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Nous séparons ici et nous distinguons toutes ces variantes par la lettre initiale Vy et les commentaires par la lettre Ç; nonobstant les transpositions , divisions et subdivisions que nous nous sommes permises dans tout le corps de l'ouvrage , pour lui donner plus d'ordre , de clarté et de précision, on doit cependant lire le texte , les commentaires, les variantes comme si on lisoit le code universel des Mahométans dans l'original Arabe, puisque nous en donnons une traduction parfaitement exacte. Nous ne pouvons cependant nous dissimuler que dans les pratiques du culte extérieur, mais sur-tout dans les purifications, la prière Namaz et le pèlerinage de la Mecque } il n'y ait beaucoup d'observances qui paraîtront peut-être minutieuses et puériles. Quelques-unes appartiennent à l'ancienne religion des Arabes. Le fondateur de l'Islamisme crut devoir les conserver malgré toutes celles qu'il établissoit encore. En politique habile, il sentit la nécessité de captiver les hommes par les sens, et de frapper la multitude ignorante par ce religieux appareil. Dans le dessein où nous sommes de faire connoître sous tous ses rapports la nation Othomane, et par elle tous les peuples qui depuis douze siècles sont soumis aux lois du Cour'ann dans la plus grande partie du globe , nous n'en avons omis aucune. Si, par leur multitude, leurs retours perpétuels, leur diversité, leur bizarrerie même, ces pratiques ont été capables d'en imposer aux esprits vulgaires, et d'ajouter en quelque sorte à la grandeur et à la majesté du culte , elles seront sans doute pour le philosophe attentif la matière et la source d'une foule d'observations, qui lui dévoileront tout-à-la-fois et le génie du Législateur Arabe , et le caractère des peuples qui A iij suivent sa doctrine, et l'esprit général de ces lois religieuses qui influent si puissamment sur leur état moral, civil et politique. Ces lois claires et précises dans tous les objets sur lesquels elles prononcent, parlent des purifications sur-tout, dans les termes les moins équivoques, les plus libres et les plus naturels. Jamais les Imams rédacteurs n'ont recours à ces expressions réservées , vagues et indécises que le goût et la délicatesse ont introduites chez les nations Européennes : sans nous écarter du but, de l'intention et des principes de ces lois, nous avons tâché, autant qu'il nous a été possible, de concilier les bienséances avec la clarté et l'intelligence des choses. LIVRE PREMIER. Des Purifications, Tahharéth. O n divise ce livre en cinq Chapitres ; le premier traite des purifications en général ; le second, des eaux pures ou impures, et par-là même propres ou non propres aux purifications; le troisième , de l'état d'impureté légale ,des femmes dans leurs infirmités périodiques ainsi que clans leurs couches ; le quatrième, de l'impureté continuelle de l'homme et delà femme, par l'effet de différentes incommodités naturelles; et le cinquième, des purifications pulvérales. CHAPITRE PREMIER. Des Purifications en général. Les purifications sont instituées pour nettojer le corps , en faire disparoître les souillures , Nedjess, et mettre ainsi l'homme en état de faire dignement ses prières, en se présentant devant son A iv g CODE RELIGIEUX. Créateur avec toute la pureté qu'il exige. Elles consistent, i°. en lavage, 2°. en ablution, et 3°. en lotion, toutes relatives aux différentes espèces de souillures, dont les unes sont substantielles, Nedjeassétk-hakikiyé, et les autres non substantielles , Nedjeassctli-hukmiyé. Les premières se partagent en graves , Nedjeasséth-moughalla^a, et en lég ères, Nedjeasséth-moukhaffejé. Les secondes se divisent en mineures, Hadess-assgfcn et en majeures , Hadess-ekber. Article Premier. Du Lavage, GhassI. Le lavage est requis pour les souillures substantielles, soit graves, soit légères. Les unes sont les sécrétions naturelles de l'homme, de la femme et de l'enfant même à la mamelle ; celles des animaux mangeables : le vin , le sperme , le sang, enfin tout ce qui sort du / corps humain , excepté les larmes, la sueur, la salive et les mucosités du nez. Ces souillures font déchoir le fidèle de sa pureté légale, et invalident la prière, si leur volume est de plus d'une dragme, ou sur son corps , ou sur son habit, ou sur son oratoire , c'est-à-dire , au lieu même 011 il pose les pieds et la tête dans les prosternations du Namax, Les autres sont les déjections de tout animal non mangeable : elles rendent également la prière invalide , si elles embrassent au-delà de la quatrième partie, ou du corps , ou de l'habit, ou de l'oratoire du fidèle. C. Il est donc de la prudence et d'une précaution louable de porter des habits plutôt courts que longs, pour ne pas les exposer aux souillures. Généralement toute chose souillée io CODE RELIGIEUX, doit être lavée et purifiée avec de l'eau simple et naturelle, ou du vinaigre, ou de l'eau rose, ou de la terre. V. L'Imam Mohammed n'admet que l'eau pure et simple. Tout objet lisse et poli, comme un sabre, un couteau, un miroir, etc. perd sa souillure par un simple frottement fait avec la main ou avec un linge. C. Cette loi est fondée sur l'exemple des disciples du Prophète qui, à la suite de leurs actions militaires contre les infidèles, enle-voicnt les sabres des ennemis tués dans le combat , les frottoient de leurs mains, s'en cei-gnoient, et faisoient la prièreNamaz. La terre recouvre aussi sa pureté par le dessèchement et la disparition totale de l'objet qui l'auroit souillée. C. Elle seroit pure , sans doute, pour le fidèle qui s'y placerait, et y ferait sa prière; mais elle ne seroit pas purifiante, ne pouvant pas servir elle-même aux ablutions pulvérales. Un lieu pavé de marbre ou de briques , un toit couvert de roseaux, les herbes, les plantes et les arbres recouvrent aussi leur pureté primitive par le dessèchement de l'objet qui les auroit souillés. Mais si l'herbe, la plante ou l'arbre sont coupés , ce n'est alors qu'en les lavant qu'on peut les rendre purs. Tout ce qui est souillé d'une manière visible, doit être lavé jusqu'à l'entière disparition de la matière immonde : cela suffit pour rappeler sa pureté , quand même la tache en seroit ineffaçable. Si au contraire la souillure n'est pas visible, il faut laver à plusieurs reprises, jamais moins de trois, ni plus de sept, en pressant fortement l'objet à chaque fois, sur-tout à la dernière ; et s'il n'étoit pas susceptible de compression , tel que la natte , la brique, 12 CODE RELIGIEUX, le cuir, la viande , les grains, etc., il faudroit attendre à chaque lavage le dessèchement entier de l'objet. V. L'Imam Mohammed exige dans tous les cas la compression de l'objet souillé. Mais si ce sont des étoffes, des ha ■ bits , du linge, etc., il faut les laisser dans l'eau pendant un jour et une nuit. Si une chose immonde est brûlée et réduite en cendres, ou que jetée dans une saline , elle se convertisse en sel, elle perd alors son impureté légale. Le sang du poisson et de tout animal aquatique , les excrémens de tout volatile ( excepté les poules et les oies, qui se nourrissent d'immondices) , l'écume des mulets et des ânes, le lait de la femme et même celui de la bête mortes , ne sont pas des objets impurs. y. Les Imaméïnns donnent pour immonde le lait de l'une et de l'autre. Si un linge sec et net est étendu sur un linge humide et souillé , il devient également impur, si en le pressant il donne quelques gouttes d'eau', mais pas autrement. La loi est la même si le linge sec et net qui seroit étendu sur un mur humide et souillé, donne aussi quelques gouttes d'eau en le pressant; mais si le linge est mouillé et le mur sec, alors le linge ne sauroit participer à la souillure du mur, vu l'action de sonhumidite. Si milinge, un habit, etc. souillé dans un bout, est, par méprise ou par négligence, lavé dans, un autre, l'action et l'intention suffisent pour opérer le retour de la pureté légale. Eniin cette pureté requise dans le corps, dans l'habit et dans l'oratoire du fidèle, exige aussi qu'il se lave toutes les fois qu'il a satisfait ses besoins. C. Cette loi est d'une obligation imitative, étant fondée sur l'exemple même et la conduite du Prophète. >, V. Selon l'Imam Sclufty , elle est d'obiigal ion divine. Article 2. De l'Ablution, Abdestli. L'ablution est requise pour les souillures non substantielles mineures. Cette pratique est de précepte divin, d'après cet Ayeth ou oracle céleste : O vous croyans ! (1) lorsque vous vous dispose^ à la prière, lave^-vous le visage et les mains jusqu'aux coudes ; baignez-vous la tête et les pieds jusquà la cheville. Elle consiste donc, i°. à se laver tout le visage, depuis le haut du front jusqu'au gosier et derrière les oreilles ; 2° a. tremper dans l'eau les trois doisrts de la main ou (1) Ya eyyuhh el-lczinê arnenou ira coumtoum iVes salath fe aghselou woudjeouhliiKum we eyedïKum Wel-merajik we emssakhou bi roussck'um we erdjelk' utn Wel-kcabcyvn, la main toute entière, et à les porter sur la tête pour en baigner au moins la quatrième partie ; 3°. à porter la main à la barbe, pour la baigner aussi, si ce n'est en entier,' du moins la quatrième partie; 40. à se laver les mains et les bras jusqu'aux coudes ; et 5°. à se laver les pieds jusqu'à la cheville. V. Les Imams Malik et Hannbel exigent qu'on baigne la tête en entier; et l'Imam Schafiy est d'avis qu'il suffit de mouiller quelques cheveux seulement. Cette lustration doit aussi être accompagnée de différentes pratiques imitatives , qui ajant été observées par le Prophète, sont en conséquence pour le Musulman qui s'en acquitte avec fidélité , autant d'actes louables et méritoires. Elles consistent, i°. à renouveler trois fois de suite cette même ablution , sur-tout celle des mains et des bras , 2°. à se rincer la bouche trois 16 CODE RELIGIEUX, fois, Ma^ma^a; 3°. à se frotter les dents avec un Missvak. C. Espèce d'olivier amer, qui a la vertu, non-seuleinent de les nettoyer et de les fortifier, mais encore de dissiper la mauvaise odeur de la bouche. 4°. A se laver les narines en respirant trois fois de l'eau dans le creux de la main , Isstînschak ; 5°. à appliquer les doigts en forme de peigne sur la barbe, Takhlil-Lihliyé ; 6°. à entrelacer l'un dans l'autre les deux pieds et les deux mains, Takhil-Essaby ; y°. à observer toujours dans cette ablution Tordre suivant, les mains, le visage , les bras, la tête et les pieds ; 8°. à passer la main baignée sur toute la tête, sur les deux oreilles et sur la nuque du cou. V. L'Imam Schafiy exige une nouvelle eau pour baigner les oreilles après avoir baigné la tête. 9°. A faire de suite toutes ces pratiques CODE RELIGIEUX. 17 ques sans jamais attendre que la partie lavée se sèche pour baigner l'autre; io°. à ne pas les interrompre pour s'occuper d'objets étrangers et mondains; à commencer l'ablution toujours du côté droit. C. Ce que l'on doit également observer dans toutes les pratiques, soit religieuses, soit civiles : en conséquence il est louable de ne se servir que de la main droite dans toutes les œuvres manuelles, et de n'entrer jamais dans la mosquée que du pied droit. 12°. A se laver soi-même, et jamais par la main d'autrui, hors les cas d'indisposition; i3°. à être assis, et toujours en face de la Mecque,- et 140. à accompagner toutes ces pratiques de l'intention, et des prières suivantes, en commençant par le Bessmelé. C. C'est une invocation à l'Éternel, conçue en ces termes : Au nom de Dieu clément et Tome II. B 18 CODE RELIGIEUX. miséricordieux: grâces àDieu qui nous a favorisés de la religion Musulmane ( i ) ! C'est par-là que le fidèle doit commencer toutes ses actions : il doit réciter ceBessmele dans toutes les circonstances de sa vie , lorsqu'il est question, par exemple, de prier, démanger, de boire, de monter à cheval, de se coucher, et même de cohabiter avec sa femme, etc. En se lavant les mains le fidèle dira : O mon Dieu ! mets - moi du nombre des pênitens, des purifiés, et de tes serviteurs justes et vertueux. En se lavant la bouche et les narines : O mon Dieu ! parfume-moi avec le parfum 3 avec la bonne odeur du paradis y enrichis-moi de. ses richesses 9 et comble-moi de ses délices. En se lavant le visage : O mon Dieu ! blanchis mon visage de ta splendeur au jour ou les visages seront blanchis ; et ne le noircis pas au jour où ils seront noircis (jour du jugement). En se lavant le bras droit : O mon Dieu! ( i ) B'issmlUaliir-rahhmaKn-ir-rahhïm , v"uhamdy ul-ilLh ala dinn Isslam. donne mon ( 1 ) livre à ma main droite , et procède à l'examen de mon compte avec indulgence et faveur. En se lavant le bras gauche : O mon Dieu l ne me donne pas mon livre à ma main gauche, ni par derrière mes épaules, et ne procède pas à l'examen démon compte avec difficulté et rigueur. En se baignant la tête : O mon Dieu l couvre-moi de ta miséricorde. En se baignant les oreilles : O mon Dieu! mets-moi au nombre de ceux qui écoutent ta parole , la suivent et l'observent fidèlement. En se baignant le cou : O mon Dieu ! affranchis mon cou du feu, des fers et des chaînes. En se baignant les pieds : O mon Dieu ! affermis mon pied sur le pont Sirath [2) en ce jour où les pieds chancelleront et tremble- (1) C'est le livre où les anges gardiens écrivent les bonnes et les mauvaises actions des hommes. Voyez le onzième article de foi. (2) Ce pont est dressé au dessus de l'enfer. Vo)er le quatorzième article de foi, Bij 20 CODE RELIGIEUX. ront dans ce passage terrible. On doit finir par cette prière: J'exalte ton nom, 6 mon Dieu! je te sanctifie y je te loue; je confesse qu'il ny a point de Dieu sinon toi y c'est à toi que je demande pardon et miséricorde y je confesse quil ny a point de Dieu sinon Dieuy et que Mohammed est son serviteur et son Prophète. Au lieu de se laveries pieds nus , le fidèle a la liberté de se baigner simplement la chaussure ; mais cet acte, Messhh, ne doit avoir lieu que pour un jour à l'égard de l'homme en demeure fixe, et trois pour l'homme en vojage. C. C'est-à-dire, que le premier ne doit pas, user de cette concession de la loi, dans les cinq ablutions du jour. II faut qu'il se lave les pieds au moins une fois dans les vingt-quatre heures ; à quoi le voyageur est également tenu une fois dans les trois jours. Le Messhk consiste à porter ensemble les trois doigts du milieu de l'une et CODE RELIGIEUX. 21 de l'autre main , ou vertes et baignées, sur les deux pieds , depuis l'extrémité jusqu'à la cheville. C. Toute chaussure qui couvre et enveloppe le pied, permet ce bain extérieur, vu l'incommodité de se déchausser cinq fois par jour. On peut en user aussi pour les parties du corps qui seroient couvertes ou enveloppées pour cause d'indisposition , comme saignée , blessure , fluxion , etc. ; il suffit alors de porter la main trempée dans l'eau sur l'extérieur de la ligature, de quelque genre qu'elle soit, pour faire participer la partie affligée ou malade à l'acte d'ablution. C. Il est louable d'user d'économie dans la disposition de l'eau destinée à ces ablutions, même d'en boire , soit assis, soit debout , ce qui pourroit en rester. Il n'y a proprement que cette eau et celle du puits sacré de Zemzem à la Mecque , que le fidèle doit boire dans cette dernière attitude. B iij Les souillures qui exigent l'ablution, sont, i°. les évacuations ordinaires du corps ; 2°. les évacuations accidentelles , telles que les vers , les sables, les pierres , etc., effets d'indispositions naturelles ; 3°. les vents; 40. le sang, et tout ce qui sortiroit d'une plaie dans les parties consacrées à cette ablution, telles que le visage, les mains, les bras, les pieds; ou qui, sortant de toute autre partie du corps , découleroient sur elles ; 5°. tout vomissement de nourriture, de sang, d'eau ou de bile; 6°.la démence ; 70. l'ivresse ; 8°. la foiblesse ou l'absence d'esprit accidentelle ; 90. l'éclat de rire dans une personne majeure , au milieu de la prière jVa-ma?, ce qui oblige à renouveler non-seulement l'ablution , mais encore la prière. Ç. Cette loi a été établie par le Prophète, CODE RELIGIEUX. 23 qui priant un jour à la tête de ses disciples, et voyant quelques-uns d'eux faire un grand éclat de rire à l'occasion d'un aveugle qui alloit se précipiter dans un fossé, les réprimanda vivement à la fin de la prière, et leur ordonna de renouveler et leur ablution et leurNamaz. Le rire même avant ou pendant la prière, exige aussi le renouvellement de l'ablution. Le simple sourire n'exige rien. io°. Les embrassemens voluptueux. G. Même entre mari et femme. Un simple embrassement n'altère cependant pas la pureté légale. Cette opinion est appuyée sur l'exemple du Prophète, à qui il arriva souvent, d'après le témoignage â'Jlîsché.j l'une de ses femmes, de faire des caresses à plusieurs d'entre elles à la suite de ses ablutions, sans cependant les renouveler pour s'acquitter de la prière. Et 11°. le sommeil. C. C'est-à-dire, si l'on s'endort dans une attitude propre à laisser échapper des vents. B iv Dans tous ces différens cas, le fidèle est obligé de recourir aux ablutions pour rentrer en pureté, et faire dignement la prière Nama^. C. Différentes autres circonstances , et même plusieurs des pratiques religieuses exigent aussi ces ablutions qui, par cette raison, deviennent pour le ficlèle tantôt d'obligation divine, tantôt d'obligation canonique, et tantôt de convenance religieuse,c'est-à-dire, des actes purement louables. Elles sont d'obligation divine lorsqu'il s'agit des cinq prières du jour, et de la prière funèbre qui précède la sépulture d'un mort. Elles sont d'obligation canonique lorsqu'il est question du pèlerinage de XacMeçque, et des Tawaf-Zijarethautour du Keabé } le premier jour de la fête des sacrifices, Id-Ad'hha. Elles sont de convenance religieuse , lorsqu'on les emploie aussitôt après son réveil, à la suite d'un mensonge, d'un trait de médisance, d'un éclat de rire indécent dans la société , ou avant la lotion funéraire d'un mort. On doit encore ranger CODE RELIGIEUX- 25 dans cette dernière classe l'ablution que fait par pur sentiment de piété, un Musulman qui n'est pas déchu de son état de pureté. Ces ablutions surérogatoires, Vouzou aïelvou-zou , sont celles que des ames pieuses ne manquent pas de faire pour s'assurer davantage de leur entière purification, et s'acquitter plus dignement encore de la prièreiV<2/?z*z^ comme des autres pratiques religieuses. Article 3. De la Lotion > GhoussI. - La lotion qui regarde les souillures non substantielles majeures consiste à se laver d'abord la bouche et les narines , ensuite tout le corps , depuis la tête jusqu'aux pieds. Si l'on porte une bague, il faut la toucher et la remuer pour que cette partie du doigt soit aussi baignée. A cette lotion, qui est de précepte divin, on doit encore joindre différentes pratiques imitatives , comme autant d'actes louables et méritoires. Il faut 26 CODE RELIGIEUX, donc , i°. commencer par une ablution , 2°. se bien frotter le corps , à. mesure qu'on se lave, 3°. se bien laver dans toute la partie inférieure. C* Cette pratique est encore plus obligatoire pour le Musulman incirconcis; il en est de même des femmes, cpiœ ultcrius progredi non debcnt. 4°. Laver jusqu'au dedans de ses oreilles ; 5°. dénouer les cheveux et les tresses. C. Pour ceux qui en ont, comme les Aie? wjs y les Scheykhsj les Derwyschs, et quelques peuples de la Turcomanie. Les femmes n'y sont pas tenues ; il suffît qu'elles se baignent les cheveux dans la racine, en se versant de l'eau sur la tête ; c'est ainsi que le Prophète l'a statué lui-même, d'après la demande qui lui en a été faite par Ummy-Sélemé sa femme. Et 6°. renouveler ces pratiques j us-qu'à trois fois. CODE RELIGIEUX. 27 Les souillures qui soumettent le fidèle à cette lotion générale sont, 1°. Effusio seminis etïatninsomno 2°. Lacté de cohabitation , quand même il ne seroit pas suivi de ses effets naturels. C. L'homme et la femme sont également obligés à cette lotion entière , même dans les actes de conjonction légitime. 3°. Les infirmités périodiques du sexe ; et 40. les couches. Indépendamment de ces cas , d'autres circonstances exigent aussi la même pratique, et cela par obligation imi-tative : tels sont les vendredis, avant la prière publique de midi, les deux fêtes de Beyram avant l'oraison pas-chale consacrée à ces grands jours , et l'acte de pèlerinage , avant de prendre le manteau Ihhram, et de faire la station prescrite aux pieds du mont Ara-fath. C'est encore un acte louable pour 28 CODE RELIGIEUX, l'infidèle qui embrasse la foi Musulmane , de faire cette lotion générale l'instant d'après sa conversion. C. L'homme ou la femme atteints d'une souillure, soit mineure soit majeure, ne doivent pas toucher le Cour'ann , pas même avec la manche de leur habit, à moins qu'il n'y ait entre la main et le livre quelque chose d'absolument séparé et étranger à l'un et à l'autre. Ils ne doivent pas non plus toucher l'argent monnoyé sur lequel seroit gravé le chapitre Suré-j-Ahhlass (i)^ ou tout autre passage de ce saint livre. II ne leur est permis de toucher que la bourse ou le sac qui renfermeroit ces espèces : ils ne doivent pas même entrer dans la mosquée, à moins qu'ils n'y soient obligés par quelque cas pressant. Us ne doivent enfin réciter aucune prière du Cour ami} ni même aucun passage, soit de la Bible, soit de l'Evangile , parce que ces livres contiennent également la parole de Dieu. Cependant s'il s'agit d'enseigner à quelqu'un la doctrine du (i) C *èéi le cent-douzième Chapitre. CODE RELIGIEUX. 29 Conr'ann > on peut alors en réciter des versets, mais en articulant lettre par lettre ou syllabe par syllabe. CHAPITRE II. ' Des Eaux pures ou impures , et par-là même propres ou non propres aux Purifications. L'eau nette et limpide est réputée pure, et par conséquent propre aux purifications. Ainsi toute eau de pluie, de source , de fontaine, de puits , de ruisseau, de fleuve , de neige , de glace , jusqu'aux eaux même de la mer, peuvent être employées à cet usage , parce que toutes les eaux de la terre sont censées être les eaux du ciel; mais ces eaux, soit courantes, soit mortes , doivent toujours être claires, pures , et jamais corrompues ; elles doivent avoir les trois qualités qui forment leur substance , le goût , la couleur et l'odeur. Le défaut de l'une de ces qua- lités ne sauroit cependant les rendre impures ; mais s'il en manque deux â-la-fois , alors l'eau est réputée impure, et ne doit jamais servir à l'usage des purifications. Nulle boisson composée, comme le Seherbeih;x nulle eau de senteur, comme l'eau rose; nulle eau chargée d'aromates , de feuilles d'arbres, ou de fruits; le vinaigre, ni le bouillon , ne peuvent servir à ces purifications, soit pour les vivans, soit pour les morts. La plus légère immondice qui tombe dans une eau morte, la rend impure , à moins que cette immondice ne soit imperceptible , et que le bassin qui contiendront l'eau , n'eût dix pics de longueur sur dix de largeur, avec trois doigts d'eau, de sorte qu'en en prenant avec le creux de la main , il ne fût pas possible d'en voir le fond. L'eau même qui auroit déjà servi à une purification , quoique réputée pure encore , ne pourroit cependant pas être employée pour une autre ( 1 ). Il en seroit de même de l'eau d'un puits ou d'un bassin, dans lequel un homme impur entrer oit, même sans aucune intention de s'y purifier. L'eau dans laquelle se trouveroit une bête morte , est également réputée impure ; mais tout poisson, tout animal aquatique qui naît et qui vit dans l'eau, ne sauroit la rendre impure par sa mort. C. Tout poisson, tout animal qui vit dans l'eau , n'a point de sang; le fluide rougeâtre que l'on voit en eux s'évanouit toujours au soleil. Les insectes en qui le sang ne circule pas, comme sont les mouches, les cousins, les abeilles, les scorpions, etc., (i) V'd-mael-mussiamel tahhir ghayrï mutahhir. 32 CODE RELIGIEUX, ne rendent pas non plus l'eau Impure. La peau tannée d'un animal quelconque n'a en elie rien d'impur, excepté celle du porc, immonde de sa nature, Nediess *uUaihu, La peau humaine lavée et tannée, est réputée pure; mais elle ne doit jamais servir à des objets d'utilité, vu la noblesse et l'excellence de l'espèce humaine. La chair de toute bête égorgée, mangeable ou non mangeable, est réputée pure , quel qu'en soit le genre ou l'espèce. Le poil, les os, les cornes et les ongles de toute bête morte sont également des objets purs. V. L'Imam S:h.if.y les donne pour impurs. Les cheveux et les ossemens humains sont également réputés purs. C. Toutes les fois que le Prophète se faisoit raser, raser, ses disciples se partageoient entre eux les cheveux de sa tête. V. L'Imam Schafiy donne pour impurs les ossemens et les cheveux , soit de l'homme vivant , soit de l'homme mort : ils sont , selon lui, aussi impurs que le vin et le porc, qui n'ont aucun prix aux yeux de l'Islamisme. Mais l'urine de tout animal quelconque , même de ceux qui servent de nourriture à l'homme, est un objet impur, et l'homme ne doit dans aucun cas en faire usage, pas même pour remède. V. Dans les cas de besoin , l'Imam Ebu-Youssouph l'admet pour remède. Un puits souillé par le mélange ou par la chute d'un objet impur, exige d'être vidé, à moins que cet objet ne soit quelque petite partie d'excrémens de chameau , de cheval , d'âne, de bœuf, de pigeon ou de moineau. Ainsi l'eau est réputée souillée du moment Tome IL C 34 CODE RELIGIEUX, que l'objet impur y est jeté; et si l'on ignore ce moment t l'impureté de l'eau doit alors compter du jour précédent c'est-à-dire , de vingt-quatre heures' de sorte que les purifications faites avec cette eau, dans les vingt-quatre heures, et les prières qui les suivent doivent être renouvelées. Si l'objet jeté dans l'eau se trouve ou gonflé ou dissous , l'impureté de l'eau compte alors depuis trois jours, jamais au-delà. C. Cette loi est dans l'esprit de celle qui permet de faire sur le tombeau d'un mort la prière funèbre qu'on autoit omise avant sa sépulture : prière qui ne peut avoir lieu que durant les trois premiers jours de ses obsèques. Si c'est une bête morte qui a souillé l'eau d'un puits , il suffit alors d'en tirer une certaine quantité de seaux pour en purifier le reste. C. Cette mesure se règle selon le genre et l'espèce de la bêle morte Si c'est un rat , un moineau , un reptile , il ne faut que trente seaux; si cV.-t um | igeon, rue poule, un ci.at, il en faut soixante : mai* m c'est un chien, un mouton, etc., ou si la léte, quelle quen soit l'espèce, se trouve clans le | uiis de ja toute gonflée > ou bien si c'est un homme noyé, alors le puits censé entièrement impur, exige d'être entièrement vidé; et si l'opération est difficile, à cause des veines qui eutretiench oient continuellement l'eau du puits, il ne fauchoit dans ce cas en tirer que la quantité qm s'y trou voit au momei t de sa touilluif, ce qui ne doit jamais être au dessous de tiois cents seaux. Les restes d'une eau reçoivent toujours le caractère de pureté ou d'impureté de ceux qui eu ont bu. C. Elles se divisent en pures, Tahhir, en impures, Ned/ess_,en blâmables, Mehrouhh, et en douteuses, Mtsçhkeouk. i°. Les pures sont les restes de Peau bue par un homme ou par tout animal quelconque dont la chair est Ci) 36 CODE RELIGIEUX, mangeable, comme Test le mouton, le bœuf, le chameau , etc. Dans l'article des hommes, on comprend les femmes, les majeurs et les mineurs, les Musulmans et les non-Musulmans, l'homme pur et l'homme impur, ]a femme pure et la femme impure. En elïet il arriva souvent à Ahché> d'après son témoignage même, de boire pendant ses jours d'impureté , et de présenter ensuite le même vase au Prophète son époux, qui en bu voit les restes. Quant aux non-Musulmans, il est constant que le Prophète ayant permis à un corps de troupes de la tribu de Sahif de camper dans l'enceinte même d'une mosquée, ce trait seul prouve que l'Apôtre céleste n'envisageoit pas l'état d'impureté des infidèles comme résultant de leur personne, mais seulement de leur croyance. Cependant si l'homme boit de l'eau après avoir bu du vin, ou toute autre chose impure, les restes de son eau sont censés alors avoir perdu leur pureté. z°. Les impures sont les restes de l'eau bue par un chien, par un porc, par un loup, enfin par toute bête vorace dont la chair n'est pas mangeable. 3°. Les blâmables sont les restes de l'eau bue par les chats, les poules sauvages, les serpens, les rats, en un mot par tout reptile et tout oiseau de proie. Et 40. les douteuses sont les restes de l'eau bue par les ânes et par les mulets, quoique le lait et la sueur de ces animaux soient décidément réputés des objets purs. C'est qu'il arriva souvent au Prophète de monter, par esprit d'humilité, sur des ânes nus, sans selle, sans housse, et de l'aire des courses dans le Ilidjeaz au milieu même des plus grandes chaleurs de l'été, en recevant ainsi sur son corps et sur ses habits toute la sueur de ces animaux. Cette distinction admise à l'égard des restes de l'eau bue, doit s'observer encore pour le lait et la sueur de ces mêmes animaux. V. L'Imam Schafiy admet la pureté des restes de l'eau bue par tout animal quelconque , excepté seulement le porc. CHAPITRE III. De l'état d'impureté légale des femmes dans leurs infirmités périodiques ainsi que dans leurs couches. Toute femme est réputée impure, et pendant ses infirmités périodiques., et pendant les quarante jours de ses couches. Le temps de son impureté lunaire est déterminé par ces paroles du Prophète : Le terme le plus court pour {es menstrues des femmes est de trois jours , et le phi s long de dix jours (ij. V. L'Imam Ehu-Youssou: h leréduît à deux jours et demi, et l'imam Ç 'ha \y le restreint d'un côté à vingt-quatre heures, et J'etend de l'autre jusqu'à quinze jours : il appuie, son opinion sur la parole même du Prophète, qui un jour, après avoir déclamé contre les femmes par ces mots : » Certes (2), elles sont ( 1 ) AkaV ut-kaït^ selasseth eyamm ve ekscrhha aschruh eyyam. (2.) Ennehinni nak'issathïui-akl ved-dinn. imparfaites et du côté de l'esprit et du côté de la » religion, « répondit à l'un de ses disciples qui lui en témoignoit de la surprise : » C'est qu'elles restent » dans un coin de la maison , passant une partie de » leur vie sans jeûne et sans prière (i). « Mais ce passage n'est pas de la même précision que le premier, qui d'ailleurs est généralement adopté par les autres Imams. La femme, pendant ces dix jours , est réputée impure, sans égard à l'état de ses pertes : si elles ne durent pas trois jours, alors ce sang, ainsi que celui qui contînueroit après le dixième jour , n'étant plus qu'un sang ordinaire, ne sauroit emporter le caractère d'impureté comme le sang menstruel. L'état d'impureté de la femme dans ces dix jours lui interdit quelques-unes des pratiques religieuses , et lui en prescrit quelques autres : les choses £l) Ennehinnê yak'adené fi caar beytchha schafr œum-rehha la tesawemt ve la te s s allé. Civ 40 CODE RELIGIEUX, prohibées sont, i°. les cinq prières du jour , 2°. le jeûne canonique du Ra-maiann , 3°. la fréquentation des temples. C. Défense qui est fondée sur cette parole du Prophète : Je ne permets pas (i) l'entrée des Mesdjids à la femme impure > ni à aucune personne atteinte d'une souillure ma/eure. 4°. Les tournées, Tawaf\ autour du Keabé de la Mecque y 5°. la lecture du Courann y 6°. l'attouchement même de ce saint livre ; et y°. la cohabitation. C. Cette loi est fondée sur ces paroles divines adressées au Prophète : Si l'on vous interroge (2) sur les menstrues de la femme , répondez, que c'est une affliction physique j séparez - vous de la femme lorsqu'elle a ses menstrues. (1) Fecnriy la uhkaV d-messdjid li hayï^ ve la djunub. (2) JVe yesslounek an'el-muhiç coul huwé ezy f'ateze-lun-nissa fïl-muhiz. CODE RELIGIEUX. 41 Les choses prescrites sont de faire une lotion générale au moment de la cessation de l'infirmité. C. L'époque de ces aecidens périodiques désigne et règle aussi le terme après lequel on peut se livrer à différens actes civils et naturels , comme de convoler à de secondes noces, dans le cas de viduité ou de répudiation; de cohabiter avec son esclave, vu qu'il nest jamais permis à un patron d'user avec elle de son droit qu'elle n'ait éprouvé les infirmités de son sexe, depuis l'instant qu'elle a passé sous sa puissance. C'est elle qui détermine encore l'état de majorité dans les filles, et règle le temps que le mari doit, à l'exemple du Prophète , choisir de préférence, lorsqu'il est dans l'intention de s'en séparer. La femme, à qui la prière Nama^ est défendue dans ses jours d'impureté, n'est plus obligée d'j satisfaire : mais il n'en est pas de même du jeûne canonique ; elle est tenue d'y suppléer par 42 CODE RELIGIEUX, un nouveau jeûne clans un autre temps de l'année. C. Cette loi a été donnée à Eve par l'Eternel lui-même. Troublée et interdite à la première époque de ses accidens, cette mère des hommes consulta Adam sur ce qu'elle devoit faire au sujet de la prière dominicale. Dans son ignorance, Adam s'adressa au Créateur , qui, pat la bouche de l'ange Gabriel y accorda à Eve la dispense des prières Namazs pendant ses jours d'impureté. Eve éprouvant les mêmes révolutions dans les jours du Ramazann , eut encore recours à son époux , qui, dirigé par l'esprit de la première grâce , la dégagea de l'obligation du jeûne, sans consulter la volonté du ciel. Dieu irrité, prescrivit hEce cette pénitence dans un autre temps de l'année. Dans les cas de dérangement , la femme doit observer avec attention les effets de la nature en elle, pour déterminer les jours de sa pureté ou de son impureté légale , et s'acquitter CODE RELIGIEUX. 43 ainsi avec exactitude des devoirs religieux. Il n'est pas permis au mari d'approcher de sa femme ni de prendre aucune liberté avec elle dans ces jours - là. C. C'est le Prophète lui-même qui s'en est ainsi expliqué, pour résoudre les doutes et les scrupules d1Jbn-Onier. Cela est constaté d'ailleurs par l'aveu ÏÏA'isdiê} cpii déclaia que l'Apôtre céleste en avoit toujours usé de cette manière envers elle. Le mari peut sans scrupule cohabiter avec sa femme après le dixième jour dcses infirmités, quand même elle n'auroit pas encore fait ses purifications ; mais il pèche s'il cohabite avec elle avant l'expiration des dix jours, sans attendre que la femme, qui seroit déjà débarrassée de ses accidens , eût rempli le précepte de la loi. La femme en couches est également 44 CODE RELIGIEUX, soumise à ces dispositions ; mais alors le temps de son impureté n'est jamais moins de vingt-cinq jours, ni plus de quarante. C. Ces quarante jours partagés en dixaines, sont relatifs aux époques des quatre premiers mois de la grossesse, parce que le fœtus n'est censé respirer qu'après ce terme, et que dès-lors il attire à lui le sang périodique qui lui sert de nourriture jusqu'au moment de sa naissance. Cependant la femme qui seroit quitte de ses pertes avant les quarante jours, peut faire ses purifications et la prière Namaz. V. L'Imam Schafiy étend jusqu'à soixante jours les interdictions de la loi. Lorsque la femme accouche de deux enfans, c'est à la naissance du premier qu'elle devient impure ; mais s'il s'agit de convoler à de secondes noces , le terme prescrit, Iddeth , aux femmes veuves ou répudiées, ne compte jamais que depuis la naissance du second CODE RELIGIEUX. 45 enfant. Dans les fausses - couches la femme n'est soumise aux interdictions religieuses qu'autant que l'avorton a tous ses membres bien formés, mains, pieds , doigts , ongles , etc., parce qu'alors la fausse-couche rentre dans la classe des accouchemens ordinaires. C. D'après ce principe, si la femme est dans le cas d'une répudiation conditionnelle dont l'époque ait été fixée par le mari à ses couches , elle ne peut plus s'y soustraire. C H A PI T RE IV. De l'impureté continuelle de l'homme et de la femme par V effet de différentes incommodités naturelles. L'homme et la femme sont réputés dans un état permanent d'impureté, lorsqu'ils ont des incommodités naturelles : telles sont , entre autres, le relâchement du ventre, une indisposi- 46 CODE RELIGIEUX, tion dans les reins qui occasionneroit des mixtions fréquentes, les Hattuosités continuelles , les hémorrhagies , les pertes de sang dans les femmes, les suppurations des plaies , etc. Dans cet état, le fidèle incommodé, Sahhib œu^r> est tenu de renouveler son ablution dans chacune des cinq prières du jour, comme dans tous les autres actes relatifs au culte religieux. CHAPITRE V. Des Purifications pulçéraies , Tejemmum. Les purifications pulvérales ne peuvent jamais avoir lieu qu'au défaut d'eaux pures et claires. Les matières qui y servent sont le sable , la terre , la poussière, la chaux, le collïrium , la pierre, la cendre, fémeraude, le corail, fétain et le cuivre , pourvu CODE RELIGIEUX. 47 qu'elles soient nettes et dépouillées de tout corps impur. V. L'Imam Ebu-Youssouph , ainsi que l'Imam Schafiy n'admettent que le sable et la terre. La manière de les employer consiste à poser les deux mains ouvertes sur la matière même, et après les avoir secouées horizontalement l'une contre l'autre, les porter au visage, retoucher la matière , secouer encore les deux mains , et les frotter l'une contre l'autre, ainsi que les bras jusqu'aux coudes. C. Ce genre de lustration a été ordonné * par l'Eternel, à la suite de la journée Ghaz-wey-Mcrissak , où le Prophète, accompagné à'Aisché et à'Ebu-Bekir, se trouvant le jour d'après dans un lieu désert et aride, reçut du ciel cet oracle sacré : Si tous ne trouvez point d'eau CO ' purijiez-vous avec de la matière (1) Fe e^lcm tcjhdou rnaa fcîeycmmemou saïd\nn tayy'iFenn. / nette et pure j et dans l'instant même, l'Apôtre céleste lit, à la tête de ses disciples, ses purifications avec du sable, et s'acquitta ensuite de la prière Namaz. Ces sortes de purifications ne regardent donc que les voyageurs, ou les personnes qui, se trouvant hors des villes ou des lieux habités, auroient à faire un trajet d'un mille au moins pour se procurer de feau. L'habitant d'une ville , l'homme en demeure fixe ne sauroit en faire usage que dans les cassuivans; i°. lorsqu'on veut participer à la prière funèbre qu'un corps de fidèles seroit sur le point de commencer pour un mort avant son inhumation , sans avoir le temps de se pourvoir de l'eau requise ; 2°. lorsqu'il est question de faire l'oraison paschale consacrée aux deux fêtes de Beyram, et qu'il ne reste plus assez de temps pour faire faire chercher feau dont on a besoin. C. Comme ces prières se font en commun, et à des heures fixes et déterminées, elles ne souffrent aucun délai. Il n'en est pas de même des cinq prières du jour, qui, pouvant être faites en particulier, peuvent aussi être remises à d'autres heures de la journée. 