ll.-i^-it • '••H/ i •■T«'-" •. - . - * .v . it.! •• T • • ■ •■.■ i ^ • •jc: I ■ £ CS- ■■'XtX'cr . 'o . -• " : J ■■■■ ..•4.; i « ; • i.A-Äi 2 * ' "i -J..- * ■••i Ž; 1 «.i» •S I ■i.' i »• --••Tt F o Y A G E EN SICILE JETZ" ^ M^ILTjfJOE:, Tradiiic dc Tanglois de M. Brydone , Membre dc la Socicte Royale des Sciciices de Lou-dres,par M. Demeunier. Bdition foigncußtnent coriigce fur la fecondc idltir)n arigloife, par AL B. P. jl, N. Aiigm&nict dt notes inureßü/ues , par M. DerV eil,&di quelques autrts piccei unponantes. S E C O N Ü E P /V R T 1 E. A NEUCHATEL' ÄU tiingalin de la Societe Typographique, M. UCC. LXXVI. "fifliy'-"-"-^ - . - Vv... • • ^U* »s* I a ^ ^ ^ A ¥ E R TIS S E M E N T SUR CETTE NOUrZLLE EDITION-, e's que I'oiivrage de M. Brvdone me toiiibfi entre les mains, je tlefirai ()u'il enparut iine traclut^lion fran^-jiife. J'etois lur le point de la faire moi-iiieme, lorfqiie j'appris qn'on en pre-paroit une a Paris : a 1'inllant j'aban-nai Fentreprife. Poiivois-je croire qii3 Ton ecoutcroit encorc , dans notre lie-de, ces aveugles prejiiges qui ont fait le mallieiir de nos peres ? Pouvois-js croire, du moins , qu'cn oferoit les montrer fi oiivertenient ? Comment fuppofer que, dans une ville qui fe pique d'etre le centre de la philofophie ^ on fecrut permis de defigurerun au-teur, delui faire tenir un langage qu'ii defavoue , de mettre fous fon nom des chofes qu'il a'a point dites, & cela par ij AVERTISSEMENT. im beau zele de religion ? Un ecrivain' etraiiger a la France, vivant dans un pays oil le fyReme proteftant eit la religion dominante, parle, non point en homme prevenu, mais en phiJofophe impartial, des abus dela fuperflition; il dit ce qiT'aucun catholique romain, eclair6 & de bonne foi, ne s'avifera de nier: & Ton tremble que les obferva-tions d'un homme fage ne portent at-teinte a ia religion romaine ! & I'on ne per met i'imprellion de I'on vrage, qu'eu y failant des corrections, des retranchc-mens ^ des additions & des notes! Que penferde la litttoure qui eftfoumiFe a de pareilles vexations ! Et I'on parle de la liberie de penfer ? Et I'on fe flatte de defendre genereufement h verite ? Yoila eependant cs qui elt arrive a a Vojage de M, Br yd one. J'ai cru devoir retublir tout ce que le cenfeur de Paric Ji VEK rrsSEMENT. iii avoit juge ii propos de fupprimcr^ & ,qiioiqiie bon proteftant, je ne Tau-rois pas fait, (i ces paOages retranches avoient contcnu lamoindre indecenca con tre la religion catholique romaine. Je ne parle pas des changemens fans nombre qu'il a fallu faire ä la traduction parilieniie : je crois que le ledciir qui voiuira fe donner la peine de comparer les editions, appercevra aife- mentouc le traduclcur ne connoifToit ft pas afiez les deux langues. Dans plus d'lin endroit, il a fait dire ä fon auteur tout le contraire de ce qu'il a ecrit. M. Brydone , aduellement en Suifle, Sc ä^orteeda lien oü j'ecris, a bien vou-lu me fournir a cct egard des fecours qui m'ont ete fort utiles. Ceft en fon nom, coinrae eii eelui de tous les gens de lettres, que je reclame contre la violence qu'il a foufferte. Ceft de fon aveu v AVERTISSEÄTENT. que j'ai travaille ä la reparer. Si Ton trouve encore bieii des negligences de %le, je priede confiderer conibieii il eft difficile de corriger un livre d'lm bout ä I'autre, avec le memc foin que i'on corrigeroit le theme d'un ecolier. Les notes ajoutses dans cette edition , Tont d'un homme de letfcies, qui a compare la relation de M. Brydone avec Celles des autres voyageurs. Sc en a tire des obferrations tres - bieii vues.;& je fuis perfuade que tousles lečlears me Ikuront gre de les publier. <----------— avertissement DE L'AUTEUR. Cf£S Uteres nauroientJamati rule joury^^'dy avo'it dans jiotrt languc quelquc livre qui eat titeme objet. En Ics ecrivam , nc penfois qiia amufcr mes amis & a Jbulager ma memoire ft je vDuloisjtißifier la mg/igence de mon travail, je pourrois ajjurer tivec verite qiu j i riavois point dcß-Jdn alors de Us faire imprimer, (S' qiion ne ni'cn a faggčre fidce qiu long-1 cm s apres, Mon principal motif y cn Us puhüant , a he de Jonner au public, peut-etre de tranfmeure a lapoßerite , vn momt-ment de mon artiiticpour P komme a qui elks Jone adreßees. Lorfqiic M. FoRSTER a fait paroüre la traduction du Voyage du baron DE. IljEDESEL en Sicilt y ces lettrts itoient dej a fous prejfe :je crai-gnis d'etre dcvance dans le fujet que je venois de choißr; mais en Hfant^j^ai trouve que Us deux yDj'ciges n'ontpas heaucoup dt rcß'cmblance. QuANn on a tranfcrit mon onvragepour l:'imprimer yj^ai jugi a propos de ret rancher ou d^etcndre quelques endroits : VaifamedußyU cpißolaire cn a probabkmtnt foußcrt ^ 6- quelques-unes des lettres font divtmies plus longues. Je hs prifenu uu public avec la plus grandi de-fiarKC : iapiupan ont id coinpofks dans d^s circonß tancespeu favorahUs a C ordre & a fa prcdßon ; fefpure qm k kcteur m'accordera qiielqiie itidulgaKe.. Coninie on dicrif. mimx Us imprejjlons au moment c-k on les fint, qtie lorfcjm ia memoirs ks rappdlc cprss quäLes fontpaßes ,je rCaipas oß ks travail^ kr de /loiiveau, dans la, craint'^ de kur faire perdre , .da coli du natunl & de laßmpUcid, ce qtüdks g-r.gi£croient du CQtidi la formt & de l'exprcffmn. VOYAGE jeijsr sxcxjljb: ET A MALTHE. LETTRE XVII. Trazfcrße de Mciltbe it Agrigente. hk de G()%zo. Cöte de SicHe. Iloes itAmerique, Fille d'Agrigente. A Agrigentc , Ic 11 juin 1770, x^ous fomtnes partis du port de Malthe fur im fpuronaro que nous avons louc pour nous tranlporter en cette ville. Nous avons c6toye I'isle, & nous fonimes alles examiner Ic port leptentrional, fes forti-ficiicioiis &. foil luzarct. Tout ces ouvrages tres-coniiderables fembleiit plutot avoir ete faits par un peuple rii^lie & puiliknc, que par un fi petit etat. Les mortiers tallies d.uis le rue font uae ijivcntion teriibie. H y ea a environ cirv Pan. II. A qiiaiite , qui dominent Ics diiFerentes criques & les aucres lieiix oii Toji pent ciebarqiier dans I'isle; ils font toiirnes vers I'eiidroit oii il eft plus probable que jes bateaux entreprendront d'aborder. L'embouchure dc qiielques-unes de ces machines a environ fix pieds de large j ^ Ton dit qii'elles vomiiFentcent cantaros de boii» lets ou de pierres. Un cantaro pefe environ cent livres ; de forte que , ii cette explofioii ports, elle doit fviire iin ravage epoiivaiUable parmi les batimens qui voudroiejit debarquer. MsJrh^jirJlpjslb^wec de Goz^oihpJusih quatre on cinqmilles, & la petite isle de Com-mino ell entre les deux. Les cotes de ces trois isles font fterües & nues , mais couvcrtes de tours , de redoutes & de fortifications de dif-ferentes efpeces. Comme Gozzo pafle pour etre la fimeufe isle de Calypfo, vous imaginez bien que nous nous attendions a y trouver quelques beautes naturelles : mais nous avons ete trompes. Elle a iingulierement degenere depuis le tems oii cette deelfe I'habitoit; ou bien I'archeveque de Cambrai & Homere Pont beaucoup fiattee dans leur defcription. Nous cherchames le long de la c6te lar grotte de Calypfo; mais noiisne pu-mes rien decouvrir qui lui reifemblat. Nous n'avons vu ni ces vertes prairies perpetuelle-inent couvcrtes de fleufs , ni ces grands arbres toujours fleiiris , dont la tete fe perdoit dans ]es mies , & qui coUvroient de leuT ombrage ics baiiis Hicrcs dc la dccire & tie fes nymphes. K'ous avons üppcrqu quelques nymphes; niiiis comnic CaiypTu & Kuclmris n'etüietu pas du nombre, noiis avoiis t'ait peu d'attention a elles. je ue eraigiKns point que men Telcmaque lue ieduu i il iiuroit fiilki eii ertet une imagination auill exaitee que celic de dom Quichotte, pour i'c preter a iin parci! enchantement. LoiTque nous vimcs que nos efperances etoient irultrces, iiüus ordonnämes ä nos ma-tclots du gaoMcr ie large, & nous dimes adieu il Tislc de Calypli), cn conckiant , ou que ies deiix aiitours dont j'ai parie ne l'ont pas peince d'npres nature, ou que cettc terre & ies liiibi-tatis ont beau coli]) change. Nous Runes bien-tüt ä la merci des riots : la nuit (lirvint; ik. nos nvarins entoauant leur chvinlbn du Ibir en l'hoiuieur dckiViergc, Ie mirent ä ramer eu uadence. Elle parut avoir accepte leurs Jiom-niages; car jious cünies ini tcms tres-agreable. Nüus noi!s cnveloppämes dans nus manteaux-, Ik nous dormimes all'cz bieii fiir ies matelas quo nous nous etions procures i Matthe. Au point du jour , nous avions perdu la vuc dd to Utes les isles, & nous n'lippercevions qu'une partie du mont Etna qui fumoit au-deJlus des eaux. Lo vent tkoit bon, & ä dix heures nous decouvrimes la c6te de Sicile. En conllderantla peticelie dc notre bateau & I'etendiie de cette traverfee , nous ne pouvions "«us einpecher d'adiiiirer la hardieJle des JVIiil-* AU thofe, qui dans toutes les faifoiis fe haf;irdent i ailer en SicÜe fur des batimens fi iujets k cha-virer. 11 ett rare cepcjidant qu'il arrive des ac-cidensi ils connoillent fi bien le terns , qu'ils prcdifent prefque toujours d'une muntere cer-taiiie unc tempete pluHeiirs heiires avant qLi'etle fiirvieime. Les nrarins regardent ce palFage comme iin des plus orageiix & des plus peril-leux de la Mediterranee. 11 eft appelle Le. canal de Maltke-, & les vailTeaiix du Levant le redoiu tent beaiicoiip ; mais dans cette faifon il ny a point de danger. Arrives liir la cute de Sidle ini peu avant le coiichcr du foleil, nous debarquames vis-a-vis Ragulii-, pres desruines de la petite Hybla. 11 y a dans I'isle trois villes de ce nom, diftin, ^leesparles epithetes ds grande , moymm\^ pence. La premiere eft Tituee pres de i'Etna, la fecondc pres d'Augufta, & la derniere pres de Ragufa. Nous trouvames ici un belle greve de liible; & pendant que nos domeltiques appre-toient le fouper, nous nous amulimes ä prendre le bain & k ramalTer des coquiilages , dont 11 y a un grand nombre d'elpeces dilierentes. Nous efperions trouver le fkmeux nautile de Sicile ; mais nous ne pumes en venir ä bout. Cependant nous raüemblämes quelques autres coquilles tres-jolies, quoique moiiis belles que Celles qui viennentdes Indes. Apres fouper, nous nous remimes en mer.. Le vent etoit aulTi favorable que nous pouvions le defircr; & le lendemain k mitU, nous gagaä-mes le celebre pore cVAgrigente. Lc capitaiiic du port noiis rccut polimcnt, Si s'ortrit de noiis accompagiier ä ia vilic, iitueo fiir lc Jbmmct d'iine inoutagne ii quatre iivilles de dilbncc du Havre , & a ciivirqa onze cCiUs pieds aii-deilus du niveau de ia nier..,Lc die-jniii eit borde de part & d'autrc pur une ran^'ce d'aloes d'Amcrique extremeincnt gios, Los tigcs de cötte belle plante nut onUnuireinent viiigj^a trentc pieds dc haut;,quclques-uncs eii ont davantage, & cllcs font couverLes, dcpuis le bas jufqu'aii fommct, dc fleiirs qid fc termi, neiit en pointe reguliere , & fbrmcut une jolic Pyramide, Cette ptnii c c(t rcgardcc, dans les pays du nord , coinnie une des plus grandcs curioikes du regne vegetal. Nous fiiincs cliar-mes de la voir dans toute la pcrtedtion, & hcaur .coup plus haute que je ne I'avois trouvec au-paravant. On croit viilgaircinent dans notrc patrie , qu'elle ne flcurit que tons Ics cent ans. je ius furpris d'appreiulre qu'cllc Ic charge ici dc fleursau plus tard la lixicmc annee , & le plus Huivent ia ciuquiemc, Comine toute la nourri-ture dc la plante ie portc dans la tige & dans Ics fleurs, Ics feuillcs coninicnceiit u toniber des que la fleur clt encicre; & un grand nombrc dejeuncs plantcs gcrinent autour deb racine. (J)narrachc ccllcs-ci , &:on en fait de nouvellcs plantations, ponr fcrvirde haics ou d'avcnues A iij Jans les maifons de campaj,mc, La vifle trAgrigcnte, appellee a prefent Gir-, eit tres-irreguliere & mul-pronre, qiiot-qu'ellc prefeiite une belle apparen.ce, iorfqu'on voit de quelques milles cn mer: eile eft alors prcfqii'-aiifTi brillante que Gčnes. Commc olle eil fitiice fur le penchant de la montag-ue , les inai-fiiii'; ne fe caclicnt pas les utiss les aucrcs , & on dcCvTiivre totites Ics parties dela ville.' Ell yarrivant, nous reconnames que I'inte-rieur iic rcpondoit pas ä ce ioli coup-d'«nl. Lgs mairnnsfont petires , taides ; les rues, falcs , tortiicufes & etroites. Ellc contietu anjoLir-trhiii pres de vitigc niillc habitant: {ii population cftfort diininuee, puifqu'oji dit qu'aiitre, fois die ii'en avoitnas inoins de Iniit cents milic .Ä qu'aprcs Syracufe, cctoit la pins grands villa dc la Sicile. ■ I,e chaunine Spoto , pour qui M. Hamilton. noDS avoit donne utic lettre , que nous avions connii a N'aples, noLis a recus d'ltne ma more tres-amicale. II a voulu que nous lo-jjeaflions chez lui, Si noüs fömnies a prefent dans fi maifon. .Adieu. Je vous ccrirai dans pcLL lettre XVIII. ylntiquith d'Agrigente. Temples de P^enus, de la Cmicoräc, d'Hercule, de Jupltor Olympien, gifc. Celcbre tableau de Zenxis. Status d'ApoHon. Catamnbes ^feptdcrcs, ßlontagne d'Agrigente. Agrigcnte, (e I4juin i""?©, jj^CJUS venom d'cramiiier les luitiqiiitos d'A-fiTtgcnte, qui foiic pcut-etre les plus confidc-iibies de tü Lite Iii Sicüc. Lcs TLiines de raiicieiiae ville font i eiivt-'on Uli mille de la mol^crne. Aiiifl t]xie cclles 1c Syracule , eltes f«>iit poiir la plupurt coiiver-ties cn cliiiinps , eii vtp;acs & ea veugers; mais les debris des templea Ibsit infinimciit plus ma-gnifiqiics quo cciix de Syracule. II y eii a quiitre i cote l'iiii de l'aiitre, pres du rcmpart meridional de la ville; !c premier s'appelloit/« ple de Fintis, dout il fubdlte encore pres de hi moitic; lelecoiid eftcelm del;i Coiieorde, qui peilt etre rcgardc comme enticv, puifqiraii-cuiie de fes colounes ii'cft tombce. II dl exac-tcincnt des memos dimenfions & de la meme arcliitedure qvie celiii de Veiius, qui proba-blement lui a lurvi de modele. D'apres l'inl-criptiüii faivantc, trouvcc fur im grand morA iv ceau de marbre, il paroit qu'il fut conftruit aiix frais des habicans de Lilibee, aptes qii'üs eureiit ete vaincus par la ville d'Agrigeiite: CoNCORnijE Agrigentinorüm Sacrum , Respublica Lilibitanorum , dedicantibus M. AtTERIO CaNDIDO Procos. et L. Coknelio Mar-cello, CL P- R- P- R- Ces temples font foutenus de chaque cote par treize großes colomies doriqiies caiinelees, & par fix autres placees aux deiix extremites. Les bafes , les chapiteaux & les entablemeiis font encore entiers; & comme I'architediLire en eft parfaitement finiple, iiins rien d'affecle Oll de recherche , Penf^ible frappe au premier coup-d'oeil, & efl; fort agreable. Les colonnes fontcependant plus conites qu'clles ne doivent l'etre , d'apres les proportions del'ordre dori-que, & elles ne font cerrainement pas aulTi el^antes que quelques colonnes des ailciens temples qii'on voic aux environs de Rome & cu d'autres villes d'Italie. Le troifieme templ^eft cehii dTTeraile, qui tombe auiTi en ruines ; mais il paroit avoir cte beaucoup plus vafte que les deux premiers. Nous mefurämes que]ques-uncs de fes colonnes brifees, & elles paroifibieiit avoir ores de feptpieds de diametre. C'eftici qu'ctoit !a fain euie ftatue d'Ilercule, fi vantee par Ciceron, Ä; que les liabitaiis crAgrigcntc dciendtrent avcc taut de bravoiire conti'c Verres , lorfqii'il cntreprit de s'cii cmparcr.Vous trouvci'cz toutc cctte hiftoire dans les difcoiu-s du prince des oratcurs latins coiitre cet infame preteiir. II y avoit auifi duns ce tcniple uii faincux tableau dc Zcuxis. Hercalc y etoit reprefente dans Ton berccaii, tuant Ics deux Jerpeus. L'ai'-tirte avoit pciiit fur Ic viuis^c d'Aleinene & d'Amphitrioii qLii cntroiciit alors dans la cliani-bre , toiites les marqiicfi de la terreur & de I'e-tonneracnt. Pline dit que Zcuxis rcgardoit cc morceau comine inelHniable, & que nc vou-laat pas abroUmicnt y niettrc ijn prix, i! en fit prefcnt ä la ville d'Agrigente, pour ic placer dans ie temple d'Hcrcuie. Ces deux chefs-d'wuvrcs le font perdus: nous y penfimes avcc regret, en niarcbant fur ccs mines venerablcs. Pies de ce temple, on tro>)ve Ics mines de ceUii de Jupiter Olympien, que les aiitenrs Si-ciliens difcnt avoir (5telephis grand du monde paien, Sc qui ell: encore d'unc ctendue prodi-fiicufe. II cil appclle maintenant U nmpio de gigand, ou ie temple des geants, parco qii'ils ne peuvent pas concevoir que dc ll grolfes mafTes dc roc aient pu etre placees dans un cdifice par la main des lK)mmcs. Les fragmens de co-ioniies font prodiginux, ik i!s donncnt line prande idee de ce bätiment. On dit qu'il a fubiiüc jufqu'en t too i mais a prefcnt il eft entiercment en mines. Nos Cidrons nous ont alTure quMl avoit les memes dimenfions que l'^life de S. Pierre de Rome; mais ils fc font lurenient trompes. Cette eglife eft beaucoup plus vafle qu'aiicun temple de rantiqiiite. Oll voitles ruines depliifieurs temples , & d'autres grands edifices; mais ccux dont je vieiis de vous parier Tont les plus remarquablcs. 011 montre cepeiidant ceitx de Vulcain, de Profcrpine, deQiilor & Pollux, Sc uii de Ju-noii, qui a ete tres-beau. Celui-ci etoit enrichi d'iin des phis fameux morceaux de peiiiture derantiqatre, donthi pkiparcdes anciens out parle avec entlioiifiaOne. Zeuxis avoit refoiu de {'urpafrcr tout ce qii'on avoit fiiit avant lui, & de produire uii modele de perfedlioii. II eii-gagea, dit-o!i, les plus belies femmes d'Agri, gente ä pafoitre uues devaut lui; oii dit memc qu'ellcs briguoieiic cet boniieur avec beaucoup d'emprelTemeiit. II eJi clioifit cinq pour fes mo-dclcs; & rafremblaiit toiitcs les perfections de cesbeautes enunc feiile,il eil compnfafa Venus. Cetoiivragc fut toujours regarde comme ibn chef-d'oeuvre; mais malheureufemcjit tl fut confume iorfquc Ics Carthaginois prireiicAgri-gente. La plupart des cicoyeiis fe redrerenc daiis cc temple , comme eii un iieu de ßretc; & des qu'ils vircnt que les portes etoient at-taqucespar leurs ennemis, ils convinrent tous d y mettre le feu, aimant mieux perir axi mi-Jieu des Hammes, que defefoumettre ä la puif. ftiice des vaiiiqiieurs. La pofterite a plus re- E T A M A L T 11 E. i i grette la perte de cc tableau, que la dcfh-uc-. tioii du temple & la inoit de cos braves citoyens. ^ Üne Ihitiied'j^polloji nc remloit pas lUüiiis celebrcle temple d'Eiculape, doiit oiivoit cn-corc aujourd'hui les ruincs. Elle fut p rife par Jos Carthagiiiois, quaiid ils brtilcrcnt le temple de Jiinon. Les cojicjuerans i'emportcreut dans leiir patrie , dont eile Jit lonsj-teans l'or-iicmeiit; mais Scipion, lors dcla delli'udion de Carthaae, la reiulit enfin ä Agrij^ejite. Quelques aiiteuirs SicÜieiis difent, mais {ans auciia fondemeiit, a ce qu'il me paroit, qu'olle fiit ciiriiitc transferee a Rome, oil eile cxifle c!i-core admifee de to us les connoilTeurs, foiis !c uom (K'ApolLon dti Belvedere. Cette Ibtuc clt ef-fedivement Touvrage le plus pauFait qii'ait jamais produit le geuic. Je vous ennuierois fort, fi je vous doniiois une dcfcription dctaillec dc toutes les uiuiqui-ies qu'oii trouve ici. La plus graiide partie n'apprejinent rieu ou tres-peu dc cbnfcs. La plupiirt des ancieiiucs murailles dc la ville etoient taillees dans !e roc: Ics catacombes & les fepulcres lont Cous tres-valtes ; I'lm dc ceux-ci eft dijTiie d'une attention particuliete , parcc que Polylie qui en fait mention , dit qu'il ctoit vis-ii-vis du temple d'Hcrcule , &: qu'il fut frap-pe de la foudre , memc de fon terns. II eit pref-qu'entier , & repond parfaitetnent a !a dcfcription qu'il ca doniie j mais Ics iiifcnptions en font fi ei?;icces, que nous n'avoiis pu y rien lire> Je parle du moaument de Teroii, roi d'A-grigeiice, imi des premiers tyrans de lu Sicile. €e priace eft de Ja plus haute antKjuite, pLiif-qLis noii4eulement Diodore, Polybe & les der-niers des ancieiis hillorieiis parlenC de lui, mais qu'Herodote meme en fait mention, & que Pin-dare lui adreire deux de fes odes oiympiqiies. Ce monimient doit avoir plus de deux miile ans; il a la forme pyramidale, & c'eft une des formes d'edificES les plus durables. Lcs rLiines fameufes d'AgrigeiiCe , & toute la rnoutagne iur laquelle on lcs rroLive, font une immenfe concretion de coquillages de mer, reunis & cimentes avec uiic clpece de fiible ou de gravier , & aulli durs aujourd'hui que le marbre meme. Cette pierre ell blanche avaut d'etre expofee ä Fair ; mais dans les murailles des temples & des autres edifices , elle e(i devenne d'un brun tres-fonce. J'en emporterai quelques morceaux, pour les montrer aux cu-rieux. [1 y a des coquillages jufqiraii fjmmet de la montagne, au moins quatorze ou quinze cents pieds aii-deirus du niveau de la nicr. lis font des efpeces lcs plus communes des pston-clcs, des buitres, &c. Je vous laiiFe, ainfi qu'aux phyficiens dc nos amis, lefbin de deviner par quels moyens ces Coquillages ont ete cleves k une fi grande hauteur , & joints fi intimement a touce la fubi-tance du rochei". Notre vieux globe a proba- l)lement foiifFert braucoiip lic conviilfions dont il n'clt pas Hue mention tlans I'hilioirc. Vous avez ciuciuUi parier des vaJles couches d'os qu'on a decouvcrtes dcriiieremcnt dans I'H-trie ä Oliero; ime partie de ces couches fe prolonge fous des rochers de marbre qui out plus de quarante pieds d'epaiireur , & Ton u'a pasencorcpu determiner quelle eft Icur eten-due. On a trouve quelque chofe de Icmblable dans la Dalmatie , dans Ics isles dc I'Archipel j 8c depuis pen , a ce que j'apprends , fur Je rocher de Gibraltar. Le deluge de Pecritiire-^^l!nte fuffic a peine pour rendre compte de tons CCS phcncniencs qii'ou rencontre dans prefque toutes les parties du monde. Mais je fuis iiiterrompu par des vifites : c'eit uncheiT-reufe circonitance pour vous & poxir moi; car j'allois etrc extremement philofophe , Sc par confcquenc fort eunuyeux. Adieu. LETTRE XIX. Luxe des amiens habitans ä'Agrigmtc. Leur /jofpüalite. Anecdote. Leur bonte & leur rmmvöißance pour leurs chevaux. AgrL ((e7ite long-tems fonmife aux tyram. Phcu laris. Anecdote^fiir ce tyran. iWknippe ^ Car it Oft. Leur amitie. M ort de F ha-laris. J'e fus interrorapu dans ma dernicre lettre par Uli des gens de l'eveque, qui nous a invites pour demain ä un grüiui diner qu'il doit doti-ner au port; de forte que nous faurons fi ]e luxe d'Agrigente merite la repLitation qu'il avoit chcj; les uncieiis. D'apres les politeffes ÄTat-tentioji qu'on a pour nous, nous avons lieu de croire que cette ville n'a point dcgenere fur Tarticle de rholpiculite , vertu qui larcndit autrefois fi celebrc. Phiton vifitautlaSicile, fut fi frappe du luxe des maifijns & des tables d'Agrigcnte , qu'il fit cette remarque. " Us batillent, d:lbit-il, cum, „ me s'ils ne devoient jamais mourir , & ils „ mangent^comme s'ils n^avoient qu'une heure „ a vivre. „ Elien, qus )c tiens devant moi , nous a conferve ces paroles IM« milil ■ imui.Lj____±------------------'1 I f !■ IIIIJ_ LIJJ__.Ml , C) ^irijjcntino! ita xdißccrc acßpcrpanoviäti^ ri, ita LonvivaTiacßprojhidic /norituri Jirav. Puiir mieiix faire connokre cette ville , jI nicuntc line hiltoire qui muntre que les miriirs de la ieune nobldFe des anciens & de celic d'au-joui-d'Kui font beiuicoup plus rellcmbbntcs qu'oii n'iiuroit lieu de I'uttendrc. Dcjeunes gens de la premiere diüincliüii fe trouverent fi ivres aprcs un graiul repus , qu'a force de clianceler di: de toinber les uns Jlii: les autres , ils imaginercnt qii'ils ctoient en pleine mer , aflaillis par une tempetc, ik com-mcncercnt a fe croire dans le danger le plus eminent de pcrir. Enfin lis dcciderent que la feule manicre dc lauver Icur vie ctoit d'allcger le vailfcau, & d'un comnnin accord ils fe mi-rcnt a jctcr par les fenetrcs les meubles les plus riches des appartemens, au grand con-tentement de la populace. I!s nc ceiferent leur extravagance , qtie lorfque la maifon fut entie-remcnt niie. En memoire de cecte folie , cet edifice fut appclle dans la fuite Ic trireme, ovi le vailfeaii. II ajoutc que c'koit un des principaiix palais de la ville. On m'a dit qu'il y a a Dublin plu-lieurs de ces triremes , & qif il n'elt pas rare d'y voir des exemplcs de cette frenefie, que les hubitLins appellent} ear la maifon par Its fenitrts. Lcs anciens , qui reprochent aux habitans d'Agrigcnte Ic vice de Fivrogiierie, louent en meme tems leur liofpitalite: cire lorl-qu'il s'ccrie que les portes d'Agrigente annon-(joiciic a cliaque etraiiger qu'il etoit le bieii vciiLi. Nous pouvoiis allurer par experience, que les habitans conferveiit encore cette antique vertu fi connue dans les pays polices. Demain nous aurons occafion de juger li elle elt accompagnee du defaut qui marche ordinaire-ment avec elle. On clt etonne de la defcription que nous fonC les aiiciens , de la magnificence d'Agrigente j mais les monumens qui fublKtent, I'atteilcnt d'une maiiiere encore plus Forte que ce qu'on trouve dans teurs ouvrages. Diodore dit que les grands vafes ou Ton metcoit de I'eau, etoicnt orduiairement d'argent, & que les litieres & les voitures etoient le plus iouvent d'lvoire , licherueiit oriiees. II fait mention d'un grand vivicr rempli de poiiFons & d'oifeaux aquati-ques , oil les habitans alloienC le pourvoir quand xls vouloieat dünner ua grand repas > Part, IL B Xa YOY age EN S ICiLJS mais il ajoute que des Ic fiecle d'Awjiiifte, on le laiiroit tomber eu ruines, parce qu'il en aii-roit trop coüte pour rcntretenir. It n'en refte pas aujoiird'huile moindre veftige ; cependant on voit line fbiirce d'cau fingulicre , fur la furface de laquelle flotte unc efpece d'huile, dont les pauvres font ufage dans plufieurs maladies. On croit que cette Fontaine eft ä !a place de ce fameux etang,que Pline & Solin difent avoir ete fortcment impregne de cette hiiile. Diodore parJant des richeires d'Agrigenfe, rapports le nom d'un ds fes citoyens, qui re. venant vidiorieux des jeiix olympiques, entra danslaville, fiiivi des trois cents chars traiiies chacun par qiiatre chevaxix blancs richenient caparaqonncs. II rapporte pUifieiirs autres exeni-ples de ieiir profufioii & de leur luxe. II dit que ieurs chevaiix etoient fort eftinies dans toute la Grece, pour leur beaute & Icur agilite. Plufieurs des anciens auteurs donnenc des eloges ä leur race. Arduus inde Agragai oßentat maxima longc Msnia^magnanintum quondam generator equorum • dit Virgile , au iivre III de I'Eneide. Pliiie nous apprend qu'on rendoit les honneurs ftinebres ä ceux quiavoient ete fouvent vidorieiix dans les jcux; il ajoute menic que, pour eternifer leur memoire , on leur clevoit de fuperbes monumens. Timeeconfirme ce fait; il dit avoir vu, ä Agrigeute plufieurs pyraniides eii form^ fenulcres, qu'oji Iciir avüit crigees , & il ajouCe que lüdqüe ces aniinaiiX ctotciit dcve-nus vieux & incapables de fervir, on eii pte-iioit tres-graiid foiii Ic relle de 1 cur vie, & qu'oii leur füurniiroit toLites les coinmodites poiliblcs* Je defirerois que nos conipatriotes imitaflctiC en ce point la reconnoillänce & la bonte des Siciliens. Notre nation pent etre juflenienfc ac-CLilec de cruaute & d'iiigratitode dans la ma-niere dont elle traite les chevaux , ees quudrii-pedcs qui font dc tous les plus dignes dc notre attention. II e(l vrainient douloureux de voir fur la plupart dc iios grands chemins, des cl\e-vaux autrefois les meilteurs du monde & la gloirc de ceux qin les poiTcdoient, livres, fur la fin de leur vie , ü la tyrannie & a la briaalitc des plus cruels oppreHeurs, entre Ics mains del-quels ils fouifrent la derniere mifere, jiifqii'i ce qu'ils fiiccombcnC enfin finis le poids des travaux qu'on leur inipofe. Lcs fouffrances de CCS malhcureux animaux m'ont toujours paru la circonttance la plus incommode des voyages qu'on fait cn Angleterre , & qui d ailleurs font fi agreables. On m'appelie pour aller voir quel^ ques antiques j mais Je finirai cette lettre ce foir, parce que la pofte part demain raatiu pour ritalie. Le 13 au foir. Nous avons examine 'beau-coup d'anciennes murailles & dc voCites qui tombent cn ruines. Les habitans leur donnenc desnonis, & preteiidcnt vous dire ce qu'clles" Bij ctoient autrefois ; mais comme ellcs n'ont pas auioiirtrhui la moindre rclfcrablaiice avec CCS objets, ii eftinipoirible de les croire, & il leroit inutile de vons eii entretcnir. Ileftvnii que nous avons -vii qiielque chofe qui nous a bien dedonimages des peines que nous avuns prifes. C'eft uiie chaile de fanglier en relief fur du marbre blanc ; ce raorceau vaiit au moins tous ceux du menie genre que j'ai viis en Italic, s'il lie leur e(t pas fuperieur. II e(t compofe de quatre difFerentes parties qui reprefcntenc les cireonftances ik les fuites de cette tlitiHe rc-niarqiiable. La premiere contient les preparatifs de la chaHe: il y a douze chafleurs portant chacua ime lance, & Tons le bras gauche uii petit cou-telas d'une fonne tres-finguliere. Les chiens lefl femblent exaäement ä ceux que nous appe!. Ions baßets. Les chevaux font pleins d'ardeur & de feu : ce qui prouve peut-etre niieux I'ex-, cellence de leur race, que tous les temoigna-ges des auteurs; car Fartifte qui les a dellines ^toit certainement accoutume a voir de trcs-beaux chevaux. La fcconde piece reprefcnte la cha/Te memc; la troifieme, la mort du roi qui tonibe de che-val; & la quatrieme, le defefpoir de la reine & de fa cour, en apprenant cette nouvelle. On Voit cette princeife evanouie entre les bras de fes femmes qui foudent en larmes. Ces morceaiix font tres-bien, cxkutcs, & je les mets au rang des plus beaux rcftcs d'aii-tiqiiiti que j'aie jamais viis. On les coiifbrve dans !a grandc cglile , qui ell celebrc dans toute la Steile par un ucho fingulier , a peu piX'S du meme genre que la gajcric dc luiiU Paul, mais dont il ctl beauctnip plus dillicile de renili'e raiion. Si un homnie le place a la pnrt-c occidentate, & im autre lur hi cornichc , dans le point le plus eloignc ds Tegliie, exadtenieiudcrricre le grand autd , ils pourroiciit, en parlant tres-bas, avoir line converTation oü chacuii d'cux cjitendra Taiitrc creB-diltinctcment;. Cc phcnoniene iCa ete connii pendant long-tcms que de pcu de perfoniies. Comnie il y a piuHeLirs confeirionnaiix prčs du grand autcl, Ics perfonncs qui lavoienc le leeret, avoieiit couf.imc de fe placer i la porte de lacathedralc, ik elles cntendüient clairemcnc tout ce qui II* dilüit cntre Ic confelPcur & Ion penitent. Vous imaginez bien qu'ellcs ne manquoieiit pas d'cii fiiire iiläge dans ruccafion. On di'cnuvroit les intrigues Ics plus cachees. Les feniincs d'Agri-gcnte avoient beau changer d'amant ou de con-fareiir; tout le duvoiloit eomme a I'ordinaire. Kn/^.n on en trouvala cauie : on enleva iescon-i^ionnaii.Y; on prit d'autres precautions pour enipechcr la revelation des iäints niyiteres, & Ics parties otFenfees fc pardonnercut nnitucllc-Jiunt. A^rigeute fut long- terns foumifc , ainfi que ]i jjj Syraciife , au joug des tyraiis. Fazello parle de icur cL'Liaute. Je n'ai pas ciivie de repeter ce qu'il cn dit 'fy trouve cependant une hiftoire tres-curieiife; quoiqu'elle foit connue, comnie eile eJt courtc, je vous la rappellerai, L'orfevre Perillo voidant faire fa couv au ty, rail Phiilaris, lui fit prefent d'un taureau d'aü . Tain adniirabiement cravaille. II etoit creiix en dccians, & coiiftruit de maniere que la voix d'n« homme qui y etoit renferme, reflembioit exadement au mugiirement d'uii boeuf, L'ar-tille tiidiqua aii tyraii Ics grands cfFets que ce chätimentproduiroit, Ii Ton mettoit quelques criminels dans le taureau d'airain , & qii'on f it du feu dcflbus. Phalaris frappe de cette horrible idee, & cu-rieux peüt-etre de voir l'cxpcrience de ce qu'on lui propofoit, dit äPorfevre qu'il etoit la feule periönne qui put animerle taureau 3 qu'il de-voit avoir etudie le fon de voix qu'il falloit employer pour le faire mugir de la maiiiere la plus parfaite , & qu'il feroic injufte de le priver de riior.neur de fon invention, Lär-defliis , il ordomia qu'on y rcnfermat l'orfevre , & qu'on aüumätun grand feu au tour du taureau, qui-fur-le-charap le mit a mugir : ce qui amufa tieaucoup les habitans d'Agrigente. Ciceron dit que, lors de la prife d'Agrigente, cette machine fut empörtes ä Carthage , d'ouScipion la renvoya en Siciie apres la deärutflion de la ri-vaie de Rome. ETA MALT HE. 23 Tazello racontc uiie autre luRoirc, qui fait plus d'lionncur ä phalaris. Deux amis , Mela-iiippe & Carlton, avoienC confpire fa moit. Canton