)onc confeili«^ an Gouvernement d'An-glecerre de donner aux Indous la propriete de leurs cerres. Cette grande entreprife eft digne d'une Nation c]Lii connote (i bien tons les droits de riiomme. On peut ltd pre-fenter dailleurs des motifs d'inte-rets; elle accroitroit par-la fes re-veniis, elle afFermiroit fa puifTance dans rinde ; elle afTureroic fa con-quete ; elle augmenceroit fes ri-chefies , & elle rendroit an commerce une partie des trefors de I'Europe de I'Amerique, qui (I) Voyez an cjjliy upon the Cultivation of ths lands and improvements of the revenues of the Bengal. Land. \ 771. By. M. Patullo, & I'Hif-toire Philofophique & Politique de I'^rablif-Temenr des Europeens dans les deux Indes^ Tome I, rcftent DU TRADUCTEUR, xvii reftent enfouis dans le Bengale. Malgre tant d'avantages, il eft aife de prevoir que ce beau projet ne s'executera point; & ici, comme dans plufieurs autres cas, il eft per-mis de contefter la maxime de Bacon : ä ne faut dejcjperer de rien, La Compagnie Angloife n a pas eu beaucoup de peine ä s'emparer du Bengale ; eile a profite de quelques circonftances favorables, Sc fon artillerie a faic le refte. Maisla G rande Bretagne confer vera-1- eile long - cemps fes Doniaines ? Le defpotifme d'un petic nombre d e-trangers dont la pacrie eft fi eloi-l^nee de leurs etabliflemens pourra t-il fe concilier avec les mceurs, la Religion & les coucumes des In-doux ? Les boule ver fernen s paHa-gers qui one defole l'Indoftan, fini- b xviij P R i F A C E ront peur-etre bienrot. Un Empe-reiir remontera fur le crone de Delhy & recouvrera fa Souverainetl Les Gouvernemens d'Afie ne foiiffrent pas quLin pays obeifTc a rant de maicres; les peuples d'Orienc ont befoin de fe reiinir en grands troupeaux pour ctre conduits par un feul defpore. Les Nababs les Soli-bahs da Bengale, de Bahar & d'O-rixa J devenus independans au milieu de lanarchie, recomberonc fous le pouvoir d un feul & de tous les ufurpateurs qui feronc depouill^s, la Compagnie Angloife fen tira la premiere lautorite du Monarque. D'ailleurs, lorfqu'une con tree eft abrutie par une longue fervitude, que lui Importe d'etre fubjuguee par de nouveaux tyrans ? Elle fe prSte aif^nent aux vues de cliaque DU TRADUCTEUR. xix ufurpaceur : eile efpcre coujours qu'en changeant de inaitre, eile fera moins foulee. Enfin , puifque les Habitans du Bengale font plus op. primes par la Coaipagnie, qu ils ne ieroient par les ancicns Mogols, rhabicude & les prejuges les exci-teronc a prendre les armes contre lesAnglois. Mais puifque la Compagnie n'a pas encore perdu fes conqu^ces , il eft important de publ^er les vices de fon adminiftration & den indi-quer les remedes. Tel eft le but de rOuvrage done on donne ici la traduction. L'Auceur a r^fide long-temps dans le Bengale, & jaime ä croire que c eft I'amour de rhumanite qui lui a mis la plume a la main , comme ii ie dit dans fa Preface. Afin de hij XX PREFACE remonter a I'origine des abus qu'il arcaque, il examine le Gouverne-jnenc, la Police & I'Aaminiftration de la Juftice ecabJis dans ce pays, la conduite des Employes de la Compagnie^ letat des revenus. Ja maniere de les percevoir, 1 etat des fabriques, les monopoles, &c. & il ne lailTe rien ä defirer fur chacun de ces articles. L'Auceur eloquent de YHiflolre Philofophique & Politique des Eta-bl^emens Europeens dans les deux Indes, nous a deja fait connoitre en par tie la fituation du Bengale ; mais le plan de fon Oiivrage ne lui permettoit pas d'entrer dans les details que donne celui-ci , qui peut fervir de Tupplement au iien. Les Ledenrs nadopteront peut-etre pas toutes ks opinions de DU TRADUCTEUR, xxj M. Boks ; & s'il foup^onneaifement He mauvailes inceiitions ä I'exemple de Tacite , c'eft qu on prend ce ca-raČtere defpric lorfqu on eft vive-ment frappede la tyrannie. SonLi-vre eft appuye fur des Pieces Jufti-ßcatives & des fairs qu on n a pas recufes en Anglecerre : des Employes de la Compagnie ont pre-cendu le refuter ; mais tous lesEcri-vains defincerefles qui ont traite cetre matiere J one adopce les me-mes fentimcncs (i). J ai fupprime quelques-unes des (i) Voyez State of hritish empire in Ben" gal 3 Si p!iifieurs autres. Avanc M. Bolts, I'Aiiteur de I'Ouvrage intitule , The National Mirror Being an feries of ejjays on the mofi important concerns j tut particulary thefe of the eaft India Company 1771 j avan^olc deja les memes fairs , & les foucenoit avec encoro plus de chaleui". b iij xxij preface, &c. des repecitions cju'on crouve dans rOriginal, & j aurois pris la libcrte de ranger avec plus d'ordre les id^es de I'Auteur, fi cetce permifTion ecoic toiijours accordee aux interpretes. L'Ouvraf^e Anjzlois eft fuivi d un t? Ö Appcndice eres - volumineiix, qui contient tons les traiccs pafifesencre la Compagnie Angloife, le Mogol, le Nabab les autres Princcs du Bengale; je n'en ai traduit que les tit res & Its dates. Ces difFerens ades rcnferment plufieurs claufes relatives aux autres Compagnies de I'Europe^ & en par-ticulier ä celle de France qui Tub/if-toit alors; & comme ils font partie du droit public des PuifTances com-meti^antes de TEurope, ils font fans doute connus du Miniftere. preface de V A U T E U R. ^L eft temps que la Legiflation d'An-gleccrrc pcnfe aux interecs de fes Sujets du Bengale. Malgre tout ce qu'oa a dit ou ecrit fur Ics affaires de l'Inde, eile femble les avoir negliges , comme fi les habitans de ce pays pour etre eloign^s, n'ecolenc pas les mcmbres du meme corps politique, ou qu'ils ne me-ritafFent pas Ics foins de la Metropole. Puifquils rempliflent envers le Gouvernement tous leurs devoirs dc Sujets, ils ont droit a fa proredion. Le Parlement de la Grande-Bretagne oü les Propridtaires de la Compa-gnie des Indes, fc font bornes jufqu'ici a des cxpediens paflagers qui ne reme-dioient ä rien. On n'a point encore adopte de fyftemcs permanens pour b iv xxlv preface afTurcr ces Domaines i la Nation ; & com me les Membres de la Legiflation n'onc pjvs encore accjuis fur cctte ma-riere des connoifTanccs fuffifaiucs , ils ignorenc les dangers qui nous mcna-ccnc, & ils nc pcnfcnc point a prendre les moyens neccfT;iires pour reformer Ics abus & prevcnir ccux qu'oii a lieu de craindre dans la fuite. Le Bengale eft dans un etat de crifc qui ne peuc pas durer long temps. Si I'An-glcterre ne s'emprclle pas d'y faire attention, non-feulemcnt clle fcra bicn-tor privce des refTburces que lui four-nit le commerce de I'lnde, mais clle court grand rifque de pcrdre pour jamais la Souverainete qu'elle a acquife dans ce pays. L'objet de cet Ouvrage eft de devoi-!er I'ecat politique & cornmer^ant du Bengale, de montrer les maux & d'in-diquer quelques-uns des remcdes. L'Au-teur ne croit avoir d'autres titres pour Tentreprcndrc, que Tcsperlence acquife DE V AU T EUR, XXV fur les lieux L'imporcance de la maciere lui fervira d'excufe; comme il ne dit rkn qui ne foic appuye par des faits, il foumet fon Livre avec confiance au tribunal refpečlable du Public. Si ea le publianc avec toute la fimplicice de la verice, il peut exciter la vigilance du Gouvernement, ou delivrer de la mifere & de roppreffion un feul des malheureux qui gemifTent dans le Bengale , il fe croira recon:ipenre de fes rra-vaux. Sous le nom de Sujets de la GrandeBretagne, nous comprenons les Natureis du pays qui vivoient fous la domination dc la Compagnie Angloife, & les Angloxs qui vont s'etablir dans I'ln-de. Malgre lahaine qu'on a con^ue contra la pluparc de ces derniers, ils n'onc cependant pas tous contribue aux revolutions , aux detronemens & a I'eta-tablifTement des Nababs. D'apres les exemples que le Public a fous les yeux, il s'eft pcrfuade que tous les Em- xsvj p Rž FACE ployes tic la Compagnie font aifemcnt des fortunes immenfes dans Ic Bengale. II eft pourtanc vrai qu aducllcment dans ces contr^cs, il y a pluficurs Angiois, qui avec de I'induftrie & bleu des efforts, nc pciivcnt pas fc procurer une honnetc fubfitbncc. Lc Gouvernement doit occr a fes Sujets d'Afie le droit de dire, qu'il les a vendus a une Societe de Commer-^ants pour une fomme de quatre cent mille livres fterlings par an f i). 11 pour-roit avec plus de juftice & de dignite, tirer de ce pays de plus grands avanra-ges, & t^ui peut-etrc feroient bien plus durables. La Compagnie Angloife qui n'etolc (I) Lorfque I'Ouvtage de M. Bolts s'lmprimoi't en Angleterre, li Compagnie Angloife payoic au Gouvernement 400000 livres fterlings par annee. Le refte des revenus du Bengale Te partageoit entre les Aöionnairesj apres en avoir prelevc ks frats «i'ad-miiiiftration. DE V AUTEUR, xxvij d'abord qii'unc Societe de Cornmer-9ants a qui fa Chartre permetroit feu-lement d'envoycr dans l'Inde fix vaif-feaux 8c fix plnnaffes chaquc annee, eft devenue Souvcraine de plufieurs Royaumes etcndus, riches Sc peupl^s. Sc die a fur pied une armee de plus de foixante millc hommcs qui eft en-tiercmenc ä fes ordies. Ses conquetes lui one fait oublicr ce qu'eüe etoit a foa orlgine ; eile a mal entendu ou neglige fes veritables interets de commerce ; i on peuc dire avcc verite qu'il n'y a plus d'e/prit public parmi ceux qui la conduifcnt en Angleterre ou dans Tlnde. Iis n'examlnenc plus que le nombre des lacks de roupies qu'ils pourront amaficr, & celui des fils, neveux, parens ou amis done ils pourront faire la fortune aux depens des miferables qui vivent dans les Do-maines de la Compagnie. Les Proviii-du Bengale, ainfi que les Provinces eloignees de l'Empire Romain lors de xxvilj p R F AC E fa d^cadencc , font devenues la proi'c dcsconcudionaircs. Plufieurs Employes dc la Compagnie apr^s avoir donne cn Afie des fcenes de barbaric , dont on trouvc k peine des cxcmpies dans THiftoirc , font revcnus cn Anglcterre charges dc ricIiefTcs ; Sc la, ä I'abri da credit des Adlonnaires de la Compagnie , ils ont d^fi^ hardimcnc la Jufticc de vengcr la gloire de la Nation Sc J'innocence opprimee. La ruine de la Compagie Angloife mettra du defordrc dans Ics Finances de Tetat. Le gouvcrnemenr doit crain-drc les fuices fachcurcsqiii refulteroienc de la perte des Domaincs d'Afie , ou apprehender du moins qu'ils ne tom-benc dans un etat d'appauvriiTemenc dc de mifcre qui les rendedefavantageux ä fes Souverains. Le Bengale les Provinces de Bahar d'Orixa , n'ont d'autrc rcflource que Targent des autres Nations ; cc pays ne peuc etre floriflant que par la profperite da commcrce^ DE VAU T E U R. xxlx dont les prjncipes font invariablement les memes dans tous les climats. Si le Bengale rombc en decadence , la Com-pagnie ne pourra manquer d'y tomber a Ton tour. Tanc quelle fera Marchandc fouveraine, ou fouveraine Marchande dans rinde, il eft trb-sürque ces con-trdes ne recouvrcronc jamais Icur an-cienne profperice. Les Actionnaires fic les Dire£tcurs ignorent dans quel etat fe trouve le Bengale , tc commeils font mal infor-mesd'ailleurs par des Employds qui les trompent, Tadminiflration nc peut etre que chancelante : ils envoyent dans les Indes des ordres abfurdes & concradic-toires , Sc enfin la Compagnie n'a pas afTez de pouvoir pour fe faire obeir par fes Agents. II n efl: pas pofUble de lui accorder cette autorite dont elleauroit befoin, fans etablir un nouveau Gouvernement au milieu du Gouvernement de la Nation, & fans d^truire la con-ftitution de l'A ngleterre. XXX p nt: F AC E Les monopoles font par leiir nature in^virablcment pcrnicicux. Mais Ic monopole cxerc^ par iiii Gouvernement abfoln, tel qu'efl: celtii du Bengale, doit etre le plus terrible de tous. La Compagnie Angloife jouic cn propriece des revenus de ce pays; eile eft maitrefle fouvcrainc de l'admi- niftration de la Juftlce & de tont ce qui a rapport au Gouvernement. Le Princequ'on appelie Grand Mogoln'efl que l'inftrument de fa puiflance; eile J'a etabli fur Je trone, eile l'v entre- ' i tient par une penfion pour !e faire fer-vir a fes defleins particuliers. Les pre-tendus Nababs du Bengale & de Bahar font des valets a gages dont eile difpofe a fon gre. Le titre de Dewan fous le-quel eile pretend avoir acquis fes pof-feflions territoriales, eft une fii^ftion qu'elle a inventee pour cachcr, s'il etoit poflible fa fouverainete ä I'Angleterre & aux autres Nations de TEurope qui ont des etablifTemens dans cc pays. DE V AUTE VR. Un monopole univerfel s'eft em-pare de tout ce qui fe vend & de tout ce qui s'achette dans le Bengale ; £c la corruption & les abus font porc^s au point que le commerce marche ä grands pas vers l'andantif-fement. Les Tribunaux font auffi ini-ques que les Employes qui en dičtent les Arrets; des millions d'habitans font a la merci d'un petit nombre d'hommes qui partagent entr eux les depouilles du Public. Le defpotifme s'y foutient par la violence militaire, 8c I'on n'y recon-noit ni les Loix d'Angleterre , ni les Loix du Pays : les Agens de la Com-pagnie ne fuivent' d'autres regies que leurs caprices be leur inter^r. Pendant qu'on ^toufFe Tin iuftrie des In-dous, la population, les Manufactures 6c les revenus diminuent , &l le Bengale qui envoyoit a Delhy un tribut de plufieurs millions en efpe-ces il n'y a pas beaucoup d'ann^es , eft ä pr^fent fi depourvu de mon- xxxij PREFACE noies courantcs, que dans peu dc temps la Compagnie n'aura probablemenc pas de I'argent pour payer fcs troupes, & die dira au Gouvernement d'Anglc-terr quelle ne peut plus lui donner fes quaere cent millc livrcs fterlings. Les Employes de Calcutta ont deja ^te obliges de tirer plufieurs millions fur les Direfleurs pour les befoins de leur commerce & les frais du Gouvernement. Les habitans du Bengale, dont une famine defaftrcufe vient encore d'ag-graver les malheurs , ont poufle des cris vers l'Angleterre pour obtenir le foulagement de leurs maux. Si eile rc-fufe plus long-temps de les ecoutcr, fi on les met dans le cas de g^mir plu5 long-temps fur I'iniquite d'un Gouvernement dont on leur avoit vante la fa-gefle, on doit craindre que le comble de la mifere ne les jette dans le defef-poir & qu'ils n'aldent de toutes leurs forces la premiere Puiffance qui voudra dans VE D AUTEÜ R. xxxiii dans rinde combactre la Compagnie Angloifc. Ceux qui regardent ces ter-rcurs comme chimeriqucs, parce que Ics Indiens font un peuple deg^n^r^ , effemliie & mol, devroient fe rappellcr qu'ils one roiivenc defaic nos armecs ; que fans armes a feu ils foutienncnt le choc de nos troupes d'Europe, Sc que dans pluficurs occafions ils ont montre autant dc bravoure de courage que Ics Anglois. L'bomme impartial qui juge fainenient, s'imaginera peut-etre que la feule leputation exagerec des exploits de la Compagnie lui confcrve la Souverainece qu'clle pofIcde,&: que fa puifTancc ceflera d'etre formidable dans I'Inde des qu'on commencera ä la le-voqncr en doure. Les memcs caufcs pro-duironc les memes cfFets dans tous Ics pays, &L le grand nombre finlra tou-jours par tcrrafler le plus petit. Avant de meprifcr les Afiatiques comme des lächcs done on n'a rien ä rcdcu-ter, on devroit confiderer que !e plus Tome I. c Jtxxk preface rneprifablc reptile , fc rctourne contrc riiomme lorfqu'il eft fouM aux plcds, & que I'Hiftoire montre par-tout des Nations foibles a qui Ja cruaute de 1 op-prefliondonnoitia forcedc Ja rage be du defefpoi r. Heureufemenc pour les Euro-peens qui ont fait des invafions dans rinde, la rivalite qui eft entre les Mahometans & IcsIndous, donne ä ces etran-gcrs des facilit^s pour gouverner iesuns & les autres ; & fi les Anglois vouloienc employer uneadminiftration Equitable, ils pourroienc y conferver leur pui(^ fancc pendant pluficurs fieclcs. Les revenus que per^oit la Compa-gnie dans les Provinces du Bengale, de Bahat & d'Orixa, ont ^te eftimes en 1765 i plus de trois millions fix cene mille livres fterlings par an , & il feroit aife en reformant lesabus de les porter a fix millions fterlings. Ces riches con-trdes offrent, d'aillcurs, ä l'Angleterre routes fortes d'avantages pour Ton commerce i mais pendant que la Na- DE L'AUTEUr, ^^^^ tion forme de grands projcts chlmeri-ques fur cccce opulence, eile fouffre que la Compagnie & fes Subftitucs eq tarifTent la foarce. Les difFerens interets de la Compagnie, comme Souveraine du Bengaile, & comme faifanc en meme-temps touc le commerce de ce pays, font direöe-ment oppofes les uns les autres, & fe detruifenc mutuellement; de forte que fil'on n'adoptepasun nouveau fyfteme^ le mal doit faire fans cefle des progr^s. Si Ton permec ä la Compagnie de fui-vre le cours de fes operations, eile fe ruinera bien-tot, Scla Grandc-Bretagne perdra ccs poflTcffions qui auroienc pü I'enrichir & l'elever aun degredeprof-perlce £c de puifTance doiit l'Hiftoire fournic ä peine des cxemples. Une aucorice fansbornes nepeut gue-res fubfifter fans oppreffion. Uadminif-tration de la Juftice doic naturellemenc fe corromprc dans les Gouvernements qui font fore dloignes de la inE V AVTE UR. xxxis font opiniäcres , & il n'eft pas aiß de les faire taire; 6c nous ne cr^ignons point qu'on ofe nier ouvertement la verite de ceux que nous offrons ä Texamen du Public. Nous nous fommes bornes, au-tant qu'il etoit pofGble, aux actes con-tius du Gouvernement de l'Inde qu'U etoit necefTaire de einer. Chacun , en Angleterre , a le droit d'examiner les operations .publiques des hommcs conf-titues en dignite , fur - tout Celles qui peuvent etre avantageufes ou nuifi-bles k la Societe don t il eft membre. Apres avoir lü les fairs exrraordinai--res rapportes dans cet Ouvrage, le Lec-teuf deraandera comment ils ont pü reC' ter Ii long-temps caches aux yeux da Public. II eft facile d'en donner la rai-fon. Les perfonnes en etat de les expo-fer ,etoienc intereflees a ne le pas faire. Les amis (i) de ceux qui avoicnt lieu CO Ces raifons ont empechc I'Auteur de fe plain-dre du maffacrc d'un de fes amis cjui fut aflafline en Decembre 1766 par les Employes d'un Zcmindat diftričt de Sutalury. xl p Rž F A C K de Cc plaindre des rraiccmcns de la Compagnie dans TlnJe, nofoicnc pas pubiier Icurs Ictcres , de peur d'acci-rcr fur les opprim^s qui rcftoienc encore au pouvoir de la Compagnie ou de fes Subfticuts , de plus grands malheurs; d'aiileurs, la Gourdes Direc-tcurs a coujoursftrictcmcntdeFcndu (i) »■■IM« ■■■ I I I (0 Dans le XCVI & XCVII' Paragraphe d une Lettre de la Cour des Dircčteurs au Prefident & Confeil du Bengale , datee du 19 Fe'vrier i^öö, on lit les paroles Tuivantes. » Nous avnns fouvcnt montre combien il eft dan-M gereux de faire connome aux particulierj d'An-» gleterre I'etat de nos affaires dans I'Inde. Nous M avons defendu cette communication, fur-tout dans nos Lettres du premier Avril 1760 , Paragra-» phe CXVIj-du 19 Fcvrier 17^1 , Paragraphe » LVII; & du premier Juin 1764, p. 48 Comme » on a public cette defenfe dans toutes nos Prcfiden-»J ces , eile doit etre connue de tout le monde. » Nous confirmons par la prerente , de la ma" niere la plus forte , les ordres que nous avons donne dans nos aneiennes Lettres; nous enjoi-* gnons a notre Prcßdent & Confeil de les fa^re " ex^cuter dans toute leur teneur, 8c de faire de rc-» chef pubiier par-tout cette nouvelle Ordonnance , » afin que perfonne n'en pretexrc caufe d'igno-» ranee DE L' AUTEU R. ^Ij fous des peines feveres, ä fes Employes, de communiquer ä qui que ce foit en Angleterre des details fur le commerce de rinde. Ceux mBmes qui viennenc du Bengale a Londres pour obcenir la reparation des corts qu'ils ontfoufferts , ne s'avifenr pas de les decouvrir, parcc qu'ilsefperenc obtenir de laCompagnic une decifion avantageufe, ou recoarner dans rinde pour y occuper des poftes Gondderables, En un moc, tous les An-glois qui ont ete une fois dans l'Inde , one tellemenc ä craindie ou ä eiperer de la Compagnie, pour eux ou pouf Icur amis, qu'il eft de leur interet de ne pas Ic brouillcr avcc eile en devol-lanc fes fecrecs. Ceft par ces motifs que l'Auceur lui-meme de cec Ouvrage, qui pourroic prefenter au Public des Depuis ce tcmps, la Cour des Direfteurs , dam fes diverfes Inftrudtions au Prcfident & Confeil de Calcutta, nacefle de repeter quefi quelqu'un etoit coupable de la plus petite contravention a ces Or-donnances, la Compagnie lai recireroic fa proteßion ^ ^ ^uil fcroit envoys pri/onnier en AngUurrtt xlij p R J^ F AC E faks plus intereflancs & plus curieux encore que ccux qu'on va voir, les ticnt caches jufqu'i ce qu'une occafion favorable de ddcouvrir pleinement la v^ri-tö, lui permettc d'en former yn autre volume. % i tTAT Etat civil,, POLITIQUE ET COMMER^ANT DU BENGALE; Ou Hiftoire des Conquetcs, de la Sou: verainete de rAdminiftration .de laCompagnie Angloiredaasce pays; INTRODUCTION. CHAPITRE PREMIER. Reflexions generales fur l'Indofian & les Indous, Ij'Agrjculture feule ne pourra peu:-etrQ jamais rendre un pays puifTant & riche. Ii n'auroit alors d'autre navigation que celle des Nations errangeres qui en feroienc ptefque Tome I, A a Etat Civil ^ 6c. tout le commerce (i). Les Manufadures, fef^ vent furtout a enrichir & peupler un pays i cependaiic routes les fabriques ne concoii'-reuc pas cgaiement i la force d'lm Ecar. La Navigation par elie-meme produit plus de forces que de richelfes pour le pays qui a line marine. Le Commerce eft non-feulemenc une fource abundance de richeires , mais encore de beaucoup de connoiiraiices uci-les. L'Indoftan , depuis un terns immemorial, s'adonnoic a I'Agriculture & aux Manufactures qui avoienc fait des progres excraordinaires. 11 ctoit devenu riche & peuplc au-dela de tour ce qu'on peut imaginer. Mais en ncgligeant le commerce ctranget , cc vafte pays etoit refte dans Tignorance de beaucoup de connoif-fances qui auroient pu fervir a fa profpcritc, & parce qu'il ne s'ctoic pas adonne a la navigation &c aux arts , il ne fur jamais alTez puilFant pour fe metcre a I'abri de rinvafion de fes ennemis. Une barriere infurmoncable emp^choir les J (i) Voyei Confiderations , on the policy j commerce of the Kingdom j p. j 'M' Londres, che* Almon J en 1771. Wous ou Gentils (i) de vifirer les pays ^tftiu-. gets. Reteniis dans le leur par des fuperfti» tions religieufes 8c des inoeurs infociables qui font la fuite de leur croyance , i Is s'y bot-nerent aux Fabriques 8c i I'Agriciilrure , ea-abandoniiant le Commerce" & la Navigatioa-i tous les peuples voilins qui vouloient venit, trafiquer chez eux. .: Les aiiciennes Hlftoires parlent beaucoup des Nations eloignees qui alloifent commercec-chez les Indiens, mais elles ne difent jamais que les habirans de I'lnde foient fortis de leur pays pour faire le commerce. Les Ecrivains des premiers ages remarquent fouvent que les Indiens ccoient fort riches, mais jamais qu'ils croient puiffans : & furement ils ne I'eroient gueres , paifque nous f^avons qu'ils furenc (i) Gentio , eft un mot Portugals qui fignifie Gen-til dans le Tens de TŽcriturc. Les Chretiens don-, nerent d'abord ce nom ä tous Ics habitans de I'lnde , foit Mahometans ou Indous. On dittingua enfuite Jes feftateurs de Brama, qii'on appelia Indous J des Mahometans , qu'on appella trcs im-proprement Maiires. Cependant , fous le nom de Gentils 3 on comprend qsielqisefoi«; a prefect tous les habitans de I'lnde j de quelque religion qu'ils To lent. ■A 2 ^ Etat Civil, Oc. toujours fub/ugucs facllemenr pnr tous ceux qui voulurent les combatrre. II eft probabJe que ta reflembbnce de religion & de mcEurs entretenoit la paix dans toiires les Provinces de l'Indoftän, tanc qu'el-les ne fiirenr point envahies par des domi-jiateiirs etrangers. La popuintion , rr^s-ancien-ne, defcend des anciens Pacriarches de l'O-rienr. Les families , en fe multipliant, for-nioient aucant de Tribus oii de Communaurcs fcpar^es, dont les nfages , les moeiirs &: la croyance ctoient pourranc tres-peii difFerens. Chaciine fuivoit les loix que lüi avoir trac^ iin Chef Oll Rajah, da nom duquel on diftingiioit chaque pays parriculier. Mais roiis ces legif-lateurs femblent s'erre rcunis dans la redaction de leurs loix , pour former im feul corps de cesdiverfes Cartes feparees. L'une etoit chargee d'inlkuire les autres ; une feconde devoic les proccger & les goiiverner, & enfin le refte s'occupoit des profeflions & des rra-vaux qui eroient neceflaires ^ la grande confederation. Iis vivent encore fous la menie forme d'adminiftration , auranr que le per-mettenc les divifions & les ravages qui defo-lent ces coturees. Ce Gouvernemem etoic trcs-dcfedueux enapparence, mais il fiippo- du moins que l'ambition ßc rous les vices def-iručbejiirs de nos iiiftitutioas modernes y etoient peu comms. Les indous , ainfi que ies Chinois , preteu-dent que leur Nation eft bejmccup plus an-cienne que les cpoques auxquejles les calcuis des Chieriens & des J uifs oar fixe la creation dii Monde. Leiics preinieiš monumens hifto-riques font fans doute aufll fabuleux que ceux de toures les autresNatioiis; & les Scavans qui out eutrepris inutilement de debrouiller ce ca-^ hos, croient qu'on ne peut pas comptet fur leur Hiftoire au-dela de cinq mille ans. Le Samshret ou Sanskret jS. ete jufqu'a pre-fent le fančtuaire impenetrable des trefors litteraires des Braminfes , , qui feuls enten-dent cette Langue raere^ qui eft tres-ancienne & tres majeftueufe (i).. Ms out plufieurs Li^ (j) Nous croyons devoir tranfcrire ici pour la curiofite des Lečieurs, ce qn'ectivoit de Tlnde en 174a, fur cette jLangue, de P. Pons ^ Miflionnaira Frin^ois. Letcrcs Edif, To. z6, p. izi. Edition de ^aris. "C Les Scienccs Sf les beaux Arts ^ qui ontete culti-v« avec tant de gioire Se de fucc^s par las Grecs & les Romains, ort fleuri parcillement daas l'Inde; & tcpuce i'Antiquite rend temoignage au nitrite des A 3. 5 i:tdfCivf/^ &c. vresqui traircnt'de la Religion &de laPhilofo- phie , & mcme, d ce qu'on dir, de I'Hiftoire. Gymnofophiftds , qui foht ^videmment les Brami-nes:, & fur-tout c'eux qui parmi eux reiioncent au inoinle, Sd fe font Saniajfi. Li -Giamrnaiie tics Bramlnes peut ctre mife au rang des plus belles fcicnccs; jamais Tanalyft & U ryncbcre ne futent plus heureulcmcnc employees j que dans leurs ouvrages Grammaticaux de ii Lan-gue Sarnskret ou Samskroatam Ti me paroit que cette Langue , fi admirable par foii harmonie , fon abon-dance & Ion energie.j t'toit autrefois la Langue vit yante dans les paj'S lnbiit,'s par Jcs premiers Bra-mir.Gs. " __: . II eft ctonnant que Tefprit humain ait pu attein-dre a la perfeiiioii de fart, qui ectate dans ces Gram-jnaires :]es Auteiirs y ont reduit par Tanalyfe la plus liche Langue du monde, a yn petit nombre dYlc" mens primitifs, qu'on peut regarder comme le caput Tmnuum cte la Lans;ue^ Ges clemens ne font par eusc-memes d'aucun ufage ; ils ne fignifient proprement rien; ils ont feulement rapport i une idee ^ parexeWi-ple J Km i I'idcc d'ailion. Les elemens fecondaires qui affečlent le primitif^ font, les terininaifons quj le ftxent ä etre noni ou verbe •, cefles felon lefquelles il doit fe dccliner ou fe conjuguer; un certain nom- . bre de fyllabes a placer entre Telement primitif'&r ■Tes terminaifons i quelques prepofitions j &c. — A J'apptoche des elemens fecondaires , le primitif chan-pe fouvent de figure; Kru, par cxemple j devieac» I-es qiiatre Livres de Loix oti Tnftitutions divines, appelles Bedas, font eciics en Stances, po^ felon ce qui luf eil ajoiite^ Kar , Kar, Kri , Kir, K^r.