159 Le texte littéraire dans l’enseignement d‘une langue étrangère : une espèce menacée? Meta Lah Résumé Dans le présent article, nous présentons en préambule la place du texte littéraire dans l‘histoire de l‘enseignement des langues pour passer ensuite à des arguments en faveur de l‘utilisation des textes littéraires en classe de langue. Dans la partie empirique, nous essayons d’abord de déterminer la place de la littérature dans quatre manuels de FLE. Ensuite, nous présentons les résultats des entretiens semi-dirigés que nous avons effectués avec six enseignantes slovènes tout en leur demandant leurs avis sur la littérature dans l’enseignement des langues. Nous terminons en évoquant la question des textes adaptés, souvent utilisés en classe de langue étrangère. Mots-clés : classe de langue, texte littéraire, manuels de FLE, pratiques enseignantes. ACTA NEOPHILOLOGICA UDK: [811.133.1'243:37.091.3]:82 DOI: 10.4312/an.55.1-2.159-175 Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 159 12. 12. 2022 09:29:09 160 Meta Lah INTRODUCTION1 Au cours de l’histoire de l’enseignement/apprentissage des langues étrangères et selon les différentes méthodologies, la littérature a été plus ou moins présente dans l’enseignement du Français langue étrangère : « la littérature a connu de façon cyclique, des phases d’abondance et de disette, entre sacralisation et désacra- lisation » (Morel, 2012 : 141). Le texte littéraire, même s’il est actuellement moins présent dans les classes de langue, a bien sa place dans l’enseignement, et ce pour plusieurs raisons. Nous ne saurions le résumer mieux que Proscolli (2009 : 131) : « En tant que document authentique, le texte littéraire se prête à l’étude de ses divers aspects socioculturels. En tant que forme de communication, il représente un stimulus de réflexion sur la communication humaine. En tant que document polyvalent, il suscite une réflexion sur les modes de fonctionnements discursifs et textuels et se prête à la découverte de la complexité des plans énonciatifs. En tant que document écrit, il contribue de manière appréciable à la diversité des discours utilisés en classe de langue par la perception des spécificités de l’écriture et des invariants des types de texte et des genres. » Dans le présent article, nous allons d’abord présenter la place occupée par le texte littéraire dans l’histoire de l’enseignement des langues, en nous focalisant surtout sur la situation actuelle avec le Cadre européen commun de référence pour les langues (2001) et son Volume complémentaire (2018). Nous allons ensuite essayer de présenter des arguments pour l’utilisation des textes littéraires dans la classe de langue. Dans la partie empirique, nous nous proposons de répondre à deux questions de recherche : • quelle est la place de la littérature dans les manuels de FLE ? • quelle est la place accordée au texte littéraire par les enseignant·es slovènes ? Pour terminer, nous allons aussi évoquer la question des textes adaptés qui sont beaucoup utilisés en classe de langue étrangère. 1 Cette étude a été effectuée dans le cadre du programme P6-0218 Recherches théoriques et appliquées des lan-gues : approches contrastives, synchroniques et diachroniques, financé par L’Agence nationale de la recherche scientifique (ARRS). Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 160 12. 12. 2022 09:29:09 161Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère LA PLACE DE LA LITTÉRATURE DANS L’ENSEIGNEMENT DES LANGUES Dans la méthodologie traditionnelle basée sur l’apprentissage des langues an- ciennes, le texte littéraire est considéré comme le support le plus important, son but principal étant la traduction des textes littéraires : « C’est un travail minutieux sur les textes comme matériau qu’il faut analyser pas à pas de manière exhaustive et détaillée pour arriver à la traduction la plus précise et la plus fidèle possible » (Godard 2015 : 15). Gardant sa place de support privilégié, la littérature « couron- nait l’apprentissage de la langue jusqu’à la décennie 1950 » (Cuq et Gruca 2002 : 374). C’est la méthodologie structuro-globale audio-visuelle qui a finalement « banni la littérature de l’enseignement des langues vivantes et a donc évincé le texte littéraire des supports d’apprentissage pour représenter la parole en situation » (ibid., 375). Le texte littéraire a été réintroduit dans les classes de FLE avec l’ap- proche communicative, dans les années 1980. Dans cette approche, il fait partie des documents authentiques, « participant à l’acquisition de l’écrit au même titre que les produits médiatiques et fonctionnels, le texte littéraire n’a cependant pas été pris en compte dans ses spécificités propres, qu’elles soient linguistiques, tex- tuelles ou culturelles : si l’on s’en tient à l’analyse des méthodes, le texte littéraire est exploité pour développer la compréhension des écrits et généralement dans une perspective globale. » (Gruca 2009 : 167). Selon Morel (2012 : 141) cette réapparition « se réalise de manière confuse. Avec l’arasement de tous les types de textes au même statut de textes, la littérature est un document authentique comme les autres. » Dans le Cadre