3°. Lorsqu'on est dans le cas de payer feau à un prix au dessus de sa valeur réelle; 40. lorsque pour raison d'incommodité , on n'ose pas en faire usage ; 5°. lorque des empêchemens naturels ou civils, tels que le défaut de vases, de seaux, etc., la crainte des ennemis, des malfaiteurs , des bêtes féroces qui seroient dans le voisinage du puits ou de la fontaine, privent le Musulman des mojens de s'en procurer ; et 6°. enfin, lorsque le danger prochain de manquer d'eau pour les besoins de la vie , ne permet pas de s'en servir pour les Tome 1 I. D ;5b CODE RELIGIEUX, purifications. Mais nonobstant la légitimité de ces motifs, et la validité des lustrations pulvérales, si le fidèle peut en trouver avant de s'être acquitté de la prière Namay^, il est obligé de s'en servir, et de renouveler ses purifications. C. C'est qqe dans cette pratique religieuse, le sable, la terre, etc. ne sont que l'image, l'ombre, le symbole de l'eau, et que toute image, toute ombre, tout symbole s'évanouissent à l'approche de l'objet qu'ils représentent. L'étranger, l'infidèle qui embrasse l'Islamisme, ne doit pas faire ses premières lustrations avec du sable, etc. : il doit recourir aux purifications naturelles , soit par l'ablution, soit par une lotion générale. V. L'Imam Ebu-Ycussouph n'admet pas cette nécessité. Si un Musulman purifié apostasie, et que l'instant d'après , abjurant son erreur, il rentre dans le Musulma-nisme , il n'est pas obligé de renouveler son ablution , soit naturelle, soit pulvérale , mais bien la prière Nama^, qu'il auroit faite à la suite de sa purification et avant son apostasie. C. La raison en est que l'apostasie fait évanouir la validité de la prière, qui est un acte relatif au culte de Dieu , et non l'ablution , qui n'a trait qu'à la pureté corporelle. V. L'Imam Zufer est d'opinion que l'apostasie fait aussi évanouir la validité de l'ablution. Enfin, au défaut d'eau, les purifications pulvérales tiennent lieu et de lavage, et d'ablution , et de lotion entière, même de lotion funéraire (1). (i) On verra cet article plus bas. Dij 52 CODE RELIGIEUX. Observations, Les purifications forment une des pratiques les plus essentielles du culte Musulman : la loi ne permet à l'homme l'exercice d'aucun acte religieux, avant de s être préalablement lavé de toute souillure-quelconque, et mis dans un état parfait de pureté corporelle. Ces lustrations cependant n'ont aucun rapport aux souillures de l'ame. Les péchés ne s'effacent que par le repentir, des larmes de componction, des actes de pénitence propres à appaiser le courroux du ciel, et à attirer sur le pécheur la miséricorde de Dieu, ce qu'on appelle,Teubé ou Isstighfar. Ainsi le véritable objet des lustrations est de rendre à l'homme la pureté qui lui est nécessaire pour s'acquitter dignement de tous les devoirs de la religion. Comme on en distingue de trois espèces, toutes sous des dénominations différentes , chacune selon la nature des souillures que l'on a contractées, nous développerons brièvement tout ce qui concerne ces trois genres dé purification , soit dans l'ordre moral, soit dans l'ordre civil. 1°. Le lavage, comme relatif aux souillures matérielles, embrasse par-là même toutes les impuretés visibles qui peuvent se trouver sur le corps, sur l'habit ou sur l'oratoire du Musulman; c'est-à-dire, à l'endroit où il se place dans la mosquée, chez lui ou ailleurs, pour s'acquitter des cinq prières du jour consacrées sous le nom de Namaz ou Salath. Ce point contribue essentiellement à la propreté physique de ces peuples. Par cette raison , ils sont très-attentifs à écarter de leurs appartemens tout animal quelconque, ses déjections, l'urine même étant au nombre des choses immondes. Si chez les Musulmans l'humanité prodigue les plus grands soins à la conservation des animaux, les lois de la pureté les écartent constamment de l'homme et de la femme. Jamais on ne voit un Mahomé-tan prendre sur ses genoux un chien, un chat , etc. ni même les laisser approcher de sa personne, dans la crainte de s'exposer aux souillures réprouvées par la loi. Par ce motif encore, l'un et l'autre sexe s'abstiennent presque toujours de porter des robes traînantes; D iij ils se servent même d'une double chaussure, dont la première est toujours laissée dans le vestibule ou à la porte de l'appartement; et ils ne font jamais chez eux la prière que sur un petit tapis, Sedjeadé, consacré à cet usage. Quoique toutes les chambres soient garnies dévastes tapis en hiver, et de nattes d'Egypte en été, on y place encore au milieu ce Sedjeadé, sur lequel les hommes et les femmes s'acquittent de la prière : ces tapis d'adoration suivent même les Seigneurs dans leurs visites et dans leurs courses, soit à la ville, soit à la campagne : un laquais le porte sous le bras , et à l'heure marquée, il l'étend aux pieds du maître, qui s'y place et fait sa prière, la conscience tranquille de savoir que son prie-Dieu est dans une pureté égale à celle de son corps et de son vêtement. Ceux qui n'ont pas leur tapis, s'agenouillent sur celui du maître de la maison où ils se trouvent; et au défaut de celui-ci, ils se servent de leur manteau ou de leur habit, Binisch : on est sur ce point d'une attention très-scrupuleuse, par la crainte de poser les mains et la tête, lors des proster- / nations, sur un sol qui ne seroit pas dans cet état de pureté que la loi exige, pour rendre dignement au Créateur le culte qui lui est du. 2°. L'ablution, Abdesth y est un genre de lustration qui exige d'être renouvelé toutes les fois que le Musulman déchoit de sa pureté légale par divers événemens naturels ou accidentels, tels qu'ils sont énoncés dans le texte. Comme cette pratique ne consiste qu'à se laver les mains, les pieds et le visage avec une partie de la tête, la loi les désigne sous le nomd'^^'r maghsoidé-y-sciasse y c'est-à-dire , les trois parties consacrées à l'ablution. L'Islamisme en attribue l'institution à Mohammed lui-même , d'après les ordres de l'ange Gabriel. Ce ministre des volontés du Seigneur, disent les Imams et les auteurs nationaux, commanda au Prophète les ablutions, le jour même qu'il lui révéla le premier des chapitres du Cour'ann dans une grotte de la montagne de Hira. Comme cette grotte étoit aride, Gabriel frappa du pied contre terre, et à l'instant il en jaillit une source d'eau vive: il s'en servit pour faire l'ablution , s'acquitta D iv ensuite de la prièreNamaz, en deux riltaths, et ordonna à Mohammed d'en faire de même, en lui enseignant tout ce qui constitue l'un et l'autre de ces actes; et cela, ajoutent-ils, k l'imitation de ce que les Patriarches et les Prophètes avoient pratiqué dans tous les temps. On sent combien cette opinion ajoute à la force du précepte sur l'observation de ce rit, que l'on renouvelle plusieurs fois le jour, mais sur-tout dans les cinq heures canoniques consacrées à la prière. Le retour fréquent de cette pratique a nécessité cette quanti té prodigieuse de fontaines qui entourent l'enceinteextérieure des mosquées dans toutes les villes Mahomé-tanes. Les grands, les gens aisés, les femmes, ceux enfin qui s'acquittent dans l'intérieur de leurs maisons du Namaz, y font aussi leurs ablutions , toujours de la manière prescrite par la loi. On se met ordinairement sur le bord du sopha, devant une espèce de cuve d'étain ou de cuivre étamé, posée sur une pièce ronde de drap rouge, pour empêcher que le tapis ou la natte dont l'appartement est garni, ne soit mouillé : un domestique, genou à terre, verse de l'eau à son maître ; un autre tient un linge destiné à ces purifications. On peut voir l'estampe ia : le sujet qui s'y dispose, commence par relever jusqu'aux coudes les manches de son habit. A mesure qu'il se lave les mains, la bouche, les narines, le visage, les bras, etc., il récite les prières prescrites par la loi pour chacune de ces parties séparément. Quant aux. pieds, on ne fait que se baigner la chaussure. On ne lave cette partie du corps que dans l'une des cinq ablutions du jour, et le plus communément dans celle du matin, avant de sechausser. Mais tout Musulmannon chaussé, ou qui porte des sandales, sans bas, comme la plupart des Arabes et des Africains, les gens de la campagne, les artisans, le commun.du peuple, etc. ne manque jamais de se laver aussi les pieds dans toutes les ablutions. On compte parmi les souillures qui demandent le renouvellement de ces pratiques, les évacuations naturelles, pour lesquelles la loi ordonne aussi à l'un et à l'autre sexe de faire chaque fois, indépendamment de l'ablution, an lavage dans les parties inférieures. Les Imams commentateurs donnent là-dessus différentes instructions, et se livrent même à des détails qui, quoique minutieux , prouvent cependant le but de ces lois lustrales, dont le premier objet est la pureté physique. Us exigent encore de ne pas proférer le nom de Dieu, de ne causer avec personne lorsqu'on satisfait aux besoins de la nature, et d'être attentifs dans ces momens à ne jamais tourner ni le visage ni le dos vers le Keabé de la Mecque. Us défendent même de faire ses besoins dans un lac, dans un bassin , dans une eau morte, dans les chemins publics, sous les arbres fruitiers , dans aucun des lieux qui servent, disent-ils, d'ombre, de repos, de retraite aux fidèles. C'est par cette raison qu'on ne voit presque jamais un Musulman soulager la nature , pas même verser de l'eau, sur-tout publiquement , dans les rues ni dans aucune place publique. 3°. La lotion relative aux souillures majeures, et qui s'étend à tout le corps, est un troisième genre de lustration que l'on répète assez souvent deux, trois, et même quatre fois la semaine. Cette loi présente la véritable cause du fréquent visage des bains chauds chez tous les peuples Mahométans. Presque jamais on n'est dans le cas d'y aller par simples motifs de propreté et de santé, qui sans doute furent ceux de son institution dans l'esprit du législateur. Il est très-probable que Mohammed suivit sur ce point leLévitique, ainsi que les coutu^ mes des ancien^ Egyptiens, dont les lois rituelles avoient un rapport si intime avec la santé des citoyens. Le fondateur de l'Islamisme en fit une loi divine; il prescrivit l'usage de toutes ces purifications jusqu'à l'excès, dans le dessein sans doute d'y assujettir et d'y habituer tellement la nation, qu'elle ne pût jamais les négliger. Aussi cette pratique est-elle générale et constante chez tous les peuples Mahométans. Toute ville, toute bourgade, tout village, quelque chétif qu'il soit, a ses bains publics, Hammam , la plupart élevés par la piété des grands et des personnes opulentes. Ils sont constamment chauffes: chaque sexe a les siens; il en est'aussi de communs à l'un et à l'autre ; le jour est pour les femmes, la nuit pour les hommes. Ces bains chauds , ces étuves, sont de grands édifices bâtis de pierre , revêtus en stuc, et toujours payés de marbre : ils ne sont éclairés que par de hautes coupoles percées en échiquier et garnies de verres convexes blancs ou verdâtres : un foyer souterrain échauffe l'édifice par le moyen de plusieurs tuyaux disposés dans l'épaisseur même des murs ; la chaleur y est ordinairement de 3o à 35 degrés du thermomètre de Réaumur : on y est comme dans un nuage de vapeurs et d'exhalaisons humides; les personnes même les plus maigres y éprouvent une transpiration subite; la sueur découle par tous les pores : on n'y entre jamais que nu , le corps simplement couvert d'un tablier, Peschtumal, depuis le sein jusqu'aux pieds; il est de soie , de lin ou de coton , toujours rouge ou bleu : on s'y chausse de longs patins, Nalinn} parce que la chaleur du pavé ne permet pas d'y marcher pieds nus : de grandes urnes de marbre blanc, ménagées contre le mur de distance en distance , reçoivent par des robinets séparés, de Peau froide et de l'eau bouillante : c'est autour de ces urnes que se font les purifications : assis sur de petites banquettes , on se verse sur la tête et sur le corps de grandes tasses d'eau ; moyennant les robinets d'eau froide et d'eau bouillante, chacun est le maître de prendre le degré de chaleur qu'il lui plaît ; des rigoles taillées dans le pavé, servent à l'écoulement de ces eaux le long de l'édifice. Si, outre les purifications, le bain que l'on prend a aussi pour objet la propreté , les femmes se font alors servir par des baigneuses qui sont affectées au service de ces bains. Ces Telahs j comme on les appelle, ont une adresse singulière pour nouer et dénouer les cheveux, les tresser, laver le corps et frotter la peau, depuis les épaules jusqu'aux pieds : elles se servent d'un gant de serge ; elles y emploient aussi de l'écume de savon parfumé; elles font encore usage d'une espèce de terre, Kii} pétrie avec des feuilles de roses, pour dégraisser les cheveux. Comme toutes les femmes Mahomé- 62 CODE RELIGIEUX, tanes sont dans l'habitude de sepiler, et cela encore par principe religieux, ellesy emploient une argile très-fine , Olh , d'une qualité mordante : les hommes en font de même ; le plus grand nombre cependant se sert de rasoir. Ces bains contiennent quarante , cinquante et même soixante personnes à-la-fois. On n'entre jamais dans l'eau; on ne connoît guère les bains d'immersion ; les grandes urnes de marbre qui y sont en forme de baignoires, ne servent que pour les personnes à qui les bains sont ordonnés pour cause d'indisposition : beaucoup de femmes souffrantes s'y font aussi masser par des matrones qui les soumettent à différentes compressions, sur-tout celles qui sont nouvellement sorties de couches. Cette opération, souvent très-douloureuse, se fait ordinairement sur une espèce d'estrade élevée au milieu même du bain. Au reste, tout s'y passe dans la plus grande décence; chaque femme garde soigneusement le tablier dont elle est enveloppée ; les baigneuses passent les mains sous ce tablier, pour frotter le ventre les cuisses et les jambes. Quand on a fini de se baigner, on le quitte pour prendre une chemise fine et propre: les baigneuses couvrent en même temps les épaules d'un linge, et la tête d'un mouchoir blanc : on passe ensuite dans l'antichambre du bain, Vjeamékeann , où l'on éprouve , dans une atmosphère plus tempérée, toutes les douces sensations qu'excite la grande dilatation des fibres. Ces antichambres sont de vastes pièces garnies dans leur pourtour de hautes et larges estrades qui présentent une infinité de lits : ils consistent en matelas, et en couvertures garnies de draps très-propres; on trouve alors ces lits délicieux, ons'y repose avec volupté, on y éprouve un calme et un bien-être difficiles à exprimer; c'est une sorte de régénération, dont le charme est encore augmenté par des boissons restaurantes, et sur-tout par un café exquis. Ces lits, que les femmes, en arrivant au bain , choisissent à. leur gré, et où elles quittent leurs habits, leur servent en même temps de toilette; c'est-là qu'elles s'habillent et lbnt leur parure. Une sûreté parfaite y règne. Tout ce qui est déposé dans ces anti- 64 CODE RELIGIEUX, chambres , est sous la garde générale de l'intendante du bain , Hamadjj - Cadinn j placée au fond de l'antichambre , sur une espèce de siège élevé, elle surveille à tout avec une attention d'autant plus active, qu'elle est responsable du moindre événement fâcheux qui pourroit survenir. On ne dépose ordinairement entre ses mains que les ornemens en or, en argent ou en bijoux, que chaque femme reprend en quittant Je bain : cette intendante fait même souvent des apparitions dans l'intérieur , non-seulement par égard pour les dames d'un certain rang, mais encore pour voir par elle-même si tout s'y passe dans la décence. Le même ordre règne dans ceux qui sont destinés pour les hommes. Ces bains ne coûtent que douze, vingt, trente, au plus quarante sous par tête, selon l'état des personnes et le nombre des baigneuses que l'on y emploie. Comme plusieurs sont partagés en deux ou trois compartimens, des familles en prennent souvent un pour elles seules, et pour trois ou quatre heures de la journée. D'autres louent les bains en entier, afin afin d'y être encore plus à leur aise. Il en existe aussi de gratuits pour les pauvres de l'un et de l'autre sexe; ce sont des monumens élevés par la piété des ames charitables et bienfaisantes. On peut aisément se figurer à quel point ces lieux sont fréquentés dans toutes les saisons de l'année , puisque toute cohabitation entre mari et femme, indépendamment des autres cas qui emportent aussi l'état d'impureté légale, exige des lotions absolues. Par cette raison , le nombre de ces bains publics est considérable dans toutes les villes Mahomé-tanes ; on en compte plus de trois cents à Cons-tantinople. Les familles opulentes en ont dans leur propre maison pour leur usage particulier. On peut dire que ce sont autant d'édifices de luxe et d'ostentation. L'estampe n°. i3 donne une idée de ces bains publics. Quoique ces édifices aient pour objet principal une pratique religieuse, les purifications, la loi n'en exclud cependant pas les Chrétiens et les Juifs, qui n'y vont que par propreté et par motif de santé. Ainsi tous les naturels du pays non Mahométans, de l'un et de l'autre Tome IL E sexe, en font également usage, de sorte que l'on voit dans les bains des hommes comme dans ceux des femmes, des personnes de toutes les religions. Les femmes Mahométanes s'y distinguent toujours des autres : on reconnoît aisément leur état et leur condition par le faste et l'élégance de leur parure. Elles se servent de hauts patins richement brodés, et incrustes de nacre de perle ; leurs tasses sont d'argent ou de vermeil ; leurs chemises de bain et tout le linge qui y est consacré sont brodés clans les bords en or ou en argent. Elles se parfument avec du bois d'aloës, de l'ambre gris et d'autres aromates. Elles font aussi des déjeunes ou des dînes somptueux dans les antichambres, au sortir du bain. Elles mettent cependant beaucoup plus de recherche chez elles, dans leurs bains particuliers: tout y respire le luxe et la volupté. Il n'est pas douteux que l'usage de ces bains ne soit très - salutaire , puisqu'il ranime la transpiration, qu'il donne une impulsion nouvelle aux sources de la vie, et qu'il prévient lesmaladiesépidémiquesdeeesclimatschauds. On ne pourrait tout au plus en condamner que l'usage immodéré, parce que la sueur continuelle que provoque la chaleur excessive de ces bains, peut à la longue jeter tout le genre nerveux dans un état de relâchement et de débilité. On laisse la discussion de ce point de physique au jugement des gens de l'art; on les prie cependant d'en peser les avantages et les inconvéniens, de rapprocher la théorie de la pratique , et de combiner les principes de l'économie animale avec l'expérience de tant de siècles , puisque la nation, qui lait usage de ces bains, même à l'excès, ne laisse pas d'être saine et robuste, exempte de beaucoup d'infirmités graves qui affligent ailleurs l'humanité , et que l'un et l'autre sexe y jouissent d'une santé riante et soutenue jusque dans l'âge le plus avancé. Tel est l'esprit et l'usage des purifications, toutes relatives à la nature des souillures corporelles de chaque individu. La loi les distingue tellement, qu'elle donne aux personnes qui en sont atteintes, autant de dénomi- E ij nations particulières : celle de Mutentdjiss y lorsque les souillures n'exigent que le lavage ; celle de Meuhhdiss , lorsqu'elles demandent l'ablution; et celle deBjounoub> lorsqu'elles soumettent à la lotion générale. Elle appelle ensuite indistinctement Tahhir, toute personne qui a recouvré sa pureté légale, par l'une de ces trois sortes de lustrations, comme aussi par les purifications pulvéralcs qui suppléent aux premières, au défaut d'eau, et dans différentes autres circonstances, telles qu'elles sont exposées dans le texte de la loi. LIVRE IL De la Prière. O n divise ce livre en dix-huit chapitres : le premier traite de la prière en général ; le second, de la prière dominicale dans les cinq heures canoniques; le troisième, de la prière Salath-uitr j le quatrième , de la prière publique des vendredis ; le cinquième, de l'oraison paschale dans les deux fêtes de Beyram j le sixième, de la prière Téraivihh pendant le Ramazann ; le septième, de la prière à l'occasion des éclipses de soleil ou de lune; le huitième, de la prière dans les disettes d'eau; le neuvième, de la prière des militaires au moment du combat; le dixième , des prières à faire dans le Keabéde la Mecque j le onzième , des différentes prières de dévotion ; le douzième, des prières surérogatoires ; le treizième, des vœux religieux ; le quatorzième, des prosternations auxquelles tout Musulman est tenu lorsqu'il lit, récite ou entend dilïërens passages du Courann j le quinzième, de la E iij 7o CODE RELIGIEUX. récitation du Courann J le seizième, de l'attention que doit avoir te Musulman à ne pas Suivre les pratiques des non-Musulmans ; le dix-septième , de la circoncision ; et le dix-huitième , des prières pour les agonisans et les morts. CHAPITRE PREMIER. De la Prière en général. L a prière est le culte que la créature rend à son Créateur, en signe d'hommage , de reconnoissance, et d'aveu solennel de son néant auprès de la toute-puissance de l'Eternel. Mais celle qui est la plus obligatoire pour l'homme , et la plus agréable aux jeux de la Divinité, est la prière Nama^ Article Premier. De la Prière Dominicale j Salath ou Namaz. Cette prière est de précepte divin, ajant été ordonnée aux fidèles par difFérens Ayéths ou oracles célestes : elle exige avant tout quatre conditions, auxquelles tout Musulman est soumis, pour s'en acquitter dignement. C. Les conditions en général sont ou rar tionnelles, Schourouih akliyéj ou volontaires , Schourou th-djealiyé; ou légales,Schou-routh-scher'i/yé. Les premières sont celles qui dépendent de la nature même ; tel est l'état de santé nécessaire au Musulman pour remplir ses devoirs, etc. Les secondes sont celles que l'homme peut arbitrairement imposer aux personnes qui sont dans sa dépendance ; et les troisièmes sont celles que la loi prescrit aux fidèles dans les divers exercices du culte religieux. Article 2. Des quatre conditions requises pour la Prière Dominicale Schou-routh-us-salath. La première est l'état de pureté parfaite du fidèle, qui ne doit être atteint d'aucune souillure quelconque , ni E iv 72 CODE RELIGIEUX, grave, ni légère , ni majeure, ni mineure. La seconde est l'attention de couvrir les parties du corps que la pudeur ou* la bienséance ordonne de voiler , Awréih-yery (l). C. On les distingue selon le sexe et la condition de chaque individu. Dans l'homme elles s'étendent depuis le bas-ventre jusqu'aux genoux : dans la femme de condition serve, ce sont les épaules et le ventre jusqu'aux genoux: dans la femme de condition libre, c'est tout le corps, excepté le visage , la paume de la main , et les pieds, qui ne doivent même rester à découvert que dans le cas d'une nécessité indispensable. Si donc l'homme ou la femme laisse à découvert quelqu'une de ces parties , la prière n'est pas valide. Ces lois de pudeur sont telles, que si le Musulman a une partie de son habit souillée, —_-■- < (i ) Cet article est relatif aux peuples Nomades qui sont presque toujours nus dans les climats les plus torrides de l'Asie et de l'Afrique. fût-ce même les trois quarts, sans aucun moyen ni de le laver, ni d'en changer, il doit faire sa prière avec cet habit, plutôt que de se tenir nu devant l'Eternel; mais si la souillure prend au-delà des trois quarts de son vêtement , il est le maître alors de le quitter, quoiqu'il soit toujours préférable de le garder. S'il le quitte, et qu'il fasse la prière le corps nu , dans ce cas il doit rester sur son séant, et voiler avec ses mains ce que la décence ordonne de dérober aux regards, en indiquant par des inclinations de tête les prosternations requises dans le Namaz > à l'exemple de ce que pratiquèrent quelques-uns des disciples même du Prophète, qui se trouvèrent souvent dans les mêmes circonstances. La troisième est la position du fidèle, qui doit être constamment tourné vers le Keabé ,de la Mecque. C. le Keabé est le point de direction et le centre de réunion pour les prières xle tout le genre humain, comme l'est le Beïth-mâ- mour (i) pour celles de tous les êtres célestes ; le Kursj (2), pour celles des quatre archanges; etVJrsch (3), pour celles dés séraphins et des chérubins chargés du trône de l'Eternel. Les habîtans de la Mecque, qui ont le bonheur de posséder et de contempler le Keabé} sont obligés de faire la prière les yeux toujours fixés vers ce sanctuaire ; mais pour les étrangers, qui n'ont pas ce précieux avantage, il leur suffit de diriger pendant la prière leurs regards vers ce lieu saint. Le fidèle qui ignoreroit la position du Keabé, doit faire tous ses efforts pour parvenir à la connoître ; et après cette sollicitude , quel qu'en soit le succès, la prière est toujours valide, quand même il découvrirait son erreur à la suite de { 1 ) Bcith-màmour, qui veut dire , maison de prospérité , de félicité, est l'ancien Keabé de la Mecque , qui, selon la tradition , fut enlevé par les anges lors du déluge, et porté au ciel, où il fut placé perpendiculairement au dessus du sanctuaire actuel. (a) Kursy, qui signifie siège, est le huitième firmament. (3) Arsck, est le trône de l'Eternel, que l'on croit posé sur le neuvième et le plus haut des firmamens. \ son Namaz : s'il s'en appereoit au milieu de la prière, il doit aussitôt se tourner vers le Keabé, et la continuer , sans être légalement obligé de la recommencer; mais s'il la commence sans avoir fait les recherches nécessaires , ou s'il la dirige volontairement vers tout autre point que celui du Keabé, alors non-seulement sa prière n'est pas bonne, mais il se rend encore coupable d'infidélité envers la loi et la religion ; enfin, dans tous les cas où le fidèle, menacé de quelque danger, comme seroit la présence d'un ennemi, d'un voleur, d'une bête féroce, etc., n'auroit pas la liberté de se tourner vers le Keabé> il peut faire la prière dans telle posture que ce soit, la circonstance ne pouvant que l'excuser et rendre son acte bon et valide. La quatrième est l'intention. C. C'est elle qui détermine le caractère de toute œuvre quelconque (1). Il est louable de la manifester par la parole même , en indiquant chaque fois la nature de la prière dont (1) lnncmd aidai b"\n-niyath. y6 CODE RELIGIEUX. on va s'acquitter, et en joignant son intention à celle de Y Imam qui o/Kcie, toujours dans un esprit de communion. Article 3. De P Esprit et de l'Essence de la Prière Dominicale , Ahhlveam' us Sala th. Avant tout la prière exige de l'homme un entier dépouillement de tout objet mondain. Le fidèle qui prie , doit être en ce moment pénétré de la présence de Dieu , dans les sentimens les plus profonds d'amour, de crainte et de respect. C. Le Prophète lui-même nous en a donné l'exemple , puisque toutes les fois qu'il prioit, il se détachoit du monde , et se remplissoit tellement de l'amour, de la grandeur et de la majesté de l'Etre suprême, que son cœur pur et saint bonillonnoit comme l'eau dans un vase, au milieu d'un grand feu. Dans toute prière adressée à la Divinité , il faut se garder encore de ne jamais invoquer l'Eternel par des objets créés et soumis à sa puissance, mais par ses seuls attributs, qui sont l'essence de sa grandeur , de sa gloire et de son existence immortelle et immuable. Voici les pratiques qui forment et constituent la prière Nama^ i°. On doit commencer par se tenir debout, dans le recueillement le plus respectueux , puis hausser les deux mains, les doigts entrouverts, en portant le pouce sur la partie inférieure de l'oreille, et en récitant le Tekbir. La femme ne doit hausser les mains que jusqu'à la hauteur des épaules (1). C. Le Tekbir. est conçu en ces termes : Dieu très-haut (2) Dieu très-haut! il n'y a point de Dieu sinon Dieu : Dieu très-haut, Dieu très-haut ! Les louanges sont pour Dieu. On doit proférer ces paroles de suite, sans traîner (1) V. les Planches 14 et i5. (2) Allait u ekber, Allait u ekber , la ilahî iW Allah, Allah'u ekber Allah"u ekber, ve V'dlaK'd-kamd. 78 CODE RELIGIEUX les syllabes, pas même la dernière lettre. Ce Tekbir, qui se répète plusieurs l'ois durant la prière , étant le premier articulé au commencement du Natnaz, est par-là même appelé Tekbir Jjtitah , (oraison préliminaire ou d'in-troduclion). Lorsqu'on l'ait le Namaz en commun, on doit suivre en tout Y Imam ; en récitant avec lui les mêmes prières. On est libre d'ailleurs de les Caire en Arabe, en Persan ou en toute autre langue. V. Les Imaméinns ainsi qu'Ebu - S.ûd Berdayi, n'admettent que les langues Arabe et Persanne ; ils s'ap. puient sur cette parole du Prophète : « L'Arabe (i) et » le Persan , Deriyc, sont les langues u paradis. « Jls :e permettent même de faire usage du Persan qu'au cas que l'on ignore l'Arabe ou qu'on ne puisse pas le bien prononcer. 2°. On pose les deux mains sur le nombril, la main droite toujours sur la main gauche, en récitant successivement le Tessbihh, le Séna , le Téa-woui, le Fatihha , puis un autre cha- (i) L'issanr. ehhVuhdjenv.ith cl-arebiyé v'el-farissiycth-'ud-dcriyé. CODE RELIGIEUX. 79 pitre du Courann , au gré de chaque fidèle, qui doit réciter pour le moins trois Ayeths ou versets de ce saint livre. C. Le Tessbihh consiste en ces paroles : Que ton nom (1) soit exalté, 6 grand Dieu! Le Séna : Je te sanctifie , ô mon Dieu (2) ! je te loue j ton nom est béni , ta grandeur est exaltée : il n'y a point d'autre Dieu que toi. Le Téawouz : J'ai recours à Dieu (3) contre le démon lapidé : au nom de Dieu clément et miséricordieux. Et le Fàtihha ( premier chapitre du Courann } .* Au nom de Dieu clément et miséricordieux! Louanges à Dieu Seigneur de l'univers , très-clément et très-miséricordieux } il est le souverain maître du jour du jugement : nous t'adorons , Seigneur, et nous implorons ton assistance : dirige-nous dans le sentier du salut, dans le sentier de ceux que tu as comblés de tes bienfaits , de ceux qui n'ont pas mérité ta colère, et qui ne sont pas du (1) Subhané rcbfïl-a^im. (2) Subhhaneké allahumé , etc. (3) Eou[un tfïllah mïmri'esch-scheytarin ir- redj'im iïissmillaliir-rahhmanriir-rahhim. 80 CODE RELIGIEUX. nombre des égarés. La récitation du Cour'ann n'est proprement obligatoire que dans cette prière i\ama:. 3°. On fait une inclination, Rukeou en tenant la tête et le corps horizon-talement penchés, posant les mains, les doigts bien ouverts, sur les genoux, récitant encore le Tekbir, puis le Tessr blhh, qu'il faut répéter neuf fois de suite, ou bien sept, cinq, ou pour le moins trois fois. 4°. On se relève en récitant le Tessmyy le Tahhmilet le Tekbir. C. Le Tessmy est conçu ainsi : Dieu écoute (i) celui qui le loue : et le Tahhmid : O Dieu (2) / les louanges sont pour foi. 5°. On fait une prosternation , Sed-jeoud, la face contre terre ; savoir , les genoux, les doigts des pieds, les mains , (1) Scmy'AllaKu li rr.cn n liarnduhu. (2) Rebbina Uk'ul-hairJ. CODE RELIGIEUX. 81 le nez et le front touchant la terre. Pendant la prosternation on doit encore réciter le Tekbir, et pour le moins trois fois le TessbihL C. On doit poser la tête entre les deux: mains portées au niveau des oreilles , les doigts toujours serrés. Le corps doit être prolongé sans que le ventre touche la terre. A l'égard des femmes, celte attitude doit être plus raccourcie ; le ventre doit porter sur les cuisses. On peut faire ces prosternations sur des tapis ou sur un habit même étendu par terre , en évitant soigneusement tout ce qui ne présenterait pas une surface unie et solide. On peut aussi dans la prière en commun , où. les rangs seraient extrêmement serrés, éviter de s'étendre ; on peut même poser la tête sur le dos de ceux qui forment les premiers rangs, supposé que les uns et les autres s'acquittent a-la-fois de la prière marquée pour la même heure canonique, pas autrement. 6°. On se relève de terre, et on reste un instant assis sur ses genoux , les ' Tome II. F 82 CODE RELIGIEUX, mains posées sur les cuisses, en répétant encore le Tekbir. 7°. On fait une seconde prosternation absolument comme la première. 8°. On se relève en s'appuyant des mains , non pas contre terre , mais contre les genoux, et en récitant en, core le Tekbir. Toute cette partie de la prière forme un rik'ath. C. La prière Namaz est composée de plusieurs de ces rik'aths , deux, quatre,six, etc., selon les heures canoniques. Deux rik'a/hs s'appellent Schéfj , et complètent un Namaz. Tout rik'ath exige les mêmes pratiques et les mêmes prières , excepté le Tessbih , XaSéna, le Téawouz, le Fatihha et l'élévation des mains, qui sont des actes réservés dans tout Namaz quelconque, au seul premier rik'ath ? distingué par - là même des autres, sous le nom de rik'ath-oula. Le haussement des mains n'est permis qu'en huit différentes occasions, savoir, i°. au com- mencement du Namaz > dans le premier rik'ath j 2°. dans le cantique Counouth , qui termine la prière Salath-fritr, consacrée à la troisième et dernière partie de la nuit ; 3e. dans l'oraison paschale des deux fêtes de Bejram j 4°. dans le baisement de la pierre noire à la Mecque j 5°. à la station de Safaj 6°. à celle de Me rué j j°. à celle du mont Arajath ; et 8°. à celle des deux premiers Djemrés à la Mecque. Elles sont toutes désignées par les mots factices de Fak'ass , et de Sanfadjh , dont les lettres sont les initiales des noms de ces huit lieux ou circonstances. 9°. A la fin de chaque second rik'ath on doit s'asseoir sur les genoux, en posant les mains, les doigts ouverts, sur les deux cuisses , placer alors en dedans la jambe gauche, et tenir le pied droit tendu et levé par derrière , les doigts toujours contre terre. C. C'est pour avoir aussi dans cette posture le pied droit tourné vers le Keabé de la Mec Fij 84 CODE RELIGIEUX. que , h l'imitation de ce que pratiquoit le Prophète, suivant le témoignage d'/Iïsché. Mais la femme doit s'asseoir du côté gauche, en portant ses deux pieds du côté droit. Dans cette posture on doit réciter le cantique Teschehhud. C. Le voici : Les Prières vocales sont pour Dieu (i) , lesprières corporelles et les prières aumônières sont aussi pour Dieu. Salut et paix à toi , ô Prophète de Dieu ! Que la misé-ricorde et fa bénédiction de Dieu soient aussi sur toi! Salut et paix à nous et à fous les serviteurs de Dieu justes et vertueux ! Je confesse qu'il ji'y a point de Dieu sinon Dieu, et que Mohammed est son serviteur et son Prophète. Ce cantique est àTbn-Mess'oud j il le composa en mémoire des œuvres miraculeuses opérées par le Prophète la nuit de son assomp. tion, Apparaissant en la présence de l'Eternel, il lui adressa ces paroles : Tahhijath , Sa- (i) EStahhiyath V'UUh v'es'salath v\t-tayyibath , etc la/h et Tajjibath (i). Elles désignent les trois genres de prières, par paroles, par œuvres et par aumônes. Sur quoi l'Eternel lui répondit aussi par ces trois mots : Sélam y Rahmcth et Berekiath , qui indiquent le salut de paix, la miséricorde et la bénédiction célestes censées implorées par tout mortel auprès de Dieu son Créateur. Et io°. A la fin du dernier rik'ath on doit réciter, assis , le Salawath. C. Le voici : O mon Dieu (i£) ! donne ton salut de paix à Mohammed et à la race de Mohammed, comme tu as donné ton salut de paix à Ibrahim et à la race //'Ibrahim ; et hé ni s Mohammed et la race de Mohammed comme tu as béni Ibrahim et la race ^Ibrahim : louanges , grandeurs } exaltations sont en toi et pour toi. (1) Eftahhïyath ibadath cawliyé , v'el-salath ibadath filiyé y v''et-tayibath ibadath maliyè. (2) Allahummc saWé âla Mohammedviâla aVi Mohammed kema salïtè âla Ibrahim ve âla aVi Ibrahim , etc. F iij On doit ensuite réciter un des chapitres du Courann, dont le choix est au gré et à la volonté de chaque fidèle. C. Il n'est paspermis de réciter aucune autre prière, ni de faire à Dieu des demandes relatives aux biens temporels de cette vie caduque et périssable. LeNamazue doit jamais avoir d'autre objet que celui de rendre à l'Etre suprême l'hommage qui lui est dû, en lui demandant des biens spirituels, ces biens précieux et ineffables de la félicité éternelle. On doit enfin terminer le Nama\ par la profession de foi et par une salutation , à droite et à gauche, à ses anges gardiens , Kiram'enn Keatibinn. C. Cette salutation doit être accompagnée de ces paroles : A toi le salut de paix (i) et la miséricorde de Dieu. Ibn-Abas est d'opinion que l'homme a pour gardiens cinq anges, qui sont placés, le premier à sa droite, (i) El-sdamunn aliyKum ve rahhmetK ullah. CODE RELIGIEUX. 