dcfirant epargncr ä fon ami Ics dangers dc I'entreprirc, voulut I'cxecutci" leul. Au moment ouil tentoit de poignatdcr le tyran, Ü flit faifi par Ics gardes, & on Iclivra fur-Ie-champ aiix plus atFreuibs tortures, pour lui faire reveler fes complices. II los fupporta avec tout le couragc imaginable. Melanippe , in-Corme dela fituation de Ion ami, courut vers le lyrau , & Tallura qti'il etoit fcul criminel; que Cariton n'avoit agi qu'a fon iiiitigation, II liii demanda dc fouffrir lui-memc les iiipplices dcitines a ion ami. Phalaris, iiappe de tanl d'hüroiime, leur pardoima ä tous deux. Malgre cette adtion genereufe, c'etoit affli-rcment un tyran barbare. Fazcllo raconte auffi f;i mort. Je finirai ma lettre par ce trait; car je fjis excelTivement fatigue , & je crois que voiis etes daiis le memc cas. Zenon le philo-ibphe etand alle ä Agrigeiite, & ayant ete adir.is devaiit ic tyran, il lui confeilla pour fon bon-licur, ainfi que pour celui de fes fujets, de rufigncrfa puufance, & de mener une. vie pri-vee. Phalarif; ne goiita pas ccs idecs philofo-phiques; & foupqonnant Zcnon de confjiirer cotitre lui avec quelques-uns des habitans de la ville, il le fitappliquer ä la queftion, enprefence ^es citoyens d'Agrigcnte. Zcnon fc mit alors ä Icur reprochcr la foi- B iv blelTe & la pufillanimitc qu'ils Hiifoietifc patoi-tre , en fe foumettant a iiu li abominable tyraii, & il excita tellcmpnc leiir courage, qu'ä I'itit tant ils defarmerent les gardes & lapidercnt Plialaris. jcvoiis ajfijreguc je fuis charme que rexcciition fuc Ci prompte. Je ne vous čcrirai plusäl'avemrdc longues lettres ; car eiles font au moiiis aulfi incommodes pour moi que pour vous. Nous ferons voile ce matin, ou demain, poiir Trapani, d'ou je vous donnerai de mes nouvelles. Nous allons examiner un grand nombre de vieilles inurailles; mais je nc vous eiinuierai pas du detail de cc que nous aurons vu. L E T T R E X X. Environs d'/igrigente. FHe, Hofpitalite des habit ans d'Agrigentc. Leur caraäerc. I H. veqiic. Depart pour Tntpani. Tempete. Retour ä Agrigente. Foyage par tare ti Palerme. Richeffe beaute du pays. Fau-vrete & opprejfion des pay fans. Le 16 juin 1770. ^ENDANT que mes compagnons fe rcpofent, jcprends la plume pour vous ecrire, moncher Becltford. Nous fommes a prefent fur le fom-niet d'une trcs - haute moiitagne , litucc encre E T A M A L TH E. Agrigcnte & Palermo. Notre voyage par meri Trapiini a manque , & nous avons rcfoHi tic ne phis; nous haliirder fiu-cct elumciit i nous nous croyons tres - heiireiix dc n'y pas čtic expo-iüs , quüiqiie nous ioyons dans Ic plus pauvrc Si le plus mtfurable cle tons Ics villages. Nous fivons voyagti tonte la unit fur nos miilcs, & nous fomnies arrives ici a environ dix licurcs dii matin , accables de fornmcil & dc fatigue. Nous avons pris dn tlic , rcmcde qui nc manque jamais de nous foulager , & je lliis :i pro-fent auifi frais que lorfque nous nons Ibmmcs mis en marcKe. II n'a pas produit im 11 bon eifet fur mes cotnpagnoiis : ils fe font jetes fur de la vieillc paille dans nn coin; cn depit des poules alFamees qui vont chercher leuv paturo deffous eux, ils font dejaendormis. Je profitcrai de cc terns pour vons faire un abrege de ce gui nous elt arrive depuis ma der-niere lettre. Nous avons fait quelques petites excurfions aux environs d'Agrit^ente. Le pays ell agrea-blej it produit du bled , du vin, dc Fbuilc , dans la plus grande abondance. Les champs font converts en meme tems dc bcaucoup dc fruits tres-beaiix & de diHercntes efpeccs , d'o-ranges, de limons , dc grenades , d'amandes, de piftaches, Ces produdions nous caii-foient prcfqu'autant de plaifir que le fpedaclc des ruines fur lefquelles dies croilfent. Nous avons din6 che/ I'cvequc , & nous fummcs tres-conva;nc:ir; quo Ics anciens hibi-taiis d'A!;ngc:itc ne coiiiioilibieiit pas niieux le veritable luxe de la r.ible que ceux c.raiijour-(.I'htii , auxqucls ils out trixnfmis une gninde partie de leurs vertus focmles & de leurs vices. Je ieur demande pardon d'appcllcr ces defiiiits , des vices j je vuudrois employer ini noiii mollis fort, djiisk crainte qu'oii ne m'accufat de re, coiiiioit'-e mal fhofpitalite qu'ils out exercec ä iiotre egard. Nous ecioiis trente k table , & Ton y a fervi plus de cent plats : ils ctoicnt tons appreCes de ]a maiiiüre la plus delicate ik la plus difjieiidieu-fej & nous avoirs vu que I'aiicic!! proverbero-coquus &ßaila mtnja^ fc verifie encore aujoui'd^'hui. II n'y manquoit rien de tout cc qui peut exciter ou flatter le gout, cau-fer u:\ appctit taclicc, & le fiitisfdire. Quelques-iins des mets (1 vantes paries epicuriens de Tan-ciciine Rome, faifoient partic du feftin, & eii particulier la morena, dont parlent fi fouvent leurs auteiirs. C'eft une efpcce d'anguille qu'ou ne trouve parfiiite que dans cette partie de la Mediterranee , & qu'on cnvoie dans plufieurs cours de I'Europe. Elle n'eit pas auffi graife & auifi fade que Ics autres poiilbiis de ce iioni ; de forte qu'ou peut en manger beaucoup: fa chair, blanche comme la neige, eft tres-delicats. lis ont invente un ralTinetnent de luxe fingu-]ier. En traitant dune certaine maniere leurs Volaillcs J ils cn grofliilcnt confiderdbleniencles foies, & ils Ici'.r donnent iinc cxccllcntc fii, VCUI-, Celt iiii rnctü iiicompii-iiblc ; nv.iis pour ic je procurer, on emploie tics moyc'vs li crucls-, que j.c 11c veux pas voiis les apprendrc. Vous en purlcricz peiit-ecre, (;iiis aiicuiic imuiviiifc intention , i vos amis i ceiix-ci les revclcroicnt ä d'aiitres , juliju'ä ce qii'enfiaon cn fiti'cxpc-rieace ; ik toiite hi race des volaiiles ain-oit mi-ion de me maudire. Contenre:i-v()iis dc favoir qit'elle octullonne une mort lente & trcs-dou-loiireulc aupauvre animal. Jc fais queccla feul iuHic pour voiis empecher d'en gouter jamais. La compagnic etoit fort gaie. Les Agrigcn-tins ne dcmcntcnt pas leiu" ancien caradere; car laplupart ctoient ivres avant que dc Ibrtir dc tabic ; en Ics voyant chancclcr , je com-mcncois a craimire que la fcene des triremes ncfb reiioiivellät. Iis nous pricrent dc leiir fairc-du punch, liqueur dont ils avoient fouvent cntcn-dii parier, maisqu'ils n'avoient jamais viie. On nous apporta fiir-le-charnp Ics ingrcdiens ncccf-ijures , k iious i-eufsimcs fi bicn, qii'ils Ic pre-fcrerent ä tous Ics vins qu'on avoit fcrvis en grantl nombre. lis en biirent tant, que je m'at-tendois ales voirtomberpar tcrre. lis Pappel-loientpomlo; ils Ic vantaient d'nn ton de voix ^'oi'thaut, &ils difbient, en faifant ailufion k Püncc-Pilate, que Pontio ctoit un plus galant liommc qu'ils ne I'avoient cru. Un d'entr'eux, chanoine refpečtable, fut tres-nialade; &. pendant qu'il dcchargeoit fon ettoniac, il tourna vers moi des yeux mourans; & eii braniant la t_ tete, il me dit avec uii foiipir: ah fcigneiir capicaiiie, je favois bieii que Pontio ecoit lui grand traitre. Uu autre qui I'eiitendoit, s'ecria: iin momeut, feigiieur chaiioiue , iie ditcs rien concre Pouce-Pilate ; fouvenez-vous que, finis lui, vous ne feriez pas chanoine , & Con excellence ne feroit pas eveque. N'oubliez pas aiafi vos amis. Qiie penfez-vousde ces jreverends pcres de I'egüfe ? Leur merite ne confilte plus dans ic jeCuie & la priere; ils difeiit qu'ils ont arrange leur ä la moderne , & qu'il eft beaucoup plus fimple que celui de S- Athanafc. L'un de ces pretres m'apprit que, fi nous voulions reH. ter quelquc terns aveg. eux, ils uous perfua-deroient bientot qu'ils font les mortds les phis heureux de la terre. Nous avons 6te de ce fyfteme, dit-il, tout cc qui ell Tombre & nielancoüque, & nous croyons que , de tous Ics chemins , celui du ciel doit etre le phis agreable & le plus riant. Si cela n'eft pas, Dieu aurapicie de nous. Je lui repondia que, fi c'e^ toit un peche de rire, comme I'enfeigncnt quelques cafuiftes, i!s fcroient Ics phis grands do tous les pecheurs. Nous tichons au moiiis, coiitiiiua-t-ii, d'etre heureux ici bas j & je crois qu'on ne peut pas mieux fe preparer au bonheur de I'autre vie. Le renoncement aux plaifirs per-mis nous parolt lui grand peche, & nous Pevi^ tons avecje plus grand foiii: aucun de noug ns Jera damnc pour ce crime. Ilfinit enrapportmit tlcux vers qui font leur maxime favorite, & dont Vüici le icns : Dicu eß futisfait qiiand fhom-me e[l co/ucm. Joiiir , ceß uheir, Ce ii'eli: pas la premiere fois que j'ai rencontre cet efprit de licence parnii Ic cierge dc Kome. Pour montrcr aux ctrangers qu'ity a dans leur culte bien des points qu'ils ne regardcnt pas coninie fcrieux, ils tombent fort fouveiic dans I'aiitre extremite. Nous avons cte tres-contens de I'eveque; il eft fort rcfpcde, & ä jufte titre. Ccpendantfa prelbncc, loin dc diminuerla bonne humour de la compagnic, contribua a I'augmenter. II pre-3ioit pare a tous les bons mots i il nous amu-foit par fes reparties iaillantes, & oublioit en-tieremcnt fa dignite epilcopale; mais on m'a aflure qu'il ftvoic bien la reprcndre, lorlque celactoit ncceflaire. 11 nous plaqaprcs de lui ä table, & nous fit toutes fortes de poiiteHes. Sa maifon etl: une des premieres de I'isie, & il eft frere du prince de____ Celt un petit homnie honnete & d'une focike agreable : il n'a pas encore quarante ans ; & coniine iijn fiege elt un des plus richcs du royaume, c'eft une chofe fort extraordinaire de I'en voir pourvu dans nn age fi peu avance. II eft inftruit dans la Hc-turaturciil a lu avec fruit les anciens & ies modernes j il a d'ailleurs autant d'cfpnt que d'erudition. Nous trouvänies chez lui pluHeiirs fi-ancs-maqous qui furent tres-charnjes de re- connoitre que nous ctions leurs confreres.. lid nous preflerent beaucoup de palier quelques jours dc pius avec eux , & ils nous out otfert ^les Icttrcs pour Palerme, ainll que pour routes les autres villes que nous voudrions viliter. Mais Ics chaleurs augmentent avec tant de vio, lence , qu'cn proloiigeaiit iiotre voyage , nous cvaignons d'etre furpris par' !e firoco , qu'on dit fouffler des deferts bn'ilans de I'iVfrique j Sc qui a quelquefois des fuites tächeufss pour ccux qui voyageiit en Sicilc. Je ni'appercjois que j'ai oniis plufieurs partis cularites de notre diner j j'aurois du vous dire que c'etoit une fete annuelle que donne ä I'e-veque la noblefle d'Agrigente. Le repas fut fer-vi dans une vaile gfange ä moitie remplie de bled, au bord de ia mer; on avoit choifi cet cndroit pour cvitcr la chaleur. Iis obfervcnt une methode qui nous parut lingulicre , niais qui eft bcaucou'p meilleure que la iiofcre. Uiie graiide partie des fruits fut mife fur la table avec le Jecond fervice. II y avoit entr'aiitres des fraiies. Les Siciliens furent flirpris de nous les voir manger avec de la creme & du fucre. Le deffcrt confiftoit en fruits de toute cfpece & en un beaucoup plus grand nombre de glaccs; dies etoiein fi bien faites, en forme de peclies, defigucs, d'oranges, denoix, &c. qu'im liom-me qui n'auroit pas ete accoutume ä en voir, le feroit aifement tronipe ; comme cela vient d'arriver a votre ami M. B.....capitaine de haut-honl, ä la tabic d'un dc 110s miniflres, Un domeitiquc lui prefenta imc belie i)t:chc ca gjuce: Icbou capitaiiie ne foupqüiinant aiiainc iupcrchcric, crut que c'etoit vcritablemcnt Ic fruit done on lui olfroit la figure. Cor.imc il aime beaucoiip les pechcs, il en nuirdit avidc-mcnt la moitic. Cettc erreur ne Taltcčla d'abord que eres - Icgerement; mais fcntant fes dents gclccs, il no put plus y tenir; les larmcs tom-berent de i'es yeux pour la premiere lois de fa vie, & il rejcta fur Ton atFictte la peche ä moi-tie funduc , cii s'ccriantavec furcur : imcpdotu dc nei^e pdnu, par Dicu I Sur les fix heures , nous primes conge de nos aimables amis d'Agrigente , & nous nous etiibarqu;imcs dans Ic iioiiveau port, a bord de lujtre Iparonaro. Le havre a etc coiiftruit depuis peu a tres-[;ran(is fruis. Cettc ville fiit toujours un des premiers ports de Tislc pour Tcxportation des grains. L'cvequc & ft compa-gnie viurcnt Je proniener dans un giand bateau ; & comme ils voguoient antour de nous, nous ciunes occafion de leur iaire unc fecondc fois nos adicax. La ibircc fut tres-bclie, & nous fimes plulicurs miiles cn longeant la c6te. Nous depailimcs plufieurs pointes ou pctits promontoires tres - pitcorelques ; la plupart etoient coiivertcs dc grands aloes cn pleine fleur. Jc comptai plus de deux cents de ccs plantes majcihicules. j'imagine que ee coup-d'ccil lie ic retrouve nulle part. Je voutirois vous cadier cc qui nous arriv.i apris Ic cou-eher du foleil ; nuiis l;i vie clt rcmplic dc bicn des traverfes; & puiique notuc voj-igc nous Ciiufüit; taut de philir , Jious devions nous attejuke quelques incuiivcniens. Nuus avtms efluye une tenipetc : ce malhcur doiiucrn du reliefa notrc couiTe de mer, «S: ou eu lim notre journal avcc plus de plaifif. Elle toit pas ü la veritc auffi forte que celle qui eft decritc par Virgile , & dojit la lecturc a don, jic , ä ce que l'oii dit, Ic mal de luer i quelques perfüiines ; niais cllc nc l'etoit que crop pour notre petit batiinent. Nous tachunies de nous rcfugier dans une crique, mais nous n'en püines pas trouver. Le vent foullloit avcc beaucoup d'impetuofite , & nous rccon-nunies qu'il etoit dangcreux d'avanccr plus Join; mais comme la iiuit ctoit fort fombre & noire , nous craignunes de nc pouvoir pus regagner le port d'Agrigentc. Ii n'y en avoit point d'autre i plulicurs milles de Jiuus ; & c'etoit la ieule reliource qui nous reltoit. Nous virames de bord; & apres avoir pris beaucoup dc peine pour ne pas echouer contrc Ics ro~ chers & les brifäjis, nous decouvrunes le fanal environ deux heures apres: il nous fervit dc diroiilion ; & entre une & deux heures du matin , nous entrames iains faufs dans le Havre. Nous nous couchamcs fur nos matelas ; & j'cx-perience nous ayant appris qu'il pouvoit y avoir en cette i-.tilün de gros terns iiu- liiMtidi- Lorrauec, tcrrauee, nou^ reiülumes nnaniiticment de nc plus voyager fur des fparonaros , & nous c:i-voyames iiir-lc-champ loner ties niuics pour gagncr les moiitagacs de Fulernic. La teiniitjtc dura tout Ic jour , Ik lat tres-violence. Nous n'cümcs qu'a cinq hemes des mules, des guides & des gardes. Nous partimes alors ä peu pres dans le inenit: ordre raiici:nc ties montagiies que iious avons paC-cs loli Ic PaniuHe, 111 qifaucune dcy mules voiilCit les habitcr, excepte peut-etre Melpomene, qui aime les phyfionornies tnif^iques. Je vous cn tirerai auHl-töt qu'il me Icra polJiblc , pour vous ramcncu parmi les iiommes. Pltii^d'unc foi-s j'ai iouliaite d'avoir votrc mufe pour coüi-pagne dc voyage: mes Icttrcs aiiroieiit ete plus ititereiraiiCes, Prenez rinteutiou pour le iiiit. Apres avoir marclie jufqu'a niiniiit, iioiis aii-ivämes i lui autre milcnible village , oii nous dormimcs quelques hcures fur la paille, pour nous remettrc cn route a la pointc du jour. Nous eiunes le plailir dc voir le iolcii fe lever du {bmmec d'uue tres-haute monca^nc, & nous Rimes ravis de I'aipccl dii Stron.iliolo & de to Utes les isles Lipari, que nous voyions ä uue graude diitance de nous. Ku dcfcendaiit de cctte montagiie , nous nous trouvämes fur les bords de la mcr; & quoique cette roitce fut plus longue de qticlquss milles, noits la pnmes ccpendaiit de preßreiicc k cclle de I'ia-tL-rieui: du pays. Nous mimes bientot pied ä tcrrcpour nous buigner. Voiis jiepoiivez pas iiiiagiiier corabien cct exercicc procure dc do-liilfcaieiit: nous en avions grand befoiii, apres h flitigne d'ua paucil voyage j car il y avoit trois joLiis que nous ne nous etions deshabilles. V'otre ami Fiillarton, qui n'a que dix-feptans, mais dont I'cfpric & )e corps bravent totites les liicigiies, recoLivra fes forces dans uii iiiibiit, & flit pret afe reniettrc en route. Nous fiines du the, & nous dajeanames fous un fig;uter. l.,es environs dePalerrae font tres-beaiix. Tüntes les allocs font plantecs d'arbres fruitiers & do gros aloes d'Amerique en pleine fleur. Nous paliames pres de la ville, vers un endroic ou les meinbres d'un grand nombre de criminels ctoient fiifpendus a des crochets. On avoit fait quelques executions depuis peu ; & ccs cada-vrcs d^coupcs ofFroient un ^pedl:acle hideux. A notre arrivee, nous appriraes qu'un pretre Ä: trois autres coquins avoient ete arretes apres IUI combat opiniatre, dans lequel plufieuts hommes furent tues de part & d'autre. Le pre-rre nevoulant pas'fc rendre aux fatellites, fe plongea un poignard dans le fein, & niourut fur-Ie-chanip; les autres ont ete mis en prifon &punis de niort. Commcil n'y a qii'une aiibcrge a Palcrme , nous foinmcs obliges de payer cc que le pro-prictairc nous a dcmaiule, & nous lui donnons cinq cUicats par joiir. Nous fo mm es alTcz mal äogüs. A p rop rem cnt parier, c'ellia feule hütel-'eric que noiis ayoiis encore vuc cn Sicilc. Elle eft tenue par une Francoife babiüardc & incommode, que nous ne p^uivons paschaiTcr dc nos chambrcs i & elle n'y vient jamais Jims nous parier de tel priiicc ou due qui Jb ibnt trouvcs parFaitemcnt heureux d'etre logcs dajis famailbiT. Elle nous fait entendre qu'Üs etoient pailioniicment amoureux d'elle, & il fcmble qii'elle trouve tres-mauvais que nous ne ibyctis pas dans !a ineme dilpolaion. J'aideja ete oblige de lui dire que nous etions une ejpece d'Jiom-mes qui vivioiis retires, & que nous n'aimons pas la compaj(nie. jc vois qu'elle nous cn ef-tiine nioins; & commc j'ai palie ce matin dans la cuifiiie fans lin parier, eile s'eft ecrtce: Ah, rtion Dieu ! comme ccs Anglois font iäuvages! ,|c crois que nous devons tairc un peu plus d'at-tentioTi ä eile ; Eins quüi, eile Te vcngcni, eii nous faifimt payer plus eher; niais elle elt ex-traordinairement gnilFe , Sc laide commc un diable. Elle fe placre Ics joues d'une maniere degoücante : fon portrait eft dans la chambre d'ou je vous ccris, ainil que celui de fon mari, qui, pour le dire eit paliimt, e(t un imbecille. I! eft peint tenant une tabaticrc ouverte dans Hue main , une taile d« cafe dans Tautre, & (Hfiint en raemc terns des douceiirs ä inadamr. J'ai rcmarquc c:tLc triple occupation, qui nie jembloit figiiiiier qiiolqae chofc de particulter. J'cn ai parle a la fenimc, qui ni'a dit que Ti, dec hii LippLirteiioit j que foji miiri uimoic paf-llonnenicnt Ic tubac & le cafc, & que cepcn-daut il la prcferoit ä ces deux plaillrs. Je n'ai pa lu'empechei: d'applaudir a la naiVete de cette peiiJee- Madame eft petiite avec uiic cnorriie bouquet fur la gorge & une orange dans la niaiu droice, fJjjne emblematique dc fa douceur & de fa chaiicce. Elle ajouta qu'elle avoit prefl'e ]e peiiicrc dc la tircr avec It foiirhe fur k vifagc ; que coninie il n'avoit pas aifez d'efprit pour j'egaycr, ellc avoit ete obligee d'en artecter utt qui n etoit pas tout-a-fait auili joli que le natu-rel, mais qui vaudroit toiijours mieux que de paroitre trifte. Je luirepondisquelle avoit rai^ fon, & qu'illui feyoit parfiiiteuicnt bieii, parce que les danies gralfes font toujours de bonne humcur. Jc vis cepeiidant qu'il falloit lui faii:e des cxcufes fur la derniere partic de men compliment, qui niefaifoit perdre dans fon efprit i'eftime que j'avois gagnee par la premiere. II eftvrai, dit-elle aifez piquee , que j'ai ini pen d'embonpoint,inais je ne fuis pas fi gralfe. |e lui deniandai pardon de ne pas connoitre tou'te ]a fineife de la laugue franqoife, & je I'aflurai au''embonpoint etoit le terme que je voulois employer. Elle me fit une reverence , & me dit : oui, raonfieur, pourparler commc ilfaut, oit doitdirc embonpoint; dji iic dit ^izs^aße. Je lui jurai, cii lu liiluant jiiiijira tcrrcf que ceiiiot Jcroit a jamais r:iyc ilc moii vocabulairc. EUc me qiiitui avcc im gnicieiix foudrc, & ine fit imc rcvcreiicc bcaucoup plus profoiule que Iii premiere, cii ajoutaiu; je lavois biču que mon-iieur ctoit uii homme cointnc il taut i »i. cllc s'eii alia en fauttilant Jur la pointc des picds, pnur me fairc voir combicii je niV;Cois ti-ompe. Cette femme m'a rappclie ime oblcrvation qui s'cft ^oujours voriBec. Les Franc;ois chaiigeiit pcu tie Dircyis Ik ile inaiiiercs, en Ic siielaiit avcc les autres nations , ])cni!ades qii'ils ibiit leiils dignes d'etre i mites, (iiioiqit'cllo foit ici dcpiiis vingtans, eile clt toujoiirs aulFi franqoifeque fi cllc n'etoit jamais, Ibrtic de Paris ; & clle ue-garde toiites les dames dc ralcnne avec le phis grand niepris , puree qii'eltcs n'ojit jamais, vu cctte capitale , iji qu'eÜes ii'ont point entendn ia iniifique fiiblime de ibn divin opera. Ellc eft d'ailleiirs un abrege mcrveitleux de tontes les feinmes de Fraitee , dont la palTioii univcrfellc [lit to u jours le defir de pluire & dc paro i tre jeuncs ; & je crois reellcment qu'clles euiiier-vcroicnt ces pretentions, quand dies vivroient niilleans. c^uicoiique oblerve, dans les aflcm-!l>lces publiqucs , leurs tetes de mort enduitcs d'un mafque epais de vernis , lera bicntöt con-Vaincu de ccttc varite. Au contraire; des que nos vieilles ladys luigloifes ont atrcintPage de iüWfaute AJis» cllesfe piqucut d'cn uvoii-.quutre-» vingt, & ellcs paroiflent auffi vaincs du nom-bre de leurs iinnees , qu'elles 1'etoieiit autrefois de leiir jeuiieire. J'en coimois plufieurs qui ne iojit pas moiiis conccntcs., & j'oferois prelque dire , moins rcchercliees avec ieurs rides , qii'cllcs I'aicnt jamais etc avec leur teint fleuri. Une vieilie fcmme de bonne humeur , qui ne rougit point du nombre de fes annees, eft aufl] refpcdable & auffi digne d'eltime , qu'une petite-maitreiTe fletrie, qui remplit fes rides; de vemis, & veuC ä qiiatre-vingts ans pafler pour en avoir vingt - quatre, elt ridicule & meprifu, ble. Adieu. lettre xxi i. P'ilk de Palerme. Älarino. Lieux ohfc tien, nent les converfations. Dames Siciliennes. Reflexions. A Palcrme, Ic 2} juin 1770. 'ai bcaucoup dc chofes a vous ecrire fur cette viilc; nousy goutons chaquc )out de nouveaux phiifirs , & nous laquitterons aveebien du regret. Nos lettres de recommandation noxis out prociirc de tres-agreables connoißlinces , & Ton nous comble de politeffe. Mais j'entre-prendrai de vous donncr d'abord quelque idee de la ville , & je vous parierai cnfuite des habi-tans. C'efl ime des plus r%uHeres que j'aie vucs, ellc cfl batie fiir xin plan que toiites les f^ratides vi lies devroient iiiivrc. Les deux rues principalcs K'entrc-coupent cxadcincnt iiii ceJi-trc delacitc, 011 dies forment iine jnlie pKice reguliere, appellee VOttangolo^ oniec ile tres-lieaux butimens iiiiiformes. Dii cciitre de cette place , on dccouvre renfemble de ces qti;\tre riies , & les qiiatre grandes portcs cjiij !cs ter-minent. La fyjnii;ec/e produic un eHet cliar-niant. Dans un rnois d'ici, elles doivent toutes etre magnifiquement illinninees, & elles Ibr-meront furement alors le plus bean coiip-d'oeil du mondc. Laville n'a pas plus d'un mille de diametre , les cjiiatre poitcs font čloigiices l'une de l'uutre d'euviron un dcmi-millc. Ce ■font de tres-bons morceaux d'arcliitcdurc ri-chcment decores ; & eii particiilicr la PortaNova & la Pona-Feiice, lcü]uelles termiiieut la i'uc appellee il Corfo, qui va du llul-oueft au nord-e!l:. Les petites rues font ordinalrcmcnc paralleles aux graiules; de Ibrte qu'apres quelques monicns de marclie, 011 cit tüujours lur d'arrivcr a l'une des nies principales. La PortaFeiice, qui e(l: la plus belle , debouche dans le Mari/10 , promenade delicieuic, qui fait un des grands plaillrs de la noblelle de Talerine. licit l^tJHic d'un c6tc par les nnirailles de hi viüe, & c'c l'autre parlamer, d'ou i! vient tounnu-s une liri fc agreable dans cctte Tai Ton briilaJitc. Ona ^^ati dcpiiis peu au centre du Marino , une ef-Pece de temnic (mi fert nour im orcheihe pen- tlasit les mois d'etc ; & comme ou efl: oWige alors de faire de la luiitlejour , le concert nc commence que qiiand minuic fonne; ce qui eft le fignal de ia (imphoiiie. La promenade eft rcmplie de carro/fes S; de gens a pied ; afiu de inieLix fiivorifer les intrigues amoureides , ii eftexprcliement defendu a qui qiie ce Toit de porter de la himiere. Tous les fiambeaux s'e, teignent i la Fona-Fdicc ^ oi'i les dome'tiques attendcncleretour de leurs nvaitres ; oc Fiilieni-blee reib une heiirc ou deux duns les teuebres, ä nioins que les chaftes comes de !a lune, s'y gliflant par intervallc, n,c vieniient les dilTlper. Lc conccrt finit fur Jes deux heures du niatin, & alors chaque mari va retrouver fonime chez Uli. Cette inflitution eft admirable, Ik ne prodiiit jamais de fcandale : un cpoux lie refufe point ä fa moitie la permillion d'alier au Marino j & les dames, de Icur cöte , Toiit ii circojifl pectes, qu'elles preiment tres - Jbuvent des-maHjucs- Lzsconverfiiiioni, doiit ii a un grand noni-bre tous les foirs, ticnnent ie premier rang par. mi leurs autres amiifemens. 11 y en a nne generale , entretenue par uiie foiircriprion de Ia noblelTe; eile commence chaque jour au coucher du foleii, & dure jufqu'a minuit, quand le Marino commence. Cette affemblee merite mieux le nom de amverßüons qn'avicune de ceües que j'ai vues. On y vient recliement pour converier, au lieii ^u'ou va dans celles d'Itaiie pour pour jüucr aux Ciirtes & prendre dj;s;glacqs. Cetle-ci occupe plulieurs appiircemeas , tons eclaires dc boti^ries & qu'on a Join d'jeiiU-ptenir fbis;. Celt niellement ur etablilFemeut trts-fage & trt's-iigreable. On trouvc d'aillcurs. beau-coup de convcrjatio,7s paiticulieres ; ce qui vous furprendni fort , dies lb tieiinenc tou-jours dans lu chambre des fcrames en couches. Dans cet lieureux climat;, laccoiiclienient ell rcgai'dc coinmt; une partie de plaiijr. Nous n'a-vons appris cetcs circonliance qu'hier. Le due de Vcrdura, qui nous fait les honnairs de la villc avcc beaucoup d'attentton & de politefFe» vine nous avertir que nous avions a rendre une viiite iiidilpeniable. La princelTc Fatcrno , dit-il, c(t accoucliec liier au foir, & vous devcz aller aujourd'hui Iiii prcfsnc^r vos refpeds. Je crus d'abord qu'il badinoit; mais il m'allura qu'il parloit fericufement, que nous com-niettrions une grande iinpolitclle, il nous ne-yUgioiis de renipjir ce devoir de focietc. Nous iiyavoiis pas manque, & nous avons trouve la princeile fur Ibii lie dans un deshabille eie-gaiu, &environnce dun grand numbre de fes •auüs. Elle parloit comine u rordinaire,& ne paroufoit point inconunodee. Cctte convirfatiofi ie rcitcre tous les foirs pendant la .convaleC-cence, qui dure communement onze a douze jpurs. Cet ulage elt univerfcl ; & comme les femnies iunt ici trt:s-£ccondes , ii y a ibuvent ti'uls Ol» quatre de ces aiibmblces djp.s le menj.e Part. IL D Tr - • 50 V O t A G t; e tt -S r c i l e ;femš; Peut-strc que le Marino ne contribiü: pas: ■peir i fes 'multiplier. Les darnes de Sicile fe niririent ä trcize ou quatorze ans , & dies font fouveiit g;riind'-meres avant d'cn avoir trcr.te. Le comtc Stu-tela nous a prcfentes il y a peu dc joins ä la princciTe Partaiia Ih caufine , qui, con^rne il nous avoic dit, a plnficurs enfans, dont ! nee'eft iiiie fille de qntJize ans, dune figure chai'inante. J^ous lurr.es luie clemi-heiirc; avcc k princfelle , tres-peiTuadcs que nous parlions a ia Bile j & nous ne fit m es detrompes que iorfquc la jeune perfonne entra. Alors meme il etoit diliicilc de dire qui des deus etoit la plus jcunc & la plus belle. Ccttp dame a cu douze ctifans, & die cojiferve toujours la flcur dc k jeimcile. Elle nVa ailiire que jamais eile no jouit d'lins fLintö plus parfiiitc que lorfqu'elle eft en coucaes. Pendant h-^rolVelic, die eft fou, vent iudifpofee; mais des I'ljilbnit ou die a mis Ton enfant au monde; dieTe trouve cn-ticremeiit gucrie, Ä plii'i 'en et'at que jamais de jouif dc la 'compagnie dc fes amis. Je lui temoigiiai i'etonnemerit que me cauibient ce fiiiguiier effet du dimat, & Hicui-c-ufe couftitu-tion des fenilnc^s cn Sidle; mais ellc fut bich plus fiu-prife cllc-nieme, JoiTque jc lui dis que plufieurs de nos joiics fcmmes mouroient en coudiess & que ics accouchemens heureux ctoicnt toujour« 3.ccüTnp£!.gnes de douleurs cruelles. £Uc depiorLi k ibrc de nos dam CS, & remerda le ciel d'etre iice en Sicile. Je lailic aux naturaliitcs lefuin d'exp]iqucc ce plieiioinene ; nvdis cette faveur etl fiiremenC uiie des ]>remieres dont juuit ce ciimat , qui n'elt point fiijet a la maledidion poitee contre iiotre mere Eve. je ne iäis conimcnt ces I'cm-nies ont merite cette exemption i car elles del-cetuient d'Evo auili diredemeiu que Ics no-trcs , & ciies ccnfervcnt pciir le Ihiit defendli nil appetit jiilH vii'que par-tout aiileurs. 11 eft iiiipeu'dtir quecetanatheme fe faiJe Icntir da-vantage cn SiiilFc & en Angictcrrfi , ou les fem-mes font les plus chaltes dc I'Europe, Ceil pro-bablcment !e ciimat qui prodmt ces eifets. Uaiis les pays froids , & fur-rout dans Ics monta-gnes , les accoiichcmcnt font difficiles & dan-gercux , parce que I'air y durcit & reiierre les fibres, lis ic font plus aifcment dans les con-trees cliaiides & balles , ou la temperature de I'air amollit & reläcbe tonte rorganif^ition du corps. En quelques endroits tie la SuiiJe , £c fur les hautcs Alpes , beaucoiip de fcmmcs meurent eii couches. Phifieurs dcfcendent daiislaplainc quelques femaines avant d'accoi:chcr, & au terns de la criic elles fe rrouvcnt foiih-gccs. On coiiqoit aifcmcnt quel changcment doit pro-f'uire fur tollte la machine x;ne coh)nre d'nir de deux ou trois mille picds de plus qn'ä Fordi-rairc, qui vient la comi'vimcr; fi le mou-vemcnt des nuifcles fb liat par ia prcffiou dc i'atlunoiuhere, conimc cucli'iics autcurs i'oiit D ij. pretendu, combieii cc nouvcaii poids doit-it ajouter ä leur adioii! Cependant, fi cette ftip-pofition eft vraie, notre force auroit dii cJimi-mtcr d'liii tiers fur le romniet de I'Etna , puill que nous avions travcrre iin tiers de Ja region de I'air; niais nous ne nous fommes pas trou-ves dans ce cas. J'aiiouvent penfe queles me-deciiis ne font pas aJfbz d'atrention a ces refle, xioJis bieii limples, & que des hommcs iiabtles poiirroicnt cn tirer im grand parti pour g:ucrir pitifieurs maladies. [Is eiivoient ieiirs maludes ä te) degre de latitude Juiis s'embarraHer jamais du degre de hauteur do rathmofphcre : ainQ ils ordoiincnt aux perflmnes attacjuees des memes maladies, d'aller ä Aix & a Marieille, quoique I'air de ces deux villes Ibit eflcntiel-, lement diiFerent. Marfeille elt au niveau dc la mer; & Aix, ainii que je Tai mefure moi-meme, eft ä pres dc fix cents pieds uu-defllis dc fa fur-face. Je fuis perfuade qu'un habile mcdeciii pourroit faire dc grandes decouvcrtes dans uii pays comnie la Suilfe, & fur tnie montague oa, reilie ä I'Etna, ou il elb aife cn tout terns'de decharger le corps humain d'un poids de plu, lleuis milliers de livres. Ces decouvcrtes ne fg bonieroient pas meme ä changer la quantite d'atr qui comprime la machijie; on pourroit varier encore la qualite de celui que nous refpi, rons. Sur le c6te de I'Etna, I'air elt plus vurie que dans uu efpace de cinquante Ilegres d^. latitude. lettre xxiii- Lc 'Dicerüi. Sa table. NobkJt\ Tcmperaiics de la uobk'ljn. Galanteric,' Jeunes fiimines, Lew cäticdtim. fl Pulermc, le aö iiiin 1770. ^OTRE attachcniciit pour Palermc s'iiccroit (.le jour en joiir , & noiis voyoiis approühei* avec regret Ic tems ou noiis fcrout; obliges de In quitter. K'ous y coimoiirons pliilieiirs pcr-fonnes tres-lenrccs & il'iiti caradere aimabie. Les SiciUcns parüiÜbnE francs t^ (uiccres , & leur püliteflc iie confilte pas eu gviinaccs vaiiies dcmoiiltrations , comme celle tie quelques nations du continent. Lc viceroi clt Ic modde de rhojjäicalito , & Je reite des nob'es imite fon exemple. Ccflun honime de merite; je crois qit'il eft auUi ainie & aufli elfime 411c peut l'etre le vicerui d'un moiiarquo anfolu. II u voyage en Angleterre dans Iii jeuiieile; ik il aitne cncore paiHunnement plufieurs de nos autüLirs, qu'il coniioita merveille. II parle affez bien iiotre langiie, & il en encourage 1 etude. II eil, pur rapport a la cour de Naples, cc qu'eft le lurd-lieutcnaut d'lrlunde relacivement ä ccIle d'Angleterre ; avec cette difTiiren.