^ &c. La fynthefe unit & combine tous ces elemens-, & en forme une variete infinie de terines d'ufage. Ce font les regies de cettc union & de cette combi-raifon des Gemens, que la Graiuinaire enfeigne de forte qu'un fimple ecoüer qui ne f^auroit rien que 1-a Graminaire, peut en operant felon les regies, fur.une racincj ou elunent priraitifj en tirer plufieu.rs milliers de mots vraiment famskrets / c'efi cet art qui 3 don-t\6 le nom a Languc, car Samskret, fignifie fynteti-que ou compofe^ . - Peut-etre que depuis le Pere de Nobilibus , il.n'y a eu perfbnne afTez habile dans le Samskret, pour exanniner les chofes par foi-meme. J'ai vu d?ins un-Manufcrit du P. de Bourzes , que dans certain pays de la cote de Malabar, les Gentils ct-lebroient la de-livrance des Juifs fous Either j & qu'ils donnoient ä cette fete le nom de J. Yuda Tiroanal ^ Feu de Juda, Le feul moyen de p^netrer dans TAntiquite In-dienne, fur-tout en ce qui concerne l'Hiftoire ^ c'elt d'avoir un grand goüt pour cette fcience, d'acqueric «ne connoiflance parfaite du Samskret , & de faire des depenfes auxquelles il n"y a qu'un grand Prince qui puifie fournir. Jufqu'ä ce que ces trois chofes fe trouvent reunies dans un meme fujet , avec la fante neceflaire, pour foutenir Tetude dans Tlnde ^ on ne f^aura rien, ou prefque rien, de I'Miftoire anciennc de ce vafte Royaume A iv s Etat Civile ^c, tiqiies j les Bramines les regarcient coinme ß -facres, qu'ils ne pefmetcent point a ceitx qui ne font pas de leur Ordre , de les lire , qiiand jnJjnie ils en feroient capables. La fiipeifti-tion & les Pretres ont acquis taut d'empire fut ies malheureiix qu'üs goiivernent , qu'il lent four accroire que ce feroit un crime irremif-fible , fi qiielqu'un faifoit les moindres efforts pour connoitre ce qu'ils contienneiir. Les In-doiis ne s'avifent pas de tranfgreifer ces or-dres ridicules. Le Bramiiie qui dcconvrtroit aux hoinmes des autres Tribus Ies fecrets de "C'eft un m.-ilheur qu'aucun Europt'en n'ait nppris cetre Langue, peut^ctre antidulivienne ^ pourpou-voirlJre & tradufre les anciens Livres Samskrets ^ & "decouvrir Tignorance & la fourbeiie des modernes Eramiiies. Quoique ces ouvrages foient dtfigures par lies fiiperilitions & des fables ridiculesils pour-loienc cependant fervir a jetter un grand jour fur j'ancienne Hiftoire des Sciences 8c des J^ations , 8c fur-tout des Indous que nous ne connoiflbns ea aucunc nianiere- 11 fembie que les principes de la la Religion, de Morale Sc des Sciences de ces peu-ples J ont ete adopt« dans TAntiquite la plus re-'cuJee par toutes les Nations ^ depuis la Chine & ie Japon jufqua I'Egypte & ä la Grece. On f^aic . que les anciens Fhilofophes ou Lcgiftateurs alloient fouvent voyager dans Tlnde pour en rapporter des cftnnoiflanccs. ce Code de la fouiberie , ieroic excomtnimic fiir le champ , chafTe de faCafte, & condam-ne poiir jamais a I'infamie : punitions qu'ils redoutenr plus que la morr. II n'eft paspoffible de danner une preuve 'plus force des -obftacles infurmoncables qui s'oppofenc a la'connoiffance de ces Livres , que l'exemple tres-connu dans l'lnde d'un ■ Empereur, le grand Akbar, qui, malgre couce fon autorite & route fon adrelTe , ne put pas en venir a bout. On avoic imatiinc de laire re-mettre entre les mains d'un Brainine , Feifi , comme un pauvre orpheliii de fa Tcibu. Le jeune Eleve avoic concerte cet expedient avec Akbar. Lorfque apres dix ans d etude & de frequenration des Bramines , il coimnt !a Langue Samskrer , & les fecrets des Pcerrcs, TErapereur prit les mefures convenables pout afTurer fon rerour. On croir que Feifi, pendant fon fejonr cliezfon Maure, ecok devena amoiiteLix de fafille unique. Le vieuxBraniine la luioffViren niariage, ScLeifi, parrage entre Tamour & la reconnoifTance, ne put cacherplus long-rems-fon artifice. -II tomba aux pieds da bon Vieillard, Ini decouvrit la tiahifon,& em-brafTani fes genoux, il le fupplia, les larmes aux yeux, de lui pardonner cet attentat čonrre le meilleuL" des bienfaiteurs. Le Braminc de- 10 Etcit Civile O C. meura intcrdit, & fans proferer un fcul m'oc de reproche, il faifir uii poignard dont 11 al-loit fe frapper : Feifi arrcte fon bras , met touc en ufage pour le flechir, proreftantque s'il eft quelque moyen d'expier fon outrage , il ji'y a rien a quoi il ne foic tcfolu de foufcri-le. Le Bramine , fondant en pleurs, lui die, que s'il vouioit Uii prometrre deux chofes, il lui pardonneroic, & poiirroit confentir a vivre. Feifi promit fans Jicfiter j & ces deux chofes furenc que jamais il ne traduiroit les Bedas, ni ne reveleroit !a croyance des Indous. Feiü tint fa parole (i). II eft rrcs difficile d'apprendre i^Samskret ^ foit a caufe de la grande referve des Brami-nes, feuls depoficaires des ouvrages ccrirs en cetce Langue , foit, parce qu'on manque ab-folument des Livres qui feroient ncceflaiies a cetre etude. Ce qu'on a public en Europe fur cetre matiere, fe borne aux Lertres de TAI-phabet, & a leurs difFerenres combinaifpns (i). Pluficurs Anglais I'ont entrepris ^ mais fans fucces, faute d'avoir des fecours fuffi- (i) Dow's Hyftory of Indoftan, of the. D'tJJir-tation J vol. premier , p^ IJ. (i) Voyez China illufirata de Kircher. Amfitr^ ^ätn^ 176J, p, 'fans. II y a quelques Livres d'une autre Lati-"gue qui peuvent faciliter la connoilTance du Samskret j mais l'Auteur , pendant deux ans de fejour a Benares , na pu en trouver aucun. Quiconqiie veur appiendre le Samskret, doit d'abord fe former a lui-meme fa Grammaire & fon Di^tionnaire. 11 doit ctudier enfuite la Langue Perfanne , on quelques uns des dia-ledes de I'lndoftan , qui approchenc davantage dii Samskret j & fuirout le dialecte dii Bengale , qui a qaelque rapport avec la Langue des Bramines. La quatrieme paitie de fes mots , la forme de plufieurs de fes Lectres , le nom &c I'arrangemenr de tout TAlphabet, font exadement femblables. On ii'a pas lieu d'efperec que les Europeens qut vonc dans Tlnde pour y acqueiir des richef-fes, employent tout le terns qui feroit necef-faire pour etudier une Langiie tres-inutile an but qu'ils £e propofent. Cette entreprifc ne fera probablement jamais executee, que par rencouragement d'un Souverain ou de quel-que Acadcmie zffez riche pour en faire les depenfes. Les protedeurs des Sciences de-vroient determiner un Scavant a ce aenereux facvifice , & faire les frais d'uir voyage done i'Europe tireroit des connoilTances & des dc-coiiverces au moins ttb-curieiifes, 11 Etat Civil j Oc. On n'e/l üiftruit de l'Hiftoire aticienne des Indous que par une rradučtion en Lan»ue Per-/aiiiie d'im Poeme Samskrer. Peuc-ecre nonr-ils poim monumcns de ces rems recules , que quelques clianfons fur des evcnetnfiiš fa-buleux pareilles ä celics des Bardes Wel' fhes, tcolTols , Iriandois ou Gaulois, qui ont cce pau-tout, mune depuis Homere, les Hif-toriens des fiMes barbares. 11 eft probable que les Bramines n'onc pas d'autres treibrs litccrai-res furxes premiers ages. Mais dans des fiecles plus modernes, ces Prcttes, Taus ctre f^.ivans, s ecant roujours beaucoup appliques a J'etude, ils ont fans doute ecrit des cliafes intcrefTan-res. L'Europe ne connoit ces ancetres du tenis des Driü'des, que par ce que lui en ont ap-pris les auttes Nations, qui čtoient im peu plus cclairces alocs. Les Drui'des , ainfi que les anciens Bramines, ccoient des Pretres des Philofophes. Quoique tres-differens dafls ietirs principes de religion, on a}>per^oit ce-pendanr quelque reflemblancß dans les mceurs & les ufages de ces deux Series. D'apres ce qu'ils connoiflent des Mahometans, des Juifs, des Payens & des Chretiens, les Pretres de l'lnde aflurent avec quelque efpcce de raifon, que les Legiflateurs des autres Nation^ one emprunte grand notnbre de leurs Loix des Inftituts de Bratna. Les Hiftoires qu on nous a donnees iufqu'i prefenr de Tlndoftan, traitenc moins d :s Indoiis que des Brigands Strangers qui venoi nt les fubjuguer Sc les r^duire en fervitiide. Les an-ciens Rajahs etolent probablement Souverains de plufieurs Provinces de I'lnde. lis en eroienc fealsproprietaires desterres j giieiriers cie pro-feflioii, & protegeaiic leur fujers uniqiiement par des motifs d'interet:. Leur Gouvernement defpotique n'avolc d'aucte frein , que celui des fenrimens de la nature qui retiennent encore les Tyrans qui ne les onr pas etoufFes, & les peuples de I'lnde n'onc jamais connu de droit public 8c de liberce que la volonte de leurs Maitres. Quelques-uns des Rajahs , devores d'ambition, foumirent un grand nom-bre dePcoviiices; maison a lieu de croire que rindoftan ne fut jamais reduit en entier fous le joug d'un feul dominareur. Plufieurs pays de I'lnde ont etc long - tems rributaires des Perfans, Sc enfuite des Tarta-fes d'Afgan ou de Patau , qui habirenc les montagnes fituees entre la Perfe & Tlndoftan. lis firent d'abord des incurfions dans les Provinces voifines de I'lnde. Its aüerent !es pil-let & leur impofer des tnbucs, jufqua ce ,4 Civile &c. qu'enfin ils s'etablirent a Delhy, au commencement da quatorzieme fiecle. On pent dire de ces Tarrares , ainfi que tie Tanierlan qui leur fucceda, que jamais Icur Gouvernement jie s'etendic fur tout J'Indoftan. Les Rajahs tributaires s'oppofoient a leurs conquetes , & s'approprioient fouvent les Provinces qu'ils commandoietir. La partie de THiftoire qui tiaite de Tin-doftan , depuis qu'il eft fous Tnutorice des Mogols, eft beaucoup mieux connue. Nous en parlerons dans le Chapitre fuivant , ic nous expoferons enfuite I'erat des Provinces du Bengale qui font tombees fous le joug de la Compagnie Angloife. On a voulu perfuader au public que les Anglois n'onr rien ä craindre des Narutels du pays , trop timides & trop foibles pour ofer attaquec leurs vainqueurs, & qu'ils peu-» vent compter fur une poflelfion permanente des domaines qu'ils ont envahis. II eft i propos de montrer ici que ces opinions font tres-faulTes , & que les forces miliraires & mari-[iines de la Compagnie ne fuffiront pas pout conferver nos conqueres, fi nous n'y joignons une adminiftration equitable Sc fage. On n'a aucune raifon de fuppofer que Hude ait jamais maaque de peuples cou- ^ageux. Ii eft für qua prefent plufieurs des PuifTances de ce pays ont de grandes artnees de cavalerie &: d'infantetie bien difcipli-nees , & qui ne foiu pourtant pas com-pofees d'^trangers. Les Syapois au fervice de la Compagnie, font braves, robuftes, & tres-exercžs a routes les operations miliraires. Ii n'y a peut-etre aucun peuple du monde qui ait montre dans les fouffrances autant de courage & d'intrepidite que les Indiens. Les auf-terites & les macerations des penitences reli-gkufes qu'ils s'impofent volontairement, font prefque incroyables. Souvent'ils airaenr mieux expirer dans les tortures ou etre mutiles, que de decouvrir leurs trefors caches , &: contri-buer ainfi a la ruine de leurs families. Les femmes elies-mcmes qui vivent feparees du monde , 6c par confcquent qui ont eprouve peu des difficultcs &c des nialheurs qui fervent a fortifier I'efprit &: le coeur, donnenc des preuves d'intrepidite & de courage qui etonnent les Europeens qui f^avent reflechir. Sans etre accablees par des chagrins qui leur rendent la vie incommode ou les portent an defefpoir, elles fe devouent librement a des inorts horribles , en fe brulant routes vives fur les tombeaux de leurs maris. Quoique la pliiparc des Nations de I'Inde aient erc autrefois tribucaires des Mogols, il y en a cependant qui n'ont pas ctc fubjugues par eux , & qui vivent i prefenc fous leur propre Gouveinemenn. II n-a jaaiais cte ppflible de foiimettre les Maratres &c de leur impofc? djes tributs. Ces pen ples font gouvernes par un Confeil de plufieurs Rajahs de la religion des Indens; ils fe font toujours defendus de I'efclavage , & mcme ils ont fouvent obliges leurs voifins a leur payer des rributs. Derni^rement, iU ont forces le fameux Aureng-zeb a payer mj chout (i) ou Tribut annuel de la quatricme partie des revenus du Decan. L'Empereur , en fe foumetxanr a ces conditions avililfantes , a reconnu, par-la non-feulement qu'ils etoienc independans de foa autorite , niais encore qu'ils partageoient avec lui la Souveraiaete des Provinces qui produifent Ifes revenus dont on paye le chout^ Les Marattes conttnuerent a percevoir le chout J long-tems apres que les revenus des Provinces du Decan n'etoient plus paycs au Trefor Royal a Delhy (z). Lorfqu'en 1740 (i) Holvell's Hiltorical Eve^its. part. I. p. 104; 107. (i) Ibid. pag. 180. ]e9 (i), les Deputes du Rajah S^hoO ;, ( Roj Sktarah ), allaiu i Delhy pourjiecevoir le tnbut, comme a lordinaire , le Miniftere da Mogol leur dit : « Que Nader - Sliali avoic » tenement epuife le crefor , que: I'Empe-•> rear ccoit incapable de fatisFaire i leiirs de» roandes; que d'ailleurs il avoif perdu revenus des Provinces du Bengale , depuis » 173S , par la revoLte d'/4l!awerdy Khawn » qui , conjoincement avec fon frere Hajee « Ahmed , avoic ufuipe le Gouveroement de_ » cetce Soubabie. Le Miniftere ajoutoic que " les divifions de I'Empire ne permettoienr pas » au Mogol de lever des forces fufiifantes pour » reduire ces deiix rebelles, & que les Dcpu-» res voudroienc bien prier leur Maure, an » nom de TEmpereur , d'envoyer une arniee )> fufSfante pour exiger le payemenr du chout » qui etülc du, faire AzcoWsi Allawerdy Sc fon. » frere , & rerabiir fur le crone la fainille de » Sujah Khawn qui en avoir cce chaflTee », C'efl: aiiifi qu'apres la perce du Decan, le Mogol permit aux Maratres , pour les de-dommager du chout lever le meme cribut fur les Provinces du Bengale. Ii eft vrai que (i) Pag. loS 109. Tome I. ' B lg Etat Civil, o C, le Mogoi n'ctoit pas plus maitre alors du Bengale que du Decan ; & que fes Miniftres ne firent cette reponfe aux Deputes que pour fe debarrarter d' line dernande importune. Ce-pendant les Marartes accepterent les ptopofi-tions de TEmpereur j ils fe mirent en devoir d'en accomplir les conditions acquirent par-U un nouveau droit au chout. Une armee de qiiatre-vingt mille hommes de cavalerie, fous le commandement de Boskhaf-Pundit , fuc expedice fur le cliamp pour les Provinces du Bengale. Le General, apres avoir montre fes Lereres de crcance , demanda a l'ufurpa-i^mAllawerdy Khawti:, « trois annees d'arrera-ges du chout^Sc les rrefors des deux derniers n Soubahs; il dir qu'il vouloir qu'un Officier " Maratre fit fa refidence dans chaque Cut« clierie , afin de percevoir la quatrieme 3> parciedes revenus en faveur de fa Nation Cetre demande ayant cre refufee avec indignation , on fe prepara a dccider la querelle par la voie des armes. Allawerdy fut vaincu, except^ quarre mllle hommes , teures fes troupes furent taillees en pieces. 31 courut de fi grands dangers, qu'il fut forcc de fe faire jour a travers toute I'armee des Marattes , avec vingt-cinq mille foldacs Ben-galois & Patans. Sa recraice dura trois joius, combatt.uir. I-a guerre conrinua jufqii'ä la fin de 1747. Hajee Ahmed , un des fveres da rufurpataur, y perdit la vie de la maniere la plus cruelle Sc la plus ignominieufe. Allawerdy Khawn fic dans les combats des exploits digues d'un herosmais accablc de routes pares par fes ennemis, il fut contrainc d'acheter la paix des Marattes, de leur ceder le Cuttack , & > tendroit aucune propolicioti d'accommode-»> mene, H au prealable !es Anglois nc s'en-« gageoienc a payet uii tiribut annuel de feize >• lacks (i) de roupies , a compter des le renis « que la Compagnie a pri s l'emplüi de Dei> wance dans ces Piovinces , & Ii le Cornice " ne garantiflbit pas en faveur des Mai-attes » la fidelle execution du Traite. Pour appuyer * la Icgirimite de ces conditions, il a rap-» pelle les pi:omeires que M. Vanficcart fit a jj fon Maltre en 17(53 , de payer tous les ar' » rcrages du ckout j a conditioJi que les Ma)) ratces ne joindroient pas leurs forces a »> Celles de Coffim Ally Khawn. 11 a beau-it coLip infifte fur les alTurances que donna a J) fa Nation le Lord Clive , de payer tous Us (I ans J apres la conclußon du Tmite ^ la fom-« meßlpulee , ä commtncer des le tenis que la (i) Deux cent mille livres fteilings. » Compagnic jaukoitnde i'emploi de I>ewanee " des Provinces 3). 1 l U " Noiis-'iioLis fomniesl.cTcöUpi?^ fres-ferleu-» femcnr de cecre mariere qui ntms a paru de » la phis grande.importance. En leunifTaiiE jj ainfi hs territoires de la Compägnie fitues fur n la cote .^ravic vöj pojj'eßions du Bengale \ » Yoiis cn tirerez de gi-.mds avanräges. Vocre j» autoirite & vos domaines s'ecentlrönr depuis « Caramnaßa j jußiu'ä Vextrdmitd ia^plus eloi-w gneč de la cote de Ccromandil. Vos etablif-» femens de l'Inde pourcont fe fecourir les )• uns & les aucres , ficrferdcfendte murueüe-» ment j- vous oteSiaiaixjMarartes. roiit prerexte » de rroubler la naniquiUtlE-&: la pajx de ces 5) Provinces, & enfin vdits vous mettcz en etat » de pouvoir ebranlerileiir foTce-& leur.puif-)» faticer Vous pourrez faciiemenc detacher »> de leur parci un allie auffi puiflant que «' Janooge'e , qui pendant le cours des ne-^ gociations , a monrre. un defir emprelTe de »> :faire avec vous une alliance ofFenfive 3!'d^fenfive. €es confidcKations ayanrere pe-»> fees atrentivement Sc debattues dans le Coli mice ,. nous avons refolus d'acquiefcer^ auta » propoßtions du Fakcä j & de figncr le « Traire le pUuot poflible. En confeqiienc© « l&Pccfidenc.a ligni.fie nocre confentemeiic B i 2 2 Etat Civil y Oc. n pif line Lettre a Janoogce , & i reqiiis le-„ Nabab de donner le fien de fon core On voir que les Maratres deniandenr avec inftance a la Compagnie Angloife le rcta-bli/Temenr de leur chout, & le payement des arrčrages qui letir font diis depuis que la Compagnie eft devenue foiiveraine dii Bengale. Noiis ne pretcndons pas dire ou en eft i prefenc la conreftarion \ on croit dans I'lnde , & dernieremenc on a ccrit en Angleterre, que Us Marattes ont en vue plußcurs points impor-tans dont Us ne fe dcpartiront pas. Les Marattes polfeUent un pays tr^s-cteii-dii. Les Laboureurs & le Fabriquans quittent fouvent lenrs charrues & lenrs metiers pour aller aux combats. lis ne recoivent d'autre education qu'iine educaricn miliraire; leufs armces font entierement compofees de ca-Valerie. Accoutumcs depuis long-remsau pillage & aux entreprifes guerrieres , ils font toujours prets a quitter leur pays pour ravager les rerritoires voitins, & leur impofer des tributs, lis ont rous les vices des foldars, & des brigands ; ils font naturellemenr feroces cruels : ils ne fe contenrent pas de depouiller ies habitans chez qui ils font des incurhons, ils Ies murilent, les alTäffinent, les font ex-pirerdani les tortures, afin dc dccguvrir leurs trcfors , lorfqu'ils imaginent que ces malheu-reux en onrde caches (1). Ce peuples ont ece jfbrmidables dans tous les tems i mais iis le font devenus davantage depuis quelques annees. Dans leur expedition de 174 a conrre Allawerdy Khawn j dont nous avons deja parle , ils firent d'abord marcher line atmce de quatre-vingt mille homines de cavaleiie (1) dans les Provinces du Bengale. Le refte de cetce arraee , difperfee par les Bengalois , ayant cte obligee de fe re-tirer , les Maratces renvoyerent l'annee fui-vanre deux corps de cavalerie , de foixante niille hommes chacun {3) , & ils vinrent enfin a bout de foumettre Allawerdy Khawn,. On les regarde dans l'Inde comme la Nation la plus puilTante des Indous , Sc effedivement ils Gilt fouveiit donne des preuves de cetce fuperiorite. On les a vu^terrafTer Hyder Ally , & montrer que fes forces n'ecoient pas eii ^tat de fe mefurer aux leurs, lis travaillenc maintenant a former des corps d'infanterie j quand meme xls ne feroient pas d'abord bien (i) HolwcU's. HifioricalEventi , part. I. p. (1) Holvdl. p. IM (j) Hol>yelI. p. no. B 4 Etat Civil, €'C. iiombreiix Sc bien difciplines , it leur fem ties-facile de les aiigmeiuer & de les exeiccr, j^iiifqü'ort fuppofe qti environ la quatcienie pardti'die's natiuels de-rindoftnn quitrent leiu ■patrie-^-ioni- fe faire foldatsde fortune chcz !es elt^mgörsqui veiilenr les acherer (i). Ces mer-t^eiiiiirtsordmiircment mal-paycs, font fouvent. iffetfiirtetis de la Puiflnnce qu'ils fcivent; ils feronc toüs pras (2) i le joiiidre a qiiiconqiie ^iäyrar-former'line entreprife dont ils efpt-TÄtöiit'tirer des avaijtnges. H eft done tics-cvKleHr qiie chaqiie jmir il peiic fe former dHhsr n-nde line tres-grande puilTance milirai-fallt efpcrer que ki Lcgiflatioii' d'An'-^Oteitpfc-^endra fiir-fes grtrdes, crainte que Iii GÖitiprirfriie par nne-adhViriiftraiion injnfte, iil^ipWaeJerTfin des domaines qii on bpsrdera j>etir-tSrfe tdiiime aflfez ihinilet a la Nation, ■' ■ . , _I, ^ ■■■■:- - , •• jiJ.' I. r->,joi '.•••n t.,...... Indoftan j vol. 1 , pi 402.j fecondc tiiitioi».' ........ ■ ■ - ■ - * (1) '.Ce- flire nous difofis cft'iWVe dans ies Uncles TpaiRs-j Jo¥ß]ue ies MarjUtes fiuToiehc diti«a-gtia. Ce General, conanje le dit Groß dans fen Voyage de I'Inde ^ pag. I jo, eut la prefompUon de demander a laCompagnie Augloife uii tribut annuel de I i lacks de roupies, ou de i joooo livres fterlings , pour laifTer paifer fes Vaifleiux fans les attaquer. Ce-pendant lors de la derniere guerre, toute la Marine de ce Guerrier fut promptemeiit dt'truite par TAniiril Watfon avec pea de Vaifleaux. 30 Etat Civil ^ O C, rinde , pour y acheter le produit de fes Manufactures. Ilsnepouvoienr, par confequenr, manquer d'etre un peuple foible , hors d'etat de refifter a des ufiirpareurs. Une Socicte de Commer^aiis , qui a quatre ou cinq mille lieues de fa patrie va fubjuguer des peuples entiecs , en trcs-grand nombre & tres-riches , eft un phenomene politique furprenant; mais il ne faut pas en chercher d'aurres raifons que dans le caradere foible des vainctis, & dans I'anarciiie qui defoloit le Bengale, lorfque la Compagnie s'en eft rendu fouveraine. En un mot on doit actribueraux prcjuges religieux & aux mcEurs des Indous, I'ecat de foiblefTe oü ils font reftes; & ä Textrcme defpotifme des Empereurs, I'inftabilite de leur Gouvernement. On regarde ordinairemenc dans les autres pays, les richefTes comme le fondement de la puifTance ; le contraire eft arrive dans I'ln-doftan J I'opulence y a ete la fource de la foi-blefle, Un trat defpotique trop riebe , eft porte naturellement a romber dans i'indolen-ce ; les Officiers a qui le Tyran d delegue une grande autorite , deviennent bien-cot les mai-tres de ceux auxquels ils faifoient femblant d'ob^ir. L'Hiftoire de l'Indoftan nous fournit des exemples frappans de cette verite. On a toujours cru que l'Empire Mogol , dans Je« da Bengale. jy jours de fa fplendeur, etoic un des plu, ches & des plus etendus qoi aient jamais exifte ; & des ^crivains l'onc demontre der-nierement d'une maniere fans replique , cn citant des aurorircs inconteftables. L etat le plus authenrique qui ait ere public des revenus annuels de TEmpire Mogol avant rinvafion de Nader Shah , eft du r^gne de l'Empereur Aureng-zeb (i). La fomme totale de ces revenus montoit a rrente-fept millions fept cent vingt-quatre mille fix cent & quin-ze livres fterlings (z). (1) Voye^ I'Hiftoirc des Empereurs Mogols de Freißer j 3 I. (2) ,li parolt par THiftoire de TAmbifTade du Ca-pitaine William Ha\p kins ä Delhy j que les revenus aČtuels dii Mogol Shahfeleem , fils &: fuccefleur du grand Akbar, etoient eftimes en \6\o, 50 millions fterlings. * SirThomas Roe, un autre Ambafla-deur du Roi Jacques a Delhy , coniirma cette efti-mation. Mais on nc fait pas renumeration des Provinces qui dtoient poffedees alors par TEmpereur. Voyez Purckafs Pilgrimes , Voyages de Purchafs, * La livre fterling vaut environ vingt-deux livres dix fols de France. Etat Civile tie. J^oici le mmhre des Provinces ou S o ab able s ^ avec la. Sommc que payoit chacune d'elles. .Souhabiti. Dclhy. Agra. >iii!fer. raiijih. AodihfiuOw'd, kiulran. C.VfOul. Čichcmirc. GlMouiw:.'^ BENGALE. B.VHAR. Dami. " >,911.3 »7- la.ßirl. I!4,((l<,i+0, I, or M.ilva. 40!,SCJ,«J'K. t^iei^i^i. t J. S. B^r. 614,01^,000.. 1. ft. Kaodiih. ..0. Bcdr. S71,974,^-0. 0. Hyderabid. 1,113,5fin,oae. 3,<,75,150, 0. a. Vilhpour. 1,078,(0?,000. 1. s. lEJana fa) ii,C7t,S7«,S40. .■ .rjT' 7 (i) Les .revcnus des terrcs (e comptent ä la Coiir 3e Delhy parD/ms. M. FraffierJit: j qu il y cn a 40 <1ans chaque Roupie ficca. La Roupie ficca vaut «äcuxfcheliiigs fix fols Anglois. Tous ceux qui ont qaelque connoifTaiice de i'Indoftan , conviendronc que fi la foinme ci-defliis enrroit dans le Trefor de l'Emperenr ä Delhy , on peut fuppofer avec beaucoup ds moderation, que les Fermiers en payoienc uhe au moins deux fois plus grande, done les Col-lečbeurs enlevoienc la moitie , foit pat frip-ponnerie, foit pour les frais de perception. Voyez plus has le Chapitre qui traits des revenus ^ de la maniere de les percevoir dans rinde. M. Hol well, anclen Gouverneur du Bengale , affiire que les terres payoienta I'Empe-teur un revenu qui n'ccoit que la quatrieme partie de leur produir. En fuppofanr qu'elles en payoient la moitie , il feroit encore prou-ve qu'en 1707 les terres de I'Indoftan appar-tenantes en propriäe i I'Empereur, rappor-toient annuellement plus de foixante & quin-ze millions quatre cent mille livres fterlings. II ne feta pas erränget ä notre objer de lapporter d'autres temoignages qui atreftent combien l'Empire Mogol avoit anciennement de fplendenr Sc de richeffes (i). (i) Voyez Dow's Hiadöfian, premiere edition , pag. x6. del'Appendix, Orme's Uindofian, pag- ij- C 4 40 Et^t Civil ^ 6c Lorfque Nader Shah envahit Delhy cn i7j9, pnt Je trone de I'Empereur , Ic u^fot & les meubles les plus pr^ieiii de fon Palais. Ce trone» connu dans I'lndoftan fous fous U noiT5 de Tuktec Taoos j ou Trone du Pan (ijii croit eftim^e dix crores de roupies, c'eft-a-dire; environ doiize millions & dem» fterlings j & od čvalue a foixante & dis oil qiucre-yingc millions touE le batin qu'en-leva I'ufiu'pateur., Les peires que fircnr en cetce occalioti la capitale de Delhy & fes ha-bicaas fonc povtces a une fomme fi prodi-gieufe , qu'il iie feroit pas poffibie de fe fier x tous ces calculs , s'ils n'croienr atteftcs par ^es perfoünes dignes de foi qui vivenr dans riadoftan, & pat M. Fraißer, dans fa tradne-ticm a\.