87 le second à sa gauche, tous deux pour écrire ses bonnes et ses mauvaises actions ; le troisième devant lui, pour le, diriger dans la voie de la vertu et de la piété ; le quatrième derrière lui, pour le garantir des pièges et des séductions du monde; et le cinquième devant son front, pour tenir son esprit et son cœur toujours élevés vers le Prophète de Dieu. D'autres disciples et Imams portent le nombre de ces anges gardiens jusqu'à soixante , et quelques autres jusqu'à cent soixante. Dans les prières en commun, Y Imam doit diriger par l'intention ce salut de paix à toute l'assemblée des fidèles , et chacun d'eux le doit diriger à son tour vers Y Imam et vers l'assemblée, en signe de communion. Toutes ces pratiques qui constituent le Nama^ , sont, les unes d'obligation divine , Fanr , les autres d'obligation canonique, JVadjib, et d'autres d'obligation imitative, Sunneth. C. Les premières, qui furent dictées et or- F iv 88 CODE RELIGIEUX, données au Prophète par l'ange Gabriel même, sont, i°. la récitation du Tekbir au commencement de la prière^ 2°. celle de trois versets pour le moins du sacré Cour'ann ; 3°. l'attention de se tenir debout ; 40. les inclinations de tête et de corps; 5°. les prosternations; et 6°. l'attention de terminer le Namaz par Ia profession de foi, toujours assis sur ses genoux. Les secondes sont, i°. la récitation du Fatihha ; 2,0. celle d'un autre chapitre du Courann , au choix du fidèle, dans le premier comme dans le second rik'a/h j et 3°. celle du Tesschehhudà la fin de chaque rik'ath. Toutes les autres ne sont que d'obligation imitari ve. V. Suivant l'Imam Schafiy, la récitation du Fatihha est de précepte divin : il exige aussi que le fidèle fasse à son gré la récitation d'un autre chapitre du Cour'ann , non-seulement dans les deux premiers , mais dans tous les riFaths de la prière; et l'Imam Malik l'exige pour le moins dans les trois premiers. Le fidèle doit être attentif à suivre exactement dans toutes ces pratiques, l'ordre et la méthode qui y sont près- CODE RELIGIEUX. 89 crits ; il doit aussi s'en acquitter avec lenteur et gravité. C. Le Prophète voyant un jour un Arabe Nomade faire précipitamment les prosternations , précisément comme un coq affamé lorsqu'il béquète des grains d'orge, di^ à cet homme que sa prière ne pouvoit être agréable à Dieu , et lui ordonna de la recommencer, et de s'en acquitter lentement. Il est d'ailleurs de la piété et de la décence de fixer constamment, pendant la prière, les regards devant soi, de bien fermer la bouche lorsqu'on a envie de bâiller ; d'éviter autant qu'il est possible d'éternuer, et de dégager les mains de la manche de son habit, supposé qu'elle les couvre par sa longueur. Cette dernière pratique ne peut regarder la femme, parce que si elle est décente pour l'homme, elle cesse de l'être pour elle. C. Durant le Namaz, lorsqu'on est debout, on ne doit regarder que son marche - pied ; dans l'inclination de tête, que ses pieds; dans la prosternation , que ses narines ; assis, que ses cuisses; en saluant à droite ou à gauche , que ses épaules. Comme l'envie de bailler est l'effet d'une dévotion tiède et languissante, œuvre du démon, on doit aussitôt fermer la bouche, de peur que l'esprit infernal n'entre en ce moment dans le corps. Enfin pendant tout le Namaz, l'esprit du fidèle ne doit s'occuper d'aucun objet mondain : il ne doit proférer rien d'étranger à la prière, ni adresser le moindre mot à personne. Observations. On remarquera dans ce chapitre comme dans les suivans , que le culte Mahométan a pour base principale cette prière Namaz ; elle forme en quelque sorte toute la liturgie du Musulmanisme : la rigueur avec laquelle elle est prescrite , influe sur les conditions que la loi exige pour s'en acquitter dignement : aussi est-on très-attentif à tout ce qui concerne les purifications, la décence dans le vêtement, et la position vers le Keabé de la Mecque. Cette direction commune et générale à tous les peuples qui suivent la doctrine Musulmane dans tous les climats et dans tous les pays du monde, est consacrée sous le nom de Kiblé : Mohammed en fut l'instituteur; il l'établit la seconde année de l'Héghe, qui est l'épcque de sa retraite de la Mecque à Médine. A son approche de cetteville, comme il reçut d'abord les hommages et les acclamationsd'unegrande partie de citoyens empressés de venir à sa rencontre , il passa par Couba , bourgade située aux environs, où il posa de sa main la première pierre d'une chapelle , Mesdjid , qu'il consacra au culte de l'Éternel. Le lendemain vendredi, il se transporta en pompe dans le vallon Ranona-dcressy, où il fit la prière de midi à la tête de ses disciples. Quelques jours après, il ordonna d'éleverau même endroit une nouvelle chapelle sous le nom de Mesdjid-djumâ, qui veut dire, le temple de la prière du vendredi ; mais il n'y eut dans l'une ni dans l'autre de ces chapelles aucun autel qui servît de Kiblé vers le sanctuaire de Ja Mecque. Rendu kMédine , son premier soin fut de construire aussi un temple magnifique dans le centre de la ville. U y consacra ses travaux et ses sueurs; il portoit lui-même les pierres et les briques; et à son exemple, ses disciples et tout Médine y coopérèrent avec un zèle ardent : il appela ce temple Mesdjid-scherif , c'est-à-dire , temple saint, temple sacré. C'est là que Mohammed plaça un autel, non du coté de la Mecque, mais vers le temple de Jérusalem : ilvouloit par-là, dit le judicieux Ah?nedEfendy, flatter les Hébreux, les attirer dans son parti, et leur faire embrasser sa doctrine. L'année suivante, ayant commencé à prêcher le Cour'ann les armes à la main, et à faire des expéditions militaires contre différentes tribus Arabes et Juives, établies aux environs de Médine, l'un de ses généraux, Abd'ullah ibn Djcahhsch , poussa sa course jusqu'à la Mecque :J et attaqua presque aux portes de cette ville une petite caravanne de x<*Couréyschs : il fit deux prisonniers, tua quelques-uns de la troupe , et dispersa le reste après les avoir dépouillés de tous leurs effets. Ce fut, ajoute le même auteur, le premier butin enlevé par les Musulmans aux ennemis de Dieu et de son Prophète. Cet événement fit le plus grand bruità la Mecque et dans tout le pays d'alentour. On cria à la profanation du Keabé et de son territoire sacré. Mohammed, continue le même écrivain, dont toutes les démarches étoient dirigées par l'esprit de Dieu , désapprouva hautemnt le procédé de son général, et différa quelques semaines le partage du butin parmi ses disciples-soldats. Il témoigna alors le plus grand respect pour le Keabé et pour son territoire , et rentré à Médine , il alla le jour suivant au temple, à peine achevé, i5 Chah. (2. 2.6 Févr. 624), faire la prière publique à la tête de son peuple. Au milieu de ce Namaz, il reçoit du Seigneur l'ordre de changer la position de l'autel , et de diriger la prière et les adorations des Musulmans vers le Keabé de \a Mecque. A l'instant il se tourne avec toute l'assemblée vers cet ancien sanctuaire, et termine le Namaz dans cette nouvelle direction. Ce temple fut dès-lors appelé MesdjidhU-Kibléthéïnn , c'est-à- dire , le temple à deux Kiblés, à deux directions. Les disciples qui dcsservoicnt ceux de Cauba et de Eanona hors de la ville, eurent ordre de se conformer aussi à cette prétendue loi céleste, qui, quatre jours après, fut suivie du précepte relatif au jeûne du mois de mazann ; et le 28 de la même lune, une nouvelle loi, toujours réputée divine, établit la dîme au manière en faveur des pauvres. On peut remarquer ici la politique de ce législateur, et son habileté à profiter des opinions publiques et des circonstances , en les faisant toutes concourir au succès de son entreprise. Dès cette époque, toutes les mosquées, tous les Mesdjids, tous les temples Mahométans élevés à Médine, dans le reste de l'Arabie, dans toutes les parties du monde, eurent leurs autels dressés vers le Keabé de la Mecque. Il en fut de même dans toutes les chapelles et dans toutes les maisons particulières qui ont ordinairement une ou deux pièces consacrées à la prière, par une espèce d'autel dessiné, en couleur ou en or même, sur le mur qui donne vers la Mecque : le dessin d'une lampe règne aussi au milieu de ce symbole. Dans les environs des villes, dans les campagnes, ainsi que le long des grandes routes, on rencontre de pareils signaux , tous également dressés vers la même cité, et élevés en pierre ou en marbre, artistement travaillés, et toujours terminés en pointe. Auprès de la plupart se trouvent ou de grands puits ou de belles fontaines, qui sont principalement destinés aux purifications requises avant la prière. Ce sont autant de monumens de la piété des grands et des personnes opulentes. Tous ces signaux sont placés sur des terrasses ou des plate-formes; et comme ils n'ont d'autre objet que celui d'orienter les voyageurs dans les cinq prières du jour, on les appelle Mussala ou Namaz-Kiakh , c'est-à-dire, oratoires ou lieux d'adoration. Nous en donnons une idée dans la Planche 16. L'attention des Musulmans à s'acquitter de ce Namaz dans les heures prescrites , égale les sentimens de respect, d'humilité, de recueillement , d'anéantissement même que la reli- g;cn exige de l'homme , lorsque! rend, par cette prière , le culte dû au Créateur. Dans ces momens il ne lui est permis de s'occuper que de la grandeur et de la toute-puissance de l'Être suprême, que des choses spirituelles et célestes, parce que sa prière ne doit jamais avoir pour fin des biens terrestres, des intérêts mondains, des projets ambitieux. Ce Namaz est imposé généralement et indistinctement à toutes les classes de la nation, par les préceptes les plus absolus du Courann : il se renouvelle plusieurs fois par jour, à différentes époques de l'année, et dans certains événemens'de la vie humaine. Il est composé de plusieurs rïk'alhs, qui, comme on le voit dans le texte, consistent en diverses attitudes, accompagnées d'inclinations et de prosternations, dans lesquelles on récite les hymnes et les prières dictées et réglées par la religion même. Nous avons déjà dit que Mohammed prescrivit toutes ces attitudes , ainsi que les pratiques de l'ablution , comme lui ayant été enseignées par l'ange Gabriel, dans la grotte de la montagne de Hira, en signe de révélation CODE RELIGIEUX. 97 tion des anciennes pratiques des Patriarches et des Prophètes antérieurs. Il imprima ainsi un caractère sacré à ce Namaz, qui est toujours uniforme , soit qu'on s'en acquitte en commun ou en particulier, à la mosquée, chez soi ou ailleurs. Il n'existe de différence que dans le nombre des rik'aths , qui varie selon les heures canoniques et les diverses solennités consacrées par la religion : et quoique les prières portent alors des noms différens c'est toujours le même Namaz, les mêmes inclinations , les mêmes prosternations. Les huit premières, telles qu'on les voit dans les planches 14 et i5, forment un rik'ath; on les répète deux , quatre, six, huit fois, nombres que la religion détermine pour chaque heure canonique, comme on le verra dans les chapitres suivans. Si la prière n'est que de deux rik'aLhs , on s'acquitte à la fin du second, des attitudes indiquées par les figures o et 10 , avec les prières qui les accompagnent : et lorsqu'il est question déplus de deux rîk'aûu, on se tient à la fin du second, toujours dans l'attitude marquée par la figure 9 : celle de la Tome IL G 98 CODE RELIGIEUX, figure 10, qui sert de complément à la prière, n'est jamais employée que dans le dernier rik'ath. Les femmes sont tenues d'observer les mêmes attitudes ; il n'y a proprement de différence entre elles et les hommes, que dans l'élévation des mains. Nonobstant la tolérance de la loi sur l'usa o-0 des langues étrangères, cette prière ne se fait jamais qu'en Arabe; tout le reste de la liturgie Mahométane est également en cette langllet Quelques hymnes seules de la composition des linams modernes sont en idiome Turc ; et ces hymnes, réservées aux louanges du Législateur, ne se chantent jamais qu'à la fête de sa nativité. Il existe aussi des prières et des hymnes en idiome Persan; mais XéélDerwischs seuls en font usage dans les différens exercices particuliers à ces sociétés religieuses. Le Persan Bérijé, dont il est fait mention dans le texte, est le dialecte le plus épuré. Il fut adopté à la Cour de Perse, sous le règne de Behhram VI, qui défendit à ses sujets de parler aucun autre idiome. Par cette raison il fut dès - lors appelé Farissiyelh-ud-dériyé , c'est-à-dire, le Persan de la cour, Der, qui signifie porte, désignant dans tout l'Orient la cour d'un prince souverain. Nous observerons en passant, que si la loi accorde la liberté de se servir d'une langue étrangère dans le culte divin , cette liberté peut à plus forte raison s'appliquer aux objets civils et mondains. Or si les Mahométans ont un certain éloignement pour l'étude et l'usage des langues étrangères, si par-là ils sont privés des avantages que leur procureroient les sciences et les lettres qui se cultivent en Europe , on ne doit attribuer cette répugnance de leur part qu'aux seuls préjugés populaires, infiniment plus aisés à détruire que des opinions ou des principes qui ont pour base la religion et la loi. CHAPITRE IL De la Prière Dominicale dans les cinq Heures Canoniques. L e Prophète lui-même a fixé et déterminé les heures consacrées à la prière Namai , par ces paroles : Certes, Dieu Gij ioo CODE RELIGIEUX. impose à tout Musulman et à toute Musulmane (1) F obligation de s'acquitter de la prière cinq fois par jour, y compris la nuit. Ainsi tout fidèle est indispensablement obligé de faire cette prière en cinq heures différentes du jour, savoir, je matin, à midi, l'après-midi, le soir et la nuit, à l'imitation même de ce qui a été pratiqué par les anciens Prophètes. Ces heures sont ainsi déterminées : i°. La prière du matin , Salât h-Subhh (2), est depuis l'aurore jusqu'au lever du soleil. C. Adam fit le premier cette prière, à la suite de son expulsion du paradis. Saisi d'erfroi de se voir dans l'obscurité, il rendit, peu avant l'aurore, des actions de grâces à l'Eternel, en faisant un Namaz de deux rik'aths , l'un pour (1) Inn AllaKi fara^é ala kulViMuslim ve kulli MuslU methji kulCc yewniinn ve leïle£ (1) On l'appelle encore Salath-fedjr, et en idiôm* turc , Sabahh namaçy. avoir été délivre des ténèbres de la nuit, et l'autre pour avoir vu renaître la lumière du jour. 2°. Celle de midi, Salatk Zuhhr (1), compte du moment que le soleil commence à décliner, jusqu'à l'heure, du Namai de l'après-midi. C. C'est Abraham qui s'en acquitta le premier, à l'occasion du sacrifice de son fils : il la lit de quatre rïRdths , pour remercier Dieu, i°. de ce qu'il avoit fait taire en lui la tendresse paternelle; sP. de ce qu'il lui avoit plu de substituer à Isrnaël, un bouc envoyé du ciel; 3°. de ce qu'une voix céleste lui avoit fait entendre dans son sommeil cette parole consolante : Tu es Jidèle à ion Dieu j et 40. de ce que son fils s'étoit soumis avec tant de résignation à la volonté de l'Eternel. 3°. Celle de l'après-midi, Salatk Assr (2) , commence au moment que le cadran solaire présente une ombre (1) Euïlê -namatf. (2) Ikïnniy-nama^y. Giij 102 CODE RELIGIEUX, d'une double longueur de son aiguiHe et finit au coucher du soleil. C. Le Prophète Jonas en est l'auteur : il Ja fit aussi de quatre rik'aths , en action de grâces de s'être vu délivré à-la-fois de quatre différentes espèces de ténèbres , celles de l'ignominie, celles de la nuit, celles delà mer, et celles du poisson qui l'avoit englouti. V. Suivant l'Imam Schafiy , cette heure doit commencer au moment où le cadran présente une ombre égale à la longueur de son aiguille : celte époque du jour s'appelle par cette raison, Assr-cwd , premier temps J et l'époque de la double longueur de l'aiguille , Assr-sany, second temps. 4°. La prière du soir , Salatk Magfè rib (î) , est depuis le coucher du soleil jusqu'à l'heure où commence la prière de la nuit. C. C'est Jésus-Christ qui fit le premier ce Namaz : il fut de trois rik'aths , dont les deux premiers avoient pour objet de reconnoître sa (i) Ahhscham-nama^y. CODE RELIGIEUX. io3 dépendance et celle de sa mère, et le troisième* de rendre hommage à l'Eternel , en conséquence d'une voix céleste qui se fit entendre à lui vers cette heure-là. Et 5°. celle de la nuit, Salatk Ischa (1 ), compte depuis l'entière obscurité de l'horizon jusqu'à l'aurore , où commence l'heure de la prière du matin. C. C'est de Moyseque Ton tient cette prière. Après s'être égaré, au sortir de la ville de Mcdyenn , Madian , ce Prophète se trouva à Ventrée de la nuit dans la plaine Vadïy-Eymenn. Consolé par une voix du ciel sur les différens motifs de sa douleur, il fit aussitôt un Namaz de quatre rik'aths en action de grâces de ce qu'il se voyoit délivré des cruels soucis que lui donnoient, i°. sa femme ; 2,0. son frère Harounn, Aaron; 3°. Fir-awnn, Pharaon , son persécuteur ; et 40. ses enfans. Nonobstant la validité de la prière dans l'espace circonscrit de ces cinq ( 1 ) Yathsy - nama^y. G iv 104 CODE RELIGIEUX, heures , il est cependant plus louable et plus méritoire pour le fidèle de s'en acquitter dans les premiers momens plutôt que dans les derniers de ces mêmes heures canoniques. / C. Le fidèle qui, après s'être acquitté du premier Namaz du jour vers l'aurore, ne se rendort pas jusqu'au lever du soleil, acquiert le mérite qui est attaché à l'affranchissement de quarante enfans cYlsmaël. Au reste,il est permis de prier Dieu dans tous les momens du jour et de la nuit, excepté ceux du lever, du midi et du coucher du soleil, dans lesquels on ne doit jamais faire aucun Namaz, ni canonique, ni satisfactoire, ni surérogatoire, ni funèbre , pas même la lecture d'aucun des quatorze passages sacrés du Cour'ann qui exigent des prosternations. On ne doit pas non plus ensevelir les morts en ces trois momens du jour, suivant la défense expresse qui en a été faite par le Prophète lui-même. Le fidèle doit également éviter de faire un Namaz canonique dans la matinée, c'est-à-dire, depuis le CODE RELIGIEUX. io5 lever du soleil jusqu'à midi; c'est pourquoi l'on appelle cet intervalle IVakth-MeuhhmtL, temps de suspension. Chacune de ces cinq prières doit être composée de difïerens rik'aths ; la première de quatre , la seconde de huit, la troisième de six , la quatrième de cinq, et la cinquième de six, dont les uns sont d'obligation divine, et les autres d'obligation imitative. C. Les premiers sont ceux qui sont déterminés par les cinq Prophètes ci-dessus, et les autres ont pour principe ce qui a été pratiqué par l'Apôtre céleste. Les vendredis on doit encore ajouter à la prière de midi quatre autres rik'aths. Comme chacun de ces cinq Nantais a son heure canonique fixe et déterminée, il n'est pas permis au fidèle d'en faire deux ou plusieurs dans une même heure. C. La réunion de ces Namazs n'est permise io6 CODE RELIGIEUX, que dans un seul jour de Tannée, et pour Jes seuls pèlerins de la Mecque , où ils peuvent la veille de la fête des sacrifices, s'acquitter à-la-fois du Namaz de midi et de celui de l'après-midi au mont ylrafath > et des deux derniers à Muzdélije. Tout fidèle est obligé de faire ces cinq Nama^s en commun ou en particulier , dans la mosquée ou ailleurs. C. Il est cependant plus louable, et même d'une obligation imitative , de s'en acquitter en commun. Losque le fidèle s'en acquitte en son particulier, il est maître de les faire à son gré. à voix basse ou à haute voix : c t quoiqu'il ait la liberté de réciter, après l'introït Fatihha , un autre chapitre du Courann, à son choix, il est cependant plus louable qu'il s'en tienne aux chapitres les plus longs , sur-tout dans la prière du matin et dans celle de midi. CODE RELIGIEUX. 107 La troisième et la cinquième peuvent admettre des chapitres moins longs, et la quatrième , les chapitres les plus courts , conformément à ce que prati-quoit notre saint Prophète. C. Les plus longs chapitres sont depuis le Suré-y - heudjraûi ( 1) jusqu'au Sure-y bu-roudjh (2) ; ceux qui le sont moins, depuis celui-ci jusqu'au Suré-y-lemyelainn (3) ; et les plus courts, depuis ce dernier jusqu'à la fin du Cour'ann. On peut se dispenser de cette récitation du Courann en cas d'empêche-mens légitimes. C. Tels seroient l'heure canonique déjà trop avancée pour faire le Namaz , la présence de l'ennemi, une incommodité quelconque, l'état de vieillesse, etc. ; circonstances qui, dans les prières même en commun, accordent la môme (1) C'est le quarante-neuvième chapitre. (2) C'est le quatre-vingt-cinquième chapitre. (3) c'est le quatre-vingt-dix-huitième chapitre. io8 CODE RELIGIEUX, dispense à Y Imam , pour ne pas tenir 1 assem-blée en souffrance ou en péril. Enfin toute prière Nama^ doit être précédée de l'annonce E\ann% et de Ylkaméth. Article Ier. De /'Ezann ou Annonce des Heures Canoniques. UE{ann est de l'institution du Prophète. C. Comme l'Apôtre céleste , lors de sa retraite à Médine , ne faisoit pas toujours les cinq prières canoniques à la même heure et aux mêmes instans, ses disciples , qui manquaient souvent de faire le Namaz avec lui, s'assemblèrent un jour pour délibérer sur les moyens d'annoncer au public les momens du jour et de la nuit où leur maître s'acquittoit de ce premier des devoirs religieux. Les drapeaux , les cloches, les trompettes, les feux furent successivement proposés pour signaux. Aucuns ne furent admis. On rejeta les drapeaux comme ne convenant point à la sainteté de l'objet; les cloches, pour ne pas imiter les Chrétiens ; les trompettes, comme des instru-mens propres au culte des Hébreux ; les feux, comme ayant trop d'analogie avec la religion des Pyrolâtres. Dans cette contrariété d'avis, les disciples se séparèrent sans rien conclure. Mais pendant la nuit, l'un d'eux, Abd'ullah ibn Zeld Abdériyé, voit en songe un être céleste vêtu de vert : il s'ouvre à lui, avec tout l'empressement que lui inspiroit son zèle, sur l'objet dont s'occupoient les disciples du Prophète. Je vais vous montrer, lui dit cet esprit céleste, comment vous devez remplir ce devoir important de votre culte. II monte alors sur le toit de la maison, et fait YEzann à haute voix avec les mêmes paroles dont on s'est servi depuis pour annoncer les cinq heures canoniques. A son réveil Abd} ullah court exposer sa vision au Prophète, qui le comble de bénédictions, et autorise à l'instant même Bïlal Habeschy, un autre de ses disciples, à s'acquitter sur le toit de son hôtel de cet office auguste, sous le titre de Muezzi/in. Voici les paroles de ÏE^ànn : Dieu très-haut (1) ! Dieu très-haut ! Dieu très-haut ! Dieu très-haut ! J'atteste qu'il n'y a point de Dieu sinon Dieu y j'atteste qu'il ny a point de Dieu sinon Dieu ! J'atteste que Mohammed est le Prophète de Dieus j'atteste que Mohammed est le Prophète de Dieu ! Vene-t à la prière y vene7L à la prière ! Vene^ au temple du salut ; vene^ au temple du salut ! Grand Dieu! grand Dieu! Il n'y a point de Dieu sinon Dieu. C Le but de ces répétitions est de donner plus de force et de vigueur à l'invitation que fait le Muezzinn au peuple, d'abandonner en ces heures consacrées au culte de l'Eternel, (i) Allah'u ekber ! Allait u ekber! AllaKu ekber l Allah'u ekber! Esch'hed'u ennèla ilah'i iVAllah; esch'hed'u ennè la ilah'i d'Allah! Esch'hed'u enné Mohammed ressouVullah; esch'hed'u cnné Mohammed ressouV ullah ! Hayyè afes-salath ; hayyè al'es-salath ! Hayyè al'el-felahh ; hayyi al'el-felahh ! Ve Allah'u ekber , ve Allah'u ekber ! La ilah'i W Allah ! COÏÏE RELIGIEUX, m toute occupation étrangère, toute affaire civile, tout objet mondain, pour s'adonner uniquement à la méditation , à la prière, à la pénitence. UEzanti commence et finit par le nom de l'Eternel, pour faire voir qu'il est le commencement et la fin de toute chose, et que l'homme ne doit rien entreprendre ni achever qui n'ait pour objet l'honneur et la gloire de son nom. Cette annonce doit être la même pour les cinq heures canoniques, excepté celle du matin, où le Mue^inn doit ajouter après les paroles , Vene^ au temple du salut, celles-ci : La prière (1) est à préférer au sommeil y la prière est à préférer au sommeil. C. On en est redevable au zèle et à la piété de Bilal Habeschy : un jour qu'il annonçoit XEzann de l'aurore dans l'antichambre même du Prophète , Aischë lui ayant dit, tout bas derrière la porte, que l'Envoyé céleste reposoit (i) Es'salât h7 u khayrunn minn en-newm , es" salatiïu khayrunn minn en-newm. 112 CODE RELIGIEUX, encore, ce premier desMuezzinnsajouta alors à la première formule ces paroles : La prière est à p/tférer au sommeil. Le Prophète à son réveil y applaudit, et ordonna en même temps à Bilal de les insérer dans tous hsEzanns du matin. UE^a/in est consacré aux seules heures canoniques où commencent les cinq Namazs du jour. L'annonce publique n'a lieu pour aucune autre prière , pas même pour celle des deux fêtes de Beyram. Si par méprise on annonce YE^ann avant l'heure canonique, on est tenu de le répéter à l'heure qui lui est-destinée. Toutes les paroles doivent être chantées, mais lentement et avec gravité, celles sur-tout qui forment la profession de foi. Le Muej^inn doit les prononcer clairement; plus attentif à l'articulation des mots qu'à la mélodie de sa voix, il doit mettre dans son chant des intervalles et des pauses, et ne CODE RELIGIEUX. n3 ne pas en précipiter les paroles , pour qu'elles soient distinctement entendues du peuple. Rien ne doit le distraire ni l'engager à interrompre son office. Pendant tout YE^ann il doit être debout , avoir les oreilles bouchées avec l'un des doigts de chaque main , et la face tournée, comme dans la prière, vers le Keabé de la.Mecque. En proférant ces paroles , Vene^ à la prière, vene\ au temple du salut, il doit tourner le visage à droite et à gauche , parce que son invitation est censée adressée à toutes les nations du monde, à l'univers entier. En ces momens le peuple auditeur doit réciter tout bas le Tehhlïl. C. Le voici : Il n'y a point de force (i)^ il n'y a point de puissance y si ce n'est en Dieu , en cet Etre suprême , en cet Etre puissant. (i) JVe la hawlé ve la couweté illa FillaK'il-aUy'il â[im. Tome IL H La pureté légale est nécessaire an Mue^inn pour qu'il puisse s'acquitter dignement de cet office. Comme on^ prononce le saint nom de Dieu, il est indispensable d'apporter dans cet exercice les mêmes dispositions que dans la prière Nama{. Une souillure mineure n'altéreroit cependant pas la validité de Y Epatai ; mais ce seroit un acte blâmable et répugnant aux jeux de la re~ ligion. Il en seroit autrement si lasouit lure étoit majeure ; YE\ann alors ne seroit plus qu'un acte invalide, et de-vroit être renouvelé par un Mue^rlnn en état de pureté légale. UEr^ann cesse également d'être valide , s'il est annoncé, ou par une femme, puisque la voix de la femme ne doit jamais être ouïe du public, ou par un homme en démence, ou par un homme dans l'ivresse , ou par un vieillard dé- crépit, parce que la raison chez eux est trop affoiblie ou dégradée. Le Mue^nnn doit aussi être en âge de majorité , doué de vertu, de science et de doctrine , attendu que son office, qui a été exercé plus d'une fois par le Prophète lui-même , est des plus nobles, des plus augustes , des plus saints. C. Les vices de la naissance, ni les défectuosités naturelles, n'excluent personne de cet office ; de sorte que l'homme de condition serve , l'Arabe Nomade » l'aveugle , le bâtard , etc. peuvent s'en acquitter sans opposition légale. Ceux qui les premiers entendent la voix du Mue^rinn, doivent aussitôt en prévenir les autres, pour que personne ne manque l'heure de la prière Ndma^ Le fidèle qui a saisi distinctement les. paroles de YE^anh , peut se dispenser de les répéter ; mais celui qui n'est pas Hij n6 CODE RELIGIEUX, à portée de les entendre, seroit obligé de réciter, non-seulement YE^ann, mais encore Ylkamétli, avant de s'acquit-ter de la prière qu'il feroit en son par, ticulier. Article 2. De /Mkameth. Ulkameth n'est qu'une simple répétition de YErann, à laquelle le Mue?^inn lui-même est tenu avant toute prière faite en commun. 11 doit seulement, après les paroles : Vcne^ au temple du salut, ajouter celles-ci : Certes, tout est disposé pour la prière; et cela pour indiquer que Y Imam est déjà placé à la tête de l'assemblée , et prêt à commencer le Nama^. C. On doit réciter cet Ihamelh de suite, et toujours à haute voix, mais sans chant et sans pause. Enfin au moment que le Muezzinn profère ces paroles : Venez à la prière Y Imam et CODE RELIGIEUX. 117 toute l'assemblée doivent se lever sur pied ; et au moment qu'il articule celles-ci : Certes y tout est disposé pour la prière y Cad-cameth-us-salath , on doit la commencer. Article 3. De la Prière Namaz en commun. Quoiqu'il soit permis au fidèle de faire seul et en son particulier la prière Nama^, dans les cinq heures canoniques , il est cependant plus louable , et même d'une obligation imitative, de s'en acquitter en corps d'assemblée, soit à la mosquée, soit ailleurs, pour montrer aux autres que l'on est véritablement du: nombre des çroyans , et pour leur donner en même temps des exemples de vertu et d'édification. Ainsi nul fidèle ne doit s'en dispenser qu'en cas d'empêchement légitime. Un Nama^ en commun ne doit jamais avoir lieu que sous les auspices et la direc- H iij n8 CODE RELIGIEUX, tion d'un Imam placé à la tête de rassemblée, Djémaâth. C. Ces Imams doivent être les plus distingués de toute l'assemblée, par leur instruction dans tout ce qui concerne le Namaz et le culte divin , et par leurs talens pour la musique vocale et la lecture du Courann. Ils doivent encore être supérieurs aux autres par la piété, l'âge, l'éducation, la prestance, la beauté, Ja naissance, Ja modestie , et la propreté des vêtemens. Les premières de ces qualités doivent prévaloir graduellement sur les autres; et si differens sujets se trouvent à-la-fois les posséder au même degré, l'assemblée a pour lors la liberté de choisir parmi eux Ylmani qu'il lui plaît. L'homme de condition serve, l'Arabe Nomade , l'aveugle, le vicieux , le dissolu et le bâtard, peuvent à la rigueur remplir aussi cet office : mais ce seroit toujours une chose blâmable aux yeux de la religion attendu que l'esclave est méprisable par sa condition; que l'Arabe Nomade, né et entretenu dans la campagne, est censé avoir croupi dans l'ignorance ;'qùe l'aveugle n'est en état ni de se tourner par lui-même vers le Keabé, ni de se garantir des souillures qui font perdre au fidèle la pureté légale; que le vicieux n'est pas observateur fidèle de la loi ; que le dissolu est un transgresseur des préceptes de la morale et de la religion ; qu'enfin le bâtard manquant de père légitime, est censé avoir été négligé dans son éducation et dans l'enseignement de la doctrine. L'aveugle cependant seroit le moins blâmable de tous, parce que sa défectuosité n'est qu'un accident de la nature , et que d'ailleurs le Prophète l'a autorisé par son exemple , lorsque dans une de ses absences de Médine , il y laissa pour son vicaire Vm- Mehtoum} et une autre fois Ghassan ibn-Malik y tous deux privés de la lumière. C'est à Y Imam à commencer la prière, en entonnant à haute voix le Tekbir : Allah'u ekber, Dieu très-haut, etc. C. Il doit élever en même temps la voix et les mains pour annoncer au peuple le commencement du Namaz y afin que ce moment H iv i2o CODE RELIGIEUX, ne puisse échapper ni aux sourds ni aux aveu, gles qui scroicnt dans le corps de l'assemblée Tout le reste de la prière doit se faire également à haute voix, dans les tfl. ma^s du matin, du soir et de la nuit connue dans l'office public des vendredis et des deux fêtes de Beyram. Mais la seconde et la troisième prière du jour doivent se dire à voix basse. \\ n'est permis au peuple de répondre à haute voix que Y Amen, Aminn. VImam doit être attentif à réciter lentement le Courann clans le premier rik'ath de la prière , mais particulièrement dans celle du matin, afin de donner par-là un peu plus de temps aux fidèles pour se réunir dans le temple du Seigneur. Le peuple doit écouter en silence cette récitation du Cou/ann., et ne pas répéter les mêmes paroles ; Y Imam, doit même se régler sur l'état et la position de l'assemblée , et se dispenser dans le besoin de faire une longue récitation du Courann. Le Nama^ fait par une assemblée de femmes , sous la direction d'une autre, en qualité Ci Imam, seroit un acte blâmable aux jeux de la religion, quoique d'ailleurs valide et légal. Dans ce cas il faut toujours que la femme qui préside à la prière, se place, non pas à la tête, mais dans le centre de l'assemblée. La même chose doit s'observer encore dans les assemblées où les hommes sont presque nus ( 1 ) ; leur Imam doit se placer dans le centre, pour dérober , autant qu'il est possible, sa nudité aux jeux des autres. Les femmes ne doivent point prier avec les hommes , encore moins se ( 1 ) Comme il arrive chez les peuples Nomades et chez les habitans des climats chauds. 122 CODE RELIGIEUX, trouver avec eux sur une même ligne, de peur que leur présence ne porte quelque atteinte à la pudeur et à la vertu. C. Il n'est permis qu'aux femmes âgées d'y assister, et seulement dans les prières de la première , quatrième et cinquième heures canoniques; jamais à celles de la seconde ni de la troisième; les hommes vicieux et irréligieux étant ordinairement sur pied vers ces' heures-là. V. Les Imaméinns permettent qu'elles assistent également aux cinq prières du jour ; la vieillesse, disent-ils , n'étant pas exposée à ces atteintes criminelles. Si à l'heure de la prière il ne se trouve qu'un seul fidèle , alors Y Imam doit le placer à sa droite , et s'acquitter dans cette posture de la prière Nama^. C. C'est à l'imitation du Prophète , qUj plaçoit ainsi à sa droite Ibn-Abas toutes les fois qu'ils étoient seuls, et qu'ils s'acquittoient ensemble du Namaz. Mais s'il y en a davantage, ne fussent-ils que deux, alors ils sont censés composer l'assemblée, et Y Imam est obligé de se placer à leur tête. Après Y Imam, les premiers rangs doivent être occupés par les hommes ; les seconds par les enfans, les troisièmes par les hermaphrodites , et les quatrièmes par les femmes. Si un homme et une femme , qui seroient encore dans l'âge des passions , se trouvent rangés sur la même ligne l'un à côté de l'autre, sans que rien les sépare , leur prière ne sauroit être valide. En général, toutes les fois que les deux sexes se trouvent réunis dans un même lieu, c'est de Y Imam que dépend alors la validité de la prière pour l'un ou pour l'autre, ou pour tous les deux ensemble, suivant qu'il dirige ! son intention , ou en faveur des hommes , ou en laveur des femmes, 124 CODE RELIGIEUX, ou en faveur des uns et des autres. C. Cette intention de Xlmcm n'est requise, à proprement parler , que dans les prières quotidiennes, qu'il est libre au fidèle de {'aire en commun , ou en particulier, et non dans la prière publique des vendredis, ni dans celles des deux fêtes de Bejram , parce que celles-ci ne pouvant jamais être laites qu'en corps d'assemblée , les femmes sont censées y participer comme les hommes, sans avoir besoin de l'intention explicite de Xlmuni. La prière de -l'homme qui auroit pour Imam une femme , n'est ni bonne ni valide, non plus que celle du majeur qui auroit pour Imam un mineur; de l'homme pur, qui auroit pour Imam un homme impur; de l'homme docte, qui auroit pour Imam un homme ignorant; de l'homme vêtu, qui auroit pour Imam un homme nu ; de l'homme sain , qui faisant en réalité les inclinations et les prosternations requises , auroit pour CODE RELIGIEUX. 12S Imam un homme malade, qui ne s'en acquitterait qu'en symbole, qu'avec le mouvement de la tête ; de l'homme enfin qui faisant lui-même la prière prescrite pour chacune des heures canoniques , auroit pour Imam un fidèle qui feroit alors une prière ou satisfac-toire ou de surérogation. C. Cette diversité de prières 11'est pas valide, parce que l'unité d'oraisons requise dans les iidèles est censée exiger d'eux une communion d'esprit et de cœur, pour faire tous ensemble et dans le même temps .une seule et même prière. Cependant le Namaz que l'on feroit sous Ylmamélh ou d'un Musulman esclave, ou d'un étranger qui auroit embrassé l'Islamisme sans une véritable conviction, est réputé bon et valide, mais toujours blâmable aux yeux de la religion. V. L'Imam Schafiy admet l'entière validité de toutes ces prières. Si Y Imam n'est pas lui-même dans un état de pureté parfaite , sa prière , 126 CODE RELIGIEUX, comme celle de toute l'assemblée, n'est ni bonne ni valide , et exige d'être renouvelée. Tout Nama^ une fois commencé , doit être continué et achevé sans aucune interruption : cependant la prière faite en commun, étant bien au dessus de celle que l'on feroit en particulier, le fidèle qui en auroit commencé une, pourroit l'interrompre afin de se réunir à l'assemblée, supposé qu'il fût encore au commencement de sa prière, c'est-à-dire, au premier rik'ath, et avant d'avoir fait aucune prosternation. Mais s'il en a fait, il doit alors s'acquitter de deux rik\iths en entier,, lesquels font wxNama^ complet; après quoi s'interrompaut lui-même , il peut se réunira l'assemblée, et suivre Xlmam 9 pour continuer la prière qui, dans ce cas , n'est à son égard qu'un Nama? surérogatoirè. Quoique l'obligation de / faire le Nama7_ en corps ne soit que de pure pratique imitative , cependant si un fidèle se trouve dans une mosquée au moment même de l'annonce, Eiann, d'une des cinq heures du jour, il feroit mal de quitter le temple, et de ne pas s'acquitter en corps de ce devoir important de la religion. G. Ce seroit une action très-blâmable , à moins que ce ne fut un fidèle attaché au service d'une autre mosquée, et par-là obligé de se rendre à ses fonctions, tel qu'un Imam y un Muezzinn , un Sclieyldi > etc. Enfin tout fidèle qui arrive au temple avant l'heure du Namaz canonique, peut faire en attendant, des Namazs surérogatoires. Article 4. Des Souillures qui peuvent survenir au milieu de la Prière et qui exigent le renouvellement des purifications y Hadéss f'is-salath. Le fidèle qui se trouve involontairement atteint d'une souillure non 128 CODE RELIGIEUX, substantielle au milieu de sa prière est obligé de la suspendre dans le m0-ment même , pour faire son ablution, et rentrer en pureté légale. S'il prie en particulier, il est le maître de poursuivre son Nama^ ; mais il seroit plus louable de le recommencer. Si c'est en commun, il doit continuer avec le reste des fidèles, pour ne pas se séparer de leur communion. A l'égard de Xïmam , s'il se trouve dans un état de souillure , il doit aussitôt , pour ne scandaliser personne, porter la main au visage, comme s'il lui survenait un saignement de nez. Dans le même instant il doit, par un signe de l'autre main, inviter le plus docte et le plus vertueux des assis tan s à venir prendre sa place , pour que la prière ne soit pas interrompue : rétabli dans l'état de pureté par l'ablution, il CODE RELIGIEUX. 