^e , qü'il ed atifolu conime fun nialtre, & qu'il tieiit Ton parlenient ( car il en u un) dans la plus parfaitc D iij dependance. Les putriotes, qui font en tres-^raiid noinbre , n'oiit jiimais pu rien gagner, ni obteiiir ime pbče ou une peiilJoti pour ceux da leurs amis qui font dans le befoin. Si Ic Joud Townsheiid avoit Je pouvotf dii marquis de Fogliano, je crois que vos qiierelies d'lr-lande , dont nous cntendons parier jufqn'ici, feroient bientöt terminees. Malgre fa gninde autorite, il eft alFabje, familier, & il rend fa maifon agreabie ä tout le moiide. Nuus allons fort fouventdans fes aifcmblees, & nous avoiis dine pliiiicurs fois avec lui. Sa table eft iervie d'une maniere el%ante Sc magiiifique; el!e eft plus brillante que celle duroi dc Naples, qui mange fur de ia vaiifellc qui a plus de trois cents ans, & qui eft noire & rouillec. Un jour que nous etions ä fon grand couvert, j'enteti-dis quelqu'un qui demandoit fi on ne I'avoit pas tiree des ruines d'Herculanum. Celle du viceroi eft tres-belle, & le reite y repond; mais nous u'avons encore ricn vu qui foit comparable au luxe dii repas que nous fiines ä Agrigeii-te, danslc grenier. La cuifine ficiUenne eft un melange 3e I'efpagnole & de la franqoife; & Toillc garde toujours fon rang& fa dignite au centrc dc la table , environnee d'un cortege iiombreux dc fricaifees', de fricandeaux, de ra-:goLits, dc beignets, comrneun grave Efpagnol au milieu de quelques petits marquis femillans. Lcs autres gentiishonimcs, ch^z qui nous avons en occafion de manger, out aufli line table tres^ snagmfiqiiement fervie , fur-tout en dciTerts & cn glaccs; on yea trouve licaiicoiip plus que flails aucmi autre pays. I!s font fort fobrcs fur I'ardclc du vin. Kous leur avons appris ä boire ä la {iinte des dames & ä choqucr avcc leiirs amis2 Cctte pratique fociale les animoit fi fort, qu'iis büvoientplus qu'a I'ordinairc, & ils nous ont iouvciit rcproche de les avoir rendu ivrogncs. Iis ont beaucoup de frugaüte dans Jcurs repas journalicrs ; & d'apres la Ibbriete que nous avons reniarquec dans cctte ville, nous icfm-3nes periijades de plus en phis que la fituation clcvee d'Agrigente eft une des principalcs cau-fes de i'ivrognerie de fes habitans. Les Siciliens ont toujours paife pour etre tr«-galaiis, & ce n'elt pas fuis raifini. Tout Ic peuple fe pique de pocHe j 3es payians eii\-raemes compofent des vers, & un homme fait mal Ja cour ia niaitreire, quand il n'eft pas en etat do celcbrcr fes touanges. On croit com-nuinemcnt que la pocfie paltoraJe a pris naif^ fancc dans cctte isle; & Theocrite, qu'on ne cefle de copier, fera toujours rcgarde comme ^e princc des poetes en ce genre. Ku miifique, ■ainfi qu'cn poefic, les pctites pieces a:oriqi:es font ordi]iairement appellees ßciü.^jii. Autre-foicles amans avoient coutuine iVen joucr tons les foirs fous Ics fcnetres de leurs niaitrelTes-, pour esvpnmcr la dclicateiTe de leur pafTion; inais les ferenados ne font plus a pnilcnt fi i la mode qu2 lorfqu'ils avoier.t des üaifons Div intimes avec l'Efpagne. Un de leurs auteurs dit qu'alors un liomme ne paflbit pas pour galant, s'il n'avoit pas gagne im rhiime, & qu'il ecdit fiir de ne pas voir courojiner fa flamme, s'il rte failbit fa declaration d'uiie voix enroiiee. Les dames nc font pas maintcnant fi rigides; elles daignent quelquefois ecoufer un homnic <}iii leur parle avec unc voix ckire, & elles 11'exigent plus CCS exploits pmdigieux de che-vaierie, qui etoient jadis neceffaires pour en triompher. Terraffer un taiireau furieux, vain-ere un. farouche fangiier, etoit ie plus beau compliment qu'un amant put fairc a fa maU tre/fe; & en tiiantces animaux, il amolliflbit plus le coeur de fi belle, que par tous les foupirs qa'il auroit pu pouifer. Un de leurs poetes a toiirne ces ufages en ridicule d'une matiiere pluifante. II dit que la petite Heche de Ciipidoii eft diangee eii line lance raaifive, qui perce Ic tendre cceur de la dame cn memo terns que la peau dure du taureau. Ces coutumes gothiques ne regnejit plus qu'cn Efpagne; & les aimables Siciliens ont repris leur douceur primitive. A vous dire le vrai, la galantcrie elt ii pcu pres ici fur le meme pied qu'en Italic; ies figifibes font tres-communs , quoiqu'ils n'y foicnt pas aufli nombreux que fur Ic continent. L'infide-lite conjugale ne paffe phis pourimpeche mor-tel : les confefleurs trouvant des methodcs ai-fees & affez plaiCuites pour Ies faire expier, les maris font coiiteiis j comrae les bons gene- raux , lis fc confolcnt de la perte d'liiie place , par la prtie d'linc autre. Ccpendiuit la licence des femmes ii'cttpas portcc fiiiiriloin qu'eii Icalie. Nous avoils vu des flimilles Iieureufes , des maris & des fcmnies cjiii s'aimoient vcritable-meiit. Sc qui prenoient piaifir ä s'occuper de concert de I'education de leiirs enfans. Je pour-rois oil citer piufieiirs, tels que le duo de Vcr-dura, le prince Partaiia , le comte Uiicerni , & pluiieurs autres , qui vivent daiis I'liniou la plus intime. Ii ed rare de voir ce f|iečlacle fur ie continent ; mais la nianicre doiit on elcve ici les jcunes perlonnes, paroit plus propre ä faire des mariagcs heurcux , que celle qu'oii liiit eil France & en Iralie. Lcs dcmoifelles ne font point cnfermees dans lui couvent jufqii'au jour de Icurs noces j la ptiipart vivent dans la mailbn patcrnelle, oii eiles reqoiveiit leur education , & elics font tons Icü jours eu fociete avec leurs amis & leurs parens. Par ce que j'ai pu voir , je crois qu'oii leur accorde aiitant de Iibertü que parmi nous. Nous appercevons fou-vent, dans les grandes allčmblees, unecotterie de jeuiies gcns des deux icxcs, retires dans uii coin, Sc s'anuilant i des jeiix , fans que les meres en conqoivent la moindre inquietude. Nous nous melons quelquefois dans leur pctites parties , ik nous les trouvons estremement amufantcK. Eu general, ils font vifs & animes , & ils ont un certain nombre de ces jeux d'ef-prit, qui dans tous Ics pays me paroilfent prou- ver que les jeiines perfonnes des deux fexcs le voieiit tres-familierenicnt. Ces afliufemens font inlipidcK , s'ils ne font pas airaifoiitics d'uii peu ds cet agent lubtil & invifible, qui i-encHout plus intercirant dans iiiie fijciete compoße de perfoiiiies des deux fexes. Je n'ai jamais vu aiiciin de ces jeiix cn Italic, en Eipagne , &ea Portugal; )'en ai appercu raremeiit en France : mais il y en a ixn nombre infiiii en Suifle, o« j'on jouit de tonte Ja lihcrti & de coutc la fa-miliaritL' poffiblcs. Voici Theurc dc la conver, fation. Notre carroUc eft ä laporte. Adieu. lettre xxiv. Bagciria. Palais du princi P..... A Pakrme , Ic ij; juin 1770, 3[L y a deux petites cantons, Tun k I'eft, ^ I'autre k Toueft dc Palcrme, oii la principale noblcffe a fes niaifons de campagnc. Nous les avonsvifites tous Ics deux, & nous y avons trouve plufieursjolis chateaux. Le premier eft appeile/iZ Bagaria, ^ le fecond H Colic. Nous revenons de la Bagaria, & je me bäte dc vous informer des cliofes ridicules que nous y avons mais peufc-etre ne m'en remercicrcz-vous pas. Le palais du prince de Valguaniera eft, je crois, le plus beau & le plus magnifiqiie de tons J mais il cfl: bicn loin d'etre Ic plus extraor, dinaire. Si j'cii fiulbts la dolcriptioii, jc vtnis parlerois de chofcs communes a tons Ics autres pays ; mais jc ne volis eiitreticnJrai que d'uii autre chateau qui, fur tout le globe , elt airure-nieut le Icul dc Ton cfpece. II appartient uu prince P . ... hommc d'uiic fortune imuiciifc, qui ll pafle fa vie a enFanter ties monihes & des chiineres iiifiniment plus ridiculcs & plus bizarre? que to us ccux qui font jamais forcis de i'imaginrtion des failöurs de romans & des fidions de la chevalcric erraiitc. t La multitude prodigicufe de (btuesquien-Vironnent Ih maifon, paroit etre de loin une petite annee rangec cn bataille pour fa defcnfe ; mais lorlqu'oii cn approchc & qu'oii voit la figure de chacunc, on fc croit traufportc dans iiii pays d'illulion & d'cncliantemeut. Parmi cc grouppe immenfc, il n'y a pas une feule piece qui reprcfente un objet exillanc dans la nature Ton n'eil pas moins ctoniie du de-ibrdrc dc I'imagination folic qui cn inventa la forme, que de fa feconditc merveillcufc. Jc ^erois un volume, fi )c vous decrivois cn cii-tier cette fcene d'extravagance. Imagincz des tetcs d'hommes fur le corps de differctis ani-iiwnx, & des tčtcs de toutes fortes d'animaux fiir des corps humains. QuclqucFois il a faituiie fcule fiffurc dc cinq ou lix animanx qui n'ont point dc modele dans la nature. On voit unc dc lion JUr le coi d'unc oie, avcc le carpt d'un IcHifd , les jambes d'unc chevre , &~Ia queue d'itn renard; llirle dos de ce moiiftre il cn place iin autre encore plus hideux, qui a cinq ou fix tetes & iiii grand nombrc de corncs. ii a ralieinble routes Ics cornes du monde, & foil grand plailir ell de les voir routes elevees fur la memc tete. Sa femme eft pretc d'accoii, eher ; & plulieurs perfonnes de Palerme nous ont ailure qii'il defire fincerement qu'elle mette au jojr un niotiftre. Sa folie eft d'une etrange forte. II eft fiirprenant qu'il ne foit pas eufernie depuis quelques annees: mais il elt tres-doux ; & en fiitisfiiifant fes caprices inleiifes , il ng trouble qui que cefoit. II donne, nncontraire, du pain ä iin grand nombre de Itacuaircs & d'autres ous^riers, qu'il recorapenfe fuivant que leur imagination fe rapproche phis ou moins dc ia fienne, c'eifc-a-dire, lüivant qu'ils produi, fent des monltres plus on nioiJis ajFreux. ii ft-roit ennuyeux & fatijjant de vous detaiilcr eii particulier toutes ces abfurdites. Les itatucs qui embelliifent , ou plutot qui defigurent la grande avenue & bordent la cour du palais, montent deja ä fix cents: on pout ccpendanc direavec verite qu'il n'a point tranigreBe le fe, cond conimandemcnt du decalofjue ; car ii n'y a pas une de ces ftatues qui rertemble aiix ob-jets qu'on voit dans les cieux, fur la terre 8c fous les eaux. Son perc ctoit un homme d'e{l prit, & les decorations qii'ti avoit faites ctoient d ua tres-bon goiit. Le fils les a niifes ca pieces. pour fiiiic pliice ü ccs tiouveuux cliefa - d'ocu-vres, & cUcs fbnttoutcs catallcv's ciiiib Ltn coin. Lc dedans de ce chateau cnchaiite repond exadeiiicnt ;m dehors: on retro uve par-tout la ioiie & la biziUTcrie du maitrej &dequelqiie Cütü qii'oiife tourne, on appercjoit des Egures originales. Qiielques-uns des apparteniens lent viiitcs &. magnifiqucs : on y voit des plafonds cn grandes votites , qui, au lieu de plütrc ou de Ikfc, font entiercniciitre couverts dc largcs nii-rpirs joints ciiferable trts-exiidcment. Chacun de ces mivoirs faifunt un petit angle avec foii voiiln , ils produilent i'cHct d'un jmiltipHantj dc forte que, fi trois ou quatre pcriunnes fe pronienent au-deflbiis, il paroic toujours y en avoir trois ou quaere cents qui inarchent dans la voiite. Toutes lesportes fontauffi couvertcs de petits niorceuux dc glaces taiilces fur les formes Ics plus ndiculcs, & cntrcmelees d\ine grande qinuitite de cryibu.x & de verres de dilferentes couleurs. Les chambranles , les fe-netres & Ics enibrafures font garnis de pyra-mides & de colonues, de theyercs, chandeliers , coupes, tafles , faucieres , cimentes en-feiiibie. L'une de ces colonnes a pour bafe Wn^jrand pot-de-chambre de porcehiine , & ua ^ercle de jolis petits pots de fleurs pour foil t-hapiteau. Lc fut, qui a plus de quutre pieds de long , elt compofe entierement de pots ä the de dilfercntes grandeurs, & qui dimiuuent par degres, depuislabafc juilju'au chapiteau. Voiis ne pouvez pas imagiiieu quelle eft Fi quatititc de porcelaine qu'uii a employee pour Ibrmcr ces coloiines ; il n'y cii a pus moins dc quaruiite faites de cette mariere, & fur cet ctrange iiiotlcle, Lii plupart des chambres font pavccs der tables de niarbre de ditferciites coiilcurs , qui rcUenibleiit a autant de tomheaiiY. Qiiclqucs, lines font richemcnt ornecs dc iapis-Jazuii, de porphyre & d'autres picrrcs preden(cs ; ieiir beau poli eft nihiintement paflc , 8c elles reifen:, blent ä du marbre ordinaire. En place de ccs Jolies tables, il en a mis en quelques endroits d'autres de fa propre inventit)n , qui ne font pas fans merite. Ce lont de tres-belies ccaillcs de tortiies, melees avec de la nacre de perle, de i'ivoire & divers metaux. Les feiietres dc cc chateau de fee font com-pofccs d'nii grand nonibrc dc vcrres de toiu tcs forces de couleiirs, bleu , rouge , verd , jaune , pourpre & violet, meles fans ordre & iims rcgularitc ; de faqon que, pour voir Ic del & la terre fous la coulenr qii'on defire, il n'y a qu a les regatdcr a travcrs !c panncau correfl pondant de la fenetre, L'horloge eftrenfeimec dans le corps dun» ftatiJC, dont les yeux fe meuvent avec Ic pen-dule, & qui niontrentalternativcment Ic blanc & )c noir; ccqui produit im eifet «iideu?r. La chambre coucher & Ic cabinet de toilette reliemblciit ä deux appartcmeiis de l'ardi» tie Noe ; Ic princc y a pluce toutes fortes d'a-ninijux , nisme les plus viis : cics crapuuds, des trreiiouillcs, des fcrpens, des Icfards, des fcorpioiis, traviiilles cn nmrbrc dans Iciirs propres uoLilcutS. II y a aulli plufieurs bultes qui lie Ibnt pns moitis lingulierement imagines-Quelqiies-uns ont uii tres - beau pro£l d'liu cote, ik de Tautre ce n'eii qu^un fqudette. Ici, voiis voyc?. ui;e noiirrice qui tiejit d?.jis fcs bras unc fif^iire tlont le dos cll exaßemem čelni d'uii enfant, ik qin a Jc vifiige ride d'uuc Trieilte lemme dc qiiatrc-vingt-dix ans. On pcut s'aniufcr pendant quelques niomens dc ces felics : niais on ell: bicntot penctre d'in-disnaticn tc dc mcpris contre le propnctairc Sc riuvenceiir de tanc de iiiöniires. j'avmic que }'en ai bientut cte fati™č , quoiqu'il y ei'it des objcts C\ bizarrement c(jju]us , que le itoicien le phis rit;idc pardonncroit bien d en rire lui peu. Lesitatues de faniillc font tres-rifibles; elles font cxcciJtees d'apres quelques andens portraits, elles formenc unc jiiite rcfpctlabic. II les a habilles dc la cete aux pieds de nouveaux habits: de in a r brc j ce qui prodint i'eilct le plus ridicule que vous puilliez imagincr. Lcury iou-'iers font tons de niurbre noir ; Ics bas iönt firdinairement cn roiigs; Ics habits font de di-verfes coulcuus, blens , verds , &c. avec uii riche galon dc jaunc antique. Les perruques des hommcs &. Ics cocfTures des femracs font de marbre blanc, aiiili que Icurs chcniife^ qui ont de grandcs mancliettes flottaiites d'albatre. Les murs de la maifon Tont couverts de plu, lieurs jolis bas-reüeis de niarbrc blunc d'uu boii gOLit. Coninie il Ji'a pu les enlever ni ies älterer, il n'a fait qu'y ajonter d'iuimciiics cudires , doiit cliacun coiilllte eii quatre larges tables de niarbre. L'iiiveiiteui: & le propdetaire de cettc coL ledtion curieiile eft iin rquelette vivant, qui paroitcraindre tous ceux qui luiparlent; nmis ceqiii me furpric beaucoup, )c l'entendis rai, foiiiier affez bleu fur divers fiijcts. C'cft un des plus richcs habitaiis de l'islci & i'on croit que ies montlres &fes chimercs ne luioiic pascou, te moiiisde 4.S0000 livrcs tournois. 11 auroit pu tairepreuve de tblie i meülcur marciie. Ce, pendant il Jiourrit beaucoup de pauvres gcns, qu'il traite eiibon maitre. Son hotel ä Palerme eft ä peu pres dans le meme goiit que fa niaifoii de campagiie ; füs voiturcs font couvertes de grandes plaques d'airaiii; de fac;on qu'elies font, je cruis , ä l'e, preuve des coups de fufil. Le gouveruemenc a penfe ferieufcmciit ä abolir ce regiment de moiilires qu il a places autour de foti chateau ; mais comnic cc pauvre viliontiaire eft humaiii & qu'il iie fait de niul ä perfonne, on n'a pas cncore execute cc pro-jct, qui itirement le reduiroit au tombcau. Üu dit que ce Ipeclacle a ete iunefte k plufieurs feniines eiiceiiices, (k que quelques monftres; viviuis vivans ont ete produits dans le voifinage. Les ieiranes Ic plaignent de iiepoLivoir plus fe pro-mener au Bagaria, üiis que des figures liidcufes vienuent troubler leui- imagiiiütion quelqiie terns apresj ik les maris, de Icur cote, ne font pas contcns du grand nombre de comes qu'oii y voit. Adieu. Je vous ecrirai par ie premier courier, parce que cetCe capitale mc fburnit beaucoup de chofes iiitereiraiices a vous mander. lettre xxv. ^cnt de ßroco. Convent de capticim, Leur cavean. ßlaniens d^y coujerver les raorts. Jldrejfe d'tm valet Sldlien. A P'dlerme , le 30 juui 1770. Ce qu'oii die id du vent de firoco ou defud-eft, eft vrainientetonnanc. Le thermometre elt, i Ibixaiite-dix-neuf dcgrcs, & nous nous piai-gnons aujourd'huide la chaleur; maisonnous "d iiHure que, (i nous rcltions dans cepays jut qu'a lajliii du mois prochain, uous regarderions aiors comme tres-rafraichiliunt & tres-agrcable', ce terns que nousne pouvonsaujourd'hui fup-poiter; & que fi notiK ilviünä une tois Jenti Par-deur du flrocu, tous les autres terns nous pa-i'oitroient moderes. Je deniandai ä quel degre le thennomocre montoit ordinaireraeiit pen-Pan. U. E daiit qu'il foiiffie; mais je fus fort furpris d'ap-prendre qu'il u'y a pas ici uit feiil de ces inllru-meiis. Nos nnüs pcrnilcrent a nous dire que fa chalf ur etoic ihcroyulilc ; que ccux quiuvoient deineiire pluficiirs iinnees en Efpagne fc a Mal-thc, n'eii avoient jamais eprouve tl'aiiiH iiicom-inode. On n a pas encorc expHque pourquoi cc vent efl plus chuud a Palerme que dans tOLites Ics autres parties dc Ja Sidle. On a ecrit p!ii_ fieiirs traites fur cette matierc fingulicrc; mais il nV cn a aucun de fatisfajfant. Comnie nous fejoiiräierons encorc qitelque terns ici, il ett polFiblc que nous troavions une occafion favorable de vous en faire b defciiption. On a commence , il y a quelques femaines, ä faire des preparatifs pour la fete defainteRofa, lie ; nos amis nous engagent äne pas les quitter avant qu'elle Ibit iinie : mais nous crai-gnons que cs projet ne foit impraticable. La faifon chaude s'approche, & Pepoque que nous avions fixee pour notre retour a Naples , ell dejä palTee. II eft vrai que Naples ne vaut pas la Sicüe ; & fans les compatriotes que nous y avonslailfes ,nous ferions un fejourplus long dans cetteisle. Qiioiqtie lafocicte foit icimeil-ieure que celle de Naples , cependant il y a dans le caradere, TefpritiSc Taniitie de nos Anglois, line ccrtaine confiance, un je n.e faij quoi que j'ai rarement trouve Jiir le continent, ii Ton en excepte la Suiile. Vous traiterez cette alTer-tion de prejuge, oi-' de ce qu'il vous plaira: niai-? je crois que le Riit cll vr.ii. Cc fe!Uim.'?iit ijiij lait Ic charmc dc la Jociitc, & qisi peat Jrni !li '-endre luppoituble, eil caiilü piir cjuel-qtie chüfc (.runalogiiG ik dc lympatliu^iic dans r.os mauiores dc voir &, de fentir, ainli qiu deux inllrumeus mii font ä runiifon eprou-vent !es memes vibrations, lorfqu'oii las tcii-die l'uuou l'aucre. La focietc elt uii conccic: 11 les iiiitrumens iic lojit pas d'accord, il ii'y aura jainais d'harmonie; & , poiit: Juivre ia mctaphore , cette harmonic doit etre relevt'e & lüLitenue par des difronances; mais lorfijuc ies ditronanccs predominent, ce qui arrive lou-vent entre la trempe d'ame d'un Anglois & ccllc d'un Italien, ta niuilquc elt aHiu'ement tres-mauvaile. Avec combicn de plaifir nous puire-riop.s rliiver eu Sidlc, H noiis avions quelques perlbnncs de notre focicte particujiere ! Mais nous regretcons louventles iamilles de M. Hamilton & dc M. W^altei'i tk. nous dellrons de regufjncr le continent. Celt fur-tout a M. Hamilton que nous fommes redevables des ugre-mens dont nous jcuiilbns id : nous ne pou-vions etre micux introduits que par fes lettrcs de recoinmundation j & nous voyons , par le Kde cnt, & t^ui forihe;nf ime aHemblec tres-venenible. La piaU-& ies inulcles, prepares d'lme cercaine mariiere, fonE deveniis aaiH fecs&aiiffi diii'K qu'un morceau de ßock^ßsh^ & quoique pluljeurs y foicut places depiiis plus de deux cents cinquante ans, cependant il n'y a point encore de fquelcttes. Les mufcles pa-roilTent feulement un pen plus retires que dans d'aurres , probablement parce que ces perlbn^ lies cifoknt plus extenuees ä i'lieure de leur mort. Les habitans de Palerme viennent rendre ici des vifites Journalieres ä leurs amis defunts, & ils fe rappellent avec un melange de plai, fir &de douleur, les incidens de leur vie paCee. lis s'y familiarifent avec la mort, & ils exanii, nent d'avancc la fociete qu'ils voudroient avoir dans I'aucre monde. II elt tres-commun deles voir choiiir leur niche, & elFayer ii leur corps peut y entrer, afiu qu'il n'y aitpomt de change. mcnt a fairc lorfqu'ils eii aiiront befoin. CHiel-qiiefois, pav nr,iniere dc pcnitcnce voloutuire, i's s'accoutiiineiit a s'y tciiir dcbou: pendant quelques hcure«!. Les corps des princcs & de la premiere no-blclle font depofes dans de crčs-belles ciiiires , dont quelques-lines font richcment decnrccs. Elles ii'ontpas la meme forme que nosbierresi niais leurliirfjeur eft la memc, & elles ont environ Uli pied & demi ä deux pieds de profon-deur. Les clefs font entre les mains des plus proches parens du tnort, & toute hi famille y vicnt quelquefois verfer des larmes fur foii tombeau. Jc ne fills fi cettc manierc dc dirpofer des morts n'effc pas meilleure que la notre. Ccs vifites peuvent donner des leqoiis adminibles d'luiniilite; & je vous afllire que ce ne font pas des objets aidll hideux que vous riniaifine-nez. On dit que les^corps confervent rplnfieurs licclcs apres leur more, une reifemblance frappante ; & des qu'on a vaincii la premiere im-preiTion que font naitre ccs fig-ures ref]>0(5t,i-bles,! on ne regarde pkis ce caveau que com-nie unc vaiie gillerie de portraits ortginaijx , peints d'apres nature par le peiutre leplus fi-dele. II faut convenir que les couleurs font un peu ternics, que le pniceau n'a pas etc fiat-teiir: tnaisil n'importe; c'eft le pinceau de la verite, Sc jujn celui d'un mcrceiiaire qui ne VcKt que plaire & gagJier de Targcnt. Ces cata- E iij combes pourroieiit procurer de grands avan, tages ä la focietei Sc ces orateurs muets fe, roient ii l'orgueii. & a la vanite les fermons ies pllis pacheciques. Lorfqiruii komme , tel que M. R.....commence k s'enorgueillir 8c ä prendre un air defierte, on devroit I'cnvoyer ■TLir-Ic-champ coiiverier avec fcs amis de la ga, leriej&fi leurs argumcns nechangeoicnt pas iä Hiqou de penfer, il faudroit rabaiidoniicr, comme incorrigible. On nous montraa Bologne le fqucletted'nue cciebre beaiite qui monrut dans un age on elle e.vcitoii: Tadmiration univerfellc. Afin d'expier la vanite, elle Icgua Ton cadavre, comme un monument capable de corriger celle des autrcs. Se rappeilant au lit de la mort Ics adorations qu'on avoit prodiguees ä fcs cbarmcs, & le chaiigement fatal qu'ils alloient fubir , elle or-donna que fori corps feroit dilfeque, & fcs os expofes auxyeuxde toutes'les jeinies perfonnes tropvaines de leur beaiite. Ccpendant, li elle avoit ete confervee dans cette galerie morale , la leqou auroit encore etc plus frappante ; car ces traits qui avoient excite fon orgueil, fulv. fifteroient, mais depouilles de Icur puiHluice & de leur bcautc. Qiieiques-uns des capncins couchent routes les nuits dans ces galeries, & i!s pretcndetit y avoir des vifions & des rci^elations merveilleu-fes, auxquelles tres-peu de perfomies daiguent ajouter foi. Altcune tem me inovte ou vivantc n'elt jamais admile dans cecoiiveiit. Cette ititerdktiou elt gravee cn gros caraclcres fur !a poite. Les pauvTcs capucins out grand befliin de toutes ces precautions : conime ils n'ont point d'oc-cupiitioii, uvGcpeu dcreflTmirces dans refpritj ils (iiccombcroicnt ailcmcnt aiix moindrcK teu-tations. Bocace & tons 1 es oiivrages de cc genre, font remplis d'exemples deleur fragilite. Hier, d>-Jiunt chez Ic prince de Spcrünga, la convciüi-tion roula fiir ce fiiiet , & l'abbe T... n ii on nc pouvoit point avoir de carrolFe ou d'autrc voiture pour de I'argent. A peine etions-nous arrives au milieu dc la rue , que plulleurs gcntiishommes de notre connotirance nous olTrirent la leur. lis pre-noient beaucoup de part ü i'affront que nous avions eJliiye , & ils etoicnt fort furpris de ce que nous ii'avions pas mieux aime envoj^er un domcftiquc cherchcr une autre voitinc, & at-tendrc Ion retour, cxpojes ä la chaleur brulante du folcil. Ce n'cft pas k feulc fois que ]'ef]uit fertile de Philippe nous a ere utile cn parcillcs occa-pons. iNjous fumes mecontcns, il y a quelques iüurs, de notre cochcr , Sc nous le renvoyames. Pan. IL F I! )ic nous eii avoit pas cncore procure un au, tre, 5c nicilheureuiement nous avioiis promis d'aÜer ä une t^rLintie aflemblef. Qiie faireSi on nous voyoit marchcr ä pietl, nous (jtions des-honores pour jamais j c'ei'it ete pirc que li i'on. nous cut furpris cn aduitcre. Ccpeudant on ng ponvoit point trouver de voiture.Philippe etoit trifie, & juroit; niais tjuaiid it vit que nous ctions contraints de nous mcttre en route fur jios iambes , i! ie trouva dajis le plus grand cmbarras; & jc crois reellenient que, fi ]]o;]s avions ete dccouverts , il nous auroit quittes des Ic lenckmain. Son imagination chercha done comiTient ii pourroit conferver I'honncur de ion niaitre & Fa placc. II hefita d'abord a prendre le flambeau ; raais il nc voulut jamais rallumer. Qiioi, dit-il, penfez-vous que je in'interciTe aifez pen a ce qui vous regarde, pour voiis expofer, dans I'etat oii vous etcs , a^x yeux de toute la ville ? Non , non, meffieurs; fi vous voulez vous deshoJiorcr , vous iie tiie forcerez pas du nioins ä y contrtbuer. Souve-nez-vous que , fi I'on vous voit ä pied , per^ fonne ne croira que vous avez un cairolFe ; & avifez-vous , apres cela , de frequenter la bonne compagnie. Je lui repondis: fbrtbien, Philip, pe, fhitcs comme il vous plaira; mais ü faut <]ue nous aliions ä la converfation. II haufla les epaules, en difant: diabolo ! che faremo ? Andia-mo dunqui, fi^mri, andlamo. IL fe mit ä m archer, & nous leTurvimes. Philippe avoit etudie ia topographic de la vilie i il nous coiidiiilk a tnivers des piiiiägeä pcLi trequeiues, eti evitauc ioigneiiicment la nie. Eiifiii nous iirrivames k une petite entree qui condiiiföit aux appartemens de l'ai^ fcinbicc , oi; les vüiturcs s'arretent ordinairc-nieiii. Nous nous gliiraraes doucement ä l'uids des teiiebres. Philippe £iutanc daiis une boutique , ulluma fon flambeau dans un iuftunt, & revinc devant nous , e:i criunt, pia^ia per gli ßgnonforrcßieri, A l'inilant, tout le monde nous tit place. Des que nous fimies entres dans lea liiHcy, il nous demanda fi haut a quelle heure rcvieiidroit le carrolFe, que, decoiicertcs par I'envie dc rire & la fupercherie k laqueUe nous avians pris part, aucunde nous n'eut la force de repondre. Philippe nous luivit , 8c il repeta la quelHon (i fouvent, que nous fumes obliges de Uli dire , a jm^a none. A I'heure prelbrite , il Vint nous aveitir que le carroire etoit prec. Nous etions eurieux de voir comment il fe ti-reroit de ce nouvel embarras; car il etoit bien plus difficile de iurtir que d'etitrer lans etre ap-perqu; niais Ton genie triumpha de nouveau. Des que nous fiimes dans le velHbule, il cou-rut ä la porte, appellant Antonio dc toutes fes forces. i\.ntoine ne repondoit pas j & nuilheu-reuiementnous etions a c6te d'uii grandnom-bre de gentilshoraines & Je dames qui s'en al" loient eh meme tenis que nous. lis earent Fhoii-netete de uous iiiviter,conime etrangcrs, a nion- f ij ter les premiers en voiturc, & ils refufcrent ab-folumcnt de paßer devant nous. Philime ctoit cTuellenient embarrairc. Ii coiirutntr-le-cliiunp dans Iii rue, & revint tout hors d'jiiileiiie, ca nuadiflant Antoine. Ce cotjiiin, dit-il, n'ell: jamais dans Ic rang , Sc voi:s devi'iez le reii-voyer. Tl pretend qii'ii n'a pas pu fiiire cer Ton carVolFc julqi; a in porce, ä raufe du grai d nombre de voitiires, & il vous attend k ein-quaiite pas an-deiroiis. Sue cxcclknie fcront bicu, ajoiita-t-il, d'aller a pied iiifques Ii; aiu trenient vous ferez obliges d'attcndrs une de-iiii-heure. Nous primes conge dc la compagnie, & iioiis pardmcs. Philippe marchoit devant nous avcc fon flambeau , jiifqu a ce qn'il cut prefque pafle les voitiires ; a!ors i'eteignant i terrc, coinme fi cela lui fut arrive par hafard, il entra dans unc rucHe etroite, & nous atten-dit. Qiiand nous Feumcs joint, il nous dit ä I'oreille de !c fuivre. II nous reconduifit au tra-vers du mcmc labyniithc par lequel il nous avoit amcnes, & nous fiiuva ninfi d'lin oppro-brc cternel. Cepeiidantil nous afTura qu'i! per-droit plutot ill place, que de rifquer dc nous deslionorer une autre fois. Qiie penfc2-voi!S dime nation oii dominent des prcjuges comme ccux-ci ? 11 en eft a peu pres aiiifi dans toute Tltalie. Un jioble Italien roiitrit de fe fervir dc fcs jambes plus que dc toum autre ciiofe^ il crcitque fii dignite augmeute parle repos de fes mcmbres: un homme ncpeut etrcrcfpcdciblc , s'ilnc Je fait berccr la inoitii de I^l vic fiu- uiiloplia o;i claiis itnc vol-tUK. Ell u:i moc, oiicit oblige d'etre iudolciu ct-fwininc, pour nc pus etrc mepriic tt ridicule. Que peuc-üii iittcndre d'ujic pareillc Jia-tioii 1 Ccs peuplcs, qui fuiit conius dc paroitre homnies, fcront-ils jamais de gnuides cholbs ? J'avotie que je iie comprendspus commeni cda elt poiiiblc. Croirea-voiis que de tons les iioni-mcs que j'ai vus en Italic, j'en ai troiivc :i peine line demi-douzaine qui euireut aifez de coiirage pour fiinnoiiter cc mepriialile prejiigc 'f Le prince Campo-Fnuico , qui vit en cette viiJc, eit iort jettie dans te cote oppofe da ciei, avcc line force & xuie vicelie inconocvablcs. Qjielle caufc pourroit produire cet eilet , fi cs n'elt la pinJ?ancc repuiJivc dii Ibleil ou de fon athmoiphcrc ? 11 ne paroit pas d'libord moiiis abfurde dc dire que la queue de la comete efl:, pendant tout ce terns, attiree fortemcnt par le ibleil , quoiqu'clle foit chaflee duns une diredion qui lid uib oppofce , que d'alHrmer hi nictns chole de la comete. II crt vral que cetce repulllon fern-ble commencer i afleder bcaiicoup plucut la queue que le corps dc la comete, qui ell tou-jours liippolee avoir dcpalie le foleil , avant qu'elle commence s'eii ccartcr, ce qui n'arrive pas ä la queue. La force repuifive, s'il y en a line, e(t done dans unc proportion beaucoup moins grande que la force attradive , & proba-blement eile nepeutque contrebiilancer la der-iiiere, lorfque ces corps font dans leurs perihe-lies, & les rejeter aflez de c6te pour les empe-cher de tomber I'urlc difque duloleil. La force projccT:ile qu'ils ont acquile, les porteroitalors dans Tefpace des cieux j raais la repulfion di-JTiinuant probablement i mefure qu'ils s eloi-giient de I'athmofphere du fuleil, I'attradion eji reprend la place , & retarde leur mouve-nient il'une maniere reguliere , jufqu'a ce qu'ils arrivent a leur aphelie ; & alors its commei;-cent de nouveau ä retourner vers cet aftre. Je nc fais ii vous goutercz tout ceci. Notre coinete m'a engage dans iinc digrcHion ä quelle je penfois peu , & jc crois que j'aiirois mieiix fait de I'cnvoyer tout d'un coxip duns le ibleil, pour m'eii dcbarraUer. Je peiile que ce fem un jour foii fortj car commc eile n'a point de queue, il n'y a pur confequcnt point de repulfion apparente. Si die ctoit repouilee , Ton atlimofphere feroit entrainec, commc !es aiitres, vers uue diredion oppofee a celle du fbleil. Je ne vois done pus pour eile de moyea pollible de s'echapper. Cos cometes font ftremcnt des corps d'une nature tres - difFerente de cclles qui out des queues , & auxquelles ellcs paroiiient moins xeflbmbler qiiaaix planetes. Ccquiprouvc corn-bieii nous avoiis cncore fait pen dc progrčs dans la coimoiirance du cid, c'ell qu'on ne ies a pas cjicore dilHnguees par un nom different. Ces cometes font la troifieme efpece de corps decouverts dans iiotre fyfteme planetaire, qui paroiilent tous difFerer eflentiellement Tun de I'autre : chacun d'euz eft probablemcnt regie par des loix qui iui font propres, & deftinč ä des rifages particuüers. Combieii la poftcrite Jera ctonnce de notre ignorance, 8c de voir que le geure humain a cxifte des niiiliers d'an-Hees fans connoitre la moitie des grands corpg de la nature! Je ne doutc pas que, dans les ficcles futurs , le uombre des cometes, la forme dc leurs or~ bites bites & ies terns de Icurs rcvoliidons ne foient lieniontres aiilfi claireiiieut que ceux des p!a-nctcs. Notre corapatriote, le D. Hniley, u com-iiicncc ce grand on vrage, qui nlell" encore qii'^-baiiche. La place de ces cometes , l]!)