européen de référence pour les langues (2001), la littérature est peu présente, même si les auteurs mentionnent ses atouts : « Les littératures natio- nale et étrangère apportent une contribution majeure au patrimoine culturel eu- ropéen que le Conseil de l’Europe voit comme une ressource commune inappré- ciable qu’il faut protéger et développer. Les études littéraires ont de nombreuses finalités éducatives, intellectuelles, morales et affectives, linguistiques et culturelles et pas seulement esthétiques. » (CECR 2001 : 47). Dans les grilles, la littérature apparaît à partir du niveau B2, donc aux niveaux supérieurs ; prenons comme exemple la grille pour l’auto-évaluation (ibid., 27) : • Je peux comprendre un texte littéraire contemporain en prose. (niveau B2) • Je peux comprendre des textes factuels ou littéraires longs et complexes et en apprécier les différences de style. (niveau C1) • Je peux lire sans effort tout type de texte, même abstrait ou complexe quant au fond ou à la forme, par exemple un manuel, un article spécialisé ou une œuvre littéraire. (niveau C2) Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 161 12. 12. 2022 09:29:10 162 Meta Lah Le Volume complémentaire du CECR (2018, 53) apporte trois nouvelles échelles qui traitent de la littérature, toutes les trois apparaissent dans la catégorie Médiation : • lire comme activité de loisir (uniquement pour le processus de réception ; les descripteurs proviennent d’autres ensembles de descripteurs du CECR), les descripteurs sont proposés à partir du niveau A1; • exprimer une réaction personnelle à l’égard de textes créatifs (moins intellec- tuel, niveaux inférieurs), avec les descripteurs à partir du niveau A1, • analyser et formuler des critiques littéraires (plus intellectuel, niveaux supérieurs), avec les descripteurs à partir du niveau A2. Même si les activités sont décrites comme « plus ou moins intellectuelles » et cela de façon un peu maladroite, le fait d’inclure ces descripteurs dans le CECR laisse espérer qu’il existe un consensus sur la place que le texte littéraire devrait avoir dans l’enseignement des langues. POURQUOI UTILISER LA LITTÉRATURE EN CLASSE DE LANGUE ? Il y a plusieurs raisons en faveur de l’utilisation de la littérature en classe de langue. Sarkar (2018 : 39) en mentionne trois : la littérature sert de modèle culturel, de mo- dèle de langage et de modèle de croissance personnelle. Calafato et Paran (2019 : 29) soulignent surtout le critère de l’authenticité : « L’utilisation de la littérature comme ressource d’apprentissage des langues est censée apporter de nombreux avantages. Les enseignants peuvent l’utiliser pour introduire un sujet de discussion intéressant et authentique dans la classe (…) favorisant ainsi le désir d’apprendre une langue d’une manière qui ne peut être obtenue avec des manuels scolaires. » Les textes littéraires se distinguent des autres documents authentiques qu’on peut utiliser en classe ; ils offrent une possibilité d’interprétation : « (…) contrai- rement aux documents fonctionnels et médiatiques qui livrent généralement un message qui se donne à voir dans sa transparence, le texte littéraire, par son dis- cours marqué, livre les possibilités d’une lecture plurielle et sollicite la coopéra- tion du lecteur pour partager ou pour construire son sens : la lecture littéraire se construit, elle est un jeu de construction (Picard 1986). Certes, des documents authentiques peuvent présenter cette caractéristique. La publicité, par exemple, offre de nombreux aspects littéraires et certains slogans peuvent ressembler à de véritables petits poèmes. Mais la littérature condense ces phénomènes langagiers et construit à partir d’eux un univers fictionnel qui se réfère à lui-même tout en se référant à une multitude d’autres textes, hors de l’accidentel, mais toujours dans l’éventuel. » (Gruca 2009 : 172) Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 162 12. 12. 2022 09:29:10 163Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère Lire des textes bien écrits est sans doute une bonne manière d’apprendre une langue étrangère, d’observer des structures et de mémoriser le lexique. Gruca dit que le texte littéraire est un « laboratoire de langue » où « des variations linguis- tiques (...) se déclinent à tous les niveaux : mot, syntaxe, structure, phonétique, etc. ». En lisant, on devient un meilleur lecteur, un des objectifs est aussi de « dévelop- per une réelle compétence lectorale qui dépasse l’approche globale, permet de construire du sens et est susceptible de fournir des outils d’analyse pour conduire à l’autonomie quel que soit le support envisagé » (Gruca 2009 : 172). On ne peut pas négliger la culture de la langue cible véhiculée par chaque texte lu : « Outre ses aspects langagiers, le texte littéraire véhicule une culture qui, par essence, est métisse et métissée et cet aspect devrait redynamiser son exploitation dans les manuels de langue à l’heure où le concept de littérature-monde s’impose et où l’interculturel est prôné et revendiqué par tous » (Gruca 2009 : 174). Calafa- to et Gudim (2020 : 2) rappellent les descripteurs du Volume complémentaire du CECR dans lesquels