129 il peut alors continuer le Nama^, en se plaçant parmi les fidèles qui forment l'assemblée. En cédant sa place, il doit néanmoins la donner par préférence à l'un de ceux qui ont assisté au commencement de la prière ; autrement, la personne qu'il auroit choisie seroit à son tour obligée de céder sa place , parce qu'elle ne pourroit donner à l'assemblée le salut de paix qui termine la prière. C. On peut ranger en trois classes tous les Musulmans qui font le Namaz en commun. Ceux de la première, appelés Mudrik , sont les fidèles qui y assistent depuis le commencement jusqu'à la fin : les seconds, appelés Lahhikj sont ceux qui arrivent tard, et qui trouvant la prière déjà commencée, se joignent cependant à l'assemblée, pour faire avec elle ce qui reste encore de rik'aths > s'arrêtent au salut de paix qui termine le Namaz , et Tome II. I l'un et l'autre n'étant nullement admis au milieu du Nama^; 8°. le boire et le manger ; 90. l'action de tousser, d A moins que ce ne soit l'effet naturel dune indisposition, ou pour dégager le go, sier, ou pour redresser Y Imam y en cas d'erreur dans son office, dans la récitation du Courann y etc. io°. L'action de souffler tout autre que Y Imam , ce qui est une sorte d'enseignement toujours déplacé au milieu de la prière. C. On ne doit pas même se presser de souffler Y Imam y pour lui donner le temps de se remettre ; et s'il avoit déjà récité trois versets «. du Courann } ce qui suffit pour un Namaz , il feroit beaucoup mieux alors de poursuivre la prière , de continuer les rik'aths y que d« recourir à la mémoire des assistans; Xlmam peut même passer à un autre chapitre du Courann, qu'il posséderoit mieux par cœur. Le fidèle qui n'est pas du même Namaz , qui ne la fait pas en commun avec l'assemblée, ne doit pas souffler ; et si Y Imam ne se remet que par lui, la prière, dans ce cas, n'est valide ni pour lui ni pour le corps de l'assemblée. .11°. la lecture du Courann. C. C'est-à-dire, si le fidèle fait sa prière, non pas de mémoire, mais en lisant dans le livre du Cour*ann} ce qui est envisagé d'un coté comme une lecture d'enseignement, et de l'autre comme une imitation des Juifs et des Chrétiens, que l'on ne doit jamais suivre dans aucune des pratiques du culte. V. Les Imaméïnns ne réprouvent, pas cette lecture au milieu de la prière. 12°. Enfin toute œuvre, toute action considérable , AmeVul-kessir. C. C'est-à-dire, lorsque le fidèle se permet, au mileu de la prière, un acte qui ne se fait ordinairement qu'avec les deux mains, comme, par exemple, l'action de lier ou de délier son turban, de changer d'habit ou de chemise, de décocher une flèche, de prendre un voile pour se couvrir la tête et le visage ( article qui concerne les femmes). Il en est de même lorsqu'on réitère trois ibis de suite une chose qui se fait ordinairement avec une seule main : tel est l'acte de jeter des pierres , d oter ou de mettre son turban, de se procurer du frais avec un éventail, de se gratter la tête ou toute autre partie du corps, de s'arracher des cheveux , de tuer des insectes, etc. Dans tous ces cas, l'acte répété trois fois de suite sans interruption, fait évanouir la validité de la prière; mais si c'est par intervalle, le Namaz n'en souffre pas. Différentes autres actions opèrent aussi le même efïèt; savoir, lorsque le fidèle marche, au milieu de la prière, et fait trois pas; lorsque faisant sa prière à cheval, etc., il bat trois fois sa bête dans l'espace d'un îiliath-lorsqu'il jette les yeux sur le Cour'ann ou sur tout autre livre, et distrait par-là son esprit de l'attention qui est due au Namaz j lorsque la femme allaite son enfant, quand même il n'auroit sucé que trois fois; lorsqu'elle interrompt sa prière, et se lève, non pour fermer , mais pour ouvrir la porte de la chambre; lorsqu'au milieu de son Namaz elle reçoit la plus innocente caresse de son mari. Article 6. Des Souillures qui surviennent au milieu du Namaz , et qui exigent le renouvellement soit des Purifications y soil de la Prière. Tout fidèle qui, au milieu de la prière , seroit atteint d'une souillure ou substantielle ou non substantielle, mais-volontaire, est obligé de renouveler et ses purifications et sa prière. C. Le sommeil spontané , des éclats de rire, des attaques de démence ou d'épilepsie, sont également autant de souillures qui exigent le renouvellement de ces actes. Article 7. De tout ce qui est blâmable dans la Prière, Ma yukrehh Pis-salath. Indépendamment des circonstances qui invalident la prière , il en est aussi qui, sans opérer cet effet, n'en sont pas moins blâmables aux jeux de la loi. Ainsi le fidèle pèche contre la reli, gion, si, au milieu de son Nama^ en commun ou en particulier , il se distrait en touchant son habit, son corps, ses doigts, etc. ; s'il les fait claquer; s'il cligne les jeux ; s'il tourne la tête à droite ou à gauche; s'il porte la main sur le côté; s'il donne ou rend le salut à quelqu'un , sur-tout avec la main; s'il lève les jeux vers le ciel ; s'il compte avec les doigts les versets du Courann ou autres prières qui se répètent souvent ; s'il s'assied , la plante des pieds contre terre, et les genoux contre le ventre, ou bien les jambes croisées de côté, à droite ou à gauche, à moins que ce ne soit pour cause d'infirmité ; si en faisant les prosternations il relève les manches de son habit, se couche entièrement sur les bras, se frotte le front contre la terre; s'il a la tête nue , les cheveux épars et flottans sur les épaules ; s'il est en habit de nuit ou en habit négligé ; s'il en jette les bords sur sa tête ou sur ses épaules ; si l'étoffe de son vêtement représente des figures d'hommes ou d'animaux ; s'il se place de façon à avoir de ces figures au dessus de la tête , devant soi ou à ses côtés; s'il se met hors de la ligne, dans un endroit élevé, ou séparé des autres fidèles, sur-tout si c'est dans la vue de se distinguer ; enfin s'il fait la prière face à face devant quelqu'un. C. Le fidèle doit être scrupuleusement at- i38 CODE RELIGIEUX, tentif à tous ces points. Si dans la prière il porte quelquefois les regards à droite ou à gauche, mais sans tourner la tête , la chose devient indifférente , attendu l'exemple d\\ Prophète, à qui il arrivoit souvent pendant son Namaz de jeter les jeux sur ses disciples. Tenir la main sur le coté est une action réprouvée , parce que ce seroit imiter le démon, qui étoit dans cette attitude lorsqu'il fut chassé du ciel. Les autres postures sont indécentes; d ailleurs l'air de gravité et de hauteur qne donnent quelques-unes de ces positions, est contraire à ce recueillement et à ce respect profond dont le fidèle doit être pénétré au milieu du culte qu'il rend à son Créateur. Avoir la tète nue seroit également une chose indécente , à moins que ce ne fût par un sentiment de la plus grande humilité. Quant aux cheveux, on doit les tresser ou les lier, et les relever sur la tète comme les femmes. La réunion des fidèles par rangs et par lignes, sans égard à l'état des personnes, est absolument nécessaire , vu l'esprit de communion dans lequel on doit s'acquitter du culte public, et l'égalité des rangs et des conditions aux yeux de la Divinité. L5Imam lui-même , qui n'est placé à la tête de l'assemblée que pour la diriger dans les pratiques du Namaz y et présider à cet acte auguste de la religion, ne doit jamais se placer, soit à la mosquée,soit ailleurs, qu'au niveau des autres fidèles, jamais plus bas ni plus haut. On doit enfin éviter les figures d'hommes et d'animaux. Cependant si elles sont petites, imperceptibles à l'œil, si elles sont placées derrière le fidèle, si elles ne présentent que des têtes.d'animaux, un paysage, des fruits, des fleurs, des arbres , la chose seroit sans conséquence. Il en seroit de même des figures d'un tapis sur lequel le Musulman feroit sa prière , pourvu quelles ne se trouvassent pas dans la partie où il pose sa tête en faisant ses prosternations. Il est également très - blâmable de passer devant un fidèle occupé de sa prière , sur-tout si Ton met le pied sur la partie du tapis où Ton doit poser la 140 CODE RELIGIEUX, tête dans les prosternations. Le péché ne pourroit être expié que par iUle pénitence de quarante jours de jeûne et de retraite. C. Lorsque le fidèle fait la prière en plein champ , il doit avoir la précaution de poser devant lui, ou une lance, ou une pique, ou un bâton de la longueur pour le moins d'un pic, et de la largeur d'un doigt; il doit les planter dans la terre si elle est molle , autrement les poser devant lui pour se séparer des passans, et les avertir de se détourner, parce que, durant toute sa prière, le Keabé de la Mecque doit faire le seul objet de ses regards et de son attention. Cependant ce signal doit toujours être un peu de côté. A son défaut on doit écarter les passans par un mouvement de la main, de la tête ou des yeux, ou bien en récitant tout haut le Tessbih, Que ton nom soit exalté j o grand Dieu ! On peut encore avoir devant soi le livre du Cour'ann • un sabre suspendu , une chandelle, une lampe, etc. Article 8. Des Prosternations satisfac* toires , Sedjoud'us- sehhw. Ces prosternations ont pour objet de satisfaire à Dieu pour les fautes ou les erreurs que Ton auroit commises au milieu de la prière. Le fîdèfe qui s'en seroit rendu coupable , seroit obligé d'en faire deux à la suite du Nama^ , soit avant, soit après , soit même entre les deux saluts de paix. On n'est jamais tenu qu'à un seul acte satisfactoire, si, dans une même prière on commet plus d'une faute : celle de Ylmam devient commune à toute l'assemblée, et l'oblige à la même réparation. C. Le fidèle est tenu à ces deux prosternations , si dans la récitation du Courann il n'observe pas les mouvemens prescrits; si au lieu d'une inclination de tête il en fait deux; si dans les endroits où il faut réciter le A 142 CODE RELIGIEUX. Courann* voix basse ou à haute voix, être assis ou debout, il fait le contraire ; si avant l'introït Fatihha, il récite tout autre chapitre An Courann; s'il omet quelqu'une des prières requises; s'il fait plus ou moins de deux prosternations dans chaque rik'ath ; enfin s'il intervertit en quelque chose l'ordre et la méthode prescrite dans le Namaz. Article 9. De la Prière Dominicale des Voyageurs, Salath'ul-mussafir. La religion accorde différentes dispenses aux Musulmans voyageurs. C. On est réputé voyageur, du moment que l'on sort de la ville dans le dessein de faire un voyage pour le moins de trois jours ; ce temps se mesure sur la terre par la marche ordinaire du chameau, et sur mer par un vent modéré. Ainsi ce n'est ni par la célérité, ni par la lenteur de la marche, que l'on peut acquérir ou perdre la qualité de voyageur, et par-là profiter ou non du bénéfice de la loi. Le voyageur, sur-tout lorsqu'il est CODE religieux. m3 clans le cas de se presser et de faire diligence, n'a pas simplement la faculté de réduire les prières qui sont de quatre rik'aths, à deux seuls, il y est même obligé. V. L'Imam Schafiy et l'Irnam Hannbel ne donnent pas celte réduction pour obligatoire. Or , si au lieu de deux rik'aths , le voyageur en faisoit quatre, les deux premiers formeroient son Àrama? , et les deux autres n'auroient jamais que le caractère d'une prière surérogatoire. C. Acte très-répréhensible, et qui rendroit le fidèle coupable aux veux de la Divinité, à cause de ses doutes sur la réalité d'une dispen-sation charitable accordée par l'Eternel à tous les croyans voyageurs. Il peut aussi se dispenser de réciter après l'introït Fatihha , aucun autre chapitre du Courann , comme il est maître de s'acquitter, ou non, de tout 144 CODE RELIGIEUX, ce qui n'est que de pure pratique iniita-tive. Le voyageur est en même temps dégagé de l'obligation du jeûne canonique en Rama^ann , de la prière pu, blique des vendredis, et de l'oraison paschale dans les deux fêtes deBeyram, ainsi que du sacrifice paschal, de la prière Tekbir-Teschrik , et de l'ablution des pieds , remplacée par la inadéfac-tion de la chaussure. Ces dispenses ont lieu pendant tout le temps de son voyage, à moins qu'en entrant dans une ville ou dans un village , il n'ait l'intention d'y demeurer au moins quinze jours ; car alors il est constitué en demeure fixe , Moukim, et déchu de toute dispense accordée à l'homme qui quitte sa patrie pour voyager. C. On distingue trois sortes de patries; la patrie originaire, la patrie de domicile, et la patrie C.ODE RELIGIEUX. 14S patrie de voyage (1). La première est le pays natal, ou bien le pays où l'on se marie ; la seconde, le pays où l'on a intention de demeurer , ne fût-ce que quinze jours; et la troisième , le pays que l'on traverse , même dans le dessein d'y séjourner, pourvu que ce soit moins de quinze jours. De ces trois sortes de patries, les deux premières seules opèrent la conversion du voyage en demeure fixe ; ce qui est toujours soumis à l'intention du fidèle. Il y a aussi trois sortes de voyages; le religieux , le licite , et l'illicite ou criminel (V). Le premier est celui que prescrit la loi même, relativement au pèlerinage et aux expéditions militaires; le second a pour objet des choses civiles et temporelles , telles que le commerce, les arts, les métiers, les spéculations, les commissions ; et le troisième est celui qu'entreprennent les voleurs , les brigands , les rebelles, et les esclaves transfuges. Ces trois classes d'hommes ont également droit (1) JVrtar.n-assly , &ratann-ik.imcth , Jfatdnn-sefcr. (a) Sifer-uitth., Sefcr-mubahh , Séfcr-nSssiyéth. Tome H. K 146 CODE RELIGIEUX. aux dispenses accordées par la loi aux voyageurs, vu le dispositif de ce précepte canonique , qui est en termes généraux. V. L'Imam Schafy en excepte absolument ceux de la troisième classe. Mais s'il se propose de résider moins de quinze jours, s'il demeure en pleine campagne, hors de tous lieux habités, il ne sauroit alors perdre la qualité de voyageur. Il ny a que la Mecque et Mina qui fassent une exception à cette loi générale,parce que l'homme en voyage qui auroit l'intention de demeurer dans l'un ou l'autre de ces lieux, quand même ce seroit moins de quinze jours , ne pourroit reprendre la qualité d'homme en demeure fixe , qu'aprèsy avoir passé une nuit. Au défaut de toute intention de résidence, le voyageur qui diffère^ roit.du jour au lendemain son départ d'une ville, d'une cité, d'une bourgade, GODE RELIGIEUX. 147 pourroit y rester des mois , des années entières , sans que sa demeure fît évanouir en lui la qualité d'homme en voyage. C. Ibn-Omtr fut dans ce cas lors de son expédition dans YAzerbaïdjeann, où il resta plus de six mois, ainsi qu'^Icamé-Ibn-Càiss, qui passa plusieurs années dans le Kkarzém , et diffërens autres disciples du Prophète, qui restèrent à Suez plus de neuf mois, toujours en qualité de voyageurs. Cependant l'homme de guerre qui se trouve en pays ennemi , ou fixé dans un corps d'armée, assiégeant une ville , est toujours réputé voyageur, quand même il auroit l'intention d'y demeurer. C. C'est que tout pays ennemi , tout pays uon Musulman, Dar-karb9 ne peut jamais être regardé comme une demeure fixe et permanente pour un Musulman. Les peuples Nomades qui vivent sous » Kij 148 CODE RELIGIEUX des tentes en pleine campagne , sont également réputés des hommes en voyage , à moins qu'ils ne forment l'intention de demeurer où ils se trouvent, et qu'ils n'y fassent une résidence pour le moins de quinze jours. V. Quelques Imams les regardent clans tous ces cas comme des hommes en voyage perpétuel. Cette intention en général n'est valide que pour le temps présent: elle n'a aucun effet ni pour le passé ni pour l'avenir. Toutes les classes de la société des fidèles ont la liberté d'en former à leur gré , et de se constituer ou hommes en voyage , ou hommes en demeure fixe , excepté les esclaves , les femmes et les soldats. C. Vu le défaut en eux de toute volonté libre , par cet état de dépendance et de soumission entière auquel ils sont tous également tenus, et les esclaves envers leurs patrons, et les femmes envers leurs maris , et les soldats envers leur prince , leur général, leur chef. Dans les prières en commun , tout-voyageur est cependant obligé de se conformer à Y Imam qui préside l'assemblée , et de faire comme elle le Namaçen qualité d'homme en demeure fixe. Si au contraire un fidèle en demeure fixe fait son Nama^ avec un corps de voyageurs., il est toujours obligé de compléter la prière en son particulier , par les autres rilcaths nécessaires. C. C'est pourquoi un Imam voyageur doit être attentif à annoncer à l'assemblée qu'il est en voyage , afin que les fidèles demeurans aient ensuite à satisfaire au reste du Namaz: c'est à quoi le Prophète ne manquoit jamais toutes les fois qu'il passoit à la Mecque, et qu'il s'acquittoit dans cette cité des fonctions d'Imam en qualité de Mussajir , d'homme en voyage. , K iij Enfin le voyageur rentré clans la condition d'homme en demeure fixe n'est tenu à satisfaire aux Nama^s qu'il auroit omis dans ses courses, qu'à titre de voyageur , c'est-à-dire ; pardeux seuls rik\iths. Il en est de même pour la prière de l'heure-canonique pendant laquelle il auroit entrepris son voyage, mais non de celle pendant laquelle il seroit rentré dans son premier état. L'omission de ce Nama^ exige d'être réparée par le fidèle à titre d'homme en demeure fixe. C. Il est de principe que l'état légal où se trouve le fidèle , non pas au commencement, mais à l'expiration de toute heure canonique, détermine le genre de prière satisfactoire à laquelle il est tenu par l'omission du Namaz de cette même heure. Article io. De la Prière Dominicale des Malades, Salath'nl-mériz. Un malade hors d'état de se tenir CODE RELIGIEUX. 1S1 debout, ou qui auroit lieu de craindre d'aggraver son mal par le mouvement, seroit libre de faire son Nama^ assis , et de s'acquitter dans cette posture , des inclinations et des prosternations requises. Si ces pratiques étoient encore trop pénibles , il pourroit alors les faire par des signes de la tête, Ima, en observant toutefois de marquer les différences qui se trouvent entre les inclinations et les protestations : c'est pour cela qu'il ne faut jamais rien tenir contre son visage. . ■ C. Cette loi a.été donnée par le Prophète , qui , allant un jour visiter un malade, et l'ayant trouvé assis , la tête penchée, faisant sur un carreau les inclinations et les prosternations du Namaz, le lui retira aussitôt, et ordonna au malade de faire par signe , dans l'une et l'autre pratique, ce que font en réalité les fidèles, dans l'état de santé. Si le malade a encore de la peine à. K iv \5i CODE RELIGIEUX, faire la prière assis , il peut s'en acquitter couché sur le dos ou sur le côté droit, mais toujours le visage et les pieds tournés vers le Keabé de la Mecque ,> et la .tête posée sur un coussin , afin de pouvoir marquer et indiquer, par des mouvemens de tête, les mêmes inclinations et les mêmes prosternations ; et s'il n'est pas en état de faire ces mouvemens , il ne doit y suppléer par aucun autre, mais se dispenser de la prière , dont l'obligation s'évanouit à son égard , comme à celui d'un homme privé des deux bras ou des deux pieds. C. Il est cependant louable et méritoire au malade de suppléer au Namaz par autant de prières satisfactoires , aussitôt après son rétablissement. Si un malade est en état de faire la prière debout, sans pou voir néanmoins s'acquitter des inclinations et des prosternations \ il vaut mieux qu'il la fasse en entier , assis. Si un homme se sent indisposé au milieu de la prière , il peut la continuer dans telle posture que son état peut lui permettre ; de même si un malade se trouve mieux au milieu de sa prière , il peut également la continuer debout, quoiqu'il l'ait commencée assis.: Mais s'il s'en.acquittait avec les mouvemens de la tête , il doit la recommencer. Dans tous les cas , le fidèle qui se trouve à bord d'un navire sous voiles, y peut faire la prière assis. Article* i r. De la Prière salisjactoire , Caza'eLfèwaïth. ."' -.'a éiAh I.// ssv i75 - • Vr:if Tout ffajjiaz qui n'est pas fait dans son heure, canonique, doit être acquitté dans un autre moment du jour, ce qui constitue la prière satisfactoire. En cas d'omission de plusieurs Namazs, il faut j satisfaire suivant Tordre dans lequel ils, auroient dû être faits , c'est-à-dire , en commençant par les premiers, et finissant toujours par les derniers. Il faut même s'acquitter du Nama^ que l'on auroit omis, avant d'en faire aucun autre pour l'heure canonique où l'on se trouve. C. Si donc un fidèle qui auroit omis la prière dii matin , commence par celle de midi, cette prière n'est pas valide ; et il .-est obligé de.sa-tisfaire d'abord à celle du matin,et de renouveler ensuite celle de midi. On doit observer cette loi jusqu'à la concurrence de cinq Na-màzs consécutifs! Si le fidèle en fait plus dans les heures qui suivroient celle où il auroit omis son Namaz il n'est plus obligé à les renouveler; mais cette inexactitude dans l'ordre prescrit pour s'acquitter de ce premier des devoirs de la religion, lui fait perdre le caractère de Sahhià-Ter/ïb ( Observateur fidèle et méthodique des heures canoniques}** lr. Les Imamcinns n'admettent la validité d'aucun Nama^a. la suite de celui que l'on auroit omis , et exigent en conséquence que le fidèle les renouvelle tous 7 quel qu'en soit le nombre, après avoir satisfait à celui qui a été précédemment oublié. [*:£tôfol -.M.) ^ i , " Si mie femme recouvre sa pureté légale , si un mineur de l'un ou de fautre sexe atteint sa majorité y si un infidèle embrasse le Musàîmanisme . précisément dans une des cinq lieures canoniques.,. tous sont obligés au Na-mai de cette même heure , et par conséquent aune prière satisfactoire , en cas d'omission. Si dans l'espace d'une de ces heures, un Musulman, fait Son Nama^sQ rend ensuite coupable d'apostasie, e.tcentre dans la foi avant l'expiration de la même heure , il est également tenu à renouveler son Nama^ . . V. L'Imam, Schafiy n'admet .pas la nullité de la i56 CODE RELIGIEUX. prière déjà faite , et n'exige conséquemment pas qu'elle soit renouvelée. Mais si la conversion de l'apostat n'a lieu que dans un autre temps , il n'est pour lors tenu qu'à la prière de l'heure dans laquelle il seroit rentré dans la foi , sans aucune obligation de satisfaire à celles qu'il auroit omises durant son apostasie. il tî ; ':■ . J ! '■ ". ( ) ^ fa f i i :tr. '-■ : vâlii '■- ' ■' • C. C'est que le Namaz et les autres pra.ti-tiques du culte religieux , sont des devoirs imposés aux seuls fidèles, à ceux qui ont le bonheur d'être dans le sein de l'Islamisme, 9:. L'Imam Schafiy exige que le Musulman converti satisfasse à tous le Namaçs omis durant son apostasie. L'infidèle qui auroit embrassé le Musulmanisme en pays étranger,n'est pas obligé non plus à satisfaire aux Namazs qu'il y auroit omis par ignorance de la loi. V. L'Imam Enfer J'y oblige, parce que l'ignorance CODE RELIGIEUX. xBj de la loi ne fait pas , dit-il, un motif légitime pour dispenser le fidèle des devoirs de la religion , soit en pays Musulman , soit ailleurs.] Enfin tout fidèle doit se garder , autant qu'il est en lui, de manquer aux heures canoniques , nonobstant le moyen qu'il a d'y suppléer par une prière satisfactoire : ceux qui les négligent pèchent grièvement ; et ceux qui meurent avec la conscience chargée de cette dette religieuse , sont obligés à une satisfaction aumônière. C. Elle consiste à donner aux pauvres une demi-mesure , Sa > de froment pour chaque prière omise «dans son heure canonique, et à laquelle on n'a pas satisfait dans un autre moment du jour. Cette aumône doit être prise sur le tiers de l'hérédité du mort, et distribuée aux pauvres par les mains de son tuteur naturel. V. L'Imam Schafiy exige , au lieu de cette aumône, que le tuteur naturel satisfasse , par la prière même, à toutes celles que le défunt auroit omises. Observations. Pour mettre plus de précision et d'intérêt dans nos remarques, nous croyons devoir embrasser ici tous les articles de ce chapitre, et représenter dans un seul et même tableau le développement qu'ils exigent. Mohammedy pour rendre la prière Namaz plus sacrée et plus imposante à ses peuples, en fit remonter l'origine jusqu'aux anciens Patriarches, Adam , Abraham, Mojse } Jo~ ?ias et Jésus-Christ même , à chacun desquels il attribua l'institution d'une des cinq heures canoniques. Il promulgua cette loi le lendemain de son assomption prétendue. Monté au sommet des cieux, disent les docteurs , ce coryphée des Prophètes eut fe bonheur de contempler face à face l'Eternel, qui, après lui avoir révélé ses plus augustes mystères , lui donna', entre autres préceptes, celui des cinq prières du jour : c'est pour cela qu'elles sont consacrées sous le nom de Salath-nic-frouzay qui veut dire, prières d'obligation divine ; et les heures dans lesquelles on doit \ s'en acquitter , sous celui $ Eivcath-salath , c'est-à-dire, temps ou momens destinés au culte de Dieu. On ne doit pas s'étonner que ces heures soient réglées sur le cours diurne du soleil, puisque le cadran étoit la seule montre connue dans le siècle qui donna naissance à l'Isla* misme. Nonobstant l'invention des montres et des horloges , dont l'usage est commun aujourd'hui chez ces peuples, on suit toujours la même détermination solaire , qui sert de règle fixe, permanente et générale pour toutes les saisons comme pour tous les pays habités par les Mahométans. Les Arabes ne furent assurément pas les derniers à connoître et à perfectionner les montres : on n'ignore ; pas que la première horloge sonnante que l'on ait vue en Europe, fut celle que le Khaliphe Harounnl, dit Reschid> envoya en présent à Charlemagne au commencement du neuvième siècle. L'ordre des heures suivi par les Musulmans , a toujours été différent de celui des Européens. Le jour civil commençant chez eux au coucher du soleil, ce point, où se renouvellent les vingt-quatre heures du jour , marque la douzième à leurs montres et à leurs horloges dans tout le cours de l'année -de sorte que les périodes de midi et de minuit varient constamment d'heure suivant les saisons : on se règle cependant en tout temps sur le cours diurne du soleil pour les cinq heures canoniques : à cet effet , des astronomes ont, dans chaque siècle du Mahométisme, dressé des tablettes qui indiquent avec la plus grande précision les momens de ces cinq heures , selon les degrés de latitude de chaque contrée, de chaque ville, de chaque district. Ces tablettes sont, les unes annuelles , les autres perpétuelles. Les premières s'appellent Tàkwim, les secondes, Rouz-namé j ce sont de petits rouleaux de vélin ou de parchemin très-fin, qui , au moyen de simples lettres alphabétiques , indiquent à-la-fois les cinq heures canoniques , les jours de la semaine, les mois lunaires, les mois solaires, les difTé- - rentes phases de la lune, les jours de solstice, - les jours d'équinoxe, les fêtes religieuses, etc. ; toutes toutes ces époques sont distinguées ou en rouge , ou en vert, ou en or , le tout en menus caractères , dans le plus grand ordre , et avec une précision singulière. Ces tablettes astronomiques offrent aussi un synchronisme ou calcul de rencontre des jours , des mois et des années lunaires , avec les jours , les mois et les années solaires selon le v. s. Elles désignent encore les révolutions planétaires, les jours que les astrologues donnent pour heureux ou malheureux , l'influence des astres et des élémens sur le règne animal et sur le règne végétal, enfin l'heure et la minute où le cadran marque , dans le cours de toute l'année , la position de la Mecque j ce qui se détermine selon le degré de latitude de chaque ville et sa position respective avec le Keabé , comme étant le point central du culte et des adorations des Mahométans de tous les pays et de toutes les régions de la terre. Ces almanachs ou calendriers perpétuels embrassent ordinairement une période astronomique de quatre-vingt à quatre-vingt-cinq années. Le plus récent de nos jouis, et le plus T o m e IL L 162 CODE RELIGIEUX, estimé dans l'Empire, est celui de Darehdëwy, fait en 1192 (*778) ' et va jusqu'à l'année i2'/y; ce qui fait une période de quatre-vingt-cinq années lunaires. Il est tel que nous le donnons ici, planche B. Quoirju'il soit d'un usage commun et général , il sert principalement aux Muezzinns chargés de l'annonce des cinq heures canoniques ; et il n'est jamais plus consulté que pendant le Ramazan ; ony a recours, pour ne pas manquer, sur-tout dans les temps nébuleux, les momens précis où le soleil sè lève et se couche, parce qu'ils déterminent dans chaque climat la durée de l'abstinence diurne pendant tout ce mois de jeûne et de pénitence. Il n'est point de Musulman qui n'observe avec le plus grand scrupule ces instans , et ceux où commencent les cinq heures canoniques. Trois de ces heures , à ne les envisager que dans leurs rapports avec le lever , le midi et le coucher du soleil, sont absolument les mêmes dans toutes les saisons de l'année , parce qu'elles sont réglées sur le cours périodique de cet astre. Ainsi la première, ou celle CODE RELIGIEUX. i63 du matin commence toujours quarante cinq minutes avant le lever du soleil : la seconde ou celle de midi, quarante minutes après qu'il a passé au méridien ; et la quatrième , ou celle du soir, vingt minutes après son coucher. A l'égard des deux autres, dont l'une est de midi jusqu'au soir, et l'autre du soir jusqu'à l'aurore , elles commencent plus tôt ou plus tard, suivant la longueur ou la brièveté des jours. On évite soigneusement de taire la prière, ni aucun acte religieux, dans les trois temps interdits par la loi ; savoir , les quarante minutes qui suivent le lever du soleil , ou qui précèdent son coucher , et les quatre-vingt du milieu du jour, quarante minutes avant et quarante minutes après le zénith. Ces trois périodes sont indiquées sous le nom de TVakth-kirahlieth, c'est-à-dire, momens prohibés par la religion. 11 seroit difficile de se méprendre sur les heures où commencent les cinq prières du jour, parce qu'elles sont exactement annoncées au public par YEiann , qui se fait presque au même instant dans toutes les mosquées L ij 164 CODE RELIGIEUX, de l'Empire. Cet Ezann tient lieu de cloches, dont l'usage est inconnu aux Mahométans : il n'en existe ni dans les temples, ni au Sérail, ni à la cour, ni dans aucun hôtel particulier. Les Muezzinns préposés à ces annonces , excellent ordinairement, par la mélodie et les sons agréables de leur chant. Montés sur le haut des Minarets } ils entonnent Y Ezann , tournés vers la Mecque , les jeux fermés , les deux mains ouvertes et élevées, les pouces dans les oreilles. Voyez les planches 17 et 18. Dans cette attitude, ils parcourent à pas lents la petite galerie , Schurfë, qui règne autour de chaque Minaret. Deux ou quatre de ces flèches décorent toutes les mosquées: il en est peu dans l'Empire qui en aient six, comme celle de Sultan-Ahmed. Les deux prières diurnes (seconde et troisième) sont annoncées du haut de tous les Minarets en général ; les trois autres , sur un seul de chaque mosquée. Le calme et le silence qui régnent dans des villes où l'on n'est jamais troublé ni par le son des cloches, ni par le bruit des voitures, portent au loin la voix de ces Muezzinns dans ^60289824048186450^124^353 S1 916737 \ toutes les heures canoniques , mais sur-tout dans celle du matin vers l'aurore. Ces annonces périodiques ont quelque chose de grand et de majestueux : elles réveillent la dévotion même des personnes les mofns religieuses. L'aine en effet est doucement émue, lorsque du fond de son lit et à la lueur du crépuscule, on entend des voix mélodieuses prononcer et répéter ensemble ces paroles : Venez à la prière ! venez au temple du salut 1 la prière est à préférer au sommeil ! Cet Ezann se renouvelle cinq fois par jour, et cinq Ibis par jour il met en mouvement tous les peuples qui professent la religion de Mohammed. Au moment que la voix des Muezzinus se fait entendre, le Musulman , quel que soit son état , son rang , sa condition , abandonne tout pour faire la prière: on s'en acquitte dans les mosquées, dans les maisons , dans les boutiques, dans les magasins, dans les marchés, dans les promenades publiques , enfin par-tout où l'on se trouve. A moins d'avoir vu cette nation chez elle , on n'aura jamais qu'une idée imparfaite de son 166 CODE RELIGIEUX, attention constante et scrupuleuse , hommes et femmes , grands et petits , riches et pauvres, prêtres et laïques, à satisfaire au devoir de ces cinq Namazs. On diroit que ce peuple immense ne forme qu'une société religieuse. Chaque jour on voit les ministres et les grands de l'Etat quitter la plume , suspendre les occupations les plus importantes, pour se mettre sur le tapis, Scdjéadé , et faire la prière au milieu de l'appartement où ils travaillent, souvent en présence d'une foule d'officiers. Lorsque le maître de la maison a fini son Namaz, il cède ordinairement sa place aux plus distingués d'entre eux , qui remplissent successivement ce devoir. Les gens d'un rang subalterne passent dans un autre appartement. Cette pratique est si universelle, que personne n'ose y manquer , par la crainte d'être taxé d'irréligion. Quelque vicieux , quelque incrédule que soit un citoyen, il est toujours attentif à ces devoirs du culte extérieur , surtout s'il est employé au service public. C'est par-là que la nation le juge plutôt que par son mérite et sestalens. Lorsqu'un homme est élevé en charge ou en dignité , on ne fait communément son éloge que par ces mots : // est bon Musulman, il ne manque jamais aux cinq Namazs du jour. Pour peu qu'il soit irrégulier dans sa conduite et dans ses mœurs, on s'écrie : C'est un infidèle , un faux Musulman , qui néglige les devoirs de la religion. On sent quelle doit être la force de cette opinion sur les esprits , même les plus libres , comme sur les personnes les plus puissantes dans l'Empire par leur crédit et leurs emplois. Aussi, soit piété, soit hypocrisie, tout Musulman a la plus grande attention de satisfaire aux devoirs du culte public. Les cinq Namazs du jour forment ensemble vingt-neuf rik'aths, dont dix-sept sont de précepte divin , et les autres d'obligation imi-tative. Tous les Musulmans s'en acquittent avec fidélité ; les dévots en font même davantage. Le Khaliphe Ilarounn I, dit Reschid, avoit coutume de faire chaque jour dans ses prières cent de ces riléaths , et de distribuer cent talens aux pauvres. Quoique l'obligation de faire le Namaz L ïv dans la mosquée même , et en corps d'assemblée, ne soit pas absolue, néanmoins la plus grande partie des citoyens de toutes le3 classes s'y rendent assidûment, sur-tout pour les diurnes. Ce sont ces prières en commun qui, à la suite de Y Ezann exigent Ylkameth : c'est une répétition de la même annonce ; elle ne diffère de la première qu'en ce que celle-là se fait toujours sur le haut des Minarets , par un Muezzinn qui s'en acquitte debout, et que Ylkameth se récite immédiatement après clans la mosquée même , par tous les Muezzinns assis dans leur tribune. Rien de plus simple que cet office public : il répond, et à l'intérieur des mosquées , et à l'extérieur des Imams et des autres ministres de la religion , qui ne portent jamais aucun habit sacerdotal ; mais rien de plus grand , rien de plus auguste , que ce culte lui-même pratiqué dans le silence et le recueillement le plus profond. Nonobstant la simplicité qui règne dans tous ces temples , ils ne laissent pas, surtout les mosquées impériales , de frapper l'œil par l'immensité de leur étendue et l'élévation de leurs voûtes. La plupart sont ornés de riches colonnes de porphyre , de vert antique ou de marbre. Les décorations se réduisent à de petites lampes d'argent , et à de petits lustres artistement travaillés , garnis à leur entour de lampions et d'œuf's d'autruche , et sur lesquels on lit des versets du Courann écrits en lettres d'or. Quelques-unes de ces mosquées, sur-tout celle de Suit an-Ahmed y ont aussi des lampes d'or enrichies même de pierreries. Les murs de toutes en général n'offrent que des inscriptions ou des tablettes sur lesquelles sont écrits en grosses lettres d'or le nom de Dieu, Allah y et ceux du Prophète , des quatre premiers Khaliphes , et des Imams Hassan et Hussein , enfans (YAJj\ On n'y voit aucune image, aucune figure, aucune représentation quelconque , ni en peinture ni en sculpture ; la loi est très-rigoureuse sur ce point. Trois objets principaux caractérisent, pour ainsi dire , tous les temples Mahométans: ce sont , i°. l'autel , Mihhrab y qui consiste en 170 CODE RELIGIEUX, une concavité ou espèce de niche liante de-six ou huit pieds , pratiquée dans le mur, au fond même de l'édifice , et qui n'a d'autre objet que d'indiquer la position géographique de la Mecque j 2°. la tribune des Muezzinm , Mahhfil- Muezzinn, toujours à gauche de l'autel; 3°. la chaire, Kursy , des Scheykhs prédicateurs : elle est élevée de deux ou trois gradins à la droite de l'autel. Dans les mosquées principales , qui ont le droit de faire le prône, Khou-thbé> à l'office solennel des vendredis et des deux fêtes de Beyram, il y a une seconde chaire appelée Minnber} uniquement consacrée au ministre Khaliby qui remplit cette fonction importante. Cette chaire , de quinze , vingt ou vingi-trois gradins, én proportion de la hauteur de chaque mosquée , est placée à une certaine distance de l'autel , toujours à gauche. Les mosquées Impériales , et celles que le Sultan honore quelquefois de sa présence , sont aussi décorées d'une tribune, Mahhfil-PadiscJïahy y destinée à recevoir S. H. avec les Kkass-odalys ou gentilshommes de sa chambae. Cette tribune, garnie de jalousies dorées, est placée à droite de l'autel, vis-à-vis de la chaire des Khalibs. De jour, le service divin se fait sans cierges et sans flambeaux : ce n'est que dans les prières de nuit, aux premier, quatrième et cinquième Namazs , que l'on allume une partie des lampions suspendus aux voûtes, et les cierges placés près de l'autel. Il n'y en a ordinairement que deux , l'un à droite, l'autre à gauche du Mlhhrab : ce sont ceux des fondateurs des mosquées. Il est cependant permis aux ames pieuses d'en ajouter d'autres , et cela par des fondations également perpétuelles. Ainsi quelques mosquées en ont quatre six , huit, dix , etc. Ils sont toujours placés à côté des deux premiers , en ligne droite , le long du mur ; le nombre cependant n'excède jamais celui de dix-huit, neuf de chaque côté de l'autel. En cas de nouvelles donations, le Caïym-Baschy de la mosquée , au lieu d'en augmenter le nombre, les réunit à la masse des anciennes , et fait faire déplus gros cierges en forme de flambeaux. Les chandeliers t7i CODE RELIGIEUX, sont communément de cuivre ; très-peu de mosquées en ont d'argent : celle de Sainte-Sophie en a deux grands d'or massif; triste monument des dépouilles de la Hongrie, lorsque Bude-, sa capitale , tomba au pouvoir de Sulcjman I : telle est du moins l'opinion du public et de tous le&ministres qui desservent cette mosquée. On ne voit dans aucun temple Mahométan, ni bancs , ni chaises , ni fauteuils : l'usage n'en seroit compatible ni avec les mœurs de la nation , ni avec la nature même de son culte, qui, comme on l'a vu , consiste en des inclinations de tête et des prosternations. Grands et petits, tous s'asseyent indistinctement sur les tapis ou sur les nattes dont les mosquées sont garnies dans toutes les saisons de l'année ; aussi n'y entre-t-on jamais qu'avec la seconde chaussure , Mësth ; on ôte-la première à la porte du temple , en été comme en hiver. Les planches 19 et zô , qui représentent Sainte-Sophie et Sultan-Ahmed, donnent une idée exacte de l'intérieur de ces mosquées. Quant à la partie historique et CODE RELIGIEUX. 