! ont des adiinofplieres cpaiiJcs & point de queues, fera proliublement d^terminec , & on ne Ies con-Jo];dra pUis avec des corps auxqiiels ils'ne ref-ler,-,blent point. l,cs conietes ä queues n'ont guere etc vifi-bks que lorfqu'ellcs s'eloigiient dii foteil ; c'efl cet aiire qui les allume, Si leur donne vn alpedt menacaut. A a concraire , on n'a prefque ja-' nuis obferve cclles qui n'ont point de quciies, que quand dies en approchent. Je he fais paš' meme li Ton a rcmarqiie le contiwe une'leiile ^ois. Je ne me fouvicns d'aucune dönt"le re-toLir ait cte fixe avec quelque dcgre de preci-iicn. )e nie rappelle ccpcnd;ait qu'onparia, il y a quelques annces , d'line petite quiavoit cte decoLiverte ä I'aide d'un telefcope, apres qu'elle eut depafle le dbleil, & qui ne fut jamais vifi-ble k I'ccil nu. II elt aife de flüre c&tte afler-tion, & perfonne ne peut la contredire ; mais il n'clt point dii tont probable que la comete füt beaucoup moins luraineure apres avoir depafie le ibleil qu'avant qu'elle en approchat. Je vous avouerai que, lorfque j'entends dire que le retour de ces cometes a echappe aux aftronomes les plus cclaires, )c fuis porte ä croire qu'elles ■ii'en ojit aucun , & qu'elles lent abibrbecs par Pan. 11, G le difque du foJeil. En eflet , le mouvement violent qui les entraine vers lui, femble Tindi, quer. J'ai fouvertc defire qu'on verifiät cette idee, parce qu'elie rendroit compte en quelque maniere du probldme fuivant, qu'on a regards comme inexplicable. Pourqiioi la grofleur Sc la lumiere du foleil ne paroilTeiit-eiles pas dimi-nucr, quoique chaque jour il pcrdc de fa fubC. tancc en eclairant l'univers ? Cette confomma-tiou doit etre immenfe j & s'il ny a pas dans la nature qijelque magafin cache quiy fburniflc, les planetes auroient dii s'en eloigner davaii. tage par la diminution confiderable qui fe feroit faite dans la force qui les attire. En fuppofaat que le monde n'exifte que depuis fix niille ans, elles fe ieroient mues plus leiitement, & paj confequciit la longueur de notre annee auroit augment! Tout ceia ne femble pas etre arrive: le diametre du foleil eft toujours le meme j il ne paroit pas qu'il ait diminue, & que nous foyons plus eloigiies de lui qu'autrefois. Sa lu. miere , fa chaleur & fon attračlion ne femblent pas avoir change; & le mouvement des planetes autoiir de lui fe fait dans le meme tems; d'ou il fiiit qu'il a toujours la meme quantite de maticre. Comment done cette perte fe re-pare-t-elle ? N'attire-t-il point des regions immenfes de I'elpace, des corps que nous n'ap, percevons jamais ? On a decouvert plufieurs fois, ä I'aide des tclcfcopes , des cometes qui s'avanqoient vers lui, & qu'on ne voyoic point 4 Tcjcil. Le grüiid nombrc de taches noires obfer-vees dans le foleil, icrable iadiquer qii'il ciabore toujours une ccitaiiie quantite de m.itiere qui n'ert pas encorc raffinee, & aflez purinee pour lancer des ruyons de iurniere comme le reite de fon corps. II paroSt difficilc de conce-voir qu'une madcre quelconque puiiFe relter ioiig-tems für le corps du foleil fiins devenir lu-raineufe: aufl) nous voyons foiivent ces taches difparoitre ; c'eit-ä-dire , qtie la matiere dont elles font compofees, elt alors parfaitement fondue, & qu'eile a acquis le meme dcgre de chaleur & de lumiere que le relle de l'artre. Dans nos vcrreries & nos foiirnaifes, oii la chaleur eil exccßive, plufieurs fortes de nia-ticrcs acquierent la meme couleiir & la nieme appareiice que la matiere en fulion , lancent comme eile des ravons de lumiere. On peut jugcr de ce qui doit arrivcr dans le foleil, d'a-pres lecalculde Newton, qui a trouve qu'un corps place ä plufieurs milliers de milles de cet altre, acqueroit un degre de chaleur deux fois plus grand que celui d'lin fer rouge. On a cru ordinairement que Newton avoit dit que U grande coinete avoit cc degre de chaleur; mais on fe trompc : ce celebre philofophealTure feulement qu'elle aiiroit pu I'acqucrir. Si Jious conlideroiis'lugrandeur enorme de ce corps Sc Ic peu de tems qu'il eft dans fon perihelie, 1j chofe paroitra impolFible; & il femble difficile de concevoir qu'un corps qui ne feroit que de Gij Ja groirciir ds notre terre, piiiiFe etre reduic cit fullon fur I'd TiirHice tin foleil, li ce n'ctt apres im elpucc de terns tres-conlldenible : on faic ce-pendaiit; que fcs taches font fouvent beaiicoup plus graudcs. Puilque ion ftippofe .generaJenienc que les rayons de lumicre lont reeilcnaent des parti-cuiesde mutiere proctjdant du corps du foleil, il fautabrolament qu'ilrecouvrc d'aiilcurs une nouvelle matierc : autrement il devroit s'e, puifcr. Jc voudrois que les aftronomes obfervaflent fi ies taches du fulcil ne font pas aiigmentees apres rapparition des comctes, &iices tachcs lie dirparoilfeiit point pcu a pen , comme un corps qui fc fond gradueUcmcnt ls nc Ibii.t pas ,fu-j£;aiis iur ca chapitre, coninie ea Francc , cii Ton nc cciTe de- vous eniuiyer par iles raiiounemens raille ' ibis rebaaus, nuis ou, iniilgre iaHeClätioa d« ' \ quelques-uns, it y a plus de foi que chez au-cuiie autre nation du continent. Je ne connois rien qui donae plus maiivaife opinion d'un homine, que de le voir faire parade de foti mepris pour des choles qu'oil regarde comme fiicrees ; c'eit infulter ouveite-nient au jugement du public. Un de nos coni-patriotesfereoditcoupable de cet exces, ily a environ deux ans, Sc on parle cncore de kit avec horreur. II entra un jour dans una egliie iui moment ou Ton clevoit I'lioftie : chacun ^toit Ii genoux, & il fe tint debout fans doniier la moindsre marque de relpečl pour cctte cere^ monie. '-Un jeune honnne qui etoit pres de lui, teinoin-na JJi fin-prire , & lui dit : il elt furpre-nant qu'un homine commc vous, qu^ avez recM I'educanon d'un genrilhomme, & qui devez en avoir les fenrimens, s'avife d'olienier aulll grievcmentle public. Moi, moniieur, repoii-dit I'Anglois, je iiecrois pas ä la tranflublbn-tiation. Nt moi nonplus, repliqiia TautrcjÄ cependaiit vous voyez que ie fuis ä genoux. Adieu. Gn mappcllc pour voir les prepara- ^ tifs de !a fete; i! efl probable que je vous en fs-rai la deftripuon dans la lettre fiiivante. .f. ,|'ai epic avec grand foin Ic retour de iiotre comete i mais je ne Tai point encore ap. pcrque: j^obferve , avec UJie alFez niauvaife lii- ■ "ctte, de grandcs taches rondes fur le difqii^ du fblcil j je iic lais fi cl- lie ieroit )ias eile qui Hij - .Tn^ VOYAGE EN SIC iLE s'eft prtcipitee dans fon fein; rr.ais je ne vous ciiuuiei-ai plus fur cettc mutiere. LETTRE XXIX. Vent de firoco. Revue thin regiment Suiffe, Rtpas. Veducation cn Sidle cß di^ereiite dc csik du coiitir.ent. Princc de Refut, tana. A Palermc,le lo juillct 1770, IL/E vent dc firoco , que Jious attendions de-puis long - tems . a cri£n commence Je g. D'apres ce qiron nous cii avoit dit, nous le regardions ^comrne infiipportable; niais nous voyons par experience qu'il cit encore plus bru, laiit qu'ou ne I'annonqoit. Le thermometre a etc ciurc foixante-douze & foixantc-quatcrze de^ gres, dcpui,'; que nous fonimes ä notre nouveau togemciii. Lorl^jue nous ctions al'ancien, fou, vent i! etoit a foixantc-dix-neuf& qiiatre-vingtj tiUit il ya de diiFercnce entre le centre do'la villc & Ics bords de la iner. A prcfent nos fe-netre:; font tournees an lun d i & la raer qui eft imniJJiaLeinoni; au - dcllons , iious ralVaichit canttniicllemeut par unc brifc ddicieure. On dit que io firoco a commcnce dimanche de ^rHiid matin. C^iandje me levai aliuitheures, Fair de nos cli.imbrcs, qui font tres-grandes, n'cu eCoitpoint eucorc; anede : j'ouvris la port« iiins roiJDqo!i;;er cc chiingcmcnt tie tetTis, & je »e üis j^tiuiis plus ctonivj, ioriijue jc rcHbncis toi!t-;i-ct):i;i fur nion vifig-e nnc imprcffion pa-reiile ft cclle qu'auroii: fine one vapcur bruliinte Jortic de la bouche L^iiii four, |e i-etinii liUete & fcrmai la por<-e, m cHant ä fiirlianon que toiite 'I'athmolphciT ctoi: cn fcii. ^-Coiis nous h'ifiirtlämes cependanta o;;vrtriiiic autre porte qui conduit Li uiie plurc-forme fiTtiche, ou nous 'loiis nromeiioiis ordin.;ircmci:t. Comnie die 11 ctoit pas cxpofee an vcnr, la clialcwr y fut l^Eiiucouppliis fiipportab!;? iielecroyois <^'apres cc que j'avois Jc:ni cn cutr'cvvrrjit premiere portc : il femb^oit qi!C nous vc-"iotis d'entrer dans un des poeles foutrcrrcins Napbs, & meme il y fiiifoit cncore plus chaud. En pen de minutes toutcs nos fibres . le ti'ouvcrent relach°es d'unc maniere jncon-cevable, & nos pores s'ouvrirentteJlcnient qnc '^lous nous nttendions a tombfr dans ur.c grande Jucur. J'aüai examiner Ic thcrmomctre, & je yis qiie Tair de la chambrc ctoit encorc ß pen . t'chaalfe, qu'il n'ctoit qu'a foixantc-treize & deS'*"«. Le foir precedent il ctoit a foixante-doiize ^ dcnii. |e le pnrtai cn pleinair, & al'lnlbnt '' nionta ä cent dix, & bieiitöt apres ä cent Sc je fiiis perfi'ade que dans notrc an-cien logenient Sc dans ies autres endroits de^la '^'"c, il fe feroit elevc de plufjeiirs degres par-•^'cla. L'air etoit cnais Sc penint: le barometre ^ut psu affcčtc i il iie tomba que d'une ligne. Hiij Le foleil ne parut pas de tout le jour 5 autre-r.ient je crois que la chaleur auroit etu abfo-himeuc intoieriibic; noLis avioiis peine iircller quelques minutes.fur le eote de la plate-forme qui elt expoß ;lu vent. J'y portai dc !a pom-inade, qui {e fondit coinme il ellc avoit etc Bilfe devant Ic feu. J'entixpris dc me promencr dans la rue , pour voir fi quelqu'un ofcroit fc montreri nwis il me fut iinpolEble defuppor-ter la chaleuL', & je ru'emprelfai de rentrer chcž; inoi. Cette chaleur ctoniiante dura jufqu'ä trois heures de I'upres-midi, que ie vent fauta tout-a-cuLip au point oppofe du compas , &. le refte du jour il fouffla de la mcr avec force, II n'eit pas polfible de conccvoir la difference d'im-preffion que caula fur nous ce chaiipraent de i'air; Änous ne fumes pas moins iurpris de-prouvsr en un inltant une fraicheur cxcellive, que nous Tavious eCe de Pardeur du firoco quantl il conimenqu. Lc couranE de cet air chaud avoit f<)ufHc du fud au nord pendant plulieurs heurcs , & jc ne douce pas que Tatlu raolpherc, ä quelques millcs aux environs, ii'en füt cntieremeiit rcmplie. Cependant, des que le vent eut paßS au nord , le froid devint tres-vif, & nous Rimes obliges de reprendre proinptement nos habits, car jufqu'alors nous aviuns etc prefque nus. En tres-peu de tems lc tlierniometre tomba quatre-vingt-douze degres, chdieur qu'on auroic peine fouHric «n. Anq;7ete!'rc. M.;is le firoco avoit tcllement "OLivert iiüä pores S: rdiiche iioü hbres, tjue !e "froid nous obü^'ca a t>miL' tout Ic ioii" les ^^laces cio notre citrrüfie fermses. II elt vrai que je m'cL tois beaucnitp ex'poß e:i plciii üir, voalanc ejfayer que) effbc ii prodLiiroit/ltr fe corps hu-iTtaiii. Je cms d'übord qii'il fcroit iiiipüilible de Je füpportcr 3 maisje rccontiiisquc je me trom-pois, & qu'on pouvoit fc proinsncr {luis uiic g'"fi!ideiiicoiTimoditc dans Ics endroita ol'i l'oii etoit a Ptibri du vent. II Jic prodiiifit p^is cctte fueur qiie j'attendois; cc ]ie fiic qu'une trünl-piration tres-foitc, fuivie d'uiic huir-iditc legere ftirlapeim ; mais je pcnle que i'aurüis ete inondc de liieiir, H j'avoismis mes habits, ou fait le moindre exercice. Je vous avoue que ma curiofite par rapport au liroco , eft maintenant tres-fatisfaitc, & je ne deiire pas le rcirentir pendant notre fejour en Sicilc. Plufieurs perfonncs de ma comioillan-ce, qui nous en avoient parle, vin rent en foule, dčs q-j'il cutceiFe, pour /avoir ce que nous cn penHojis. lis convienjient qu'il a ere alFez vio-icut; mais ils nous alilireiit qu'il Tcit quelque-fois ■■avantage , & qu'il dure beuacoup plus 5ong,tcms : ccpendant il ne contimia jamais pUis de trente-fix ou quarante hciirss, de forte que !a clialeur ne peut pas penctrer les murs t^es maifons. lis avouentqu'autreincnt les homines & Ics animaux mourroicr.t; mais, d'apres ina propre evpcriejice, jl me paroit qu'ils Ce H iv '%2Q VOYAGE EN SiciLE trompent. Si, cjfriiye de la premiere bouffcc , je n'calTc pas ofe nVy expofer de iiouveau , commc il lear iirrivc ordinuirement, j'aurois certaiiiemcnt penfe comrae eitx. lis rioicnt de nous voirmarcher ll long-tems eiiplein air, & ils etoicnt Hirpris de ce que nous raiflons des experiences aux dspens de Jiotre perfonne. Us nous difoient que pendant le firo,co aucun habitant ne fort de chcz lui, a. moins iju'il u'y foit force. Leurs portcs & leurs fenetres font exadenieiit fermees, pour empecher i'air d'y en-trer j & lorfqu'il nV a point dc volets , ils fut pendent en-dedans des couvertures moiiillees. Les domeftiques font continuellenient occupcs ä arrofer les appartemens , afin de conifcrver nil air aufli tempere qu'il elt poffible, car.j'ap. prends qiie toutes les mailbns de la ville out une fontaiiie. Au moyen de ccs precautions , les gens ä leur aifs fouiirentpeu du firoco. II eft fingulier que !a chalcur bridante de ce vent n'ait jamais produit de maladies epidtmi, qucs , & qi.i'il n'ait point d'iiiSuences funeftes fur la fante des habitaus. II les met feiilemeiit dans un etat de foiblelfc & de langueur; niais quelques heures de la tramontane ou du vent de nord, qui iui iltccede ordinaircment, fL;^rI-fent pour rendre a leurs corps fon elalHcite & ft vigueur. A Naples & cn plufieurs autres en-droits d'ltalie, oil il eft beaucoup moins vio, lent qu'ici, il occalione fouvent des maladies putrides, & il produit prefque toujours uti endet ab;ittciiienr de ki maciiine. TI eft vrai tjue ic liroco y dure pluficLirs jours, & meme piu-fieurs fcmaines. Je n'ai pas pu mc fiiire rcndreraifon de cc pbenomcne du dimat de Palcrme. On cn domie diftcrcntcs caufesj miiis aucuiie iie me p.iroit iansfailänte. J'ai vuiin vicillard qui a čcrit furcettc nia-tierc, II dit que c'eit Ic incnie vent qui fait de fi grands ravages diuis les deJbrts rabloiineiix ce ä'Afriqiic, & qui tue quelquefois les animaux tlans Tcfpacc d'unc dcmi-heure. II ajoute qu'il fe rcfroidit cn tnivcriant la mcr ; cc qui le de-pouillc do cctcc qualitc nvcurtnerc avant qu'il iirrive cn Sicilc. Mais oupeut obječlcr que, ii cettc explication ctoitfondce, ii. devroit etie plus violent iiii- ce cotc de Pisle, qui eft Ic plus voifiii de I'Afaquc ; cc qui n'eft pits. II eft ce-pendant pollible que fa clialcur augmente en palTant fur Pisle. Erfcdivenient, il eft toujoiirs pins violent a Palerme, qui eft dans la partic la plus leptenfrionale, que par-tout ailleiirs. Je commence a goiiter cctte raifbn, qiiand je con-fidcre que Palerme eft environnc dc hautes niontagncs, dout les ravines & les vallces font cntierement brQlees dans cette faifon. Cclles-ci contieniicnt une quantite innoinbrablc de four-ces chmidcs, doiit Ics courans doivent accroi-tfc la chaleur, & pcut-etre adoucir Pair & lui faire perdre fcs qualitcs nuiftbles. D'ailleiirs, on brüle dans cc tems-lä fur les montagnes, des bruyeres & des bronffiiiües ; cü qui doit encore äjoiiter i !;i chalcur de ('air. Qiielques peiToimes qui ctoicnt ä la campa, gnc, m'ontditqu'elless'etotentpromenccs ini, mediatement apres le firoco, & que Ics herbes Ics plantes qui etoient vertcs la veille, s'e, toicnt trouvecs aiors abfblunicnt brinies , Sc qu'cUes fc brifoieiit foiis les pieds, commc fi dies avoicnt etc fechees dans im four. J'ajoutcrai pour votre amulemcnt, un journal delu tcniperacure de Fair depnis que nous fonimes a Palerme. Le barometre a rcftc confl tammeiit A uiie ligne ou deiix du meine point 25? I p. i le ciel a toujours cce c!air, excepte le jour da firoco & ie 2(^ '}üin , que nous eCimes une petite pluie pendant deux heures ; de forte que je n'ai qu'i marquer la hauteur du ther-momctre. Thermometre. ..........731 18..........74 .......... ■ i........7Ö .......... ........ . - • 77 23 ■ ..........7^1 ' 24..........77 ..........77 ..........77^ 27..........77 'lliermomctre. il. Juiii 28..........77 i 2 9..........771 3 0..........781 Juiilct I..........79 Z..........80 3..........So| 4 ii iiotrc iogemcnt Air le burJ dc la mer, toiinie vers )c Jiord, 74 5..........73 e..........7ii 7..........7^1 8 , ie vent de firoco , 112-rapres-inidi....... y..........79 10......... 78 Plus jcxaiiiinc I'extrejiie violence dc cette clialeur , & plus je iiiis etonnc que nous ayons py la lupporter avcc li peu d'iiiconiiiiociitti. i^ous n'avons pas nienic cproiive cet abatte-nient total qui eft Pertct ordinaire des graiidcs chaicurs en Angletcrre. Lc thcrmomctre moiita en^ pen dc tems d'eiiviroii 40 degrcs ; il c(t iilici: fin^ulier qu'^vant que lc ilroco fiiuiHcit, ''efprit-dc-viii ftit prociicrnent ä 40 degrcs aii-defliis dti point dc congelation; de forte qiic lc niatiiT du 8 juillet, la chalcur augmcnta pret que dans un ijilbnt aiitant qu'cllc fait comniii-Uenient pendant tout lc terns que le foleil fe niciit; de Pequateur au tropique ; cur c;itrc foi-XiUite-douzo & cent dou^c dcgres, la cliticrcnce eil lameme qireiiti-c ibixuiite-doiize & Ic point lie congclrttioii. Noiis eCiines hier im grand feftin cliez ]e princc Partbiiia ; & le viceroi fit de delTus uii balcon Iii revue dun reg-inier.t Siüire , Ic pjuj beau que j'aic vu au fei'vice du roi de Kaplcs. C'cR inte excellence troupe ; & inalgre la violence de la chrtleiir, eile fit fes exerciccs avec beiuicoiip d'ardcur. Je tiouvat dans les evolutions plus de precilioii & deregainrite qii'clles ji'en ontordinairement, excepte en Angleterre & en AHemagiie. II y avoit ä chaque flanc deux pieces de canipagiie bien fervies. Les grenadiers lancoicnt de faiiflcs grenades qui ne fai-foient point de mal , mais qui prodiiifoicut d'aillenrsle meme cfFet que les veritables. La maniere doju ils les jetoient, m'amufii plus que le refie du i]iecT;ade; ^t ils avoient grand Toin de les [liriger de liiqon que leur coup ne füt pas perdu. Lorfau'il en tomboit un certain r.ombre fiir ini gronppe de gens du peuple, cela faifoit une icene afFcz plaifante. I] n'y a eu que des coefFes & quelques perruques ou des clievciix brules; car il 3' avoit au moins autant de femmes que d'hommes. La compagnie etoit fort brillante chez le priiice Fartana , & la collation foraptucufe : die confUloit fur-tout cn glaces, creir.es, cho, colat, coiifiturcs, & iin gi'diid nombre de divers friu'ts. II Ji'y eilt que la mnitic tics convius qiii jüLia , les untres s'aiivulcrent k auifer en ie pfomenaiit fur la temiire. Nous trouvämcs ie jeiine prince la princelle , qui Ibnt tres-aimables, le tUvertillkiic avec icurs conipagnons i de pedes jeux. I!s iioiis lulmirent avcc plaifir dans leur cercle, 8c nous pafliimcs au milieu i^'eiix quelques heures agreables. Je nc vous ^itpportc cette circonOance , que pour voits iiioiitrer que Techication qu'on donne id aux enfans elt diticrente de celle qu'ils recoivent en Jfaüe.On ne permet pointaiix jeunes perJbnnes dc communication lamilicrc avant Ic mariage. Les dcmoileiles ont ici des manieres aifees : on leur parle tiicilement; dies ne font pas toujours, rinil que iur le continent, ä cötc de leiirs mc-I'es, qui les produifeiit dans Ics affcmblees , plutüt pour ics üiirir on ventc que pour leur procurer qaelque delalJement, de pots ä fleurs & d'arbres de corail artificiel. Le char s'arre-toie tous les cent pas, & alors TorchcUre jouoit un morceau de raulique, accompagne d'hym-nes en I'honneur dela fainte. li reUcmbloit ä un grand chateau mouvant, Äremplülbit entiere-tnem la rue d'un c6r(ä a I'autre j iln'avoit pas, pour fe mouvoir, un efpace proportionne ä f» grofleur. Get edifice prodigieux ctoit traine par «^iiiqiiaute-fix mules tres-fortes, fingulicrement capara(;onnees, rangees fur deux files, & mon-tees par vingt-huit poltillons habilies d erolfes d'or & d'argent, & portant de? plumes d'autru, che a leurs cliapeaujr. Les fenetres & les balcons des deux cöt6s de la rue etoient remplis de fpcc-t'Jteurs tichemeni vetus,& le char itoit fui vi par <^f?smilliersde perfomies du pauple. Cetce pro-ceffion triomphale a tbre trois hatires, & en-iliite il y a eu une maguifique illuraination au Marino. Je crois voiis avoir deja decdt la rangec dc lierceiiüx & de pyraraides qui s eteiident d'une cxtreiniCe ä i'autre de cccte belle promenade. Iis foiic peints, ornes de fleurs artificielles, & entieremenc couverts de pctits lampions pia, ces treš-pres les uns des iiucres. A peu de difl tance de iä on croit voir des berceaux des py, ramides en feii. Tonte la chaine de cette illu, minadon avoit environ uii mille de longueur, & il dt difficile de concevoir queique chofe de plus beau; on n'y appercevoit ni defaut ni iß. tcrruption. La nuit etoit fi calme j qu'aucuii de CCS lampions ne s'eft eteint. f Oji avoit erige, en face du milieu de cette illumination , un magnifique pavilion pour le viceroi& fafuite, qui etoit compofee de toute la nobleire de Palerme; & devant cet edifice oq avoit place, apeu de diftance dans ia mer, da ^andes pieces d'artifice qui reprefentoient le frontifpice du palais, ome de colonnes, de trophees, & de tous les autres ornemens d'ar-chitečlure. Les chebecs, galeres, gaiiotes & autres batimens formoient tout autourune et pecc d'artiphiteacre. lis commenccrent le ipec, tacle par xine decharge de leur artillerie, dont le fon repete par les echos des montagnes, pro^ duilJt un eflet agreable. lis tirerent enfuite uii grand nombre de fufees volances & de bombes dune compofition curieufe, qui bruloient fou, vent fous 1' eaii.Tout cela dura une demi-heure apres quoi tout le palais fut illumine dans un itvftant. Ce fignal fit ceiFcr les cxerciccs de ia inariiie : nous crümes alorü luibiterun pays cii-chuiite. Cctte operation le iit en uii moment, & fans qu'il parüc aiicun agent vifjble. Kn me-me tems tcs fontainea (jii'on avoit conih'iiites diuis la coLir iJevünt le paluiM, commencerent i jeter du feu, Ä: a rcpixfcnter quclques-uns des glands jets d'cau de Verläitles & de Marly. Des qu'ils flirent etciiits , la coiir prit fiir-le-champ la forme d'iin vaite parterre orn« de painiiers, & entreniele d'orangers, de pots de Hcurs, de vafes & d'aiitrcs ornemens cn lenx ci'arti&ce. L^ilkimination du patais finit lorC-que ces feiix ceJiereiit; & le frontirpice s'iüu-niinant alors, on en vit fortir des Ibkiis, des etoiles , des roues de Fcu, qui bicntöt )c firent tombcr ca ruines. CXnaad toutparut renvcrfe, il fortit de ce tas de decombres une explollont de deux mille fufees volantes, bombes, fer-peiiteaux ik diabies , qui fembloient reniplir l'athnlüfphcre, & qui firent un terrible ravage Jür les habits de la populace. Pendant ce Ipec-tacle, on nous fervit dans uii grand pavilion, au centre du Marino, un excellent regal de tiiiFe , de glaces, de confitures & de ditferens vins. C'etoit le due de Caltillano, preteur ou niaire de la villc, qui en fit la dcpeiife. La prin-cipale nobleiFe fe donne ces regals tous les foirs, chacun a leur tour, & ils fe dilputent ä qui fera le plus magnifique. ^ Des que Ics feux d'artifice eurent ceiie, 1» Iii viceroi s'cmbarqun. fur une galere illuminee. Nous reftLinies ä tcrre, pour voir le coiip-d'ocil qu'elle Jious ojfriroit k une ccrtaine diftance. Soixante-clouze rames taifoienc manocuvrer ce bätiment volant fur la furface des eaiix, iinies & claires conime uiic glace. Ces ramcs brilloient comme la flamme; elles battoient en mcfure avec les corps dc chalFe , I es clarinettes & les trompettes, qui etoieiit en grand nombre fur la proue dii batiment. La fete fut terminer par le corfo, qui commence exadement ä minuit, & dure jufqu a deux heurcs du matin. La grande rue etoit auffi magnifiquenient illuminee que le Marino : les arcs & les pyra-midesecoieutplaces des deuxcötes,ä pcu de diftance les uns des autres, exaftement eutre lestrottoirs &ie chcmin des voitures j & lorf-qu'on les voyoit de l'une ou l'autre des quatre portes , on croyoit appercevoir dciix lignes continues de la flamme la plus brillante. Ces illuminations font fifuperieures ä toutes celles que j'ai vues , qu'il eft diflficile de vous en donner quelque idee. Deux files de caiToIfes occu, poient I'efpace entre ces deux ligncs de flambeaux: CCS voitiires etoient dans Ic pius briU lant appareil; & comme elles s'ouvrent par le milieu & laiflent entre voir de chaque cöte la beaute des dames, la richelfe de leurs habil-lemens & I'eclat de Icurs pierreries s'y de-ployoient de la maniere ia plus avantageufe. Ce magnifique coitege fe promeiia lentcraent pendant deux heures ; & ccux qui !e compo-ioienc, fembloienc aiiimes du deiir de plaire. La compagiiic etoit veritabiement ivre de joie & tie plailir ; & le bonheur qui ecinceloit dans tous les yeux, paroiilbit le rcpaiidre par une ^ipece de jympathie fur toute raHemblee. Au milieu d'un tei Ipcdacle il etoit impof-fible deiiepaseprouvcr uiie dilatation & un epa~ iiouiflemenc de coeur: j'avoue que le iiiieii etoit ravi; cette fccjic de joic publique m'a caufe plus d'emotioii qu'une tragedie. J'avois tou-jours peiife que ces feutimeiis etoieiit etraii-gars a une Pete de ponipe & de parade , inais ici la joie univerfeile Jbmbloit reellcment partir du cccurj ellebriiloit lur tous les vilages, & an-nonqoit dc tous cotes ralFectioii , Pamitie & I'cgalite. Certiiinemcnt ies diamaiis & !a pa-rure ne rehaulfoient pas autant les chaimes des James, que i air de compkifance iS: de bonne humeur qui les animoit. Nous ctions diftribues dans difFerens car-rofTes parmi la noblelle, cc qui iio-us donna occafion d'obferver encore niieux. Je vous avouc que je n'ai jamais ioui d'un ipcdacle fi Quelques marlires avec des iiifcnptioiis & des gnivures, qu'oii a tires de dejious Cerre, font prcique les ibuls monuniens qui attcltcnc Ibn cxiftence. Srietoiic die qu'il ctoi.t tombo en ruines avant le I'cgne de Ti-Ijere ; mais comme Venus ctoit la divinite favorite de cet empercur, il le fit reparer ma-gnifiqucmcut. 11 eft cepcndaut difficile de con-cilier ce recit avec celui de Strabon, qui af-fure qu'au terns 011 il vivoit, il etoiteiitiere-nient ubandonne. En eilet, cela clt tres - probable, puifqu'il n'en rcitc plus aujourd'liui au-cune trace: ce qui n'eft pas vrai des grands ouvragos du regne de Tibcfe. Enee dtibarqua au port de Drepaniim, exac-tcmeiit au pied de cctte raontagne. Cell ici que inouruc fon pcre Anchife , en Thonneur duquel il celebra , environ un an apres fon re-iour de Carthage, ces jeux 11 bieii decrits dans rEnetdc. Virgik a tiru dc cct epifode, avcc bsLiiicoup d'adreifc , itn eloge de la piete d'Au-guib, tjui avoit jnftitue des jeux de la r.ienie cfiicce cn rhoiineiir .de Jules Ceiar, Ton pere par adoption. 11 elt liiiguiier que la defcription que fait Virgile de cetCepartie de laSicilc, foiC fi dilfg, rente de celle qu'en donne Homere, puifque Icurs deux heros la viGcerenta peu pres dans le niemc tems. A la verite,Virgile fcmble avoir Tui, vi Ics hiftorieiis dans cette partiedc Ton poenie, pUitöt que le feiitiment d'Homere, qui place dans le pays qui requc Enee avcc tant d'hofl picaUte, rfvabitadon de Polyphenjc & des Cyclopes, oil Ulyile pcrdit plufieurs de fes coni, pagiiotis, &. dont il euC tant de peine k s'e-ciiapper. L'isle de Licofia, ot'i il amarra fa flotte, cfi; tres-voifinc du port de Drepaiuim; & Ho, mere dit que l'avcntiire de Polyplieme arrivii fiir Ja eöte dcSiciie, exadement vis-ä-vis de cette isie. Virgile a pris la liberie de changer cntiereraciitle iicii de la fcene , parce qu'it con-noiilbit mieux qu'floinere la geographie & l'hif, toire du pays; & ilia tranfporte, peut-etre avecbeaiicoup de raifon, au picd du mont Etna. Je craiiis qu'il n'ait pas aufli bien fiiic de changer faclion nienis, & de contredire le recit qu'oii troüve dans I romerei car Uly/fe dit quo quatre de fes compagnons ayant ete devores par Poly, pheme, il lauva tons les autrcs par fon adrclfc, & qu'il s'echappa le dornier de la cavenie. Vir, J?ilc fait dire im nieiifuiige a Uiylfe : tl :ffirme ^u'il JaiJ?a Achcnienidcs dcrriere liii , nindis ^u'Achemcnides racoiite cttte luitoire d'uiie maniere trčs-dilfcrentc. ]1 ailurc aiiiH que Po-Ivphčme ne devora que deux de fes conipa-g'lons , qu'cnfuitc ilslai crevcrciit ranl( ■fwo; avcc un trait aigu : ce quidojine pliitot I'idec d'ujie pique ou d'une Javeliiie, que ccllc d'tme lonj^iic buchc dc bois toute cmbrafce, aiüf] que le dit Horacrc. 