\_Mir'\a Z uman de Delhf,-ou Jour-ual pavcitiUier des eväiemens qui arriverenc dans ces tenis de troubles^ ,7 l-l;feröic iniitile.de nous arr&ter pins long-terns a montrer combicn I'EmpirO Mogol etoit florifTanc;- &c liche , meme a one cpo-: que aufli voifine de.nous que cells dont o» tteJapHTertation, S^les Lcttres Edißanus ^ dc Paris, T741. vol. IS- P^S- 444- (ju'on apper^oit la regularite des anciennes u mcEurs. L'admiiiiftratioa eft equitable & » douce j les Souverains femblent moins gou-» vetner leurs fujets que leurs enfanrs. La « propricte & la liberte des hommes font in» violables. On n'y entend parier d'aucun vol „ public ou particulier. Le Gouvernement » prend un foin imm^diat du Voyageur & „ de fon equipage , dis qu'il corame des barrieres contre loppreflion , » forenc en vigueur jufqu'a I'invafion de Na- (i) Luke Scrafton's Refledions on the Governc-of Hindoftan 1770. pag. 14 & faivantes. » der Shah. Arant cetre epoque,il ti'y avoit w peut-ctce pas L«s Commer^ans n avoient nulle part au-n tanr de liberte Sc de fecours de la part da n Gouvernement, qui Ieur accordoit une pro-■> tečtion fpecial« : L'I»doftan , pendant la durce de l'Empite Mogol, n'avoit pas un corps de loix com me nos peiiples d'Europe. Tout Ieur Code civil & reiigieux confiftoiten quelques Livres com-pofcs par des Scavans 5c des Prcues, & Ton avoir raffemble les diffcrens ufages 6c: couru-irtes fondes fur la raifon & 1« Koran , qui S obfervoient dans le paysdepuis un terns Im-memoriai. Nons avons dej a dit que les Malic-metans ■Stolen t les fondateurs de i'tmpire Mogol ; comtne legiflateurs, ils avoient donne ieurs ufages poiir fervic de't^les aux peuples conquis. Gependanr, dans routes les caufes tfui netoient pas majeures ou criminelles, dans les cas qui intcrefToient feuletnent les tndous, & fur-rout dans les affaires de leuis 44 Civil, Oc. Cartes, qu'ils regardent comme tris-importan-i; res , le Goiiverneinenc Mahometan lailToic or-Hinairement anx Bramines le foin de decider Ja conteftacion fuivanr leiirs Shaftros ou an-ciennes ^crirures qui ne font connue« que d'eux feuls. Apt^s que les Bramines avoient prononce, la partie condamnee payoit une amende au Gouvernement. Les Indous font fi opiniacrement attaches a leuis anciennes coutumes , que les nou-veaux Scuverains avoient etc obliges de re-courir ä cec expedient. D'un cote , comme U ecoit impoflible aux Mahometans de fe con-former aux ufages des Indous ; de I'autre, le« Indous, fuivant une conftitution civile & re-]igieiife tr^s-differente de celle des Mahometans, ils ne pouvoient pas adopter leurs moeurs & leurs ufages, ni meme recevolr ces Con-querans dans leurs Tribus. Nous ne connoif-fons pas les mefures qu'on employa pour diminuer la confufion & le dcfordre que de-voit naturellement introduite le melange de deux peuples qui avoient des fyftemes politt-ques & religieux fipeu conformes j mais a en juger par I'experience, il eft fur que les m(Eurs de ces deux Nations devoient s'alterer 6£ fe corrompre. Pendant la diuee de I'Empire Mogol , les Offices & la forme du Gouvernement deDel-Jiy ont toujours ece les memes qu en Perfe , com me le pro a vent les no m s dan: onfe fervoic pour les defigner. Les Aventuriers Perfan« accueillis favorablement dans I'lnde , ve-noients'yrefugier , &: ils ne contribuerent pas peu a conferver cette conformicc. Ceux qui voudront fgavoir quelle devrolt ecre la forme aftuelle du Gouvernement de I'lnde, tel qu'il fut ecabli par les Mogols, peuvenc voir dans ie Chevalier Chardin (i) letat de celui de Perfe qui avoir fervi de modele aux ufurpa-teurs Mahometans. La nature a donne a plufienrs pays de rindoftan de tres-grands avantages pour le commerce. Le Bengale, par-delTus routes les autres Provinces , femble avoir en^ le plus favorife. Certe Soubabie de I'Empire, que le Mogol Aureng-zeb appelloit em-phatiquement le Paradis des Nations j pro-duit en abondance prefque fans culture, tout ce qui fert ä la vie & au bien ctre du genre humain. II n'eft aucun pays mieux arrofe ; des ruifTeaux & de grandes rivieres relies que le Putta & le Brimaputre ^ y ferment des canaux qui rendent la navigation intc- (i) Voyages en Perfe. Etcure ce pays rr« - crendae & trcs-com-ipode poiii lautes Ics cpcrariorys de coramerce (i). Cecre feciliri de «pandie Ae l'ea« for les cainpagne:, & k bont^ naturelle du fot, ftrtilifee d'aiHears par des phiics peiiodiques qni tombent rcgidicremeiir dcpuis le mois de Mar jufqu'au nwis de Septembre , rendent la cahaic des teires fi aifn^ , tju'il refte an La-booreur beaiicoup de tems i donner aux rra-vaux des Manu fad ures. (I) Les Indiens du Bengak fatfoieiit autrefois quelque commerce par mer j Si avoient une PiiLflän-ce maritime, comme oa le voit dans plufieurs en-droits cfe la Collečtion de Purchafs. On dir qu'ea 1607, la flotte du Roi de Bengale fic une Inva-fion dans les liles Maldives. II eft tres probabfe que cetre flotte etoit corapoiec de barimens coiiers , tek qu'on en fabrique encore en pkfietiis endroits de la Baye. Sans rechercher quel ttoit ancienoement l'etat de la maxine des Indiens »il eft für qu eile nc s't-ft pas diftinguee depuis que les Portugals out aborde dans leur pays ^ apres avoir double te Cap de Bonne-Efperance. Par ce que nous avons rapporte d*Angria j Maltrc du port deGheri», fur la cot« de Malabar, on voit cc qu'une marine Indienne, dirigee par un habile homme, feroit capable d'en-treprendre au milieu desmers quibaigncnt cc continent i & la Compagnie Angloife pourra fe repen-lir d'avoir cedc Gheria fi imprudemment aux Ma-rattes. L'Empire de Delhy , fans avoli: des mines dor Sc d'atgent, jouifTok, lors de fa profp£-rite, des metaux de routes les parties du monde les plus eloignees. Les peuples errangers y ont porte leurs iiche0es pendant des ficcles, jufcju'd ce que l'invafion des ufurpareurs aic interrompu le cours du commerce. Noas avons deja dir plus haut comment les Commer^ans de routes les Nations , accueillis & proteges par les Souverains de I'lnde, alloienc achetet les belles etofFes qu'on y fabriquoit: il feroir inutile de le repeter ici. ^ 11 etoic fur-tout necelTaire d'encourager le commerce domeftique & etranger dans la Soubabie du Bengale : cette Province payoic annueMement ä la Cour de Delhy un rribuc confiderable , & elle n'avoit d'autre reflburce que fes Manufa£tures- Ainfi, comme le dit M. Scrafcon, avanc que la Compagnie An-gloife s'etablit dans ce pays, des milliers de Marchands du refte de I'lndoftan & de routes les parties de I'A'fie y arrivoient par Carava-nes, & n'apportoient gueres que de I'argenc comptant ou des billets en echange des etofFes qu'ils venoient acheter. Nous expliquerons plus bas les caufes & les efTets de cette decadence du Commerce dans le Bengale. 4? Etat Ovil, Oc. CHAPITRE III. Etat de rindoflan depuis la fubverßon totale de l*Empire. Situation acluelle du Prince qu'on appellc Grand Mo- gol (0. lPres ce que nous avons dit dans le Clia-pitre precedent, rien ne donne un exempl« plus frappant de Tinftabilite des puifTances liumaines, que le contrafte qu'on verra dane celui-ci. Nous ne nous arreterons pas a dccrire en detail comment Tinvafion de Nader Shah en 1759 affoiblit I'Empire, & le demembrement qui s'en fit feus I'Empereur Mahomed Shah (i) Nous nous fervons de ce terme ^ parce qu'on I'emploie commune'ment en Europe. II paroit que cecufage eftfonde feulement furTnutorite des Miffion-iiaires Francois qui dans leurs premiers Voyages en Orient, appellerent Grand Mogo/, on ne ffait trop pourquoiji'Eniperciir de I'lndoftan. Jamais dansle pays on ne iui donna un pareil titre; on le nomme Teulement Shah j ouPadash j ce qui j en Langue Per-fane, figniiie Roi. ■ qui qui tegnoit quelqiie tems aprös ; nous- ten-voyons aux diflfercns Auceurs qui ont traite de THiftoire moderne de L'lndoftan. Ces Soubahs ou Gouverneurs de Province s'emparerent de Celle qui leur etoic confiee ; les Rebelles de-vinrent independans ä force de carnage & de meurrre^ ils abolivent ies loix & les ufages etablis, & ils repandirent dans toiic TEmpire la devaftatlon & la mifere. « Le pays (i) de» chire par les facäions & les guerres civiles\ » geniilToic dans la confufion & le defordre-M Les loix & la religion eroient foulees aus M pieds, & rien n'arretoit plus Ie brigandage, " Les crimes les plus atrcces fe commetroient 1. cous les jours; chacun pourfe venger s'efFor-» coit d'en in venter de nouyeaux. Onne reV a connoifToic plus aucune liaifon de parens, » d'amis, de focieteou de gouvernement, » chaque individu , comme s'il eiuece au mi» lieu d'une force pat mi des betes farouches, " ne pouvoit compter que fur la force de fon » bras ». Depuis le rcgne de I'Empereur Aureng-zeb , il y a roujours eu pUifieurs Princes du Sang en prifon. Les ufurpateurs , fuivant qu'ils le crouvoient convenable a leurs def- (i) DoVs Hindollan. Tome. J. D JO Etat Civil i (iC. feins flinbitieux (i) j les en tirereiit quelque-^ fois poür les pröciamer EtnpereiiFS da tiom niais ces nulheilt-ou* EmpeteurS n'^toieiit le jouet & i'inftriimem de fa parfidie de leiirs Officitrs : c'eft ainfi que I'Omrah Ga^i al deen Khaivn , qui ^toit Tr^foricr ciei troiipes de ['Empire, detrofia en 1753 , fon Makrfe i'Empereitr Ahmed Shah , fils airte &: fucčeO-feur de Mahomed Shah. L'Empife de I'lft-doftan, qui jufqites alors avoir et^ fi flöriffant, s'anMhcit a cette^poqiie. Quoiqu'il y ait toujours eu depuis quelques pr^rendans i li Couronne, i propratnenc parier j il n'y a point eu d'Etnpereur. Les Provinces afieiennehleiit tributaires de Delhy, fe font d^tach^es poilt former aurant dö OoliVernemens fepares & independans. (i) Les exemples de ce traitement ont ^ti fre-tjUens člepuis le terns de Nadet Shah. Voyez les Lei' trts tdifiantis ,-vbl. i^.-p. lij- Voici les paroles du P. Grimod dans une Lettre datee d'Ifpafiah le 26 Aoüt i^fo. « Depuis. lamott de Nider Shah , il jr » a eu cinq Rois, iröis ont ete malTacres, le qua-» crieme aveugle , Ic cinqui^e a er^ proclame de» puis peu, c'eil uri enfant. II n'a ete faic Roi, dic-^ on J que poUr la liiontre, &: pour donnet occa-•• fion a ceux qui I'obfedent de tirer des fomnias coiifiderabies des villes doignees ». Le Rebelle Gazi al deen Khawn , gp^^j avoir dcttone fon Souverain , le fir metcre dans un cachot ou plufieurs autres Priaces du Sang Royal etoient dcja renfecmcs. II iui fit enfuire crever les yeux par un homme qiii avoir cti long-tems fon Chirurgien. Comme Gazi avoit befoin pour fes projers d'un nouvel Empereiu , il tira de prifon I« Prince Yaz al deeti , qu'il pla^a fur le trond de Delhy , fous le nom de Allum Gueer. Ce Monarque lui devinr bien-tot aufli incommode que fon predecefieur ; afin de s'en debar-rafTer , il I'artira dans im piege, & le fir afla^"-finer au mois de Dccembre 1759. ^ Le Scelerar qui fe jouoir ainfi de la vie des Empereurs, qu'it creoit Ä fon gre , fe fervir, apres cet alTadinar, d'un rroifi^me Prince qui ttoic en prifon pour remplir le trone de Delhy. II I'y fic monrer fous le nom de Shah Je-han. Enfin fes projets d'ambition fiirenc renverfes par i'invafion des Marartes qui le vainJ-quirent dans une baraille en 17(51. II ctut alors qu'il etoit a propos d'abandonner la fce-ne ou il avoir repandu li fouvent le fan^ des Empereurs , Sc il s'enfuit dans le pays de» Jate s. Le fantome d'Empereur Shah Jehan refta flic le trone de Delhy quelques femaine& Lee D i J J Etat Civil, Mararces qui venoient de conqiierir le pays , le,renvoyereiu en prifon apres 1'avoir depofc. iJs mirent a fa place Jehan Bukht ^ fils anic d'Ally Gohar ^ uutre Prince de la famille de Tametlan, que Gazi al deen avoir parmi tant d'autres retenu prironnier d'etat. Ce Prince Ally Gohar j eft le mane que la Compa-gnie Angloife crca enfuice Empereur de 1'In-äoßan. Au milieu de la coiifufion Sc de l'anarchie de I'Empire , un homme obfcur , Akhmer Abdalla, chef de la Nation desDurannies, ort Abdallas , avoir ufurpe touces les Provinces cedees ä la Perfe par Mahomed Shah, &c ccoit devenu tres-puiffant. II fit d'abord une premiere invafion dans I'lndoftan , öc combat-tit plufieurs fois les Maratres, pour f^avoir qui placeroit un Valet-Roi fiit le tioiie da Delhy. Le 8 Fevrier ly^o , il rentra une feconde fois dans I'lndoftan , Sc defic en-tierement fes ennemis, L'Empire de Delliy n'avoit plus d'aurorite que fur la Province du meme nom j les Maratces y avoien: nom-me le jeune Jewari Bukhr. Akhmet Ab-daila voulut bien confirmer leur eledion. 11 exigea feulement du jeune Monarque un tribut annuel pour les Provinces qu'ii lui laif-foit J & aprcs I'avoir mis fous la garde d'u« ehef Rohilla , une de fes creatures, il s'en re-ronrna dans fon pays. Sur ces enrrefaites ie Prince Jlly Gohar trouva moyen de s'echapper de la prifon ou il etoit confine avec plufieurs de fes freres; & il eut Ie bonheur de tomber en des mains moins fanguinaires que fes aiirres compa-gnons d'efclavage &: d'inforrune. 11 s'adrefTa a la Compagnie Angloife , qui aprcs lui avoir fait efTuyer bien des refus & des humiliations, voulut bien Ie creer Grand Mogol. Incapable fans doute alors de lui conferec la couronne a laquelle elle venoit de le noni-mer, la Compagnie Angloife abandonna Ally Gohar. Sans reflburces & fans prorečteur, il mena une vie errante pendant neuf mois ; mais Ie fameux Gazi al deen le fit bien-toc faifir & remettre de nouveau en prifon. See malheurs augmenterent fon intrcpidite & fon courage; un ade de bravoure le delivra de les fers, & il alia fe refngier chez un Chef Maratte, nomme Ittul Row , qui Ie protegea quelques mois en ravageant & pillanr le pays en fon nom. Mecontentde fon nouveau prorečteur , i! implora les fecours de Nigib al Dowlah , Chef des Roliillas, Celui-ci ne ju-geant pas a ptopos de lui accorder la grace D ? J 4 Etat Civil ,0c. qui I demancioit, le malheureux Prince s'a-drefTa a Siijah al Dow lah {i), Soubah d'Owd. Ce Soubah jouiiTant dans I'lndependance du fruicde fes ufurpations, crut qu'il ne devoir point fe ni&ler des affaires de ce Mendianr. 11 fit a Ally Cohar une petite aiimone , & lui oidonna de quitter fes domaines. Notre Prince errant, dedaignc par rous ceax qu'il tachoir d'intcireirer en fa faveiir, ne f^a-^hant que devenir, fe retira chez Mahomed Kully Khawn , Nabab d'lllahabad. Comme il avoir eu la precaution d'obtenir de I'Empe-reur AUtim Gueer fon pere, une conceflion de la Soubabie du Bengale , il cqncerta avec Mahomed Kully Khawn, les moyens de s'eni-parer de cetre Province. Aprčs avoir rafTemble vers la fin de Decembre 17 J 8 line armee d'Aventuriers dcfef-p&es & de Zemindars meconrciis , ils mar-cherent vers le Bengali pour en prendre pof-feflion. Le Lord Clive , Gouverneur de la Compagnie Aiigloife, avoit enleve au mois de Juin de I'annee prccedente, certe Province a Serajah ai Dowlah qui en ecoitNabab, pour (i) Le m^e qui en 17(^4 ftt chafle de fes do-•»lifies par la Ccmnpagnic Angloife, & que le Lord Clivc rttablic enfuite apres fon arrivec a Calcutta. le donner a wn de fes Officiers nommq jt^^g,. JaflSer Ally KhawPr Ally Gühar reuffic tres-mal dans cetre expedition. Les Aiiglois eurepc tanc de mepris pour fa peifonne, & fi peu d'egard pour fes pretentions , que le Colonel Clive, ä la de, mande dp Jaffier Ally Khawn, qui! avoir fait Soiibah du Bengale, fe mir en campagns ponr punir les Rajahs qui dvoimt ofefe joindra su fils de I'Empercur (i). AHy Gohar ecrivit une Lettre tres-pathjetique au Lord Glive j il ]ui dir entr'autres chofes : f Je ne fornie aur » cun prejet cqntre la vie ou le gouverne-r 55 ment de Meer Jaffier; j'ai feuleiuenr leve M ime annce pour faire tete an Vifir j & ft » Dieu favofifoit mon encreprife, vous pour* » riez difpofer de mes bieiis ou de ma per» foiine en votre faveur ou en eelle de la » Compagnie Le Lord Clive ayant communique eetie Lettre au fils du Nabab & a fes Miniftues J on convint unanimement: « Qu il J' feroit dangereux d'avoir un Prince du Sang « dans quelques-unes des Provinces ». Le Lord Clive renvpyale Depute avec une repoufa (i) Voyez Luke Scrafton's Letters^ intitulees ^e-fieSions on the government of Hindoßan , p. 159 & Ics Vivantes. D 4 rerpe pouvc\ pas ignorer I'amitie inviolable qui reH gne entre Meer Jaffier & moi j je fuis Jurpris n que vous aye\ cu I'audace d'envoy er des trou~ w pes dans le Bengale. Si vous perfifie":^ dans » vos fentimcns d'inimicie contre nous j vous n deve\ Vavouer franchementI dansce cas,J'irai w vous en demander rzifon Vepee ä la main », ]1 n'eroit pas alors de I'iuterct des Anglois de reconnoitre I'autoritc de ce Prince j mais quand ils avoient befom des Empereurs pour favori-fer leurs projets, ils leiics donnoienr le titre de Suaverain. Si nous esaminons ce qui fe du Bengale. pafToit cn meme tems de l'autre cote de l'ln-de, fur ia core de Malabar, nous vertons que Ja Coinp,icnie Angloife voulaiic s'emparer du Port & de"la Ville de Surace , faifoit au Mo-gol, pere d'Ally Gohar, une apologie de fcs pretentions. Cette Pi^ce efl: trop curieufe pour ne pas l'inferer en entier au bas de la page , telle qu'elle fur prefeiitee en 17a TEmpe-reur, par M. Spencer , qui fut enfuite Gouverneur du Bengale (i). (i) Remontranctenfaveurdela Compagnu Angloife, ßiite au Mogol cn 17^9 j par Jean Spencer. « Les Firmans Royaux des predccefTcurs de voire M Majefte, ont toujours favorife le commercc que » font les Anglois ä Surate ; cependant les Siddees » ufiirpent aujourd'hui dans la Ville une autoritc » illegitime ; üs en hätent la ruine , & ils y in« tioQuifent le trouble 8i la confufion. lis dif-pofent arbitrmrement de la vie & de la propricic des Sujets de Votre Majtße, & meme des An-M glols que vous voule^^ bicn prottger. En un mot, " Surate elt tellement accablee par les opprcflionj » des Siddees que Ton ne fait plus auciine attention « aux Ordonnances de Votre Majeftc. Les chofcs en font venues an point, que les Siddees qui de-voient tenir la barre du Port toujours cuvette, I'ont icrmce eiiticrement pendant plufieurs mois, " & en ont dt'fcndu I'entice du tote dc la «ncr j i 5 s Etat Civil ^ &c. Le Bengale fur en paix penclant quelques moisi mais eii \ -f6o Ally Gohar renouvella H I'aide d'une flotta conßderaUe, commandee par » Sancrajce Punt; & du c6te de la Villg , an jnoyen » d'une grande armee , ce qui a caufe uti notable » prejudice ä la Viile & a fes habitans. On avoitde « tris-fones raifons de croirt , ^ut ß Von. ne s'tmpref. » foit pas de prendre des me fares cßcaces & rigoureuftj » four s'oppofer a ces brigands , voire famcufe viUc » de Surate , le fiul pore des bans Mufulmans fj U « lombeau de voire Prophhe , alloic hrt profanec. » Dans cette circonftance j route la Viile a jette kt » yeux fur nous , comme les feuls qui ayonsdes for-» ces fufEfances pour la dclivrcr des malheurs qa^elle ~ refleiit, & dont elle eft menacee pour la fuite. a» Nous navons d'autre projei dans cette partit du moa-M de que de commercer , & noti d'envahir 0 dt gouvemer » des VilLes ou des Pays. Cependant comme tous les habitans de Surate, petits & grands J m'ontfollicitc » d'en prendre le gouvernementj & quefaivu que c'i^ « toic pour U bun de ia place j j'ai ecrit fur ce fajet au » General de Bombay, qui a fait des frais immenfes 3. pour envoyer une efcadre de Vaifleaux remplis de » Soldats courageux & de tollte forte de provifions de » guerre. Tai eu le bonheur dt rendre k ta ViLle & a fes » habitans la fitreti & lapaix que Us Siddecns lui avoient « tnlevee de faire exhuter Us ordres de Votre Ma-» jsßi Imperiale, Nous maintiendrons dans cette plate » I'autorlte de Votre Majeße , au tan C qu'ilfera en noire pouvoir i nous firons toujours dijpefes a reccvoir du Bengale. fes enrreprifes fur ces Provinces. Toutes fes tentarives eurent uii mauvais fucc^s ; ma« elies troublerent le pays pendant trois ans. H offrit fouvenc de fe metcre a la difpofi-rion des Anglois , ainfi qu'on le voir par u'ne Lettre qu'ecrivic de Calcutta le 14 Juin 17^0, le Gouvernem- Holwell (i) au Com- =.. fes ordres. Le Gouverneur de Bombay & moi ti'a-M Tons d'autre intention , que dt poffedcr pour Votre •> Majcfle le Chateau & la Ville de Surace ; de tenir S3 pour voire avantage la barre du port Sr la mer ou- * verte contre quiconqiie voudroit contrevenir aux w loix qui Tordoiinent exprefiement. Nous n'em-" p]pyerons pas ä d'autres ufages , comme on a fait » juiqu'a prefent, !e Tunkhaw (*) que vous avez. » deftinc a cet effet. C'eftainfi que nous fommes vc-K nus ä bout d'ccarter les enncmis qui defoloient la » Ville par terre & par mer. Nous fotnmes tou-« jours prcts a defendre la Ville & le Chateau, Sc » tous les habitans ; nous efperons les faveurs dc « Votrc Majefte envers la Compagnie Angloife Voyez An account of the War in India by Richard Ovt^en Cambridge. 4'. 1761. p, 216. (j) Lettre de M. HolNf-cll au General Major Caillaud. hidia traBs, p. ja. « Le Prince eft dans w une lituation fi deplorable, qu'il ecoutera fiire-" ment avec reconnoiflance & plaifir toutes les ou-" vertures que nous voudrons lui propofer, &que, <*J Rcvemi dcfiiite par le Mog«l i I'eanretien d'unc floite. jnandant de larinee. Enfin an milieu He roares fes campagnes , il fur rcduit a une telle extre-niitc, que le 8 Fcvrier 1761 , ii fe rendit aa Major Carnac, qui commandoit Farmce An-gloife a Goyac, dans la Province de BaKar, On ccrivic alors de Delhy au Prince , que TEmpereur Alliim Gueer fon pete avoit cte afTafiine ; il rcircra aupics des Anglois fes inf-tances & fes ofFres , pout les engager a I'ai-der a exccurer le projet favori qu'il avoir forme depuis long-cems , de recouvrer le tröne de Delhy. Il s'appercut bien-tor que les Anglois ne feroienc rien pour lui, fiiion de le proclamer a Patna Empereur de nom , fans lui donner des fecours fuffifans pour prendre pofleflion de fa dignite. Concrainr de cher-cher un autre afyle , Ally Gohar quirra les Anglois le 21 Juin I7<>i, & fortir le nieme jour de la Province de Bahar. Ce Prince infortune au comble de reus les malheurs , n'avoit d'aurre redburce que d'ini- u fans hefiter J il accordera un Firman qui nomme la » Compagnie Soubah perperuel de la Province. Je » vous ai dqa dit que, dans les deux Lettres qu'il tn'a » adrefltes , il offre carte blanche ä la Compagnie. » Je ne doute pas qu'il ne vous ait ecrit la meme » chofe plorer de nouveau la proteftion de ceux me-nie qui l'avoienc toufours rebute. II va trou-ver le Nabab Siijah al Dow Iah , concre qui il venoit de faire la guerre, dont il avoit cte autrefois le prifonnier. Celui-ci pout toiu acciieil le fit jetter une feconde fois dans un cachor, & gardet de pres. Sa proie pou-vant lui etre bonne a quelque chofe , ii s'en fervit pour fes projers particuliers , comme Gazi al deen , les Marattes & Abdalla s'etoieiit fervis des autres Princes du Sang, Coflim Ally Khawn ayant cic chaffe par les Anglois vers la fin de 1765 de la Sou-babie du Bengale , fe retira avec Ibn trefor , & quelques-uns de fes adherens dans les do-maines de Sufah al Dowlah, qu'il decermina » fe Joindre a lui pout reprendre la Province qu'on venoit de luienlever. Sujah al Dow lah, au mois de Fevcier 1764, entra dans la Province de Bahar avec des troupes confiderables, amenant avec lui le Prince Ally Gohar, dont les titres & les droits, romme fils d'Em. pereur, pouvoient etre avantageux a fon pro-|et. 'L'armee Angloife , commandee par le Major He£tor Munro j rencontra Sujah al i^MOa» Dowlah a Buxar, & apres un combat trcs- 6i Etat Civil, Oc. opiniStre le defic & ie poiirfuivir jufques dans fes propres Etats. Ally Gohar tomba dans les mains da vainqueur. La Compagnie Ajigloife , depuis cette epo-que, fur maicrefTe de ce Prince^ elle avoir de-vant les yeux trop d'exemples de la maniere dont le plus fort fefervoitdc cevii inflmmenr, pour ne pas les irnicer. Cependant elle Ie traira d'abord avec plus d'amitie que tous ces autres Brigands, qui fe battoient pour f^avoic d qui Ie tiendroit en prifon. Tant qu'il fut dans le Camp des Anglois, on lui donna une certaine fomme pour fa fubfiftance journa-liere. Telle ecoit la Htuacion de ce malheu-reux , qu'on appellera fi Ton veur, Empereur , Grand Mogol ^ Shah Allum j I'Invincible ^ ou Rot du Monde, Les Anglois non-conrens d'avoir repoulTe Je Nabab Sujah al Dowlah de la Province de Bahar, ailerent I'attaquer dans fes domaines, & vinrent A bout de Ten chafler. Comme on ignoroit alors en faveur de qui les Anglois difpoferoient de ces Provinces , Ally Gohar Lc 11 No-envoya du Camp de Benares une Lettre ao & Confeil de Bengale, dont voici ia copie. « Si vous confervez ce pays , je vous prie » de m'en mettre en poffelfion, & de faire »» voir que je fuis protege par !es Anglois, en » me donnant un petit d^tachement de trou-" pes que j'entretiendrai a mes frais. Si I'en-»' neml vienc m'atraquer je racherai de me « faire des pioredeurs &c des amis dans cette n Province , afin qu'avec mes propres fol-» dats & le petit detachemenr que vous m'au-rt tdz laifß , fe puiffe me defendre fans » vous demander d'aucres fecotirs. Je voui it paycrai atinuelUment fur les revcnus dit ft pays tout - ce que vous exigere^^ Si vous » faires, contre votre interet, la paix avec le Vifir (i), je ferai forc^ de retout-» ner a Delhy. Je ne puis pas me re» metrre de nouveau dans les mains d'un n hodime qui m'a fi malrrair^. Je n'ai point »» d'amis fur qui je puifle plus compter que » fur les Anglois. J'aurai toujours pour euic » le refpeft Li confid^ration qu'e'merirent »• leurs procl^des a mon ^gard. II eft teiiis » qu'ils prennent pofTeflion d'un pays fi aboit-» dant en richefles 6c en tr^fofs. Je Jerai con-y» tent de tout ce tju il leur plaira me donner. « Les RohUIas feront toujours ennemis de (O Sujah al Dowlah s'etoit fait cr^er Vilir par Ally Gohar, pendant qu'il le tenok sn prif»ti- Etat Civil, Oč. „ Timpirieux Vifir; ils font tous mes amis «, U Prefiiem & Confed de Calcutta ayant examine la demande de l'Empereur ^ reiolu-renc qu'on garderoit pour laCompagnie une partie des domaines de Siijah al Dowlah, & qu'on memoir Sa Majcft^ en pofTeflion du refte. Apres cetre Sentence definitive , oa ttccembre jjjgfj'j qu'on envoya au Major Munro, Commandant en chef de Tarmee, afin de le faire figner par Ally Gohar. Voici la traduction esačle de l'originai , rel qu'il fuc 6crir en Langue Perfane- « En confidcration des fecours de la Com» pagnie Angloife , qui nous a dclivre des w malheursqui nous accabloienc, & qui a ren» force les fondemens de i'Empire que Dieu n nous a donne, nous avuns accorde gracieu-» femenr a la Compagriie Angloife notre fa» veur royale, Sc figne ce Traite done les H difFcrens articles refteront fermes & inc>» branlables pour le ptefenc & pour I'avenir. » Comme la Compagnie Angloife a faic » de grandes depenfes , & que fes affaires ]> entere retardees par la guerre que I ui a fuf-» cit6 injuftemenr, & contre notreplaifir royal^ M le Nabab Sujah al Dow lah , afin de la d^-« dommager, nous lui donnons le pays de » Ghazipore-Öc le reft« du Zemindarat de '» ßulvan: Bulwant Sing , dependant du Nizamut de » Sujah al Dowlah. Eile y ccabiira les ioi^ " &: le gouvernemenc qu'elle voudira » ainfi que le faifoic le Nabab. Le Ra-» jkh de ces Provinces s'arrangera avec la 3» Compagnie pour les revenus quil doic » payer. La fomme qui fera fixes n'appar-» tiendra plus au trefor imperial , & fera • rayee fur les Regiftres des reVenus d« n la Couionne. L'armee des Anglois fe » joindra a nos drapeaux pour nous mecrre " en pofleflion d'lllaha^ad, & du refte da « pays qui appartenoic a la Nababie de Sujah n al Dowlah. Excepce les revenus ci-delTus " du Zemindarat de Bulwant Sing , nous au» rons rentiere adminiftration de tous les " autres, dent nous pourrons difpofer a none " grc. » Lorfque la Compagnie Angloife m'auta » mis en poffefllon d'lllahabad & du refte du » Nizamut du Nabab Sujah al Dowlah , je n lili donnerai pour les depenfes qu'elle aura ») ere obligee de faire , une fomme prife n dans mon trefor, teile que les circonftan-f » ces me le permettront , jufqu'a ce que fe « puifTe lui rembourfer entierement tous les »» frais que lui aura coute cette axpedirion On imagine bien que Sa Majefti /oufcti-* Tome /. . E Etai Civil ^ vit volojitiers 4 tout ce qui eft contenu dans. tctVDktm-cet ačte. Quelques jours apcis lavoir re5U» b„ ^^^ Sunnud Imperial, cu f xrman, pour le coiifirmer (i). Eti con%uen-ce de ce parcage, ie l?rince fut mis eii poflef-fjoii d'lllahabad , & de toute la Soubabie 4'0 wd , excepte feulement le Zemindarat da Bulwant Sing, que la Cümpagnie Angloife s'appropria. Elle etablit a Benarb , qui ea eft la, priiicipale Ville > uae Fadorie pour la perception des revenus qui furent. fix« a io lacks de roupies , ou environ 230000 livrea ßerlings par an. Tandis que la Compagnie Angloife po-foit ainfi les premiers fondemens de ia Sou-VeraineEe dans le Bengale, on n'etoit pas encore ihftruir dans ia Grande - Bretagne de rheureux fucccs de fes affaires. La Cour des l>ire(äeurs au contraire allarmee des troubles qui defoloient ce pays & qui pouvoienr nuire %u coitimerce de U Compagnie, nomma le l,prd Cüve Gouverneur de fes .