173 politique de ces temples , leur rang , leurs prérogatives, leurs revenus , etc., nous en parlerons plus bas, dans le chapitre qui traite de leur édification. Dans l'office public, Y Imam célébrant est toujours placé devant l'autel , à la tête de l'assemblée ; le peuple se range derrière lui en lignes parallèles de droite à gauche, depuis l'autel jusqu'à la porte du temple. On ne se met jamais sur une nouvelle ligne que les vides des premières ne soient entièrement remplis : c'est dans cette ordonnance que l'on s'acquitte des Namazs en commun. Les mouvemens , les divers exercices, que l'on y fait avec une méthode et une précision singulière, offrent le coup d'œil le plus frappant. L'Imam récite seul les prières à haute voix : il n'est permis qu'à lui et aux Muezzinns de psalmodier. De quatorze prosodies qu'ils ont pour le chant spirituel , sept sont réprouvées comme profanes ; les autres sont adoptées par les ministres de la religion ; mais la plus estimée et la plus généralement suivie , est celle qui porte le nom SAssim. Le peuple répète à 174 CODE RELIGIEUX, voix basse le chant de Y Imam, et écoute en silence les différens chapitres du Courann qu'il récite. Il n'y a que Y Amen seul , Amirtn qu'il puisse articuler à voix haute. Cette prière, Namaz, comme on l'a déjà observé, constitue tout l'office divin des Mahométans ; elle est uniforme , générale, universelle , et dans toutes les heures canoniques , et dans toutes les mosquées , et dans tout le cours de l'année, chez tous les peuples Musulmans ; il n'est de différence que dans le nombre des rik'aths prescrits pour chacune des heures canoniques, et dans la récitation des chapitres du Cour'ann, qui sont toujours au gré de chaque Imam dans les prières en commun, et de chaque individu dans celles qui se font en particulier. Comme la loi n'admet dans l'assemblée des hommes que des femmes d'un certain âge , on n'en voit guère dans les mosquées ; cependant des tribunes particulières leur sont réservées : elles sont garnies de jalousies, et élevées à l'entrée du temple, au dessus de la porte principale : par-là les femmes qui s y rendent, code religieux. 175 forment, suivant l'esprit de la loi, les derniers rangs de l'assemblée. Elles ne se réunissent jamais entre elles pour faire la prière en corps , soit à la mosquée, soit ailleurs. Il n'existe nulle part ni couvens, ni monastères, ni maisons , nii sociétés religieuses pour le sexe; presque toutes en général, quels que soient leur état et leur condition , font le Namaz chez elles chacune en son particulier. Mais les hommes , comme nous l'avons dit, peuvent s'en acquitter en commun , chez eux ou ailleurs ; plusieurs des grands et des officiers en charge s'en font même un devoir toutes les fois qu'ils n'ont pas le temps d'aller à la mosquée ; alors ils prient en commun et avec les domestiques de leur maison. Si c'est dans leurs bureaux , dans leurs départemens, les officiers qui y sont employés, et tous ceux qui s'y trouvent dans les heures canoniques, se réunissent pour faire ensemble le Namaz. A cet effet on entretient dans les hôtels publics , dans les grandes maisons , des Imams et des Muezzinns particuliers , à titre de chapelains ou d'aumôniers. Ces Muezzinns 176 CODE RELIGIEUX, annoncent ['Ezann sur le haut de l'escalierou vers la porte de la pièce destinée à la prière, se mettent ensuite dans une des lignes de l'assemblée , où ils récitent la seconde annonce, Jhaméth j après quoi Xlmam, placé comme dans les temples à la tête du corps , commence le Namaz. Ces ministres particuliers n'ont rien de commun avec les ministres publics voués au service des mosquées. Ce sont de simples citoyens, nommés par les chefs des familles , sous le nom et l'autorité desquels ils président à ce religieux exercice , comme ayant eux-mêmes le droit de s'en acquitter en personne. Cette prérogative est commune à tout Musulman dans les assemblées particulières; et c'est au choix de cet Imam passager que se rapportent spécialement les dispositions c^le la loi sur les vertus et les qualités requises dans le sujet, pour qu'il puisse exercer légalement cet office à la tête de ses con-citovens. A moins d'empêchemens légitimes , il est bien rare que l'on se dispense de faire les Namazs du jour en commun , soit à la mosquée CODE RELIGIEUX. 177 mosquée soit ailleurs. Les ames dévotes et ceux qui ont intérêt de se ménager l'opinion du public , n'y manquent jamais. Les Sultans eux-mêmes s'en acquittent le plus souvent dans une chapelle du Sérail, avec les gentilshommes de la chambre. On craint d'ailleurs les censures des gens de loi, dont les plus rigoristes ne cessent de blâmer hautement ceux qui se contentent de faire le Namaz en leur particulier , mais sur-tout les gens en place et en dignité , comme devant être les premiers à en donner l'exemple au reste de la nation. Bajczidl, livré au vin et à la débauche , négligeoit la prière commune. On lit dans Sad'ed-dinn Ejcndj } que ce monarque fut un jour en dispute avec les principaux Oulé-mas de sa cour, sur une cause qui intéressoit l'un des officiers du Palais. II s'agissoit de produire un second témoin , pour prouver judiciairement ce qui faisoit l'objet de la procédure. Bayezid, qui en avoit connoissance, dit aux Mo lias qu'il savoit positivement ce qui en étoit , et qu'il rendroit témoignage à la T o m e 11. M vérité : Nous ne pouvons qW croire à votre, parole, répondit l'un de ces magistrats , Fëna-rizadé Schcmsud-dinn Ffendy, Cadj de Brousse, alors la capitale de l'Empire ; mats le témoignage de V. If. nest pas recevable dans une cause juridique. Et sur l'extrême surprise que témoigna Bajezid , le Cady lui exposa très-respectueusement que la loi n'admettoit la déposition testimoniale d'un Musulman, qu'autant qu'il étoit fidèle à sa religion, et attentif'à remplir tous les devoirs du culte extérieur. Ainsi , comme V. II, t a jouta-t-il, ne fait pas les cinq prières du jour en commun avec les fidèles , ■votre témoignage n'est pas recevable. Ces paroles firent sur l'esprit du Sultan la plus vive impression. Dès ce jour , il s'imposa la loi de faire ses Namazs toujours en commun : il ordonna même la construction d'une mosquée , près de son palais , où il alloit depuis régulièrement tous les jours, ajoute le même auteur , s'acquitter, en public et en corps d'assemblée, de ce premier des devoirs de l'Islamisme. Tout ce que la loi prescrit pour le maintien de la pureté corporelle durant la prière , et les détails où elle entre sur tout ce qui peut invalider le Namaz ex. les purifications , montrent avec quelle rigueur elle exige du Musulman de tout état , de toute condition et de tout sexe, le recueillement le plus profond et le plus respectueux durant cet exercice. Aussi , pendant la prière, nul Musulman ne se permet-il de tourner la tête, de promener ses regards , d'adresser le moindre mot à personne, à moins que ce ne soit dans un Namaz particulier , après le dernier riUath , ou dans l'intervalle de deux prières faites à-là-fois, l'une canonique , l'autre satisfactoire , pour un Namaz précédemment omis. Les défenses de porter la main sur le côté, d'élever les yeux ou les mains vers le ciel , d'avoir les cheveux flottans, de se découvrir la tête, etc. ne sont pas moins observées : elles influent même sur l'état moral et civil' de toute la nation. Ces manières , comme celles d'avoir les pieds en dehors , décroiser, les jambes lorsqu'on est debout, de les porter en avant , enfin les différentes postures Mij Européennes, sont absolument inconnues à ces peuples. Tout est simple et naturel chez eux. Leur démarche porte l'empreinte de ce caractère sérieux et grave qui est presque général parmi les Musulmans. Jamais ils ne se découvrent , ni à la mosquée ni ailleurs , ni pour le culte religieux, ni dans la société civile. Les femmes, en faisant leur Namaz chez elles, quoique seules dans leur appartement, se font encore un devoir de prendre un Schal ou un voile, dont elles se couvrent la tète, et cela pour paroître, suivant l'esprit de la loi, avec plus de décence devant l'Eternel. Ce n'est jamais que lors d'événemens très-extraordinaires , heureux ou malheureux , et dans les excès de son alégresse ou de son offiietion , qu'un Musulmam ôte son turban , pour rendre grâces au ciel, ou pour en implorer les secours. Ces exemples sont même très-rares , sur-tout parmi les grands, et plus encore parmi les Princes. Les annales de l'Empire n'en offrent qu'un seul ; c'est celui de Selim I, qui , après la conquête du Caire, ayant été le vendredi suivant s'acquitter de la prière de midi dans la mosquée Melik-Mueyyed-Djiamissy 3 ôta son turban , fit enlever le riche tapis qui étoit sous ses pieds, se prosterna la face contre terre , versa des larmes d'attendrissement , et rendit mille actions de grâces à l'Eternel sur le succès brillant de ses armes. On a observé que l'obligation de ces cinq Namazs s'étend jusqu'aux voyageurs et aux malades , malgré les tempéramens et les dispenses que la loi accorde aux uns et aux autres. Les trois jours de marche qui déterminent la nature d'un voyage légal sont des jours artificiels : quoique les distances par nulles et par lieues ne fussent pas ignorées des Arabes dans les premiers siècles du Maho-métisme, leslmans jugèrent sans doute plus à propos de les régler par journées, pour se conformer aux idées du vulgaire , et à cette méthode qui est générale parmi tous les Orientaux. Les Othomans eux-mêmes , soit à la cour, soit parmi le peuple, ne s'expriment jamais autrement quand ils parlent des distances. Le célèbre Keatib-Tschéléby , qui M iij dans un ouvrage intitulé Bjihann-Nouma, le Belvédère du globe, a donné une descrip. tion historique et topographique de toutes les provinces de l'Empire, n'en détermine le plus souvent les distances respectives que par journées ou par heures. Malgré les dispenses absolues que la loi accorde aux malades qui ont une infirmité grave , les aines pieuses ne manquent jamais, aussitôt après leur rétablissement , de satisfaire aux Namazs qu'elles ont omis. De toutes les personnes en état de santé, les marins seuls sont autorisés à faire la prière assis , dans les momens où le navire est sous voile. Les FethuasduMuupkty Behhdjé Abd'ullah Efendj offrent de grands développemens sur cet article : suivant ce docteur, il n'est pas permis de faire la prière debout à bord d'un navire qui seroit à l'ancre dans un port , si on a le moyen d'en sortir et de s'acquitter sur terre de ce devoir important. Dans ce cas , dit-il , le Namaz du Musulman ne seroit pas bon. Mais si le navire se trouve mouillé sur la côte ou clans la rade même , et touchant îaterre, alors la prière est bonne et valide. Quoiqu'il soit toujours plus louable de la faire plutôt sur terre que sur mer , cependant, continue le même Mouphtj , le fidèle qui vers la fin d'une heure canonique, se trou-veroit dans une barque traversant un canal ou un bras de mer , peut faire , assis dans la barque même , le Namaz de cette heure canonique près d'expirer. Enfin les cinq Namazs sont d'une obligation si absolue , que tout Musulman qui en laisse écouler l'heure marquée sans s'en acquitter , ou en commun ou en particulier , est tenu d'y satisfaire dans un autre moment du jour. 11 n'est même pas permis, comme on le voit dans le texte ,*de faire un Namaz canonique avant d'avoir réparé par autant de Namazs satisfactoires tous ceux que l'on auroit omis pour quelque motif que ce soit. La loi envisage ce devoir envers Dieu comme une dette qui ne peut jamais se remettre,pas même en cas de mort , puisqu'elle oblige les héritiers à y satisfaire par des aumônes pécuniaires au profit des pauvres. M iv ïS*4 CODE RELIGIEUX. CHAPITRE III. De la Prière Salath-witr. Cette prière , qui est d'obligation canonique*, mais qui n'exige ni Y Ezann ni Ylkatneth, doit se faire dans la troisième partie de la nuit, toujours avant l'aurore. Elle consiste dans un Nama^ de trois rik'aths , en récitant dans chacun l'introït Fatihha^ avec un autre chapitre du Courann^ à volonté. C. Le Prophète récitoit ordinairement dans le premier rik'ath, le chapitre Scbihhaissm rebb' uk'el-ala j dans le second, celui Coulja ejrjruliel-KeaJirounéj et dans le troisième , celui Coulhiuv'allahh'u aliacl (i). Ainsi , à l'exemple de f Apôtre céleste, il seroit louable pour le fidèle de s'en tenir aux mêmes chapitres. V. Selon les Imamcïnns , cette prière n'est que d'obligation imitative. (i) Ce sont les quatre-vingt-septième , cent-neuvième et cent-douzième chapitres. A la fin du dernir rikyath il faut réciter le cantique Counouth. C. Le voici : » O mon Dieu ! nous deman-» dons en vérité ton assistance , ta miséri-» corde, et la grâce de nous diriger dans la » vraie voie : nous avons recours à toi , nous » croyons en toi, nous nous résignons à toi ; » nous exaltons , nous adorons tes attributs » divins ; nous te rendons nos actions de gra-» ces ; nous ne méconnoissons pas tes bienfai ts ; » nous rejetons celui qui ne se soumet pas à » tes volontés : nous n'adorons , ô mon Dieu » que toi, et nous ne prions que toi : nous » t'adressons nos prosternations et nos hom-» mages : nous nous bâtons d'implorer taclé-» mence et ta commisération: nous craignons » ta colère ; car certes ta colère est le partage » des infidèles. » Celui qui n'est pas en état de réciter ce cantique , doit y suppléer par ces paroles , qu'il faut répéter trois fois : O mon Dieu ! jais-moi miséricorde (i); ou bien par celles-ci: (i) Ailahummé aghfedy. i86 CODE RELIGIEUX. Donne-nous, o Dieu (t), ce qu'il y a de bon dans cette rie et dans Vautre } et préserve-nous des tourmens du jeu ! F. L'Imam S:hafy place la récitation de ce cantique dans le Namaç du matin, à la fin du secondrik'ath'j et ne l'exige dans cette prière, Salath-whr , que pour les derniers quinze jours delà lune de Rama^ann. Tout fidèle est religieusement tenu de s'acquitter en son particulier de cette prière nocturne dans l'heure qui lui est destinée, et à son défaut d'en réparer l'omission par une prière satisfactoire. C. On y est obligé dans tous les pays et dans tous les climats, excepté dans ceux où le lever du soleil suit de fort près son coucher. Dans ces régions on peut même se dispenser du cinquième Namaz. Observations. / Cette prière, Salath-witrj, n'est pas aussi (i) Rebbina etna fid-dunnya h.isséneti/ù ve fil-akhi-reth hassénetihi nkkïna açab'un-nar. scrupuleusement ni aussi généralement observée que les cinq Namazs , parce qu'elle n'est que d'obligation canonique , et que ceux-ci sont de précepte divin. Lésâmes dévotes seules s'en acquittent à l'heure marquée par la loi ; les autres y suppléent dans la journée par une prière satisfactoire. Les dispositions de la loi, qui exemptent les Musulmans de cette prière, et même du cinquième Namaz y dans les régions où l'aurore suit de fort près le coucher du soleil, ont fait envisager aux esprits vulgaires tous les pays septentrionaux comme des climats qui leur sont absolument interdits. Cette opinion , maniée avec adresse , fit échouer un projet important conçu par le ministère Othoman ,sous le règne de Selim II : il s'agissoit de la jonction du Don. avec le Volga. Selon les annales de l'Empire, Tscherhess Cas-sim Béy y Circasse d'origine, et alors second ministre des finances, Dej'tcrdarSchikk-sany , avoit le premier imaginé cette grande entreprise. De son aveu , elle exigeoit un travail immense et des sommes considérables : mais 188 CODE RELIGIEUX, il en relevoit les avantages, en temps de paix, pour le commerce ; en temps de guerre, pour le transport des munitions et des troupes, contre les Persans ou les Russes. Il obser-voit d'ailleurs dans la facilité de passer de Constantinople à la mer Caspienne , un nouveau degré de sûreté pour la garde et la défense des places frontières de l'Empire dans toutes ces contrées. Le Grand Vézir Tawil Mohammed Pas-cha, pénétré de l'importance de ce projet, donna aussitôt le Sandjacat de Cajfa à ce môme officier , et le fit partir pour la Criméey avec ordre de s'occuper sérieusement de cet objet , et d'en dresser un plan d'après l'avis des gens de l'art qu'il chargerait d'examiner les lieux et tous les moyens d'une rapide exécution. Sur les réponses favorables et encourageantes de ce Tscherkess Cassim Bejy 9 le ministère pourvut aux préparatifs nécess-saires. Une escadre chargée d'un grand nombre d'ouvriers, partit en 976 (i568) de Constantinople pour les côtes de la Crimée : elle por-toit aussi plusieurs dfficiers ZaimSj et divers régimens de Janissaires et de Sipahys. Tscher-kess Cassim Bey eut la conduite générale de l'opération, avec le commandement des troupes qui escortoient les ouvriers ; il fut même décoré du titre de Pascha} et l'on érigea en sa faveur le Sandjacat de Cajfa en Beylerbeylik. En même temps Selim II expédia un ordre à Dewleth-Guiradi-Khan, qui régnoit alors en Crimée, de lever sans délai une nombreuse armée de Tatars , de marcher sur Astracan , de chasser les Russes et les Circasses des rives du Don et du Volga , de protéger les travaux relatifs à la jonction de ces deux fleuves , enfin de se concerter avec Tscherlœss Cassim Bey sur les mesures nécessaires au succès de cette entreprise. Plus de soixante mille Tatars et environ quinze mille OÛwmans s'avancèrent vers Astracan. A leur approche les Russes abandonnent la ville : on les poursuit, on se répand dans la campagne , et après avoir fait mille dégâts sur les terres Russes et Circasses , on vient commencer l'ouvrage à une certaine distance de Czaricin. Vers la fin de la belle saison , i9o CODE RELIGIEUX, après trois mois de travaux , on étoit déjà au tiers de cette grande opération, lorsque la politique de Dewleth-Guiriûh-Khan , réveillée par les insinuations malignes de quelques officiers de son armée , parvint à la faire échouer. Ces officiers crurent voir dans l'exécution de ce projet , qu'il rendrait un jour les Otho-mans indépendans des secours et des armes des Tatars. La perte de leur considération leur parut devoir entraîner insensiblement celle de leurs prérogatives, la chute même de la principauté , et la conversion de la Crimée en simple Paschalih j comme les autres provinces de l'Empire. Alarmé de ces réflexions , Dewletk-Guiraïh-lQian emploie sous main mille ressorts pour faire abandonner l'ouvrage. Par ses ordres , on répand dans l'un et l'autre camp, comme parmi les ouvriers, qu'ils périraient bientôt sous ce triste climat , ou parle froid excessif", au milieu des neiges et des glaces; ou de faim et de misère , attendu les difficultés de faire transporter des vivres au travers de tant de pays déserts ; ou par le fer ennemi , étant exposés à être surpris par les Russes et par les Circasses, tous accoutumés, disoit-on , plus que les Musulumans , à tenir la campagne au milieu de la plus rude saison. Comme ces bruits ne faisoient que de f bibles impressions sur les esprits , on imagina de faire valoir ce préjugé qui fait regarder tous les pays du Nord comme interdits aux vrais Mahométans. Les satellites du Khan s'en acquittèrent très-adroitement: ilsneces-soient de plaindre le sort de ceux de leurs frères qui se fixeroient en ces climats , où, dans les plus longs jours de l'été , la nuit, disoient-ils , n'étant que de quatre heures, ils seroient obligés de troubler leur repos pour faire les prières nocturnes prescrites par la loi, ou de sacrifier leur religion en ne s'en acquittant pas. Il n'en fallut pas davantage pour soulever les esprits. Othomans et TatarsJ.toûs se répandent en murmures , et demandent hautement d'être reconduits dans l'Empire. Tscherkess Cassim-Bey emploie tour-à-tour, caresses, promesses , menaces , pour dissiper les clameurs et maintenir l'ordre dans le camp. Tout fut inutile ; officiers , soldats, ouvriers t92 CODE RELIGIEUX, abandonnèrent tout-à-coup leurs postes et leurs travaux, et regagnèrent par pelotons, les uns la Crimée , les autres les cotes orientales de la mer Noire. D'après des traits aussi frappans, on ne peut s'empêcher d'observer encore ici que tous les maux politiques qui affligent les peuples Musulmans , dérivent de leurs préjugés, de leurs fausses opinions, des vices du gouvernement, et non des vrais principes de la religion et de la loi. CHAPITRE IV. De la Prière publique des vendredis , Sa-lath'ul-djuma. La prière publique des vendredis est d'une obligation divine pour tout le corps des fidèles. Elle exige six conditions , sans lesquelles elle ne doit jamais avoir lieu ; savoir , la cité (i) , la présence du Sultan, l'heure canonique (i) EVmissr^ v'cs-Sultan, v'd-Vakth'u^uhhr , v'e/-Kkouthbi, v'd'Djcmaâth, v'd-lyiul-âm* de CODE RELIGIEUX. 193 de midi, le KHouthbé, rassemblée des fidèles , une liberté entière et générale. i°. La cité. La prière doit se faire dans un temple, Mcsdjid, élevé au sein de la ville ,-ou dans un oratoire , musr s alla , qui seroit situé , soit au centre , soit à l'extrémité de la ville, et non hors de son enceinte^ parce qu'alors cet oratoire ne seroit pas censé faire partie de la cité , et que hors de la cité , il n'est jamais* permis de faire la prière publique des vendredis. C. La loi ne reconnoît pour cité , ni les bourgades, ni les villages, ni les bourgs ; mais toute habitation qui réunit dans ses murs un corps de société, un certain nombre de fidèles , sous les auspices et sous l'autorité d'un gouverneur, Emir, et d'un Magistrat, Cadj , légitimement autorisés k'y exercer les droits, l'un, de la puissance politique, et l'autre , de la puissance judiciaire. L'extrémité de la cité, ou plutôt ses limites, ne peuvent s'étendre tout Tome II. N 194 CODE RELIGIEUX, au plus qu'à la distance de la portée d'une flèche : cet intervalle étant censé faire partie de la cité , on peut y établir un oratoire , et y faire la prière publique des vendredis. ()n doit excepter de cette loi générale la station de Mina près de la Mecque. Ce lieu est le seul que Ion puisse ranger dans la classe des cités , et où il soit également permis de faire cette prière ; ma$ en présence et sous les auspices du Khaliphe , de Ylmam souverain lui-même , ou à son défaut, de YEmir-Hidjeaz ( prince de YlJidjsaz , ou Schcrif de la Mecque}, vu les droits de tutelle, Vclayeth , et d'autorité suprême de l'un et de l'autre sur tout le corps des fidèles : nul autre ne sauroity exercer cet office religieux , pas même Y Emir Meivsim ( Emir-ul-Badjh>)i parce que ses pouvoirs sont restreints à des objets temporels, relatifs à la sûreté des pèlerins qui sont confiés à sa garde et à sa conduite. On peut faire cette prière généralement dans tous les temples d'une cité, V. Cette loi est fondée sur l'opinion de l'Imam Mohammed : elle a prévalu, et sur celle de l'Imam A{am, qui ne permet dans chaque cité qu'une seule de ces prières solennelles , et sur celle de l'Imam Ebu-Tous-souph, qui en permet deux seulement dans les cités qui sont coupées par un fleuve , pourvu toutefois que l'une et l'autre se fassent séparément dans chacune des deux parties de la cité. 2°. La présence du Sultan. Le Souverain doit être présent dans le temple , ou à son défaut, son vicaire, son lieutenant, Naïb (i) , autorisé formellement à y remplir ce jour-là , en son nom et en sa place, les fonctions de V ImametJu 3°. L'heure canonique de midi. Cette prière doit se faire précisément à cette heure-la, et jamais dans aucune autre du jour. -_____ (i) Naïb , nom sous lequel on comprend les Lnams-prêtres, désigne proprement tout vicaire spirituel et judiciaire , comme Wekïl indique tout vicaire temporel , civil et politique. N ij 40. Le Khouthbê. Cette oraison est indispensable, et doit toujours précéder le Namai solennel de ce jour. C. Le Khouthbê est divisé en deux parties, appelées par cette raison Khouthbétéinn, au milieu desquelles le ministre Khatib fait une pause, et s'assied quelques minutes. Ce ministre est même tenu de réciter tout le Khouthbê sur la chaire, Minnber , en s'appuyant de la main sur la garde d'un sabre, dans tous les temples qui ont été pris avec la ville, parla force des armes; pendant tout ce Khouthbê , l'assemblée doit se tourner vers le Khatib, et l'écouter dans le silence le plus profond et le plus respectueux. 5°. L'assemblée. Pour faire cette prière publique, il faut qu'il y ait au moins trois fidèles réunis dans le tern-pie, non compris Xlmam. V. L'Imam Schafiy exige , outre Y Imam - prêtre , une assemblée pour le moins de quarante fidèles tous du sexe masculin , de condition libre, et en demeure fixe. Et 6°. une liberté entière et générale. Le temple doit être ouvert à tout le monde; et à l'heure canonique, tout fidèle doit avoir la liberté de s'y rendre, sans que nulle autorité publique ou particulière puisse en interdire l'entrée à personne. Le défaut d'une seule de ces condition altère la nature de cette prière solennelle, et la convertit en Namaz_ ordinaire de midi. Tout fidèle est obligé de s'en acquitter; c'est-à-dire, l'homme en majorité, l'homme en demeure fixe, l'homme en pleine santé, et l'homme de condition libre. Les mineurs, les voyageurs , les malades, les esclaves, ceux même qui ne jouissent que d'un affranchissement partiel, les femmes, les villageois, les hommes N iij i98 CODE RELIGIEUX de la campagne, les estropiés, les perclus, les aveugles, en sont dispensés. Ils peuvent faire cette prière chez eux en particulier. Cette dispense est également accordée, i°. à l'homme en demeure fixe, qui se trouve par hasard hors de la ville à l'heure de Cette prière, à moins qu'il n'ait entendu lui-même l'annonce de Y Ezann par l'organe des ministres Muezzinns ; 2°. à l'homme de la campagne qui se trouveroit un jour de vendredi dans une cité, pourvu qu'en j entrant, il n'eût point formé la résolution d'y demeurer jusqu'à l'heure de cette prière ; et 3°. au voyageur qui, se trouvant dans la même circonstance, n auroit pas eu l'intention d'y demeurer pour le moins quinze jours, parce qu'alors il seroit assimilé à l'homme en demeure fixe. L'omission de cette prière ne peut jamais être réparée, comme celle de tous les autres Namazs , par des prières satisfactoires. C. Tout fidèle qui y manque pèche grièvement contre la religion, d'après ces paroles du Prophète : Celui qui (1) sans motif légitime , manque à la prière publique des vendredis trois semaines de suite , est censé avoir jeté I- Islamisme derrière ses épaules } c'est-à-dire, qu'il est censé avoir abjuré sa loi. Enfin chaque fidèle est tenu de suspendre tout acte civil et mondain , les marchés, les achats, les ventes, et toute affaire quelconque, durant cette prière solennelle , du moment que Y Ezann en annonce l'heure canonique, jusqu'à celui où la prière est entièrement finie. (t) Mén terek'd-djumâ selassé djum'd muttwaliyath b'ila aiitrinrifekadncb[ul-hlam ver£y-^ihhn-hi. N ïv 2oo CODE RELIGIEUX. Observations. Cette prière, la seule de la semaine qui doive être laite à la mosquée et en corps , est par cela même regardée comme le premier de tous les Namazs , comme le plus auguste et le plus sacré de tous les actes publics de l'Islamisme. Elle n'a cependant jamais lieu sans les six conditions prescrites par la loi. Nous allons les reprendre et les développer dans le même ordre. i°. La cité. Il n'y a donc que les cités qui aient le droit de faire célébrer l'office solennel des vendredis , encore n'est-ce que dans les principales mosquées de leur enceinte. Ces temples sont distingués par une chaire très-élevée, Minnber > à la gauche de l'autel, et réservée au Khouthbê , espèce de prône qui précède le Namaz } et qui constitue proprement la solennité du service divin de ce jour-là. Dans toutes les autres mosquées , on s'en tient au Namaz ordinaire. 20! La présence du Sultan. Cet article prouve de quelle obligation il est pour le monarque , comme chef de la religion , / d'assister et même de présider à cet office public. Rien ne peut le dispenser de ce devoir pratiqué par le Prophète et par les Kha-liphes ses successeurs : aussi aucun Sultan n'y manque , à moins d'une maladie grave , ou de circonstances extraordinaires , telles qu'en offrent les annales de la monarchie sous les règnes malheureux de Monrad III et de Moustapha I. Le premier n'osa pas sortir du Sérail pendant deux ans , à cause des séditions perpétuelles des milices ; l'autue paroissoit rarement en public , et cela par un effet des menées des officiers du Sérail , qui n'écoutant que leur intérêt , vouloient dérober aux yeux de la nation les écarts de son extrême imbécillité. À l'exception de ces deux princes, aucun des Sultans Othomansn'a négligé ce premier des devoirs de la religion. Des raisons politiques ajoutent d'ailleurs aux dispositions impérieuses de la loi. Un Sultan ne pouvant s'en dispenser , sans être, pour ainsi dire , à l'agonie , son absence répand aussitôt l'alarme, et quelquefois met en effervescence les esprits turbulens. D'après ces considérations , les Souverains, dans leurs maladies, s'efforcent de quitter leur lit, de sortir du Sérail, et de se rendre le vendredi à la mosquée. Comme ils ne paroissent jamais en public qu'à cheval, et qu'il est de la loi plus encore que d'étiquette , qu'un Khaliphe régnant se montre à son peuple , plusieurs Sultans ont aggravé leurs indispositions , en sexposant l'été à l'ardeur du soleil, et l'hiver aux rigueurs de la saison. Cette loi sévère coûta la vie à Mahmoud I. Son zèle à remplir ce devoir du trône , le porta mourant à la mosquée, le i3 décembre 1764 : mais accablé par la violence du mal, il n'eut pas même le temps de regagner son palais ; il expira entre les deux portes du Sérail. Ainsi la loi, la religion, la politique tout ensemble obligent les Sultans à se rendre à la mosquée chaque vendredi. Ce n'est donc point ici une cérémonie vaine et arbitraire, comme le préten-tendent divers écrivains. Les Sultansy vont avec un cortège éclatant, quoique composé des seuls officiers du Sérail et de la maison Impériale. Nul ministre, nul C G D ERE L I G I EUX. 2o3 homme de loi , nul officier public n'est tenu ce jour- là de les accompagner. Quoique maître d'honorer de sa présence telle mosquée qu'il lui plaît, le Monarque se rend néanmoins tour-à-tour à celles qui ont le droit de célébrer le Namaz public du vendredi. Il parcourt ainsi alternativement les mosquées Impériales qui sont de la fondation des Sultans et des Sultanes , et les mosquées particulières élevées et dotées par des Vézirs , des Paschas, des Beys , etc. Au fort de l'hiver seulement, S. H. se rend d'ordinaire à SainteSopkic , à cause de sa proximité du Sérail ; mais elle ne s'acquitte jamais par elle-même des fonc-tions de'Ylmameth. Des ministres de la religion l'y exercent en son nom et en sa place, dans chacune des mosquées de l'Empire qui ont droit de célébrer cet office solennel. Placé dans sa tribune , le Sultan est censé y présider. Les ministres célébi ans sont distingués de tous les autres, sous le nom cYImam'uI-djumâ , qui veut dire , les Imams des vendredis, ou plutôt les Imams de la prière des vendredis. 3°. L'heure de midi. C'est l'heure ordinaire des Namazs des autres jours ; ainsi ce n'est jamais que quarante minutes après midi que l'on célèbre cet office chez tous les peuples Mahométans. 