11 y a d'ailleurs pUi-iiciirs aiitrcs palTagcs axixqucls ou peiit appli-quer cettc obfervation. Les autCLirs Sicilicns nc pcnfent pas, comme Virgile, qu'Encc fut Ic foiidatcur dit temple de V'enus Eiycine. lis cotivienncnt que la colonic qu'il^ fut oblige d'y lailler aprcs I'incendie de fes vaiNeauif, batit cn I'hoiineur de Ja mere Veuiis la ville d'Ericc aiitour de Jon temple; mais ils Ibutic'iinent tous que ie temple tut cojiltruit par Eryx , ou , comme ils i'appcllcnt,par Ericc, autre his dc Venus, mais Ijcaucoiip plus age qu'Encc, Ic menie qui r^iifta a Hcrcule, par qui pourtasit il fut tue dansun combat de iutte qui ic dunna au pied dc cette montagne. Le lieu (ju Ton fiippore que s'eit pafle cet evcnc-nient, coiiJervc encore Icnom de champ d'Hcr-culc (it campo cTHercok), Dans tout le cin-quieme livrc de I'Eiieide, cet Eryx eft appclle fVcre d'Eiiecj & dans fa defcription des jeux, il y parle des memcs gantelets avec lefqiicls il £ombattit Hercule , tn hoc ipfo Lhtorc^ en cc rneme .endroit. La vue de ieiir enorme groF-ieiir etoiiiia toute Parniee, & effraya tellement le diiinpioii Dares, qu'ilrefuraabfolumentde Gombattre. Adieu. Nous aurons i'opcra dans dei:x jours, & pcnfe que bientct aprcs nous quitCeroiis la liicilc. LETTRE XXXII. Monte-Pclcgrino. Sainte Rnfalie. AncUnrte fartereffe. Situation de Falerme. Antiquite de cettcville. Infcriptions. ATalermcJe SI juillet i^-q, ^OTJS fommes alles hier au mont Pciegrino rendrc iios dernicrs devoirs ä fainte Rofiilie, & la remcrcier des plaifirs varies qu'elle nous a procures. C'cfi: uii des voyages les plus fati, gansqucj'aiefaits. La montagne ell tres-haute & fi excraordinairenient efcarpee que le che-miti qui y conduit eft appelle avec raifoii la fcala, rechelle. Avant la decouverte de fainte Rofaiie, clle etoit rcgardcc comme inaccefL lible; mais les habitans de Palerme ont conC tmit k grands frais un bean chemin fur des Tochers prefque perpendiculatres. Nous avons vu la fainte dans fa grotte , avec {'attitude «gu'clle avoic lorfqii'oi! la trouva, la tete ap- piiyce negligemmeut fur iii main, & un crucifix [{evaiic elle. C'cft ime ilatuc (run trcs-bciui mai'hre blanc, &dii travail le pins fini, qui elt placee duns I'interieiir cie la ciivcrr.e, t-iu meme endroit oii I'on ditque moiirucJaicite RoiiiUe. CVft une jeiiiiti fil!e d'environ qiiinze ans, d'line figure iiitercirante, dans im adc de devotion. L'artille atrouvc inoycn de rcpiindre un iiif e-xtremcment touchant da^ns Ton m;iin-tien & ftir iČi phyfionomie. Jcn'ai jnnais ricn vu (jui m'ait tant aüedo, Ik je Jic J'nis pas fhr-pns qu'elle aitcaptivc les caiirs des Sicilicns-Elie eit couvcrte d'lmc robe d'or battu, & ornee dc quelques joyaiix precieiix. Lacavcrne eii; d'une etendue conliderable, & extremement Jombre. La pauvrc petite doit y avoir fouffcrt du froid. On a bäti iiiie cglife aux environs; il y a des pretres chargcs de vcillcr fur Ics pre-cieufes rciiqiies de la fainte , ik de recevoir les otfraiides des pelcrins qui vicjinent !es vi/Iter. On a trouve dans iiiie caverne de la nion-taf>ne Qiielquina , ruie dilbnce confiderablc dcccile-ci, une infcripcion gravefi de la propre main dc fainte Rofidie. On dit que cet aiitre n'etoit pas aiiez pailible pour elle, & qu'ellc fe retira de la au mont Pelegrino , comnie eii "11 lieu plus folitaire & plus inacceflible. Je la copierai exadlenient telle qu'on Ta conlervce le latin de la fainte: Ego Rcso lh S I N I B A L D I CLu 1 s Q.U INE ET KoSARUM Doäiini Filia Amob-e Dei mei Jesu Christi, I N H o C A n t k o H a b r t a-decrevi. Apres que fainte Roialie ene quitte ia ca-verne ou cette infcription a ete trouvue, oii n'eii entenctic plus pauler qu'uu bout d'enviroii cinq cents ans, lorfqu'on fit ladecouverte de fes oilcraens. On jouit, au fommet du mont Pelegrino d'une vue tres-belle & tres-etemlue. Silejour eft bien clair , on appercoit la plupart des isles Lipari , & meme une graiide partic de I'Etna,. qiioiqu'on en foit alors cloigne de prefque tOLite la longueur de la Sicile. La Bagaria & H Colli ^ couverts d'un grand nombre de jolies: jnaifbns de campagne, fornient im charniant coup-d'oeil. On voit tres-bien la ville de Pa^ lertne, qui eft ä environ deux milles du pied de la montagne. Pluiieurs perfonnes font moj^ tees au fommet pendant la grande illumination,, pout voir le bel effet qu'elle produifoit; maU heureufement cette idee ne nous eft pas venue, i On voit encore pres du milieu de cette montagne j & nonloiu du fommet, quelques pctits reftes d'un ikmeiix fort üii cliateau , ilont Jcs ■auteurs Sicitieus font rcmontcr l'urij^iiie ü l'un-liquitü !ci plus rectilec. .A4iiiia tlit cju'on croit qu'iLfitc bki lors du regne cic Saturnc, inimt-^ (Katcment apres le deluge j- car ati tcms des premieres giierres puniques, il ctoit dcja ibrt refijcdc a caufe de ibn andquitu. C'ctoit alois iiiie place forte, & les anciens hiltoriciis eii font roiiveiit mention. On lit dans le vingt-trüificmc livre de Diodorc, qit'Aniilcar la de-feiidit trois ans contre toitces les forces des Komaiiis, qui entreprireiit eii vain de IVii chal^ Jer uvcc line urmce de qiiarante millc hommes. Palernie ell; I'extreinitc d'liiie eipcce d'ani-phitheatre nature!, forme par des niontagncs de roc extrememenc luuttes ; mais Ic pa_ys qui eit entre la ville & ces mojitagnes , eli: certai-nement un des cantons ies plus fertilcs les plus pittorefqiies de la terre. On croit apper-cevoir par-tout uti jardin magnifique, couvert d'arbres Iruitiers de tonte efpece , & arrofc par de claires foiitaines & des niiileaux qui forment niillc detours ilir cette plaiiie deiicieu-i'e. Tant d'avantages out merite a Palermo pki-licut-s epiüietes fiatteufes. Les poetes fur-tout I'oat appellee amca iCoro, cotjuilk (Tor ^ pcuir fJcprinier a la fbis fa fituation ^ J;i richefie. On J'a Jiommee auffi Awca Falk , Hortus Siciiaz ( valUe iTor, jardin de la Sicih ) ; & pour reiinir tous ces avantages, on hii a domic, menie Till ies cartes , rcpithete , l'hiurniß. Qiielqucs etymologiltes pretendeat que fon premier nom de Panornms liii avoit ete doiine ä ciUife delil feconditc de cette vallee, & que ■ce mot dans le vieux Iniigagc grec fignifiG loju jardin. D'aiitres rcjettcnt cette explication, af, fiuant avec plus dc vraifemblance, qii'elle f'ut appellee Pan-ormus , mot qui fignifie eii grec , tout port, ä caiife dc la grandeur & de la corn-rnodite de Tcs liavres , dont I'lin pciietroit an, treiüis jufqu'au centre dc la ville. Diodorc le psulbainfi; &P['ocopc, dans fonhiitoirc dela guerre des Goths , dit que, memc au tenis de Belilaire, le port etoit fi proFond que cc genera! fit avaucer fes vaifleaux jufqii'au pied des nnirailles de la ville , & que de la il livru I'alTaut. On ne pout plus hii appliqucr cc lurnom avec antatit de raifon qu'autrefois : ces havres ont etc prefque entierement dctruits & comblcs , probablemcnt par les torrens inipetueux qui dcfcendent des montagnes d, abordcrent fur cette isle triangulaire , & Pun. IL L jj choilirent leur habitation dans ce bel cn-droit, auquelils donnerent le notn ds Pan- » onnus.,^ L'evequc traduic une autre infcription chal- ^ deenne qui eft tres-curieufe. On h conferve mais on ii'en a pas autant de foiii que le merite lin fi precieux monument d'antiquite: cl!e eft placee fur une des anciennes portes de la ville, & eile perira probablemcntlorfque cette porte tombcra cn ruirtes. La tradudlion eil cji latin: en voici line en franqois. " II n'y a d'autre Dicu qu'un feul Dieu: ü » n'y a pas d'autre puiflTance que cc menie „ Dieu. II n'y a pas d'autre conquerant que cc „ Dieu que nous adorons. Lc commandant de „ cette tour eft Saphu, fils d'Etiphar, fils d'E, „ ihu, frere de Jacob , fils d'Abraham, Le nom „ de la tour eftBaych, & celui de la tourvoi, „ fine eft Pharat. „ Ces deux iiifcriptions femblent s'cxpUquer mutueilemenc. Fazello les a confcrvecs toiitcs les deux , & il remarque, a I'occafion de cette derniere , qu'il en refulte evidemraent que la tour de Baych fut batie avantle terns dcSaphu, qu'oa dit avoir ete le commandant de la tour, & non füll fondatcur. Une partie desruines de cctte tour fubjfle encore , & Ton y trouve d'autres inibriptions chaldcennts, mais fi mutiiees & Ii ufees, qLi on n'a pus p LI en deviner ie fens. Fazello fe facha uu joLir concrc des ma^ojis qui demoliiToient Ccs precieux reites; il s'eii plaignit amerenieiit au finat, a qui il reprochoit avcc beaiicoup de jiillice negligence & fön indiifercnce. En raifonnaiit Jur ccs matieres , je ßs line objedlion contre I'etymologie grecque cle Paru ormus , a un favant tres-verie dans les anti-quites de cette viile. Jc lui dis qu'il paroil-foit tres-abfurde de donner un nom grec ä uiie viile, long-tems avantrexiftence de la nation grccquc, & que j'etois furpris de ce que Fa-zello n'avoit pas entrepris de repondre ä cett« objedtiün. II eft coiiveiiu qii'elle etoit embar* ralliinte , & que Fazello avoit eu tort de ne pas y penfer; nlais il ni'a alllire que Pan-or^ rnus , ou un mot approdiaiit, llgiiifioit en chal-deeii, ainii qu'cn hebreii, mi paradis ou jardiii delicieux, & que les Grecs n'uvüient pas cru devoir Ic changer. Je n'etois pas allez ravanC pour contrcJire cetcc explication. II a ajoute que Pdn-ormm elt un mot arabe qui fignific toute tau; que c'etoit probablement pour cela que les Sarraiins ne changerent pas ce nom , aiiifl qu'ils bouleverferent toute autre chofe, parce qu'il exprime aiilTi bien la fituation de Palerme qu'aiicun autre qu'ils auroient pu lui dunuer. Cette viile eft eHedivement entouree de tous c6ccs dejoliesä foiitaines de Teau la plus pure, qui coulc des montagnes voifines. Je vous prie de montrer cette lettre ä notra ami M. Crofts, de lui denvander ion fenti-nicjit fur ces etymologies & ces antiquites. Lij Diteš-Iui que je n'ai pas oubUe fa commilTion, &quejciui procurerai tousles livres les plus anciens & les plus inteüigibles (.luifoientäPa-lerme; mais je Jois lefupplier, poiirle rcpos & la tranquiiiite du genre Iiuniain, de nc pas en fiiire une nouvelle sdicioii. C'eft ä ces conditions que je luienvoie un fragment tues-pre-cieux d'iine infcription chaldeenne.il a ete co-pie exadement fiir un bloc de marbre bianc j trouve dans les ruiiies de Baych. Adieu. Le tems cfl; devenu extremement chaud : ie thermome-tre eil k quatre-vingt degres. LETTRE XXXIII. ütilitede laglace dans tin pays chaud. Pecheries de Sidle. Le thon. Le pefce-fpada ou tempereitr. Mantere de fkber pendant h nuit. Peche du comil. Tyrannic dugonver-nement. Principe du fyßhnefeodal en Sidle. P ar le men t. Inqtnfition. Autor it e du viceroi. Forces militdires. Faiffeaux de batidiere. A Falernic , !e 24 juillet 1770, ous avons appris, danslc coiirs de nos con-verfitions avec des hommes inlrruits de cette villc , pludeurs chofes furla Sicile , qniferont pcut-etre dignes de votrc attention. Comme il läit. aujourd'hui li chaud que je ne peuxpas Tortii' , jc rtchenii de mc les rappelier, pour votre amufement Ä pcmr le mien. Le diermo-mccre elt k qiiüCre-viiigt-iin clcgres & tlemi , & Vüus pouvez jugerde Tetac üii fe tioiiventnos corps accoutLimes ua climiit du'iiord. J'ai cependüiit toujoiirs obrerve dans ces cli-niats du midi, que, qtioique la chaleiir foit beaucoup plus forte que dans notre patric , cllc ii'ed cependant pss "rdinaircment accum-pagnee de la langueiir de i'abatteinent d'eC prit que produifeat nos jours brulans d'etl Je iuis fiir que , fi I'ou eprouvoit en Angleterre une chaleur egale a ce!!e-ci, on feroit epuife , &que perfonue lie pcnieroit i lire li iecrire. Cependant je n\ü jamais eu plus dc vivacitts Sr. je crois que la grande quantitc dc glaces que nous prcnons, peut contribiier a cettc hcurenfe diftofition ; car jc vois que ce font les meil-leurs cordiaux, ainfi que I'eau gläcee, qu'on puilTe employer dans les chaleurs tres-violeu-tcs. Non-feulenicjit ces boilFons rafraichiflent; mais , comme le bain froid , elles conimuai-quent tout-a-coup une nouveüe vigiieur a Teil tomac,& donnent le ton aux fibres. II efHur-prcnant que jufqu'a cettelicure nousayons Ci fort neglige cet articlc de luxe, qui , fuivant nioi,eft le plus agreabic de tons,& peut-etre le feul qui contribne a la Gintc. Je connois inie dame Angloife a Nice, qui en tres-peude terns a ete guerie d'lme conibuip-tion menaqante , en n'employant d'autre re- L iij niedc que des gl aces j & je fuis perluade qu'uti habile niedecin qui les ordonneroit ä propos, opereroit beaucoiip dc guerifons dans les maux d'eftoraac & dans les maladies inflammatoires, puree qu'il n'elt rien qui agilFe plus fortement Sc d'une maniere plus immediate fur la machine. II elt fiir qu'on entretieiit la maiadie, lorl^ que dans ces cas on adrainiftre des potions echaul^intes. On eft ici dans Tufage de faire boire beaucoup d'eau de glace dans les fievres inflammatoires: cela va fi loin, qucM. Sanghes, celebre medecin de Sicile, a fouvent couvcrt la poitrine & le ventre de fes malades, de neige 8c de glace, & nous a afllire que cet expedient avoit eu plufieurs fois du fucces. Je doisajou-ter qiril n'a pas etegeneralement adopts. Ceil peiit-etre k caufe des avantages que me procure aduellement la glace, que je vous eii fais uu Ii belclogej car je fuis tres-perfuade que 5 ii je n'en avois pas une certaine quantite Jiu- ma table , je ferois bientöt oblige de celTcr d'ecrire, & de maller coucher; mais lorfque je commence ä etre fatigue, un verre de cette eau nie rani me. Je vais vous parier ä prefeiiC des pecheries de'l'isle. La peche du thoii eft un des plus grands amufeniens des Sicilians pendant l'ete. La fiiiai-, fon de ce poiifon & Penvoi qu'ils' en font chez l'etranger , eft tine des premieres brandies de leur comhierce. Nous fumes invites hier par le prince Speriinga a iiiie de ccs parties Ac peciie; ■Tiiuis la chaleur ctuiL Ii violente, que nous ne pümes pas y aiier. Le poilfon nc paroit dans les mcrs dc Sidle que fur la Hn de niai; c'clt alors qu'on prepare les lonnaros pour les recevoir. Celt une eipece de chateau aquatiquc, conftruic k gi-ands frais de filets tres-fbrts, attaches au fond de la nier par des ancres & des morcearix de plomb tres-pefins. On placc toujours ccs tonnaros dans les paiTages, an milieu des tochers & des isles que le thou frequcnte davantage. On a foin d'ejt fermer prefque eiitierement Tentrec avec des filets : on n'y lailfe qu'une petite ouvö,rture qui eit appellee la porte exterieure dii tounaro: eile conduit dans la premiere chambre , on, comnie ils la nomment, dans fa falle. Des que le poilfon y eft entre, ies pecheurs qui lout en ientinelle dans leur bateau , ferment cette porta exterieure , en lailfant tomber un petit filet, ce qui empeche le thoii de pouvoir fortir. lb ouvrent alors la porte intcrieure de la flillc , qu'ils appellentrantichambre, & enfaifantdu bruit fur la furface de I'eau , ils y amenent bientöt le thon. Des que Ic thou eft entre dans I'aiitichambre , la porte intericure de la falle fe reforme, & on r'ouvre Tinterieure pour y adniettre une plus graiide quantite de poilfons. Qiielques tonnaros onfc plufieurs chamhres düTerentes , qui ont diffcreus noms: le falloii, Liv la fiüle ä manger, &c. Mais la derniere eft tnujours appellee la charabtrc de la mort: eile eft compofee de filets plus furts & d'ancres plus pofantes que les autres. Des qu'on a rairenible ime quantite fiiffifante de thoiis , on les challe de toutes les autres chamhres daus celie -ci, & alors le mairacre commence. Les pecheufs, & quelqucfois aulfi Ics fpečlateurs , armes d'une pique ou harpon, attaquetiC de tous les cötes Ic pauvre animal qui eft (ätis defenfe, & qui -fe livrant au dcielpoir, frappe l'eau & les bateaux avec beaucoup de force, & fe heurtc quclqucfüis lui-meme contre les rochers ou les ancres. Vous voyez qu il n'y a rien de bien noble & de bien genercux dans cet amulement. La peche du pcjU-fpada , ou de Xcmptrtur, eft phis divcrciilante. On n'emploie point d'artifice , pour I'attircr dans un piege j mais on I'attaque en pleine nier avec un petit harpon attache a une longuc Hgne, & on Ic frappe fouvcnt de fore loin : c'elt exademcJit la peche de la bii-leine en petit. Les pecheurs de ce pays, qui font tres-fuperftitieux , proferent une certaine phi'afe grccque , comme un charme pour amener le poilFon pres de leurs bateaux. Ceil la fenle amorce qu'ils cmploient: ils pretendent qu'elle eft d'une eflicace merveilleufc, & qu'elle contraint les poilfons ä les fuivre; au licu que, Ii malheureufemcnt ils entendent prononcei-un mot italien, ils fe plongcnt aulli-tut duns I'eau, & ou ne les revolt plus. "Commcces poifJoiis font ordinaircmcnt gros & forts, ils coureiitquelqucfbis des heiirescn-tiercs, tipres uvoir ctc Fmppes dii iiarpon. Leur <5pec, de qitatre on cinq picds de long & extre-memcntaigue, ieiir doniie dims l'eiui line appa-I'ciicc formidable , flir-tout apres qii'ils fojit blerics. La chair en e[t exccilentci elle rcllcm-bleplus ail boeni'qu'aii poiUbn, & on k decoupe ordinaircnieiit cii cutelecces. La pechc de Vemperciir plus confideriible H MelRne qii'ici. Ony troiivc aulE la moram , Ii efHmec chcz les Romains, & qui vcril:ablt^-JTient e(t le nieilleur poilfon que j'aic man^e. Ce n'elt pas leulement coiitre Ics gros poiP-foiis qii'ils fc fervent dc harpons; ils emploicat lu niemc methode pour prendre des mulcts, elpece particiiliere de maqiicreaux , & cl'au-tres; mais cette peclie fe faittoujoiirs la niiit. Des que le join Hnit, dciix homnies entrent 'liins Uli petit bateau; I'un d'eui: tient irne tor-che ailiimee Jiir Peau , & Taucrc a dans fa mam imharpon tout preta frapper. Laliimiere de la torche attire bientot ie poiUbn vers la furface lie I'eau , & a I'inftant ie harponneur I'attaque. J'eji ai vu tiier un grand Jiotnbre de cette nianiere, ici & a Naples. Uiie flotte de bateaux occiipes ä cette peche, prodiiit lui joli coiip-ti'«.'!) fur Teau dans une belle nuit d'ete. La peche dii corail le fait fiu-tout ä Trapani. Ouyainvente uiic machuie tres-propre ;i cet t>bjet; ce n'ell qu'ime graiidc croix dc bois, au centre de laquelle on aEtache une pierre dure & tres-peraiiCc , capable de la porter an fond: on place des morceaux de petit filet ä chaquc iricnibre ds ia croix , qii'oii tient huri-fontaleraent eti equilibre, au moyen d'lme corde , & qu'oii lailTe tomber dans I'eau. Des que ks peclicurs fcntent qu'elle Couche le fond, lis lieiit la corde aux bateaux; ils ramcnt en_ fuite fur les couchcs de corail; la grolfe pierre detache le corail des rocliers , & ii tombe fur, le-chanip dans les filets. Depuis cette invention , la'peclie du corail eftdevenue unc bran-chs importante de commerce. Les habitans dc Trapani paflent pour les plus induihieux de 1'isle : ils ont enrichi les arts de plulieurs inventions utiles. Uii artifte y a decouv-ert dernierement une maniere de faire des cainees qui imitent parfaitement les antiques gravees fur lonyx. II Ics travaille fur une elpece de coquillage dur, d'apres les em-preintes des msilleures antiques ; & ils font ii parfaits , qu'tl eft difficile de les diftiugucr des modeles. Lorlqu'ils font montes en or, on les porte ordinaircmeiit en forme de bracelets , & les dames dc qualite de ce pays les eftimejit beaucoup. Madams Hamilton (*) en a achete Tannee derniere une partie qu'elle emportaa Naples, oil ils furenttres-admircs. On envoya fur-le-champ des commiflions a Trapani , & (.*) A prefent tady Hamilton. I'ouvrier euc plus tie befogiie qit'il n'cn put faire: cependLiiit nous en avons obtenu quelques puires pous nos amis. J'ai vudcs carnees de deux cents guinees, qui ne font pas plus beaux que ceux-ci. L'extrenie rigueiir du gouveriiement impofo aux pauvres Siciliens des entraves qui Ics obli-geiit quelquefois a inventer des branches dc conimercc.que la nature femble Icur avoir rc-fufces, parce qu'onnc leiir pernietpas de jouir dc Celles qii'elle letir a accordecs. On cultivoit autrefois dans cettc isle un grand nombre de caunes de fucre; mais les inipöts qu'on a mis iur cette marchandile font fi enormes, qu'on a ete oblige d'abandomier cntieremcnt ces plantations. La vente Teulc de leurs bleds, ü eile etoit libre , Iltffiroic bien-tüt pour rendre cette petite nation tres-riclie &ties-florillhnte; car onm'a allure quc,qxioi^ que ia culture fbit en tres-miiuvats etat, le fol donne affes! de productions pour nourrir ies inililaires pendant Jept ans. Apres cela, vous ferez furpris d'anprendre que I'exportation de cette denree e(l- abfoki-ment defcndiie depuis phifieurs annees, au nioins a ceux qui ne pcuvent pas payer des fom-mes exorbitantes pour en obtenir le privilege. 11 s'eniuit que le bled elt tonibe trcs-bas.Le prix commui deialii!me, quipcfe deux charges, ctoit d environ trente & nnfchelings; il eft a prefcnt rcdutta cinq fchelings fix fcHs, & ii eft probahlc qu'ii dimiiauera encore dims k fuite. On m'a dit que les agriciilteurs ont rccueilli avcciiircz de iiegligcjice ia recolte de cettean-Tiee , qui a etc tres-aboiidaiite, paice qii'il ell psu vnüremblable que cecte crueUe defeiifc foit fupprimee. Les fermiers font dejä mines, & leiir ruinc eiitmincra iiifiiilliblenicnt ccUc de Icurs maitres : c'c'U'expedient qu'a employe le mtniiterj deNaples, on plutöc celui cl'Efpagiie, pour liumüier rorguei.1 des barons de Sicile, qui , ä ce qa'oii pretend, ont encore un pen-voir trop ecendu & une jurifdidion abPolue. Piufieurs d'entr'eux ont droit de vie & de mort dans leur domains i mats il eil probable qu'lls feront bicntöt forces de renoncer a leurs privileges , oil qu'ils fe revoiteront (*). Nous avons vaiite quelquefois les richefles de la Sicile, ifc ils nous repondoient : vous auriez raifon d'en parier, il nous pouvions en jouir. Rsgardez ces montagnes, clles contiennent de riches vcines de metaux, & on y voit encore piufieurs niines des Romains j mais pour-quoi !es fouillerions - nous ? Cc n'ell pas nous qui en retirerions le profit; Sc meme la dccou-verte dc quelque chofe do precieux deviendroic peut^etre la mine de celui qui Tauroit faite. Non: les trefors caches de I'isle doivent refter (*) Ce que M. Brytlone avoit predit eft arrive ; mais la fasefTe du c;ouvcrnement a fu reprimer cetEe fermentation paffligere, qui ti'a pas eu de fuite. eiifevelis dans les entraillcs de la tcrre. Si noiis avious te bonheur de vivre foiis itne coiilHni-tioii pareille ä la votre , vous auriez droit de nous appeller riches : nous Gurions alors des füurces d'opulence aiixquelies on ne pcnfbpas maintenant, & nous recouvrcrions bientöt la gloire de notre ancien nom; mais a prcfent iloiis ne fonimes rien. Voiia le langage que nous tenoicnt quel-q^Jes nobles de la premiere qualite; cepcndant ils fe glorifient toujours de conferver plus de reftes du gouvernement feodal qii'aiiciine nation de l'Europe. Mais il n'en iiibfifte plus que le fantome; ily aJong-tems que Tautorite ro3^aIe a tout envahi. La maifon de Bourbon a forme depuis long-tems ie projet d'aneantir le pouvoir des barons dans tous les royaumes qui !ui obeiircnt. Richelieu commenca h executer ce iytteme en France, & fes fucceifeurs ont tous marche fur fes traces. Son influence s'eft rcpandue par degres fur les contrees les plus eioignees de l'Europe, oü eile n'avoit pas pu s ctablir d'abord. Le coniCe Roger polii le premier dans cettc isle les fondcmens du fylteme feodal, vers le milieu du onzieme ficcle, immediatement apres qu'il en eut chalTe Ics Sarrafins. II divifa la Si-cile en trois parties : la premiere fut doiuiee i leglife, du confentement de fon armee : fes officiers requrcnt la feconde, & il referva la troiiieme pour lui-meme. De CCS trois branches, on, comrae ils leg appelleiit, de ces trois bras ( bracios ) , il forma foil parlement qui fubfifte encore aujoiir-d'hui , du moins quant a la forme. La brauche militairc e(l compofee de tous les barons clii ruyaume, au nombre de deux ccnts cinquaiite & Uli, qui font toujoiirs obliges a ini fervice. lis cm pour chef le prince Butero, qui eft preß-dent hercditaire du pariementj car, fuivanc I'efprit du gouvernenient feodal, qiielques-uns des grands otlices font toujonrs hereditaires. Les trois archeveques, tous les evequcs, abbes , prieurs & membres qualifies du clerge, montant ä pres de foixante-dix, ferment la branche ccdcfiaflique; I'archev^ue dc Palerme ell leur chef. La branchc demanuiU {c. forme par eiecttoii, comme notre chanibre des conimu-ncs. IL y a quarante villes royales, appellees detnanialcs yf^wi ont droit dc choifir un repre-fentant. Chaque proprietaire a une voix dans cette election. Leur chef eft le reprefentant de Palerme , qui eft aufli preteur ou maire de la ville. C'eft un offider du rang le plus eleve; & foil pouvoir, qui eft tres- etendu , n'eft infe-rieur qu'aceiui duviceroi. Lorfque celui-ci ell abfent, ilexcrce fon autorite. IIa une compa-gnie de grenadiers qui lui fervent de gardes-du-corps , & il prend le titre d'excdknce. I,e preteur, avec fix fenateurs appeiles pd' trickns, a touts Tadminiftration du gouvernc-ment civil de la ville. II eft nommc chaque annee par le I'oi ou ic viccroi: cc qui efl la meme chofe; car je ne vois pas que Ics habi-tans joiiiireiit encore du droit de tlonner leurs voix; de Ibrtc qu'il n'y fiibfillcpas menie Fom-bre dc la liberte. Vous pouvea jiiger clc la li-beite d'un royaunie oii les niembrcs dc tons Ics tribuiiaux civils & criniinels ibnt jiummes parl'iVLitorite royale, oiitoiis les cmpiois font donnes par la volonte du foiivcrain, & dependent enrierenient de fon capricc. Je deplore fincerement Ic fort des Siciliens , qui poJibdent , je crois , pluHeurs excelIcntes qualices ; mais le caradere natiojial doit infail-liblement s'ctfacer par un gouvernenient op-prefTeur & ryrannique. lis ont pourtant eu le courage de. ^e defendrc contre ini des maiix )es plus cruels du defpotifnie, I'inquifition. Les rois d'Efpagiie one tadie de 1 etablir dans toute fa rigucur ; mats les barons , accoutiimcs a cxercer nne autorite abJoIue, n'ont pus voulu deventr les cfclavcs de quelques prtoes Elpa-gnols. Les inquifiteurs qui poiiifoicnt trop loin Jeur zele, etoient bientot allhlTlnes, fur-tout s'ils s'avifoicntde fcmelerdela coi]duite& des opinions dc la nobleife, C'et expedient raientit Icur arJeur, & iufjjira de la moderation au faint-office. Cepcndant les liabitans font ici tres-circonfpedh dans Icurs convcrfations fur les mati eres religieufes 1 & ils avertilPent ordi-nairement les etranj^crs de le tenir fur leurs gardes, puree que lepouvoir de i'iiiquifition. qijoiqiic diniinLie,n'en; pas entiercnient anennti. Les loix de la Sicile font reoandues dans uii grai-id nombre de volumes. Le roi de Sardaigne avoic dcfiein de les abreger, & d'en former iin code; malheureufementil n'apaspoflede alFcz long-tcms cette isle pour executer ce travail utile. D'ailleurs les loix fervent peu oü il exiile une aiitorite au-delTiis de toutes les bis. L'aiitorite du viceroi ett abfolue j il difpofe de toutes les forces militaires du royaume , & il prefide d'une maniere defpotique dans tous les tribiiiiaux civils. Comme il eft d'ailleurs revetii du pouvoir de legat, foti autorite «'eil pas moins eteudue dans les matieres reli-gieufes. II a droit de nommer ä tous les grands offices du royaume, & de conferer toutes les di-guites civiles & ecclefiaftiques. II vifite les prifons deux fois par an, & alors il peut delivrer tous les prifonniers qu'il lui plait, apres qu'on Uii a fait lečture de leurs crimes. Afin poiirtant qu'il refpečte uu peu Ics loix & ]a juftice , il eft toujours fuivi, dans ces occa-ilons, d'lni confbiller charge de lui indiquer les bornes dc cet ufage. Celt un ofRcier tres-rcfpecle, notnme pour affilier fou excellence dans fes dccifions, lorfque les cas paroilTent importans ou douteux; & ce doit etre un des plus habiles jurifconfultes de I'isle. On donne communcmcnt cette place ä des etrangers, afin que, n'ayant point ici de parens ou de liaifons particulieres, particulieres, leur avis foit impartial & dirige par lafculc equite, Cct olficier entre libremeiit duns toutes les cours & ti'ibunaux, pour qii'il ibit mieux en etat de faire coiiuoitre au viceroi leurs procedcs. Suivant ce que j'ai pu apprendre , toiitcs les forces militaires de la Sicile niontent a neuf mille cinq cents hommes, done miiie douze cents environ de cavalcrie. Plufieurs de ies villes & forterelles, en particuUer Mclfine , Sy-racufe&Palerme, auroient befoin d'unenom-breufe garnifon pour les det'endre ; mais leurs fortifications & leur artillerie font dans un etat qui ne leui' permetcroit pas de faire beau-coup de rcfittance. St cette isle appartenoita unepuiiiitace maritime, je crois qu'ellc domineroit fur toutle commerce du Levant. Outre les grands ports de Trapani, Syracule & Mefline, qui fojit a peu pres aux trois angles du triangle , il y en a plufieurs petits k chaque extremite. Dtis qu'un vaifleau auroit pafle devant un de ces havrcs, les autres pourroient en etre avertis dans Tell pace d'une demi-heurc, au moyen des tours conrtruites pour iervir de fignaux tout autour de I'isle, afin de s'avertir mutuelletuenc des iiivafions fubrtes que tentent les peuples de in Cute de Biirbarie. Ces tours font clevees fur chaque petit promonroii:e, ä la vue Tune de •I'autre. Oay entretient toujours des feux prets a allumer les figjiaux, & ji y a dans chasuue Pan. IL M line perfoiine nommcc pour cela; de fijrte qu'on nous nirareqiie, dans Tefpace d'uneheurc, on peiit donner I'aiarmc a coute Tisle. Nous avons etc temoins ici d'lin iifiigc qui paroit tres-injiiltc, & qui poiirroit enfin ruincr notre commerce de la Mcditerranee. Plullcurs VaiHeaux ont mouille dans ce port foiis pa-villoii anglois; & cependant il n'y avoit pas ä bord Uli feul de nos compatriotes. On tes appellc vaijfeaux de handiere. Pent-etre que cette pratique cit connuc de notre gouvernemcnt, quoique je Teulle ignorec jufqu'a prefent. 1! y a un tres-grand nombre de parcils bätimens fur cette mer, qui fontuntrafic confiderablc dans toute la Mediterrance, au detriment de nos propres vaiircaux. La plupart appartiennent ä Genes ou k la Sicile, quoiqu'ils paflent fous le nom de Minorquins. On m'adit qu'ils achctcnt des pafle-ports dc quelques-uns des gouver-lieurs de nos garnifoiis, & ils peuvent alors commercer pendant le terns qui eft fpccifie, en portant le pavilion de notre nation. On m'uifure qu'il y a phificurs centaines de ces vaiiieaux. lis ont a bord un ou deux matelots Anglois , ou du moins quelqu'un qui parle notre tangue, afin de repondre , en cas de be-join, jcvousprie de me mander fi le miniflcre eli iiifbrnie de cot ufage. Adieu. La cbaleur eft devenue infupportable, & je ne puis plus ecrire. Cependant je nc fini-lois pas ciicore, fi ms. glice n'eteit pas toute fondue. Si ce tcins continue, je crois que nous tomberotis maliides, Lc thermomctre cfta plus de quatre-vingt-deiix dcgres, & la dvAleiir fern-blc augmenter cliaquc jour. L'eaii de lamer cifc meme crop chaude pour s'y baigner, & eile n« nous rafraicJiit plus conune autrefois. LETTRE XXXV I. Titres des Sicilieus. Lew luxe dans les voU twes. Prejuge ridicule. A Falerme , le2ö juillet 1770. ITout eft prec pour notre depart; fi le vent continue a L-cre favorable, void la dernierc lettre que vous reccvrcz de Sicile. J'aurois ce-pcndanc cncore bien des chofes a vous dire J'ur? les SidÜens & leur isle, & jc vous a/Iure que je les quitterai avcc beaucoup de regrct-Dciix dicbecs ont fait voile ce matin pour Naples : on nous a oHcrt un pafFage; mais nous avio ns dcja ioiiu un petit batiment pour nous feuls. Un jeune gentilhonime, le marquis dc.... 6toit -k bord de I'un d'eiix, & il a requ ordr® de ne plus remcttre les pieds a Palerme. Nous avons ete liirpris du pcu de rigiieur de cette pdne, parce qu'il eft coupable d'un crime qu'on punit ordinairement avec la plus grandc fevc-rite dans Ics pays catholiques, II a fMuit unc Mij rcligiciire , qu'il avoit rencontree h euvii'on treiitc milles de cette ville, dans un endroit ou on l'avoit eiivoyee prendre des bains poiir fa fante. Sa mere l'accompagnoit i mais coinme ic jeimc homme eÖ: coufm de la demoifelle , & qii'ils avoient vecu long-tems comme freie & faur 5 la vieillc dame crut qu'il n'y avoit point de danger a leur pcrmettre xin peu de fami* Uarite. La religieufe fut bientöt ^erie, & s'en re-tourna dans fon convent avec un embonpoint fufpečl. Ii y a environ cinq ou fix mois que cela eft arrive; iSc cen'eft que depuis quelques jours qu'on a fait la fatale decouverte. Mais, lielas! eile nc pou voit pas cacher plus long-tems fa grolfefle. Le gentilhomme eft banni de la Sicile pour la vie, & la plus grande partie de fes biens font confifques. II pent fe croirc beu-reux d'avoir ete traite avcc tant de douccur. Si fes juges avoicntete des pretres ou des moi-nes, il auroit immanquablemenC perdu la vie; car c'eft un peche mortel, pour Icquel il n'y a pas de remiffion, lorfqu'un laique couche avec une religieufe. Le cbattment de I'infortimee religieufe ne fera determine qu'apres fes couches i on m'af lure qu'il doit etre terrible. Elle fera probable-ment condamnee ä vivre fept ou huit ans au fond d'un cachot, ayant une tete de mori; & un crucifix pour toute compagnie , & fans autre nourriture que du pain & de I'cau. J'ai vu ä Portallegro en Portugal, une religieuft qui avoit fubi cette peiJic pour la meme iuute. Oil tieiit cette hiltoire tres-fecretc; & ii noiis n'avious paS coniiu iiitimement quelques perfoniies qui la favent, nous ne Taurions jamais apprife. Les Sicilicns confer^'^cnt quelques iifages de!i Efpagnols i mais its n'ont pas leur gravite & leur tacituriiite. Les cadets de famiile s'appel-lent dons^ & les filles donna^ coramc on donne en AngleCerre le nom de lords & de ladis aux fils & aux filles des duos. L'aine prend ordiiiaire-nient le litre dc comte ou de marquis ; mais ils ne font pas tous comtes, comme en France & cu Allcmagne, oii j'ai vu lix comtes dans line maifou , & pres de douze barons dans une autre. Uli des titres les plus ordinaires ici , ainfi qu'i Naples , eft celui de prince. Quoiqu'ils aientete crees par Philippe II, roi d'Elpagne, ils out rang avant les autrcs gentilshommcs, dont quelqucs-uns, & en particulier les comtes, font remonter leur origine jufqu'au tcms des Normands , & regardent avec bcaucoup de mepris ces princes de nouvcllc creation. Les dues & les marquis ne font pas fi anciens : les premiers furent crees par^ Charles V ; & les iecoiids, qui leur font iiiferieurs , par le roi Alphonle au quiuzieme fiecle; de forte qu'on peut dire que la dignite des titres ficilicns eft cii raifon iiiverfe de leur aiiciennete. M iij C'eft fur-tout dans Iciirs equipages & leurs chevaux , que les habicans de cette ville, ainii que les Napolitains , etalent leur luxe; muis par une fage loi du roi de Saudiiigne, que je fuis fiirpris de voir encore cn vigueur, il n'y a que le carrolfe du viccroi quipuille avoir fix chevaux; Ic preteur, I'archeveque & le prefi-tl^nt du parlement en ont quaere, & le relle de la noblelTc eft reltreint a. deux. Ces regie-mens ne s'obferveuc que dans Tinterieur de Palerme ; car en allant a la campagne , im noble ne voyage pas avec raoins de quatre chevaux. Chaqiic familie de diftindion a au moins deux ou trois carroires pour riifage jounialier. II n'y a point d'homme du bon con qui n'eii donnc un a fa femme : fans cela , le Marino ne pourroit pas fubfilter, & les premiers domefti-ques des grandes maifons rougiroient autant que leurs maitres , 11 on les voyoit marcher ä pted- Nous avons pris la liberie de tounier en ridicule la tblie de ce prejuge: ils coiivicnnent qu'ii elt abfurde, &ils deliretit qu'il foit aboli; mais quidoiincraTexemple ? Nous avions ä la fiii determine quelques gentilshommes a fe pro-mencravec nous dans lesrues pendant les illu-irjiiations; mais leur condefcendance ä cet egard nous faifoit inieux voir encore I'cxtravagance de leur prejuge i car ils ne vouloient fortir qu'eii faifant niiircher leurs domeftiques dix'pas devant eux, avcc de gros flambeaux de cire, quoique toute la ville fut eclairee de la maniere que je vous ai Jecrite plus haut. Voiis pou-vez croire que nous ii'cpargimmes pas letir vaiiite en cetCe occafion ; niaiü