^tablifferaens dans rinde, avec un Comire , & elJe leur donna p leine autoritc de prendre routes 1 ces fontfondces fur nous dont il a befoin pour !> fa fiibftliftance. 11 n'eft pas poffible de •> fuppofcr qu'il s'opiiiiatre a refufer une con« vention qui eft de peu de confcquence pour ;» lui, dans I'et at ou ilfe trou\e j mais qui eft r> rrcs-avantageufe a nous qui fommes fes (j) Extrait d'une Deliberation du Comkc le 21 Juin 1765. E } Etat Civile &c. „ plus gfands bienfaiteurs Sc fes meilleurs rt amis P. Oe netoit pas afTesj pour la Compagnie (I'acqucrir par le titre de De-wan^e la Souve-raHiecc dii Bengale , & puifqu'on ctoit maute du Gmnd Mvgož j il falloir bten en faire ronr I'lifage poflible. Le Comit6 fe propof^ d'ob-tenir encoce des Firmans pour pouvoir s'etn-parardes cinq Provinces'du Nord , Sicacole, &:c. dans le Deckau, dont les revenus annuels croienc eftimes a jo lacks de roupies , ou 375000 livies fterlings. Le Comire n'avoit poinr a craindre de ne pas reuffii: dans tous fes projets. II eft fur que fi le plus jtfune des fecrivains au fervice de la Compagnie avott etc envoye vers ce fantome d'Empereur, il lui auroit accordc Ic rtflt de fori Empire j tout le monde j pour obtenir fa fubfiftance & la furetc dc fa perfoniie. Il Egna efFe£tivenaeiic - rcnir ce qu'on vouluc, Sc il donna des Sunnuds on Firmuns Impe-riaux qui confirmoient tomes les demandes de 1.1 Compagnie. On peut voir tous ces ačtes flans I'Appendix de M. Boirs , N°. XVII , XVIII, XIX, XX, XXI be xxn, pag. 27 & les fuivantes. ^' Le lefteur voudra bien obferver que cet Ally Gohai-, qui accorde a la Compagnie An-« du Bengait. gloife le Devranee, &c. eft le meme PtJnce que le Lord Cltve avoir combartu auparavanr. dont il reconnoifToir fi peu les droits, qu'Ü chatk ies Rajahs rtheths'qui avoient oß fi joindre ^ lul. Les Sunnuds , ririrans ou con-ceifions de ce Prince, avoient cre dans plin fieurs autres occafions declares Invalides (i). La Compagnie & le Nabab du Bengale s'e-toient reunis par un TraitI formel contre lui (i), & enfin la Cour des Direfteurs avoir re-connu que routes fes pretentions žtoienc ex-tr&mement douteCifes (J). La Compagnie ne profitA paS feulementde la dipendance de cet inForrune Monarque> dans les operations piibliques dont on vient de parier. Si Ton en croir les rapports de I'lncie les Employes fuperieurs s'en fervirent adroi-. ---^ (i) Dans une D^ibcrarion du Gouverneur Van* fittart, du Colonel Cailhud, & antres membrts dll Conrcil de Bengale ^ en date du li Janvier 1761 , on dit: « Quant au Firman du Mogol, il fiit un M terns oü les ordres de la Cour de Dclhy avoient » quelqiie poids dans le Bengale j mais ce tems n'eft. " plus. II feroit difficile de dire qui eft Roi a Del*» by, ou meme qui le fera (i) On peut voir le lo*^ article du Traite, 8. (5) General Lentr to Bengal^ du 19 F^vriet »78^. E 4 7» ' Em Civil, Oc. temeiit pour favorifer leur ambition & Icnr cupidi«. Oll die avcc bean coup de vrai-femhhnce , qu'on ne hü laiflTa pas ladmi-jaifoation libie des diflričts & de la penfion qa'on iui avoic accordc, non plus que de fes jiiojinoyes , ni meine de fes domcftiques. Gpm.me cecte madere eft digtie des recher-ches des Commiilaires que l'Angleterre fc propofe d'envoyer dans le Bengale, II faut ef-perer que les Direčteiirs auionc alTez d'hon-' neui & d'amour de la juflice, pour leur ordon-net de faire cet examen, afin que ies Employes q^ionc abufe de Tauccritcde leurs places d'une nianiere criante , foient piinis comme ils le ^er'kenr. 11 fill t de tour ce qu'on a die dans ce Cha-pitrc.j. que rcellpment il n'y a poinr eu d'Em-pereur ou de Grand Mogol pendant les annees dernieres ^ qu'a^^tteilenTen^ meme perfonnc n'eft revetu de cette. aurorite ; que tout le gays eft dans un etat d'anarchie, ou il n'y a pas d'autres loix que ceiles de Tufurpateur le plus:, fort , & qu'enfin M. Dow a raifon de dire (i) , " que milie Tyrans , au lieu d'uti w oppriment I'lndoftan, Sc que les oris des . (I) Do^'s Hindo.1;ni Appendix ^ p., . dii^ Bengale. U malheureux Indous implorent la clctnence » des cieux & des hommes. L'^quite&rhu-» manite exigent qu'on öte i rous ces petits « Defpotes la domination qu'ils ont enva-» hie par leur fceleratefTe , Sc qu'on donne » a cant de millions d'liommes Uii gouverne-w ment fonde fur la vettu & la juftice ». Quant au mallieureux & trop genereux Prince (i) qu'on appelle Grand Mogol j il de-depend pour fa fubfiflance des Employes d'une Compagnie de Commerce, qui lui one donne le ritre d'Empereur , afin de favotifer leut ambition. Inftrument & vii jouet de leur cu-pidite, ils en font ce qu'il leur plait. II refte-ra dans cet etat pitoyable , rant qu'il demeu-rera parmi eux , qu'on ne changera pas la forme adtuelle da gouvernement qu'y ont etabli les Anglois. <0 On peutvoir dfis exemples de la generofit^ d Ally Gohar J dans les Autkemü Püf«rj conccrning the India affairs, pag. f) & lo. Et dans une Deliberation du Convite de Calcutta du 14 Septembre ijCj. 74 Clvii, öc: chapitre IV. l'Office appdU Devan^e , ^ des monfs qu'a eu ia Compagnie Angloifc de prendre po(fe£lort des urriioircs du Bengale h ce tare. XjE Dcwanec eft le nom d'un Office qui ji'exifte plus Hepuis plufieurs annees, & ce-pendant l6s agens de Ia Compagnie s'en ibnc fervis pour fiire ilJufion aux ignorans, firabuferla Lcgiflarion de la Grande Bretagne. Afijide mettre Je Lečteur en etat de fe former im jugemenc impartial fur ce qu'on appelloic autrefois le Dewanie 8c fur ce qu'on veuc iäire entendre a prefent par ce mot, nous au-ront recours äl ce qu'en ont dit ceux qui ont |oue les principaux roles dans I'adminiftra-tion des affaires du Bengale , & qai par con* fiquent conttöifToient bien cette matiere. M. VariÜrtnrr, dernier Gouverneur du Bengale , nous dit que le Dewane'e (i), efl l'em- (0 Vanfittart's Narrative, vol. I. p. ij. & Intro-duftioii, p. 4. ploi a'an Officicr qui eft le fecond de Province (i), & qui a la Surintrendance des ferres & de la perception des revenas. Cet OiEcier appell^ Dew an , eft «ommi far la. Cour di Delky i ü eft abfölument ind^pen-danc du Nabab, qui fuivant la confiitution de fEmf ir^ j aucun droit de fc miler de ce fegütrde i'adm 'mißration des revemis. Une Lettre de plufieurs Membres du Confeil de Calcutta a la Cour des Direc-teiirs , datee do n Mars i7<>2, nous dir : " Le Dewan^e eft l'emploi d'un Officier » charge de la perception des reveiius de » toures les Provinces foumifes au Nabab, 8c »V dont il doit rendre compte a la Coar de » Delhy. Get Office eft different de celui du i> Soubah , qui a !e commandement des treu« pes & la |urifdi£tion des Provinces. Le « Dewanee etoit autrefois un Office fepatc^ « mais les Nafaabs du Bengale , pcofitant des « derniers croutde« de TEmpire , ß font ap-j> proprio cet emptoi »». Voici les termes d« M. Holwelt j ancien Couvenieur du feengale , au fujet du De- mais de raifons pour dire que tous les re» venus n'ont pas etc payes , quoique dans M le fait ils en aient percu tout le montanf-r> lis partagenc entr'eux tout ce qu'ils peii-» vent diftraire ainfi du ttefor royal. Le Ni-» bab prend toujours la part du Lion u. LeLord Clive & fou Comite acquirent en a la Compagnie Angloife cet emploi de De.wanee. L'Empereur le leur avoit deja offert .plufieurs fois, comme on i'a vu dans le Chapitre precedent ^ mais elle I'avoit toujours refufe. La Cour des Direčleurs ecrivit ea lyt) J , au Gouverneur Sc Confeilj de Calcutta (i): Vous avez tr^s^bicn fait de ne pas ac-J» cepter le Dewanie que nous ofFroit le Roi, » c'eft-a-dire , :Ie Prince Ally Goliar ; nous f (i) Hlßorlcal Events , part. I j p. no. ce» puifqae deformais aucuii Nabab n'aura » alTez de richefTes oa de puifTance, pouc « vous renverfer par la force , ou voiis coo-» rompre par Targeiic. L'experience deplu« 3» fieucs annees nous a appris qu'il eft impof-j> Cihledepartagerl'autorlee j fansengendrei le » jneconrentement, & nous mectre endanger « de tout pecdre. Tour le pays doit appatce->» nit d la Compagnie ou au Nabab ; dans » cette alternative, nous vous lai/Ions a juger »» lequel des deux partis eft le plus delirable « & le plus urile dans les circonftances ac-3* ruelles Le Lord Clive, dans une autre Lettre qu'il ^crivit i la Cour des Direčteurs le jo Septembre 17^5 , expliqua plus au long les motifs de fon plao. (i) Qaoique l£S revenus, difoir-»> il, appairiennent a la Compagnie , les Na- (0 Partie du paragraphe ii, p. 21 des Papiers mtherttiques. Ca^ Partie du- paragraphc i j. du Bengale. v tions etrangeres en prendroient ombrage, » fi fes Ofliciers en etoient les Collečleurs. » Si elles en porcoient des plaintes a la Com if. d'Angleterre , les fuites pourroient etre tres-embarrafTantes pour nous. On ne peut » pas fuppofer que les Frangois , les Hollan-»1 dois Sc les Danois reconnoiffenc que la Cona.' M pagnie Angloife eft maurefle de la Nababie » du Bengale, Sc qu'ils confenrent a payer a vos » Employes les impots etablis fur le Com» meice , on le revenu des terres qu'ils oat » poiTedees pendant plufieurs annees, en verta 3) des Firmans Royaux, ou des conceffions des n anciens Nababs (i )• H ajoutoit plus bas : JVö->» tre Jiirifdiäion territoriale ne donncra point » d'ombrage aux Nations etrangeres ^ tant que n nous conferverons en apparencc L'autarita » du. Nabob Les affaires de la Compagnie changerent entierement de face apres qu'elle eur acquis If Dewanee dii Bengale. Le Lord Clive & fon Comite 0:rivoient i la Cour des Diredeurs le JO Septembre 17^5. « Vous etes. devenux j> Souvcrains d'urz ricke- & puijfant Rjoyaume (z). (1) Parag. li. dc la Lettre. AuthentU Papers, pag- 16. (i) AutheatU Papers, pag. gJt 8c iu NaBab y ainrement appelle Naii^im^ ou Soubah du Bengale. A.Fin de traiter ce Chapitre au gre de tous Jes le(äeurs, noui examinerons ce que de-vroic erre le Nabab fuivanc les anciennes Loix de I'Enipire , ce qu'il 6toic avanc que la Compagule acquit !e Dewanee, & enfin ce qu'il eft devenu depuis cette cpoque. lei com-me aiPeurs , nous ne dirons rien fans Tap-piiyer fur des aarorites irrecufables- « Suivaii: I'ancienne confticution de I'Em-j> pire Mogol , le Nabab ou Soubah des Pro»» vinces du Bengale , Baliar & Orixa , n'ctoic » que le Viceroi du Mogol. Mais, les trou->» bles du pays, ayant pendant les annces der« nieres alrere & prefque aneanti cecte conf-» lirution, les Soubahs de touces lesProvin-» ces de i'lnde, font deveniis peu a peu in-w dependans de la Cour de 0>.lliy. Lots de «* I'invafion des I'erfes foil? N.ider Shah , • I'Empire fut cbranlc jufques da is fes fon-Tome I, P 21 ^tat Civil ^ ^c. „ mens, ou pliuot fiic eiicietement renverß. „ Cette revolution confirma fi bien les Na« babs dans I'ind^pendance , qu'il n'y a plus » entr'eux & le Mogol, qu'une relation purity ment nominale (i), « M. Vanfitrart nous dir (2) , que TOfli-rt cier appeile Nabab, on plus propremenc le » Nazim d'une Province, a la Siirintendance » des affaires du deparcement qui lui eft con-» fie, tant qu'il plaic a i'Empereur Mogol de »i de ne pas le revoquer. II eft rare que cet J» Ofiicier pofTede toiite la vie cetce dignite: « On le changeoit fouvenr (3) dans les pre- (i) Pages II & d'lin Memorial to the King't mofl excellent Myeßy, date du 3 Fevrier 1762., par la Cour des Direčteurs ^ 8e figne par Laurent Sullivan , Prefident , Thomas Rous ^ Depute 3 & 18 Di-r£ti:eurs. Imprime a LondreSj chez Jean Brotherton Cprnhill. (2> Vanpttart's f^arrative ^ vol. I » p. 4. (j) M, Orme fait remarquer que ces change men s croient fi frequens autrefois ^ qu'un Nabab nouvel-lement cree fortant de Delhy pour aller dans foa Gouvernement , s'e'toit place fur fon elephant de maniere que fon dos etoit toiirne du core de la tete de J'animal, & que lorfqu'on lui en demanda Ja rai-fori, il repondit qu'il regardoit fon fucceffeur qui al-loit le fuivrc, Orme'sJUnäoßan fDiSeiUUon, p. 8. » miers tems de TEmpire, afin de prevenir t> les effets dangereux de l'autorice qu il pou-« voit acquerir. Les Nababs, fuivant les loix» w n'ont pas droit de fe meler de ce qui re« garde radminiftration des revenus. 11 eft » vrai que depois l'anarchie de l'Empice , ils ,> font devenus fi indepeiidans de la Cour de ** Delhy , qu'ils ne lui font plus foumis que »» de nom. On garde roujours les anciennes » formes j mais elles fervent feulement a » montrer ce qu'etoit originairement ce gou* » vernement dans fa conftitution primitive. » Lors de la mort d'un Nabab , foij fiiccef-» feur , foic qu'il foit etranger , ou defcen-n danc de fa familie , n'eft pas repute legiti--»» me , avant d'avoir ete confirnie par une Pi-tente Imperiale qu'U eft tres-facile d'iob-I) tenir »>([). (i) Lcs Mogols n'ayant depuis long-terns m au-toriie J ni pouvoir , accordent tout cc qu'pn Icut de-mande. tnoyennant une certaine fomme qu'ils font bien aifes de Te procurer. Hs font un profit clair, en ilotinant contre dc I'argent des litres qui ne font pas en leur poffelEon, 8f qui ne leur font rren perdre de ce qui leur reite. M. Vanflctart, Narrativt, torn}. pag. 418, rapporte un exemple remarquable dc «es negociations. Uncertain DevfanjnomracNun* ieomar, homme fojt intriguante obtint pour lui" F i 84 Civil, Cic, Tel eft I etat des Nababs du Bengale , de-trcd«Dir«.puis la decadence, ou pliuor comme les Di-/u^ reftenrs de la Compagnie en conviejinent tux-mcmes , depuis ia fubverßon de VEmpire. Si les auceurs donr on vienr de parier avoienc ofe publier encierement la v^ricc, ilsauroienc dit avec plus de juftefle, que depuis cerce cpoquc jufqu'aujourd'hui, la Nizamut oii Na-babie du Bengale n'a äe poHcdce que par des Ufurpateurs Sc des Tyrans , qui ne s'y font mainienus que par la violence , la fraude 5c les afTaflinats. Le dqfnier JSabab legitime j Sujah Khawn , (i) mouriu en 17 j 9. Son fils Serfraz Khawn lui fucceda dans fon Gouvernement 5 il le conferva environ rrois ans , jufqu'd ia revoke d'AIIaweidy Khawn , qui äoit alors Gouverneur de la Province de Bahar. Ce rebelle meitie la Nababie de Meer Jaffier dont 11'etoit Miniftre, avantque fon Maitre cut ricn appris de fa perfidic. Depuis le Gouvernement de M. Vanfittart, les conceflions du Grand A4ogol font devenues encore a meilleure marche. Des Valets noirs de quelques Employes au fervice de la Compagtiic , one etc crc^s par eux Kajahs ou Princes, & pluCeurs An-glois s'en font revenus en Europe avec le titje dJOmrahs. Vaußitan'fUtirrätivt avoir ete autrefois Hookahburdar (i) de Su- j-ah Khawn. Apres avoir tcame parmi les do- inelliques de fon no^^veau Maitre, un com- plot de perfidie fans exemple , il vainquit i-eiojau^ daias uiie bataille Serfraz Khawn , & Im fit perdie la vie. Allawerdy Khawn s'empara alors de la Na-babie du Bengale. Les invafioiis repetees des. Mai-actes pendant huir ans, ne purent pas Ten chalTer. ]1 mouruc dans fon lit 1« 10 Avril ' II fur remplace par Serajah al Dow Iah, pe-tir-fils de fon frere. Ce noaveaii Tyran ayant eu avec les Employes de la Compagnie quelques difpures rapportees par M. Holwell & leio jüi» les aiitres ^crivains , ilatraqua routes lesFactories des Anglois , faifit & faccagea leur ville & fort de Calcutta. Les habirans & les foldats qui echapperent ä la colere du vain-queur, furenr obliges de fe retirer d bord des Vaifleaiix Maichands qui ctoienr ä l'ancre dans la riviere d'Hougly. Iis trainerenr une iMianviti^ vie mifcrable jufqu a l'arrivee de l'Efcadre commandee par l'Anniral Watfon & le Lord (i) Officier charge de porter la pipe du Nabab« Scrufion's Rifid'ilons. p. 31. Cz) ScraftoKs Rcßcctions. p, 5. F i CJive. Les troupes qu'elle amena venoient de la coce de Coromandel , & etotenr peu coiifiderables. Cependant feiles agirenr avec ranrdevalfeurqiie le j Janvier 1757, ja Ville de Calcutta fut reprife par les Anglois. Lorf-que ies Vaiireaux furenc d la port^e du Fort (i), i'ennemi Tabandontia aux premiers coups de canon. Le Nabab Serajah al Dow lah revint qiiel-que tenis apržs poiir combattte Ies Anglois. 11 fut repoulTe avec rant de bravoure & d'in-rrepiditc par les foidacs de la Compagnie, que fa nombreure aimee fe retira dans fa ca-pitale de Murshedabad ; enfin le y Fevrier J7J7 , it fut oblig^ de figner on Traite par leqiiel en ratifiant toutes les anciennes poffef-fioni & privileges de la Compagnie Angloife, il Uli accordoir en outre plufieurs domaiiies & de nouvelles immunites, Ce Traite, ainii que les particiilarites qui en furenc la fuice , font rapportes rout au long dans I'Appendix de M. Bolts, N". I. & 2. p. I, J , 6cc. Ce Traite eft le premier qu'air Jamais fait la Compagnie Angloife avec les Nababs du Bengale. II fut confirm^ folemnellement pat (i) Scrafton's Refeahns. p. €1. les fermens les plus forts. Serajah al Dowlah jura fur le Koran , par Dleu & Mahomet, de lobferver; & le Lord Clive jura la m£-me proineffe fur I'Evangile , par Dieu & Jcfus-Chrift. La ncceffire dans !a politique enfreint (i) tous les fermens & tous les Traites. La Com-pagnie Angioife , quatre inois apr^s la convention , rcfolut de chaffer Serajah al Dow-lali de fa Nababie, & de la donner ä un autre. M. Dupleix, Gouverneur de Pondichery, qui le premier a monrre la fuperiorite de la difcipline Eiiropcenne fur les habitaiis de (i) Lcs Anglois apprirent dans ce teins que la guerre etoit declaree dans la Grande-Bretagne contre la France, & ils decouvrirent que les Francois nego-cioient fecrettemenr avec le Nabab Serajah al Do>«'-lah. On dccida dans I'lnde , que fans egard pour U neutralite qu'on avoi: propofee aux Franfois j on atta-queroit leurs ctablifleinens du Bengale. A peine ce projet fut-ü forme , que les foldats de la Compa-gnie vinrent ä bout de I'executer. Une efcadre coni-mandee par les Amiraux Watfon & Pocock , & par le Lord Clive, inveftit Chandernagor le 23 Mars 17^7. Elle s'en empara apres une canonade de quelques heures, & la Ville & les fortifications furenc rafets de fond en comble. F 4 I?8 Etat Civil, l'Inde, apres fes vičtoires fur la cote de Co-jomandel, avoir in vence le rrafic clesNababies, La Compagnie profita dun fi bel example. Meer Jaffi r Ally Kliawn , qui avoic cpoufe la foEUr d'Allawcrdy , avoic fiir cclater contre Serajah al Dowbh des fenciniens de haiiie, & ]es Anglois le choifirentpo ur leur nouveau Na-bab(0. Serajah al Dow lah trahi par Meer Jaffiec fon parenr & fon fujet, fur battu dans !a plai-leij juinne de PlafTry. Son armce de 50000 fantafllns & de 20000 cavaliers avec 50 pieces de gros canons J fuc niife en deroiice par une poignee de foldats que commandoit le Lord Ciive, & le Nabab lui-meme fut oblige de fe degui-fer pour prendre la fuire (1). Ses croupes firent fi peu de re/iftance, que les Anglois eurenc feulement foixante & dix hommes tues ou bleiTes. D'apres cetre viftoire & les conditions qu'on avoit ftipulc d'avance av«cMeer Jaffier, il fuc inftalle le 10 Juin j757 Nabab du Bengale , par le Lord Clive. Meer Jaffier fir un nouveau Traite avec Ja Compagnie (l) Leutr of Scrafton upon tht caraBer of Mttr, , p. 44 , 6' Scrafton's Rtfieäions j p. /J. (z) Scrafton's ReßeHions, p. 8j. Angloife , qui fat confirme , comme ä l'or-dinaire , par les fermens des parties con-tradlantes (i). 11 ratifia routes les ancienne» conceflions & privileges , aiiifi que le Iraite fait avec fon predecefleur; il accorda en outre de nouvelles pofleffions ä la Compagnie Angloife, & des fommes immenfes d'argent pour les defrayer des dcpenfes de la guerre. Voyez ce Tratte tout au long , ainfi que les conque-tes fubfcquentes dans I'Appendix de M. Bolts. NMll, IV, V, VI, yu. Sur ces entrefaites Serajah al Dow lah fut decouvert dans fa fuite, & faifi a Ragemahl. Le frere de Meer JafEer I'envoya garotte i Murshedabad , le 4 Juillet 17J7 , & le jiouveau Nabab le fit aJTafllner dans fa pri fon. Les vidtoires mulripliees & rccentes que les Anglois veiMjient de remporrer contre Se-lajah al Dowlah ^ les Francois & les Hollan- (i) Par cette revolution, le LorH Clivc obtint le litre d'Omrah de Meer Jaffier, 3 qui il avoit donnc la Nababie. Voyesi Letter of Lord Clivc to the prq-r prietors of cafi India Stock, p. 3 j. En vertu de fa nouvelle dignite, le Lord Clive etoit fuppofe eutre-nir ()ooo hoTitnes de cavalerie. Le Nabab lui fic pour cela une penfi^n dc 30000 livres ftciüngs. 96 t:tat Civil ^ Oc. döis (0 'feur avoient acquis rant cJe reparation 8c avoient teUement ripandu la terrent dans le pays , qu'ils pouvoiem facilement, s'ils lavoieht voulu, marcher k Delhy pout s'emftarfet de I'Empirc. Les revohiticnis etoient devenues an objet dt commerce , ou au moins un fond qui four-nifToit aux befoins de laCompagnie & de fes (i) Les Hollandois du Bengale voyatit comment au milieu de l'anarchie du pays In flipcrioritc de la difcipline Europcenne avoit rendu les Francois & les Anglois niaitrcs des Mogois & des Nababs > & Jcs avantages qu'iJs en avoient tires , rerolurent a leur tonr de tfcnter Ja fortune de Ja memc maniere. Ce pro-jetfut forme d'abord par I'^tabli/rement.dcCJiinfurah dans le Bengale j le Gouvernement de Batavia Tadop-ta. D'apres un plan tres-bien concert«! ^ mais qu'ils cxecuterent fort maJ, ils compoferent une armee de troupes Europeennes & Malayes. Sept Vaifieaux !es debarquerent dans Je Bengale, vers la finde 17 Les Hollandois furent vaincus par les Anglois dans routes leurs entreprifes- Enfin, defaits dans tous ks combats , ils fiirent obJiges de rembarquer Jeurs troupes, & de /igne'r avec Jes Anglois & leur Na-bab j un accommodemcnt qui Jeur etoit tres-defa-tantageux. On peut voir les details de cette affaire , dans ks Memoires des Compagnies Angloife Si Hol-landoifc , imprimes en lyöi a Londres , che* J. Brotherton Cornhill. Employes. On jugea bbn-tot que mbw Jaf-lier etok incapable de tenir les renes dii gouvernement qu'on lui avoit confie. Les finances de la Compagnies croient en mauvais etat (i), quelques aucres circonftances d'une pareille neceßte pclhiqut j dererminerent le Gouverneur & le Confeil de Calcutta a faire un changement & a vendre la Nababie da Bengale pour avoir de I'argent. Meer Jafiier fuc depofe fans ancun foule-vemenc, & fans que cette revolution courai: la vie a un feul homme. Les Anglois , apres avoir fait au nom di Dieu j iin nouveau Traite avec Meer Coffim Ally Khawn , qui avoir ^poufe fa fccur» le creerent Nabab du Bengale j Meer Jaffier fon beau-pere fut amenc a Calcutta, ou la Coinpagnie lui payoir une pen-fion chaque mois pour fa fubfiftance. La Compagnie Angloife ne faifoit aucun Traite fans acqiierir de nouvelles pofleffions. 