la note interculturelle est mise en valeur : « Cet accent, mis sur le développement de la compétence communicative interculturelle des appre- nants, y compris leur capacité à produire un langage authentique, a conduit à un regain d’intérêt pour la littérature en tant que ressource linguistique en raison de son rôle de réservoir d’authenticité, de connaissances pluriculturelles et de conte- nu engageant. » En ce qui concerne le côté (inter)culturel, le monde francophone a sans doute beaucoup à offrir à un lecteur étranger : « À ce titre, la littérature francophone, par-delà des aspects historiques, politiques ou économiques parfois très ambigus, reconnus ou récusés, est, par excellence, le domaine du partage et du dialogue des cultures » (Gruca, 2009 : 168). Finalement, selon nos expériences, la littérature peut aussi servir à procurer un moment de détente et d’évasion dans le parcours parfois très (trop) organisé et planifié d’une classe de langue étrangère. Pour reprendre Gruca (2009 : 174), le texte littéraire offre « plus que tout autre support, un espace d’interprétation, si ce n’est de méditation ou de rêverie. » LA PLACE DU TEXTE LITTÉRAIRE DANS LES MANUELS DE FLE Skela (2014 : 131) constate que, dans les manuels d’anglais langue étrangère, les textes littéraires sont beaucoup plus présents dans des manuels anciens que dans ceux qui appartiennent à l’approche communicative. Selon lui, la littéra- ture y « reste périphérique ». Les manuels d’anglais modernes contiennent « des bouts de littérature, mais c’est encore loin d’un programme littéraire cohérent » (ibid.). Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 163 12. 12. 2022 09:29:10 164 Meta Lah Pour examiner la place de la littérature dans les manuels de FLE, nous avons analysé quatre manuels de niveau A1, destinés à un public de grands adolescents/ adultes : • Le nouveau sans frontières, paru chez CLE International en 2002, livre de l’élève et cahier d’activités ; • Saison, paru chez Didier en 2014, méthode de français et cahier d’activités ; • Entre nous, paru en 2015 aux Éditions Maison des langues, tout en un ; • Cosmopolite, paru chez Hachette en 2017, méthode de français et cahier d’activités. Parmi les méthodes analysées il y a trois manuels récents, publiés en 2014, 2015 et 2017, par différentes maisons d’édition. Nous avons aussi inclus Le nouveau sans frontières qui est paru en 1988 chez CLE International et est donc un manuel appartenant à l’approche communicative. L’édition analysée date de 2002. En feuilletant les manuels, nous nous sommes très rapidement rendu compte que, dans les manuels récents, il y a très peu de textes littéraires en tant que tels et que, par contre, il y a plus de textes traitant du monde littéraire (biographies des auteurs, cou- vertures des livres, etc.). Pour cela, nous avons classé les documents trouvés en deux catégories : textes littéraires et textes fabriqués parlant de littérature2. Nous avons aussi évalué les exercices ou activités, proposées en accompagnement de chaque texte. Le nouveau sans frontières (première édition en 1988) Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité Louis Aragon : Persiennes (C/ ex, p.11) Prononciation - intonation Alain Bosquet : Les mois de l ’année (C/ex, p.21) Compréhension écrite René Hague : Dessert (C/ex, p.21) Sans consigne Guillaume Apollinaire : Voyage à Paris (C/ex, p.36) Sans consigne Maurice Carême : Ronde (C/ ex, p.43) Sans consigne Verlaine : Le ciel est par- dessus le toit (C/ex, p.50) Ludique : Illustrer le poème. 2 Nous empruntons cette formulation d’Estelle Riquois (2009). Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 164 12. 12. 2022 09:29:10 165Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité Jacques Prévert : L’addition (C/ ex, p.58) Sans consigne Paul Éluard : Liberté (extrait) (C/ex, p.64) Sans consigne Jacques Prévert : L’accent grave (C/ex, p.75) Sans consigne Jacques Prévert : Pour faire le portrait d’un oiseau (C/ex, p.92) Sans consigne Jules Verne : Les 500 millions de la Bégum, André Breton : Nadja, La Bruyère : Les caractères (C/ ex, p.97) Objectif linguistique : lexique de la description d’une per- sonne Paul Éluard : L’amoureuse (C/ ex, p.101) Objectif linguistique : les parties du corps. Prévert : Déjeuner du matin (C/ ex, p.109) Ludique : Mimez la scène. Production écrite Éluard : Couvre-feu (C/ex, p.117) Compréhension écrite Dan Greenburg : Le manuel du parfait petit masochiste (C/ex, p.124) Sans consigne Prévert : Chanson pour vous (C/ ex, p.137) Objectif linguistique : lexique du paysage et du climat Clancier : Le roi de l ’île (C/ex, p.146) Écriture créative Apollinaire : Le pont Mirabeau (C/ex, p.155) Objectif linguistique : lexique du temps Saison (2014) Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité Michel Monnereau : Le soleil oiseleur (extrait p.30) Pas de consigne explicite, illustration de « Demander poliment » Vincent Remède : Jus de chaus- settes (extrait3 p.50) Compréhension écrite Objectif linguistique : lexique de la description d’une personne 3 Il s’agit d’un texte pédagogique, Collection Mondes en VF, éd. Didier. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 165 12. 