uos lecons fiirent inu-tilcs. II cit polfible que quelques-iins i!e nos iilages foicut auifi riilicules; cai" le ridicule ii'eft le plus fouvent que rdatif, &il ne depend que des tems & des iieux. Vous vous louveiiez peut-ctre du priuce iie^rc d'Aiwmabou. J'aimerois ä entendre ia delcrintioii qu'il Kiit de la nation augloife dans fou pays ; quclqiics-uncs denos cuutumes ie frappcrent bicii plus fortcment en-corc. Se promenaiit un joLir au pare cie Saint-James , il apperqut u:ie per(onne de ia connoil-lance trainee dans uii phaeton atte'e de quutre chevaux. Le prince fit ini grand cc'.?t de rire: quand on lui demanda de quoi li rioit, i! re-pondic: cet homme.a-t-il tant mange a fon diner qu'il faille quatre chevaux pour le trainer? Je me ibis pronienc ce matin avec lui, & il etoic auin leger que moi: ce doit etre un grand fou ouun grand glouton. On lui propoia uneautre foiy d'aller a ia comedie : il y alia, & en fut bien-töt eniiuye. Lorfqu'il retourna vers fes compa-gnons, lis lui demanderent ce qu'il avoit vu; il rcplxqua, avcc beaucoup de mepris, qnil avoit vu des hommes jouer du violon, & d'su-tres Faire les fous. Je conclus de la qu'il faut avoir de la circont pečtion, iorfqu^on veut jeter du ridicule fur les uliiges des autres nations. Un Sicilien fe mo-queroit peift- etre avec autant de raifon, de M iv plufieurs de nos coutumes. Iis ricnt, par exem-^ pie, cle nous voir forcer ä boiA des hommcs qui n'en ont pas envie , des EcofTois qui man-gent de Toie fauvage avaiit ie diner, pour aigui-ierleur appetit, des medecios & desjunfcon-fultes qui portent d'enormes perruqucs, & de pliifieurs autres qui fe prefenteront naturelle-ment ä votre efprit. Ces ufages ne paroilTcnt point ridicules aceux qui les pratiquent, & ils !es defendroient avec autant de chaleur que nos Siciüens en mettoientafoutcnir qu'ils avoicnt befoin dc flambeaux pendant la grande illumi-jiation. En efFet, ils ont )ouc d une mani ere admirable quelques-uns de nos ridicules dans une de Icurs danfcs d'opera, qui nous a fort amufes. Jc crois vous avoir dit que leurs danfeurs vicnnent de Londres ; ils ont mis fur ie theatre plufieurs des caracflercs les plus frappans de notre capitalc , les Bucks, Ics Maccaronis , les Prigs, les Cits^ 8c quelques autres cncore plus refpečlables. Ccs pantomimes font aflez bien executees , & font beaucoup rire. Si Ton ne venoit pas m'interrompre, je vous en au-rois donne une defcription plus particuliere. Adieu : la chalcur eit toujours infupportable , & il n'eft pas poffible de fe promener. Nous nous plaignons fans raifon du climat de notrc pa trie , & jc fuis perfuade que la remarque du roi Charles eftvraie. II n'yapoint de climat, difoit-il, 0Ü dans Ie courantde I'annee onpuiffe /aire autant d'exercice en plein air. LETTRE XXXV. Les Sicilien^ font miimes dans hur s converfu' tions. Ceremonies du mariage. Eeniite des femmes. Anecdote. Les Siciliens out nve pqßion univerfcllepour la poejie, A Palerme , le 27 juillet 1770. JLes Siciiietis font extremement aniines dans lii converration, & leiir adioii eft fl jiiftc pour Tordiiiaire & die cxprimc fi bien leurs fenti-mens, que memc fans entendre ce qu'ils difenC, on devine aifeinent le fujet de leurs difcoui s. je croyois que les Franqois & les Napolitains ctoicnt fort habiles dans Part de la pantomime; mais je vois que les Siciiiens leur font fort fu-perieurs , par ia vcrite & la precifion de leurs geftes. lis font remonter Torigine de leurs giands geftes jufqii'au tenis des premiers tyrans de Sy-racufb , qui, pour prevenir les confpirations , avoient defendu, fous des peines tres-icvercs, ä leurs fujets de fe raifembler en troupes & de parier enfemblc. Cctte dcfenfe les obligea d'in-venter une maniere de commiuiiquer leurs fen-titnens fans ouvrir la bouche, & ils ajoutent que depuis cetteepoque. Tart s'efttranfmis chez cux de generation en generation. Get ulage pourroit bicn avoir domic la pre- miete idee de la comedie, puifque I'ou voit que, pC'.i de ceinsapft;s,E[?iciiriTie, iiatifde Syi'acule, iiivenca co gciu'e de fpeclnclc. II n'y a pas long-teras qtic les Sicilietis cnii-fervoicnt encore uii grand nonibre d'ancieiis vS:Vgcs c>:travagan5 & rLipcrititienK, fur-tout ioi-,5 des mariagcs & des funeraille-j. 11 Seroit eiinuyeax de vous en faire le detail ; plaltcui-s ie praciquenc eiTcore dans les parcies l^iuvas^es !k moiic-igneufes de I'isle. Des que ia benediction napicale efl; fiiiie, deux perlbniies du cortege euFanceiic dans la bouclie des epoux inie grande cuilleree de miel, en difiint qne c'eft itii embleme de leiir iiiiion , & qu'ils elperenc que le mariage fera aiiili doux a leurs palais. lis fe mettent enfuice ä jeter fur eux des poi-gnecs de bkd , jiifqirä ce qu'ils arrivesit k la maifoii du raari. Ce font probablement les redes de quelque ancienne ceremonie en I'hon-neiir de Ceres , leur divinite favorite , & ils croiesit qu'elle ne pcut manquer de leur attirer line nonibreufe proi^eniture. Au refle, les fem-mes Siciliennes n'ont pas befoin d'employer cet expedient pour avoir beaucoup d'enfans, car elles font tres-fecoiidcs. Fazello parle de qiieiques-unes qui en out eu jufqu'a quarante, & Carreraiait mention dune qui en eut qua-rante-fept. On ne permet pas aux jeunes raaries dc gou-tcr du feftin des noces: pretend leur infpi-rer par4a la paticnce & la temperance; niais lorfljiie ]c diner eft prefque fini, ie pere de la fanmc , ou Tun de fes plus proches parens, pre-Jciitc .i Topoux Lin grand os , cn lui diliint: rodi tu q-tuß" oßo, rongez cet os j car voiis venez d'en prendre ini tjiii fcra phis diir & plus difficile ä digürer. De la peuc-etrc I'expreirion populaire dünt on le fert en purlanc de quelqiruti qui a (-'ncrcpris quelquc chole de penible: il ;i uu os Ä roiigcr. Lcs Siciliens, ainfi que plafieiirs aiitrcs nations de I'Eiiropc , evitent avcc foin de le ma-i'ier dans le niois de mai. lis rcgardent lcs ma-riagcs qui le fontalors, comnie de Cres-manvais aiigiirc. Cette croyance fupcrlHtieufe ctoit dcja Tepandue chez les anciens Roinains; car leitrs aiiceurs cn parlent foiivent, & ce font cux qui Font tranlniile a prdqiic toutcs lcs narions dc TEnrnpc, On nc conqoit pas comment une idee fi ridicule, qui n'a aucun ibndemcnt dans la nature , a pii fubfiüer pendant tant de liecles. li eft vrat qu'il y a d'autres coiitumes aiilfi pue-I'iles, qui Jie font pas moins iiniverfclles, telle que celle de donner cc qu'on appelle le/o^^o« d'avril, I'ulage du gäteau des rois , & quelques autres qui fe prefenteront ä votre elprit, & dont je n'ai jamais pu apprendreTorigine. Lcs nobles Siciliens celebrent leiirs mariagcs avcc beauconp de magnificence. On c(l etonne dn grand iiombre de voitiircs elegantes qu'ou Voit dans ces occalions. En recherchant a quelle cpoque cc luxe des equipages a coinnicucc, j'ai trouve l'hiftoire de la fille d'mi de leurs vice-rois, qui epouia en 1581 le due de Bivona : la ceremonie eft decrke par Elcnco , qui en etoit fpečcaieur. H dit que les dames, aiiifi que les gendlslioniiiies , etoietit tous niontes lur de beaux chevaux richemcnt caparaqomies , & precedes par des pages j qu'il u'y avoit dans la ville qje trois voitures , dont fe fervoient les malades qui ne pouvoient pas monter ä cheval: ii donne ices vouures le nom dc careite^ qui ßguiße petics chariots. Lcs femnaes de Sicile fe raarient tres-jeunes, & voient fouvent leur cinquieme ou fixierae generation. Vous voiis attendez fans doutc a ap-prcndre quelque chofe de leur bcaute : en general , dies font enjouees & agreables, & elles pafleroieiit pour jolies en pluficurs cndroits de ritalie. Un Napolitain ou un Romain leur ac-corderoit cette qualite ; mais un Piemontois , ainfi qu'un Aiiglois , diroit qu'ellcs font d'une figure ordinaire. Ricn de fi vague que nos idees llir la beaute des femmes ; elles varient dans tous les climats, & I'on n'en trouve nulle part le veritable prototype. II n'y a pas deux nations, ni peut-etre deux honimcs, qui y atta-chent precifement les memes marques caracte-rilliques. Chacun exalte I'idee qu'il s'en fait, fiiivant la bcaute des femmes qu'il eft accou-tume de voir 1 de forte que la meme perfonne pcut nous paroicre jolie ou laide , fuivant que nous en avons vii d'autres qui Ic font plus ou moins. Jcraefouvicns qu'apres avoir parcouru la Savoic & Ic bas Vatais, routes les fcmm.cs que nous rcncontrions cn Suilie, nous paroif^. foicnt des nymphcs. On fait encorc cette refle-en voyagcant cn quelques parties dc TMle-magne. Vous vous rappellez combien il y a dc difference entre une beaute de Milan Ä iine de Turin, quoique ces deuxvillcsfoientvoifi-"es Tune de I'autre. Cell dommage que la Ju-non de Zeuxis /bit perdue i eile nous auroit montre I'idee que les anciens fe formoient d'uiie beaute parfaite. LaVenus de Medicis a ete rcgar-dee comnie xm modele de perfečlion ; mats cc fentimenteft abfurde, car eli-il pollible d'ima-giner qu'une beaute parfaite n'ait que cinq pieds de haut! Queique figure qu'elle eiit fait parmi les anciennes divinites dansle Pantheon de Rome , je craindrois qu'elle nc brillät pas beaucoup parmi les modernes dans celui dc Londres. En un mot, jc crois qu'oii pent aflu-rer ayec certitude que la beaute ell une qualite relative , & que ro'jtaxsv n'clt pas Ic nieme en phyfiqiie ni cn morale , en deux endroits du globe. Lcs femmcs ont ici de tres-bcaux cheveui, & elles entendent parfaitement I'art de les ar-I'angcr avcc avantage. lis ne fervent plus qua Parer leur beaute; niais on dit qu'autrefois elles iurcnt, ä I'jmitation de Samfon, en titer parti pour la defcnfe de leur patrie. Ccla vous paroi-t^ta luie ciiigme qua to us les fages de I'orient aiiroient peine k expliquer. Les hiitoricns rap-porteiit ( on ne KiiC pas precißmcnt foiis quel regne ) q-]- cetce viile ullk^cc depiiis Ipug-teais par les SiUTalins , etoit rcduite la Famine ; mais ce qui enibarraHbit davantage les ha-bitans, C eft qu'ils ii'avoient pas de niatcriaux pour faire des cordcs d'iirc : enlbrte qu'ils ctoient pres de fe reiidre. Dans cette finiation, line dame enflammee de Famour de la patrie, ■ s'avanqa , & propofa aiix femmes de couper Icurs cheveus , & d'en faire des cordages. On fuivit lur-lc-chainp fon avis. Vous lavez que rhero'ifine des femmes nc manque jamais d'cx-citer celui des honimes : les affieges , aninies par ce galant fäcrifice des belles, rccommence-rent a fe dcfondre avec tant de vigueur, que les afliegcans fiirenc batcus; Sc un reiifort etant arrive bientöt apres, la ville fiit fauvee. Lcs femmes fe glorifient encore de cette hifloire, qui a etc ccleln-ee par philieurs de leurs poe-tes, commc vous l'imaginez bicn. " Lcs che-„ vcux de iios dumes , dit Tun d'eux , Tont 53 toujours employes au meme ufage j mais ils „ nelancent plus d'autrcs fleches que Celles de Cupidon, & ils ne forment plus que des liens d'amour. „ Les Sicilietis aiment beaucoup plus Tetudc que leurs voillns du continent, Sc Icur education eft plus foignec. Nous avons ke furpris de voir qu'au lieu de fujets frivoles & oifeux que triite en couverfation la noblelTe d'ltalie, oji prciid plaiilr ici A purler ck littctaturc, i.n)j|l toirc, tlc politique, & fur-tout de poüfie. Les autres brandies lic cunnoiflhnces Tont moins repandiics , mais on pcac dire qtie ccl!e-ci ell iiniverfellc. Tout Sicilien olHur d'etre iiiftirc par les mufos ä queiyue tems de fa vie: on Jie croit jamais \ir amant, tant qii'i! cxprinie fa pafFiou enpi'ofe; & coiitre notre maniere de penfer, les declarations ne font regardees com-me vraics, qii'autant qu'elles font poetiques. Vous voyez que I'inipiracioji efl; devcnue ici la preuve de !a \^erite. Nüus avons ete ctoniics, en arrivant ä Pa-lenne, d'y trouvcr de jcuncs gentilshommes qui noiis parloicnt anglois; mais nous Ic f-ümes bien phis , quand ils nous prouvercnt qii'ils connoilfoient pavihitement plnfietirs dc nos meilleurs pot-tes & de nos pltilofophes. Nous avons troLive en original, dans plufieiirs bibÜo-theques, les meillcnres editions deMilfon , Sha-keipear, Dryden, Pope, Bacon, Holingbroke. Notre langue eft tellcmcnt devcjnie ä la mo-i^e, qij'on la rcgarde conime une partie ci?en-tielle d'unc bonne education. Le marquis Fo-Sliaiio, viccroi, fommc d'un grand merite , a f'lit unc etude particuliere de quelques-uns de lies auteurs , & il encourage cette etude dans le royaunie. Phifieurs nobles parlent un peu anglois& quelques-uns avcc aifance , quoi-^rfils ne foient jamais fortis de I'isle. Lc marquis; Natali, les comtes Stateh & Bulbhgmi, le due de S. Micheli, &c. -font de cc nombre. Leur focike nous a fait beaucoiip de plaifir , & nous pouvoiis aflurer que leurs Jiimicres font k moindre partie de leur merite. Adieu. LETTRE XXXVI. Opera. La Gahrieli. Perfe£iions de fon chant &de fon jm. Ses caprices. Ballet de l'o-pera. Caraäeres anglois qu'ony reprefente. Jnimitie entre les Siciliens & les JS/apoli-tains. JT'oubliois de vous parier de l'opera: j'au-rois etü bien itigrat; car nous nous y forames fort amufes. Le premier & le fecond afteurs font excellens chantcurs; je penfe que nous ]es aureus a Loudres dans quelques annecs. Iis ne foiit pas encore conuus , & je vous aflure qu'on pourroit les engager a tres-bas prix; mais on apprendra bientöt en Italie a eftimer leurs talens. Le premier s'appelle Pa-chirotti. II eft tres-;eune, & encore abfolument inconnu. Je fuis perfuade qu'il fera regarde comme un des plus excellens adeurs, loriqu'il auraete enteiidu fur les dÜferens theatres d'Ita-lie. Ilexcelle dans le patlidtiquc, qu'on neglige trop; je crois qu'il donne plus d'esprellion qu'aucun autre aux airs qu'ils nomraent canta-bik, & qu'il feit plus d'impreirion fiur les fpec- tateurs , tatcTirs, pjirce qii'il fent toiijours ce qu'il elit. 11 parle toujuiiis; au coeur, tundis que laplu-part des modernes ne s'adrellent qu'a i'imagU nation. Lii Giibrieii eft la premiere adrice: c'eft afllire-mejK la plusgrandecantatrice du monde. Ceux qui chantent fur le meme theatre qu'elle, doi-vent avoir beaucoup detalens; autrement 011 rje puurroit pas ies Aipporter. Celt ie fort de toLfü les aiitres clianteurs j cxceptePacherotti; inčme il le rcgarda comma perdu, lorfqu'il purut I'D LI r la premiere fois fur la fcene avec die. Elle cliaiitoic un air d'exprclTion tres-ana-iogue i la vüix , qu'elle deploya d'une maniere Ii econnante, que le pauvre Pacherotti s'enfuit derriere les coulilfes, cn pouliant de grands cris, & regrettant d'avoir ofe fe prefenter fur le meme theatre avec iine cantatrice fi excel-lente. II ctoit Fache d'ailleurs de voir fes petits talens eclipfcs, & il craignoit d'etre accufe de prefomption, vice tres-etraiiger ä fön caračlere. Cc fut avec peine qu'oii I'engagca a repa-rojtre denouveauj niais Ics applaudifTemens bien merites, qu'on donna i fes talcns&a ia modeitie, lui infpirereat un peu de courage. Bientot apres, jouant un role d'amoureux , il chanta un air tendre, qu'il adrölfoit ä la Ga-brieli, & y mit tant de vcrite, quelle en fut cmue , ainfi que I'aiTembiee. Je fuis furpris que, dans ces morccaux fi pathetiques, la puilfance de la muliqiae ne Fem-Fart. IL N .polte pas fur rillufion du role; car la pocHc, la nuilique & rudion, iigUrant de conceit, cloiveiit fiiire fte grandes impreilioiis fur fiinie: ccpeti-Jant je n'ai pas oui" dire que cel;i fuit arrive plus d'unc foisi ik ce fuc Ic ceicbrc Farinelli qui produifit cet etFet. 11 joiioit le role d'lin heros captif, & il imploroit dans lui air cres-Cou-chaiic, fa grace Sc cclle de ia maitrelTe aiipres d'lin tynmfarouche & cruel, qui Ics avoit fait prifo]iniers. L'adeur qui reprefeiitoit le tyran, fiit tellemetit atteiidri par les acceiis plaintifs de Fariiielli, qu'au lieu de lui relufer fa de-mande, comme Ic portoit la piece , il oublia entiercraent foil caradtere, fond it en 1 armes , &lerrale captifdans lbs bra-j. Le jeu& le chant de la GabricH font fi coiv nus & fi admires, qii'il elt prefque inutile de vous en parier. Sa merveilleiife execution & lu volubilite de Ja voix raviifent depuis long-terns toute Fltalie. On a ete oblige d'iiivetiter lin nouveau terme pour expritncr Ton talent. Si cn chantant eile fe propolbic aufant de plaire qued'etoniicr , eile pourroic prefque operer les prodiges qu'on a attribues ä Orphee & ä Ti-inothee. Heureufenient peut-etre pour le re-pos du genre humain, fes caprices furpaflent lbs talens, & la reiideiit encore plus mepriiable que ceux-ci ne I'oiit rendue celebre. Son čara čtere ell ainfi devenu im prefervatif fuffifant contre les charmes de fa voix & ceux de fa per-füiuie, qui ne Ibnt pas moins feduifans'. Si ä ces tjiiaütes eile joignoit liii efprit modefte &. iiimuble, eile auroit fiiit de terribles ravages duns le moiide. Cepeiidant, avec tons fes de-fauts, c'eft ja plus dangereufe lyrene de ces tems modernes , eile a faitplus de conqueccs qu'aijciine autre. Je dois vous dirc aulfi, pour Ilil rciidre juilice, qu'elle n'a point l'ame mer-ccüaire , & qu'elle ti donne, au contraire , plit-ficui's prcLtves eclatantes de generofite & de defintcreirement. Elle clt tres-riche; on croit que fes biens proviennent des liberalites du dernier empereur, qui deliroit paffionnement de l'attacher ä Vieniiej inais les tracalferies & les quereiles quefouefprit intrigant, plus encore que fa beaute, avoit excitees, ia firent chalFer de cette ville, comme eile l'a ete de prefque toutes celies d'Italie. II y a fur Ton compte un grand iiombre d'a-necdoces qui formeroient un volume tres-amu-Jant : on ni'a die qu'on va les publier. C^ioiqu'elle ait beaucoup plus de trentc ans, eile ne paroit pas en avoir dix-huit fur le theatre. Get art de paroitre toujours jeune, n'eit pas le nioiiidrc de ceux qu'elle polfede. Lorl^ qu'elle e(t de bonne humcur&qu'eile veutbieii faire ufage de fa voix, il n'y a rien qu'on puilfe comparer a Ibn chant 3 elle chante au coeur au-t.uit qu'a rimagination, quand il hii plait, & die exerce un empire abfolu lur toutes les paf-iions ; inais eile elt rarement en etat de de-plover cette puiiTance diviiie : foil caprice &. fes ■N ij talcns remportunt touM-tour : die a cte alter-nativement, peiid;int le coiirs tie fa vie, uii objet d'admiratioii (k de mcpris. Elle exccUe prct que autaiitdaiis Tadion &dans Ic recitatifque dans le chant. Qiiclqiies paroles dc fon recica-tif, avcc Lin litnple accoinpagnement, excitcnt line emotion que jamais aucnu autre chantenr ii'a inlpirccj & d'apres cet efFct, jc fuis portc ä croire ce que J. J. Roulleau avance fur cette braJichc do la mufiqiic, pour laqiielitj nous avons'tant dc dedain. Elle doit beaucoup aux coufeils de Fabbe Metaftafio ; il iui a fiir-tcut doline d'excelleutes lec.ons fur le jeu & le reci-tatif, & ilditqu'elle fait plus valoir fes operas qu'aucitne antre virtuoft. Elle elt fi opiniatre Ä il decidee dans Jes ca-prtccs, que Tinteret, la fiatterie, les menaces, Ics punitions, ne font pas la moindre imprel-fion fur eile. Lorlqu'on veut les combattre, on lie fait que les auginenter, foit qu'on la traits iivcc reipečl ou avec mepris. Elle condefcend raremeiu ä deployer fes talens enchanteurs; mais eile exerce fur-tout fa nvalignite , quand eile imagine qu'on s'attend i la voir briller. Au lieu de chanter fes airs com-me les autres ačtrices, eile les chante alors entre fes dents ou ademi-voix; & rien ne peut I'cngager ä contenter les Ipečtateurs, lorfqua cela ne lui plait pas. L'expcdient !e plus f^r qu'on ait trouve, eft de pner fon amant favori ( car eile en a tou- foiirs 1111) de fo piiicer :iu cciitrc dii parterre, 'Hl Jims; la loge vis-a-vis le theatre. S'ils font p;;rf;iitemcnt cracconi, cc qui arrive raremeiit, die lui adrclic tous les airs tendres, & ellc diploic tons les charmes de fa voi'v. Son f.ivoii aduci nous avoic promis de iioits en dosiiier iin exciiiple. II s'etoic placc dans I'endroit con-venable; mais la Gabrieli, foupcoiinaiit iiius doiltc qu'il s'entendoic avec nous, ne daigna pas faire attention ä lui: ainfi cet expedient ne reu lilt pas to uj ours, Le viceroi, qui aime pallionneinent la mii-fjqiie, a puis on vain toutes fortes dc nicCurcs pour triompher de ion eaprice. II doniia, il y a qucij^ terns, un diner ä la principale noblcire de IWrnie, & il fit pricr la Gabrieli d'etre dc la partie. Les autres perlonncs arriverent {'uc-celfivcracnt ä I'heure fixec. Lc viceroi fit rc-tardcr le diner pendant quelque tenis,&;en-voya chez ellc pour lui annoncer que la com-pagnie rattendoit. Lc niellager la trouva lilant dans fon litjcllc dit qu'elle etoit mortifiee d'a-voir fait attendre la coinpagnic; clle chargea le depute de faire fes excufes, & de dire qu'elle avoit reellement oublie cet engagement. Son excellence Itii auroit pardonne cette impertinence; niais lorfquc ies convies allcrent ä I'opera, la Gabrieli joiia fon röle avec la der-niere negligence , & eüe chanta tons fes airs fot' ro-foa-, c'eit-a-dire, d'unc voix 11 baiTe, qu'oii pouvoit ä peine Ies entendre. Lc viceroi en N iij fiittres-ofFenre ; oependaat, commeil n'efi; pas violent, il diiEroit tonjours i faire iifiige de füii autorite; ejifin, revolte de la voir pei levercr daiis ibii infolente opiniätrete , il fut obligt; dc la meuaccr. Cette mciiace la rcndit plus obftincc: elle declara qu'en craplo3-ant !a force & Tauttiritc, on ne viendroit point ä bout de ce qu'on exi-geoitd'eile; qu'on pouvoit iii faire cricr, mais que jamais on ne pourroit la faire chanter. Le viceroi I'cnvoya alors en prifon, oil elic refta doLizejours. Pendant ce terns, elle donnoit de foniptiieux rcpas j elle paya ies dettes dc tons les pauvres prifonniers, & dilfcribua de grolfes fommes d'argent par charite. Le viceroi fiit contraint de ckler, Sc elle ftit remifc en liberte, aux acclamations\des pauvres. Heureiirement pour nous , elle eft ä prefcnt de bonne humciir, elle veut bien quelqiietois taire uFage de tous Ics tal ens, Elle dit qu'elle a etc dcmandee plufieiirs fois par les adminiftrateurs de notrc onera ; mais die croit qu'elle ne pourra jamais \h refoudre ä aller cii Angleterrc. Vons ne devinez pas la raifon qit'elle en donne : elle n'eft pas manvaife, Je ne peiix pas commander a mon caprice; il m'entraiiic le plus fouvent; & fur votre theatre , je ne lerois pas la niaitreire de faire tou-tes mes volontes. Si jc mc mettois dans la tetc dü ne pas chanter, on dit que la populace m'in-fiilteroit, & que peut-etrc on ni'aflTommeroit. j'aiinc micux_dormir ici en boiuic fautc, quaiid memc ce fci oit en prifon. Elle ajouts que cc ii'eli: pas toiijours Ic capiice qui rempechc de chantcr, & que certaines caufes phyfiqiies I'cn rendcnr clc terns cii cenis incapable. Je fuis aflez porte a Ic croire; car cette fle-vibiÜtc prodi-gieiife tic ia voix, qui parcoiirc fi rapidcmcnt, avec tant de netcetc, ics tons Jes plus varies, & produitprefqiic dans 1111 inltiiit un fi grand iionibre de modulatioiis, depend ä coup lur d'une di(pol]tion des fibres tres-fujettc a des Včiriatiojis. Si elles font un pCLi relachees, on que leur elaiticite foit dcmiiuiee, comment ciKil polRblc que leurs contraclions & leurs expanlJons obeiifent aflez promptcmeiit ä la volonte , pom- i>roduire ces c^Fets ? L'ouvertura de la glotte qui forme la voix, elt cxtrenienieut petite, & fon diametre doit ie relFerrcr plus ou nioins a chaquc ton ditferent; car lorfqu'elle tonrervc Ic mäiie diametre, eile doit produire le meme ton. Ses reflerrcmcns & lbs dilatations font fi prodigieuftmcnt pctits,quclc dodeur Keil conipte, je crois, que dans quelques voix , cctte ouverture qui n'a pas plus d'uii dixiemc dc pouce, cit divifcc cn plus dc douze cents parties; & line oreille exade diftingue le foil different de ehacunc. Quelle delicatelfe de teuton ne doit-il pas y avoir dans les fibres! J'inia-giiie que le plus leger diaiigement dc I'air doit y cauibr une difference notable, & que , dans nos cHmats nebuleiix, las fibres feroient en danger dc perdre cctte incroyable fenfibilite» N iv ou du moins, que fouvent elles ne fc trmive-roient pas d'accord. 11 iVea eft pas de mema d'une voix ordinaire, qui ne parcoiirt pas au-tanc de divilions, & qui n'elt pas aulFi flexible que celle de la Gabrieli. Un des ballets de I'opera que nous avons vu, reprefentc les jardiiis du Vauxhall; & c'eft la troifieme fois que j'ai vu le VauxhaU fur its theatres dltalie , a Turin, ä Naples, &^ici, Cette imitation eft affez fidelle; & Tidee doit en avoir ete donnee par quelqu'un qui a ctä fur les lieux. On y a. mis plufieurs figures an-gloifes ; quelques-unes ont de groHes perriiques frifees, qui pendent d'un pied & demi au def^ fous du col j d'autres en out de petites , ecnur-tees & extremeraent ridicules. Les uns encrent fur la fcene en culottes de peau & en bonnets de palefreniers, faifant claquer leius fouets; d'autres font armes d'un gros baton de chenc ; leurs cheveux forment un enorme catogan , & j!s attachent quelque chofe derriere leur col, pour le renfler encore davantage. Ce qui diver-tit le plus Taflemblee , cc font trois filles publi-ques, qui, dc concert avec leurs amoureux, dupent trois qimkcrs. Vous penffez bien qu'oii a charge ces ridicules; mais la caricature en eft tres-gaie , & nous a fait beaucoup rire. Nous avons cepcndant etc fäches de voir des perlbn-nages aufli vcnerables que les quakers, tour-nes en ridicule j & comnie les gens de oepays ne les comioiireut en aucune muuiere, nous nous fommes cfforccs dc fairo connoitre ia fim-plicitc & la purete de Jeiirs mccurs , aijiJl que Pijitegrite de leurs priiicipes, ä reprcuvc de toiitc coiTuptioti. Qiioique Ics Sicilieiis foient en geiitial d'mi bon nature!, quoiqu'ils paroilFentavoir beau-coup dephilantropie & d'mbanite, il f-uit pour-taut convenir qu'ils ii'ontpas une gruiuie aii'ec-tion pour ieurs voifins du continent, qui aieur tour le Icur rcndent bien. C'eftune oblervatioa pen honorable pour la nature humaine, qu'il nV ait pas dans toute I'Europc deux nations limitrophes, qui ne foient perpetuellenient en difpute. Je deHrcrois que nous fLiilions excep-tes de cctte regie j mais jc fuis fachc dc voir, par queiqucs-uncs de ]ios gazettes qu'on envoie id , que ce reproche s'adreHea nous plus qu'a perlonne ; du moins nos animodtcs font plus de bruit que cclles d'aucun autre pcupie. Des etrangers nous ontfouvent deniandequel etoit le fbndement de tant de qucrelies fi fcandaleu-fes chez uii pcupie ccicbre par la gonerofitc de fes fentimens: & nous avons peine a ieur perfiiadcr que, quoique ies papierspublics fem-blent etre la voix dc la nation , ce n'eft cepen-dant que ccllc d'une troupe dc mifcrables qui mettent le feu ä la niaifoii, pour pilicr pendant rincendie. Les injures qu'on dit au roi les eton-iient beaueoup plus que tout le refte; & vous nepouvez pas imaginer la furprife & Pindigna-tioii qu'ils out monrree, loxfquc nous les avons alTiires que c'etl; un prince vcrtueux & bienfl^t-fciut. Voiis etes done, s'eoria iin noble Sicilicn, ]c plus abominable peuple de la terre. Je fits ti'es-frappe decette implication ecliappee toiit-i-coiip; & ce ne fiit qifapres hii avoir expUqiic cn detail la liberte de notre conlHtiition, & Ibr-tout celte de la preiTc, que je pus rengager a re-venir un pcu de fes preventions , & k concevoir de noas une opinion plus fiivorablc. II perfilhi a foutenir qii'iin fi grand abus de la liberte etoit line uouvelle prcuve de fa propofition , & qu'il devoit y avoir bien. de la mechancete dans une nation oti I'on permet d'outrager ainfi !e plus {acre dc tons les caračteves , Pextrenie vertu reunic au rang le plus elevc. Nous ruiibrames que c'etoient les hoinnies Ics plus vils & les plus corrompus de la nation qui difoient ces injures, & que profitant de la liberte de la prelle , ils fouifloient la ledition dans les papiers publics ; que le roi & la reinc etoient aimes do tous leurs fujets , au moins de tons les honne-tes gens ; qu'on n'eix parle jamais que conimc du plus parfait modele de l'union conjugale & de toutcs les quatitc's fociales , & qu'ils ne pou-voient avoir d'autres ennemis que ceux de la* vertu. Apres cette apologie nous fumes aifcmcnt d'ac-, cord. 11 lie comprcnoit ccpendant pas commcnd la voix de quelques incendiaircs pouvoit etre plus forte que celle de toute la nation. Nous lui dimes que ceux qui font contcns fe taifenti qus la retiition Sc les Ubelles font; toiijours pins tie bruit que les louiiiigcs, comine le cocllii attire plus I'litcentioii quo ic carillon irau^ I'^tc-Adieii. Notre pilote dit que le veiic n'cll pus boil; de forte que nous pourrons reiier ici uii jour ou deux de plus. LETTRE XXXVII. Foutaines remayquabks at Sidle. Bainf jnl-j'urcux. Source d'ean cbandc daus Li uier. Oi de geants. I'opjtlation. Rkolte de bled. Maniere de conferver Is grain. Prodne-Hons tie la Sidle. Sonde. Miel fanvdgc. Sucre. Sue de reglifj'e. Oranges. Noix de pifladje. Manm. Gantbarides. Marbres, Pierre defuvon. Pierre de rfwnjferon, Sfc. Mont Etna. Avant age s qtCil procure. A Palerme, le sg iuilleC 1770, JTe n'ili ni le terns ni Ics coiinoiflanccs iieccfl iiiircs pour voiis domier heaucoiip de details fur rhifloire naturelle de cctte isle; cepcndant ete frappe dims mcs courfes, de quelques objcts doiit il iic/cni pas inutile de vous parier. II y a dans prelqiie toutc la Sidle ini grand nombre d'eaux mincrales. Plutieurs font bouil-lonnantesdechaleur; d'aiitres ciicore plus fln-gulicrcs out un dcgtre dc froidfupcricur ä celui de !a glacc , & cepcndaiit nc sjelciit jamais. On trouve cu pblieiirs eiidroics, des iontai-nes qui jetteiit fur leur HirEicc uii^ efpcce d'hut-le, que les payläiis brütenta iuurs himpcs , qu'ils emploieiit ä d'autres idiiges. Miiisprüs de Kicoiie , il y csi a uiie encore plus rcmarqua-ble , & qu'oii appelle i/ fina CanaLono. Elle clfc toujours couverte d'une ecume opaisib d\ine Ibrtc de poix que les gens de la campagne re-gardent commc un rcmedc Ibisverain cuntre Ics rhuniatifmes Sc d'autres maludies, L'eau d'un petit lac pres de Nalb , eft celebre par la propriete qu'elle a de teindre cn noir tout ce qu'on y plonge ; eile donne ccttc Couleur fans le melange d'auciui autre ingredient, quoiqu'clle foit pure & tranfparcntc. Ce pays clt rempli de bains fiilfiireux, coin-me cetix des environs de Naples , oil !a vapeui* c\- j.iide procure au nialadc une fucur abondante. Les plus fanieiix font ceux de Sciaccia & de la moiiragne de S. Cologero. Iis ne {buč pas diuis le voifinage dc 1'Etna , comme je Faurois imagine i ils en font tres-eloignes. Je fuis porte ä croire que non-feulement 1'Etna, raais encore la plus grande partie dc la Sicile & prefque routes les isles adjacentes , ont ete forniees urigi-nairement par unfeu ibiiterrein; mais j'aurai occafion ds nVctendre davantage fur cette ma-tiere , en vous decrivant les environs de Naples. j'aivu de la lave, dela pierre-ponce, & du cut': Ciiplufieurs endroits de la Sicile, fort eloigiies de TEtna; & il y a un grand ncnibre dc montagaes & de valltes qui cxhulenc ton-jours une vapcur chaude, ^ produilbit des foiirccs d'eau louillante. On trouve, ä un miiie & demi a I'oueft de cette vitle , fur une petite greve on nousalloiis foiivent nous baigiier, pludeurs foiitamcs d'cau chaude qui s'elcvcjit du fond de la mcr. Nous fiiir.es d'abord furpris de nous trouver prefque ail memc initant dans un bain chaud & dans un bain froid j car d'unfeiil elan, nous depaffions Teau chaude, qui ne s'etend qu'a quelques ' pieds autoiir de fa fource. Ce changemeiit nous cauiii un friiron extraordinaire , & qui n'etoit point du tout agreable. J'ai parle de četne par-ticularitcä plufieurs pcrfoiines d'ici, qui m'ont dit avoir fouvent obferve la meme cho^,e. Non loin de lä, eft une celebre fbn'jaine appellee il mar dolu ^ oiiVoiw oil quelques retl-es d'une ancienne naumachie; & fur la niontagne au-delfus , on montre une cavcmc, oii Ton a trouve le Jquelette d'un geant, lequel tomba entierement en pouffiere, lorfqu'on entreprit de le tnuifporcer. Fazello afliire que ff's dents furent les feules parties qui refilferent ä I'im-prelHon dc Pair; qu'il s'en procura deux, & qu'cllcs pefaicnt pres de deux onces. Les legendes de Siciie rapportent plufieurs hiftoires de cettc nature j & c'eft une opinion prefque univeiTclle, que cette isle ^toit autrefois habi-tee pur des geants. Mais, quoiqu? nous ayons fait bcaucoup de