11 feroit trop long de detailler routes les fti-pitlations qui etoient en fa faveur dans cehii-ci, ainfi que dans rous les autres. Nous di- ileftditida rons feulement que MeerCofllm Ally Khawn» S'P«»''« afin de la defrayer des depenfes de ia guerre , (i) Kanßnan Narraiive. vol. i. Etat Civil J ^c. Sc payer I'entretien de fes foMats, lui ac-corda ies rerres de ßnrdwan , Midnipore & Chirtigoiig, qui produilbienc atiniieilcmeinim revenu ne: de 600000 iivres fterlings. Ledi-xieme article de cetre Convention eft remat-quable. On y lie : on ne pcrmcura pas au Grand Moool Ady Gohar ^ de met tre In To^ti\tttm de Reftdent de la Compn-gnie , afin de veiller fur routes fes operations, de les reprimer, & de faire exocuter tout ce qu'ordonneroit le Gouverneur & le Confeil. Meer Jaffier ne pofTeda pas long-tems la Nabnbie qu'on lui avoit donn ont * alTez manifefte le defir de renverfec » I'autotite des Anglois. lis ne n^gligeront « aucune occafion favorable pour nous den rruire entierement j quoique les fuites de » ce projet doivent leur erre tres-fatales , fi » nous tenons notre armce complette. Le )> jong de I'autorirc impatiente les Europeens, " mais les habitans de I'lnde rcdiiits au de" fefpoir, font fi paflionnes contve ceux qui n les gouvernent, qu'ils n'envifagen: que le " moment aduel, & expofent tout au hafarcl » d'une fimple bataille. Notre jeune Nabab )> eft le fils d'une proftituee j il a peu de tart lens j on n'y a point fupplee par fon edu-M cation , qui a cte trcs - mauvaife. Malgre (i) Quinrieine patagraphe de la Lettre^ datce dc Calcutta, le 5 Septembre 176^. Authtntk Papers. Pag. »9. G t lOO Etat Ovil, &c, „ (on ignorance & fa foibleiTe , fi on I'abin. „ doniioirl liii-meme & aux Coiirclfans flat-„ teurs qui renvii-onnenr, il Ajivroic les tra-„ ces de fes pcčdcceireurs. Nous ne pouvoiis t, nous fiei" que fur nos propres forces. Si It vous prctcadez conferver les pofTefHons & M les aYaatages que voiis avez acquis : vous « deve^ meurc en vos mains le commandement » dc I'armee & la perception des revcnus. Lotf-)> qu 11 paioitra vouloir ctrc maitre de i'lui & )) de lautre , foyez fur qu il fe propofe de » vous reduire a votre ecac primicif de depai-»> dance dans Icquel vous ne pouve^ plus rentrcr M deformais 3 fans cejfer d^cxißer La Compagiiie Angloife , par Ja Convention faite en Juillec 17(35 , devoir payer au jeune Nabab Najim al Dcwlah , 53 lacks de Roupies ficcas par an fur les revenus du Bengale. Deux ou trois mois apres, cette fomnie fut rcduice a 41 lacks (i) j m^is il mouruc (i) Voyex la Lettre du Lord Clive a la Cour des Direfteurs. Authentic Papers, pag. 17 j & la Lettre dc M. Sikcs au Comite de Calcutta, dans l" Appendix de M. Bolts, N". XXXIX. Nous avons dcja dit que fur ce rcvenu Iai(re au Nabab , il devoit en payer prefque la moitie a TEmpereur, pour avoir accorde a la Compagnic Angloife le Dewaace des Provinces du Bengale. totit-a-coup le 8 Mai 176^ j quinze mois apres-fem elevation au trone. Meer Kaneyäh-ou'Sbyf äl Dowlah fut choiß par la Compagnie pour lui fuccedet. ll'n'a-voic que quinziiiins. On ne lui accorda plüs pour revenu que 5Ö lacks de roupies. II neir jouit pas long-tems j leaf il'nioürut de moT.t fabiter^ comme fon frere , le 10 Mars ,1770. Ii eilt pour fiiccefTeur un autre'freie ; agc d'environ creize ans , nonime Mobarek al Dowlah. C'eft une chöfe afPez curieufe de voir commenc a chaque clečlion da Nabal?' les Employes de la Cofnpagnie diminuoienc les reveniis de fon Gouvernement. On avöic accorde 3 6 lacks de roupies par an a fon pre-deceffeur j mais on ftipula qu'on ne lui en payeroit plus que ji , 5i meme cecte derniere fomme fut reduite par la Cour des Direčteurs la mcme annee 1770 , a feize. L'emploi du Miniftre Mahomed Reza Khawi, qui valoit neuf lacks de roupies, fiu reduit a cinq. Le Nabab aduel Mobareck at Dowlah, quoiqu'enfant, a deja up tres-nombreux Ser-raii, ce qui ne lui procurera pas une longue vie. Au refle, nous ne prctendons pas pre-dire a quel terns, ni de quelle maniere Mobareck mourra. C'eft le feul rejetton de la Familie de Meer Jaffisr. En confiderant coni- G 5 Etctt Civil y ?jc. , ment fes autres freres out etc malcraitcs , oti niis a mort en cres-peu de terns , il eft raifon-nablp d'imaginer que la race des Nababs dans Je Bengale approche de fa. fin. Probablemenc Mobareck n'aura pas de defcendans, & il fera peut ^re le dernier ppflfedeur de l^a NababieOn reconnoitra dans iin rr^s - petlc nombre d'annees la veritc de toiues ces conjediures. Lotfqu'elles feront accomplies , les Anglois lie manqueront pas de fe declarer oiiverce-mcnt Souverains d'un pays qu'ils goiivernenc dcja fsiis uii fantome de Nabab j mais le tem& poiura bien amener des revolutions qui ten-vfiifent tous ces beaux projets. CHAPITRE VI. Remarques fur les Chapitres precidcns. Lorsqu'on entend parier en Europe du Grand Mogol Oll du Nabab du Bengale, ceux qui ne conncifTent poiiu les affaires de l'Inde, imagineiit que ce font des Souverains inde-pendans qui polTedent un Empire ou des Provinces en teure propriete, & qu'ils gouver-nent leurs fujets fuivant leur volonte , ou d'aprcs les loix etablies du pays. Nous efpe-rons que les Chapitres precedens convain-cront le Leileur impartial de la faulTete de ces opinions , car ces Princes font bien eloignes d'etre ce qu'on les fuppofe. On a vu plus haut comment I'Empereur dependoit des Anglois pour fa fubfiftance. Les Nababs du Bengale, ne font que les inftrumens de k Compagnie & fes reprefenraiis en Afie. Les natiirels du pays , ainfi que les Anglois qui vont s'etablir dans ces climats lointains , j font expofes a des oppreflions de toure efpece. Le Gouvernement du Bengale peut les priver, quand il lui plait, de tous les biens qu'ils poffed^nc dans les domaines du Nabab , ^ G 4 /c4 Ei^t Civil ^ (iC. meme de la vie , fans qu'il foit poflible. aus uTTš alleres , par la conftitucion prefente de ia Compagnie, de reclames la vengeance tie la Jiiftice dans la Grande-Bretagne , on dans rjndoftan. La fuite de ce Livre demon-trera dc plus en plus la vcritc de routes ces atTettions- Le Mogol FuinikfeeT accotchi en 1717 ,.a la Compagnie Anglo, on petit ceri-ein de voyez ic qulnze acres Oil eile etablir ftfS Factories. Ce domaine eft le feiil mi'elle au obcenu par line conceflion legitime d'uu vcriiable Empe-reur, D'apics tons les rcmoignages rapportes dans.autre quanieme & cinquicuie Chapitte, concecnant le Devance & ie Nabab, d'aprcs I'aiiroritc chi Lord Clive lui-mcme, il parok clairement que fuivant. la. conßictiüon de I'Em-^ire J le Nabab oil Soiibah du Bengale, ainfi qite de toiues les aiitres provinces de I'lndof-tan, n'avoir auciin pouvoir de difpofcr des revenus ^ qu'il eroic tomptable de tont le mon-tanr au trefor de Delhy , apres qti'il avoir paye ki dcpenfes neceflaires de fon Gouvernement. Lc Nabab n'avoir done pas le.droir de dif-pofer des reveniis de faProvince, & d'en alie-iier les terres par des Traires publics ou par-ticuliers. Toutes ces. coiiceflious dcvoienc ^xna- Her cJe i'autotice imperiale. Comme depuis plufieurs annees il n'y a point eu de veritable £mpereur fur le trone de Delhy , excepte ce qui fuc accorde par Furrukfeer en 1717 a la Compagnie Angloife , tous les aftes qui lui 011t transfere depuis cene cpoque la pro-ptierc des terres oii des levenus, font invalides , & ont etc excoi'ques par la violence £c rnfurpation. Lorfqu'il n'exifte plus dans I'Indoftan , ni Empire, ni Loix , il eft abfurde de fuppofer Tun Sc l'amre , Sc de parcir de ce principe pour juftifier la legitimite des pofTeffions de la Ccmpagnie. Tous les ouvrages cju'on a faic fur cetce matiere , fgiit remplis de contradictions & de faulTetcs. Les Auteurs, ordinaire-ment parries intereflees dans la caiife quils dcfendoienc, ont toiijours expofe la conftitu-tioa de l'Empire Mogol, fuivant leur caprice. On ne doit point efperer de rencontter la Verice en les lifant; ils n'ont jamais manque de prefenter Tecat des affaires fuivant leurs vues particulieres. C'eft aitrit qiie ia-Cour des Direčteurs > dans un Memoire prefente au Röi d'Angle" terre ie j Fevrier 17(> 2 , a Foccafion des plain-i^es de la Compagnie Hollandoifes'efForga de prouver par des ^ignmen«:tres-fubtils, que ie Nabab du Bengale ctoit dans le fait nij Prince Souverain (i), dcclarc tel par les Loii de TEmpire , & qu'H n'y avoh point d'Empe-reurMogoL Son interct exigeoit alors que Jaf-fier Ally Khawn , premier Nabab de la Com' pagnie , fut regardc comme independant. Le LordClive foiuenoit le mcme fyftcme, parce que le Nabab Tavoit ctee Omrah j & lui avoit donnc la propriere des tetres de laCompagnie fous le ritre de Jagueer j cc qui däivrok les Anglois dans l'Inde de taute dependance autre \'oyzz le que la fiennc (i). Mais lorfqu'il fut queftioJt CnapnrciVjjg s'emparer du Dewance , la Compagnie T^spari/du fourint qü'il 7 avoit uii Empereur & point de Pcwaucc. Nabab. En confcqueiice Shak Allum piiblia fes Firmans Royaux avec toute I'tiutorke Imperiale. II eft fur que l'equite n'autorife pas tonte« ces revolutions ic conceflions ptctendues. Dans roat ce qui s'eft paflc dans I'lnde, de--puis Tanatchie de I'Empire &r les troubled de la Compagnie , il n'y a point eu d autre-droit que ceiui da plus fort, ni de loix que (1} Vpy^-L Defenfe , &c.'impritnee i Londfss ehez Broiherton Cornhill. 1761. p. 11. " (i) Yoytz. uhe Lettre du Lord Cli've aux Pro-, prictiirc? dt la Compngnie Angloife. LondreSjChe^. Noiirfe. 1764. pag. 8cc»' le defpotifine & la volonte des Conqu^ranj qui s'emparoienc a leur gre de ce qu'ils trou-voient ä leur bienfeance, &c difpofoient de tout fans ccce repnin^s par rien. Avant l'ae-quifition du Dmanee, la Compagnie An-gloife , pour defcndre fes pofTeffions , de-voit^dire qu'elle les tenoic du Nabab , en cas que leur dioit für contefte par les au-tres PiiifTances. Apres s'etre empare du De-wanee , eile devoir encore, par la mane vai-fon J foutenir que le Mogol le lui avoir accor-de : il falloit d'ailleurs qu'elle cachac fen ufurparion ä la Legiflacion d'Angleterre. Le Lord Clive en s'emparant an nom de la Compagnie du Dewanee du Bengale , avoir un intcret immediat ä confommer cette cn-treprife fi hardie Si fi extraordinaire. 11 crai-gnoit de perdre fon ritre d'Omrah & la pen-lion de rrenr-fix mille livres fterlings qvt'ou lui avoit accorde. On a vii dans le quatrieme Cliapitie , que la Cour des Direčteurs refufa forrnelle-menr au mois de Mars d'accepter le Dewanee. En efFet, cecte demarche eroit incompatible avec les arrangemens qui fiibfif-toient alors entre la Compagnie Angloife & le Nabab de qui eile avoit tire les plus grands ayantages. La Cour des Direčteurs fencoic bien que cc nouveau ticrc engageroic la Grande-Bretagne i examiner !cs affaires de Ii Compagnie , qu'on d^voilcroit des fccrers qii'ii falloit cacher, & enfin quil ne feioic d'aucunc un!ir faires, n'ell pas beaucoup a norre avanrage, » & que nous n'avons fait quechanger les pro" fits furs que nous faißons dans U commerce j tt contre Us profits precaires des revenus ». ^^^ Tome I. H CHAPITRE VII. Ves Firmans da Mogol ; des Paffe-pons appelles Dußucks , <5- des an-ciennes pojfeffions des Anglois dans le Bengale^ T . J-*Es Portugals, apies les premieres decouver-tes de Vafco de Gama en 1497, firem pendant prcs d'un fiecle le commerce de l'Inde, fans que les autres peuples d'Europe devinf-lent leiirs rivaux. Letir Piii(rance dans ce pays (Stoic formidable ; ils avoient des etablifTe-mens a Surate , a Giizarare , a Amadabad , fiir les cötes de Coromandel & de Malabar, long-rems avant que les Vaifleaux Marchands des Anglois abordaffent dans ces pays. Des l'an 1534, ils fe liguerent av«c le Roi du Bengale , qui croit alors independant de la Cour de Delhy,&:ils envoyerentdeGoa,unc arm^e pour le fecourir centre Shera Kliawn , Prince Patane. Leurs principaux domaines dans le Bengale eroient Porto Grande, qu on appelle a prefent Chittigong; Sc fur la riviere d'Hougly, Porto Pequeno, aux environs duquel iJs ont encore a£tue!lement leur erabliiTetnent de Bandell. L'Empereur Shah Allem , o^ Jehan Gueer , grand-pere du fameux Auieng-Zfeb j les conhrma dans la pofTeflion des rerritoi-res quon leur avoit accorde fur la riviere d'Koüi gly , a condition qu'ils dcfendroienr la bayeßc les cores du Bengale, contre les invafionsdes PiratesMugg, qui ctoienralors cres-frequeines* La Reine Elifabetli fut le premier das SoU" verains de la Grande-Bretagne qui s'lntcrefla aux voyages qu'entrepriient les Anglois eil Afie par le Cap de Bonne - Efperance. Afiii qu'ils puflent ctablir leur commerce dans la Chine & dans I'lnde , clle donna aux Aven-turiers qui formoient ces expcdiiions, des Ler^ tres pour les Empereurs & les Princes de ces pays. C'eft ce qu'elle fit en faveur de dent Marcliands nommes Jean Newbury 5c Ralpli Fitcli qui partirent en 1583 , S«: de deux au-tres appellcs Richard Allot Sc Thomas Brom-field, qui partirent en i j 96. Voici fa Letcre au Grand Mogol ou Empe* rear Akbar, datce du tnois de Fevrier 1585* «' Elifabeth j par la giace de Dieu ^ &c. X »3 I'invincible Sc tres-puifTant Prince, Seigneur •> Zelabdiii Echebar, Roi dc Cambaye, in» vincible Empereur,&c. Nos Sujets ayant grande envie de vituaC H 1 „ Jes parties eloignces du MonJe, dans la M bonne volonte d'y inrroduire le commer-„ ce des Marchandifes de toiues les Nations, « noiis avons chargc Jean Newbury de cette .> Lettre , afin que lui & fes alToci^s puif-» lent, avec une honnete hatdiefle, arrivef n fur les frontieres & dans les pays de votre » Empire. Nous ne doutens pas que Votre Ma-» jefte Imperiale ne veiiilte bien les accueil-» lir & les traiter favorablemenr. Nous vous n prions de le faire pour Tamour de nous, & >) nous aurons par-la de tres-grandes obliga-M tions a Votre Majefte. On parle rant en J) Europe de votre hnmanite , que nous ne •> croyons pas devoir infifter plus long-rems » fur cetre demande. Nous ajourerons feule-» menc qui! plaife a Votre Majefte, en con)> fideration du penible voyage qu'ils ont en« crepris , leur accorder la liberte & les « privileges que vous /ugerez convenables. }> Si vous ecoinez notre ptiere, nous fcrons s> par reconnoilFance en votre faveur tout ce » qui dependra de nous. Sur ce , ;e falue Vosi tre Majefte Imperiale (i) ». (I) Colledtion de Richard Hackluyt , Tom. 11. fag. 245. Londies, 1 jyy. Ralph Fitch, qui a ecrit dans Hakluyt I'hif-toire de fon Voyage , raconte bien qn'il reft» jufqii'au 18 Seprembre 1585 , i Cour de I'Empereur Akbar, qui fc tenoit alots i Feti-pour ; mais il ne die pas qu'il en obtiut des priviieges. On trouve dans la Collečtion de Purchafs , (i) que Jean Mildenhall fut le premier An^-glois qui obtint des privileges du Grand Mo-gol en faveur de fa Nation. 11 partit de Lon-dres en 1599, & pafTa le Detroit de Gibraltar. Apres avoir traverfe la Mcditerrancc , il fk par terre le voyage a la Cour du Mogol , & il arriva a Agra en löoj. L'Empereur re^uc fes Lertres 8c un prefent de Chevaux Anglois, Sc de quelques Bijouteries , Sc I'accueilUc rres-bien. Les intrigues des Jefuitcs, & fuc-tout des Italiens, dont il fe plain: amerement, liii fufcitereiit beaucoup d obftacles. Comn-ie il ne pouvoit rien faire, fans connoitre la langue du pays , il s'appliqua a I'aude dii Perfan , & trouva le moyen de gagner les bonnes graces du Mogol. L'Empereur lui accords des Firmaus dont il fut content, & qui ctoienc, dit-on, avantageux & trcs-honora- (i) Voyages de Purchafs. Tom. II j pag. Londtes, i6is. H 5 bles i la Narion Angloife. Les copies de ces firmans fe font perdiies par le laps Ju tems. Sc I'on n'eti f^air pas le contenu. PenHanc le Voyage de Mildenhall, la Rei-T.o )i d;- ne Elifabeth donna des Lettres Patentes pout 1Ä0»- J J ans , a line efpece de Compagnie, creee alors foils ie nom de Compagnie des Mar-ch.inds de Londres dans les Indes Orienrales, CetteSociccc empecha piobablement Mildenhall de publiei' les Firmans qu'il avoir obtenus. Thomas Beft (i), qui en i6ii conduifit deux Vaifleanx dans Pinde, prefenta de mejne au Grand Mogel Shah Seleem , des Ler-tres de la part da Roi Jacques. Le z i Očlo-bre 1^11, il fit avec le Gouverneur Mogol d'Amadabad & de Snrate, iin Traicc de commerce que I'Empereur conhrma le 15 Janvier 161} , par un Firman. Entr'autres articles, il flit ftipulc : « Qn'il y aiiroit une paix perpe-s^ tnelle & un commerce libre 6ntre les Su-31 jets du Mogol & les Angiois dans tons les " domaines de TEmpire; que routes les Mar-» chandifes de la Grande - Bretagne paye-» roienc un impot de trois 8c demi par cent j 35 que le Roi d'Angleterre, pendant que dii» reroit la paix & ce commerce, pourroit (0 Voyages de Purchafs, Tom. U j pag. du Btngale. » entretenit a la Cour du Grand Mogol un »> Ainbafladeur, afin d'y n^gocier & termi" ner touces les affaires importaiites lelatives " a fes fujecs ». En 16i4, Jacques I envoya Thomas Roc, en quaiice d'AmbalTadeur ä la Cour du Mogol Shah Seleem , avec une Lettre done voici la copie. « Jacques , par la grace du Dieu toiu-" pulflant, Createur du ciel & de la terra , » Roi de la Grande Bretagne, &c. &:c. Au » trcs-haut & tres-puiU'ant Monarque , le M Grand Mogol, Roi des Indes Orienrales , «■ de Gandahar, Cacheinire, KorafTän, See. j> Salut. n Le Traite conclu en votte nom par j' Sheik SufFee , Gouverneur de Guzeratc , avec notre bien-aime fujet le Capitaine )> Tiiomas Beft, nous a fait connoitre l'ac-» cueil favorable que voiis voulez bien faire » a cous nos fujets qui vonr comnieicei" dans » vos domaines. Nous avotis juge a propos 5j de vous envoyer notre AmbafTadeur, afin )> qu'il puifTe plus au long negocier & traiter jj les affaires relatives a la correfpondanc? » qui vieiit de s'etablir entre nous > & qui »> tournera fans doute a i'avanta^e de nos deux » Lmpires. Nous avons fait choix pour cela H 4 » de Sir Thomas Roc , Chevalier de notrtf „ Ordre , & un des priiTcipaax Seignenrs de „ iiotre Cour. Sa Commiffion eft fceüee de no^ " ne grand Sceau d'Anglecerre , & nous liri avons doniie les ordres & les direiäions ne-jj celTaires pour terminer definirivement avec voitsfiir coLites les marieres qui furviendront n aroccafionducomnieice. Vousvoudrezbien )T donner creance a tour ce qu'il propofera fiir " ccs objets. Nolis vous priousd'acceprer eil ir bonucpart, le prefenc quenotredit Ambaf-n fad^ur eft charge de vöiis remerrre , comme sj un temoignsgedenosbons fentimensa votre 3j egard. Sur ce , Je vous recommande a la >) prorection mifcricordieufe du Dieu tour-n puilTatit Le Io Janvier x6i(y, Sir Thomas Roc eur fa premiere audience a la Cour du Mogel , qui fe tenoir alors a Azmeer. It ftit trcs-bien recu , & I'Empereur Jelian Gueer, ccrivic en reponfe an Roi Jacques la Lerrre fuivanre. Aprt's les prcambules & les complimeirs ordinaires. « J'ai re^u la Lecrre que vous )> m'avez envoyce en faveur de vos Mar-» chands. Je Aiis trcs-fatisfait da reiidre ar» rachement que vous me remoignez , & je » vous prie de ne poinr etre fache , fi je ne » vous ai pas ccric jufqn'a prcfenr. Je vous •> adrefTe cette Lettre pour reiiouveller notre " amitic, & voiis informer, que j'ai fait pu_ " blier dans tout uion Empire des Firmans cjui " ordonnent, que fi quelques VaitTeaux des « Marchands Anglois arriventdans mes porrs, 35 mes fujets leur permettenc de commercer ,> libreinenr. J'ai ordonne en ourre, qu'ils » ayent autant & plus delibertc que mes pro»> pres fujets; qu'on ne leur faiFe aucune efpece t> d'iiifulte 5 & qu'on les fecoure & les aide " dans tous lescas oü ils feroient ofFenfcs. Iis " pourront acheter, vendre, tranfporter , enle-»' ver leurs Marchandifes, fuivanr leur plaifir, » fans etre nioleftes, ou epronver des obtta-des de la part de qui que ce foir : la Prc-j> fente vous donnera des aiTurances auiTi fur-» res de la paix & de Tamitic que je veux )) conferver avec vous , que fi mon propre « fi!s etoit charge de la porter d'en aller » tatifier le contenn. S'il fe rrouvoit dans » mes Etats quelqu'un qui eüt afTez peu de « crainte de Dieu , de religion & de Ibumif-»3 fion a fon Roi, pour s'efForcet de rompre »3 notre alliance , j'enverrois mon fils , le 33 Sultan Khourm , Gäieral renommc dans U « guerre, pour lui couper la tete, » Com me j'ai recu de vous diffcrentes f> marques d'amitic, je vous prie d'accepter HZ ^tat Civil, O C. comme un temoignage de la inienne , qiiel-„ ques nouveaurcs de ce pays ». Tels ecoient les Firmans & les encoiirage-mcns accordes .inciennement dans l'Inde aiix Angiois , d'aprcs la demaiide fpeciale qii'eii avoient faic Ics Rois de la Grande-ßretagiie en faveur de leiirs fiijets. La Compagnie An-gloife, par permiflion du Gouvernemem Mo-gol, fonda fa premiere Faitorie dans le Bengale, a Hoiigly , ou les Holbndois s'croieni etablis vers l^in kJij. La Fadtorie du Bengale dependoit alors de celle de Chinipatnam ou de Madras. Hougly, qui eft aujourd'hui une Ville ruinee , ecoit a cecte cpoque im port ou Ton faifoit un commerce confidcra-« ble. ■'Tous les Strangers en general y abordolent comme en an lieu ouetoit le grand enrrepordes Marchandifes duBen Chanok , principal Fadeiir de la Compagnic i Hougly , eproiiva divers changemens de fortune. La condiiire imprudente de Jean Child , Gouverneur de Bombay , prolongea jufqu'en Juin 16^0 , la giierre qtii fuc tres-fa-tale a la Gompagiiie : eile perdit tous f^s privileges & tout fon crcdit chez les Indiens 8c le Mogol, & ii lui en couta en outre plus de quatre cent niille livres fterlings. Sedte Ya-coob , Gouverneur de Surate , s'empara de Bombay, fit mettre en prifon les Fačteurs de la Compagnie , & les obligea de travetfer les rues enchames par le col (i). (O Hamilton, vol. I. pag. 1S5 &: les fuiv. de fon Kifloire des Indes Orieiitales j ou il avoii cte Capi-taine de VaiflTeau pendant pidieurs annees , a de-vcloppc la conduite atroce de Jean Child, II fut crec Gouverneur de Bombay en i6Sz j & cnfuice Gouverneur general dans J'Inde, & Chevalier Baronet d'Angleterre. M. Hamilton dit qu'il fut coupablc dc routes les efpeces dc tyrannie, d'oppreffioti j d'ia-juftice & de rapine , a I'egard des Anglois ainfi que des Indiens. 11 ajoute, que ce fut lui qui fuf-cita cette guerre , qui fe termina ä la honte 3c au deshonneur de la Compagnie Sc de la Grandc-Btc' tagne. « Le maiivais fucces de la guerre obligea j» les Anglois a fupplier TEmpeceur Aureng« zeb de leur pardoiiner, & de leur accordec »• la paix. Iis cliargerenr du MeiTage deux >» Fadteurs , qu'ils eavoyereiu de Surate i » Delhy, avec le tiire d'Ambaffadeurs de la 1, Grande-Bretagne. Iis furent introdiiirs a •• l'Aiidience d'Aureiig-zeb, d'iine maiiiere im peunouvellepour des Ambaffadeurs. Iis pa» rurent en fa prefence profternes contre cerre, » les mains lies pardevant avec iine ceintiue. " L'Empereur , apres leur avoir faic une fe-» veie reprimande , leur demaiida ce qu'ils » vouloieiir. Iis rcpondirent qu'ils venoieiit » confefler leurs fautes, & demander pardon ^ » qu'ils avoient merite de perdre les aiiciens jt privileges qn'oii leur avoit accordes, qu'ils n fupplioient Sa Majefte de vouloir bien les n renouveller , & d'ordonneu en mcme tems n que fon arinee evacuät l'Iile de Bombay. » Aureng-zeb, qui eroic un Prince paci-M fique & modcrcj accepta la foumiflion des ■ Anglois , leur pardonna leurs fautes , 8c n renouvella le Firman , a condition que le » Gouverneur Cliild fortiroir de l'Inde daiis n neuf inois, pour n'y rentrer jamais; que " la Compagnie payeroit a fes Sujets routes v les dettes quelle avoir contradee envers » eax, 8c qu'elle les dedommagerolt eti mS,» me tems de routes les friponneries & de ». routes les pcrtes donr eile avoir ctč l'occa-" Hon »*. Job Chatiock , Agent de la Compagnie dans le Bengale , voyant que le Mogol eroit fort indulgent , demanda que les Anglois eulTenc la permiflion de retournet dans leiirs Fadories. Aureng-zeb y confentitj les Anglois ne fe foucierenc pas de choifit Hoiigly pour le lieu de leur detneure, ils s'e-tablirenta Ulbarea, village ficue fur una baye> ä environ 40 milles au-delTous de la riviere d'Hougly. Iis s'apper^urent bien-tor que cetre place n'croit pas convenable a leur commerce , & ils tranfporrerenr , du confente-menr du Nabab, leurs Faf^tories a Sootannu-ty, village qui eft ačtuellement compris dans le diftrid de la ville de Calcutta. Six ans apres , c'eft-a-dire, en 16^6 , pla-fieuts des Fermiers herediraires, commandos par le Rajah de Burdwan, fe fouleverent, &ne voulurenr plus reconnoitre Taucotlte du Gouverneur Mogol, ou Nabab du Bengale. Les rebelles leverenr une armee confidcrable , ils s'emparerent d'Hougly, de Ragemolh & de Murshedabad , capitale de la Province ^ avanc qu'on p«t arxcrer leur rcvclte, Les Anglois, les Francois & les Danois firent au Nabab beaucoup de ptoieftacions d'auacliement, & fe declaretenc en fa faveur. Sous pretexte de dcfeiidre leurs etablilTemens , iis profiterenc adroitement de la coiifufion pout les fortifier. C'eft ainfi que les Hollandois bätirent leuc fort de Chinfurah, les Francois celili deChan-dernagor, les Anglois le fort William on Calcutta. Aureng-zeb, pour appaifet la revoke, avoic eiivoye le Nabab Azim al Shawn, homme trcS-avare. Les Anglois le corrompirenc avec de de I'argent, & lans egard pour les Ordonnan-ces de I'Empereur , il leur permit d'acheter des fermiers hereditaires, le droit de Zemin-daiat dans une ecendue d'environ un mille & demi en quarre. I!s acquirent par ce moyen les Villages de Calcutta & de Govindpore, rcfervanc pourtant an Nabab les prerogatives Royales. Les etablifTemens de la Compagnie furent bien-töt peuples d'un grand nombce d'babitans. Les avantages qu'ils trouvoient a vivre fous fon gouvemement, la protection que TEmpereur lui accordoir, & I'accroifiTe-inent du commerce des Anglois par la reunion des deux Compagnies , les y attiroient en foule. La Cour des Diredeurs en 1707 jugea que pour gouverner rant de Sujets, il falloit rendre UPrefidence He Calcutta indcpendaiite ae I'e tabli (Temelit de Madrafs dont elle avoit releve jufqu'alors. Ini7'7' Dejniis cette epoque jufqu'au regne de TEmpeieur Fiirrukfeer , on ne voir pas qii'il fe foit pafTe auciine negociation enrre les An-glois & la Cour de Delhy rclativemeiu a leurs Firmans. Nous avons deja dit qu'Aureng zeb , qui pouvoit fe venger des outrages qu'iis lui avoient fait, voulut bien leur pardonner &: leur accorder de nouveaux privileges ; apres certe nouvelle faveuc , le commerce de Ii Compagnie devinr chaque jour plus impor-ranr. Cepeiidanc il eprouvoit de frequentes interruptions de la part des OfEciers du Gouvernement Mogel, qui n'obeiflbienr gueres aux ordres de TEmpereur. 11 leur etoit tres-fa-cile d'inquieter uneCoIonie etrangere qu'iis ji'ainioienr pas , & ils y manquoient tarement lorfqu'ils en trouvoient Toccafion. La Compagnie fentant combien fes etablifTemens du Bengale Sc du refte de l'Inde etoientpcecaires, envoya en 1715 a la Cour de Delhy deux Deputes pour demander la reparation des torts qu'elle avoit foufferrs , & la protedion de l'Empereur centre lesoppreflions quelle avoit lieu de craindre par la fuite. La Compagnie demandoit en outre quelques nouveaux privileges. privileges , avec la prorogacion des anciens, &fur-cout qu'on lui accordäc uiiepetite eten-tiue de teriein , par*toiit ou eile ccabliroit un© Fačtorie. La Deputarion eut taut le fucces qu'elle avoir lieu d'attendre. La Compagnie Angloi-fe obtint le grand Firman qui exemproit fon commerce dans les domaines du Mogol de toute efpece d'impocs , en payanr feulemenc une reconnoilTance de dix mille roupies par an. Comme les Anglois one appuye routes leiirs operations fur ce Firman jufqu'ace que , devenus maStres des Nababs & du Mogol , ils les aient crablis fur le crone on depo-fes a leur gre , & qu'il fervira d'ailleursa faire connoure aux Lečteiirs les demaiides des Am-baffadeurs, nous allons le rapporter en entier to. " Tous les Gouvernetus ou Officieis" » prefens oa avenirs de la Province d'A-3> madabad , des heureux Ports de Suraie » de Cambaye , f^auront que les Fac-«» deurs des Anglois , nous ont reprefent^ (i) M. Bolts averrit qu'il s'eft fervi de la Traduction qu'en a fait en Anglois M. Jacques Prefer ^ qui coniioilfoit tres-bien la Langue Perfane. On trouve CC Firman dans fon Hiiloire de Nader Shall. Tome I, ^ J J C) Etac Civil&c. „ que les Marchandifes de la Compagnie ne ,, payent point de droits dans tour TEmpire, » exceptc dans le port de Surate ; qu'au tems de TEmpereur Shahab al deen Shah Jehan, w les droits de ce Port etoient fixes a deux » pour cent; que foiis I'Empereur Mohy al J) deen Mahomed Aareng-zeb Allumgueer, » ils furent portes a trois & demi, & qu'enfirj » fous le regne d'Abul MazufFer Bahadr » Shah, ils furenr reduits a deux & demi pour " cent, fommequ'ona continue depercevoir n jufqu'a ce jour; que les vexations des Offi-» ciers du Gouvernement les ont obliges den puis plus de trois ans a retirer leur Fadtorie » de Surate; que dans les Provinces de Bahar « Sc d'Orixa , leur Nation ne paye point de » droits 5 qu ils en font exempts dans le port » d'Hougly & dans le Bengale, moyennant une « reconnoiflance de trois mille roupies qu'ils » payent tous les ans; & qu'enfin i!s efpe-» rent que fuivant la coutume des autres » Ports , nous voudrons bien etablir un »» Pefcush en place des droits fixes par ,5 le tarif; fur quoi ils s'engagent, fi nous y confentons, a payer pour cela une recon-" noilTance de dix mille roupies par an. » A ces caufes, nous publions la prefente " Ordonnance,qui ferafiiivie ponf^aellcmcnr. n Sc i kquelle U monde entler doit obqir. » Nous accepcoiis le Pefcush de dix mille n roupies par an pour le pote de Surace, de " perfonne ne pourra molefter & inquieter » en aucune maniere les Anglois dans leur ,> commerce. Iis pourront acheter & vetidie » fuivanc leur plaifir , Sc fans payer aucuti H droit, routes les Maichandifes que leiirs >< Fadeurs ameneront par terre ou par eau » dans ledit Port , ou qu'ils voudroient en » faire fortir pour les conduire dans les au» tres Provinces de notre Empire. S'il arri-» voir qu'on leur voläc quelques-uiis de leurs » effets ou Marchandifes , nous ordonnons 1 » nos Officiers de faire reus leurs efForcs pour " les retrouver , de les rendre enfuice au prosi priecaire , & de faire punir les voleurs j 3» d'accorder aux Anglois routes les deman-» des qui feront equicables, & de veiller a - ce que perfonne n'infuUe leurs Fa£beurs. » Les Deputes nous ayant en outre repre-» fentes que les Dewans des Provinces peu->9 vent leur demander I'original ou la copie » de leur Sunnud, fcellee du Sceau du Nazini, r> ce qui eft fouvent impraricable j ils efpe-»» tent que nous ordonnerons qu'on ajoure » foj a une copie dii Sunnud fcellee du Sceau « du Kazy j que les Monnoies Porrugaifes I 1 « ont cours dans Tlfle de Bombay, appartc-« naiit aux Anglois j quits defireroient que » nous leurs permiffions d'en frapper de par-„ ticulicres , ainfi qu'il fe pratique i Ma-» drafs. Les Deputes ayant demande d'ailleurs » que reus les Employes cie la Compagiiie » qui auvotic des detces , & qui prendront « la fuite puifTent etre envoyes au Chef de » la Fac^lorie, & que deformais, fous pre-» texte du Fowzdarat (i), les Fačbeurs & Em-o ployes de la Compagnie ne foieiit plus vc-» xes & moleftes, ainfi qu'il eft arrive fou-•> vent. » En confequence, nons ordonnons qu'on M ajoute foi a une copie du Sunnud fcel-» Ice du Sceau du Kazy ; que dans Theu-» reufe Ifle de Bombay , les Monnoies »> frappecs fuivanr les loix de TEmpire (i) Le Fowzdar dans les grandes VilleSj eft le Magiftrac charge de Tinfpeftion de la Police. II connoit dc toutes les ventes des liqueurs fpiritueu-fes, & des tumultes ^ &c. Les Marins Anglois qui vont s'enivrer dans les Tavernes , y excitoient des difputes Sc des batailles, L'Cfficier qui veille au bon ordre etendoit fouvent fur tous les Fadleurs des chä-. timens qu'ils ne meritoient pas. Le Firman dont nous parions ici les fouftraic a la jurifdičlion du Fo-Wzdar. >» ayenc cours j que cous les Employes de la » Compagnie qui aiiionc des dettes, & qui " prendcünr !a fuite, foienc faifis & remis au » Chef de la Fa<äorie ; que fous precexce du » Fowzdar, &c. les Anglois iie foient plus » moleftes. u Les Deputes nous ayant encore repre-u fentc que la Compagnie a des Fadories » dans les Provinces de Bengale, Bahar Sc » Orixa , mais qu'elle defire s'etablir en « d'autres endroics ; que l'Empereur vou-»> dra bien lui accorder quaranta Begas de M terrein ( i ) i que fes VailTeaux clialTes »> par la tempere , venant fouvenc i faire » naufrage fur les cores, les Gouverneurs des i> ports faifilTent tyranniqiiemenc les Mar-» chandifes , & en demandeut quelquefois )> la quarriane partie (i). » Nous ordonnpns que par-couroü lesAn-w glois voudront fe fixer , i!s fuivent les » ufages etablis pour leurs anciennes Fačto-» ties, S: que les droits foient changes eti 35 une reconnoifTance annuelie. Lorfque quel-ques-uns de leurs Batiniens effuyeront un (i) C eft-a-dire, environ quiiuc acr??. Lc. bcga contient 16O05 pieds quarres. (i) Ce droic dc biis fc recrouve done en Afic, 1 I M natifrage , oii s'egareronr dans leur rour? , ,, nos Officiers auronc grand foin des cargai- foiis , & ne pourront rien exiger. Dans rou-» tes les affaires relativement au commerce " des Anglois, on faivra cette Ordonnance » dont on ne demandera pas meme le renou-» vellement chaqiie annee. Nous ordonnons a nos fujets de l'executer pončtuellement. " Donne le 4 de SafFer, la cinquieme annee » de nocre regne glorieux. ( Le 1 ö Janvier 3) 171 (j-7 ) M, Vanfirtarr (1) a donne une anrre tra-diičlion de ce Firman qui s'accorde avec celle de M. Frafer, dans les points principaux, niais qui difFere en quelques paiticularitcs. 