12. 2022 09:29:10 166 Meta Lah Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité Présentation de 8 auteurs fran- cophones : Pascale Kramer, Joël Dicker, Andrée Chedid, Gilles Archambault, Nicolas Ancion, Leïla Sebbar, Antonine Maillet, Lyonel Trouillot, Kim Thúy Compréhension écrite Objectif culturel : les écrivains francophones, les prix littéraires, l’Académie française Nicolas Bouvier : L’oeil du voyageur (p.160) Compréhension écrite Biographie : Olympe de Gou- ges (p.180) Compréhension écrite Objectif grammatical : les verbes au passé Entre nous (2015) Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité / Biographie : Amélie Nothomb (p.115) Production écrite : rédiger la biographie au passé composé Cosmopolite (2017) Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité Couvertures des livres de : An- dreï Makine, Tahar Ben Jelloun, Ahmadou Kourouma, Alain Mabanckou (p.91) Objectif culturel : s’informer sur les auteurs étrangers qui écrivent en français Extraits : J.Uyterlinde : Cette femme qui dit être ma mère, F. Beigbeder : Un roman français, P. Leconte : Les femmes aux cheveux courts (P. 98-99) Objectif lexical : description physique / Biographies : Ahmadou Kourouma, Tahar Ben Jelloun, Andreï Makine (p.96-97) Objectif linguistique : les formes du passé composé / Biographie : Amin Maalouf (p.107) Compréhension écrite Daniel Frère : Carnet d’un toubab en Afrique (extrait p.120-121) / Compréhension écrite. Objectif linguistique : le lexique des sensations Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 166 12. 12. 2022 09:29:10 167Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère Texte(s) littéraire(s) Texte(s) fabriqué(s) Type d’activité Couvertures des livres : M. Larnaude : Notre désir est sans remède, A. Mouton : Le metteur en scène polonais, I. Monin : Les gens dans l ’enveloppe (P. 132) Compréhension orale et écrite. Communication : faire des achats. Expression orale : discussion sur les habitudes de lecture. Objectif culturel : Les Français et les livres. Les débuts de romans (pre- mières phrases)4 (C/ac5, p.64) / Objectif grammatical : les verbes au passé composé / Biographie : Dai Sijie (C/ac, p.65) Compréhension orale / Présentation d’un personnage de livre : Anne Miller, Une fem- me à la redresse (C/ac, 66) Compréhension orale / Biographie : Alain Mabanckou (C/ac, p.72) Production écrite : rédiger la biographie de l’écrivain / Présentation de Nancy Huston (C/ac, p.73) Compréhension orale Production orale La différence entre les manuels contemporains et Le nouveau sans frontières qui était l’un des manuels les plus utilisés de l’approche communicative, résulte des quatre tableaux. Dans les manuels contemporains, le texte littéraire est pratique- ment absent : les extraits de prose apparaissent deux fois dans Cosmopolite, trois fois dans Saison (un des trois extraits provient d’un livre écrit à des fins pédago- giques) et n’apparissent pas dans Entre nous. Il y a, par contre, 18 textes dans le cahier d’exercices du Nouveau sans frontières. Dans les manuels contemporains, les textes pour lesquels nous utilisons la dé- nomination « fabriqués » et qui parlent de littérature sont plus nombreux, surtout dans Cosmopolite. À l’aide de différents documents (couvertures des livres, extraits, biographies), les auteurs présentent surtout les écrivains francophones, ce qui est sans doute positif, ouvre aux apprenants de nouvelles perspectives et les munit de nouvelles connaissances. Dans Le nouveau sans frontières, nous ne trouvons pas de textes fabriqués qui parleraient de la littérature. Les textes authentiques sont plus nombreux, il s’agit 4 Duras : Le Ravissement de Lol V. Stein, Camus : L’Étranger, Proust : Du côté de chez Swann, de Gaulle : Mémoires de guerre, Blixen : La Femme africaine, Murphy : Les Filles sauvages, Duras : L’Amant. 5 Nous utilisons l’abréviation C/ac pour le cahier d’activités et C/ex pour le cahier d’exercices. Le changement de nom est le reflet de l’évolution des méthodes d’enseignement. Entre nous apparaît sous la forme de « Tout en un » et n’a pas de cahier d’activités séparé. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 167 12. 12. 2022 09:29:10 168 Meta Lah surtout de poèmes. L’auteur le plus présent est Prévert avec 5 poèmes, suivent Éluard (3 poèmes dont 1 extrait), Apollinaire (2 poèmes), puis Aragon, Bosquet, Hague, Carême, Verlaine et Clancier, avec un poème chacun. Les extraits de prose sont moins utilisés : y apparaissent trois extraits très courts de Verne, Breton et La Bruyère et un extrait de Greenburg, traduit de l’anglais. Nous pouvons aussi observer un changement concernant les activités pro- posées en accompagnement des textes littéraires et fabriqués. Dans les manuels contemporains, les objectifs sont visibles et les activités plus ciblées : les textes sont présentés comme déclencheurs pour la compréhension ou la production et très souvent aussi pour traiter de la grammaire ou du lexique. Les objectifs culturels sont parfois annoncés (p. ex. s’informer sur les auteurs étrangers qui écrivent en français) et parfois implicites, mais toujours présents. Les auteurs francophones sont présentés dans