recherches, iioiis n'ai'Oiis jamais pu voir aiiciin dc ces os de gc;ints, que I'oti coiilerve, dic-on, tii pluficurs eiidroits. Si cette alTcrtion etoit fondce , il eft probabi'j qu'il y en aiivoit quclqucs-uiis dans les cabinets; & nous n'avoiis rencoiitrc- aiicuii bomme ilc boii fens & digiiedsfoi, qui nous aicaiTure cn avoir vu. On nous avoit dit ä Naples, que Ic mufeuni de Ptilerme contennit un fquelette cncicr de plus de dix pieds de haut; mais cela n'elt pas vrai. On y voitbcaucoiip d'antiques & d'objets d'hiftoire natureile, quoiqu'il ne Iciit pas fn-perisur ä ceux que Ton trouve ailleurs. Le nombre des habitaiis do Palerme eft eva-iue a environ 150,000. On a trouve, par Ic dernier n t'nombrement, qu'il y en avoit dans toute Tisie 1,133,153 , dont a peu pres ^0,000 meines ou. religtenfes. On compte 2585X20 mai-fous , & conicqucmment cinq i fix perfonnea duns chaciinc. Le bled fut toujours Ic premier article du commerce de Siciie, ce qui en fait la richeflc. Ces infulaires s'adonnent i pluficurs autres brancbt'S de trafic, qui ccpendantne pourroient pas etre comparees ä celie-ci, s'ils vivoienfc iüus Uli gouvcrnement libra, & fi I'exporta-tion etoit permife, Lcur mnnicre de conferver ]e grain paroitraun peu, fiiigidiere ä nos fer, iiiiers : aulicu de Texpoler, comme nous, cu plein air, ils ontgrand ibiu de le teiür renfer-jne. Iis üut t reufe en pluiieurs endroits oii le fo1 eflfec, far-tout pres d'Agrigcnte, tie rran-des caveriies dims Ic rocher. lis y font ini trou aii fümmct;, pur oil ils verfent lent bJec!, lorjl t]uil cl!: cxti-iraenient fee; aprcs rti\'oir coin-prime fortcvnejit, :1s bouchent le trou , !)oiir ie prcfbrvcr de la phiie. On nous ülllirc que, dc cette maiiicre , le bled fc coiifcrvc piulieurs anjiecs. La foude eft luie plante dont on tire bcau-caup de profit; c'eft ]e vegetal qui, pin- le moyeii du feu , fe coiivertit en verre. On en eiivoie toutes les aniices iinc grandc quantite uiix veri'erics de Venifc. Lcs Sicilicns fontiuilli X!n commerce confiderable de regliife , deriz, de figucs & de raillns-de-cornithc, dont lcs mcilleurs croiflent parmi les voicans ctcints des isles Lipuri. Lcur mid eil c-xcellent; en quelques cndroits, il clt fupcrieur a ccliii de Minorque; liins doute qu'il doit lit bonte an grand nombre de plaiites aromatiques qui cou-vrent tout ce beau pays. On recueille ce mid pendant lcs moiK de juillet, aoüt & oc5tobre. Les paylans le troiivcnt dans les ti'ous des ar-bres des rochers; il palJbpöxir etre nieilleur que celui qui le produit ious la tyrannic dc I'homme. Le canton du petit Hybla eitjComme autrefois, rendroit le pliis cclebre po.ur cette produdioii. Lc comte Statela nous en a fait prcftnt de quelques pots leves fur les domai-lies du prince de Spaccaforno fon frcre, qui font pres de cette vi!!e. Lc fuci-e n'eil plus ur article du conitnerce de Sicile, quüiqu'oii eu lüire encore une petite quandtii pour la conibmmation du pays. On m'a poiirtant ilit que les pLuitadons dc canncs funt trčs-flarifllintes dans pluliciirs parties de I'lsie. Le flic de reglilfc fe prepare ici & en Cala-bre, & oil I'envuie dans les pays leptentrio-nuux, qui en font beaucuup d'ufage pour Ics rhumes. On le iliit avcc le jus dc la racinc, qu'on bouilUc jufqu'a conilibncc d'extrait i on le met enfuite en rouleaux enveloppes dans des feuiiles de laurier, tel que nous Ic recevona. On m'a dit que , dans quelques cantons au nord de-risle , on trouve le poilTon ä coquille qui produit une cfpece de lin dont on fait dea gants & des bas; inais il y a iinc beaucoup plus plus grande quantite de ces coquillages dans la Caluhre, Les plantations d'Grangers , de limonniers, de bergamotes, d'amandiers, &c. font confi-derables; on y cultive auifiiu noix de piftache avec beaucoup dc fucces. Ccs arbres, de meme que philkurs autres , font males & femelies : le male, iippelle fcorrwbecco, eft toujours fterile j mais fi Ton n'en met pas un certain nombre dans chaque plantation , les piltachcrs ne portent pas tiiie feule noix. De toutes. les productions de la Sicile, Tarbre qui diftille la manne paife pour le plus precieux; il reiremble a« friiie, &. il ell de k nieme eipece. On fait une incifion iiicifioit ä l'ccorce pres de la raciiie , au com-menceinent du mois d'aoüt, pendant )a plus grande chaleui'i il eii fort uue litjueur cpatife tk bJanchätrc, qui fe durcit bientöt au Jbleil ; alors on la ramairc, & 011 la met eil cailfes. On rctioLivelle ces incifions chaque jour durantla raifon, & I'oii a foin de ne les faire que d'un c6te de l'arbre, & de reierver l'autrepour Tete Jbivaiit. Les raouches cantharides font un des articles du commerce de Sicile; on les trouve fur plu-fieursarbres de l'Etna, dont le lue paffe pour etre corrofif & alterfif i & cii particulier fur le pin iSc le figuier. On dit que ces cantharides de l'Etna font preferabies a Celles d'Ef-pagne. Les marbres de Sicile feroient une fource de riclveffe , fi Ton encourageoit Tcxploitatioii des carrieres. II y en a iin grand nombre, & de la plus belJe qualite. J'ai vu de ces marbres prefque aulH beaux que lejaune ou le verd antique, qui font aujourd'hui fi precieux. Les belles coioniies jaunes, que vous avez fans düute remarquees dans la chapelle royale de Caferte, font dc la premiere cipece. II y en a au/fi quelques-uns qui rellemblent beaucoup au lapis-lazuli, & au porphyre. On a trouve aCentorbiune efpece depicrie douce, qui ie diflbut dans I'cau : les blanchiJ^ leufes s'en fervent au lieu defavon; ^comn-.e eile en a la propriete, on I'appelle pietra JofC'^ Part. II. O na.ro. On y troiive aiifll, ainli qii'en Calabre, la cclebrc pierre qui prodiiit des moiifleroits, Jorfqii'clle elt arroiee & expofee a iin tres-vio-leiic dcgrc de dialcur. Mais je nc fiiiirois pas, li fentrcprenois de decrirc Ics diverfes dcnrecs & les produčlions curieufes de cette isle. L'Et-iia cn fournit tin plus grand nombrc que phi-fieurs de nos grands royaumes : il rairemble, pouu ainfi dire , cellcs de toute la terre. Outre le bled , le vin, I'huile, la foie , les epiceries & les fruits delicieux de la region inferieiire j Ics belles forets, les troupeaux, le gibier, le goudron, le liege, le miel de la feconde region ; la neige & la glace de la troifieme; fes cavernes offrent uii grand nombre de mine-raux,&: d'autrcs producftions, du ciimabre, du mcrcure , dufoufre, de Talun, du nitre & du vitriol: de fac,on que cctte montagne mer-veilleufe produit cn meme terns tout ce qui effc neceiTaire a la fubfirtance aux plaifirs de ia vie (*). (*") On pourroit cultiver, en fuivant Ics differentes elevations de k montažne, toufes les efpeces podihles ri'arbres fruitiers; mais i] fliudroit que les habitnns fiilTent plus nombreux , plus laborieux & plus inf-^ruits dansleur metier. Les botaniftcs afTurent que le cannellicr I'litbrc du calFe fe trouvent fur le mont Etna iJiins I'etac de fauvageon , & nc demanderoicnt que tie in culture. 11 y croit auffi, a ce qu'on pretend , Jes plantes aromatiques Ics plus rares; mais per. foflne ne fe donne h peine de les thercher, & biesi Nous ne fommes plus furpris de I'attache, meat opiuiatre qu'ont les Siciliens pour cette montagne, & que tous Ics objets de terreuL" qu'elle reiiferme n'aient jamais pu les cn dialler. Qiiojqu'elle les chätie quelquefois , eile joint, conime uji boii pere, des favcurs a Jes puiittions, afin de iie pas perdre I'attache-iiient de fes eiifiins. Si ellc ies traice qiielque-I'ois avec UJie verge de fer , elle repaiid cii mčine tenis fur eux tous Ics dons de Tage d'or. Adieu. Nous allons prcfcnter nos refpečts au viceroi, & faire nos vifites d'adieu. Cette cerenionie m'attrilh toujours; niais je n'ai jamais rellenti autant de chagrin , parce qu'il n'elt pas probable que nous revoyions janiaiü les honnetes gens que noiis allons quitter i &■ nous ne pourrons pas memc un jour leur reudre les poiitefles que nous en avons rcques-On dit que le vent eft tres-boni je porterai vraifemblablenienc nioi-meme cctte lettre fur le continent, d'oii je vous ecrirai encore* rioins de ics cultiver. Le prince cSc Bifcari eft le feul dc tous les habitans de Catane, qui ait employe quelques foins pour tircr parti de ce fol biülant; il a mcme force la nature, & a forme un jardin au mi-]feu de cette lave ou fdarra , qui, apres avoir entoure le chateau, a coule jul^u'a b mer. Voi/age de Ritdc-/f/, page IJ 7. O ij iiLU LETTRE XXXVIII. Retour ti Naples, A Naples , le premier aoüt 17 to. AprŽS deux jours d'une navigation agreable, iioiis Ibmraes arrives dans cette ville , ou nous avoiis retrouve avcc une joie infinie tous lea amis que nous y avions lailtes- Nous avions be-foin dc cctte confolatioii pour oublier la peine que nous avoit caufc notre depart dc Sicile. Nous relterons encore au nioins trois mois ici, jufqu'a ce que la faifon du mal-ana foit paflee. Vous fiivez combien il eft dangereux de voyager dans la Canipanie pendant ce terns. Quoi-que plufieurs de nos plus favans mMecins re-gardeiit cette opinion comme une erreur popu-laire , cependant nous ne nous avifcrons ftire-jnent pas d'en tairc Texperience. Nous nous propofons de pafler I'hiver ä Rome, oil nous trouverons probablement des objets d'inltrudlion pour quatre ou cinq mois. Nous irons de la par Lorette, Bologne, &.c. ä Venife, en fuivant la route battue. Nous ' quitterons alors les campag^iies brillantes de ritalie, pour parcourir les delicieufes & frai-ches rtiontagnes de la Suifle, ou la liberte & la fimplicite, bannies depuis long-teras de toutes . les niy:ions polies, regnent eucore dans ieur piu'ete originelle. La douceur retnperee iIli cli-nvaty annoiice celte des habitiuis. Pendniitqiie les autres peuples font opprimes & aigris par ■la tyraniiie & la fiiperiritioii, les SniHesvivent en paix au fein de i'imiocünce & du bonlieiir. Mais je dois m arreter : vous lavez que je fiits attache depuis bien long-tenis ä ce pays. Nous coniptons y paiüer Tete. Je prevois qu'alors jioLis ferons raßafies de l'art, & que nous com-niencerons a languir apres la nature. Eiie feule peut procurer quelque plaißr reel ou durable; & fi, en pourfuivaiit le bonhcur, eile n'elt pas notre guide, nous ne pourrons jamais J'atteindre. Adieu, inon eher ami. Vous avez etc notre fidele compagno]! pendant ce voyage, & voiis n'avez pas pen contribiic au plaifir qu'il nous a caufe, S'il vous en a procure autant, nous vous prierons de nous accompagner encore dans le reite de nos courfes. II fauc qu'unhom-me ait Fimagination bien iterile, s'il fe trouve dans la folitude pendant qu'il a des amis avec )ciquels il peut conveiibr. Cette confidence fiiit bientöt difparoitrc les mers & les montagnes qui nous feparent; eile excite en nous ces fen-timens de fynipathie qui rappellent agreable-meiitle louvciiir d'un ami. Je ne m'affieds jamais pour vous ecrire, que je ne vous voie place ä I'autre c6tc dc ma table j & jc i'uppofe que nous allons nous eiitretenir des evenemcns de la journec. Sivottfc prefcuctj ne m'avoit pas O üj aiiime, commcnt aurois^je eu la patience de vous ecnre ces enormes lettres? Adieu. Nous allons faire quelques excurfions dans Ic royau-mc de Naples; & H nous reiicontroiis quclquc chofe qui fait digue d'etre obferve, je vous cu ferai part. Je fuis , See. FIN des Lettres. O M O a jk^jp JC DELA SICICLE,C*} Ou Con donnc une idct de C etat aÜuel de cent isle , relativemeru a fa population, a fon gouvernement, a fes produäions & AJon commerce, SL^a Sicile eft la plus grande & la plus coiifi-d'jrable des isles dc la Mediterranec. Elle eft fituee cntre le trentc Ik le trentc-troifieme de-gre & demi de longitude, & le trentc-fixicmc degre viiigt - cinq minutes, & Ic treiite-hui-tieme degrc vingt miiuitesde latitude. Onlni donne deux cciits iieiies de cötes, & eile s'e-tend du fud au nord, I'efpiice de quatrc-vingt-dix licues communes de France, Si de cent luiit du levant au coucliant. Le dctroit de Mcf-lijic, qui la fepare de la Calabre , n'a que trois niilles d'ltalic dans i'endroit Ic plus etroit. Comme la Sicile eli d'une figure triangiT-laire, & tcrminee par trois caps principaux , ( * J La deftn'ijtifjn Ibivanie nous a psru nčceJljire pour completer la connoifibnce que IM- Rrytione donnc de cetteisle dans fo lettres. Ce n'eft d'ailleurs que I'extraic d'un ejrcellcnt memuire fur cettc isle , done nous fne connoilPons pas I'auteur, & done nous n'avonspas voulu corriger le Ityle. mi l'a nommce ancienuement Trinacria, ou Jsü a trois pointcs. Elle eil divifee eii trois vallecs ou provinces : la vallee de Maiara au couchant, & Celles de Danona & de Soto fituees au levaiit. La vallee de Mazara, qui a environ foixaiite-doiize lieues communes de France du midi au nord, & autant du levant au couchant, con-tieiit cent douzc villes j eile eft arrolee par une vingtaine de petites rivieres. La vallee de Demona a environ cinquante lieucs communcs de France d'etendue , le long de la c6tc Orientale, dans la mer lonienne, foixante-quinze dans (a partie feptcntrionalc le long de la mer de Toicane, & foixante-deux dans fa plus grandc lurgcur d'une mer ä Fautre: on y compte cent trente-quatre villes. Revolutions de la Sicilc. Cctte islc fut d'abord nommee Sicanic, parce que Skanus yToi des Iberiens, sV ctabüt & hiidonna ibn nom. Les^ic/z/M, chaffcsdu pays Latin par les Aborigenes, vinrent l'habiter en-fuite, partagerenc Tiste avec les Sicaniens, & lui donnerenc auffi leur nom, qui a prevalu. La Sicile a etc peuplee d'ailleurs , en t iffercns terns , par plufieurs colonies grecqucs. I! s'y forma divers eCats, dont le principal fiit celui de Syracufe, poITcde fuccelHvement par Denis, Agathocle, & Hicron. Les Romains & !es Car-thaginois fc la difputercnt pendant loiig-tems i & cnfin, les premiers ayaiit prevalu, elie fut ioxunile a la rcpviblique roniaine julqiies vers Tan 440 dc Jelus-Chrift, que les VcndiilcR s'cn cniparercnt. Belifaire, general de Tempereiir JulHnicn, Fi-nlcva ä ces barbares en eile demeuru foumifc aux empereurs de ConC-tiintinoplejufqiics vers I'an 828,qii'elledevint lii proie des Sarrafins. Robert le BofTu , fecond fits de Tancrcde, priiice Normaiid, en chafla ces infideles, & prit le ticre de comte dt SicUc en roSo. Roger fbii fils fiit couronne roi des deiix Siciies, c'elt-a-diic, de la Sicile propre-ment dite, & duroyaiime de Naples, en 1130 par l'anti-pape Anacict, & en 1139 par le pape Innoccntlf. Ii tranfmitce double royaume a fes defcendans, qui en joiiirent jufqii'en 1282. Pierre ITI, roi d'Arragon , qui avoit des pretentions lui: ces etats, comme raari de ConC tance, fille dc Mainfroi, bätard de Tcmpereur Frederic II, roi des deux Siciies, s'empara a cette epoqiie, de la Sicilc proprcmcnt dite, apres les {iimenfes vepres ficilienjies, oii Ton egorgeu, le jour de paques, ä I'heure des vepres, par une conjuration premiditee, tons les Francois qui etoieut dans I'isle. Le roi d'Arragon la tranfniit i fes defcendans, rois d'Arragon & d'Efpagne , qui en ontjoui jufqu'en 170(3. L'ar-chid-uc Charles , qui en fut enfuite empcreur fous le nom de Chcvks VI, la prit alors ä Philippe V, roi d'Efpagne. Elle fut cedee en 1713 , par le truite d'Utrecht, ä Vidor-Amedee, due arS Deschiptiott abržgi^e de Siivoic, qui en a jouijufqu'cn 1718, que les Elpagtiols la reprircnc. Les Autrichicns , avec lefccours dc3s Anglois, la Icur enleverent deux ans apres; & Tcmpereur Charles VT donim alors la Sardaigne en echange au due de Savoie. Le premier Fut dcpoflede dc la Siciie par I'EC-pagiie en 1734i ^ ^nfiii ce royaumc , avec ce-lui de Naples , eft rette i I'infant Don Carlos, fils de Pliilippe V, roi d'Efpagne , par les traites de Viennc de I'an 1735 & de I'aii 1738- Population ^ nombre de feux. Un pays fi beau, fi vafte, fi abondant, eft tres-peu people; on ne lui donne en tout que 1,500,000 habitans. II eft meme tres-peu probable que ce nombre y foit, fi Ton confulere la depopulation furve-nue depuis 1714- La capitale renferme prefque uii dixieme des habitans du royaume. Une carte geogra-phiqiie de Siciie , faite en 1714 par Carlo Viii-timiglio, & revue en 1744. par Agatino Dai-done, natif de la Cafcibieta, montre I'etendue des trois provinces , des neuf dioceies, des dix fergenteries, des littorali, appartenant a chaque bourg ou ville raarititne; eile indique encore le nombre des habitans dans chaque endroit. Voyez les notices qu'elle donne fur tous ces fujets. Norabve des villes royales ou domaniales, quaraiite - deux; des villes baronuales, truis cents dix. de la. SrCTLE. Nomlai-c des fcux & des habit;ins, eii l'amiee 1714; favoir, 2(>S,i63 feux, failLint 1,123,16^ hiibitatis, a railbn d'cnviron quatrc par fbu. Population- des Filles. Dans ce nombre ctoicnt compris to,ooo luibitans a Palcrme, fans les ccclellafHtiiics, qui feuis faifüieut 40,000 perfounes. Melläie avnidalors, 40,313 habitansi Catanc, 16",2225 SyracLiIe, 17,20^ jTrapaiii, Kjjijaoj Modica , 18,517^ 5 Gii-geiiti, 11,377. Le payfiiii, eii SicÜe, eft propri^taire; il paie fon ccns. Lc mot de fiu fe prciui, eti Sicilc , ä la lectre, c'clt-ä-dire, qu'il figniäc une la-iiüUe, Produäions de la Sicile. La Sicilc elt, Jans coiitredit, un des plus beaiix pays de i'Europc: on pent avcc raifou rappcller le jardinde, rEurope. Son tcrroxr, im-pregne d'ime quantite de particules nitrcufcs, ctt de la plus frraiide fertiüte. Les deiix provinces de Noto & de Mazara abondenC cn bled, commc Celle de Demona cn Fruits. Les päturagcs les plus gras font arrofes d'iinc quantite immenfc d'eaux de Ibiirce , dont qiicl-qites-unes fom miiierales & fülutaires pour la giierifon de dirterentes maladies. L'islc pro-duit les fimplcs les plus rares, d'excellens vins, de l'huile , des cannes a fucrc, des müricrs cn grand nombrc pour la iiourriture des vers i foie, de 1a maiiue, du fafran, des froniages , des laines, II s'y troiive des carrieres d'aluii, de vitriol, de foufre, & beiuicoiip de falpetre j des montagnes pleines de fei foffile ; pres d'En-11,1 de C'dftro - Girranni, des marais falans ; k Marfala-Frapanix, des mines de plomb, de fer, de cuivre, peut-etre d'or'& d'argent; des carrieres de niarbre, de toutes fortes de por-phyres, de pierres precieufes, teLles que des emeraudes & des agates , & beaucoup de co-rail. Les angiiilles du Faro, & le poüron appelle epe'e, font tres-eftimes. La province de Demona eft particulierement riche eii foie, en huile & en mines. La campagne de Meffine eft plantee d'oliviers, de figuiers , d'orangers de ce-dres; cellc du val de Noto elt tres-fertile. Les beftiaux deviennent fi gras aux pätiirages de Catane, qu'il faut les faigiier pour qu'ils ne fuf-foquent pas. Onyrecueille beaucoup de miel. Les environs de Piazza , dans le miüeu de l'isle , font delicieux, Sc abondent en fources & en ruifleaux qui ferpentent parmi de petits bois de pins Sc de coudricrs. Le viceroi de Sar-daigne, comte de iaTrinite, qui y a ete avec le roi Vidlor-Amedee, alTure qu'il ne connoit poiiit de payfage fi enchanteur. Des campagnes couverces de thym, de calamente & d'autres herbes odoriferantes, fe trouvent autour de Ragufe. L'isle produit encore des chevaux, des betes ä corncs, des amandes, des piftaches; en un mot, ü ue lui maiique prefque que les epi-ceries. DE LA SiCILE. 221 On y compte jufqu'ä trente-une difFereiites fortes de marbrcs clurs, plus de trois cenrs d'a-gate, de bery], de jiifpe, & d'autrespierres pre-cieufes. Mines. Les mines j dans ce royaume, etoient aban-r donnees deptiis Ic depart des Saxoiis, qu'on avoitappellespour les faire exploiter. Le roi a ordonne depuis peu de reprendre ces travaux. ^!tat du Gouvernement de Sicile. Le Ficeroi. Dans l'abfencc du roi, le viceroi eft la premiere peribmie en Sicile 3 fa refidence eft k Palerme. Selon 1 etablifrement de Ferdinand le Catholiqxie en 1488, cette charge ne doit fe doimer que pour trois ans; mais on proroge fouveiit la commiffion. Le viceroi ačluel, ori-ginaire du duche de Parme, a ete continue deux fois dans cette place; il commande, com-me lieutenant & capitaine-gaieral,toutes les troupes dii royaume, & prefide A tous les tri-bunaux de juftice & de finances. En qualite de l%at a latere du fouverain pontife , il iiege dans les fondions de la chapelle du roi, fous im baldaquin, allifte de tout le facro-conßglio; dans la cathedrale, il.aun trone plus eJeve que celui de I'archeveque ,quiva a fa rencontre. Ses ap-poincemens font dc 40,000 ecus de Sicile par an ( environ 210000 livres). La nomination de toutes les chargcs municipaics & inilitaires du royaume elt un dc fes droits : cependant I'exer-cice de cc droit cit plus on moiiis limite, icloii les circoiifhinces. Le viceroi eit affifte dun miiiiftre qu'on appelle confuluur. Charles - Quint inftitua cctte place : il doit etre jurifconlulte, & fiegc de droit a tons les tribunaiix , particulicrement dans les caufes fifcales, etant defeixfcur & pro-tečteur du trefbr-royal. Tribunanx. Lcs tribunaux du royaume font au nombre de qiiatre : Lagrande Cour Roy ale, I, Le tribunal de la grande cour royale a le premier de tous les departemens du royaurae: il coniioit cn detrniere inftance de toutes les caufes. Six juges compofeiit cc tribunal, dont trois forment la grande cour civile , & trois la grande cour criminelle: ils changent de cbam-bre au bout de I'annee j & apres deux ans , on leur en fubltitue de nouveaiix. Le prelldent , qui eft le chef du facro-configlio , rcfte toujours en place. Un avocat fifcal intervient a toutes les caufes qui intercflent le fife. Le Patrimoine Royal. II. Le tribunal du patrimoine royal, nom-in,e autrement della ngia camera,, djarige i'admi.. b e l a s 1 c i r, ür 223 niftration tie tous les reveiuis du roi. Ce de-partenient cit compofe dc fix minilbes qu'on iionime niaeßri ra^iv^.ali, dont trois font j urit confiiltes perpetuels, que Ton appelle de rohe loTigue; ils font juges cntre les particuliers & le filč. Les trois autrcs , de I'ordre eqiieflre, ou de robe caiirte, prefident iiniqiiement ä l'ad-miniltratioii economique & au trefor. Lc prefi-dent, qui eft a vie, eft charge de la partie des depouilies & rentes des eglifes vacantcs; uii confervateur-gaieral pour les interets du roi; uaavocat fifcal ä vie, qui examine les relents de la cour de Rome , qui doivent etre cxccutes dans tout leroyaume. Cliacun des fix coiifeil-lers a fa täche particuliere: Tun , les galeresi J'autre, les ponts, chaiilTees, & les fortifications ; untroifieme, les appointemens des nii-niftres du roi. Trois colledeurs levent les de-iiiers ürrieres dus au roi par les villes Sc let campagnes. La Giwita. III. Le tribunal de la Giunta exerce ä Mef-fine, depuis que cette ville a perdu fes privileges , la nieme jurifdičtion que la chambre a Palerme j il decide les diifcrends entre les tri-bunaux ecclefiaitiques. Le Conßfioire. IF. Le tribunal du confiftoire , nomme en-eure trtbunak ddlafacraregia cofißen^a , eft COJtn- pofe de trois juges de robe, que le roi elit tons ]es tleiix ans j & nomme cojifiilkrs royanx. H tlecitle les caufes qui, par voie d'appel on de revilioii,yfontportees apres ie jugement des deux premiers tribunaux. La Monarchie. } Le tribunal de k monarchia regia eft ime des plus finguliercs prerogatives des fouveraiiis de la Sicile. Le pape Eugene III coiifcra im roi Roger une jurifdiäion abfolue & independaute pour le fpirituel, commepour le temporel: de Ii vient que le roi de SicÜe eil legaC-ne. Les pupes Urbaiii II & Adrien IV confirmercnt ce beau privilege. Le tribunal eft compofe d'un miniftre ccclefiaftique, dočteur en droit canon, que Ton appelle ä Palerme , monßgmr ddla mo. narckia; d'tui avocat fifc'dl , d'un procureur. II exerce en Sicile la meme jurifdidion qu'cxer-ceroit un legat du pape dans le royaumc de Naples i il eft juge ordinaire dans toutcs Ics caufcs qui regardent Ics abbayes de coliation royale , &les eglifes independaiites de leurs or-dinaires i il connoit, par voie d'appel, des fen-tences de tous les tribunaux ccclefiaftiqucs j & pour cela il entretient des cours fubalternes dans toutes les villes de I'isle, & ä Malthe meme. Finances. Tribunal de la Croifade. Un autre, grand tribunal ecclcfiaftiquc dans I'isle, nž la sieile. 22? l'isle, eft celui de la croiHide. Une bulle d'Ur-bainll, de l'annee 1095 , accordoit aux fujets des fouvcraiiis qui alloient fe croifer en Paief^ tine, beaucoup d'indulgenccs, & entr'autres privileges y celui de oiiinger du laitage pendant le carčme, Alexandre VI rciiouvella cette btiüe, particuliercment en faveur de Ferdinand le Ca-tlioliquc, pour les royauraes. d'Efpagne & de Sicile. L'archeveque elt, par delegation du iaiiit-pereconiniiilaii-e-geiieral de ce tribunal i i! a ies tribunaux fubaltcrnes dans toutes Iss villci de Tisle & ä Malthe, L'argent qui fe paic pour avoir cctte dilpenle , fait annuellemeiit une fomme de looooo ecus ( ^2^000 livres) , iel-quelü, puifqu'il n'y a phis de guerre contre les-infideles, doivent lervir i fentretien des ga-icres, Mag if rat s de Paler me. La viUe de Palerme a fcs magiil-rats parci'cir-Hers, qui Ibnt, 1°. le capitaine jutticicr, qui ad-iiainiftre la juilice criniineile ; il eft dief de la jiobleile, & il liiit imniL-diatement le viceroi dans Ies ceremonies folemnelies, 2°. Lc preteur, qui dirigeTeconomie de k vilie, & tient uit conful-tciir pour les affaires de Tannone & des confu-lats : il eft deputeperpctue! du roj.-aumc, clief de I'ordre domanial dans ieparlemenc, ^jouitdes prerogatives de capitaine-general dans Tab fence du viceroi. 3'. Lacour capitanale & pretoricnn^ earuIL ^ confifte en trois juges, citoyeiis de Palcrme J qui font e!us chaqiis aimee par le roi; i!s af-ßltent le capitaine dans la decifion des aiFaires criminelles, & le preteur dajis les deliberations fur les finances. Ces deux officiers cependant n'ont ni voix ni fignature, excepte le preteur dans les affaires qui ^regardent la banque publique & I'annone. 4". Le fenat do Palerme elt compofe du preteur, & de fix patriciens que le roi nomine , qui portent la toge comme les aii-ciensfenateurs romains, & prennent foinprin-cipalement de ce qui regarde la police des grains & des vivres. Les fenateurs font grands d'EC-pagne de la premiere clafle : les deputes de la place executent les ordres du fenat. Administration ]&conoiviiqjije de Palerme. Prerogatives de la religion de ßlalthe. La ville de Palerme, quaiit ä I'economie, eft divifee en quatre quartiers. La religion de Mal-the jouit de la belle prerogative d'etre regardee comme le cinqiiieme quartier de Palerme, en vertu de quoi eile doit etre foiirnie de vivres & de toutes les fubflftances , prealablement ä Ca-tane, ä Melfme, & ä toutes les autres villes du royaume ; die a auffi le droit d'entree franche de taxc pour tousles vaifleaux de guerre. Les Siciliens fc plaignent que la religion abufe beau-coup de la francliife des traiteü, & qu'eile tirö de diez eux, en beftiaux & en vivres, bcau-coup au-del;'i de la quantite accordee par les privileges. La ville d'Augulte, prelque toüte ha. bitcc par les Malthois, facilite beaucoup ccs l'ortes de contrebandes. Mais que peuvcnt deii-rcr de mieux Ics colons, que la vente de leiirs deurecs 'i Sept grandes dignith du royaume. Lcs grandes digmtes du royaume font les fept liiivantes, qui dans les terns paffes etoienc d'Liii tres-grand relief. I«*. Le niaeftro-portalo-no a I'inlpedion des magafins ä grains, & dc toutce quircgarde Je commerce des denrees. 11 a fous lui des officiers fubahernes dans ies ports de mer, & il depend lui-nieme du tribunal des Bnances. L'auditeur-general prononce l^uis appel iLirtüus les crimes commis dans Ies palais du roi, par Ics infideles, oupar des milicaires; il aim avocat & un procureur-fifbal. Legrand-amn-al; iii jiiriidičtion s'eteiidfur les mariiiieri, tanc pour le civil que pour le criminel : cet emploi u etc reuni a la chambre. 4°. II protona-tajo^ ou chancclier, exerce la jurifdidion fur Ics notaires du royaume, cxpedie Ies patentes pour tons les cmplois, lit les propofltions quand le parlcment eil alfemble ,.ticntle pro-tocole dans ce cas ; au couronnement du roi, il lit le ferment de fidelite que doivent lui pre., ter les trois ordres du royaume, celui que le monarquc doitprononcerpour Ic mainticn des Pij capitoH on des privileges de la ville de Palerme £ hcjuelle ccremonie fe fiiit cncore a rinftallation d'uii viceroi. Lc protonotaire ddla camera regiale exerce le meine emploi dans les fix villes qiii furent le domainc particuUcr des reines de Sicüe J jufqu'a ce qu'apres la mort de Germain de Foix, veuve de Ferdinand le Catholiqne, on les reiinit au domainc de la couronnc. Voici ]e nom de ces fix villes ^ Syracufe, Lentini Carientini, San-Filipo, Mitieo &Virini. yaunic de Naples eft ejicore plus ridie. En lya^, le gouverneur inibnna fempereur Charles VI, que les deux tiers des biens-fonds du royaumeetoient dans des mains-mortcs ; & depuis cecte annce jufquVt prefent, Je clerge a encorc fait des acquilitions immcn-fes, particulierement lesnioinesquife Jiomnicnt fervites. La loi Ci iiige, qui vient d'etre publice P iv dans le Mantouan, feroit bien iieceliairc dans ces deux royaumes. On eft iiidigiie de nc voir que des piiyHins converts de hailtoiis., & fou-vcnt tout nus, dans uu pays qui eit le plus ieuu de I'Europe. Revenus royaux. Les revenus annuels du royaume de Sidle confiftentdansles impofitions fur les univerfites du royaume, taut feculieres qu'ecclefiaftiques.; les dons orditiaires ou extraordtnaires, les fer-mes, les gabelles, & les droits & taxes: on les fait monter en tout ä plus d'un million d'ecus (*). Cependant, felon un etat des revemis du roi de Naples, de I'annee 1748, ils netoient evalues que 324000 ducats napolitains. Le d^ pofitaire de ces deniers ä Palerme eft I2 trefo-rier-royal, c'eft-a-dire, un miniltte facro-'Confi^Lio, qu'on appelle ma,gißro dd real patrl-monio. La feule ferine dutabac en Sicile , rapports annuellement 330 a 3 s'0,000 ecus. On le tire de Salonique ; il eft jaune : letabac noir que les 'inarchands de Genes comptoient fournir , n'a point trouve d'approbation. Troupes. Les troupes de terre dans I'islc font ordinai-Tenient fur le pied de 10000 hommes, intaii, (') L'ecudc Sicilc vauc 5 liv. j ibis de Jjiance. D E a. A Si CI LE- 233 lerie & cavalerie, qui, encas debefoin, s'aug. nicncent jufqu'a 32000. Marine. Qiiant ä ]a marine, le royaume de Naples a 'Ordinairemcnt deux vaiiTeaux, deux fregates & quatre chebecs. Milko du pays. Les dix rergenteries du royaume fourniilent ■environ 1600 hommes de cavalerie & 10000 fancalliiis. ■Commerce. Les vilies de Palerme Mefiine font les entrepots de tout le commerce de la Sicile. 