4°. Le Khouthbê : espèce de prône ou de profession publique sur l'unité et les attributs de l'Etre suprême. Mohammed en est l'instituteur : il le récitoit lui-même tous les vendredis comme dans les deux fêtes de Bey-ram. A la suite de cet office il passoit de la chaire à l'autel , où, placé à la tête de ses disciples , il faisoit le Namaz , et s'acquittoit en personne des fonctions sacerdotales. Les Khaliphes ses successeurs suivirent son exemple. Ebu-Bekir inséra dans ce Khouthbê le nom de Mohammed j il en fit mention comme du plus grand et du plus auguste des Prophètes; et comme ce législateur , en récitant le Khouthbê se tenoit toujours sur le haut de la chaire , composée de plusieurs gradins, Ebu-Bekir j, par respect pour son caractère éminent, ne monta jamais jusque-là : il se tenoit à un gradin plus bas. A son exemple, Orner, voulant honorer aussi la mémoire cXEbu-Bekir , s'arrêta sur un degré inférieur. Osman , animé du même esprit , descendit encore plus bas. Aly craignant que cette déférence ne réduisît progressivement ses successeurs à se tenir au pied de la chaire , garda la même place qu'Osman, ce qui fut imité par tous les Khaliphes , soit Ommiades, soit Abassides } qui succédèrent au sacerdoce de Mohammed. Les premiers de ces Pontifes aj outèrent aussi à ce Khouûibé des prières pour les quatre premiers Khaliphes et pour tous les disciples du Prophète. Ils s'en acquittoient eux-mêmes chaque vendredi comme aux deux fêtes de Bey-ram , dans la mosquée cathédrale des villes où ils résidoient. Plusieurs avoient coutume de prononcer à la suite du Khouthbê , une espèce de sermon, où souvent ils parloient aussi des affaires publiques et des divers règlemens , soit civils , soit politiques, qu'ils se propo-soient pour le bien de l'Etat. Cet usage se perpétua jusqu'au règne de Mohammed VIII, qui, l'an 3i4 ( de l'Hégire 936 ) , se dispensa 20e CODE RELIGIEUX, de monter en chaire, et de réciter en personne le Khoulhùé, parce que la nécessité des circonstances l'avoit forcé à insérer dans cet office publie le nom à\Ibn-Jlatik , le premier des usurpateurs àe Baghdadat de la puissance temporelle des Khaliphes. Depuis cette époque les vicaires de Moham* medchargèrent les ministres de la religion de toutes les fonctions sacerdotales, suivant l'usage qui étoit déjà établi dans les autres mosquées , soit de la capitale , soit du reste de la monarchie. Dans tous les Khouthbcs en général, \csImams faisoient mention du Kha-liphe régnant, et même des princes qu i a voient été solennellement nommés et reconnus pour leurs successeurs. Us formaient encore des vœux pour la conservation du Khaliphe, pour la prolongation de ses jours , et pour la prospérité de ses armes contre les ennemis de la religion et de l'Etat. C'est pourquoi ce prône fut depuis appelé Khoulhbéteïnn, qui signifie, les deux oraisons , parce qu'il étoit divisé en deux parties : la première ne parloit que de Dieu , du Prophète , des quatre premiers Khaliphes , et des disciples leurs contemporains ; la seconde faisoit mention du Pontife qui occupoit la chaire de Mohammed et de ses héritiers ; parties distinctes et même séparées par une pause que les Imams faisoient dans cet office solennel , ainsi qu'ils le font encore aujourd'hui. Tous les princes Mahométans qui ont usurpé et partagé entre eux l'empire du Khaliphat, faisoient insérer leur nom à la suite de celui du Khaliphe dans les Khoudibés que l'onréci-toit dans les villes de leur domination. Ils inanifestoient par-là , sinon la légitimité , du moins l'exercice du pouvoir souverain. Aussi ce droit du Khoa/hbé et celui de faire battre monnoie , ont de tout temps formé les seuls droits régaliens des Potentats Mahométans , chez lesquell le titre le plus caractéristique jle l'autorité suprême est encore aujourd'hui celui de Sahhib Khou'hbé ve sikké, c'est-à-dire possesseur des droits du Khou/hbéet de Ja monnoie. Ceux des Monarques qui se refu-soient à reconnoître la suprématie des Khaliphes, et qui leur disputoient jusqu'à la dignité 2o8 CODE RELIGIEUX, sacerdotale,sur-tout les princes des différentes branches de la maison d'A/y, qui ont régné en Afrique, en Arabie , en Perse , dans le Khorassan, etc., n'ordonnoient le Kliouthbé dans leurs Etats qu'en leur nom et en celui des princes héritiers de leur trône : on omet-toit de parler des Khaliphes. Cette circonstance, la plus délicate et la plus importante du sacerdoce , fut aussi le premier objet de l'attention et de la politique des Abassides , qui n'oublièrent rien pour se conserver cette grande prérogative dans toutes les mosquées et dans tous les Etats Mahométans , mais surtout dans le temple de la Mecque, comme étant le centre de l'Islamisme. Pendant cent seize ans ils furent cependant dépouillés de ce premier des droits sacerdotaux dans le premier des temples*Musulmans. Les Schérijs de la Mecque , d'abord les Beno-Moussa, ensuite les Beho-Fuléjté , cédante leur haine contre les Abassides, plus encore qu'aux conjonctures de ces siècles si désastreux pour le Mahométisme , substituèrent dans le Khouthbê du Keabé, au nom de ces Pontifes, depuis depuis Fazl I jusqu'à Abd'ullah VI, de 363 à 479 de l'Hégire (de 973 à 1086) , celui des Monarques Faûùmites qui régnoient aloreen Egypte, aussi avec le titre de Khaliphe. Quand les Abassides furent rentrés dans leurs droits, ils continuèrent à jouir de cette distinction y non-seulement les onze derniers Khaliphes de Baghdad, mais encore ceux du Caire y quoique restreints plus étroitement que jamais aux fonctions sacerdotales , sous les Sultans Turkmenns et Memlouks, qui succédèrent aux Fathimites. Selim I acquit à la maison Othomane ce droit si important aux yeux de l'Islamisme et duKhaliphat. Ses aïeux en jouissaient cependant , mais en la seule qualité de Bey, d'Emir et de Sullan , titres qui n'indiquent que la" puissance temporelle. Ce droit remonte jusqu'à l'origine de la monarchie. L'an 688( 1289) Osman I, encore sous la domination des Sultans de Conja , conquit Caradjé-hissar sur les Grecs; et ayant obtenu de Mess'oudIII la propriété de cette ville, le premier siège de • sa puissance naissante , !il fit aussitôt insérer Tome .II. O 210 CODE RELIGIEUX, son nom dans le Khouthbê des vendredis, àla suite de celui du Monarque Seldjoukien. Tour-sounn-Fa/dhh son beau-frëre , fut même le premier qui exerça cet office en l'honneur du prince fondateur de la Monarchie Othomane. Mais le Khouthbê ne recouvra véritablement son antique splendeur que sous Seiim I} lors-ique ce héros fut décoré de l'auguste titre" de Khaliphe et tYlmam suprême, en recevant, après la conquête de l'Egypte , comme nous l'avons déjà dit, les l>ommageset du Khaliphe Mohammed XII, le dernier des Abassides , et du Schéri/'de la Mecque y EU ul-Bêrêkiath. Ce monarque acquit en même temps les droits de suzeraineté que les Sultans Egyptiens exer-çoient sur tout le Ilidjeaz > sous le titre aussi modeste que glorieux de Khadim'ul Haré-meriiiiusch-Schérijeinn , serviteur des deux saintes cités ; ce titre lui fut solennellement déféré au Cairejdans le Khouthbê que l'on récita en sa présence et en son nom dans la mosquée cathédrale Mélik-Muêyyéd-Djeamissyy où il alla le vendredi suivant av*ec la pompe la plus brillantç, s'acquitter de la prière publique de ce jour, et rendre des actions de grâces à l'Eternel. Tels sont, d'après tous les docteurs Mahométans , les titres qui caractérisent la légitimité des droits de la maison Othomane sur le Khouthbê comme sur le Kéabê de la Mecque , et sur le Khaliphat universel. Ainsi les Sultans de cette maison, à l'imitation des anciens Khaliphes , font remplir par des vicaires, dans le temple de la Mecque comme dans tous les autres de l'Empire , l'office public des vendredis. Comme cet office consiste dans le Khouhtbé et dans le Namaz y dont l'exercice consacré sous les noms , l'un de Khithabeth , et l'autre cYImameth, constitue la première et la plus auguste des fonctions sacerdotales, les vicaires qui s'en acquittent sous le double titre de Khadb et d'Imam'ul-ajumâ 3 au nom et sous l'autorité de Y Imam suprême, y sont toujours nommés et autorisés par un Khatt'y-Schérif, signé de la propre main du Sultan. Indépendamment de cette autorisation formelle et générale pour tous les Khatibs de l'Empire , le Sultan, à l'exemple des trente-cinq derniers Khaliphes Abassides, est encore tenu de la ka CODE RELIGIEUX, confirmer à ceux qui s'en acquittent en sa présence , soit les vendredis, soit dans le^ deux fêtes de Bejrram , dans quelque mosquée que ce soit. Cette fonction est remplie alternativement chaque semaine , par les deux Hunnhear-Imamys , qui sont les Imans du Sérail, les aumôniers du Sultan , affectés , si l'on peut parler,ainsi, au service de la chapelle de Sa HautesSe. Le Khatib de la mosquée oiril plaît au Sultan de se rendre chaque vendredi , est conséquemment obligé de leur céder pour ce jour sa place et ses droits sacerdotaux. Le Ilunnliear-Imamj du jour a soin de se tenir sur le passage du Monarque, dans le corridor qui mène à sa tribune ; Sa Hautesse , en s'ap-prochant , jette sur lui un coup-d'œil avec un léger signe de tête , ce qui tient lieu de confirmation pour les pouvoirs déjà, déférés au même prélat. Cependant le Sultan permet quelquefois au Khatib de la mosquée où il se rend , de remplir lui-même cet office , soit dans la vue de l'avancer, soit dans le dessein de le nommer son Imam çn la place de celui des deux aumôniers qu'il voudroit disgracier ou élever de grade dans le corps des Oulémas. Mais aux deux fêtes de Beyram qui se célèbrent toujours à la mosquée Sultan-Ahmed y le premier aumônier du Sérail s'acquitte seul de ces fonctions sacerdotales. Il est ég^ement d'usage que dans ces deux fêtes , comme dans l'office des vendredis , trente Muezzinns du Sérail suivent le Sultan à la mosquée , pour chanter avec ceux du temple la seconde annonce , Ikameth > qui précède la prière. Les Khatibs des mosquées de toutes les villes prises les armes à la main , jouissent d'ailleurs d'une espèce de distinction militaire: ils montent en chaire , ainsi qu'il est ordonné par la loi , en tenant un sabre dans la main droite , comme un symbole de la destinée de ces édifices, qui , d'églises chrétiennes, ont •été converties en temples Musulmans. Le Khatib s'appuie sur le sabre , en montant et en descendant les gradins, comme pendant tout le temps qu'il récite le Khouthbê. Voici la formule de ce prône , uniforme pour tou-^ tes les mosquées de l'Empire qui ont Le- O iij '214 CODE RELIGIEUX, droit de célébrer ce premier des offices divins. » Grâces au Très-haut, à cet Etre suprême » et immortel qui n'a ni dimensions ni-limi-» tes , qui n'a ni femmes ni enfans, qui n a » rieqgd'égal à lui , ni sur la terre ni dans les » cieux ; qui agrée les actes de componction » de ses serviteurs, et pardonne leurs iniquités. >» Nous croyons , nous confessons, nous attes-» tons qu'il n'y a de Dieu que Dieu seul ,J)ieu » unique, lequel n'admet point d'association » en lui ; croyance heureuse à laquelle est m attachée la béatitude céleste. Nous croyons » aussi en notre Seigneur, notre appui, notre » maître, Mohammedy son serviteur ,-son ami, » son Prophète, qui a été dirigé dans la vraie » voie, favorisé d'oracles divins, et distingué » par des actes merveilleux. Que la bénédic-» tion divine soit sur lui, sur sa postérité , sur » ses femmes, sur ses disciples, Asshhabs, sur » les Khaliphes orthodoxes , doués de doc-«trine , de vertus et de sainteté, et sur les » Vézirs de son siècle, mais particulièrement » et spécialement sur Ylmam, le Khaliphe CODE RELIGIEUX. 2i5 » réel du Prophète de Dieu, Y Emir'ul-Mumi-» ninn Ebu-Bekir , le Certificateur pieux , » l'agréable à l'Eternel ; sur l'Imam} le Kha-» liphe réel du Prophète de Dieu , YEmir'ul-» Mumininn Orner, le Discernateur pur, l'a-» gréable à l'Eternel ; sur Ylmam^le Khaliphe » réel du Prophète de Dieu, YEmirul-Mumi-» ninn Osman , le Possesseur des deux lumiè-» res, l'agréable à l'Eternel; sur Y Imam, le » Khaliphe réel du Prophète de Dieu, YE-» mir'ul-Mumininn Aly , le généreuXïintè-» gre , l'agréable à l'Eternel ; sur les deux » grands Imams y tous deux parfaits en doc-» tri ne et en vertu , distingués en sciences et » en œuvres, illustres en race et en noblesse , » résignés aux volontés du ciel et aux décrets » du destin , patiens dans les revers et dans » les infortunes ; les Emirs , les princes delà » jeunesse céleste , la prunelle des yeux des » fidèles , les seigneurs des vrais croyans , » Hassan et Hussein , Jes agréables à l'Eter-» nel, à qui touspuissentégalement être agréa-» bles ! » O vous, assistans, ô vous fidèles, craignez O iv » Dieu et soyez-lui soumis. Orner , l'agréa-» ble à l'Eternel , dit que le Prophète de » Dieu a proféré ces mots : Point d'actions h que celles qui sont fondées sur l'intention. » Le Prophète de Dieu est véridique dans ce »» qu'il dit ; il est véridique , Mohammed, l'ami » de Dieu et le ministre des oracles célestes. » Sachez que la plus belle des paroles est la » parole de Dieu tout puissant, tout clément, » tout miséricordieux. Ecoutez son saint com-» mandement : Lorsqu'on fait la lecture du » Cour'ann , prêtez-y l'oreille avec respect et » en silence , pour qu'il vous soit fait misé-» ricorde! J'ai recours en Dieu contre le démon » chassé à coups de pierres. Au nom de Dieu » clément et miséricordieux ; en vérité , les » bonnes actions effacent les mauvaises. » Ici le ministre Khatib fait une pause, s'assied , récite tout bas difïërens versets du Courann } auxquels les Muezzinns , placés dans leur tribune , répondent en plain-chant, Aminn y Aminn:'\\ se lève ensuite et entonne le second Khouthbê. » Par honneur pour son Prophète, et par » distinction pour son ami pur , ce haut et » grand Dieu , dont la parole est ordre et » commandement, dit: Certes , Dieu et ses an-» ges bénissent le Prophète. O vous, croyans, » bénissez-le , adressez-lui des salutations pu-» res et sincères ! O mon Dieu , bénissez Mo-» hammedy l'Emir des Emirs, le coryphée des » Prophètes , qui est parfait, accompli, doué » de qualités éminentes , la gloire du genre » humain, notre Seigneur et le Seigneur des » deux mondes, de la vie temporelle et de la » vie éternelle! O les amoureux de sa beauté » et de son éclat, bénissez-le, adressez-lui des » salutations pures et sincères! O mon Dieu! » bénissez Mohammed et la postérité dê Mo-» hammed, comme vous avez béni Ibrahim » et la postérité d'Ibrahim ! Certes, vous êtes » ado ra b 1 e, vou s ê t es g r a n d ; sa n c t i fiez M oh a m-» med et la postérité de Mohammed, comme »vous avez sanctifié Ibrahim et la postérité » d'Ibrahim f Certes , vous êtes adorable , » vous êtes grand. O mon Dieu ! faites misé-wcorde aux Khaliphes orthodoxes, distingués » par la doctrine, la vertu, et les dons Célestes, » dont vous les avez comblés, qui ont jugé et h agi selon la vérité et selon la justice. O mon » Dieu, soutenez , assistez, défendez votre »> serviteur, le plus grand des Sultans; le plus » éminent des Khacanns, le roi des Ara-» bes (t) et des Persans, le serviteur des deux >» cités saintes" ( la Mecque et Médine}, Sultan *> fils de Sultan ,petit-fils de Sultan, le Sultan » Ahd'ul-Hamid-Khan, dont l'Etre suprême » éternise le Khalipbat et perpétue l'empire » et la puissance , Aminn , Amen. » O mon Dieu ! exaltez ceux qui exalteut » la religion , et avilissez ceux qui avilissent » la religion. Protégez les soldats Musulmans, » les armées orthodoxes ; et accordez-nous » salut, tranquillité, prospérité , à nous, aux » pèlerins, aux militaires , aux citoyens en » demeure comme aux voyageurs sur-terre et » sur mer, enfin à tout le peuple Mahométan. » Salut à tous les Prophètes et à tous les » Envoyés célestes; louanges éternelles à ce » Dieu créateur et maître de l'univers. Certes, (i) Arèb ve Adjém, mots sous lesquels on désigne toutes les nations de la terre. 1 CODE RELIGIEUX. 219 » Dieu ordonne 1 équité et la bienfaisance. Il n ordonne et recommande le soin des proches. » Il défend les choses illicites, les péchés, les >> prévarications. Il vous conseille d'obéir à ses » préceptes, et de les garder religieusement » dans la mémoire. « Outre ces Khoulhbés ordinaires consacrés aux vendredis et aux deux fêtes de Beyram , il en est encore trois d'extraordinaires qui se récitent à la Mecque, avant et après la fête des sacrifices, ainsi qu'on le verra dans l'article du pèlerinage. C'est communément le Molla de cette cité qui s'en acqui tte, le 7 de la lune de Zilhidjé dans le temple de la Mecque, le 9 au mont Arafalh , et le 11 à Mina. Ce magistrat y joint différentes autres prières analogues au jour, et finit par une exhortation instructive sur les sentimens de religion et de piété qui doivent animer les Musulmans dans les pratiques du pèlerinage. •5°.L'assemblée des fidèles. Comme ce iW/m/75«6olennel ne peut jamais avoir lieu qu'en corps et à la mosquée , rien n'égale l'af-fluence du peuple dans tous les temples qui ont droit de le célébrer. Il faut des raisons bien graves, des circonstances bieji pressantes pour qu'un Musulman s'absente ce jour-là d'une de ces mosquées, et qu'il s'en tienne au Namaz ordinaire de midi dans une autre. Les malades seuls, et ceux que la loi dispense de cet office public, tels quejes esclaves, les mineurs, les voyageurs, les villageois, etc. se permettent de faire à la même heure un Namaz particulier chez eux ou ailleurs. Et 6°. Une liberté entîere et générale. La liberté requisepour la validité de ce Namaz solennel, s'étend jusqu'aux derniers du peuple. Ainsi toutes les portes des mosquées et celles même de la ville sont entièrement ouvertes ce jour-là. Il n'est permis, selon les Fctlwas des Mouphtys , de fermer les portes d'une ville où il existe des temples qui ont le droit de faire cette prière publique des vendredis , qu'en temps de guerre, supposé cependant que l'on soit dans le cas de craindre une attaque soudaine de la part des ennemis.» On a observé plus haut, à l'article de la cosmogonie, que le fondateur de l'Islamisme a * consacré le vendredi , sixième jour de la semaine , à cet acte important de sa religion , en signe d'hommage et de reconnoissance envers l'Eternel «, pour avoir créé l'homme ce jour-là. Cette institution étoit d'ailleurs conforme à son système général, de n'admettre dans son nouveau culte , rien d'analogue, ni au Christianisme , ni au Judaïsme. C'est pour cette raison que le vendredi n'est pas même célébré comme un jour de repos ou de fête publique : il n'est distingué des autres jours que par ce Namaz j et ce n'est que pendant la durée de cette prière, crue le peuple est obligé de suspendre tout travail et toute occupation quelconque. Le reste de»la journée est absolument employé comme les autres jours de la semaine. 1 * CHAPITRE V. De l Oraison Pas c haie dans les deux Fêtes de Beyram, Salath'ul-id. L'oraison paschale est une prière particulière consacrée au premier jour de chacune des deux fêtes de Beyram. Elle est d'obligation canonique. Elle exige absolument les mêmes conditions que la prière publique des vendredis, en observant seulement que le Khouthbê, au lieu d'être récité avant la prière, doit l'être, tlans ces deux fêtes , immédiatement après. Cette oraison consiste en un Nama^ de deux rik'aths. Son heure spéciale et particulière est depuis le lever du soleil, parvenu à la hauteur apparente d'une lance , jusqu'à son déclin , moment où commence l'heure canonique de midi. Si l'on manque cette heure , quel qu'en CODE RELIGIEUX. 223 soit le motif, on doit remettre l'oraison paschale au lendemain, toujours à la même heure. C. C'est à l'exemple de ce qui fut pratiqué par le Prophète, à qui il arriva dans une année de continuer le jeûne, lui et les siens , le premier du mois de Schewal, parce qu'un temps nébuleux avoit empêché de voir la nouvelle lune. Cependant différentes personnes ayant le même jour, dans l'après-midi, attesté en sa présence qu'elles l'avoient vue la nuit précédente , il ordonna aussitôt de rompre le jeûne et de célébrer la fête ; mais il remit l'oraison paschale au lendemain matin. Si on manque encore cette heure le second j our, quelle qu'en soit la raison, on ne peut plus remettre la prière au jour suivant, attendu qu'elle ne doit jamais avoir lieu que dans l'un des deux premiers jours de la fête. Cette prière n'admet ni l'annonce Ezann ni Ylkamcthi on ne peut en réparer la négligence 224 CODE RELIGIEUX, par aucune prière satisfactoire ; celles même qui sont de surérogation, ne peuvent pas avoir lieu dans la matinée delà fête, avant que Ton se soit acquitté de ce devoir solennel du jour. Il est cependant louable de la faire précéder par une lotion générale, comme aussi de se laver labouche, de se frotter les dents, et de faire usage de parfums et d'aromates , pour que personne n'éprouve, au milieu de l'assemblée, dans le temple du Seigneur, de mauvaises odeurs et des exhalaisons fâcheuses. Il est encore louable de se parer en ces jours solennels, de porter des habits neufs et propres ; de réciter le long du chemin, en allant à la mosquée, le Tekbir : Grand Dieu ! grand Dieu,! jillaJi u-ekber ! Allait u-ekber ! Ces paroles doivent être proférées dans la fête iïld-fitr, à voix basse; et dans celle IcFAd'hha, à haute voix, à cause des sacrifices de ce jour. Il convient également, dans la première fête, de manger quelque chose avant de s'acquitter de l'oraison paschale ; dans la seconde, au contraire, d'être à jeun, et de ne manger qu'après la prière et les sacrifices. C. Ce sont autant de pratiques observées par le Prophète lui-même. Dans la première fête il avoit coutume de manger, avant l'oraison , trois, cinq ou sept dattes bien mûres ; et dans la seconde, il faisoit à jeun la prière et les sacrifices , et goûloit ensuite de la chair des animaux qu'il avoit immolés de sa main. Enfin dans le Khouthbê de ces deux fêtes, le ministre Khatib est tenu d'enseigner au peuple, dans la première, toutes les pratiques prescrites pour cette solennité, «sur-tout l'obligation de l'aumône paschale en faveur des pauvres ; et dans la seconde , tout ce Tome II. p 226 CODE RELIGIEUX, qui est relatif aux sacrifices et au tekbir-Tesclirik. C. C'est un cantique que tout fidèle est obligé de réciter à la suite des cinq Namazs , tant dans UArifé-guny , ou veille de l'Id-Ad'hha y que dans les trois premiers jours de cette fête, ainsi que dans les trois premiers Namazs du quatrième jour , faisant en tout vingt-trois Tekbir- Teschriks. Le voici (i)^ « Grand Dieu ! Grand Dieu! » il n'y a point de Dieu sinon Dieu j Grand » Dieu ! Grand Dieu ! les louanges sont pohr « Dieu. « Ce cantique est en mémoire du sacrifice ordonné à Abraham. L'ange Gabriel, en lui présentant le bouc céleste , proféra les mots Grand Dieu , Grand Dieu ! Abraham y ajouta : Il n'y a point de Dieu sinon Dieu j et Ismaël les termina par ceux-ci : « Les » louanges sont pour Dieu. « V. L'Imam Schafiy exige que l'on répète trois fois le mot Allah'u-ekber y Grand^Dieu ! (i) Allah'u ekber ! Allah'u ekber ! la ilah'i iWallah , ve Allah'u ekber, Allah'u ekber, ve VillaKïl-hamd. Observations. Ces deux Beyrams sont les seules fêtes religieuses du Musulmanisme. La première , appelée Id-Jiir, qui veut dire , la fête de la rupture du jeûne , a lieu le premier de la lune de Sciiez al, à la suite du jeûne de Rama-zann. La seconde, appelée Id-Adhha ou Courbann-Bejram , c'est-à-dire , la fête des sacrifices, se célèbre soixante-dix jours après , le dix de la lune de Zilhidjé : le mot Id, consacré à l'une et à^l'autre , dérive du verbe âwd ou Muâii'edé , qui signifie revenir, retourner , désignant par-là le retour périodique et annuel de ces fêtes religieuses. Bejram est un mot Turc qui répond à Yld Arabe. Comme les années des Mahométans sont lunaires, ces deux fêtes parcourent dans l'espace de trente-trois ans toutes les saisons de l'année. La première n'est que d'un jour ; le peuple cependant la célèbre trois jours de suite : la seconde est de quatre. Ces sept jours de fête sont de toute l'année les seuls de divertissement pour le peuple. Cependant , dans l'un comme dans l'autre Beyram, l'oraison paschale n'a jamais lieu qu'une fois , le premier jour, environ une heure après le lever, du soleil. Cet office solennel n'est plus précédé aujourd'hui de l'annonce Ezann, du haut des minarets , comme il l'étoit autrefois, d'après les régle-mens du Khaliphe Abd'ul-Melik I. Les anciens Imams ont aboli cet usage , comme étant de pure institution humaine. La célébration de ces deux Beyrams se fait toujours avec le plus pompeux appareil. A ces époques le Monarque reçoit les hommages des dirïérens ordres de l'Etat. Cette cérémonie, appelée Muâyedé , a lieu au Sérail vers le lever du soleil ; et immédiatement après, le Sultan se rend à la mosquée avec un cortège encore plus brillant que celui des vendredis. Il est alors accompagné de ses ministres et de tous les grands officiers de l'Empire ; mais de tous les gens de loi, le Mouphty , les deux Cazlashers , Y Istambol-Ejendîssy*, et le JSTakib'ul-Esc/irqf', sont les seuls qui soient obligés d'être de sa suite ; le reste des Oulémas n'accompagne la marche publique du CODE RELIGIEUX. 229 Souverain que le jour de la solennité du sabre , qui tient lieu de sacre et de couronnement, et lors de la consécration d'une nouvelle' mosquée Impériale. Quand l'une ou l'autre fête de Bejrani se rencontre un vendredi, le Sultan se rend ce jour-là deux fois à la mosquée ; le matin, avec toute la cour , pour l'oraison paschale ; et à midi, avec son cortège ordinaire , pour le Namaz public des vendredis. Ces deux Éeyrams étant les seules fêtes religieuses de la nation, sont conséquemment les seules époques où il soit permis dans toutes les villes Mahométanes de fermer boutiques, magasins etmarchélpublics. Tout commerce, tout trafic, tout travail manuel est suspendu dans ces sept jours de l'année. Il n'est point d'individu , quel que soit son état et sa condition, qui n'ait, dans ces deux Beyrams , un habit neuf. Les parens et les amis se font mutuellement visite pour se souhaiter la bonne fête , et c'est presque la seule occasion où il soit d'un usage général de se toucher la main, de s'embrasser et de se témoigner réciproquement les sentimens les plus affectueux. Les enfans baisent la main de leur père , de leurs aïeux, de leurs parens. Les jeunes gens en font de même à l'égard des personnes âgées*, mais les subalternes ne baisent jamais que le bord de l'habit de leurs chefs , des officiers supérieurs , des principaux personnages de l'Etat. On ne voit jamais dans le peuple, moins encore parmi les personnes de marque, ces démonstrations de joie , ces signes de gaieté qui éclatent chez les autres nations en différentes époques de Tannée. Les Mahométans ne connoissent ni la danse , ni la musique, ni aucun jeu quelconque : tous cesamusemens sont proscrits par la légtslation religieuse , comme on le verra dans les lois morales. Il n'y a rien de bruyant, rien de mondain dans la célébration de ees fêtes. Toute la récréation du peuple consiste à se promener tranquillement , toujours à pas graves, dans la ville et dans les environs. Parens et amis, tous se rassemblent , et vont par bandes de huit , dix ou quinze personnes , visiter leurs connois-sances, s'arrêtant quelques momens, soit dans les places ,'soit dans les promenades publiques CODE RELIGIEUX. 23i pour fumer, prendre du café , et) causer avec le plus grand flegme, des affaires du temps et des évènemens du jour. Tel doit être l'effet* des mœurs simples et austères et du caractère sérieux de ce peuple privé de la fréquentation entre les deux sexes, chez lequel les femmes ne paroissent que rarement en public , cl toujours voilées , sans aucune idée des spectacles, desdivertissemens publics, et où enfin l'usage du vin , proscrit par la loi, est interdit plus rigoureusement encore dans ces jours de fête. La veille de chaque Bejyram-, la police a soin de mettre le scellé sur les portes de tous les cabarets , qui n'existent même que^dans les faubourgs halfités par lc^s Chrétiens. Cette précaution est une loi des plus sévères, qui se renouvelle chaque année dans toute l'étendue de l'Empire. C'est ainsi que les fêtes Musulmanes, célébrées dans le calme et dans le silence , présentent un tableau bien diffèrent de celui des grandes villes de l'Europe aux solennités du Christianisme. P iv f ' ■ m 2Z2 CODE RELIGIEUX. CHAPITRE VI. De la Prière Terawihh pendant le Ramazann. Cette prière, d'obligation imitative, est consacrée aux trente jours de jeûne de la lune de Ramazann. Elle consiste en un Namaz^ extraordinaire de vingt rik'aths, dont tout fidèle doit s'acquitter de nuit, à la suite des cinq Namaz^ ordinaires du jour. On peut faire cette prière en particulier , chez soi ; nîais il est plus louable de la faire en corps, soit à la mosquée, soit ailleurs. ' ^..L'Imam Malik, qui, au lieu de vingt , exige trente-six rik'aths; pense, ainsi que l'Imam Schafiy et l'Imam Ebu1 Ybussouph, qu'il est plus louable de * faire ce Mz/naç seul, plutôt qu'en commun , et cela pour être plus en garde contre tout sentiment d'affectation et d'hypocrisie dans une aussi longue prière. Ce iVamai étant de vingt rik'aths , exige par-là même dix saluts de paix , et cinq pauses. C. Elles doivent être aussi longues que le temps nécessaire pour faire une prière de | quatre rik'aths. C'est pourquoi ce Namaz extraordinaire est nommé Terawihh ( plu-rier de TerwihK), qui signifie repos, respiration. Dans ces intervalles, le fidèle, ^ssis sur ses genoux, est le maître de réciter le Tessbihh ou le Tehhlil, ou quelques versets du Courann; il peut aussi faire des prières, soit satisfactoires', soit su-rérogatoires, ou bien garder le silence dans un recueillement profond. Quant aux citoyens de la Mecque , il leur est permis de faire, pendant ces pauses, des tournées , Tawaf, autour du Keabé. Il est aussi d'une pratique imitâtive de • faire dans ce long Nama^ et pendant t 234 CODE RELIGIEUX, les trente nuits du Ramazann, une récitation générale du Courann. C. On doit réciter dix versets par rik'ath , ce qui complète dans les trente nuits , les six mille versets du Cour'unn, selon la rédaction de quelques Imams, qui bornent à ce nombre les six mille six cent soixante-six Jyelhs ou versets de ce livre saint. Les Imams Mudj-tehhids ou interprètes sacrés , avoient coutume de réciter trois fois le Cour'anrien entier , pendant le Ramazann ; et Vlmam Azam Ebu Haniféy soixante-une fois. A la suite de ce long Namaz> consacré aux seules nuits du Ramazann , il est louable et méritoire de faire en communia prière ordinaire, Salatk-witr, qui précède l'aurore. C. Cela n'est permis que pour cette lune de jeûne et de pénitence , pendant laquelle on peut faire , aussi en corps et sous les auspices d'un Imam, des prières surérogfctoircs, qui d'ailleurs ne peuvent avoir lieu dans aucun autre temps de l'année , pas même dans les sept nuits saintes , Leilé-y-Miibaréhé. Observations. Les Mahométans, naturellememt religieux et attentifs à tous les devoirs du culte extérieur , se livrent d'une manière plus particulière encore aux exercices de piété pendant la lune du Ramazann. Le jeûne ou l'abstinence la plus rigoureuse durant tout le jour , est suivi d'une multitude de prières et d'actes de pénitence, dans la majeure partie de la nuit. Ils s'acquittent très-scrupuleusement, les uns en particulier , les autres en commun, de cette longue prière , Tcrawihh j ils récitent le Courann j font des Namazs suréroga-toires , et passent des heures entières dans les mosquées , qui généralement toutes sont ouvertes et illuminées pendant les trentesnuits de cette lune. Enfin la dévotion dans cette partie de l'année éclate dans tous les ordres de la nation de la manière la plus exemplaire et la plus édifiante. Quant aux sept autres nuits réputées 236 CODE RELIGIEUX. saintes, et également consacrées à la dévotion du public, nous'en parlerons plus bas , dans le discours qui termine cet article des prières. CHAPITRE VIL De la Prière à Voccasion des Eclipses de Soleil ou de Lune. Les éclipses et il fera descendre sur toi des nuées de pluies abondantes. Ces prières, animées par la foi f (i) Fe'esstaghherou rebbïk'um enndïli'u keané ghaffa'enn yursd''ul-sema aUyk'um medrar'enn. la douleur et la componction, opérèrent plusieurs miracles : un jour (pie le peuple faisoit retentir le temple de ses lamentations sur la sécheresse, le Prophète, du haut de la chaire , adressa au ciel ses gémissemens et ses vœux ; et tout-à-coup une pluie abondante arrosa la terre pendant sept jours et sept nuits. Dans une calamité semblable, le Khaliphe Orner, pressé par les clameurs des fidèles, assembla les Asshabs pour délibérer avec eux sur la nécessité d'une prière générale: Keab , l'un de ces disciples , lui indiqua , comme le moyen A le plus efficace , de recourir à l'Etre suprême, avec l'un des parens collatéraux du Prophète, à l'imitation des Israélites, qui, dans ces circonstances , ne faisoient jamais leurs prières qu'avec un parent de Moyse. Orner , applaudissant à cet avis , monte en chaire avec A bas, oncle du Prophète, le fait asseoir à côté de lui, et profère ces paroles : O mon Dieu (i), nous recourons à toi , avec Voncle de ton Prophète , etc. A peine eut-il fini sa prière, qu'une (i) Allah*ummi neuwessdcileyk bl-amm'ineb'ikc. forte CODE RELIGIEUX. 241 forte pluie, répandit la joie dans le cœur de tous les fidèles. Cette prière n'étant pas dans la forme d'un Namaz_ , n'exige ni riKath, ni Khouthbê, ni la réunion des fidèles dans lq temple; il faut qu'ils se rassemblent dans une place publique, où chaque individu doit, en son particulier, implorer la miséricorde divine sur soi et sur le reste du genre huinain. C. On se conforme par-là aux ordres du Prophète et aux pratiques qu'il observa lui-même. Ainsi le peuple entier, grands et petits, maîtres et esclaves , riches et pauvres, tous doivent se réunir dans une place publique, à pied, vêtus de vieux habits, la tête inclinée vers la terre, l'esprit humilié, le cœur contrit , et les yeux baignés de larmes. Cette pénitence doit encore être précédée d'aumônes , d'actes de contrition, et de marques authen-* tiques d'une réconciliation sincère avec le prochain ; mais il faut s'associer la généralité du Tome IL Q 242 CODE RELIGIEUX. peuple, d'après ces paroles du Prophète : Saus les enfans encore à la mamelle , sans les animaux qui broutent l'herbe } cl sans les pécheurs convertis à Dieu , les calamités foudroient sur vous (i). Sans les pauvres , sans les faibles qui se trouvent parmi tous j tous ne seriez ni assistés , ni pourvus de biens (a). V. Les Imaméïnns admettent, en ces occasions fâcheuses , et un Nama^ de deux rik'aths, et le Khouthbê, et l'a réunion des fidèles dans le temple , et la prière particulière de l'Imam sur la chaire même , en s'ap-puyant de la main droite sur un sabre , sur un arc , ou sur un bâton pastoral. Cette pénitence publique doit durer trois jours, jamais au-delà. Le Souverain est le maître de la faire précéder par un jeûne aussi de trois jours, qui devient alors obligatoire pour tout le peuple Musulman. Il h?est permis ni à Y Imam souverain, (1) Lewla sibyann redâ ve behhaim rettâ ve ib ad* ullah reka H sabê aleyk'um 'ul-a^ab sabba. (2) Hel tensarùunê ve ter^akouvê illa bi-^ouâfaïlCum.. CODE RELIGIEUX. 343 ni à Y Imam prêtre, ni à aucune autre personne , de retourner à cette occasion son manteau ou son habit (i), en signe de ses vœux et de ses désirs pour le changement de temps, objet de cette pénitence publique. C. Cependant le Prophète en a usé ainsi quelquefois ; mais cette action étoit réservée à lui seul, vu son auguste caractère et sa mission divine. V. L'Imam Mohammed le permet , mais au seul Souverain , en sa qualité de vicaire et de lieutenant du Prophète. Enfin les Zimmys y les sujets non-Musulmans ne doivent pas concourir avec les fidèles à cette pénitence, parce que leurs prières ne sont pas toujours efficaces , et que, loin de mériter les grâces et la miséricorde du ciel , leur infidélité ou leur perversité ne peut au (i) Vela tckallebé erdetihhim. 244 CODE RELIGIEUX, contraire attirer sur eux que sa malédiction et ses fléaux. C. Leur exclusion est décidée , et par ces paroles divines : La (i) prière des infidèles n'est pas prière > mais égarement j e( par ces paroles du Prophète: Je me retire (2), je détourne mon visage de toute société où les fdèlcs sont mêlés avec les infidèles. V. L'Imam Mal'ik les admet , s'ils y concourent d'eux-mêmes et de leur propre mouvement : il s'appuie sur plusieurs exemples de cette nature qui eurent lieu sous les règnes des premiers Khaliphes. Observations. Ces prières extraordinaires à l'occasion des evenemens naturels , ou des calamités publiques , se font rarement. Celles qui sont prescrites pour les éclipses de soleil ou de lune, et dont l'objet est de rassurer les peuples contre l'effroi de ces phénomènes, ont été dictées, non par ignorance des principesastronomiques, (1) Ve ma doa'el-keafirlné Ma fi ^alal. (a) Ena beriy'unn ma Muslïm mon muschrik. C O D E RELIGIEUX. 