les trois manuels analysés. Si Cuq et Gruca ont constaté en 2002 que dans les manuels, il y avait un « oubli quasi généralisé de la littérature francophone » (2002 : 379), nous pouvons voir qu’il y a une évolution et que les écrivains francophones sont présentés, il y manque cependant leurs textes. Dans Le nouveau sans frontières, les textes littéraires apparaissent dans le cahier d’exercices, à la fin de chaque unité. Dans presque la moitié des cas, ils ne sont pas accompagnés d’une consigne et c’est donc à l’enseignant d’inventer une activité, de les lire tout simplement – ou de les ignorer. Les résultats de ce survol sont en partie comparables à ceux de Skela (2014 : 131) qui a analysé les manuels d’anglais. Dans son analyse, il s’est avéré que les textes littéraires étaient les plus présents dans le manuel le plus ancien, datant de 1950. Ils sont moins nombreux mais toujours présents dans les manuels ap- partenant à la méthode audio-orale, où ils apparaissent surtout dans le troisième volume, destiné aux apprenants ayant déjà un bon niveau de langue. Cuq et Gruca (2002 : 379) constatent la même chose. Selon eux, il y a le « chaos à l’intérieur d’une même série méthodologique : généralement absent dans les deux premiers livres, le texte littéraire fait brutalement son apparition dans le livre 3 ». Quant à la série des manuels les plus récents, Headway, publiés pour la première fois en 1996 (8 ans après la parution du Nouveau sans frontières), Skela dit qu’il contient des « bouts de textes littéraires mais que cela est très loin d’un programme cohérent » (Skela 2014 : 131). Dans les textes fabriqués qui figurent dans les trois manuels français récents, les auteurs présentent presque uniquement les écrivains francophones et par cela mènent les apprenants à découvrir la littérature francophone. Nous nous deman- dons pourtant pourquoi ils se contentent de la présentation des auteurs et ne proposent pas leurs textes. Une des raisons possibles est la présupposée difficulté de la langue. Defays et al. (2014 : 28) la mentionnent à la première place parmi les raisons possibles du rejet de textes littéraires : « la difficulté de la langue dans les Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 168 12. 12. 2022 09:29:10 169Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère textes littéraires par rapport au niveau de la classe, à sa composition sociologique, au type d’enseignement qu’elle implique, aux motivations des apprenants qui la composent et, selon leur profil, à l’intérêt qu’ils manifestent à approcher la litté- rature ». Pourtant, comme le dit Gruca (2009 : 175) : « Le texte littéraire paraît souvent difficile, mais la difficulté peut être un atout si l’on éveille la curiosité et la motivation. » Nous ajoutons encore qu’il est possible de trouver des textes au- thentiques vraiment simples à comprendre. Prenons, à titre d’exemple, le poème de Jacques Roubaud, Quand je pense, que les apprenants de FLE pourraient com- prendre après quelques heures d’apprentissage. L’autre raison possible pourrait être les droits d’auteur (mentionné aussi par Calafato et Gudim 2020 : 14) qui sont aujourd’hui beaucoup plus respectés qu’ils ne l’étaient au moment de la parution du Nouveau sans frontières. Cette analyse a des limites et est à compléter par l’analyse de tous les niveaux d’un certain manuel. Nous nous sommes limités au premier livre de chaque mé- thode, en accord avec les nouveaux descripteurs du Volume complémentaire du CECR (2018) qui introduisent la littérature au niveau A1. ANALYSE DE LA SITUATION DANS LES LYCÉES : ENTRETIENS AVEC LES ENSEIGNANTES DE FRANÇAIS Dans la partie précédente, nous avons vu que, dans les manuels récents, les textes littéraires n’apparaissent presque pas. Pour vérifier ce qui se passe dans les classes, nous avons opté pour une méthode qualitative : les entretiens semi-dirigés avec les enseignantes de français. Les entretiens ont été effectués au mois de mai 2022, via la plateforme Zoom, enregistrés avec la permission des participantes puis transcrits. 5 enseignantes travaillent dans des lycées à Ljubljana, une en dehors de la ville. La plus jeune enseigne depuis moins de 10 ans, toutes les autres depuis plus de 10 ans. Il s’agit donc d’enseignantes expérimentées. Pour garder leur anonymat, nous ne pouvons pas révéler plus d’informations. Nous allons citer leurs réponses en utilisant les chiffres de E16 à E6. Les questions posées étaient les suivantes – nous les avons complétées avec des sous-questions si cela s’est avéré nécessaire : • Utilisez-vous des textes littéraires dans vos classes ? Si oui, combien de fois les utilisez-vous, avec quels niveaux ? Quels sont vos objectifs ? • Quelle est la réaction des élèves ? 6 E pour enseignante. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 169 12. 12. 