11 y a quelques annees qu'on etablit ä Meli fine une compagnic royale de commerce. On obligea tous les negocians de MelTItic do con-tribuer aux fonds de -cette eonipagnie j on fit un fonds d'environ deux millions de France. Avec cc capital, la compagnie auroit dü faire de-s gains d'autant plus grands qu'on lui ac-■corda deux privileges.cxclufifs , celui de I'im-portation du lin & des cuirs du Levant. Cc-pendaat les monopoles ont mine les fabriqucs d 11 pays j & la compagnie, qui n'en a point piu-:fite., s'eft dijfoute depuis peu. Caraäere de la nation. Les nobles Sicilicns voyagent beaucoup ; & il y en a parmi eux qui ont tire parti de Icurs voyages. lis font extrememcnt preveiians en-vers les etrangcrs, & ils font plus vifs & plus penetrans que les Napolicaiiis. On cii trouve plufieurs qui s'adoiiueut ;iux fcieiices. Iis tä-chcnt de nietcre du goi'it dans lameublement de leurs maifons. Le luxe en equipages ell cx-celFifa Palerme; ilyajufqii'a des artifaiis qui vont en carrolfe par la ville. Les femmes Sici-Heimes font tres-«njouees; leur tcuit elt affez beau, pour un climat aulli meridional. Les ELombreufes iamilles de Palerme rendeuc temoi-giiage de la fecondite des Siciliennes. La nation aime beaucoup ä plaidetr: auffi y a-t-il une infinite d'avocats & de legiftes j les difpoficions feodales font naitre des proces eterneis. Le Sici-lien ne paroit pas avoir un genie crcateur; mais il ell habile a imicetr. Le pouvoir de Tin-quifition en Sicile, contribuc beauconpa con-ferver I'ignorancc dans Fisle. Le faint-office, älarequifitiondcs icfuites ,afait enlever dernie-rement au feul libraire Franqois qn'il y ait a Melfine, une quantite dc livres , fans auciin difcernement 5 & cntr'autres la phyfique de s'Gravefande----Malgre cela , il fe trouve en Sicile des perfoimes a qui cette oppreflion donne le dcfir de s'eclairer. Dix perfonnes ä Met line ont forme, depuis plufieurs annees, unc «fpece d'academie des fciences , qui s'aflemble toutcs les feinaines a hiiis ouvcrts, chcz un d'cntr'eux. Ccttc aifcmblee, ä laquelie il manque encore fapptobauon uuroi, fe nomniedes . EE LA Si C ri,e. 237 reparateurs. II n'y a prcfque poiiu d^iiidullrie diins cetteisle. Le Sicilieii quia tanc de mati eres premieres, ne lait pas les f'a(:onner,ni nieuie en tirer parti,piir un commerce libra; & c'effc par cetce raifon que la depopulation de I'isle va cn augmentant. Peut-etreJa fculercpublique de Syraculb iivoit-elle anciemiementautant de fu-jets que toiice la Sicile a prefejitemeiic d'habi-tans. Le pcu de fiirete qu'ily a a voyager en Sicile, ne donne guere bonne opinion des Sici-iicns : les brigands font prot^cs ouvertemejit par quelques barons du royaume. Nouscroyons devoir ajouter ici un portrait des Sicilieiis , tire du Voyage du baron de Rie-defel. Cctte uati^on, ainfi que tous les peuples meri d ion aux , polFede beau coup de fin eile , de penetration & de talens ; mais eile eit en meme fems fort adonnee i ceCte mollelfe , a ce penchant ä la volupte, ä cet efprit de rufe & d'ar-tifice , qui feinblcjit gcncralement s'augmenter ä mefure qu'on s'avance vers ie midi. Ce feu li ctonjiant qui les aniqie , n'eit point accompa-gne chez eux de la moindrc appai'cnce dc ce phlegme fi neceifaire aux artilles datis I'execu-tion: ce qui i'e manifede non feulemcnt chez ieurs peijitres & chez Icurs fcuipteurs, mais encore chez leurs poeces, dont tout fourmille dans ce royaume, memeparmi lepeuple, fur-tout de ces poetes qu'on nomrnc improvifateurs^ Onlesvoittouspreferer le plaifir de produire 235 DKSCRIPTIOM ABREGŽE ■de nouvclics peiifees , au foüi de Its reiialfcr ^ de les pcrfedionuer, Je Ics purgcr de leiirs tkutcs. Oil voit bien qiie la iiiitiire, dans cc cUmat , u'opeix plus dans cc julte milieu entrc le froid violent & rcxceiiive chaleur qui procUiit cet heureiix phlegme. Un fei äcreagit ■fans ceJe fur leurs n(^rfs ; & rien n'efl plus coni-mun eu Sicile, qit'tine miiiadic qu'ils uomment Iinuri falß ( humeur liles); cc qui pourroit bien, aii reite, n'etre qu'une -fuite de la faqon done ils vivent, & fi.tr-tout des exces qu'ils fosic en fucreric. Quoi qu'il en foit, cette äcrcte d'Kurncur les rend iaquiecs, imputiens j & cette dilpolition , jointe au feu iinmodere qu'ils portent au ded.uis d'eux, fc nianirclle fouvent par les Ildes Ics plus violens. Voila pourquoi les cfFets de In laloiifie & de la vengeance font It tcrribles chez cux, & qu'ils Turpailent ä cet egiird coutes les autres nations (*). Cc metnc Voici un excmplc qui vous prouvcra jufqu'ä quel point les Sicilicns font portes ä In vengeancc , & tes traces profondcs qu'a faitcs chez eux l'ancien efprit repuhiicain, IJu tems tie l'etnpereur Charles V , il fc irbniM ä Trapani uns confrairie faus le nom de con-jrafcrnita di San Paolo , dont l'inftitution & Ic vccu coiifiiloient a prononcer des juyeniens Tur Iss actions & la conJuitc de Icurs niagiftrats , de IcurR conci-toyens & de chaifue habitant de la ('iUe. Qiiicoiujiie avoit ete coiitlaninš par route l'airembliie , etoitperriu Tins relToiirce ; Sc celui des niiinbres de la confrairie quo l'on chargiuic de Texecrnblc fondion d'airalllu j DE LA Sl £ rt. E. 257 rrieiiingc qui compofe Icur caiuiitcre, proHuit uiilii qiielijucfbis un heroifinc & un itüitiiine tiont 011 pourroit tircr Ic phis grand paiti. Je puis vous en iiittr cjuelquet. iraits. Dans ic tems qiLC !e bngand Te-flakinga iiifeihnt !ii Sidle avec Iii truiipe , Romano, ibn ami ibn conBöent, eilt tc malhciir d'etre pris. IJ ctoit cn qiielque fi^qon le lieutenant de Te-ßa/unga , & apres lui Je premier de !a troupe. J^c pcre de cc Romam lue iirrete dans le niänc tems , & eniprifijime pour crime; on lui proinit fii fjracc Ä lä liberte, fi fon tils vouloit fc preter trahir Teßalur^a & ]e leur livrer. Lc coniljat cntre la tcndrclTe filiaie & l'amicie juree fut des plus violent chcz le fils; mais Ic pere lui-ničmc hii periiiada cie donner i lumitie la preference fur Tamoiir filial, qui feroit, di/bit-i!,iivili, s'illefliifoiteclater, dans ce moment, nu prix d'inie trahiibn. Romano fe rciulit ä Favis de ibn pere, !k fbt £dde i ibn ami. Teßaliir>i^a \m-\'acmc ayant etc pris pnr Ja füitc, ün ne pirc jamais , ma'gie )es tortifres ley plus cruclles , Tcngager a trahir aucun de fes compagnons, garda jufqu'a la fin le fi-lencc ic plus protbndfbr ce qiii les conceriioit. Le trait fiiivant nÜie un bei exemple d'uji veritable amour mis a la plus fcrCe eprcnve. Uii prince d'une des pliis nobles fuTniH"-! de Pa- čcoit oblige d'obtir fans replique, & d'expcdier en cachettp cet homme ainli condamiie fecretenicnt par «et abominable tribuna}. krme, vivoit dans un commerce feciet <5c tres-intime, avcc une demoifclle de meme condition que lui; cctte intrigue aboiitit au niariage, niais un pcu tard, puifque ia dame accoiicha d'un fils deux mois apres fes noces. La honte, dans un pays ou les imprefTions de I'honneur font fi fortes, le defir de fe mcttrc a couvcrt; des propos que cettc aventure feroit tenir ä touts la ville, Tefpoir enfiii de voir bieittötfuc-ceder d'autres enfans ä ce!ui-ci, engagereiTt les dcuxepoux a le fouftrairea la connoilfance du public, &. äremettre le foin defon education Ä de fa fubfiftance ä un paylan. La chofe dcmcura fecrcte jufqu'au moment que la mere fe voyant aTarticle dela mort,fe crutobligee ,pourI'ac-quit de Fa confdence, de reveler tout le myf-tcre. On fit aufli-tot revenir de la campa^ne ce fils,qui parut. plus etonne que rejoui de liju cbangement d'etat : il declara d'abord, qu'il ne s'y foimiettroit qu'a condition qu'on lui per-mettroitd'epouferune payfiinne charmante qu'rt aimoit Cette demande n'ayant pas pu lui etre accordee, il renonqa ä routes fes pretentions: en faveur de fon frere, & reprit joycufement Fctat dans lequel il avoit ete eleve. II y vecut content, avec I'objct de fa tendrefle, dans une obfcure, mais heurcufe mcdiocrite. Avouez, moil ami, que ce feroit li un beau fujet k met-tre au theatre, & qu'i! meriteroit d'etre manie par un FoUairc on par un Mhafiafi. llfetrouve encore par-ci par-la des traits de DE LA S I C I t E.' 239 rciTemblance ciitre les aiiciens Sicilicns & ccux (Ic jios joins, quoique les nombreufes mutations ti'habiciins, de fouverains & . Diodore rapporte une ancc-clote pareille aufujec du temple de Minerve,& ne Fait aucune mention particuliere de celuide Junpn. Voici fes propres paroles." Les Cartha-„ ginois arracherent des temples, ceux qui y „ avoient cherche ieur faiut, & les egorgerent „ impitoyablemenr.On dicqueGelliasIui-raeme, J, cet hnmnie fi riche & fi bienfaiTant, pentalors ^ avec fa patrie. II s'etoit refugie avec quelques „ autres dans le temple de Minerve . efperant „ que les Cnrthaginois aiiroient quelque refped ,, pour le nom de cettc deelTe ; mais s'apperce- notes. 149 „ vant bientot que ce ncfcroit pas la un freiti „ fufHfarit a Icur fureur, il mit lui-memele feu „ au temple, dans lequel il fur coiifume avec s, routes les offiandes renfcrmees dans cet edi-„ fice Pii^e ixji^fie J I. Theron, roi d'Agngcnte , mouriit Tan 472avant Jcfus-Chrifl;. M. de Rie-defel croit que le monument dont il eft ici queP. tion , eft de conftručtion romaine, & qu'il ne pent parconfequent point etrc ceJui de Theron. Pa^e 16 , tigns premiere. lis nous paroit a/Tez firnp!e, que la vertu de I'hofpitalite & le vice de rivrognerie doivent marcher ordinairemcnt cnfemhle. L'hofpitnlite fournit I'occafion dc boirc J & toute occafion dc cette nature eft faifie avec enipre/Tcmenc parun ivrognc. Convenoris ccpendaiit (juc robfervatioti dc M. Brjdone f<)uffre une multitude d'exccptions. L'hofpitalite vient de I'education. comme rous les vices & toLites les vertus; & I'efpccc d'cducatioii qui in-fluc lepliis fur les mrcurs des homines , eft celle qu'ils resolvent des circonftances dans lefquelles le hafard ou leur pofitionles piacent. Vagt 17 , li£>ie 14. Nous rnpporteronsici, d'a-pres Diodore de Sicile , un exemple de I'horpi. talite des habitans de I'ancienne Agrigente. Cct exemple fervira en meme terns, ä faire la con-noiffancc jntcreflante de ce Gellias, qui perit dans les flammes du temple de Minerve, comme nous I'avons dit ci-delTusdans la note de]a page 11. " Le plus riche des Agrigentins, en ce tems-„ la, dit Diodore, etoit Ge lias, qui avoit chez „ lui plufieiirs nppartemens pour fqs hötes , „ & qui faifoit tenir devant fa po«e un certain 2fo Notes, „ nombrede domeftiques,dont la commiffion „ ecoit d'iiiviter cous les etrangers ä venir loger jj chez lui. Plufieurs atitres dtoyens failoient ä „ peu pres la meme chofe, & recevotent leurs „ höces avec toute forte de bienveiliance & de „ franchire. Celt ce qui a fait Jire au poete Era- „ pedocle, parlaiit d'Agrigeme: Pour tout navigateur , port heureux & fidele. „11 arriva un jour que cinq cents cavaliers de „ Geia, dans un cems d'hiver, pailerenc par j3 Agrigente. GelÜas !es requt tous dans fa mai-„ fon,& fit p^efent ä chacun d'eux d'une tu-„ nique & d'line robe qu'il trouva chez lui fur-„ le-charap Page 17 , lipie jg. Nous n'avons pu trouver ceci dans Diodore dc Sidle. Pa£e 18, ligne Diodore dit (Implement que ce vivier etoic deftine pour fournir aux repas publics., &il n'ajoute pas qu'il tomboit en ruine du terns d'Augude, parce qu'it auroittrop coute pour I'entretenir. Voici les propres paroles de cet hiftorien. " 11 y avoit en ce tems-la hers de ,, la ville, un lac fait de main d'homme , de fept „ ftadesdetour(quatre milletroiscentsfoixante-„ quinze pieds , ou environ un mitle d'ltalie ) „ & de vingt coudees de profondeur ( trente 5j pieds) ; on avoit eu foin dele fournir de toutes „ fortes de poiflbns, pour la magnificence des „ repas publics. La furface de fes eaux etoit jj couyerte de cygnes & d'autres oifeaux qui for-„ moient un fpedlacle tres-amufant & tres-cu-M rieux „. Page Ig, ligneM. Brydone ou M. de Rie- Notes. dePel fe trompent. Ce dernier dit:" On troiive „ encore quelques veftiges du cirque, ainfi que „ de cette pifcine done Diodorc donne une def-„ cription fi actrayance. Les aqneducs en font „ tous pratiques I'ous terre , ä caufe qu'on fai-3, foit venir ies eaux de la partle iuperieure de la montagne II peut fe faire que M. Brydouc n'ait pas cherehe dans Ies ruines Je lieu de cette pifcincii! trouve Ies recherches de cette nature tres-peu importantes, & en cela il n'a pas tort. Page Ig, likens 16. Cc citoyen qui revintavec tant de falte des jeux oiympiques, s'appelloit Exccnete. Ii etoit monte, fuivant Diodore, fur un char accompagne d'iin grand nomfare d'au-tres ,entre Ici'quels il y en avoic trois cents at-teleschacunde deux chevauxbIancs,tousj\gri-gentins. Le Diodore de M. Brydone difoit que l'attelage de ccs trois cents chars etoitde quatre chevaux blancs chacun, & ajoutoitqu'ils etoienc tous richemenc caparaqonnes, Le dernier article eil fans doiite tres-vraifemblable s & quant au premier, fix cents chevaux blancs de plus oii de moins dans une vilie, ne font pas un objet. Page lg , ligtie 21. Nous n'avons pas fu trou-ver ce paflage dans Diodore de Sicile. C'eft fans (ioute notre faute; aulfi ne nous amuferons-nous plus ä verifier les citations de M. Brydone.Voici en revanche ce que nous avons trouve dans le voyage de M. de Riedefel, fur les chevaux de I'Agrigen te moderne ou descampagnes des environs:" On eleve encore toujours ici, Tefpece „ de chevaux la plus exceiiente , la plus noble „ de la Sicile j & ces animaux ont le pied Ii für „ dans les niauvais chemins, que nous defccn- if A Notes. „ dions avec eux des pentes fi rapides, que les „ pietons qui nousaccompagnoieiitetoient for-„ ces de fe laifler aller lur leur derriere pour les „ defcendre. „ Altor cquorum J, 3Iille rapit tur mam, atque kinnitibus aerafiammaty J3 Pulveream volveni Agragas ad inania mibcm. Silius, lib. XIV. page 21 tilgte La defcription que M. de Riedefel nous donne des quatre relieTs qu'on voir dans la cachedrale d'A^Hgente, eft bieii dif-fercnte de ce qu'en dit M. Brydone. M. Brydone compre, par exemple, douze figures dans le premier bas-relief; M. de Riedefel ne parle que de neuf. M. Brydone dit que le roi (car c'eft uii roi fuivant lui) tombc de cheval ; M. de Riedefel affure, au contraire, que c'eft d'un qnadrige ou char ä quatre chevaux, dont il eft tombe, &c. Ccspetites chofes, tres.peu importantes en ellesmernes , peuvenc cependant fervir a afleoir un jugement fur I'exaditude d'un voyageur. Les ouvrages de d'Orville 5c du P. Pancrncio pour-ront apprendre au ledeur qui de M. Brydone ou dc M. de Riedefel eft le plus exad dans ce cas. Voici les paroles du voyageur Pruffien. " Je me J, rendis----ä la cathedrale , oil j'eus lieu d'ad- „ mirer dans la piece qui y fert aduellement de „ fonts baptifraauxjun des plus excellens, peut-„ etre meme le plus beau de tous les bas-reliefs „ antiques en marbre, que le terns nous ait con- „ ferve____Ces fonts baptiCmaux ontcte trou- „ ves dans les fofles de I'ancienne Agrigcnte; ,5 & chacuii des trois c6tes differe des autres > » Notes. 5, foit par le fujet, foit par ie travail. Le devant,' 3j qui fe prefentoit fans doutc auifi eii face dans „ cet ancien foife , contient neuf figures. Le „ lieros, ou la figure principale, eft un alto 3, relievo. Tout ce que I'antiquite nous a tranf-„ mis de belles formes & de belles idees, s'f „ trouve rcuni; c'eft un des plus beaux hotnmes „ qu'on puifle concevoir: ce n'eft point un etre „ du commun , c'efl: un de ces mortels deftines „ par la nature a des entreprifes extraordinai. „ res: ii ell bien plus faillant que les autres figu-„ res, plus grand qu'elles, plus accompli j c'eft, „ en un mot, le chef-d'cEUvre'de la nature & dc , Tare qui Timite. Les autres figures ,qui repre-j fentenr les compagnons du heros, font egale-3 raent des chefs-d'ocuvres pour ce qui concerne J Jes proportions & les belles formes; mais elles , font moins belles que la figure principals. La , vicill.e femme, qui paroit fetre devant ce heros , dans I'attitude de fuppliance, eft un peu pettte en comparaifon des autres figures, mais ce-pendant parfaite dans fon genre. Dans la face drotte de cette urne , Ja figure qui tomb^ evur nouie oiFre la plus belle femme que I'arc puifle former, & le profit de fon vifage a toute la perfedion, toute i'harmonie qu'il foit poffi-ble a I'efprit humain de fe reprefenter. Les bras, fur-tout celui qu'elle etend, & qui eft foutenu par uns nymphe ou une de fes com-pagnes, eft un chef-d'ocuvre & le modele de la plus fublime beaute. La draperie a toute I'eicgancc, toute la nobleffe, toute la facilite imaginables, & les attitudes en font eiquifes. Le derriere reprefente une chalTe , ou trojs 3^4 notes. „ hommes armes , Tun d'uiie pique , un autre „ d'une groffc picrre qu'it eft pret ä lancer, & le „ troifieme qui eft ä cheval, d'un dard , tachent ^ d'atteindre un enorme Tanglier. Le travail en „ eft chetif, & infiniment au-deflbus de celui „ de la face de devant. Le quatrieiiie cöte eft du „ nieme ftylc que cclui du derricre, & a beau-j, coup moins de relief. II reprerente un homme ,, etcndu par terre, qui vient d'etre renveri'e de fon quadrige ; un autre tache de retenir les „ quntrechevaux qui one I'air efFarouche & fou-j, gueux; enfin Ton diftinguc, avec peine ä la „ verite , dans un coin de cette face, un monf-„ tre qui reflembte ä un dragon , & qui paroit „ avoir epouvante ces chevaux.....Apres avoir „ long-tems examine cctte urne avec bcaucoup „ d'attention, je Tuis encorc un peu dans Tin-„ dccifion fi elle reprcfcnte I'hiftoire d'Hypo-„ lite & dePhedrefk beilc-meLX, ou biencells „ d'Hedor qu'Achille traine apres fon char. La „ premiere opinion me paroit cependant ta plus „ vraifeniblable. Pour lors la partie du devant „ reprefenteroit dans la figure principale , & „ dans la petite vieille, Hypolite quo In nour-„ rice tache de gagner, comme dans la tragedie j „ celle d'ä cöte, le defefpoirde Phcdre en appre-„ nantlcs refus ou la mort d'Hypolite; celle dc „ derriere , lejeuneherosa la chafle ; & la qua,, tritmcifa fin deplorable caufee par la fougue de jj ies chevaux epouvaiites a la vue d'un dragon fortidela mer. Je ne fuispas I'efclave de mon opinion : peut-etre meme la tragedie grecque, & celle de Racine, ont-elles ieduit & egare „ mon imagination; mais toujours me paroit-il notes. afj- „ que le bas-relicfs'accordefingulierementavec „ cette hiftoire. Page 2 f, ligue derniere^ M. de Riedefel aflure qu'au mois d'livril, Ics bleds etoienC fi hauts dans les environs de Girgend , qu'ils les couvroient eux & leurs chevaux , lorfqu'ils les traverfoient. II ajoute qu'il a mefure des herbes hautes de dix palmes, ce qui I'air un peu plus de huit pieds mefure de roi. Ce terrein a ete de tout terns tres-fertiie. Diodore dit que c'eft de fa /ertiUte que font provenues toutes les richeifes de Tancienne Agrigente. II ieroit intereflant de faire quelques recherches phyfiques & chymiques fur les caufes d'une vegetation ß abondaiite & fi forte. Peut-etre fourniroient-elles quelques nou velles decou-vertes; & dans un fujet comme celui-ci,e!les font tüujours de la plus grandeimportance. ?r 5 17. AJoutons aux autorites que M. Brydone rapporte pour montrer que les grains viennent fans culture en Sicile, le palfage fuivant que nous lifons dansM. de Riedefel." C'eft id g, ( a Moczzanieni ) que j'ai vu plus qu'ailleurs „ dans ies bruyeres, de I'orge & de I'avoine fau-„ vagcs. Ces grains y viennent naturellement, „ comme la mauvaife herbe. Bien des natura-„ liltes ont doute que cette femence exiftät effec-tivement dans cetetat fauvagej ce qui eftce-„ pendant un fait dont j'ai des preuves vifibles. jpa^f 4f, /žgKe 14. Nous voyons avec peine , que M. Brydone eft du nombrede ceux qui le laiffent aller au riificule des prejuges nationaux. Tüute fa phiiofophie ne peut, par exemple, le de-pouitlcr de cette laine innee que les Anglois ont pour les Franqois. Pourquoi diie.fans aueune exception, que les Francois chan^gent psu dt. imurs & detmnisres, en femHaut avec les autfes jiatioMS, perfuades qtCih font feuls di^ms d'etre imte's? 11 n'y a que des fots, qui fe croient feuls dignes d'etre imiccs. Or, les fots font toujours Jots, quelle que foit leur patria. L'homme feiife fc conforme aux mocurs de chaque nation jil ell rhomnie de tousles pays, & fe garde fur-tout de mettre fur le compte de toute une nation , les ridicules de quelques-uns de iesindividus. Fn^e 46, i^. Nous connoiflbnsdesFran-i^oifes qui ne rougiffent point de leur äge. Mais , li'en d^plaife au refpečtable corps des ladys fexa-genaires & odogenaires , nous ne croyons pas qu'il y ait dans les trois royaiimes de la Grande-Breta^ne une feule femme qui au fond du cocur foit bien-aife d'etre vieille. L'empire du beau fexe eft fonde fur I'art de plaire, comme celui de rhomme I'eft fur la force. Des que I'agea fletri Jes charmes, cet empire fi puiifant s'evanouit, & il ne refte aux femmes, fuivanr I'opinioii uni-vcrfellement reque, que des droits humilians a la pittedes hommes. Ceft fans douteaffreux; mais il faut convenir que ce n'cn eft pas moins vrai pour cela , & qu'une femme ne fauroit etre bien-aife de fetrouver dans ce cas. Fa^e fi, ligyte 15. Les femmes de Palerme ne font pas les feules quifemblent etre exemptees de la maledidion portee contre notre mere Eve. Nouslifons dans Varron, ancifn auteur remain, que les femmes de rillyrie enfantenc fans dou-leur, & que I'enfant paroit pour ainfi dire avant les maux. S. Clement d'Alexandrie dit ä peu pres la meme chofe des femmes de liberie, & Linfchotten Notes. 5f7 Liiifchotteii afTure , dans fa navigation aux In, des, que les Caiiaiieennes accoucheiu prefiiue ■ tuutesfiins Jbcours etrangers, cant cettc corvee leur elt facilc. On faic encore que les tcinmes lit: Conlhiuiiiüple luiu apcu pres ilans le uiemccas. Miladi Wortley Montague, (jui , pouf le dire cii pailiint, ne crouvoic pus ie jbrc des vi eitles R'ln-mes fort agreable eii Anglecerre , alfuie qtril y •aJameme difference de tidre un eniant a Conl-taiitinopic ou en Angleterre , qii'encre un legcc rhume de cerveau tju'on actrape queiqueFois Fautc de fe menagcr alFez, & ces viiaines toiix eti-qiies fi communes a Londres. Miladi parle d'a-pres ia propre experience, puifqu'elle accoucha d'unc fiiic a Conlbntinople. rage , ligne %. La prevention fj pcu philo-fophique atoiic expliquer, conduit fouvcnt les raifonneurs ä de bieii ridicLÜes idecs. Comment eft-il pollible que la temperature de Tair ramol-lilTe & relache afJez les hbrcs des organes de la generation des Temmes, pour qu'elles puiHenc accoLicher avec autant de Hiciiite qu'a I'alcrnie? Par quel mccanilhie la preflion de I'air aug-jiiente uu diminue-t-elle les dangers de renfante-nient? II parcit, il eil vrai, que c'clt dans le cliaiiit, qu'il Taut cherclier les caufes de la faci-]itc & des dangers de raccouchement & de les inir.es. Le cas de miladi Wortley Montague le prouve, par exemple. Mais ce n'elt, ni dans la temperature de I'au-, ni dans ies degres de foa Jniinidite ou de i'A lecherelle , ni dans le poids dc la coloiineque cKaque femme porte fur Ion corps, que I'on trouvera ces caufes. Nous con-iioiliunsauborddela Medjterranee, deseiiJioits liuiiudes He iiien chauds, oil Ies femnies accuu-Pan. II, R 2/8 notes. chent avec niitant de peine & do danger , qu'anx bonis tUi lac de Geneve pendant un terns bieti fioid & bien fee, quoique la coionne d'air qui" pefe furies femmesdes bords de ia Mediterranee, ait environ ouzo cents cinqitante - hiiit pieds tie plus que ccllcqui pele fuiies Fcmtnes de Geneve. Fiige 68 , ligf^e On voit uii pareil caveati dans un convent de capucins äTouloufe. Les ca-davrcs s'y coiilervent afc long-tcms fans preparation qiiclconque ; & en ccla il eli: plus en-rieitx que celiii dc Palcrme , s'il c!t vrat qu'il frulle preparer les marts d'unc ccrtaine fsqon, ainfi qiteie crüit M. BryJone. Sans douts que le caveau de Touloufe contteiit que'qus vapeiir ou quelque autre matiere anti-i'jptiquc tres-pene-trante ;mais cette niatiere eft entierenu-ntincon-nue ,&nous ne nous rappellons pas d'avoir In quelque chofe de fatisfaifant fur ce fujet. li feroic ccpendantafTez intcreflflnt dc faire quelques re-cherches pbydques & chymiques. Pa^e lo^.M. Brydone fait, cians cette lettre, une vigoureufe fortie contrcle fytleme des forces tcmrafes, imagirie pair le grand Newton. II rie conqoit pas, dit-il, comment les cometes peii-Vertt pärcourir leurs orbites par leconcours des forces ccntripctes & centrifuges. Non content d'avoir moiitr'H'impoffibilite, meme frs cbntra-riidtionS ds riiypothefe neiSf tonienne-, ii fubf-ticu; un autre agent i celui it TattratSion dc la jjraviration univerfeiltf, & cet Agent eft I'at-trndioh & Ja repullion eledlrique. Mais danS cettb fbrtie, conduite felon tons les principeS de I'ait dc In guerre litteraire , M. Brydone a obbiie unc petite chtjfe; c'ell de nous möhtrer comnVeiu il ftut s'y ptetidra pour cflteiiler Totbita d'utie to- Notes. mete , d'apres les donnees de fattratSion Si. de la rcpulfioiieledlriques. II aurciirdu ferappeücr que Newton tracii dans Ion cabinct la inarche de la faaieiile conietc de i6So,avec t;uU de fuccts , que tüiices les obfcrvations que Flamftc'cd avoic f'aitcs fur un rnouvemencde plus de cent treiue degies , fe crouverent ties-bieii reprefentecs par Ton caJcul, En cffet,aulfi lung-tctiis que M. Hr>;-done ii'aura pas lait la memediofe, rhypotliefe qit'i! pretend aneaiicir Temportera fur la l:enne qui dans Ic fonds n'apprend lien , n'efi fondet; iuc rien , & ne pent avoir aucun ufagc pratiqiie. Nous tie nous amufeio:'.s pas a repondie ä touccs les objedions qui l"e trouvenc dans cecte iettre. Outre que nousne pourrionspas nous faire entendre Tins figures, nous croyons qu'il feroit inutile dc reperer ce que d'autres out die inieux que nous ne !e iaurions faire j car toutes les dit-ficulies deM. Brydone s'aneantilVent par la firn-plc cxpofitioii de l'hypöthefe des forces centrales Si de icur Eller. Void cependanc quelques obfer-vacions detachees.que nous ne croyons pas entie-rement dcplacees. A la paffe j>6, on lit que la comete avoic une lueur toible qui la faifoit; ref-fembler ä une ctoile brillante a t ravers un ieger jiuage. Miiis on a}outQ,pn£e 851,que le 1"' iuin, la cumete etoit vifiblelong-tems avanc que l.es etoi-ies fixes parufTent; a h pci£e 87jqne le dernier niai, une petite etoiie hxe Put appercue ä tra-vers raclimolpbere de la comete , & parut confi-dcrahlemenc obfcurcie j !!>iiitm, que la meine nuit 0Ü ce plienomene fut obferve, la vitejTe de la conlete etoit 0 prodigieufe , qu'on la voyoic clairement changer de place. Nous abandonnons I'appreciaaon dc c?s Faits aus Icäeurs eclairesj Kij au fiüt de ruhfcrvntion aftronoraique. —— Page 91. Ceß la tyoifieme comste de cetre efp^ct', die M. lirydone, clout ^hu eu occafion d'epier Is rmar, ^ jc n\ii jamais en le bonbiitr de k s re-voir apres qii'eiks nut depajfe le foleil. De deiix choles Tunc : on M. Brydoiie a mat cpie , ou il l)ien epie ; s'il a inai cpie , il eft clair que ce n'eft pas la tauce du lyrteme de Newtoii s'il n'a pus VII ces Crois cometes ä leur letour du foleil j niais s'il a bieii ejiic, iie pouvoit-il pas fe faire que la terre ie trouvät alors placce, reTativement au i'oleil & a iacomece,de maniere que le retour de ces trois cometes ne put etre apperQU 'i Ii iioua J'emMe que, fi le loleil etoit dans ce mojiietu entre la terre & les cometes, foil difque fur-tout Ta Initiiere, devoient nccelTairemeiit empecher de voir leur retour. --Fa^e 91, Si le fyßems de I'ele&ricite, de Puttraßioii & de la ripnlßon avoii ete cojttm dcms le fiecle der-fiier, je ßiis perßuade que le praßond genie de Newfo» en auroitproßte, ^c. Nous accordons ä M. Krydone que Teledricite n'etoit pas portee dans le fiecle dernier au poiiic oü eile eft main-tenant ; niais nous ofuns alTurer que rattradton & la repulfionetoient connues alors, que Newton ne ri(Tnoroit pas. Tons ceux qui connoiiJcnc un pcu rhil^oire de Feledricite, n'ignorent pas quece celebre phyftcicn envoya le detail d'line experience uir I'attraftion & la rdpulfion elec-tviques, a la Societe de Loiidres , en id/f; qu'it defjraquecette Socicte en fitreiTai, & qu'ayanc reulfiapfes quelques cclairciiTcmens, die lui eii fit des remerciemens autlientiques. II paroit nieme, par deux queflionsannexees ä que Newton s'etoic aflez occupe de Teledtricite, Notes. i(5T pour imaglner iinc cf'pece trhypothefe fur la i:aule de celic du vevre. -—~ Pag^e 9(j. Ces cometes ( qui tombcnt ilans Ic foleil ^ font fii-i-etnem des corps fl'ime nature tres - diffirente tie Celles qm mit des queues,^ auxqnclles dies parnijfent inohn rejfembler (jtCaiix phmetss, &c. Nous obfervons llir cc pnifnge : i". que juf-fjii'a ce jour nucim rt(i:ronoine n'n vu des co-inetes ()iii /e reiidenc clfcdlivement dans le fo-ieil, & queccttc opinion eit iiiie en eiir renou-vcllee de (^ueKuies pythagoriciens qu'Aritlote a refutes ii y n bien long-terns. 2*?. Quo hi queue (lüs comcrcs ne peut {'ervir h ctablir uno difference entr'cltes ; car fi cola ecoit, il y aiiroit bieii-tot ijlie foule de nouvcaux corps releftes, & ccitriines cometes (eroicnt cometes & ne le fe-rniciit p.iK dansle niemc rnonient, piiirqu'oii eii a vu qui avoienc des (juciics iorfqit'üii !es regar-doit d'uii point de terre, tandis qu'clles n'en ayoicnt pns Inrfqu'oii Ics obfcrvoit d'nn autre. C'stt ce (,)ut arriva , par excmplc, a la comete de 17 f 9----P, amietes it queues Jt'ont^^ieTeete uißbles que krjqii'elies s'^iloigmnt dit Joleil. C'eft unc erreur niünifeitejun defnut de memoire chez jiotre auteur. — Ihid. Ponriptai la ^^rnjjeur ^ la htmiere An foleil ne paroiffhit-elles pat diiin'iiiier, quoiqite clmjiis jour ilper de de [a fubjlance en ecl.ti-rant Piitiivers ^ Cette confomtmtion doit etre im~ vtenfe. Cette conibmniation n'el!: point immenlb. LeP. Bölcowich , en confiderant la prodigieiife iiibtiiite dc la lumierc,a catcule que, H Pon cou-vroic route la furface dc la terre de grains de fable de !a grolFcur d'uii ciron , il faudroit autanc de lieclcs qu'il y aiirüic de ces fjrains de fable , pour qucle fuleil eprouvii uiie diminution feii- R iij itfz Notes. jGble dans Ton volume & la 'uniiere qu'ji repand. D'un autre cote, il eil tres-peu vraifembtabie, fuivant nonibre de phyliciens diftingues, que la lumiete I'oit un fluide quidecoule du foleil. Pa^s icy, ligy.e 14. Lcs urnes funeraires font cc qu'il y a de plus rcmarquable a ces tombaiix. M. de Riedefel dit qu'il y en a quatre de fin porphyre, & qui paroilient etre prifcs dc quelques aiiciens tombeaux des Romains. r-age n f, Ugne f. Ce pnßfcriptum nous rap. pelle le conte tres-connu d-'une dame galante qui ciuc voir Tombre de deux amans hcurcux, ä deux tacbes qu'elle voyoic dans la lune; & d'un cure (ie campagne, qui foutenoit aucontraire, que ces tachesocoieut Tombre des clochers d'uiie cachedcale. Page 12.4, ligne 4. Le firoco de Naples pro-duic plufieurs effets qui pourroientie faire prendre pour un air putride, puiiqu'il afFoiblit fin-gulieremenc le principe de la vie , & qu'il caufe des fievres putrides. D'un autre cöte , on lui trouve nuiH que I que analogic avec I'airfixc. On fait que I'air fixe detruit I'irritabilite de la fibre animale, & qu'il en peut refultcr rous les maux que produit le firoco. Mais, comme il n'eft pas probable que le firoco de Naples foit ä la fois air putride & air fixe, ce dernier etnnt tres-anti-fcptique , la nature de ce vent dcmeure abfolu-ment indcterminee jufqu^a ce que les experiences nous Paient fait connoitrc. II n'eft pas non plus demontre fi Ic firoco de Paierme eft le meme que celui de Naples , ou s'il nc Tefl pas. D'apres cequ'cndit M.Brydone, nous ferionsporres ä Ic re^arder comme un air charge de phlogiflique , quoiqail foit difiicilc de dire oii i'air va prendre notes. . ajj ce phiogiftique. En general, i! rcgne dnns i>hu ■ ficurs pays, des veins cfonton nc (;iuroic conce-voirla nature, "malgre routes les belles clecoii-vertes qu'on a faitesdepüis peu, Leplusremnr-quable de tous, & cn mems tenis le plus funefto, eit celili que ies Arnbes nppellciuyij)«,/)«««/ vtiel, fuivaijc Jn diverfite des piononciations. M. Niebulir dit qu'ii e[l tres- frequent dans ie deferc euere JJafra, Bagdad, Halel St la Mcc-quc , & qu'on le connoU auffi dans quelques endroits dc la Perfe , des Indes & meme de TErpagtie. Du point d'ou viont ce vent, Tair elt rougcatrc, Ics Arabes le fentcnt venir ä uiie odeur dcibuCrc : alors ils (c jcttent ventre con-tre teirc, I'evitent, parcc qu'il fbuifle hori-foiualemsnt. Dans ceiix qui perifleiU par le Jhiiitfi, ie (hug [ort quclquefois avec impetuofiti duuez & des oreilles deux Iieures apres. Le ca-d.ivre coitferve long-tcms fa clialeiir; ii enflc, dcvient bleu, verd; & qiiand on vcut le Ibu-lever par un bras ou line jambc , ccs membres fe fi'parenc dii none. i'a^e tf I, /i^ve 26. Eft-ii bicii vrai, comme Je pretend M. Biydonc, qu'il nc fiibrdte phis aucim veltige du temple de Veiuis Erycinc? M. de Ricd'eiel a ete fur ies iieiix , Ä voici cc qu'il dit. " On trouvea fix niilles de Trapant, „ fur Iii moiitagnc qui porte Ion nom , autrefois „ Ie motu E!rix, quelques vediges de i'ancienna „ ville d'Erix & dii famenx temple de Vienna 5j Kryciiie. Ccs veiliges coiillllent en qnelqu« 33 (ragnicns de coionncs dc granite , don t on ne „ reconiioit pas I'ordrc d'nrcliitcclnre, & d<"ns ,) uiin^ fontaine ties - profbiide , qu'on dcnnc „ auff: pour itre hi (bntaine egnlcment celcbre R tv H54 NOTE S. „ de ia meme Venus Erycine. On y montre „ encore )es Liebris de dcLix portes , qu'on dit „ etre tes anciennes portes de In ville; niais je jj rne crois trcs-foncte , ajoute M. dcRiedelcl , ä croire qu'elles oiit appartenu ä un Fort conf-„ tiLiic pnr les Normands. „ rage j.(ä7,/j^He if. La meUleure pecbo du thon Ic faic aux environs de Tinpani, fur^tout nutour des ibles Favignaj^na & Falconieri. M. de Riedefel, qui nous apprend cela, ajoute que cette peche rapporte ä la famtlle Pali