245 mais dans la vue d'écarter des esprits les idées superstitieuses , les pronostics et les illusions accréditées de tout temps par les astrologues et les devins. Plus les Mahométans ont avancé dans les connoissances astronomiques, plus ils s'éclairent, plus ils reviennent des préjugés dont ils ont hérité des anciens Arabes, et plus aussi ils voient d'un œil tranquille ces phénomènes célestes, sans recourir aux prières prescrites par la loi : prières depuis Jong-temps abandonnées au vulgaire. L'Etat ne les ordonne que dans les temps de calamités. Ce fut sous le règne de Mou-rad III que ces prières , en forme de pénitence publique, eurent lieu pour la première fois dans l'Empire Othoman. Ce Sultan, alarmé de la position de l'Empire, alors ébranlé par les dissentions civiles , les guerres et les ravages sans exemple , que faisoit la peste dans la capitale, ordonna des prières publiques pour fléchir le ciel. Elles se firent dans la plaine Ock-Méidany 3 Zilhidjé 1000. ( 11 Septembre 15oa ), Vézirs, Ministres, Oulémas , Schejhh > officiers de tous les ordres» 246 CODE RELIGIEUX, les grandi , le peuple, tous s'y rassemblèrent avec un zèle empressé. A la suite d'un discours analogue aux circonstances , prononcé par le prédicateur ordinaire de Sainte-Sophie , on implora la miséricorde divine et l'intercession du Prophète : les assistans prosternés, et baignant la terre de leurs larmes, faisoient retentir l'air de leurs gémissemens et de leurs sanglots. Mourad III fit immoler le même jour un grand nombre de victimes, en répandant des sommes considérables dans le sein des pauvres et des familles honteuses. Il ouvrit les prisons publiques, et rompit les chaînes d'une infinité de malheureux , même des criminels d'Etat enfermés au ch a teau des sept tours. On renouvela, dix jours après, ces prières sur le mont Alem-Daghy. Sous le règne non moins désastreux de Mohammed III, les mêmes circonstances engagèrent ce Monarque infortuné à recourir à ces secours spirituels. La cour et la ville allèrent de nouveau prier et gémir dans la plaine Och-Meidany. Trois mois après on répéta cette pénitence, d'abord dans la même plaine, ensuite dans la mosquée Sultan-Mohammed , à cause des revers successifs qu'es-suyoient les armes Othomanes en Hongrie, et de la désolation de la capitale^, alors cruellement affligée par la sécheresse et la famine. Mais le ciel paroissant inexorable , Mohammed III , désespéré , attribue tant de calamités à la corruption générale du peuple , qui attiroit sur lui et sur l'Etat le courroux de Dieu et de son Prophète. Il fulmine contre le vice et la crapule; fait mettre à mort«pIu-sieurs citoyens convaincus d'irréligion et de mauvaises mœurs ; par son ordre , on arrête toutes les femmes publiques, qui sont étranglées et jetées dans la mer : il publie enfin un édit terrible contre le vin ; il fait détruire tous les cabarets, et défoncer dans tous les magasins les tonneaux remplisde cette liqueur proscrite par l'Islamisme. Forcé par les* circonstances de marcher en personne à la guerre, ce Monarque écrivit , quelques semaines après son départ de Constant inople , au Caïtn-mécam Hassan Pascha , qu'ayant le projet d'aller droit à Q iv Egra, il devoir, ordonner de nouvelles prières pour le succès de ses armes contre les ennemis de la religion et de l'Etat. Aussitôt ce gouverneur de la capitale lit fermer les "boutiques , les magasins, les marchés , et ordonna des prières publiques pour huit jours consécutifs. Elles se firent d'abord dans la plaine Ock-Méidany, ensuite dans les mosquées de Sainte-Sophie y de Sultan-Mohammed, Sultan-Bayézid 3 Sultan-Sélim , Sultan-Suleyman, et Schahzade'-Sultan-Mohammed: on finit par celle cYEyuh. Le chant des en-fans, les hymnes des Muezzinns-, les pleurs et les sanglots de tant de milliers d'hommes et de femmes, offroient, dit l'historien national , un spectacle difficile à dépeindre. Le Caim-mécam enjoignit ensuite à chaque famille de se réunir les mardis et jeudis, pour faire en corps ces mêmes prières , afin de rendre le ciel propice au peuple Musulman. Depuis cette époque,on n'a ordinairement recours à ces prières qu'en temps de guerre, sur-tout lorsqu'elle est malheureuse ; elles ne se font même que par la bouche des enfans, comme on l'a. vu clans la dernière guerre avec la Russie. Chaque Khodjea ou recteur des écoles publiques , parcourt un ou deux faubourgs de la ville, à la tête de tous les enfans dont l'éducation lui est confiée. L'un d'entre eux fait des vœux pour la prospérité des armes Othomanes , et les autres répondent tous ensemble , Aminn ,Aminn. A la suite de l'office public , on fait aussi pour le même objet des prières dans toutes les mosquées de l'Empire, mais sur-tout à la Mecque et à Médine. L^point qui concerne les prières des Chrétiens et leur inadmission dans l'assemblée des Mahométans , répond à la maxime : Non cojnmunicare in divinis. Il ne doit être envisagé que sous ce rapport seul 9 et non sous celui de la non-efficacité des prières des non-Musulmans, puisque la doctrine mahométane, selon le cinquante-quatrième article de foi déclare que leurs vœux et leurs prières peuvent être exaucés par le ciel. Divers exemples sous les anciens Khaliphes prouvent même que cette opinion étoit très-accréditée dans les premiers siècles du Mahométisme. soo CODE RELIGIEUX. Nous en citerons ici un trait digne de remarque. Au rapport d'Ibrahim Iïaleby , on éprouva à Baghdad une cruelle disette d'eau , sous le règne à'Abd'ullah III, dit Mêemounn. Ce Khaliphe ordonna une pénitence publique , et sortant de la capitale à la tête de tout le peuple Musulman, il fit, en pleine campagne, les prières prescrites par la loi , sans que le ciel exauçât ses vœux. Il les renouvela jusqu'à trois fois , toujours sans effet. Pressé enfin par l'excès alarmémt de cette calamité , il ordonna que tous les sujets non-Musulmans, soit Chrétiens , soit Juifs, eussent à concourir à cette pénitence ; et le jour même, le ciel propice à leurs vœux , accorda une pluie très-abondante. Le Khaliphe, frappé de surprise et ébranlé dans sa foi, assembla les Oulémas, et leur demanda l'explication de ce mystère. Personne ne sut lui répondre; mais un vieillard aussi pieux que savant, et sans doute inspiré par le ciel, continue l'auteur, lui dit, d'un ton d'assurance , que cet événement n'a-voit rien d'extraordinaire ni de contraire à la sainteté de la religion de Mohammed. Dieu, ajouta-t-il , aime tellement les Musulmans , son peuple élu , leurs prières et leurs vœux lui sont si agréables, qu'il tarde quelquefois à les exaucer , pour les obliger à les renouveler : au contraire, il hait tellement les infidèles, et leurs prières lui sont si désagréables, que souvent il se hâte de les exaucer, pour qu'ils ne reviennent plus à la charge. Nonobstant toute l'absurdité d'un raisonnement aussi fanatique, le même auteur semble y applaudir , et ajoute que cette réponse enchanta le Khaliphe, calma ses agitations et dissipa ses doutes. Ces opinions , jointes à l'énoncé de la loi, qui interdit toute société religieuse entre les Mahométans et les non-Mahométans, tendent à effaroucher les esprits foibles et superstitieux , et influent même sur l'état civil de la nation. Elles éloignent tout esprit de commerce et de sociabilité entre elle et les autres peuples. Il existe cependant dans sa législation, comme on le verra par la suite, des passages qui renferment et inspirent des principes opposés. Il'ne dépend donc que de la politique, et d'une administration prudente et habile , d'incliner les esprits vers l'opinion la plus conforme à l'humanité, et vers le système le plus utile à l'Etat. On le répète, un Sultan éclairé trouveroit, dans la loi même et dans la conduite des anciens Khaliphes, de quoi combattre ces préjugés, élever les Otho-mans au-dessus des siècles qui les ont vu naître , et leur faire adopter les sages maximes qui ont contribué à la gloire de tant d'autres nations , aussi distinguées aujourd'hui par leurs qualités sociales, que par la profondeur et l'étendue de leurs connoissances. CHAPITRE IX. De Ici Prière des Militaires au moment du combat, Salath'ul-Khawf (i). Cette prière est prescrite aux militaires, à tous les fidèles qui, en temps de guerre, marchent en corps d'armée contre les ennemis de la religion et de l'Etat. Elle est d'une obligation imita-tive, ayant été constamment pratiquée par le Prophète, par ses disciples, et par les Khaliphes ses successeurs. V. L'Imam Ebu-Youssouph ne la donne que pour une prière surérogatoire. Cette prière est un Nama^ d'un ou de deux rik'aths, selon la marche de l'armée et le moment de sa rencontre avec l'ennemi. La marche des Musulmans, lorsqu'elle est de quelques jours , ne (i) Ce mot signifie proprement, oraison contre la crainte , contre le danger. fût-ce que de trois, les assimile aux vojageurs , et n exige qu'un rik'ath ; niais si elle est moindre de trois jours, les combattans sont alors envisagés comme des hommes en demeure fixe, et par-là même tenus à deiîx rik'aths. Dans l'un et l'autre cas, ils sont également obligés à deux rik'aths, si la rencontre de l'ennemi se fait sur le soir, pas autrement. Cette prière est nécessaire au moment où les fidèles se voient en présence de l'ennemi. Ils doivent alors se diviser en deux corps, et s'en acquitter séparément et successivement, sous Ylmameth et la présidence du Sultan lui-même ou de son vicaire. L'un des deux corps doit être posté devant l'ennemi pour l'observer ; et le Sultan, placé à la tête du second, doit commencer la prière. Aussitôt qu'elle est terminée, la seconde division doit prendre la place de la première, afin que celle-ci s'acquitte également de la prière.sous Ylmameth du Souverain. Si la prièrenest que d'un rik'atk, le Sultan qui en auroit fait deux, c'est-à-dire, un à la tête de chaque corps, peut, à la fin du Namau donner le salut de paix à droite et à gauche. Aucun fidèle de l'armée ne doit l'imiter, parce que n'ajant assisté qu'à un seul rik'ath, il n'a fait qu'une prière incomplète. Malgré l'obligation de faire cette prière en corps, au moment où Ton est en présence de l'ennemi, on peut cependant s'en dispenser, si on est dans la nécessité d'agir et de combattre sur le champ. En général, dans toute occasion pressante et périlleuse, le fidèle est dispensé des Namazs, même des cinq heures canoniques du jour. C. Et cela à l'exemple du Prophète, qui, 256 CODE RELIGIEUX. dans la journée de Khandab , remit jusqu'à quatre des Namazs du jour , dont il s'acquitta la nuit sifivante , en lançant contre les ennemis cet analhème : Que Bien remplisse (i~)de Jeu, cl leurs maisons , cl leurs cœurs , et leurs tombeaux, en punition de ce qu'ils nous ont détournés des devoirs de notre culte. Enfin, s'il est impossible de faire cette prière en corps, le militaire doit s'en acquitter seul; et, soit fantassin, soit cavalier, en marche, en action , dans ses postes, au milieu même du combat, tous doivent faire ce Nama7L , en figurant, comme les malades, les inclinations et les prosternations, parle seul mouvement de la tête, sans être même tenus de se tourner vers le Keabé de la Mecque, parce que Dieu est par-tout, et que par-tout et en tout temps il reçoit la prière de ses élus. (i) Mcla Alla/tu, beyoutihhim ve coula ubïhhïmve cou-lourihhn nar'enn kema schefiuna anessalath. Observ. Observations.- Les gens de guerre sont extrêmement attentifs à s'acquitter de cette prière en commun , sur-tout lorsqu'ils peuvent la faire sans inconvénient. Si leur position ou des circonstances hasardeuses ne le permettent pas , alors tout combattant a soin de la faire en son particulier, dans les momens qui précèdent l'action. Comme la loi impose à tout Mahométan l'obligation de faire la guerre aux peuples non-Mahométans , que la religion promet la couronne du martyre à ceux qui meurent les armes à là main , et que toutes les guerres sont envisagées comme des guerres de religion , dont l'objet principal est de défendre ou de propager l'Islamisme, on sent à quel point cette idée échauffé l'enthousiasme, non-seulement des militaires, mais encore de toutes les classes de la nation. C'est pour soutenir cette ardeur et lenflammëï" de plus en plus, que la cour Othomane, à l'exemple des anciens Khaliphes, a toujours soin défaire marcher Tome IL R 258 CODE RELIGIEUX, à la suite des armées, les plus enthousiastes, soit des ministres de la religion , soit des Scheykhs et Berwischs des différens ordres. La veille d'une action, ils passent ordinairement la nuit en prières et en larmes : parcourant ensuite tous les rangs de l'armée , ils exhortent et les officiers et les soldats , par les motifs les plus puissans de la religion , à bien remplir leur devoir, et leur parlent des biens temporels et spirituels promis par le Prophète à tous ceux qui combattent ou meurent pour la défense de la foi. C'est alors qu'ils relèvent cette maxime, non moins politique que religieuse : Ou la gloire du triomphe, ou la couronne du martyre ; JTa ghazy, y a schehhid : enfin pendant l'action , les uns chantent divers passages du Coudann, mais plus ordinairement celui de Vedjeahhid'u ji sebiVillah : Combattez dans la voie du Seigneur } etc. } et les autres unissant leur voix à celle des combattans , répètent sans cesse le nom de Dieu, Allah, Allah , avec des cris et des hurlemens affreux. Autrefois , lorsque les Sultans comman- CODE RELIGIEUX. 259 doient en personne leurs armées , ils étoient en usage aussi de passer toute la nuit en prières. Quelques-uns même , au moment du combat, se jetoient, au milieu de leur tente, la face contre terre, et faisoient dans cette attitude, les plus ferventes prières. Voici, selon le Mouphty historien , celle que fit Mouradl j la nuit qui précéda la fameuse bataille de Kêoss-Owa, ou Cassovie en 791 ( 1889.). » Grand » Dieu ! s'écrioit-il , les mains élevées vers » le ciel et les yeux baignés de larmes; Grand » Dieu ! auteur et conservateur de l'univers , » l'appui des humbles et le soutien des foibles, » assistez-nous dans cette importante rencon-» tre. Ne permettez pas l'opprobre de mon » nom , l'avilissement de votre serviteur. Ne « sourirez pas que les drapeaux Musulmans « tombent au pouvoir des infidèles : que votre » sainte grâce soit notre guide et notre bou-» cher : protégez-nous, défendez-nous ,' assis-» tez-nous, Grand Dieu ! je vous en conjure » par tout ce qu'il y a de plus saint et de plus » sacré , par la splendeur de votre Prophète, » par la gloire de l'Islamisme, par le sang des R ij 260 CODE RELIGIEUX, «martyrs delà fatale journée de Kerbela, » par les larmes de toutes les ames saintes, »par les sanglots que poussent les fidèles » dans la voie de votre saint amour , par » la douleur enfin qu'expriment les cœurs » contrits et affligés dans le sentier delapéni-» tence. Soyez donc le défenseur du peuple » Musulman; arrêtez le bras de nos ennemis j i » émoussez leurs armes ; terrassez leurs géné-» raux et leurs soldats : oubliez nos péchés, *> nos crimes, nos iniquités , pour ne faire » attention qu'à nos larmes et à nos gémisse-» mens. Ne permettez pas, ôDieu des armées, » la défaite des Musulmans, la ruine descom-» battans de votre sainte religion. Ne permet- ' » tez pas que le fruit de tant d'années de » travaux , que la gloire de tant d'exploits, » s'évanouissent en un seul jour ; ne souffrez » pas que les Etats Musulmans soient foulés m aux pieds des infidèles ; que l'éclat des mos-» quées cède à l'obscurité des églises, et que des » pays éclairés par la lumière de l'Islamisme, » retombent dans les ténèbres de l'erreur et du ». mensonge. Si une victime vous est néces- » saire, frappez]ma"personne ", tranchez le fil » de mes jours, et que mon sang soit un sa-» crifice agréable dans le glorieux sentier de » la religion , pour le salut du peuple Musul-» man ; de ce peuple élu que vous avez comblé » de vos bienfaits, et que vous devez protéger » pour l'accomplissement de votre ouvrage , » et des vues adorables tracées dans vos dé-» crets éternels. « En 849 (1445) Mourad II fit à-peu-près la même prière dans la journée de Dobrldjé-Sahhrassjy près de Varna, journée si funeste kLadislas jYo'i de Pologne, et à cette fameuse confédération qui menaçoit alors la puissance Othomane. Des Vézirs, des Paschas , desSe-rarshers, et autres généraux Mahométans, ont donné, dans ces occasions, les mêmes marques de piété et de confiance en la protection divine. On voit dans les annales de l'Empire, qu'au moment du combat, ils descendoient de cheval , se prosternoient le visage contre terre, faisoient une courte prière, et après avoir imploré les secours du ciel et du Prophète , remontaient à cheval, et marchoient droit à l'ennemi. R iij Quelques-uns se frottent même la barbe avec de la terre trempée de leurs larmes. D'autres font bénir leurs armes par des Scheykhs} ou autres personnages réputés saints, tirent leur sabre, en frappent l'air à droite et à gauche , le présentent trois fois à l'ennemi, le remettent dans le fourreau, et donnent à l'instant même le signal du combat. D'autres enfin se recommandent aux saints auxquels ils ont le plus de dévotion, visitent leurs tombeaux, et se ceignent de leur sabre sur la fosse même, comme un pronostic heureux de leurs succès contre les ennemis de l'Etat. A la suite d'une victoire, les camps des Mahométans retentissent de ces paroles du Courann, Nassr minn' AllaEi, La victoire vient de Dieu y etc., et de plusieurs hymnes consacrées à ces évènemens. Ces prières, qui répondent en quelque sorte à notre Te Deum, se renouvellent ensuite dans toutes les mosquées de l'Empire, et sont presque toujours accompagnées de sacrifices, d'aumônes et d'illuminations publiques , dans la capitale comme dans toutes les grandes villes de la Monarchie. On doit observer ici qu'en général tous ces actes religieux , soit publics , soit particuliers , qui précèdent, accompagnent et suivent les expéditions militaires, sont l'effet d'une véritable piété, et de la persuasion où sont presque tous les peuples Mahométans, que Dieu seul, d'après ses arrêts éternels, décide du sort des batailles et de la destinée des nations. La valeur du soldat, la confiance avec laquelle il marche contre les ennemis de sa religion, sont soutenues par cette opinion commune , que les armées Musulmanes sont toujours protégées par des légions d'anges, qu'ils appellent Djounoud'ubGhdib , RidjeaVul-Ghaïb , Ridjeal-Ullah , ou Ghaïb-Erewiler 3 c'est-à-dire , les esprits célestes , ou les êtres invisibles. Cette opinion est appuyée, et sur les prétendus miracles du Prophète , qui fut secondé , dit-on, par ces légions célestes, dans les differens combats qu'il livra à ses ennemis , et sur ces paroles du Courann : Ton DieuÇf) te soutiendra avec mille anges trans- (i) Yumidrek'um rebbik'um bi elfi minn' el-mdaïketihh'i mussewweminn. Riv figurés j et ces autres : // vous assiste (i), il vous renforce avec des légions invisibles. Tous les docteurs accréditent cette croyance , et y ajoutent même, queles combattant, surtout lorsqu'ils sont animés par des sentimens d'une piété sincère , qu'ils ne marchent d'ailleurs qu'à une guerre juste et légitime , et n'ont d'autre objet que de défendre et de propager l'Islamisme , sont assistés et conduits par le Prophète lui-même, à la tête de toutes ces légions célestes. Lorsque les évènemens de la guerre trompent leurs espérances , lorsqu'ils essuient des revers , ces docteurs, ainsi que tous les zélateurs du Musulmanisme , ne manquent jamais d'attribuer leurs désastres au courroux de Dieu et de leur Prophète, en punition des vices qui déshonorent la nation en général, et des iniquités qu'elle se permet contre la religion et les lois. On apperçoit ici et les avantages èt les inconvéniens de cette opinion dans la conduite des affaires publiques, puisqu'elle (i) Ve eycdïKum bi djeounoud'i lem h rewehha. CODE RELIGIEUX. 265 sert, d'un côté, à diriger le peuple et les rai-lices au gré des circonstances , et de l'autre , à couvrir bien souvent sous le voile du fatalisme, tout ce qu'il y a de vicieux et de répré-hensible dans les projets des ministres comme dans les opérations des généraux. Nous en parlerons plus au long dans le corps de l'ouvrage , sur-tout dans le Code Militaire. CHAPITRE X. Des Prières à faire dans le Kéabé , Salath fil-Kéabé. Le Kéaoéde la Mecque admet indistinctement toutes les prières des fidèles, sans égard, ni au lieu , ni à la position, ni à l'heure, ni à la nature du Nama{, soit canonique, soit satisfactoire, soit surérogatoire. C. Cette loi est fondée sur l'exemple du Prophète , qui, le jour de la conquête de cette cité sainte , fit sa prière à une heure a66 CODE RELIGIEUX, non canonique , et clans le centre même du Keabé. V. L'Imam Schafiy et l'Imam Xialïk: n'y admettent que les prières surérogatoires ; et d'autres Imams, même Hanefys , ne permettent absolument aucun Nama^ dans l'intérieur de ce sanctuaire. Comme le Keabé est le point central du culte Mahométan, et que généralement tous les fidèles répandus sur la terre sont dans l'obligation de diriger vers ce lieu saint leurs prières et leurs adorations, le Musulman peut faire le Nama^, placé comme bon lui semble, dans cet auguste sanctuaire. Il est même permis de s y tenir le dos tourné contre celui de Y Imam; mais jamais face à face, de peur d'indiquer par cette posture, que la prière s'adresse à Y Imam lui-même. Lorsqu'un corps de fidèles s'acquitte du Nama^ dans le Keabé, ceux qui se trouveroient dans l'enceinte extérieure , seroient toujours censés , CODE RELIGIEUX. 267 tenir au même corps, et participer à la même prière : il suffit que les portes en soient ouvertes. Enfin, de tous les lieux du Keabé, il n'j a que le toit où il ne soit pas permis au fidèle de faire la prière. C. D'après la défense du Prophète, les chemins publics , les boucheries, les réservoirs d'immondices , les tombeaux des fidèles, les cabanes des chameaux , et les bains, soit publics , soit particuliers , sont également des lieux interdits pour la prière. Observations. Par le détail de ces prérogatives attachées au Keabé de la Mecque \ on voit qu'il est honoré comme le premier et le plus auguste de tous les temples Mahométans. Cependant, depuis plusieurs siècles , le Namaz en commun y est interdit. Ce sont les Schérifs de la Mecque qui ont fait cette défense avant l'époque de la soumission de cette cité à la maison Othomane. Elle avoit pour motif la religion ] 268 CODE RELIGIEUX, même , la sainteté du temple, souvent profané par les excès que la gradde affluence . du peuple occasionnoit, sur-tout les vendredis et les deux fêtes de Beyram. Depuis ce temps, le Keabé fut constamment fermé. Il né s'ouvre que six fois l'an , trois jours pour les hommes et trois pour les femmes; encore les uns et les autres n'y font-ils leurs prières qu'en particulier, toujours au gré et à la volonté de chaque individu. Les cinq Namazs du jour se fortt en commun , dans les quatre stations établies autour du Kéabé , et consacrées , comme autant de chapelles différentes à chacun des quatre rits orthodoxes de l'Islamisne. Nous en parlerons dans le discours qui termine le pèlerinage de la Mecque. CHAPITRE XL Des différentes Prières de dévotion. Indépendamment des Namazs canoniques , auxquels tout fidèle est absolument tenu, il en est aussi dont il doit CODE RELIGIEUX. 269 s'acquitter par dévotion, et qui sont à son égard autant d'actes louables et méritoires. Les voici : i°. Un iVamaido deux rik'aths, aussitôt que l'on entre dans la mosquée, avant de se ranger en ligne avec les autres fidèles, pour faire en commun celui d'une des cinq heures canoniques. Cette prière a pour objet d'honorer la sainteté du temple de Dieu. 20. Un Nama^ de quatre rik'aths, entre le lever du soleil et midi, dans la première des quatre parties du jour. 3°. Un de deux, immédiatement après l'ablution, pour remercier Dieu de ce que l'on a recouvré la pureté légale. 40. Un de deux ou de quatre rik'aths, à la suite de la prière canonique de l'après-midi. 5°. Un de six, immédiatement après celle du soir. Et 6°. Un de huit, après la cinquième prière dominicale du jour. 270 CODE RELIGIEUX. CHAPITRE XII. Des Prières Surérogatoires , Salath-Tetawwû , ou Salath-Nafilc. Les prières surérogatoires sont absolument arbitraires : on peut en faire et le jour et la nuit, et en autant de rik'aths que Ton veut, mais en observant de les faire doubles, et de terminer chaque second ou quatrième rik'ath par un salut de paix. On doit encore avoir l'attention d j faire des pauses, et même les plus longues possibles, parce que la récitation de divers chapitres du Courann,faîte debout pendant ces pauses , prévaut en mérites devant Dieu sur le nombre même des rik'aths. Toute prière de surérogation devenue invalide par une souillure, exige d'être renouvelée et acquittée par une prière satisfactoire. C. C'est qu'il est d'une maxime générale et CODE RELIGIEUX. 271 constante, que toute prière ou toute œuvre surérogatoire une fois commencée par le fidèle , devient à son égard un acte obligatoire. V. L'Imam Schafiy n'admet pas ce principe. On peut faire des prières surérogatoires sur son séant, ce qui n'est pas permis dans les Namazs canoniques ; mais si l'on commence la prière debout , et que l'on s'asseye après, la prière, quoique toujours valide, n'en est pas moins blâmable. Enfin tout fidèle qui monté à cheval ou sur un chameau, etc. commence une prière surérogatoire, peut la continuer en mettant pied à terre : mais s'il monte à. cheval après avoir commencé sa prière debout, il ne peut plus la continuer , il faut qu'il la recommence. CHAPITRE XIII. Des Vœux Religieux. Les vœux qui sont relatifs à la prière, au jeûne ou à toute autre pratique religieuse, demandent un accomplissement exact. S'ils portent sur un jour fixe et indiqué, dans le quel il survien-droit quelque empêchement légitime, le fidèle reste dans l'obligation d'y satisfaire un autre jour. C. Si donc une femme qui auroit fait vœu de jeûner ou de faire telle prière dans un tel jour, vient à perdre ce jour-là même sa pureté légale par ses infirmités ordinaires, ou par ses couches, elle n'est pas pour cela dégagée de son vœu. Elle est toujours tenue de le remplir dans un autre temps, après le retour de sa pureté légale. L'accomplissement de ce vœu a pour lors le caractère d'un acte satisfactoire. Mais Mais si le jour ou l'époque indiquée est un temps interdit par la loi pour tout acte religieux, alors le vœu est réputé nul, et par-là non obligatoire. C. Comme l'est, par exemple , le vœu que Feroit un fidèle de jeûner dans les fêtes de Beyrcuti , ou bien celui que feroit la femme de faire telle prière à l'époque de ses couches, etc. ; ces temps n'admettent ni l'une ni l'autre de ces pratiques. CHAPITRE XIV. Des prosternations auxquelles tout Musul" man est tenu, lorsqu'il lit, récite ou entend différais passages du Cour'ann , Sed j oud'ut-telawéth. CES prosternations sont relatives à différens passages du Courann, qui sont consacrés sous le nom d'Ayatk-sedj/idé, et consistent en quelques ver- TOME II. S •274 CODE RELIGIEUX, sets de quatorze chapitres de ce saint livre. C. Ces chapitres sont intitulés Araf} Râd , Nahhl, Jssrâ, Meryérn, Hadjh , Furkann, Némely EUm-tenûl, Sa/h , Fussiléth, Nédjm, J ans chah y et Alach (\). Le fidèle qui en fait la lecture ou la récitation , est tenu de se prosterner, en signe de componction, d'humilité et d'anéantissement aux jeux de son Créateur. Cette pratique est d'obligation canonique. V. Selon l'Imam Schafiy, elle n'est que d'obligation imitative. On doit accompagner la prosterna- (i) Ce sont les septième, treizième , seizième , dix-septième , dix-neuvieme, vingt-deuxième , vingt-cinquième , vingt-septième,trente-deuxième, trente-huitième , quarante-unième , cinquante-troisième , quatre-vingt-quatrième et quatre-vingt-seizième chapitres. tion de deux Tekbirs (1). Le fidèle ne doit la faire qu'en état de pureté légale, et toujours tourné vers le Kéabé de la Mecque. Comme la lecture ou la récitation de chacun de ces passages exige une prosternation , le fidèle qui en liroit ou en réciteroit trois, quatre, cinq, etc. seroit tenu à autant de prosternations. Il y est également obligé, s'il récite le même passage en différentes sessions ou en différens lieux. Mais si dans la même session , gardant toujours la même place, il lit ou récite plusieurs fois le même passage, il n'est alors tenu qu'à une seule prosternation. Le fidèle qui entend lire ou réciter ces passages, soit volontairement, soit involontairement, soit qu'il les coni- (1) AlUKiL-tkbtT , Allah'u-ekber , Dieu tres-haut , Dieu très-haut. Sij prenne ou non, est également tenu aux mêmes prosternations , à moins que ce ne soit une personne encore en minorité, ou une femme en état d'impureté naturelle. Mais au contraire, si ces passages sont lus ou récités par une personne mineure ou impure, par une personne ivre ou endormie, ou par un infidèle même, le Musulman qui les entendroit est toujours obligé à ces prosternations. S'il entend réciter plusieurs de ces versets, ou si pendant que l'on en récite un seul, il se lève et s'assied plusieurs fois, il est également tenu à autant de prosternations, sans avoir égard à l'attitude, au repos ou au mouvement de la personne qui lit ou qui récite ces passages sacrés. Si au milieu d'un Nama^ Y Imam en récite quelques-uns, les fidèles assis-tans sont pareillement tenus à cette prosternation, quand même ils n'en-tendroient ni la voix de Y Imam, ni aucun mot de ces passages. C. C'est que Y Imam qui s'en acquitte, impose par-là le même devoir à tous les fidèles assistans, qui sont obligés de se conformer en tout, pendant la prière, au chef spirituel de l'assemblée. Le fidèle qui, dans la prière, ou hors de la prière , récite les chapitres qui contiennent ces versets, ne doit jamais les omettre dans la vue de se dispenser \ des prosternations qu'ils exigent; ce seroit un péché grave, même un crime d'infidélité. Mais si, en récitant l'un de ces versets , il omet le reste du même chapitre, cette omission ne fait pas un péché. C. Il est cependant louable de commencer par un ou deux des versets qui les précèdent ; c'est une disposition préparatoire à tout ce S iîj 278 CODE RELIGIEUX. que ces jiyeths sacrés ont de grand, d'effrayant , de terrible pOur l'esprit humain. Tous ces versets doivent être lus ou récités à voix basse plutôt qu'à haute voix, afin d'éviter d'être entendus par d'autres fidèles qui, se trouvant par hasard en état d'impureté légale, se-roient obligés de recourir aussitôt aux ablutions , pour pouvoir s'acquitter des prosternations requises. Enfin, si, au lieu de lire ou de réciter ces passages , on en épèle seulement les lettres, on n'est pas tenu alors à ces prosternations. CHAPITRE XV. Du Cour'ann à réciter par cœur. Il est louable et méritoire pour tout Musulman d'apprendre par cœur le Courann en entier. C. Ceux qui savent ce saint livre , sont obligés de le réciter tous les quarante jours» Ils doivent profiter de cet avantage, pour méditer sans cesse sur les grands mystères de la religion, approfondir de plus en plus lescom-mandemens de Dieu et se perfectionner dans l'observance de ses lois. Observations. Tout l'énoncé de ces cinq derniers chapitres , est observé par les Mahométans avec la plus scrupuleuse attention. Indépendamment des Namazs qui sont d'obligation divine ou canonique , un grand nombre de citoyens de tout état et de toute condition, se font encore un devoir de faire , tous les jours , ou trois ou quatre fois la semaine , des Namazs de dévotion et de surérogation dans les termes prescrits par la loi. Les plus dévots y ajoutent encore des hymnes, des cantiques , et le chapelet, qui est ordinairement de quatre-vingt-dix-neuf grains; ce nombre est analogue à celui des attributs que l'Islamisme donne à l'Etre suprême. Les laïques le tiennent à la main ou dans la poche par pure S iv dévotion , mais les Derwischs le portent à la ceinture par état , selon les règles de leur institut. Lorsqu'ils prient, le chapelet à la main, ils ne font communément, les uns et les autres , que proférer, à chaque grain , le nom de Dieu ou l'un de ses attributs, Allah, Hou , etc. Ces actes de dévotion ne se bornent pas à des prières : plusieurs les accompagnent encore d'aumônes et de jeûnes dans différons jours de l'année : d'autres visitent les tombeaux de leurs saints , entreprennent même des voyages pour cet objet, sur-tout celui de la Mecque , où un grand nombre de Mahométans font trois , quatre , et même jusqu'à cinq pèlerinages de surérogation. Comme dans toutes les prières , sur-tout dans les cinq Namazs , on est obligé de réciter quelques versets du Courann, il n'est point de Mahométan de l'un et l'autre sexe , qui n'en sache par cœur plusieurs chapitres. Ils ne récitent ou n'entendent jamais aucun des versets qui exigent des prosternations , sans s'en acquitter aussitôt avec la plus grande ferveur. Quelques uns même apprennent par cœur le Cour'ann en entier , et portent alors le nom distingué de Hqfiz , qui fignifie, hommes sachans de mémoire. Les aines dévotes, dans tous les ordres de l'Etat , s'en font un devoir. Plusieurs des Khaliphes et des Sultans Othomans ont eu également cette ambition. Le Grand Seigneur aujourd'hui régnant est de ce nombre. Tous ces Hafizs en général sont attentifs à réciter en entier le Coudann ? une fois les quarante jours , dans l'espoir d'accumuler sur eux des mérites pour cette vie et pour l'autre. Ahmed I avoit coutume de faire réciter en sa présence , toutes les semaines , la nuit du jeudi au vendredi, diffé-rens chapitres de ce livre par douze de ces Hafizs y tous officiers de sa maison. Enfin ceux qui se soumettent à réciter régulièrement chaque jour une partie du Cour'ann , joignent encore au surnom de 'Hqfiz celui de Dewr-lihann, c'est-à-dire, récitateurs exacts , ou de tous les jours. CHAPITRE XVI. De Vattention du Musulman à ne pas suivre les pratiques des non-Musulmans. Ljjj &«f»~#<- {.3 uuif . .ij.-.i_l.1l Les fidèles doivent être attentifs à ne jamais suivre en rien les pratiques des infidèles. En conséquence, ils ne doivent célébrer ni le jour de féquinoxe du printemps , Newrou^, ni celui de Féquinoxe d'automne, Mihhr-djeann. Ils ne doivent même faire aucun sacrifice, aucune offrande, aucune aumône, aucun don , aucun présent, en l'honneur de ces jours équinoxiaux, qui sont.en si grande vénération chez les peuples ignicoles. C. Le docteur Eh'u Houfaz Kébir est d'avis que le Musulman qui auroit accumulé sur sa tête cinquante années de bonnes œuvres , en perdroit tout le mérite, et se rendroit même coupable d'infidélité, si, aux équinoxes, il donnoit un œuf seulement à un pyrolâtre ou à un infidèle, par respect pour ces jours-là. Il appuie son Opinion sur cette parole du, Prophète : Celui qui imite un peuple (i) et suit ses pratiques , est censé lui appartenir. Obsevrations. Les dispositions de ce chapitre ont pour objet principal de proscrire l'usage où étoient dans les trois premiers siècles de Y Hégire dif-férens peuples Musulmans, de célébrer à l'imitation des anciens Perses, les deux équinoxes, sur-tout celui du printemps , par des feux , des divertissemens publics , des jeux et des présens mutuels. Le Khaliphe Ahmed III, dit Mœutézid-b'illah, abolit, en 2,82 (%)5), ces fêles superstitieuses par un édit rigoureux ; et pour en faciliter l'exécution, il substitua à ces pratiques une espèce de fête civile,appelée de son nom Neivrouz-Mœuté^idy , et fixée au onze de juillet. De tous les anciens usages, il ne conserva que celui des présens mutuels. Cette fête ne passa pas jusqu'aux Othomans. (1) Mén teschUiiu cawm'enn fehhuwe mïnk'um. La loi, qui défend d'imiter en rien les nations étrangères , n'est relative qu^ux pratiques du culte extérieur; cela est énoncé d'une manière encore plus claire et plus précise dans l'article de Y Ezann. Cependant le fanatisme lui donne une plus grande extension : il y comprend tout ce qui a rapport à l'ordre moral , civil et politique. De-là ces fausses opinions qui tyrannisent les Mahométans , et les éloignent de tout usage étranger à leurs mœurs, ou , pour mieux dire , de tout ce qui n'est pas la production du génie , des arts et de l'industrie des Musulmans. Ces préjugés arrêtent , d'une part, le développement des maximes et la perfection des découvertes que la nation a déjà adoptées : de l'autre , ils intimident les esprits sur la recherche de ce que l'Europe chrétienne leur fourniroit d'utile pour les réformes nécessaires dans les différentes; parties du gouver-ment. Mais les lumières d'un grand homme, redisons-le encore, soutenues par l'autorité, armées par le glaive seul de la loi religieuse , peuvent vaincre ces obstacles , renverser ces barrières, détruire ces opinions funestes, qui mettent une si grande distance entre les Mahométans et les Européens. CHAPITRE XVII. De la Circoncision, Sunneth. Tout Musulman doit être circoncis. Cet acte est d'obligation imitative. On peut cependant s'en dispenser en cas de danger ou d'empêchement naturel. C. Ainsi l'enfant qui seroit mal conformé, ou l'infidèle qui embrasseroit l'Islamisme dans un âge avancé, peut se dispenser de cette opération, qui, d'après l'avis des médecins, pourroit le mettre en danger. L'âge requis n'est pas déterminé par la loi ; cependant le plus convenable , d'après l'opinion de quelques-uns des anciens Imams, est celui de sept ans. Observations. L'Islamisme , ainsi qu'on l'a vu plus haut clans la cosmogonie, regarde Abraham comme l'instituteur de la circoncision. Cet acte, de pure pratique imitative, fondée sur l'exemple des disciples , et non du Prophète lui-même, que l'on prétend être né circoncis, ne peut être envisagé comme absolument nécessaire pour acquérir-le caractère de l'Islamisme. Ainsi tout homme qui n'a pas été circoncis dans son enlance , se dispense sans scrupule de cette opération , sur-tout si elle est jugée dangereuse : mais les médecins, que l'on est obligé de consulter , doivent toujours être nationaux. Ce principe est général pour tous les objets qui concernent le culte religieux, et cela d'après les Fethivas, ou décisions légales de divers Mouphtjrs. Malgré les modifications que présente la loi relative à cette cérémonie, les parens sont très-attentifs à s'en acquitter , sur-tout ceux dont les enfans sont voués à l'état militaire. Ils craindroient de les exposer à être privés de la sépulture, des lotions et des prières funèbres , si, venant à être tués à la guerre, on les trouvoit sur le champ de bataille confondus avec les cadavres des ennemis : on ne les distingue alors de ceux-ci que par la marque de la circoncision. D'ailleurs les Musulmans non-circoncis semblent porter une sorte de réprobation aux jeux des autres Musulmans. On les appelé Aklef , et dans différentes matières, soit civiles, soit criminelles, leur témoignage n'est jamais recevable. C'est ordinairement à l'âge de sept ans , que l'on fait subir aux en-fans cette opération : elle se fait avec le rasoir, par des hommes exercés et connus sous le nom de Sunnclhdjys. La plupart sont des barbiers publics. La cérémonie a toujours lieu dans la maison paternelle , entre parens et amis. Ulmam de la mosquée y assiste , récite des prières et fait des vœux pour la prospérité de l'enfant et de ceux à qui il appartient. Dans les familles distinguées, ce jour est une occasion de bienfaisance et de libéralité. On réunit à l'enfant de la maison ceux des personnes qui y sont attachées, et souvent même ceux des familles indigentes : tout se fait alors aux frais de la même maison. Pour profiter de ces occasions , les uns retardent et les autres accélèrent l'époque de la cérémonie ; de sorte que l'on voit des enfans de tout âge soumis , dans un même jour , au glaive de la circoncision. Pendant huit ou dix jours, les parens n'oublient rien auprès des nouveaux circoncis pour faire diversion aux douleurs qu'entraîne cette opération. Parés magnifiquement , le turban garni de fils d'or ou d'argent, et surmonté de panaches ou d'aigrettes , on leur fait visiter parens et amis, on les promène même comme en pompe dans toutes les places publiques. Voyez la planche _o. L'acte est presque toujours accompagné d'aumônes et d'holocaustes. Les animaux destinés à l'immolation , agneaux , boucs , etc. sont ordinairement décorés de banderolles , de clinquant, de plumes de héron , de colliers, etc. , comme ceux que l'on immole dans la fête des sacrifices. On tigre aussi leur peau avec une teinture rouge. Voyez la planche _i. On On célèbre cet acte religieux par des banquets et des fêtes domestiques : chez les grands, sur-tout dans les maisons souveraines, on y met l'appareil le plus fastueux. Les Khaliphes et tous les Princes des différentes Dynasties Mahométanes étaloient, dans ces occasions, la plus grande magnificence. Les Sultans Otho-mans en font de même. Ceux cependant qui s'y distinguèrent le plus , furent Mahom-med II, Suleymann I et Mourad III. Ce dernier prit un an d'avance pour faire les préparatifs de la fête qu'il destinoit à Mohammed son fils et son successeur. Ce jeune Prince fut circoncis , en 990 ( i582.) à l'âge de seize ans. Il est d'usage d'envoyer , en ces occasions, des lettres circulaires aux Paschas , aux Gouverneurs , aux Intendans , aux Magistrats de toutes les provinces et de toutes les grandes villes de l'Empire. Par ces lettres, le Sultau leur fait part de la cérémonie , et les invite à s'y trouver. Ils y assistent en efïèt par des substituts qui , ce jour-là, les représentent à la Cour , et font en leur nom de riches .présens au jeune Prince , en signe d'hommage Tome IL T et de servitude. Nous rapporterons ici la lettre circulaire que Mourad III adressa à cette époque aux Grands de son Empire. Elle est digne de remarque par son style et par ses métaphores singulières. au plus Illustre, etc. » Nous vous faisons savoir par cette pièce » impériale, décorée de notre monogramme, » Toughra > très-noble et très-auguste, qu'é-» tant d'un devoir sacré et indispensable pour » le peuple élu, pour le peuple béni , pour » le peuple Mahométan , mais particulière-»ment pour les Sultans, les Monarques, les » Souverains, comme pour les Princes du » sang de leur auguste maison, de suivre en » tout les lois et les préceptes de notre saint » Prophète, le Coryphée de tous les Patriar-» ehes et de tous les Envoyés célestes , et » d'observer religieusement tout ce qui est » prescrit dans notre saint livre, où il est dit: Suis les traces d?Abraham ton Père , de qui tu tiens le grand nom de Musulman j » Nous » avons conséquemment résolu d'accomplir » le précepte relatif à lacté de circoncision, » dans la personne du Prince Mohammed 110-» tre fils bien aimé ; de ce Prince qui, couvert » des ailes de la grâce céleste et de l'assistance v divine, croît en félicité et en bonne odeur » dans le glorieux sentier du trône impérial ; » de ce Prince en qui tout respire la noblesse, » la grandeur et la magnificence; de ce Prince » qui, honoré du même nom que notre saint » Prophète, fait l'objet de la plus juste admi-» ration de notre haute et sublime cour ; de » ce prince qui est la plus belle des fleurs du « parterre de l'équité et de la souveraine puis-» sance ; le rejeton le plus précieux du jardin » de la grandeur et de la majesté ; la perle » de nacre la plus fine de la monarchie et de » la félicité suprême ; l'astre enfin le plus lu-» mineux du firmament de la sérénité, du » calme , et du bonhenr public. » Ainsi l'auguste personne de ce prince, la » jeune plante de son existence , ayant déjà eu » d'heureux accroissemens dans le potager de » la virilité et de la force, et le tendre arbris-» seau de son essence faisant déjà un superbe T ij » ornement dans la vigne des prospérités et » des grandeurs, il est nécessaire cpie le vigne-» ron de la circoncision porte sa serpe tran-» chante sur cette plante nouvelle , sur ce » rosier charmant, et qu'il la dirige vers le » bouton végétatif qui est le principe des fa-» cultes reproductives, et le germe des fruits » précieux et des rejetons fortunés dans le » grand verger du Khaliphat et de la puis-» sance suprême. » Cette auguste cérémonie aura donc lieu , ;> sous les auspices de la Providence, le prin-» temps prochain , au retour d'une saison où » la nature rajeunie et embellie, offre aux » yeux des humains les beautés du paradis , » et nous fait admirer les merveilles du Tout-» Puissant. C'est à l'exemple de nos glorieux » ancêtres , qui ont toujours été dans l'usage » de publier ces solennités dans toute l'étendue » de l'Empire, d'y convier tous les Grands de >> l'Etat , et généralement tous les officiers » constitués en charge et en dignités , que » nous vous expédions le présent ordre su-» prême, par N. N., pour vous faire les mêmes «notifications, et pour vous inviter à venir » participer à l'honneur et à la joie de cette » fête , qui sera célébrée au milieu des plus » grandes réjouissances. Que l'Etre suprême » daigne en bénir le commencement et la » fin, etc.! « Au rapport de Petschétvy > l'un des meilleurs auteurs nationaux, MouradIII adressa aussi de ces lettres à différentes cours de l'Europe , nommément à celles de Vienne et de France , ainsi qu'aux républiques de Venise et de Raguse. Plusieurs Khaliphes, des Monarques Mahométans , des Sultans même de la maison Othomane, n'ont été circoncis qu'après leur avènement au trône. De ce nombre sont AhmedI, qui étoit dans sa quinzième année le jour de sa proclamation ; Mohammed IV, qui n'avoit que sept ans lorsqu'il succéda à l'infortuné Ibrahim I son père , etc. Rien n'égale la somptuosité et la bizarrerie des fêtes et des réjouissances publiques qui accompagnent ordinairement cette cérémonie : nous en donnerons le détail dans le Code Politique : nous nous bornons ici à l'acte seul de la circoncision. Tiij En Arabie le sexe y est également soumis: l'opération consiste en une fbible incision qu'une femme fait avec le rasoir clans les parties naturelles de l'enfant, quelques semaines après sa naissance. Cependant cet acte , pour l'un et l'autre sexe , ne peut, sous aucun rapport, être comparé au baptême. Le jour de la circoncision n'est pas celui où l'on donne un nom au nouveau Musulman. Cette cérémonie se fait dans les premiers quarante jours de la naissance de l'enfant , soit mâle , soit femelle; elle a lieu le plus communément le jour même qu'il est mis au monde. Il est d'usage de laisser écouler les trois premières heures canoniques qui suivent le moment de la naissance. Le père seul, ou à son défaut le tuteur naturel , a le droit de procéder à cet acte, et de donner à l'enfant le nom qu'il lui plaît. Cependant il se fait presque toujours substituer par Xlmam de la mosquée. On est d'ailleurs obligé de consulter la mère , et de prendre aussi son avis sur le nom que portera le nouveau-né Cette cérémonie est très-simple. Du moment que le nom est donné à Y Imam, ce ministre s'approche de l'enfant, et profère les paroles de Y Ezann à son oreille droite , et celles de Ylkameih à son oreille gauche. Adressant ensuite la parole à l'enfant même, N. lui dit-il, est ton nom. Les deux annonces canoniques tiennent lieu de profession de foi , et sont comme une exhortation à l'enfant d'être toujours fidèle à sa croyance, et attentif à la prière comme à tous les autres devoirs de la religion. Elles se rapportent aussi, par anticipation , à la prière funèbre réservée à l'époque de sa mort. C'est par cette raison que l'on ne récite jamais les paroles de ces deux annonces dans aucune prière funèbre : elles sont censées avoir été faites à l'époque de la naissance de tout Musulman de l'un et l'autre sexe. Enfin ni la nomination de l'enfant , ni sa circoncision , n'exigent point de parrains comme dans les actes matrimoniaux. Tiv CHAPITRE XVIII. Des Prières pour les Agotùsans et les Morts. U N fidèle agonisant, prêt à recevoir la visite de l'ange de la mort, Melek'ul-tnewt/i, doit être couché sur son dos, le côté droit tourné vers le Kéabé de la Mecque; c'est aussi dans cette position qu'il doit être enseveli. Les assistans doivent lui lire le Suré-y-yassinn (i), et réciter la confession de foi, Telkinn, sans exiger du mourant qu'il la récite avec eux, dans la crainte de le porter, en ces momens d'angoisses, à des mouvemens d'impatience qui pourroient effacer en lui le caractère de l'Islamisme. Il suffît que le malade s'unisse à eux d'intention. C. Cette récitation met le sceau au salut (i) C'est le trente-sixième chapitre du Courann. CODE RELIGIEUX. 