2022 09:29:10 170 Meta Lah • Motivez-vous vos élèves à lire en français ? Si oui, comment ? • Combien lisez-vous en français ? Comment choisissez-vous vos lectures ? Avec les deux premiers jeux de questions nous visons à découvrir à quel point la littérature est présente dans les classes slovènes, comment elle est traitée et accep- tée. Les deux dernières questions sont destinées à mesurer la motivation des élèves et des enseignantes. Selon Applegate et al. (2004 : 555), l’enseignant influence beaucoup les habitudes de ses élèves. La motivation pour la lecture est beaucoup plus grande et devient intrinsèque dans les classes où l’enseignant sert de modèle et lit. Les enseignants qui lisent vont plus probablement proposer des activités motivantes, par exemple, les cercles de lecture et les discussions qui suscitent un engagement des élèves. Parmi les six enseignantes, trois utilisent les textes littéraires à tous les niveaux. Toutes les trois aimeraient les utiliser plus souvent. Une des enseignantes inter- rogées (E4) utilise les textes authentiques avec les élèves de terminale mais pas toujours : « Si je vois que c’est trop difficile pour eux, que la motivation va baisser, je renonce ». E5 dit qu’elle essaie de les utiliser mais ses élèves sont trop faibles pour les apprécier et elle a trop peu de temps qu’elle consacre plutôt à l’enseigne- ment des bases. Certaines enseignantes trouvent les textes littéraires peu utiles. E4 n’a pra- tiquement pas recours à la littérature ; elle est d’avis que dans la vie, les élèves auront plus besoin de savoirs pratiques, par exemple, acheter un billet de train, et qu’après avoir fini leurs études secondaires, ils ne vont pas lire de textes littéraires en français. Deux des enseignantes (E1 et E3) mentionnent le concours de lecture7 qui, dans leurs lycées respectifs, est obligatoire pour la 2ème et la 3ème année. Les textes proposés ne sont pas authentiques, cependant les deux enseignantes les trouvent utiles ; en lisant, les élèves s’habituent à la lecture de textes plus longs. Parmi les auteurs, elles mentionnent Prévert, Camus, Sant-Exupéry (Le petit prince). Elles utilisent aussi les livres destinés aux enfants, p. ex. les livres de Ber- nard Friot8 et Le petit Nicolas. Certaines travaillent avec les professeurs de langue maternelle et préparent des cours interdisciplinaires ; E1 mentionne les poèmes de Prévert et un extrait de Proust, E6 Chanson d’automne de Verlaine. Les objectifs posés sont souvent linguistiques : la grammaire (E1, E5 : Dé- jeuner du matin de Prévert pour découvrir le passé composé), le lexique (E5 : Le petit prince). Les textes littéraires sont aussi utilisés comme déclencheurs pour 7 Bralna značka, le concours de lecture est préparé par une maison d’édition. 8 Bernard Friot est venu en Slovénie il y a quelques années et a visité plusieurs lycées ; c’est sans doute pour cela que les enseignantes le connaissent. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 170 12. 12. 2022 09:29:10 171Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère l’expression orale - E5 ajoute que parfois, après la lecture, ils discutent en langue maternelle et qu’elle trouve cela tout à fait approprié - et l’écriture créative. E2 propose parfois à ses élèves d’apprendre certains poèmes par coeur. E3 et E6 utilisent les textes littéraires pour augmenter, chez les élèves, la confiance en eux et pour motiver : « Cette année, j’ai voulu prouver aux filles de la terminale qu’elles étaient capables de lire en français. J’ai retapé les deux premières pages de L’Étranger. Je l’ai apporté, nous l’avons lu et à la fin, je leur ai dit : Vous venez de lire un texte, écrit pour de vrais Français. Elles m’ont regardée, surprises : Est-ce si simple ? » Pareillement, E6 a préparé les extraits de quatre auteur·es contem- porain·es : David Foenkinos, Sylvain Tesson, David Diop et Fatima Daas. Elle a apporté ces textes en classe sans consigne précise ; son objectif était de montrer aux élèves qu’ils sont capables de lire un texte authentique. Les enseignantes travaillent séparément avec les élèves de terminale qui se pré- parent au baccalauréat au niveau supérieur ; il y a un roman et plusieurs poèmes à lire. Les réactions des élèves sont généralement positives (E1, E2, E3), parfois mixtes (E5, E6). Selon E4, apporter un texte littéraire ne provoquerait qu’un stress supplémentaire. E6 ajoute que parfois il faut trouver d’autres moyens pour les mo- tiver à la lecture : trouver une vidéo, regarder un extrait de film, adapté d’un roman. Quatre des enseignantes interviewées motivent leurs élèves à lire en français, E1, E3 et E6 mentionnent le concours de lecture. E3 ajoute : « Les élèves lisent très peu, même en langue maternelle. Parfois je leur dis que moi non plus, je n’aimais pas lire au lycée parce que toute la lecture était obligatoire. J’ai com- mencé à apprécier la lecture à la faculté. » E2 partage son avis : « Mes élèves ne sont pas de grands lecteurs. À la fin de l’année, je leur prépare une liste de livres, bandes dessinnées et films que sinon, ils ne connaîtraient pas. Certains lisent, d’autres pas. » En ce qui concerne leurs habitudes de lecture en français, E1 et E6 disent qu’elles lisent chaque jour, au moins un peu. E2 avoue lire peu en français, par manque de temps ; elle préfère écouter des podcasts auxquels elle est abonnée. E3 dit qu’à cause de la fatigue et plus de travail après le confinement, elle a lu très peu cette année. Elle ajoute cependant : « Je dis très souvent aux élèves que la lecture est le meilleur moyen pour apprendre une langue. C’est l’avantage, à part le plaisir, bien sûr. » E5 lit uniquement en français, pour garder le contact avec la langue. Elle va à la bibliothèque et elle choisit les livres en consultant la quatrième de couverture. E6 lit constamment, elle a toujours des livres, em- pruntés de la médiathèque de l’Institut français. Elle dit : « Je ne choisis pas, je me laisse conseiller. De cette manière je lis aussi des livres que je ne choisirais jamais moi-même. » Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 171 12. 