11 feroir iniuile de les comparer ici j le Lečteiir cnrieux pent confulter I'ouvrage que nous in-diquons a la marge. Afin de norifier aux OfEciers des Douanes de rinde qu'clles font les Marchandiies qui doivent paffer examptes de droit en vertu du Firman» le Gouverneur de Calcutta , & quel-quefois les Chefs des Fadories de la Compa-gnie,ont coutume d'envoyer aux Employes du Mogol un pafTepott ecrit en Anglois & en (1) Narrative. Tom. I. pag. 9. Perfan, qui defigne la quantite des Marchan-difes qu'on expedie, & le lieu de leur defti-nnrion. Ce pafleport eft fcelle du grand Sceau de la Compagnie ; on l'appelle Duftuck. Avant l'anarchie & le demembrement de TEmpire ^ ce Duftuck ecoit refpečte , les Anglois tranfportoient leurs cargaifons dans tout rindoftan fans payer auciin impot. De-puis que les Nababs four devenus indcpen-dans de TEmpeteur, ce Duftuck ne fert plus au-dela des Provinces du Bengale, c'eft-a-dire, en d'autres rermes, qu'il eft inutile a la Compagnie par-tour oü fa puilTance ne peut pas le faireexecuter. il fautremarquerque d'apres I'ufage & la connivence du Gouvernement Mogel, les Employes patentes de la Compagnie ont profite de ces Duftucks, 8c que par ce moyen ils font leur commerce parti-culier fans acquirter les droits auxqucls font foumis les naturels du pays. Tels font les privileges quaccorda I'Em-pereur Furrukfeer aux Anglois par le grand Firman. Le Mogol precendoit feulement per-mettre le libre tranfpoxt de leurs Marchandi-fes dans les difFerens ctabliffemens de la Compagnie, & les mettre a I'abri des vexations des Gouverneurs des Provinces. En excmptant leur commerce de cons les I 4 droits que devoient payer fes propres fujets , il ne fenroit pas les pertes qui en refulte-roienr dans la fuite pour fon Trčfor , & l'at-teince qii'il donnoir i fon autorire. Le commerce de ia Compagnie, peu confiderable alors, fe bornoit a un petit nombred'atticles , &:ilne pr^voyoit pas rinfiuence & le pouvoir qu'elle acqiierrcroit iin joiir dans fes propres £rats. D'ailleurs les Marchanclifes qu'ache-toient les Anglois dans i'intcrieur du pays , devoienr pafTer par rant de canaux avanc d'ar-river a leiirs erablifTemens , que les Indiens qui faifoient eux-mcmes les emplettes de la premiere main , malgrc les impots qu'ils devoient acquitter, pouvoient encore les don-jier a meilleur prix que la Compagnie. Les Armeniens ont fouvent prouvc cecre ve-rire. Les affaires de la Compagnie etanc de-vcnues plus florilTames au milieu des troubles de l'Inde , Tabus de ce privilege a ete la fource de bien des oppreflions envers les jiaturels du pays. Nous ferons voir dans le Chapitre fuivant, que c'eft la caufe prinči-pale de l'etat piroyable oü fe trouve a prefent leduit le Bengale. CHAPITRE VII L Commerce que faifoient les Europeens fur les cotes & dans L'interieur de finde lors de leurs premiers etabii(femens dans ce pays. Commerce aäuel de la Compagnie Angloife dans le Bengale^ compare avec celui qu'y font les au-ires Nations de V Europe d les Mar-chands particuliers de la GrandeBretagne. JjEs Portugals furent le premier Peuple d'Eiirope qui parut dans I'lnde avec cclat. lis durent leur ancienne profpcritc au genie entreprenant & aiix travaux opiniätres d'un Prince quits n'ont pas traite conime il le meritoic. Malgre fes talens cxtraordinai-res , & les fervices qu'ii reiidit a fa Nation par fes decouvertes , ils out laifTe fon nom dans I'oubli pour prodiguer des toaaiiges excefTives a d'aiures Princes qui n'ont fait au-cune ačtion eclatante en comparaifon des (lennes. Ce Prince eft Dom Henrique j Due de Vi-feu, quarrieme fils de Jean premier , Roi de Portugal. II employa fon genie profond aux fcieiices utiles, & s'occupa liii-mcme a faire des dccouvertes fur mer. L'Europe avant lui ne connoifToit point ies Azores, dont il prit pof-fefflon en faveur de fon pays, & il poufla la navigation du Portugal jufques fur Ies cotes de Gulnee. Anime par fes exemples & fes fucctrs, !e Portugal pourfuivit fes entreprifes aprcs fa mort, & Ton alia bien-tot jufques au Cap de Bonne Efperance , connu d'abord feus le nom de Cap des Tempctes (i). On fir pUifieurs tentatives inutiles pour le palTer; mais enfin Vafco de Gama vint a bout de le doublet en 1497. Ce Navigateur continua fa route jiifqu a Calicut , fur la core de Malabar (1) , ou par la fuire des tems on forma plufieurs ctablifTemens. (1) Ilfut dtcouvert en 1687, par Bartholomec Dias. (i) Les premieres terres d'Atneriquc furent dccouvertes en 1492 , par Chriftophe Colomb j de maniere que TEurope eut connoiflance des Indes Orientales & des Indes Occidentaics a pcu pres dans le mcme cems. Les Portugals profirerent bieiitor de leuts decouvertes. Iis s'emparerenc des ports d'Angola , ce qui les rendit maitres de ce Royaiime , & les mit en erat de faire le com^ merce de TAfrique occidentale. Iis formerent enfuite des ctablifTemens dans l'Ifle de Mo-fambique , d'ou ils ont fait long - tems avec ies peuplcs qui habicent la cote Orientale de I'Afrique (i) un commerce avantageux eii poudre d or , dents d'elephans, &c. £n ouvrant la route de Tliide , ils y au- (i) Sur la coce Orientale d'Afrique qui s'etend depuis le Cap de Ponne-Efperance, jufqu'ä la Mer Rouge , on trouve plufieurs excellens ports , & cn-tr'autres ceux de Sofila & de Melinde. On f^ait que Je pays du Monomotapa, qui borde celui de Sofala, reiifermede trcs-riches mines d'or j & beaucoup d'e-lephaiis , & qu'oii pourroit y faire un commerce avantageux, Ce pays etant fitue a l'Eft du Cap de Bonne-Efperance , fe trouve dans I ctendue du ter-rein auquel laCompagnie Angloife a un droit exclu-fif de commerce. Quoiqu'elle n'en fafle d'autre ufa-ge que d'y prendre de l'eau & des provilions pour fes voyages j eile defend cependant d'y comrnercerj eile ne veut pas que perfonne faße un profit qui nc feroit pas pour eile. Cet objet merite d'etre examine par le Gouvernement Anglois. roienr eii probablement uii gran:! nombre de Rivaiix , fi !'o!i navoit pas decouveit TAme-rique dans ces memes tems. Ce pays ccoit moins čloigne de 1'Europe que 1'Ahe ; I'Ef-pagne ecoir devenue tout a coup florilfance & riche par largeiic qii'elle en avoir tire ; les autres Nations aimereiic mieiix faire des expeditions dans le Noiiveau Mandc que dans rinrle ; les etabiiffemens &: les fticces des Anglois en Amerique acheverent de toiirnet vers ce continent I'efprir des peiiples qui fe reveilloit alors (1). Les Portngaismirent a profit ces circonfian- (1) Les conjonftures du tems furent encore des circonllances favorables aux Portugals. La reforme qui s'introdnifoit alors dans plufieurs pays de TEu-Tope J en excitant ]a perfecution religteufe äc les di-vifions inteffincs , empecha les peuples de former des entreprifes maritimes fie des voyages de long cours. Les Trones de Portugal, de France & d'An-gleterre pouvoient faciiement paffer fous une domi^ nation etrangere au dt'faut d'heritiers du Sang Royal. L'Europe avoir ä craindre que I'Efpagne ne devittt trop formidable , & ne voulut lui donner la loi-Cette Puiflance d'ailleurs etoit I'objet de la haine Se de la jaloufie generale; 3c eile avoit par fa tyrannic force plufieurs Provinces a fe revolter. du Bengale. ces, & firent long-cetns le commerce d'Afie fans avoir de concurrens. L'adminiftration de leurs affaires dans Tlnde , fac aufli vicieufe qu'il eft poffible de Timaginer ; la vaine gloi-re Sc la fup.eiflirion leur fitenc commettre des fautes qui auroient du iruiner leurs etablifle-mens. Sans penfer a leurs interecs politiques, jls ofrrent perfecuter des peuples qui leur avoienc pennis d'aborder fur leurs cotes, Sc qui poiivüient facilement les rejetter au mi-licLi des mers. Cependaiic la Nacion s'enri-chit j 5c paru: en Europe avec fplendeur, La profperite du Porcugal fe maintinc jufqu'a l'excindVion de la Branche male de la Familie Royale. Philippe fecond , Roi d'Efpagne , profira des malheurs de ce Royaume , Sc finit par s'en emparer, Ce Monarque , tout occu-pe de TAmerique & des brouilleries qu'il euc avec les autres PuilTances de TEurope & fes Sujets des Pays-Bas , negligea le commerce de l'Afie. Ses fuccefleurs fuivirent tous fes projecs; & les Holbndois , apres avoir fecouc le joug Ef'pagnol , formereni eux memes en Afie, en Afrique Sc en Amerique des eca-blilTemens de commerce qui nuifireur beau-coup a ceux des Portugal . En evirant adroirement les fautes de leuus anciens Mai-trcs ils etablirent peu a peu leur coromer- ce & leur puiflknce j & ils fe conduifireiit avec plus de politique que leurs prcdecefTeurs. Le monopole des Epiceries qu'ils fe font ap-propries ^ entrerieiu leur fuperioritc dans le commerce de ce pnys , fans qu'on puifTe crop prevoir quand eile finira. Lors des premiers ctablifTemens des Portugals dans i'Inde , leiirs Marchands comfltner-^oient jufques dans les parties les plus avan-cees de I'Indüftan. Iis alloienc a Agra, Az-meer, Burrampour, Lahor, & en remontant le fleuve Indus jufquesaTatta, a Amadabad. Caefar Frederick die, qu'ils envoyoienc routes les annces du Bengale (i) a la cote de Malabar 30, ou 35 Vaißeaux charges de riz, d'ctoffes, de lacque , de fucre , de poivre & autres MarcKandifes. Les Mogols j dans ces premiers rems, don- (i) Voyez HacMuyi's colUBlon. vol. I. pag. 2J0. On dit dans l'original qu'ils les envoyoient de Sata-garz •• ce mot a fort embarralfe tous les anciens Geo-graphes qui ne connoiflbienc pas aflez les divifions du Bengale. Saiagan, dont parle Caefar Frederick, eft un diftrift compofe de plufieurs des Pergunnahs fu-bordonnes a Hougly. 11 eft enregiftre dans les Li-▼tes du Roi fous le titre de Sircar Sautgaum. C'eft fous ce nom qu'il eft connu dans finde. noient aiix Marchands des Nations de I'Eu-rope tous les encouragemens pofllbles. Bieti eloignes de la faufTe politique de la Compa-gnie Angloife , ils permettoient a chacun de commercer libreinenc dans le Bengale ; d'y aller par rerre oii par eau , &: d'en fortir quand bon lui fembloit. On y voyoit arriver chaqbe Jour des grandes Caravanes par rerre des pays les plus eloignes, & meme de Mof-covie. Des flottes nombreufes de bateaux tlefcendoient le Jumna (1) & le Gange pour aller commercer dans le Bengale & les Provinces voifines. Encraines par un z^le aireugle de religion 5c par line ambition demefuree, les Portu-gais exercerent des vexations atroces i i'egard des Natureis du pays, qui con^arenc j toures les places qui fe trouvent compri-» fes dans les limites de fa Charrre, de la »> «lerne maniere que les Employes de la" dite Compagnie , a charge fenlenicnt de »' payer les raxes & impots erablis par i'ufage » dans ces dilFcrentes placcs ». A peu pr^s dans le mtme rems 3 la Cour des Direčleurs voLiiant fixer !es droits des Anglois qui rc-fidoienr lur la core occrdentale de I'lile de Sumatra, ecrivoit au Picildenr & Confeit de Bombay ce qui fuit : " tous ceux qui rciident I» fur !a cote occidcnrale de Sumatra, pour" » ront commercer par cux mtnies , ou par » Icurs Agens au FoicS.George &auFortGuil->j laume ou Bombay , ou dans les dependances « refpedtives de ces factories; ii feronr les » maltresd'y aciieter ou vendrepubliquement » ou en paticulier, routes fortes de marchan-V difes. On ne poutra mettre aucunc efpece deirfcchemcnc ou dobftacle datisce qu'ils 15^ Etat Ovil, Cic. y, enrreprendront.Si, contrecet ordre, qiielque „ perfonne, dequelqtierang&qii:ilire qu'elle 0 foir, voLiloitlesopprimerouleurfniredesin-», fiiltes, e!Ie encoureroic notre difgrace, Sc . eprouveroic a coup surde notre relTentimenr. Teiles eroient les fages Or'donnances que faifoient les premiers DiredteiTrs dans la vue de proccger le commerce. D'apr^s ce que nous avons dit de la nature dii commerce Je la Compagnie A-ngloife dans Finde , il eft facile d'appercevoir qu'il eft de fon incercc d'encoLirager les Commercans particuliers de teures les Nations. Mais depuis qu'elle a acquis la fouverainete du Bengale, eile en a envahi rout le commercc pour elle-meme , ou pour ies Subftituts ; & elle fern-ble avoir adoptc un fyfleme direčbement concraire au veritable efpric des affaires mer-canciles. Les Direčteurs cut ofe derniere-inenc avancer qu'eux feiils «voient droit de commercer dans I'lnde \ & en confequence de cette abfurde opinion , its ont ordonne a plufieurs Marcliands qui rcfidoient a Calcutta , de ne faire aucun commerce , en leur difant avec beaucoup de finelTe & de bon fens , que quoique la loi leur accordat peut-ctre le droit de rehder dans les etablilfemens de la Compagnie , ils ne pouvoient avoir au- tun droit d'y commercer. Cela eft auffi rai-fonnable que fi l'oti difoit a un homme : vous avez droit de vi vre , mais vous ne pouvez pas prendre les moyens que vous fournit votre profeflion pour pourvoir a votre fubfiftance. II eft vrai qu'oti n'a jamais impofe ces odieufes reftričtions qii'aux perfonnes que la Compagnie avoit delTein d'oppnmer , ou dont eile vouloic traverfer les projecs. Les affaires de la Compagnie fonr adminiftrees d'une manierebien miferable & bien digne de mepris, puifqu'on manque ainfi aux premieres loix de la juftice pour opprimer iin individu- II faut convenir encore qu'il n'y a que fix ans qu'on a ofe foutenir cette opinion. Depuis ce rems , teures les manoeuvres de ccux qui gouvernent la Compagnie en Europe , & fur-tout en Afie , ne femblent avoir cce combinees qu'afin de s'approprier plus facileinenc le monopole de tout le com-nierce interieur du Bengale. C'eft pour rem-plir ce projet, qu'ils ont fait cprouver des vexations & des cruautcs inouies aux pau-vres Fabricans & autres Ouvriers de ce pays , qui dans le fait font traitcs comme des efcla-ves de la Compagnie Aiigloife. Les Agens des Compagnies Fran^oife Sc HollWoife . fe four fouvenc plaints de ca monopole. Dans une des dernieres difputes fnrvenues encre la Comp.ignie Angloife & celle de Hollandc , les Holtandois deman-' doient qu il fe Rt un partage des Manufadtii-» riers , afin que chaciin pur falre cravailler pai-fiblemetu pour foi ccuxqui lui feroient cchus. Comine cien ne montrera mieax letat du commerce de la Compagnie dans I'intc-rieur dii Bengale , que les propres ccrits du Prefidenc feConfeit de Calcutta fur cette ma-tiere, nous allons les rapportec reis qu'on les rrouve dans le foixante-deuxi^me paragraphe de leur Lettre generale aux DireČteurs. Cette Lettre eft datec du 14 Septembre 17^7. Voici fes termes : « Si Ton accordoit le parcage des j> Manufaduriers que demaiident les Hot-as landois , ce feroit lever le mafque j & nous » reronnottre Souverains du pays. Nous con-» tredirions de la maniere la plus expreffe « routes les proteßations que nous faifons j ks M apparences que nous gardons j & les efforts ]i que nous employons chaque jottf pour fain ,1 ßmblant d'agir feulement au mm par I'au-^ » write du Nahab. En un mot, i! y a une Ci » grande difproportion dans le nombre des •* ouYiiers necellaires poiu former leur car- »> gaifon & la norre, cjue nous ne pouvons M pas confentit a ce partage , fans devoiler » tout ce que la poi'uique de la Compagnie doit » tenir cache ll n'eft pas poflible de developper les moyens qu'employenc chaqne jour ies Agens de la Compagnie & les Goinafthas du Bengale pour opprimer Ies Fabiicans, lis leurs inipofent des ajnendes , i Is ies traiiient en prifün , lis leurs font donner le fouer, ils en airachenr par force des billets ou des obligations , Sec. Ces atrocitcs tyranniques ont di-minne de beaucoup le nombre des Manu-facburiers. Les Fabriques qui fubfillenr nefont plus auffi flotilTäiites, les Marchandifes qui en fortent font plus cheres, 8c par confequent ies revenus de la Compagnie ne font plus fi confidciables. La fournicure des cargalfons de la Compagnie , eft rellement afTervie au monopole, que pffrfonnenepeut rien vendreoii achecer, ft ce n'eft les Employes au fcrvicede la Compagnie, Comme ils font cliargcs de la cargailon , ils ne manquent pas d'acheter des Marchandifes pour la Compagnie , pour eiix-meines & pour'leurs favoris. 11 fauc excepter auHI de rexclufioii gcnt'rale les Compagnies ctrangeres , auxquelles Ton permet de faire pecites empletces pour leiirs cargai-foiis , afin de l'Adminifiration de la Juflice dans le Bengale. V JU'Administration ccpitable de la Juftke €fb dans tons les pays , le fondement de la profperite nationale j & des que Tiiiiquite 8c la partialice s'introduifent dans les Tribimaux Civils , ces abus caufenc toe ou tard la rulne inevitable du Gouvernement. Si le defpocifme & les violences arbitrai-res font pernicieux aux individus qui en font les vidtimes, ils ne font pas moins defavora-bles au commerce, & nuifibles par leurs con-fequences a TJ^tat. Les hommes qui ne jouif-fenc pas de toute la fecuriie perfonnelle pof«-fible, ne feront jamais de grands efforts d'in-duftrie , & Ton ne les verra point s'appliquer avec ardeur a des entreprifes lucrati ves. A peine daigneront-ils amafTer des richeires, fi la pof-feflion en eft trop piecaire. ils n'aurojjt Tome. I. L garde de faire valoir dans le commerce les biens de leurs ancccres , a moins qu'ils ne foienr proteges paroles loix fages & bien exe-ciitees. Leur propriete feroit en danger dc devenir b proye des Defpoces. Lorfqu'iine on plufieurs perfonnes po0e-dent cout a la fois les PuilTances legiflacive & executrice, & en outre la puifTance de ju-ger, le Gouvernement ne peuc erre que def-potique. Le Souverain pent ecablir , älterer, abroger, interpreter & faire executer les loix a fa volonte , fans que perfonne cenfure les operations. La Compagnie Angloife fe trouve dans ce cas. Souveraine d'un vafle pays , eile peuc faire des Statuts & des Loix pout le reglement & radminiftration de fes affaires. La Chartrequi lui accorda cette autorite, y avoir mis une reftridion , en ordonnant que les loix qu'elle etabliroit feroient conformes a la raifon & a celles du Royaume. Le change-ment des circonftances a rendu cette precaution inutile. Peuc-etre dans Torigine, la legif. lation d'Angleterre pouvoit-elle accorder , fans inconväiient, ce poiivoir a la Compagnie. 11 lui etoit facile alors de veiller fur toiites fes operations , de la reprimer lorf-qu'elle croyoit avoir lieu de sen plaindre ; eile le pourroit encore aujourd'hui, fi cecte Socidte de Matchands s'etoic bomee A des €titceprifes puvement de commerce. Des nemens imptcvus ayant rendu la Compagnie Sou veraine de plufieurs grandes Provinces riches & peuplees , fituees a rexrremice du globe i fes Deputes , & meme leurs Agens y ^cablilTent a leur gre les loix qu'ils jugent convenables a leurs delTeins. lis font Maitres abfolus de Tadminiftr^tion de la Juftice j ies loix de la Grande Bretagne ne pouvanc pas proieger les Anglois qui vont dans I'lnde , ni les Natureis du pays, ils n'ont d'autres Juges que leurs Tyrans. Tous les Sujets de la Compagnie font pourtant Sujecs de I'Etar, & de-vroient par confequent jouir de la proteclion de la fupreme Puiflance Icgiflacive. L'inrerec eft le feiil objet du Marchand , & il eft abfurde d'efperer que des Legiflateurs Com-mercans faflent jamais des loix cquirables. Les Employes jouifTent de I'aucorite de la Cunipagnie , fouvenc en vertu d'une feconde & troifieme delegation : on peur imaginer par la 5 comment les millions d'Indiens &: d'An-glois qui habitent le Bengale , font gou v ernes. Les Employes fuperieurs de la Compagnie , exer^ant a line diftance immenfe du ■fiege du Gouvernement une aurorire fans bor- L 1 164 ^^^^ Civil, (ic. jjes, intcre/r^s d'ailleurs i commettre des vexations , fe rendent coupables des oppref-fions & des injiiftices les plus crianres. Les Anglois , dans tons nos ecablifTemens d'Ameriqiie &: d'Afie , fonr cenfes jouir do la protečlion des loix de la Grande-Bretagne. La conftitution de I'ttat defend expreflement de les privei- de ce droit. Des loix parciculie-res ont ordonne en outre que la Juftice fe-roit adminiflree dans les ecablilTemens de U Compagtiie dans l'Inde , fuivant les loix de l'Angleterre. La Legiflation a accorde ce privilege , non-feulemenc i fes propres Sujets , mais encore a tous les Strangers qui habicenc rindoftan , ainfi qu'aux Natureis du pays qui veulent en appeller aux loix de la GrandeBretagne. Telle eft la conftinuion fondamentale de ce Royaiime. La Compagnie pretend avoir recu des prerogatives qui y derogent, Elle a fi bien corrompu & cliangc Tefprit de la loi, qii'on ne I'execute plus ; on s'en fert feulement pour mafquer les abiis & tromper les ignorans. En Angleterre , les Souverains nommenc les Jages qui font charges d'expliquer les loix & d'exercer les fondtions de Maglftrats dans CD lesTribunaux de la Juftice. Mais , afin qu'ils puilTent s'acquitter de leurs emplois avec toute la liberte neceffaire a la place qu'ils oc-cupenr, le Souverain qui les nomme, ne peuc pas les depofer. Lorfqu'ils font accufes de malveifation dans leur Office, le proces s'lnf-truic en Parlement , & ils font jiigcs a la Barre de la Cliambre des Pairs. Cefl: ainfi que la Grande-Bretagne met ies Magiftrats i I'abri de I'influence de Tautorice du Roi.. La Compagnie Angloife voulaut acquerir dans rinde la puilTance de juger , reprcfenra au Souverain : " qu'e//e avo'u adminißre la » juflke avec tant d'cxaciltude & d'equitc » dans fes Faftories de I'lnde , ainfi que H dans les autres places renfermees dans les « diftričls que lui accorde la Chartre , depuis i> le Cap de Bonne-Efperance jiifqii'au De-33 troit de Magellan, que les Sujets de la » Grande-Bretagne, ainfi qi:e les Sujets des »> autres Princes & les Natureis des pays adj) jacens venoient en foule s'ctablir dans fes « Fačtories j que pat ce moyen la plupatt de » leurs ctablilTemens , & fur-tout ceux de w Madras & du Bengale , etoient devenus » trcs-peuplcs ».. A pees ce preambule , qui ne contenoit peut-ctte alors rien que de vrai, la Compagnie ajoutoit : «■ Quefi on luiaccor->• doit la fupreme puifTance de punir les offen» fes capitales & de juger les affaires effentiel- 1. 3. „ ies, d'adminiftrer la Jnftice, &(l'etabllr deä „ Tribunaux qui veitlafTenc Icntretien d Li „ bon oidre, on augmeiicefoir par-la le coni-» merce de !a Nation &c les revenus de Sa » Majefte t>. L'jfFaire fiu long-tems dcbatcue dan? le Parlement, enfin les Ačtesen faveiir de la Com-pagnie paßeteiit. Elle obtint , la qiiiiizienie aniiee de Georges I, ur.e Chartie qui liii ac-cordoit ce qu eile demandoit. Nous parlerons plus bas des raifons qui Tengagerenc a rcfi-: gner cette premiere Charrre pour en demaii-der line feconde , qui fut fceUee le z8 Janvier de Ja vingr-fixieine annee de Georges fe-cond. Voici les Cours de Juftice Stabiles par au-toric«^ de laLcgiflation d'Anglecerre, dans les principaiix erabliffemens de la Compagnie , & fur-tout dans le Bengale, dont nous par-Ions plus particulierenient ici. 1°. La Cour du Müife. Cette Cour eft coin-pofee d'un Maire & de nenf Aldermans. Le Maire & fepc des Aldermans doivent ctre Sujets d'Angleterre , & ncs dans cette Ifle. Les deux antres peiivent ctre des Etrangers; mais fujets d'une Piiiflance alliee de la GrandeBretagne. Ce Tritunal eft autorife a juger de toutes äu Bengale. Jes adtions d vi les , proccs ou conteftations qui furviennent dans les fimblifTemens de U Compagnie. 