12. 2022 09:29:10 172 Meta Lah CONCLUSION L’analyse des manuels et les entretiens avec les enseignantes de français nous montrent que le texte littéraire est relativement peu présent dans les classes slo- vènes. Les textes sont pratiquement absents dans les manuels, où nous trouvons cependant de nombreux textes fabriqués sur la littérature et surtout sur la littéra- ture francophone. Cela peut sans doute intéresser les apprenants et leur ouvrir de nouveaux horizons. Ce qui est dommage, c’est que les textes manquent. Nous ne pouvons qu’être d’accord avec Gruca (2009: 168) : « La place et les fonctions du littéraire en classe de langue mériteraient un peu plus de cohérence et de cohésion pour s’insérer, comme il se doit, dans la dynamique de l’apprentissage : instaurer quelque peu un équilibre entre écrits fonctionnels et écrits fictionnels permettrait, par ailleurs, de prendre en charge un certain nombre d’éléments constitutifs de la langue-culture étrangère, qui participent pleinement à l’acquisition d’une compé- tence de communication, objectif majeur de tout enseignement/apprentissage de langues. » Toutes les enseignantes incluses dans notre recherche, sauf une, utilisent des textes littéraires ; elles disent cependant qu’elles en utilisent trop peu. À part les programmes trop chargés par d’autres contenus et le manque de temps, elles trouvent les textes littéraires souvent trop difficiles et parfois peu utiles. Deux des interviewées mentionnent pourtant que pour les apprenants, c’est motivant de lire en langue cible et que cela augmente leur motivation pour l’apprentissage de la langue étrangère. Ce point de vue est confirmé par Daskalovska et Dimovska (2012 : 1186) qui citent Ur : « Les textes donnent également la satisfaction de savoir qu’on lit de la littératre dans sa forme originale. » Enfin, nous aimerions attirer l’attention sur la question des textes écrits à des fins pédagogiques ou adaptés. Pendant les entretiens, il s’est avéré à plusieurs re- prises que les enseignantes ne font pas une distinction entre les textes littéraires et les textes adaptés ou pédagogiques. Il est vrai qu’en lisant des livres pour le concours de lecture9, les apprenants s’entraînent à la lecture de textes plus longs, mais ne se- rait-il pas possible de trouver des textes authentiques ? Calafato et Paran (2019 : 2) reprennent Walther (2007) et Scott et Hamilton (2007) qui suggèrent que « les apprenants devraient être exposés à la littérature dès le début afin qu’ils puissent comprendre le fonctionnement de la langue cible, ainsi que développer leurs ca- pacités de réflexion critique et leur capacité à interpréter le contenu textuel ». Cuq et Gruca s’insurgent : « Paradoxalement, tout se passe donc comme si la fréquentation des textes des grands auteurs ne pouvait se mériter qu’après une longue fréquentation de textes fabriqués à des fins linguistiques et pédagogiques. 9 On y trouve des textes, écrits spécialement pour les apprenants étrangers et des textes adaptés. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 172 12. 12. 2022 09:29:11 173Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère Cependant, pour faire face à certaines critiques, notamment celles concernant la place de l’écrit et l’absence d’enseignement culturel, et pour respecter le principe sacro-saint de la progression, de nombreuses oeuvres littéraires ont été réécrites ... selon les données du Français fondamental 1 et 2 ! Qu’il s’agisse d’une utilisation commerciale abusive de bases scientifiques ou non, il n’en demeure pas moins que ces adaptations, mises en place pour permettre un accès à la culture sous la mé- thodologie audiovisuelle, ont connu un rayonnement notoire en France comme à l’étranger, alors qu’elles reposent sur une pratique bien discutable : de nombreux étu- diants ont cru lire les classiques du patrimoine français (Stendhal, Balzac, Flaubert, etc.) en 800 ou 1200 ou 1500 mots avec toutes les conséquences linguistiques que cela implique. » (Cuq et Gruca 2002 : 375). Rot Gabrovec (2001 : 122) conclut : « Du point de vue du contact culturel, il est peut-être même préférable de proposer la traduction d’un texte qu’un texte adapté appauvri. » BIBLIOGRAPHIE Applegate, Anthony J. / Applegate, Mary DeKonty / Mercantini, Martha A. / McGeehan, Catherine / Cobb, M.Jeanne B. / DeBoy, Joanne R. / Modla, Virginia B. / Lewinski, Kimberly E. : The Peter Effect Revisited: Reading Habits and Attitudes of College Students, Literacy Research and Instruction, 2014, http://dx.doi.org/10.1080/19388071.2014.898719, consulté le 10 mai 2022. Cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner, évaluer, Strasbourg, Conseil de l’Europe – Paris, Didier, 2001. Cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner, évaluer, Volume complémentaire avec de nouveaux descripteurs, Strasbourg, Conseil de l’Europe, 2018. Calafato, Raees / Gudim, Freda : Literature in contemporary foreign lan- guage school textbooks in Russia : Content, approaches, and readabi- lity, Language Teaching Research, 2020, https://journals.sagepub.com/doi/ full/10.1177/1362168820917909, consulté le 5 mai 2022. Calafato, Raees / Paran, Amos : Age as a factor in Russian EFL teacher attitudes towards literature in language education, Teaching and Teacher Education, no 79, 2019, p. 28-37. Cuq, Jean-Pierre / Gruca, Isabelle : Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, PUG, 2002. Daskalovska, Nina / Dimova, Violeta : Why should literature be used in the language classroom?, Procedia – Social and Behavioral Sciences, no 46, 2012, p. 1182-1186. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 173 12. 12. 2022 09:29:11 174 Meta Lah Defays, Jean-Marc / Delbart, Anne-Rosine / Hammami, Samia / Saenen, Frédé- ric : La littérature en FLE. État des lieux et nouvelles perspectives. Paris, Hachette, 2014. Godard, Annie (dir.) : La littérature dans l ’enseignement du FLE. Paris, Didier, 2015. Gruca, Isabelle : Les enjeux de la littérature en didactique des langues-cultures : entre identité et altérité, dans Tabaki-Iona, Fridériki / Proscolli, Argyro / Fora- kis, Kyriakos (dir.) : La place de la littérature dans l’enseignement du FLE, Actes du colloque international. Athènes, Université nationale et capodistrienne d’Athènes, 2009, p. 165-185. Morel, Anne-Sophie : Littérature et FLE : état des lieux, nouveaux enjeux et pers- pectives, dans Actes du IIème Forum Mondial HERACLES, 2012, p. 141-148. Proscolli, Argyro : La littérature dans les manuels de FLE, dans Tabaki-Iona, Fridériki / Proscolli, Argyro / Forakis, Kyriakos (dir.) : La place de la littérature dans l ’enseignement du FLE, Actes du colloque international. Athènes, Université nationale et capodistrienne d’Athènes, 2009, p. 129-164. Riquois, Estelle : Le texte littéraire dans les manuels de FLE : un outil culturel de médiation. Symposium international Ecole(s) et culture(s) : quels savoirs, quelles pratiques ?, 2009, https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03143003/docu- ment, consulté le 10 mai 2022. Rot Gabrovec, Veronika : Brati Mc-književnost ali ne – to je zdaj vprašanje: poe- nostavljena besedila in medkulturno naravnan pouk tujega jezika, dans Ivšek, Milena (dir.) Različne vrste branja terjajo razvijanje različnih bralnih strategij : zbornik Bralnega društva Slovenije. Ljubljana, Zavod Republike Slovenije za šolstvo, 2001, p. 116-123. Sarkar, Bratish : L’importance de la littérature dans la classe de langue. Internatio- nal Education & Research Journal, no 4/11, 2018, p. 38-39. Skela, Janez : The Quest for Literature in EFL Texbooks – A Quest for Camelot ?, ELOPE, no 11 – spring, p. 113-136. MANUELS Cocton, Marie-Noëlle / Heu, Élodie / Houssa, Catherine / Kasazian, Émilie / Dupleix, Dorothée / Ripaud, Delphine : Saison 1, Paris, Didier, 2014. Alcaraz, Marion / Escoufier, Dorothée / Gomy, Camille / Landier, Mathilde / Quéméner, Francine / Ripaud, Delphine : Saison 1 – Cahier d’activites, Paris, Didier, 2014. Dominique, Philippe / Girardet, Jacky / Verdelhan, Michel / Verdelhan, Michèle : Le nouveau sans frontières, Paris CLE International, 2002. Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 174 12. 12. 2022 09:29:11 175Le texte littéraire dans l'enseignement d'une langue étrangère Dominique, Philippe / Girardet, Jacky / Verdelhan, Michel / Verdelhan, Michèle : Le nouveau sans frontières, Cahier d’exercices, Paris CLE International, 2002. Hirschprung, Nathalie / Tricot, Tony : Cosmopolite 1, Paris, Hachette, 2017. Hirschprung, Nathalie / Mater, Anaïs / Mathieu-Benoit, Émilie / Mous, Nelly / Tricot, Tony : Cosmopolite 1 – cahier d’activités, Paris, Hachette, 2017. Pruvost, Neige / Courteaud, Frédérique / Gómez-Jordana, Sonia / Blondel, Fran- çois / Chahi, Fatiha / Caballero, Ginebra / Poisson-Quinton, Sylvie / Daupras, Cindy / Delannoy, Gaëlle / Brandel, Katia : Entre nous 1, Paris, Éditions Mai- son des Langues, 2015. Meta Lah meta.lah@ff.uni-lj.si Université de Ljubljana Književno besedilo pri pouku tujega jezika – ogrožena vrsta? V članku najprej orišem mesto književnih besedil v zgodovini poučevanja jezikov, nadal- jujem s predstavitvijo argumentov, ki govorijo v prid uporabi teh besedil pri pouku tujega jezika. Empirični del je sestavljen iz dveh delov: v prvem analiziram književna besedila v štirih učbenikih francoščine, v drugem delu pa predstavljam rezultate polstrukturiranih intervjujev s šestimi profesoricami francoščine na slovenskih srednjih šolah. Odgovar- jale so na vprašanja o rabi književnosti pri pouku jezika. V zadnjem delu se posvetim še vprašanju pri pouku pogosto uporabljenih prirejenih besedil. Ključne besede: poučevanje jezika, književno besedilo, učbeniki za francoščino kot tuji jezik, mnenja učiteljev Acta_Neophilologica_2022_FINAL.indd 175 12. 12. 2022 09:29:11