11 faiir en exempter les proces enrre les Natureis du pays feiilemqnc. On leur a laifTe le droit de fe juger eiix-memes , i inoins que les deux parties ne fe foumettent volontairement a la decifion de la Cour du Maire. Cetce Cour eft en onrre aurorifee a verifier les teftamens, & a juger les proccs qui regardent les biens des perfonncs qui nieurenc inreftats. Les Legiflateurs de la Compagnie ont en-voye a la Cour du Maire des inftru<£tions qu'elle doit fuivre , & qui determincnt la forme de la procedure & la maniere de pro-noncer. On y procede par bill & par rcpon-fe , comme dans la Cour de Chancellerie en Angleterre.Les Aldermans portent leur ju-gement fur les affaires de la plus grande importance , fans nomnier unjure,ainfi qu'il eft d'ufage dans la Grande-Bretagne. Le Gouverneur & Prefident du Con feil de Calcutta ont droit par la Chartre de nommer le Maire & les Aldermans qui doivent poffe-det leurs Charges a vie ; mais cela depend de beaucoup de circonftances. Le Gouverneur & le Confeil peuvenc depofer un Aidennan, fans la participation de fes Confreres , pour L 4 une caiife raifonnable , done ils font eux feiils les Juges dans l'Inde, On ne peilt appellee de ia Sentence de dcpofition qu'ati Roi d'An-gleterre en fon Confeil. La feconde Cour , eft la Cour des Jppels.. Elie eft compofee du Goiiverneiic &c Confeil de Calcutta. Elle eft chargee pat la Chattte de Juger difEnitivemeiic de tous les appels qui fe font de la Cour du Mairc, dans les cas oii le fond du ptoccs n'eft pas de plus de mille pagodes , c'eft-a-dire, d'envircn quatre cent livres fterlings. Lorfqu'on plaide pour une fomme plus confiderable, on appelle de la Cour du Maire au Roi ^ 4 fon Confeil, fi toutefois rAppellänt donne caution pour le payement' de la fomme adjug^e, Tinteret de la fomme depuis le jour de la Sentence &: les frais du proces. La Cour des Requctes eft la troifieme. Elle eft compofee de vingt-quarre CommilTiires, que choifirent originairemenr le Gouverneur & le Confeil de Calcutta parmi les piinci-paux membres de cette Ville. Ce Tribunal tient fes fcances tous les Jeudi. 11 fuit les Ordonninces & les Reglemens que lui donne de cems en cems la pluralite des Direčleurs de la Compagnie. II a plein pouvoir de juger toutes les adtions ou pioccs dans lefqaels le du Bengale. fond en litige n'eft pas de plus de cinc]| pago-des, c'eft-a-dire , de 40 fchelitigs. Les Com-mifTaires fiegent par tour, &on change lamoi-tie des vingt-quatre Membres tous les premiers Jeudi du inois de Decembre : les plus anciens font remplaces par de nouveaux qu'on elit par ballot. Le Gouverneur & les Membres du Con-feil de Calcutta font aiuorifespar la Charcre a remplir les places de Juges de Paix dans cette Ville , & dans routes les Fačtories qui lui font fubordonnces. lis out le mcme pouvoit que les Juges de Paix d'Angleterre conftitues par Commiilion fous le grand Sceau du Gou-vemcment. La quattiöme Cour eft des j4ßifes j conipofee du Gouverneur & Confeil de Calcutta. Elle eft autorifee a tenir des Affifes ou Seßlüns de paix quatre fois par an dans les diftričts de Calcutta. Le refte de I'annee, c'eft une Coar femblable a celle d'ouir & terminer (1). Les Membres de ce Tribunal font en outre Commiflaires d'ouir & terminer y & charges de juger &c punir les crimes qui • Ci) On donne ce tiora en Angleterre a un Tribunal particulier. lyo Civil ^ Cic. fe commettent dans le diftričt de Calctitra , ou les Fačbories qui font fubordonnces a cette Ville- 11 faiu en exceptcr feiilemem le crime de haute rraliifon , fur lequel ils n ont pas droit de prononcer. La Cour des AfTifes & les Commiiraires nommcs pat die , procedent centre les criminels fuivant la forme ufitee cn Angleterie. Lorfque les circonftances le permettent, ils envoyent un 'Wartanc (i) au Sherif (i), ei> le chargeanc de I'exccuter, & d'aiTembler un nombre convenable d'liabx-tans poiu fetvir de grands & de petits Jurez. Ce Tribunal eft aucorife en outre a fairc tout ce que font dans la Grande-Bretagne les Ju-ges de Paix &: les CommifTaires d'ouir & terminer J &c. II peut s'aflembler dans les tems & les lieux qu'il jiige a propos. La Cliartre accorde ä la Compagnie An-gloife & a fes fiiccelTeuts le droit de lever des troupes dans fes etabliffemens; de nonT-mer, pour les commander, les Gcneraux & les Officiers qu'elle voudca ; de faire la guerre , de tuet & inaflacrer -quiconque oferoit en- (i) Un Decret de prifc corps , d'ajournement perfonnel, ou d'afligne pour etre oui. (i) LeSherif eft encore tlu & inftallc par leGoa-verneur & ]e Confeil de Gakutta. treprendre , de lui porcet dommage , ou de nuiie a fori commerce ou a celui de fes Employes. Lorfque les hoftiUt^s font de-clarees , la Compagnie peut fuivte la difci-pline & les loix d'Auglererre relativement a la guerre, dans tous les cas ou elles feroient nc-cefTaires. Ces privileges accordes ä une So-ciete de Marchands far leurs Compatrioces & leurs Sujets font bien extraordinaires. Dans la vingt-feptieme annee de Georges fecond , on pafTa uii Adte du Parlenaent qui les coii-firmoir. 11 eft intitule r « Aite pour punir la » mutinede & la defection des Officiers & jt SoLdats au fervice de la Compagnie An-tt gJoife des-Jndes Orientales , par lequel fa » Compagnie & fes reprefentans les Prefi-» dens Sč Confeiis de fes differens etablifle->1 mens, font an tori fes a nommer des Cours » Martiales pour Juger les delirs des Offi-» ciers & Soldats, & proceder contre eux » de la maniece fpecifiee dans I'Ordon-3> nance En vertu de la Chartre Royale & des Let-tres Patentes , teures les amendes , confif-cations U peines pecuniaires quimpofenr aux coupables ces differens Tribunaux , font adjiiges a la Compagnie Angloife. La plurality des Direčteurs , les Pr^idens & Confeils peüvent faire, fous cercaines reftridions, des Reglemens & Ordonnances pour I'adminif-iration Sc le gouveniement des Tribunaux dont nous venons de parier, & ils peuvcnt «ufli ftatiier des peines contre ceux qui offen-(eroient les Membres qui les compofenc. Outre ces differentes Coiirs crablies par la Chartre a Calcutta , il y en a deux autres qui furent creees autrefois pat une permiflioti ex-prelTe ou tacite du Mogol & des Nababs du Bengale, lorfque les Anglois ecoient depen dans du Gouvernement du pays. Avant que la Compagnie eut re^u d'Angleterre le pouvoir de juger dans fes difFerens erabli fie mens, elle n'avoic d'autres Tribunaux que les deux done nous parlons ici. L'un eft/a Cour de Cutckerrie. Ce Tribunal eft compofc de quelques Employes de la Compagnie. II eft chargc de juger routes les caufesen matiere d'interet, qui furviennent entre les Natureis du pays feulement. I! s'afTemble a certain jour qu'il fixe lui-meme.Sa manierede procedeE eft eres - Ibmmaire. Les deux parties convo-quees , ain/i que leurs temoins refpečiifs, la Cour entend les accufations&les defenfes qui fefontdevive voix, &prononcefutle champ» On appelle en definitive de la Sentence an Couverneur & Confeil de Calcutta. Excepts ■dans les matieres de la plus grande importance , le cas dappel arrive rarement, parce qu'ordinairement les conteftations fe decident par des arbitres choifis par les parties ou de . leur confentement, & la Cour de Ciitcherry ne fair que confirmer ce qu'ils ont juge. Dans les cinq Tribunaux ci-delTus, ttois des Membres fuffifenc pour prononcer. L'autre Cour eft appellee , Cour du Zemindar ou du Fow^dar. Elle eft prefidee par uii Membre du Bureau du Confeil, ou quelque-fois par un Employe inferieur. Sa fonČtion eft de juger les procžs criminels parmi les habirans du pays, dans les cas oü ils ne choi-.firont point les Tribunaux de la Compagnie pour arbitres de leurs difFerends. On a vu plus haut que les loix de TAngleterre fur l'admi-niftracion de la juftice ne s'obfervent parmi les ladous , que lorfqu'ils s'en rapportent a leurs decifions. JLa Cour du Fowzdar procede d'une maniere aufll fommaire que la Cour de Cutcherry. Elle condamne les delinquans k l'amende, a la prifon, a travailler enchaines fur les grands chemins pendant un certain efpace de terns, ou pendant route la vie, &c dans les caufes capitales a crre fouettes juf-qu'a ce que mort s'enfuive. Les ancieys Mo-gols & les Nababs ne permettoient pas que les 174 Civil, &c. fečlareiirsderiflamifme fudenr pendus, ainft qii'il eft d'ufage dans la Grande-Bretagne. He rcgardoienc ce fupplice comme trop ignomi-i nieux pour im Mahometan. Lorfque le cri-mine! meritoit la mort, ils le faifoient expiree fous le foiiet. Les bourreaux de la Couc font fi habiles & fi adroits danS leurs metiers , qu'ils font moiirir le patient dans deux ou trois coups (i). Ce Tribunal, qncique com-pofe d'Indous, depend rellement duPrcfident &c Confeil de Calcutta , que le Zemindar de-mande fon approbation avant de faire execu-ter une Sentence de mort. 11 y a dans le Bengale une troifienie Cut-cherrie , appellee Cutcherrie du Collecleur. Ellc a ^re ecablie a Calcutta depuis que la Compa-gnie eft devenue proprictaire des terres. Le Nabab JafEer Ally Khawn j par le Traite de 1757s accord a ä la Compagnie Angloife routes les terres des environs de Calcutta dans une ctendue de ^oo verges (i) au deld du fofle des Marattes (j), & les 14 pergunnahs fitues ■ (i ) Le fouet dont ils fe fervent eft appelle ChiNf-buek. ii) La verge contient trois pieds de Roi. (.5) C'eft un un foffe que les habitans de Calcutta . pw pMmifllon du Gouverneur & du Confeil, du Bengale. au midi de la Ville. Tout ce diftriö: eft fous la Jurifdidion du CollečVeur , qui eft ordi-nairement un Membre du Confeil , ou un ^eune Employe. Cec Officier charge de la per-ceprion des revenus des 24 pergunnahs, dont il eftSurintendant, a le droit de juger en definitive toutes les conceftations qui furviennent dans ion arrondifTement. II a en outre une parcie de l'adminiftrarion de la police de Calcutta. Ii pafle les baux des maifons 6c des terres de la Compagnie aux habitans du pays • ü veille a rentrecien & alareparation des chemiiisj ilac-corde aux Indiens la permiflion de fe marier. Comme la Compagnie exigeoit fix roupies fic-cas a chaque mariage, il perici t ce droit, ainTi que ceux qui font impofes fur la venre des Ef-claves & les Sloupes nouvellement batis; les grains qu'on tranfporte dans les greniers publics, & fur les denrees neceflairesa la vie qu on conduit aux marches. Dans le Bengale , ainfl que dans nos pays d'Eutope , on ne peut exercer aucun metier fans en avoir achete le privilege. Les Comnier^ans & les Ouvriers payenc pour cela lau Collefteur une certaine ont creufe a leurs propres frais, pour fe meitrc a Vabri das iticiirfions des Matattes, ^^ Etat Civil, o C, fomnie, on ime partie de leur fal^ire journa-lier. La perception de tous ces i m pots, don ne lieu a beaucoup d'opprenions. Les Collec-reiirs des teires done le nombre eft infini , pillenc & volenc chacun de leur cot^ , tandis que les Siapois , camonnes dans les differen-tes places , ran^onnent les pauvres habitans-On les voir fouvent enlever ime partie des denrces qu'on conduit aux matches. Outre la Cutcherrie priiicipale de Calcutta , il y en a d'autres qui lui font fubordonnees. Le Col-lečteur en chef fait emprifonner, fouetcec ou puiiir de quelque autre maniere , les Fer-miers & Laboureurs qui font en retard pour 4es payemens , ou qui font coupables de quelques delitt- Le Gouverneur & les Membces du Confeil de Calcutta, ou du Comite fecret, compofe des Membres dudic Confeil, ont radntiniftration de toutes les autres affaires relatives au Gouvernement , & a la police du pays. La Coat des Diredteurs a donn6 depuis peu a ce Comite des pouvoirs qui le rendent ind^pendant, & mcme fuperieur au Confeil. 11 n'avoit d'a-bord ec^ cree que pour conduire fecretement les operations politiques & militaires de la Compagnie j mais afin de fervir fes vues par-ticulieres, il a outrepafTe les bornes de fon pouvoir, pouvüii: en ^tendant fa jurifdidion fiir routes ies affaires commer^an'.cs, civiles & criminelles. Sous pierexte de cjaelque nJceJfud Jicretre j il aoit arbirraiiemenc , fans s'em-barniflet delcqtTicc. Le Gouverneur qui commande en chef roiices les forces de la Compagine, eft rou^ jüiirs Prefident du Comite fixerer, ainfi que de tous les aurres. D'aüleurs, par les regie-rtiens ctablis'pour le fervice de la Coinpa-giiie, c'eft la feule perfonne d qui la corref-poiidaiice avec les Princes du pays foit per-mife. 11 en prijfenrc la fubftance nu Coniir^ ou Confeil dans le tems & la forme qui lui plan, fans etre rcprimč cenfure par qui que ce foir. Les praendus Nababs du Bengale, c'eft-i-dire, les Colleclciu-s de la Compa-guie , nc connoUrcnt d'autrc aucorite que cells du Gouverneur de Calcutta (i). lis exccutent (i) Dans wie Lettre de deux Membres du Con," l';;il a la Cour des Direäeurs, datde du Forr Wil-liim , Ic 14 Janvier 1766 j autkeniic P plaindre. Miltres abfolus de tous les OfEciers du « Gouvernement ^ ils n'ont qu'a parier pour fatis-» faire leur reflentimcnt, & ils font obeis. Com» mc ils ont feuls h correfpondance avec le Mogol j •• les Nababs, & les autres Employes fuperieurs, » ils peuvenc donner verbalement ou par t'crit ies M ordres pardculiers qui leur plaifent; .on ne man" que jamais de les cxccuter. Telle eft Tautoritc » du Gouverneur fur les habitans du pays ; les Su" jets appbudißent avec empreflement a tout ce •> qu'il juge a propos d'ordonner. II peut difpofer arbitralrement du commerce & de la fortune de " vos Employes , ce qui nous paroJt un pouvoir » tres-dangereux n ariange les affaires des Tribus des Indous: il les chafTe de leurs Caftes, de leurs families , de la fociete de leurs amis , lorfqu'il croir que ie fervice de ia Compagtiie exige cetre feverirc. Les families qu'il a fletries, font pour jamais feparees des autres j qutcon-que oferuic les frequenter , manger & boire avec elles, encoureroit la meme infamie. La tyrannie & la fuperftition font aliez encore plus lüin ; perfonne ne pent les toucher, meme par megarde, fans etre condamne a une ablutioa expiatoire dans le Gange. II faut connoitre les principes & les prejuges leli-gieux des Gentils, pour fentir toute Timpor-tance de cette autorite du Gouverneur qui la. dclegue ordinaircment a fon Banian (i). y (i) II eft propos d'apprendre au Leäeur ce que c'ell qu'iin Banian, puifque cette claffe d'hommes joue les priiicipauK roles dans Tadminiftration de toutes les affaires poliiiques ^ civiles & commer^an-tes de la Compagnie Angloifc dans le Bengale. Les Banians font les entiemetceurs les Ageiis du commerce. Cell ä eiix que les Anglois ont affaire dans tous les marches qu'ils contraftent avec les Negocians du pays. Les Banians qui ne travailient pas pour eux-mcmes, fervent d'interpretes, de Te-neurs de Livres j de Secretaires, de Courtiers, de Caifliers , &c. lis font ordinaircment tlepofifai^ss M 1 La Compagnie, & en fon nom le Gouver-iieiu- SrCoiifeil de Calciltcn , prctendenc eii outre que la Chartre lenr a accordc le droit de laifir par forcc dc fans atictiiio fbime de proces legal, les Europtens qui habirenc danS I'Inde, de les envoyer puifonniers en An-gleteire, s'ils refafenc d'y aller volontaire-nieiuapi'esqii'oii leui-cnufignihe I'ordre. Nous dc cons ks fecrets de leiirs Maiti'cs. lis ont i'liiten-dance gcntrale de couccs Iss affaires des Marcluiids qtii les cicimenr ä kur gnge. Charges de l'infpedtioli des Domcftiques ou Employes iiifirieurs ^ its rcpon-dent dc leiir fidelitc de leitr conduite. lis goiivcr-iient a Icur grc- I'efprit dc Icurs Maicres. Les Indens & les Europeens ne pouvaiu pas entei^lrc mu-tuellemenc leur laiigagc , ces Agens font devenus ntceffaires. II y a crts-peu Ac ^•^al■ch.^nds d'Europe qui aieiit a(fei de connoifT.iiice de la Laiigue du Bengale pour fe pafüt de Batiians. Depuisqucles Anglois ont acquisde rautorite& de I'infiuence daiis le Bengale ^ [plufieurs pevlbniics des metüeiires families Indienncs , fe font mis au fervice des Employes fupcrieurs de la Compagnie ^ cii qua-lite de Banians. II leiir arrive fouvcii: de payer uiie certaiue fomme pour obtenir ces places. Leur polle eft veritablement^trcs-avantapeux j ils peuvent alors faire u!i commerce qui leur feioit dcfendu (ans cela-P'ailleiirs ^ au moyen des Diiftucks dc leurs Aiaitres, it font des trafics particuliers fans payer de droirs. avons vu aüleui-s que laCompagnie & fes Em-pioyes excciuenc ce pietendii droit d'iine ma-niere aibitraire, &c mhne concre Jes Magif-trars de la Ccut du Maire, fans que perfontie pLTiflfe s'y oppofer. Apres avoir espofe l'ccat des Tribunaux ecablis dans le Bengale pour l'admini-ftration de Jullice, les homes de leur Jurifdičtion , & le pouvoir qu'ils fe foiu atroges, nous alions fiiire quelques rcflexiojis fiir cette ma-tiere , en les appuyant par des fairs. Par la Charrre de la tieizieine annce de Georges premier j la Cour du Maire pouvoic choifir elle-nieme fes propres Membres. Tant qu'on fuivir mie pratique aiifl) rage,ce Tribunal fur indcpendanc, Sc dc-fendir efScacement la propriece de rous les hnbirans du pays : il em-pcciioir de faifir & d'envoyer un Anglois pri-fonnier dans la Grande - Bretagne, fans lui avoir fait fon proccs. La Compagiile fentit bien que des Juges dont eile u'avoir pas la nominarion , nuiroient a TaHtorire fans bornes quelle vouloic acqucrir. Elle fe plaignit aiors de la premiere Chartre , & Ion vine d bout d'en obtenir imo fecondc la vingt-fixieme aniice de Geoiges fccond, qui chan-geoit ia claiife fjipicale qu'elle avoit eiivie d'abroger. Lc droir d'clire !es Aldermans de M -5 la Cour All M.iire fut transßrc nu Gouver-rteiK ^ Confeil de Calcutta, qui par-li de-vinrent Ics m»itres detablir & de rcvoquer les Jiiges a leur volonte. La Cour d« Mnire eft compofee d'Em-f!oyes de Li Compagnie 8c de Marchands U-bres. Les Aldermans qui ne foric pas Employes de la Compagnie , Sc qu'on juge favo-rahles aux projets du Gouvernement (i) , resolvent ovdinairementduGoiivernenrdesDuf-tucks, au moyen defquels ils font iin commerce particuliet fans payer d'iinpors. 11 faur remarquer que le falaire d'un Alderman n'eft que de vingr cinq livres fterlings par an ; fom-ine qui fuffit d peine pour payer un mois du loyer de fa maifon a Calcutta. Le Prcfident & le Confeil qui compofenc la Cour d'Appel J prononcent dcfiiiitivement dans tons les cas ou la fomnie en litige eft de moins de quarre cent livtes fterlings. Si la Compagnb & le Gouverneur & Confeil fe trouvent intcrelFcs dans ce proces , ils font Juges & Parties. Les habitans dii pays iie peuvenc efperer qu'on leur rende juftice , z (0 Phrafe employee par les Direftciirs de la Compagnie Angloife- moJns qu'ils ne plaidenc pour une fomnie au-delFoiis de 400 livres, ou qu'ils ne foient eil etat d'appeller au Roi d'Angleterre enfon Confeil. Mais cetie derniere tefTource eft tres-difpendieufe; TAppeUant s'expofe a beau-coup ti'enibarras&: dedelais ; il encoure la hai-iie des Employes , & enfin il a lieu de redou-ter les efFets rerribles de leur aurorite. Lorfqu'uii Alderman de la Cour du Maire eft depofe de fa Charge , la Charcre lui perinet d'en appeller aa Roi d'Angleterre en fon Confeil. Mais ce droir eft illufoire relative-menr aux Sujets de la Grande-Bretagne. En fuppofint qu'iin Magiftrat dcpofe forme cet appel, & qne la Sentence de dcpofition foit annullee par le Confeil du Roi , les loix ne permettent pas aux Anglois d'aller dans l'Inde fans u!i privilege de la Compagnie, & la Ciiartre ftipule d'aiileurs exprelTement, que h Lin Alderman efi: abfent de Calcutta pendant I'efpace d'un an , fon Office eft uiiifif-que. Si la Compagnie lui refufe le pailcpott dotit il a befoin pour fon voyage, il doit in-tentet un proces a ce Corps puilTant pour le forcer de le lui accordet. Lorfqii'il I'aura ob-tenu , & qu'il fera de retour dans l'Inde , le Gouverneur poiirrn le renvoycr, fous pretexrc qu'il a. etc abfent trop long-tems. Quoique M 4 fon abfcnce :iit ect; ntceiraire, l.i Compagiiie ^ fon Gouvcnieiir ftioac le makre «.le le ba-iocei- ainli fans fin , tie Tlnde en Anglctetre , ^ d'Aiigleteirc dans riiiJe, La Cour des RequCres , für ilaqueUe U Compsgnie n'a pL-cfqiic aucune iiiriuence, eft le feul Tiibunal qui cffire des fecüii.rs aux mal-Iieiirenx liabitnns de Calciitca. Comme jes MemK-es font tins pai" ballots , que fa Jurif-dičlion lie s'fceiid que fur les pioccs dont I'objct eft; au-delFtJUs dc 40; fthclings , le Gouvcnieiu- & le Confeil ne peuveni; gučres fc mcler de fes vpcratipiis trop pcu iiupor-tantes, -• Le Gouverneur & le Confeil ecanc les fouls Jtiges dc P.iiv , ils refufent faiiveiic d'eiueu^ dre les piaiurcs legitimes qn'ou leur adrqffi; avec fetmenr, lorfmie eux ou la Coinpagnie y foiu iutereflcs. Qiund on tient les Affifes, i!s arretent le cours des procedures ,/fu4;-_les plus frivoles pretextes (1), 011 lis renVoycnt (i) Qiielquefois ils re^oivent des Lettres de leurs meilleurs amis qui s'excufent de ne pas leur rendre vifite, dans la crainte qu'on ne connoilTe qu'ils fre-quement leurs maifons. Ce que nous venons de dire de radmlnif-tration de la Juftice & des Tribunaux crablis a Calcutta, eft de la deriiiere exadicude j & tons les Le£teurs peuvent reconnoitre a prefenr, qu'H eft ridicule d'efperer que les ofFenfcs puifTenc jamais obtenir juftice dans reus les cas ou le Gouverneur & Ic Confeil font interefTes , aiiifi que dans tous les autres , ou il leur plait de s'ingerer. Le Gouverneur & le Confeil de Calcutta font Juges fuperieurs de touces les affaires civiles & criminelles ; ils noinment & depofent a leur gre , le Maire , las Aldermans , les She-rifs & tous les autres OfEciers ; les Natureis du pays , les grands & les petits Jures , font veritablemenc leurs efclaves. II n'y a pas dans tout les Tribunaux uti feul Juge qui ofe de-plaire a uii Employe fuperieur de la Compa-gnie. II eft vrai que par un A£te de la vingt-fepticme annee de Georges fecond , il eft fti-pulc expreiremenc, que fi quelques-uns des >* Gouverneurs & Confeils de la Compagnle » fe rendent coupables dans I'lnde de quel-« ques oppreflions envers les Anglois, ou s'ils » commecrenc quelques crimes ou delits " contre les loix de la Grande - Bretagne, la - Cour du Banc du Roi ou des CommilTaires i8S Etat G vi/, (sc. rt nommčs par Sa Majeftc , ont droit „ miner ces opjircUjotis , crimes on dčlitff,' » &'d'infliger anx dclihqnants les charimcns ». qu'on dčceine en Atiglecerre conrre les of-5> fenfes de meme nirure ». Cet Adte a ete confirmč pnr iin aiirre clc la cfixietne annce de Georges III , .ivec cecce claiife nouvello. « Qtiiconque n'cxccutera pas cet Afte iliiis >1 route fa teneiu", feni enteivJu & jiige par » JesJiir^s lUiCoiiitede MidJlefex. Les Dc« fendeurs dans cetteačlion aiirontneaiimoins » la liberCede doniier leurs defenfes par ecrit J? fix /ours avant le jLigemenr du proces 11 femble d'abord que cec Ačte prcfenre uiie reffource afTuree a rous ceiix qui onr a fe plaindfC de I'oppreflion; mais en examinant la mariere de pkis pres , on verra qu'il leiu* eft prefqiie toujoius impoflible d'en joiiir. La diftance des lieux , & les aiures obftacies donr noil? avons parle plus hant; la longueur dii terns & les depenfes nccelfaires pour fui-vre line pareille enrreptife, otenc aux offenfes les moyens de venlr demander jiiftice en Angteterre. En fuppofant qu'ils y arrivent, Taccufe ne manquera pas de dire qu'il a des fecrets que pour* le bien de laCompagnie il ne peut reveler 5c confier a perfonne ; qn'ii doicaufli ceinparoiuc d Londtes. Sous difFcveirs pictextes , ilpourra fcjoiirner dans l'Inde plu-fieiiis aiinces , ou mcme sct.ibhr en pays ctranger. Quand lacciilareui- feroit affez lieu-reax pour faiie comparoitre foii adverfaire de-vaiic le Tribunal, il leioic alors expofe aiix plus grandes difficultes pour piouver le de« lir. Les loix d'Anglecerre veulenr qu'il foit conftate de vi\'e voix , & d'utie maniere evidente. Les Natureis de Tlnde font ordinaiie-ment les tcmoins principaux dans ces protus. S'ilctoit podlblede les engager,poiir arccftei: la vcritc, a faire im long voyage dans des contrces dont le climac leur eft niiifible, leiirs principes reiigieux les empccheiit d'ailleuis de forrir de leur pays.. Les Indous norenc d'infainie ^ chafTenc de l^ius Garthes quicotjqpe abandon-ne fa patne , mcme pouc un tenis. L'expiil-lioa de fa Tvibu eft .un chacinient quils redoiuent plus que.la mote. La partie ofFenfee fera done obligee , pöui- dsiniene reiTource , de demander qu'on envoy e des CommifTaires dans i'lnde , afin d'exaniiner fur les l.iehx fi fes p lain ces font fotklees.iSi on venojt a:hoiic dü fLumonter. toiit.es les-diificulccs cfiii s'o[}-. pofei'oienr a ce prpjet,;le jiigenienc de la caufc feioit lenvoye i plufiems annces. Lorfqijetles Conij-n ifTaires ferone dcbarqucs, day? lijBen-v--gale ,, Acs- tcnioins leruuc ..i -a-' jC t-' h la partie du pays qu'on appelle les doniaiiies du Nabab , & il fera facile an Gouverneur & Confeil de Calcutta de les y t«?nir caches, d'at-rcter&deluder I'exicurion de la cotirniillion. Comment pour obrenir la reparation des dommages qu'oft a foufferts, des maiheureux qui n'auronc pas une fortune immenfe , pour-roiit-ils fuivre un proces qui demande taut d'appareil? Les opprimes n'ont d'autre parti a prendre qua fouffrir toiites les vexations , fans murmurar ni fe plaindre. Nous avons vu que la Chartre & les Aftes du Parlement n'accordenc de jurifdičtion a laConipagnie que dans I'etendue de letablif-fement de Calcutta 5c de quelques Fačlories qui lui font fubordonnees ; c'eft - a - dire , fur les petits cantons que le Mogol & les Nababs lui ont accorde anciennement. Elle I'exerce pourtant par elle-meme & par fes Subftituts, fur routes les Provinces des Nababs dont alle percevoit les revenus , fans que les Princes du pays puiiTent reprimer fes operations. Depuis I'acquifition du Dewance, la Legiflation d'Angleterre les a toujours re-gardees comme independantes de la Compa-gnie , 8c eile ne lui a point accorde de nou-velle Chartre qui lui permerte d'y etablir des Tribunam pour I'adminiftration de la Juftice civile & criminelle. Les Anglois libres & les Indous qui pe«. vcnc encoie entreprendre quel que. commerce dans le Bengale , le font fur-tout dans I'inte-rieuc du pays , ou la Compagnie n a pas droit fuivanc JaChartre, d'erendre fa Jurifdidtion ; (i) cependant les uns & les autres y fouffrenc la tyrannic de la Compagnie & de fes Employes , fans pouvoir implorer la Juftice des Nababs. Lotfqu'ils ferment des plainces, le Gouvernement de la Grande - Bretagne , qui s'obftine a regatder les Princes du pays com-me iiidependans , repond qu'il faut s'adrefTer i eux pour obtenir la reparation , puifque c'eft a eux qu'il appartient de juger les con-teftations qui furviennent dans leurs domai-nes. Les grandes vexations ne peuvenr provenir que des Employes fupcrieurs de la Compagnie qui one beaucoup d'autorite. L'infortune qui en eft la vidime , & qui voudroit dc-noncer les concuflionnaires i la Juftice , au-roit a lutter en Angleterre & dans I'lnde , contre un Rival riche & puiflant. Parmi tous les liabitans du Bengale , qui font dans une (0 Nous parlerons plus bas des monopoles dcf-tručtcurs ^tablis par les Sabftituts de la Compagnie, aprcs I'acquifition du Dewanie. ti tat Civil ^ (i C. (jeptnd.ince entiere de la Compng;nie , y eit aiir.1 C il beaucotip cjui voiidront ait^er lop-prim6 a obtenir juftice? 11 efl: doiic trcs-c-vH dent que les loix Ac la Grande-Brccagiie ne lailfenr aiix AngUns du Bengale, aucun afyle contre les Tyrans qui agiffent au nom'de k Coinpngnic. Si les Anglois qui vont y refi-der , lone expofes a cons ces maux , combieit le fore des Indous doit-ii trre tncore plus dur ? Le Gouveiiiemenc de la Giatidc-ßretagne eft cependanc intereflc a prot^ger ces hommes doiix & paifibles, puirquec'eftdeleuriiKliidfie qu'elle tire les avantages de fon commerce da Bengale, & qu'elle en attend de plus grands encore par ia fuire. Dans rctabiHTement de Calcutta, les Mem-bres duConfeit, qui font revecus de plufieiirs Charges a la fois, peuvenc prendre aux ycu.x; des Natifs qui ignorent les loix d'Angleterre , Je caračtere qui convient le mienx a leius deffeins particuliers. Ainfi , quand il leur plait, lis renvoyent le piaignant du Confeil-ler au Jnge de Paix, du Jnge de Paix alix Cutcherries'du Zemindar, Sc du Zemindar au Coniite fecrer. ..Tous ces Magilirars tone engages par.ferment a ne pas revelex les fecrets de^lfcuvs Tribunijux. Si toutts ces trapafleries: ne fuffifenc pas poiir arrL'ter les potufuites, lis one ont une derniere retTource , qui eft de ren-voyer le plaignant au Nabab, bien sür qu'il n'en obciendra rien. L'Auceur pourroit citer un grand noinbre d'exemples de tous ces pro-cedes. Ceil: ainfi que tout le Bengale , fans etre protege par les loix d'Augletetre, ni par les loix dti pays , eft devenu la proye d'un ou de plufieurs Employes de la Compagnie & de leurs Banians. Les Indens font reduits a un tel etat d'avilitTement & d'efclavage , que malgre leur jaloufie, les Anglois eiilevenr fou-vent leurs femmesj fans qu'ils ofentou qu'ils puifTent fe plaindre. Les ravifTeurs font trop puilTans pour qu'on les appelle en jnftice, & il n'y a point de Tribunal ou on foic fur de lobcenir. Nous allons dcmonrrer par des fairs ia ve-rite de toiites ces afTertions. L'Auceur fe bor-nera a ceux dont il a une parfaite connoif-fance, & dont il pourra donner des preuves convaincances. Nous coinmencerons par lit Cour dii Maire. Un Marchand Armenien, nomme Parfeck Arracoon ayant ete la vidtime d'une oppreffion criante dont nous parlerotis dans le treizieme Chapicre , intenta le 15 Septembre 17^7 une ačtion pardevam la Cour du Maire , Tome I. N ij>4 ^tat Civil ^ ^C. contre les Gomafthas ou Agens du Gouverneur Henry Verelftßc de Francois Sikes, pour uns fomme de ^0,431, roupies courantes (1), monrant du fei qu'on avoit enleve par force des Magafins du Demandeur. Au mois d'Aout 17 il n'eft pas poflible de prendre des moyens qui previennent efficacement I'in-fluence du Gouverneur Sc du Confeil fur ce Corps, Tout depend de la confcience & de l'integrite des Magiftrats. Lorfqu'ils commet-tent des fauces par pure ignorance j on doit les excufer. Ce font des Marcliands qui n'onc pas etudie la Jurlfprudence. Si le Gouverneur & le Confeil les noniment Aldermans, ils fonr obliges par la Chartre, fous peine d'amende, d'accepter cet emploi fans avoir, comme en Angleterre , nn AjTefl^r pour les diriger dans les Jugemens qu'ils ont a pro-noiicer. K J I (,8 Etat Civil ^ (ic. On peut voir dans TAppendix de M. Boles un grand nombre d'aurres examples de I'ini-qiiite de ce Tribunal. Oil trouve au XXIV. pag. J 8 , le Memoire de M. Thomas Hamilton. N®. XXV. pag. 40, la Rcponfe de Cornelius Godwin, Maire de Calcutta, a laCour du Maiie. N°. XXVI. pag. 4} , le Memoire d'Alexandre Jephfon , a la Cour des Direc-teurs , avec Ics fentimens de Sir William de Grey, Sir Flecher Norton & Ciiaries Sayer, cet objet. N^. XXVII. pag. 5 5 , le Cas de M. Richard Withal I, avec le Sentiment de M. Dunning. Et XXVIII. le Memoire de Richard Withall, i la Gourdes Direfteurs. Le Gouverneur & les Membres da Confeil de Calcutta , font tout a la fois Confeillers, Membres dii Comite , Jiiges de Paix , Com-miflliires d'ouir & terminer 3 Juges des Appels J Maitres de nommer & de depofer les M.igiftrats de la Cour du Maire, Prefidens des Cutcherries , Zemindars, Colletteurs , DeleS-gues Reprcfentants de la Compagnie An-gloife , Dewans du Mogol , feieaeurs & Juges de TEmpereur & des Nababs, Marchands fir Souverains. lis one foin d'agir en verru de ces differents caraderes fuivant I'occafion. Comme il feroit tres-difficile de fuivre routes leurs bpdrations a cravers ces difFerentes me- tatnorphofes, nous allons feulement en rapporter quelques-unes qui fe prefentent i notre memoire. Le Ledteur nous permetcra de lui rappeller ici que nous ne cherchons a cri-tiquer perfonne en partieulier, & que nous n'avons d'autres motifs que de concribuer , s'il eft poflible, a la reforme de tant de maux. Guillaume Wilfon Voilier, ayant fur urt Membredu Gonfeil de Calcutta une creance de 7 5-9 yroupies courantes pour de I'ouvrage qu'il lui avoit fait, il lui envoya fonMemoire pour er^recevoi^ le payement. Le Confeiller qui etoit alors Zemindar, repondit a Wilfon, que le montant de fon Memoire eroitexorbirant & de-raifonnable (1) , qu il ne vouloit ni le payer , ni le lui rendre j il le menama en nieme terns de le chaffer du fervice de la Compa-gnie , & de lenvoyer a Bencouli (2), s'il (1) II avoit auparavant arrete Ic Memoire , & fait un billet du montant- (2) Bencouli, dans Tille de Sumatra j & Gom-ron dans la Perfe , font regardes comme des lieux mal-fains» & fur-tout nuifibles ä la fante des Europeens. Si le Gouverneur & le Confeil de Calcutta veulent fe debarrsfler de quelques Employes , il les y font tranfporter.'iLorCque dans I'lnde il s'agit d'envoyerquelqu'un aBencouii ou a Gomron ^ c'eft-a-dirCj qu'on veut les envoyer dans un pays trcs mal-fain. N 4 2 00 ^^^^ Civil , &c. perfiftcjjc dans fa demande. Uouvrier ne fur pas intimide de tomes ces menaces, il inreii' ta pardevant la Cour dii Maire une adion conrre le Confeillei'. Le Cr^ancier tres-prii-demment alots confenrir a payer le montant de fon billet, & les ftiis d« procžs qui avoic itc commence. Le Procureur de Wilfon en-voya plufieurs fois fon Banian chez le Con-feiller pour lirev cetre forame. Comnie il ne pouvoit jamais lui parier, il lui fit dire que fi on ne vouloit pas payer fon Creancier , il alloit multiplier les frais en faifant fuivre la procedure. Le Confeiller Zemindar , ir-ticc de certe demande iquirable , fit faifir le Banian par fes Peons & I'envoya ä la Cut-cheriie , oii fans aucun examen & fans forme dc proces, il fut attache a uji poteau , fouetre jufqu'au fang, Sc frappe fur la tete avcc fes fouliers (i) par ordre du Zemindar, qui, a cette occafion , ccrivit an Procuteur de fa Partie adverfe la Lettre fuivante. " Monfieur , j'ai ordonnc qu'on facisfic a » vocre demande. Elle elt fi extravagante, (i) Les Natureis du pays regardent comme un chitimcnt tres-ignominieux j d'etre ftappes fur la tete avec des fouliers. » que je pretends la faire examiner pat la » Cour. Votre Banian a eu I'infolence de me M dire que fi je ne payois fur le champ 1© » billet , vous augmenteriez les frais & les » dommages & interets que vous exigez. Je " Tai envoye a la Cuccherrie, ou il fera traitc j> comme il le merite «. Calcutta ^ U x% Fevrier 17^5. J'ai un autre exemple bien plus extraordinaire de rinhumanite ou de l'injuftice des Jage s. On ne s'attend pas a trouver dans Finde les eprcuves & les combats judiciaires remis a la mode par les Anglois. Une pauvre femme fort ägee intenra parde-vant le Zemindar une ačtion contre une autre Vieille qui n'etoit pas plus riche quelle. Le Zemindar fur embarralTe de dccider laquelle des deux.avoir bon droit. J'ai ete temoin du fait. Le Juge leur ordonnant de decider elles mcmes la queftion par la force de leurs bras , pro-tion^a que celle qui terralTeroit lautre ob-liendroit ce qu'elle demandoit. Un Negociant de Calcutta, nomme Gocul Sonar, fe plaignit d'avoir etc emprifonne fans raifon par un certain NobekifTen, Banian du Gouverneur de laCompagnie; ilajoutoit que fous diffcrens prcrextes , lui Sc fa famille tot Etat Civil y (sc. avoient cte rnaltraices de la maniere la plus cruelie. Le Detnandeur porra fa caufe de-vant la Cour des Aflifes le 4 Mars 17Ö7, par une Requcte au grand Jur^, Ses plaintes ne furent pas ^courcfs. Henry Verelft, qui prefi-doit alors a ce Tribunal, s'empara de la Requere , convoqua les Jurez, 5c leur ordoii-na de ne point pourfuivre cette affaire. II allegua pour excufe que le Demandeur avoir manque a plufieurs formalites, & que l'afFaire devoir etre renvoyee i la Cour du Zemindarar. Gocul Sonar aimant mieux que fa caufe fut dccidee par les Loix Anglcifes que par la Cour du Zemindatat, tächa de fe difculper d'avoir manqui aux formalites. 11 s'adreffa nne feconde fois au Jage de Paix, qui eroit aufli Zemindar. Celui-ci fit d abord beaucoupi de difficultes» & ne vouloit point l'enteudre j tnais enfin il confentit a recevoit fa plainte lö lendemain. La voici teile que le Demandeur l'attefta par ferment. « Gocul Sonar, Habitant de Calcutta, te-» montre : w Que le premier de Pbalgoon ( le pre-» mier Fevcier ) 17^7 , Ram Sonar & Ram » Bania, avec nn Hircarah (i) ou MefTager (0 Hirtarak ^ figtiifie proptement un efpion. Cef du Bengale. ^^^ « de NobekilTen , vinrenc i la maifon du » Demandeur; & que par force & contre les " ioix ils entrerent dans i'appartemeiit des » femmes , difant qii'ils avoient ordre d«n-» lever la Sceitr du D.-mandeiir pour Tufage M de NobekilTeii. Le Demandeur ayant fait j> quelqne relilance, & crie au Dowkay (i), » Jl fut inairrpitc charge d'injures. Le ref» re de la faniilie. yant ete obligee de prendre »> la finte, le Demandeur & fa Mere furent » faifis trautes par force chez NobekilTeti. » Le lenciemaiii Ram Sonar & Ram Ba- diploi n'eft pas avili dans I'lnde comme en Europe. Dans un Etat defpotique cette clafle d'hommes eft neceflairc J 5c Ton ne s'avife pas de meprifer desOf-ficiers qui tiennent de fi pres a la coniHtution du Gouvernement. Tous les Seigneurs ont une certain nombre d'Hircarahs a leur fuite, Dans les Cours de rindoftan ^ le Chef des Hircarahs eft un des princ!-pauxOfficiers. On le charge fouvent des affaires de confiance ^ & on liii donne aufii les emplois les plus honorables. (i) Le Dowhay eft une exclamation qu'emploient les h;\bitatis de I'lnde lorfqu'on leur fait quelquc violciice , a peu pres comme en Portugal & en EfpagnCj on crie: Aquydel Key. Lesmalheureux du Bengale orient fouvent Dowhay Company Saheb.Mii^ •la Coinpagnic Angloife ii'eiitend pas lears plointes. 104 Cm/, &c. » nia, accompagnes d'lin Hircarah , me fi-« rentcomparoltre,ainfi qu'iin de mes freres, „ devaiir NobekifTen, qui ordonna qii'on nous M mit en prifon. Nous ofFrJmes caution en vain , eile fut refufce. Nous lui demanda-n mes qu'au moins i'un des deux fuc mis en 5) libectc, tandis que lautre iroic en ptifon j » mais il ne nous ecouca pas davancage. II » manda fes Pions, qui nous tramerent dans )> le cachot de la Cutcherrie du Collečteur. » On nous fit mettre les fers aux pieds Sc. » aux mains j nous avons paife deux jours M &c trois nuits dans cet etat, au milieu des rt afläflins &c des voleurs. On eut la ctuautc » de nous refufer des alimens, Sc d'empe-M eher que nos parens ne nous vmfTent voir. » Pendant que nous ctions en prifon , Ram n Sonar, & d'autres Valers de NobekifTen , « ont brife par force la maifon du Deman-» deur 5 & enleve fa Scrur pour la csnduire » a leur Maure, qui la tint renfermce chei 3> lui pendant une nuit , Sc la viola. Nobe-j> kiffen nous fit titer de prifon pour compa-» roitre derechcf devant lui. En forrant de »J fa maifon, nous fumes reconduits dans la " ptifon des Hircarahs, vis-a-vis I'Hotel du « Gouverneur. lEnfin , apres nous avoir fait " conduire de prifon en prifon , il nous a re» laches. » Le Demandeur porta fes pUintes Ig ^ » Mars 1767, devant la Cour des Affifes, » qui fe tenoit dans la Ville de Calcutta. » II prefenta fa Requete au Chef des Jmez, » qm la remit au GreiEer des Juges dePaix. » Elle a pafle devant la Cour des Affifes ; mais on n*a fait aucune attention a la plainte du M Demandeur. I» Le 17 Mars, quatre Pions vinrent ä la )» maifon du Demandeur, faiflrent fon frere »• fans aucun Warrant legal, & le conduifirent » chez Nobekiflen , qui fans deute vouloit » rintlmider, ffc artker par la violence les w pourfuites que nous voulions faire. Ceux « de nocre Cafte ne veulent plus s'afibcier » ave nous. Comme tous les ptoccdes ci-u delfus font tyranniques 8c contre les loix, infultent a la Majefte de nocre Seigneur le » Roi , le Demandeur, qui n'a pas d'autres » reffources pour obtenir juftice , fupplie t» humblement qu'on expedie un Warrant j f> pour faifir Nobekiflen & fes complices , w coupables des oppreffions qu'ils nous ont » fait füuffrir, afin qu'ils foient juges i la Cour des Affifes. Signe'j Gocut Sonar. Kifno Sonar, frere du Demandeur, attefta pac ferment les mcmes fairs, lis imaginoient que fuivam les loix d'Anglererre , on alloit leur rendre juftice , & qu'ils obtieudroient la leparation des injures & des dommages qu'ils ivoient foufferts: ils s'apper^nrent bieii-toc qu'oii n'avoic point expedic de Warrant, & qu'on n'exigeoit aucune caution de I'Accufe. Comme on ne prenoit aucun moyen pour verifier fes preuves a la tenuedes AlliJes, Gocul Sonar alia trouver un Juge de Paix, qui le menama du Cliawbuck (i), en lui difant que la Cour des Aflifes n'avoit ilen a voir dans fon affaire, Sc qu'elle ctoit renvoyee i la Cour dix Zemindar. Nous expliquerons plus bas les raifons fe-cretes de rant d'injuftices. Le Juge de Paix s'ap-pelloit Ffloyer, & etoit aufli Zemindar. La Re-quete de plainte fut renvoyee de M. Ffloyer, Juge de Paix (i), a M. Ffloyer, Zemindar, (ij Fouet dont on fe fert dans les Cutcherries pour putiir les criminels. (z) Afin de cacher a iaCour des Direftcurs Tini-quite de fa conduite, 5r fauver au mo ins les appa-rences , le Juge de Paix, de Tavis du Confeil de Calcuti, publia TAfl« fuivant. " Au mois de dernier j tcms oü je conrre k teneur exprelFe de la Chartre de Juftice & la volonte du Demandeur. Gociü » faifois les fončtions de Juge Sc de Zemindar, le - Prefident des Jurcz me remit unc Requete de H plainte prefentes a la Cour des Affifes , par uti » certain Gocul Sonar contre Nobekiffen , cn mc M chargeant d'cxamlner TafFaire comme Zemindar. » En atteftant les Jcpofitions que j'avois re^ues ; je » Fai ßgnee comme Juge de Paix , au Heu. de La ßgntr » comme Zemindar, Je'ne m'apperfus de la meprife que « le lendemain au matin. J'en avertis le Prefident en » le priant de faire d'aiUeurs des informations, » auprcs des Officiers de la Cutcherrie , qui font les • feules perfonnes que j'ai employees dans tout " I'examen du proces. J'efpere que ma declaration » qui a ^te mife fous les yeux du Coiifeil de Cal-" ciitta , ainfi que les Regiftres de la Cour du Zc-» mindarat, donneront des preuves convaincantes » que i'ai agi dans cette affaire , comme Zemindar » fculement , & noa commt Juge de Paix 33, M. Ffloyer crut que cette declaration fuffiroic pour tromper la Cour des Direčieurs ; mais afin d'appercevoir la finilite de cette excufe, le Lečieur voudra bien remarquer que la premiere Requete de plainte qui fut remife ä M. ffloyer, le 4 Mars 1767 , n'a aucun rapport avec celle dont ii eft ici queßiouj datee du 2i Mai 1767 : le Demandeur n'ayant pas pu obteuir juftice de M. Ffloyer Zemindar j s'adrefla a M. Ffloyer , comme Juge de Paix , afin que fa caufc füt portec aux Aflir«. io8 ^tat Civil ^ Sonar ne pur obtenir juftice ; il eut beau demander copie des procedes de la Cour telativement ^ fa Requete & ä fon afFai-le, il ne put jamais en avoir communication. Le cas fuivanc n'eft pas moins extraordinaire que ceux qu on vient de voir. On a deja dit que le Comite s'arrogeoir route ef-pece de jurifdidion, meme dans les marie-res criminelles. En confequence de ce pre-tendu droit, il emploie la force militaire , pour faifir & emprifonnfir les Officiers des Nababs , ainfi que les principaux Marchands du pays ; il les prive de la protedlion de la. Compagnie 5 il les condamne au banniCTe-ment, fans aucune forme de proces , dans les cas oü leRoi d'Angleterre lui-meme ne pour-loic faire ni Tun ni l'aurre. [ On peut voir dans I'Original Anglois un derail afTez long des violences & des cruautes exercees par la Compagnie conrre un Marchand Noir , nomme Ramnaut. Le Traduc-teur a cru devoir fupprimer cer endroir; il fe conrentera de rapporter ce que dit M. Bolts a la fin de ce paragraphe. ] Une preuve demonftrarive que Ramnaut ^toit innocent, c'eft qu'enfin apres trois ans de de prifon , il fuc renvoye abfous, fans lui infligeat aucune peine. En fuppofant que Ramaaut eüt ece coupa-ble, rien iie peut excufer la maniere dont oa pioceda a fon cgatd. Ii falloic lui faire fon proces fuivant les loix, entendre des temoins, & le coiifroncer avec eux. Tous les precextes qu on invenra font abfuides & inuciles. Ii etoit contre route cquicc de refufer a ce Matchand les moyens d'obcenir juftice, & de renvoyer d'abord le jugement de fa caufe a deux üu trois Membres d'un Comite clandeftin, qui font engages par ferment a ne pas divulguec leurs operations , puifqu'il avoir choifi pour fes Juges ies Jures fiegeanc publiquemenc fur le Tribunal des Aflifes. C'eft ainfi qii'on execute la Chartre qui permet aux Natureis de rinde de s'en rapporter aux loix d'Angle-terre, Sc de choiftr, pour ladecifion de leurs proces, les Tribunaux de la Compagnie qui leur plairont davantage. Le'Cornice etoit vc-ritablemeiit l'accufateur, le Juge & le tycan deRamnaut; dans taute cettemanoEuvre ccne-breufe, il n'avoic d'aucres motifs que de ca-cher aux yeux du public de petites operations fecrettes, que des plaintcs ponees pu» bliquemenc contre NobekiHTen , fon Baniau Tome I. O ^ celui du Gouverneur, auroienc pu reveler. C'eft pac la mcme Taifon que la Requere de plainte de Gocul Sonar , dont on a parle plus hatit, fut fupprimee (i). L'exemple foJvant donnera une preuve encore plus fr:vppante de la maniere donr le Gouverneur & le Gonfeil de Calcutta fe fervent des Nababs comme de vils inftrumens pout opprimer les habitans de l'Inde. Certains Marchand« Armeniens , d'une prebite & d'une reputation connues , faifoient paifl-blement leur commerce dans les domainee du Nabab Sujah al Do-wlah , ficues fur la fron- (i) La Cour des Diredtcurs eft d^pofitaire de tous Jes papiers reUtifs aux affaires de Gocul & de Rani-naut. Si Ton penfe que l'Auteur de cet Ouvrage les a d<*giiifes ou älteres dans l'expofition qu'il vient de faire , on prie la Compagnie de les mettre fous les yeu* du public pour l'hönneur de fes Employes. Elle devroit richer du mölns de jufti'fier les Tribu-naux ecablis par la L^giQation d'Angleterre. Nous ne craignons pas qu'elle accepte !e dcfi j quotque k bon ordre dernande que le public faife juftice de tous ceux qui one ainfi malcraire des innocens , & que la Compagnie temoigne publiquement le jufte telTentiment done eile eft p^nccrde cor.ttc les prin-■cipaux coupablcs. tiere du Bengale (i), comme ils nuLfoient aux monopol es particuliers dti Gouverneur & de quelques Membres du Confeil, on crut qu'il ecoit a ptopos dy mectre ordre. Les troupes de la Compagnie les faifirenc & les condui-firent en priibn , fans les accufer d'aucuii crime. Us ne furent point inrerroges , 8c on ne leur confronta aucun cemoin. Puif-< de bon coeur a routes les loix du pays. » Depuis un tems immemorial, les Grecs, i> les Georgiens, les Turcs , les Perfans , les " Tartares , les Cachemiriens , les Arme» niens , &c. commercent dans l'lnde. Les »1 Nababs du pays fentant les avantages qui » en refulcoient pour eux & leurs Sujets, ont » toujours encourage les etrangers qui vont *> y trafiquer. » Outre leur commerce partJculier , les Demandeurs pendanc les fept annces der-»j nieres , ont ete charges du commerce de »' commiflion pour plufieurs Anglois, dont « plufieurs font a prefenr en Angleterre. jj Les Demandeurs fe i'ont toujours comM porres d'une maniere irreprochable, & a » la fatisfacäion de leurs Commerrans, Iis » ont evite avec le plus grand foiii de fe mcler » des affaires qui n'avoient point de rapport » a leur commerce , & n'onc jamais rien fait » de contraire aux inter^ts de l'honorable »» Compagnie. M Les Demandeurs qui refidoient dans le M domaine du Nabab Siijah al Dowlah & du ») Rajah de Biilwant Sing furent tres-furpris j> d'apprendreqiie votre Prefident de Calcutta *> avoit donnc a ces Princes des ordres pout « les chalTer de leurs territoires. » Cornme ces Princes honoroient les de» mandeursde leuramitic , ils voulurentbien « leur propofer quelques expediens pour « les mettre a Tabri des violences & des op-» preffions. Les Demandeurs ont en main des w preiives authentiques de ce fait j ils les » communiqiieront a l'honorable Cour des M Diredteiirs quand eile le voudra. » Ces Princes ayant ditferc de quel- O 5 „ que tems , pat bonte , I'exicutioii' de „ ces ordres tytaiiniques done ils igno^^ „ roienc U caiife ; M-. Verelft, votre Pi'efi-n dent J leiir cccivit de rechef, & leur ot-» donna de la nianiere la plus exprefTe de „ faifir les Demandenrs , de de les envoyer « prifonniers a Parni & a Mursliedabad, dans >» les clomaiiies de la Compagnie. M. Verelft » craignanc de nouveaux dclais de la pare M du Nabab Sujah al Dow lah & du Ra-« j'ah de Bulwaiic Sing , cnjoignit i quel-» ques Employes de la Compagnie de faifir » eiix-mcmes les Demandenrs ^ comme oft eft J) prer a le proaver par des Pieces amhen-« tiqnes. ; - » Ea confcqiience les Dsmandeuirs fiirenc 19 faifis, tout-a-conp , de la maniere l.i plus V cruelle. On les obligea de quitter fuc le 55 champ roLis lours biens qui ecoient confidc-M rabies, fans pouvoir mertre ordre ä leurs » Livres Sc Papiers, ainfi qu'aitx efFets de » plußcurs perfonnes done ils etoienc depofi-»> taires , & done ils devoient rend re comp:e. 5> Pendant que les Demandeurs furenr ea » prifon , leiirs parens & amis prefenterenc a »» votre Prefident, M. Verelfl:, plnfieurs Re» quetes y fur-tout une du 15 Mai lyßS, •• & une autre du i j Jiiin de la meme annce. « qui doivent hre enregiftrees au GrefFe d« » Calcutta. Iis demandoieiit qu on les remis " en liberie , en ofFraut des cautions d'ar-» gent & de corps, h le Confeil en exigeoic. » On ne.fii aucune atteacion ä ces Reque-n tes , Sc les Demandeurs refterent en prifon, « Gregpire Cojamul y a ete deux mois » neiif jfours^ depiiis le 14 Mars 176S juf-» qu'au zj Mais 1768 , Jean-Pierre » Rafael, depuis le 17 Mars 1768 , Jufqu'au u li Aout de la metne annee. On les a » traitcs avec plus de durcte que les crimi-» nels coupables de felonie. lis etoient gar-it» des par une efcorte dc Syapois, qui, la 5» bayonnette au bout du fufil , ne les quit^i » toient pas uii inftant de vue. » Enfin aprcs avoir etc mis en liberie , les » Demandeurs, accompagnes de quelques-» uns de leurs amis, allerent trouver votre » Prcfident, M. Verelft , pour lui demandet » commetir ils avoient encouru fa difgrace , » & pourquoi ils avoient etc mis en prifon. » Iis le prierent en mcme tems de leur petf 3) mettre de retourner dans leur pays, pout » raeccre en fürete les efFets qu'ils y avoient, » & prevenir par-Ia la ruine de leuts families. n M. Verelft ne datgna pas les ccouter. Les « Demandeurs ne purent pas obtenir ce qu'ü» O 4 „ follicicoient , ni f^avoir pourqiioi ils ^ avoient ete mis en prifon & eiifuite rela-» chcs, fans ette accnfcsd'aucun crime. . .» Les Demandeurs, i leur grand ^ronne-» ment, furent informes en arrivaiu d Cal-« ciitfa , que votre Goavcrneur, M. Verelft li & fon Gonfeil , avoient fait pubüer un n Edit en date du i S Mai 176S , qui dcfen-» doit ž tons Armeniens Porcugais 011 i » leurs defcendans , de reftder ou de com» mercer dans-aucun endroitßcue hofs des Pro-»5 vinces de Bengale , Bahar & d'O rix a. j oude n tranfporter aucunes Marchandifes, au-dela de M CCS Provinces j fous peine de la plus fevere rt punition corporelh de cönfifcaücn des Mar)) chandifes. Lm Demandeiirs orit en maiti « une copie de cet fedit cruel (1). n Les Deniandeurs ont ainft etc prives , » ainfi que tanF'd aiirres, des droits qui leur font accordcs comme liommes , par les » loix des Nations, & en outre de la liberte M de commerce dont ils avoient joui fous les pUis mecKans des Nababs Noirs , & fur-n tout ils one perdu tout efpoir de recouvrer (i) 11 eft rapporte dans T Appendix 4c M. Bolts j P^S-XXVII, pag. 80. « les Iiiens qu'on leur a enlevcs en les tnet-« tan: en prifon. " Les Demandeurs opt ece forccs 'de venit » en AnglÄerre a grand frais , pout deman-" der juftice a J'lionorable Cour des Direc-« teurs. Iis conclüent d ce qu'on leur accor-» de des dcdommagemens pour les partes 1> qu'ils ont fouffertes, U que M. Verelft & " tous les Employes que l'honorable Cour » jugera complices de ces opprefiions com" paroilTent en Angleterre, alin de s'y de» fendre deTaccufationintencee conrreeux ». Signes , Gregoire Cojamül & Jean-Pierre raraei. A Londres^ le Ii Septembre IJ^P- Ces Marchands Armeniens connoifToient peu Tetat de la Compagnie , Sc les vues de parci de fes Direčleurs ; il etoit riaturel quails imaginaffent que la Cour montreroit au moins un empreffement fimule a leur rendre jufti-ce, fi reellement eile n'y etoic pas difpofce. •Cependant la Requete a etc mife au neant, Sc Ton n'a pas daigne y faire la moindrft reponfe. Ces Etrangers meprifcs par la Cour dtes Direčteurs, cm ctc obliges dans I'^ratoii ils fe troavent, de fuivre un proccs riimeu». Ijt Compagnie les petfecuie en Anglererre Jepuls quarre ans i leuc commerce a ecc interroBipu pendant hwit anncÄ j & les pertes dont ils fe plaignent ont derange encietemenc leuE forrune ^ ils ont foi^ CCS d'envoyer dans I'lnde des CommifFaires pour connoirre fur ies lieux de la vctuc des faits qu'iU one allegues , & d'arrendre qo« leiirs opprelTeurs foient de retour en Angle-glerctre. Peuc etie quelques-uns fe defen-^lont'ils en difane que les vexations done on fe plaint, one cte commifes par le Nabab ^ans les cantons Ctues hots de U jaiifdidlion accord^e par la Chattre. Com me cette caufe eft aduellement pendante en Anglccerre, nous ne poiivons rien dire fur le jiigement qu'on enportera (j). 11 /liflStd'avoir montre que laCour desDirečteurs ptotege des oppreffeurs contie des malheii- (i) On vient de ;uger cette affaire au Tribunal des Plaids communs. Le fieur Verelft, Gouverneur du Bengale, a ete cond^mn.e a ncufmille livres fierlings, ifc dotnmages 8f interets envers les Marchands Armeniens & aux frais du Proc^ , qui doivent monter fortaii-c^7i~ nee, des motifs qu'a eu la Com,, p^g^^ Angloife dc prendre pojfeffion. des terriioires du Bengale ce litre. 74 CHAP. V. T>u Nabab, autrement appelU t(a\im ^ ou Soubah du Bengale. 81 iii table des chapitres. chap. vi. Remarques fur les Chapitres pricidens. 103 chap, vil Des Firmans du Mogol; de^ Paffeports appdUs Dufiucks ^ & , des ancicnnes pojfcßions des Anglois dans le Bengale. 114 chap. vni. Commerce que faifoient les Europeens fur les cotes 6* dans Vinterieur de I'Inde lors de, leurs premiers etablißemens dans Jce p^y^' Commerce aciuel de la .Compagnie ^Angloife dans le Bengale ^ compare avec celui qu'y font les autre s J^a-tions de I Europe ö" les Marckands particuliers de la Grande Bretagne. 137 chap. ix. Des Cours de Jufiice itablies par la Char t re de la Compa-^ gnie Angloife, du Gouvernement ^ de la Police & de I'adminiflration jde la Jufiiee dans le Bengale^ z6i Fin de la Table des Cluf itres.