297 éternel, selon cet oracle du Prophète :» Ce-» lui ( 1) dont ces paroles, La Illahhy iU Allah » ( Il n'y a point de Dieu sinon Dieu) , sont » les dernières que sa bouche profère, acer-» tainement le Paradis pour partage. « Les dernières que le Prophète prononça, furent celles-ci : » Seigneur , jais-moi miséricorde (f) y et place-moi au rang de ceux que tu as élevés en grâce et en faveur. « Aucune femme, en état d'impureté naturelle, ne doit s'approcher d'un homme agonisant; on ne doit respirer dans son appartement que des aromates et des parfums; il faut lui poser un sabre sur le ventre, tenir ses jambes tendues, et au moment qu'il expire, lui fermer les jeux et lui lier le menton et la barbe. C. C'est à l'imitation de ce qui a été pratiqué (1) Mènn keané akhïr ul-kelam la ilahy il'allah dakhd *el-djennétlf. (2) Reb aghferly v'd hakny b'ir-refik 'iUâla. 298 CODE RELIGIEUX. par le Prophète, à l'égard d''Eby-Sélémé , son disciple chéri. On ne doit pas différer la sépulture d'un fidèle décédé. C. Et cela en vertu de ces paroles divines: Hâtez-vous (1) d'Inhumer vos morts, pour qiiils puissent jouir aussitôt de la béatitude éternelle , s ils sont décédés dans la vertu et dans l'élection j et qu'au contraire , s'ils sont morts dans le vice et dans la réprobation , vous écartiez loin de vous des ames condamnées au Jeu de l'enfer. Les obsèques d'un fidèle se réduisent, i°. à la lotion funéraire, 20. aux linceuls, 3°. à la prière funèbre, et 40. à la sépulture. C. Ces pratiques sont fondées sur l'exemple même du premier père des hommes , d'après le témoignage de notre saint Prophète. C'est (l) Aadjelou mewtakum fe ennyek khayrenn mutemewe-hou iléyhh ve ennyek scherrenn fe beud'enn li ehheC in-nar.- CODE RELIGIEUX. 299 de lui que nous tenons, qu'Adam agonisant, eut la visite d'une légion d'anges, qui apportèrent du ciel des aromates et un linceul d'une seule pièce , dont ils l'enveloppèrent à sa mort , après l'avoir lavé trois fois avec de l'eau et des feuilles de sidir. L'ange Gabriel fit ensuite, pour le repos de son ame , la prière funèbre dans le Kéabé même. * Article Ier. De la Lotion funéraire , Ghassl-djénazé. La lotion funéraire consiste à laver le cadavre en entier, soit homme, soit femme, soit enfant. C. Cette pratique est, comme la prière funèbre , d'une obligation divine. Elle est fondée sur l'un des préceptes généraux, Farz-Kifayérfi qui sont imposés à toute la société des fidèles ; de sorte qu'à la mort d'un Musulman , si l'on ne remplit pas à son égard les devoirs de la lotion et de la prière funèbre, tout le corpS des fidèles est censé participer aux peines spirituelles attachées à la transgression 3oo CODE RELIGIEUX, de la sainte loi. Elle fait d'ailleurs l'un des principaux devoirs de société recommandés par le Prophète à ses disciples, savoir: de se saluer affectueusement lorsqu'on se rencontre ; d'agréer mutuellement les invitations les uns des autres ; de ne pas refuser ses conseils à ceux qui les demandent ; de saluer celui qui éternue par ce mot : Dieu (i) te fasse miséricorde , de visiter les malades , de laver les morts et d'assister à leurs funérailles. Pour cet effet, le corps doit être nu, hors les parties naturelles, depuis le nombril jusqu'aux genoux : cette loi de pudeur, qui est la même pour les morts comme pour les vivans, exige que les hommes soient lavés par les hommes , et les femmes par les femmes. V. L'Imam Schafiy exige que les morts soient lavés dans leur chemise même, à l'exemple de ce qui a été observé envers le Prophète. Mais nos Imams Hanefis (i) Yerhham' eh' Allah'u. n'admettent pas cette pratique : ils croient qu'elle étoit réservée au Prophète , comme ayant été ordonnée, par une voix céleste , à ses disciples , dans un sommeil mystérieux, au milieu des incertitudes où ils étoient sur le dispositif de cette lotion funéraire à l'égard de leur maître. La lotion funéraire n'exige le lavement ni de la bouche, ni des narines, comme l'ablution qui regarde les vi-vans. V. L'Imam Schafiy prescrit l'une et l'autre pratique. Cette lotion doit se faire avec une décoction d'aromates sidiret hurd ; à leur défaut on peut se servir d'eau pure. La tête et la barbe du mort doivent être lavées avec des fleurs de Khitmy, ou avec du savon. On doit commencer par le côté droit, en appuyant le corps sur le côté gauche; laver ensuite le côté gauche en tournant le corps du côté droit; après cela, coucher le mort sur son dos, 3o2 CODE RELIGIEUX, pour lui frotter le bas-ventre dune main douce et légère. C. Jlj s'acquitta lui-même de ce devoir envers le Prophète ; et comme il ne sortoit de son corps aucune mal-propreté , vif {y) ou mort s'écria-t-il, il fut toujours net et pur. A la suite de cette lotion, il faut bien essuyer le corps avec un linge propre, pour qu'il n'y reste aucune humidité. On doit enfin couvrir d'aromates , Hounoutk, la tête et la barbe, et frotter de camphre les huit parties du corps qui participent essentiellement à la prière, Nama%. C. Savoir, le front, le nez , les deux mains, les deux pieds et le deux genoux, lesquels, sanctifiés par la prière, attendu qu'ils touchent la terre dans les prosternations du Namaz , exigent cette onction pour les préserver des vers , et en retarder la corruption. (i) Tayib haï'enn ve méîth'ehn. Il n'est pas nécessaire de peigner les cheveux et la barbe, ni de couper les ongles et le poil à aucun corps mort. V. L'Imam Schafiy l'exige. La circoncision n'est pas non plus nécessaire; cet acte est pour les vivans, en non pour les morts. Article 2. Des Linceuls , Tekfinn. Immédiatement après la lotion funéraire , il faut procéder à l'enveloppement du corps : il est de deux espèces pour les deux sexes. L'un est l'enveloppement imitatif, Sueneth-kefnn ; l'autre est l'enveloppement suffisant, Kefayeth-kefnn. Le premier consiste , pour les hommes , en trois pièces ; une chemise, Camiss, un grand voile, Içar, et un sous-voile , Lifafé. La chemise doit 3o4 CODE RELIGIEUX, couvrir le corps depuis les épaules jusqu'aux genoux; les voiles, depuis la tête jusqu'aux pieds. A l'égard des femmes, il consiste en cinq pièces: une chemise, Dery ; un voile pour couvrir le sein, Khirca; un autre pour couvrir la tête, Khimar; le grand voile, l\ar, et le sous-voile, Lifafé, pour envelopper tout le corps depuis la tête jusqu'aux pieds. Le second consiste, pour les hommes, dans les deux grands voiles; pour les femmes, dans les trois dernières pièces, K/iimar, I^ar et Lifafé. On ne doit jamais en employer moins, hors les cas d'impossibilité de s'en pourvoir à temps : alors une seule pièce seroit suffisante. Il ne faut point de turban à l'homme mort. C. Cela ne peut être permis qu'aux Oulémas , comme docteurs de la loi. La CODE RELIGIEUX. 3o5 La femme doit avoir ses cheveux sur son sein, par-dessus la chemise, et séparés en deux flocons. Les linceuls, soit des hommes, soit des femmes, doivent être noués par les deux bouts, à moins qu'ils ne soient assez larges pour couvrir et envelopper tout le corps. Ils doivent être de toile, ou d'une étoffe dont l'usage soit permis aux vivans, mais toujours blancs, jamais d'aucune autre couleur, et constamment d'une seule pièce. Avant d'envelopper le corps, il est nécessaire de parfumer les linceuls, et la bière destinée à le recevoir, ou une fois, ou trois, ou cinq, ou sept, toujours à un nombre impair. . C. Nombre agréable à la divinité, selon cette parole du Prophète : Certes (i) Dieu étant unique } impair, aime P unité, P imparité. (i) Inn Allah'i wltr youhïbbé witr. Tome II. V 3o6 CODE RELIGIEUX. Tout fidèle décédé ne doit proprement être parfumé que trois fois ; au moment qu'il expire , au moment qui suit la lotion funéraire, et à celui de son enveloppement. Ses funérailles, sa sépulture même, ne demandent point de parfum. C. Cette défense, comme celle de suivre le corps avec des pleurs et des sanglots, sont fondées sur ces paroles sacrées (i) : Ne suivez pas le mort, ni avec des pleurs , ni avec du jeu. article o. De la Prière funèbre, Salatlf ul-djenazé Après avoir enveloppé et mis le corps dans la bière, on doit procéder à la prière funèbre. Elle n'a lieu que pour les Musulmans, et jamais pour aucun infidèle. C. Cette loi est fondée sur cette parole divine : Ne priez pour aucun de ces morts (f) (1) La tétébéoul-djena^è bi sawt'inn ve la nar'inn. (2) Ve la tessalli ala ahhad minhum maté ebed'enn vêla ukami ala kabrèhu ennehimme keferu b'illah'i ve ressoul'ihi. dont la mort est éternelle , et ne mettez pas le pied sur la tombe de ces hommes infidèles envers Dieu et son Prophète. Cette prière ne doit jamais avoir lieu qu'après la lotion funéraire, la pureté légale et corporelle étant aussi nécessaire dans la personne du mort, que dans celle des fidèles qui s'assemblent pour remplir ce devoir religieux. On doit s'en acquitter sous Ylmameth du Sultan, en sa qualité çYlmam suprême. A son défaut, ce droit appartient au Cady, comme magistrat; après lui à Ylmamul-haïh ( le curé ), ensuite au tuteur naturel du mort, ou à son plus proche héritier, le père devant toujours avoir la préférence sur le fils. Nul autre ne peut, dans cette prière., remplir l'office de Xîmameth, sans la permission expresse du tuteur naturel, qui, dans ce cas, seroit le maître d'exercer son 3o8 CODE RELIGIEUX, droit par la répétition de la même prière. Si tout autre s'en acquitte après lui, sa prière ne peut qu'être surérogatoire , à moins que ce ne soit le Sultan lui-même, vu l'excellence et la supériorité de ses droits. Le corps doit être placé à la tête de l'assemblée, et Y Imam doit se tenir devant la poitrine du mort, comme étant le siège du cœur et des lumières de la foi, Nour-imann. Si un fidèle est enseveli sans cette prière , on peut alors s'en acquitter sur sa tombe même; mais elle ne doit jamais avoir lieu que dans les trois premiers jours de sa sépulture, avant la corruption du cadavre et la dissolution de ses membres. Cette prière funèbre consiste en quatre Tekbirs (i), qui répondent aux (i) Allah1 u ekber, Dieu très-haut, etc. CODE RELIGIEUX. 3oq quatre rik'aths de la prière de midi. Le premier doit être suivi du Séna ; le second du Salawath (i) ; le troisième de l'oraison consacrée pour les morts. C. La voici : » O mon Dieu ! faites miséri-» corde aux vivans et aux morts , aux présens » et aux absens, aux petits et aux grands, aux » maies et aux femelles d'entre nous. O mon » Dieu ! faites vivre dans l'Islamisme ceux » d'entre nous à qui vous avez donné la vie, » et faites mourir dans la foi ceux d'entre » nous à qui vous avez donné la mort. Distin-» guez ce mort par la ainsi que les Fathimites d'Egypte, avoient coutume de prendre le deuil à la mort du Monarque. Cet usage n'étoit cependant pas général dans la nation ni dans toutes les cours Mahométanes. Sous les premiers Sultans Othomans, on ne prenoit le deuil que pour le Souverain , les Princes du sang , et quelquefois pour les Validé-Sultanes j il n'étoit même jamais que de trois jours. Les seuls grands officiers du Sérail et de la Cour le prenoient avec le nouveau Sultan ; et quelques-uns même ne faisoient que couvrir leur turban d'une mousseline noire , ce que l'on appeloit Schemlé. MohammedIII porta aussi le deuil du grand Vézir Lala Mohammed Pascha ? pour qui il avoit une affection singulière, et qui mourut le dixième jour de sa nomination. Il alla 334 CODE RELIGIEUX, même visiter son tombeau , et répandit de grandes largesses au sein des pauvres : honneurs que nul Sultan n'a jamais rendus à la mémoire d'aucun de ses ministres ni de ses favoris. Le deuil fut aboli à cette Cour, sous le règne Ibrahim I. Tout homme étranger à la religion de Mohammedne peut assister aux funérailles d'un Musulman , et jamais un Musulman ne se permet d'assister à celles d'une personne qui seroit morte dans un culte différent. Us croiroient, dans l'un et l'autre cas, souiller la religion et avilir la majesté du Musulma-nisme : cependant l'histoire offre sur ce point un exemple digne de remarque. Sous le règne de Melik-Schah, surnommé DjelaPud-Deudeth, le quatrième roi de la dynastie Seldjoukienne > qui occupa environ un siècle et demi le trône à'Issfakan en Perse, Nizam'ul-Mulk son premier ministre , étoit si puissant , dit Ahmed-Efendy , que dans l'Empire tout plioit sous ses volontés comme sous celles de ses favoris et de ses créatures. Ce ministre constitua Mouhassil, ou receveur général des droits publics de Rassura ^ un juif nommé Ibn-Allam qui se fit tellement craindre et respecter dans cette ville , qu a la mort de sa femme , en 467 (1074) tous les officiers publics et tous les citoyens Mahométans , excepté le seul Cadj, honorèrent de leur présence les obsèques de cette Israélite. L'historien Mahométan rapporte ce trait avec les expressions du plus grand étonnement. Tous les morts , hommes, femmes et en-fans, sont enterrés, le côté droit tourné vers la Mecque. Immédiatement après l'inhumation , Y'Imam , assis sur ses genoux à côté de la tombe, fait la prière Telkinn. Il commence par appeler trois fois le mort par son nom et par celui de sa mère : il n'articule jamais celui du père. En cas d'ignorance du nom de la mère , il substitue , pour les hommes , celui de Marie , en l'honneur de la Sainte Vierge, et pour les femmes celui d'Eve , en l'honneur de cette mère commune des hommes. Cette loi s'observe même à l'égard des Sultans, et de tous les Princes et princesses de la maison impériale. L'Imam appelle ainsi le mort : Y a Ahmed Ibn Mérjém ! ô Ahmed fils de Marie! Fa Fathima binlé Ilewa ! ô Fathima fille d'Eve ! II récite ensuite le Telkinn , qui consiste en ces paroles : « Rappelle-toi du mo-» ment où tu as quitté le monde en faisant » cette profession de foi : Certes, il n'y a point » de Dieu sinon Dieu ; il est seul, il est uni-» que, il n'y a point d'association en lui : certes, » Mohammedest le Prophète de Dieu ; certes, » le paradis est réel ; certes, la résurrection est » réelle; certes , le jour du jugement est réel, » il est indubitable; certes, Dieu ressuscitera » les morts , il les fera sortir de leurs tom-» beaux; certes , tu as reconnu Dieu pour ton » Seigneur , l'Islamisme pour ta religion , » Mohammed pour ton Prophète , le Courann » pour ton Imam.} le Kéabé pour ton Kiblé » ( c'est-à-dire , le sanctuaire de la Mecque » pour ta direction dans ta prière), et les » fidèles pour tes frères. Dieu est mon Sei-» gneur , il n'y a point d'autre Dieu que lui; » il est le maître de l'auguste et sacré trône » des cieux. O N*....., dis que ton Dieu est >> ton Seigneur ( ce qu'il répète trois fois ) » Ô.N...... » ô N.....dis qu'il n'y a point de Dieu sinon » Dieu (ce qu'il répète aussi trois fois ), ô N..... » dis que Mohammed est le Prophète de Dieu, » que ta religion est l'Islamisme , et que ton » Prophète est Mohammed, sur qui soit le » salut de paix et la miséricorde du Seigneur. wO Dieu, ne nous abandonne pas ; tues le » meilleur de tous les héritiers. » L'Imam termine cette prière par le Fatihha , premier chapitre du Couda/m. Il est des occasions où la même prière sert pour difïerens morts , comme en temps de guerre et dans les grandes mortalités, lorsque les Imams ne peuvent inhumer les cadavres avec la célérité prescrite par la loi : dans ces cas seuls, il seroit permis d'en réunir plusieurs à une même cérémonie funéraire. Comme la loi défend non-seulement la sépulture , mais encore la prière funèbre dans les mosquées , on porte les corps toujours en droiture de la maison aux cimetières publics. Us sont tous hors des villes , et la plupart présentent le tableau d'un parc. Us sont plantés de toutes sortes d'arbres , de tilleuls , Tome II. Y dormes , de chênes, mais sur-tont de cyprès, arbre favori des Mahométans. Les principaux cimetières de Constantinople sont i°. , ceux tVEjuby à cause du corps dé ce saint, l'un des premiers apôtres du Mahométisme, et qui se trouve inhumé dans le faubourg qui porte son nom ; a0, ceux &Aïwami-Séraih ) où reposent les cendres de vingt-six autres disciples du Prophète, morts sous les murs de Constantinople, dans les premières expéditions des Mahométans contre cette ville , sous le Khaliphat de Muaiviyél ; et 3°. ceux de Scutary en Asie , faubourg séparé de Constantinople par le Bosphore de Thrace. Pres-.que tous les Oulémas , les Seigneurs de la cour , et les citoyens les plus distingués , se font inhumer de préférence dans les cimetières de Scutary , comme faisant partie du continent où sont situées les deux cités réputées saintes de l'Arabie. C'est autant par un sentiment de piété , que par un effet de cette opinion presque générale dans la nation, que l'Asie est la seule et véritable patrie des Mahométans , que c'est le continent de prédi- lection réservé à l'Islamisme par une grâce spéciale de la Providence, et que les cendres des Musulmans j sont par conséquent beaucoup plus en sûreté que dans les terres Européennes, où , par un esprit moins politique que religieux , on envisage la domination Othomane comme moins durable que dans les contrées Asiatiques. Généralement toutes les tombes sont couvertes de terre, et élevées au dessus du sol, pour empêcher que personne n'y marche, et ne foule aux pieds les corps des Musulmans. Il n'y a ni plaques de marbre , ni aucun monument sur la fosse même; on n'y voit que des fleurs ou des boules de myrte, d'if, de buis, etc. Celles du peuple ne présentent que deux socles de pierres plates ou ovales, toujours plantés verticalement, aux deux extrémités de la fosse. Les tombeaux des citoyens aisés et des gens d'un certain rang, se distinguent par la nature de ces socles : ils sont de marbre fin, et celui qui est du coté de la tête est surmonté d'un turban aussi de marbre. La Forme de cette coiffure indique l'état et la condition du mort, parce que les différentes classes des citoyens sont distinguées autant par le turban que par le reste du costume. Les tombeaux des femmes ne diffèrent de ceux des hommes, qu'en ce que les deux socles sont uniformes, plats, et terminés en pointe. On lit sur les uns et sur les autres, des épitaphes gravées en caractères d'or : elles ne renferment communément que le nom du mort, sa condition, le jour de son décès, et une exhortation aux passans de réciter l'introït Fatihha. Il en est aussi en distiques, en quatrains et en stances plus ou moins considérables. Les unes retracent la caducité du monde, la durée de l'éternité, et contiennent des vœux pour la félicité éternelle du mort. Elles sont conçues en ces termes : Que l'Eternel daigtie envelopper son ame dans un nuage de miséricorde et d'alégresse > et couvrir son tombeau de Véclat d'une lumière permanente. Les autres représentent la mort comme le terme des misères de l'homme dans cette vie passagère et fugitive, félicitent le défunt de son bonheur, et comparent son ame à un rossignol du paradis , Djenneth-bulbuly. D'autres parlent de ses vertus, de son attachement à la religion, et exhortent les passans à prier pour le repos de son ame, afin de mieux mériter, au jour du jugement, l'intercession du Prophète auprès du trône de l'Eternel. Quelquefois elles ne consistent qu'en ces deux vers : Ce monde est caduc (f) , il n'est pas durable ; Aujourd'hui pour moi > demain pour loi. Sur ceux des enfans de l'un et de l'autre sexe, on dépeint assez communément la douleur des parens par des lamentations contre le sort, qui a eu la cruauté, y est-il dit , d'enlever la rose du jardin des charmes et de la beauté 3 d'arracher un tendre rejeton du sein maternel> et de laisser un père et une mère infortunés dans les brasiers ardens de la douleur et de l'amertume. Les tombeaux des seigneurs dans les difïe-rens ordres de l'Etat,{sont beaucoup plus distingués. Ils sont entourés de marbre en forme (1) Bon dunnya baky deyil fenadlr ; bon gunn bana issé yarinn sana dir. Y iij de caisse, la partie de la tête et celle des pieds toujours plus élevées. La planche as , qui représente une partie des cimetières cXEyub y avec trois convois funèbres , et la planche 2.3, qui montre le tombeau de M. de Bonneval , inhumé dans le cimetière d'un couvent des Deni/ischs Mculcirys} attenant à l'hôtel des ministres de Suède dans le faubourg de Pcm y donnent une idée de ces difrèrens tombeaux et de la sépulture des Musulmans. Cependant quelques Fezirs et autres seigneurs du premier rang, ont mis dans ces monumens une certaine ostentation , contre l'esprit même de la loi. Leurs tombeaux sont décorés d'une espèce de dôme à jour , soutenu par de belles colonnes, et entouré d'un grillage de fer, dont tous les pommeaux sont dorés. Quelques-uns dé ces mausolées sont élevés d'après les dispositions testamentaires de ces seigneurs, d'autres par la volonté seule de leurs héritiers et de leurs parens , comme un hommage à leur mémoire. On en voit plusieurs dans Co/is tant mopie, sur des terrains attenans à de grands hôtels. Celui du Grand- Fezir Raghib Pascha est superbe. On peut le voir dans la planche 24. Il est placé à côté de la bibliothèque publique, qui est de sa fondation. Ceux des plus grands saints du mahomé-tisme sont des espèces de citadelles, élevées par la piété des Monarques ou des personnes opulentes. Les maisons distinguées , sur-tout parmi les Oulémas, sont aussi dans l'usage d'avoir des espèces de caveaux qui servent de tombeaux de famille. Ou les appelle Turbé, mot qui répond à chapelle sépulcrale. Us ont à-peu-près la forme de ceux des Sultans ; édifices superbes qui s'élèvent autour des mos^ quées impériales. Nous en donnerons la description plus bas, dans le chapitre qui traite des temples Mahométans. Ces mausolées en général sont les seuls -monumens élevés à la gloire des Monarques et des plus grands hommes de l'Etat. Les statues, les trophées de marbre, les figures ; symboliques, ces grands morceaux de sculpture qui décorent la plupart des villes et des églises de l'Europe , sont inconnus chez les Musulmans. C'est une suite naturelle de l'ex- 344 CODE RELIGIEUX. tention que l'on donne àjla défense de peindre des hommes et des animaux ; article que nous traiterons dans la partie morale. On n'a pas moins de respect pour la loi qui défend d'inhumer un non-Mahornétan dans les cimetières de la nation , pas même la femme légitime, soit chrétienne, soit juive, d'un Musulman , à moins qu'elle ne soit morte enceinte : et encore; selon les Fetlnvas du Mouphly Behdjé Add'ullah Fjendy elle ne peut être enterrée que dans un coin de ces cimetières , séparée des corps Mahométans , et le dos tourné vers la Mecque } afin que le fœtus ait le visage vers ce sanctuaire de l'Arabie. Quoique privée des honneurs funèbres , on peut cependant , dit le même Mouphty j laver son cadavre , non par forme de lotion religieuse , mais de simple lavage, tel qu'il est requis pour un habit , ou pour tout autre objet souillé ; l'envelopper ensuite dans un linceul, et le déposer dans la fosse, sans autre appareil. La rigueur de la loi sur ce point est telle, qu'elle refuse toute cérémonie funèbre à une personne inconnue, qu'on trou- / Veroit morte dans un lieu écarté, ou un faubourg non habité par des Musulmans. Dans l'incertitude sur l'état et la religion de la personne décédée, la loi ne permet pas que l'on exerce à son égard aucune des pratiques ordonnées pour les cadavres Musulmans. Mais si de deux personnes qui périroient dans un accident quelconque, l'onsavoit positivement que l'une étoit de la foi Musulmane, alors, dans l'impossibilité de la reconnoître et de la distinguer de l'autre, la loi permet, selon le même Mouphty, de rendre aux deux corps à-la-fois les honneurs funèbres, en les attribuant toujours mentalement à celui des deux qui seroit mort dans l'Islamisme. L'un et l'autre corps cependant seroient inhumés dans un coin des cimetières Mahométans , mais la surface de leur tombe égale dans toutes ses parties, sans élévation, sans dos de chameau, afin d'empêcher par-là , que les passans n'y fissent des prières, qui, dans cette incertitude, pourroient s appliquer au non-Musulman plutôt qu'au Musulman. On observe encore très-scrupuleusement la 346 CODE RELIGIEUX, défense d'exhumer les morts. Cette loi n'a été enfreinte que dans les premiers siècles du Ma-hométisme, par la passion et la haine de divers Princes contre leurs ennemis. L'histoire en offre differens traits qui font horreur à l'humanité. En 127 (740) Menvan IIy le der-nierdes Khaliphes Ommiades, fit exhumer et pendre le corps de Fezid III} pour venger le meurtre de IVelid IL Le Prince Abd'nllah ibn Aly, oncle iYAbd'idlah Sejfah , le premier des Khaliphes Abassides , s'étant rendu maître de Damas, où il traita avec la plus grande barbarie tous les Princes du sang des Ommiades y porta sa fureur jusqu'à faire ouvrir les tombeaux de tons les Khaliphes de cette maison. On les trouva tous réduits en poussière, excepté le corps de Huscham 1 qui fut exhumé, flagellé , brûlé, et ses cendres jetées au vent. Quatre siècles après, ces traits de férocité furent renouvelés par Hassan Ala'ed-dinn, sixième roi de la maison de Ghawrs, qui occupoit le trône de Firouz-Keouhhca Perse. A la suite de ses succès contre les Sultans Sebuktékiens y et de la conquête CODE RELIGIEUX. 347 de Ghazné leur capitale, il fit exhumer les ossemens de tous les rois de cette maison infortunée, et les jeta dans un brasier ardent, ce (pii lui attira le surnom Djihann-souz, qui veut dire , l'incendiaire du monde. Les Mahométans ne connoissent pas non plus l'usage d'embaumer et de conserver le cœur d'un mort , puisque la loi défend d'ouvrir aucun cadavre. Ici l'on appereoit les véri-. tables causes qui retardent chez eux les progrès de l'analomie et de la chirurgie. Aussi ont-ils très-peu de médecins habiles, et de chirurgiens en état de faire des opérations. Des Européens et des Grecs du pays, qui vont étudier en Italie , exercent ces fonctions de l'art, soit dans les villes , soit dans les années , où beaucoup de militaires blessés périssent assez souvent, faute de secours, avec la douleur même de ne pas mériter le surnom de martyr. D'après l'énoncé de la loi, ce surnom n'est accordé qu'à ceux qui tombent , les armes à la main, sur le champ de bataille. Aussi tous les militaires peuvent également prétendre à cet honneur. Dans les annales de la monarchie. des Vézirs , des Paschas, des officiers de tout rang et de tout grade, même de simples soldats tués à la guerre , sont distingués par le surnom de Sehéhhid j comme le sont par celui de Hadjy, tous ceux qui ont fait le pèlerinage de la Mecque. Ce point, beaucoup plus politique quereli-gieux , fut le sujet d'un entretien assez remarquable entre le célèbre Timour et les Oulémas d'Alep en Syrie. Lorsque ce héros Tatar prit cette ville d'assaut en 802 ( 1899), il la livra à la fureur de ses soldats, et ne montra lui-même d'humanité qu'envers les ministres de la Ici et de la religion. Il les protégea , les traita avec bonté, et s'entretint même avec eux sur difïërens points de doctrine et de morale. Entre autres questions savantes qu'il leur fit, sur-tout au Mouphty Ihn Schahhné Ej'endy , une étoit relative aux martyrs Mahométans. » Je voudrois savoir, Efendy, lui » dit-il , quels sont les vrais martyrs de cette » foule de militaires , des miens ou des vôtres, » tués avant-hier sous les murs de cette ville. » Je ne puis là-dessus, dit le Mouphty, vous » donner d'autre réponse que celle qui a été ?> rendue par notre saint Prophète à un Arabe » très-instruit qui lui avoit fait la même de-» mande. Cet Arabe croyoit que tous les Ma-» hométans morts à la guerre les armes à la » main , obtenoient la couronne du martyre, » qu'ils étoient cependant rangés en différentes » classes, les unes plus distinguées que les autres, selon les motifs qui les animoient et « les conduisoient à la guerre, puisque les uns » ne s'armoient que par zèle pour la religion, >» les autres par un sentiment de valeur et d'intrépidité , d'autres par ambition, d'autres » enfin par intérêt. Le Prophète le désabusa, en » lui déclarant que le Prophète ne reconnois-» soit d'autres martyrs que ceux qui marchoient » à la guerre pour la défense de la foi, pour » le soutien de la cause de Dieu, pour l'exalta-» tion de sa parole , Ila'y-kelimeth' Ullah. » Tlmour, ajoute l'histoire, parut pleinement satisfait de cette réponse. Il applaudit à la prudence et à la doctrine du Prélat, l'assura de sa protection, et le combla en effet, lui et les autres Oulémas, de distinctions et de présens. Cependant les anciens Imams , comme on l'observe dans le texte , dirigés par les principes d'une saine politique, promettent indistinctement la couronne du martyre à tous ceux cpii meurent à la guerre pour la défense de la religion et de l'Etat. De tous les Sultans Othomans , Mourad I est le seul préconisé sous le titre de Sehéhhid, quoiqu'il nait pas été tué au milieu de l'action , mais assassiné dans le champ de bataille , par une main ennemie, à la suite de la fameuse journée de Cassovie. Les auteurs nationaux lui donnent ce titre, sur-tout le Mouphiy historien Sad'ed-dinn FJendj', qui, en parlant de sa mort, dit que l'ame bienheureuse de ce Sultan , décoré à-la-fois des glorieux titres de victorieux et de Martyr , Gliazy we Sehéhhid} s'envola avec l'oriflamme de félicité , à la tète de tous les Martyrs Musulmans de ce jour, dans les plus hautes régions de la béatitude éternelle. Nous aurons encore occasion de revenir sur ces matières, soit dans le Code Militaire ,soit dans l'Hisoire de la maison Othomane. DISCOURS Sur quelques autres Pratiques ou Institutions qui entrent dans le culte public des Mahométans. Après avoir exposé tout ce que prescrit la législation religieuse sur la prière, comme formant la partie la plus essentielle du culte extérieur de l'Islamisme, nous donnerons une idée des différentes pratiques dé dévotion sur lesquelles la loi ne prononce rien , et qui sont envisagées comme de pure institution humaine : elles portent le nom de Bid'ath-hasséné } qui signifie innovations agréables ou louables. Quoiqu'elles n'aient aucun caractère d'obligation canonique , on se persuade néanmoins qu'elles procurent à ceux qui les observent , beaucoup de mérites spirituels : telles sont, i°. diverses prières de subrogation ; 2°. les prêches dans les mosquées; 3°. le respect particulier que l'on a pour sept différentes nuits de l'année; et 40. la vénération des peuples pour les reliques du Prophète. i i". De diverses Prières de subrogation. Ce sont I'Es-salath, le Sala, le Temdjid, et la fête du Mewloud ou nativité du Prophète. i°. UEs-salalh est un cantique que les Muezzinns de presque toutes les mosquées chantent sur le haut des minarets une heure avant l'aurore , ou l'heure canonique de la prière du matin. Il consiste en ces trois vers en l'honneur de Mohammed : » Salut et paix y> à toi, ô l'Envoyé de Dieu (i) ! Salut et paix » à toi, ô l'ami de Dieu ! Salut et paix à toi, » ô le Prophète de Dieu ! « Quelques Muezzinns y ajoutent à leur gré les vers suivans: » Salut et paix à toi , ô la plus heureuse des » créatures de Dieu (2) ! Salut et paix à toi, » ô la meilleure des créatures de Dieu ! Salut (1) Es-salath*u v'es-selam aleïkê y a ressouly ullah tya habWullah , y a neb'iy'ullah. (2) Ta khaïr khoulKullah , y a ahhssénn khouUC ullah , y a açam khoulfc ullah, y a nour arsch" ullah. » et » et paix à toi , ô la plus grande des créatures » de Dieu ! Salut et paix à toi , ô la lumière » du trône de Dieu ! « 2,0. Le Sala , est une espèce d'hymne.que les Muezzinns de toutes les grandes mosquées chantent aussi sur le haut des minarets une fois la semaine , les vendredis , et toujours à dix heures du matin. Il consiste en ces vers: » Hâtez-vous de venir à la prière avant que » le temps soit écoulé. Hâtez-vous de venir à » l'a pénitence avant que la mort vous sur-« prenne (i). » Seigneur Dieu ! en ce jour, ni biens ni én-» fans ne sont d'aucune utilité, hors le retour » en Dieu avec un cœur droit et sincère. » Seigneur Dieu ! la victoire vient de Dieu, » le triomphe est accordé par lui : ô Moluzm-»med, donnes-en la bonne nouvelle aux vrais » croyans. » Salut à toi, qui es le prince desancienset » des modernes : salut au plus auguste de tous : *v\" .' ...... . j; i-.ifît/i .*>T'q (i) Adjelu b'is-salath'ï cabFel-femh\ ,'ve adjelu Fitteubé cabrd-mewth, etc. etc. Tome IL Z 354 CODER E L I G I E U X. » les Propriétés et de tous les Envoyés célcs-» tes ; et louanges à Dieu, maître souverain » de l'univers. « On fait encore usage de ce Sala à la mort des Sultans , des Schahzadés ou princes du sang , du Grand Vézir et des Oulémas, depuis le Mouphty jusqu'aux Muderrlss du dernier grade , comme formant le corps de la hiérarchie Mahométane. Nul autre ne jouit de cette distinction , pas même les Paschas à trois queues, qui composent le premier ordre de l'Etat. Mais à l'exception du Monarque, pour qui l'on chante ce Sala sur l'un des minarets de Sainte-Sophie et de Sultan Mohammed, il n'a lieu autrement que sur l'une des flèches de cette dernière mosquée. 3°. Le Temdjid est un cantique consacré aux trente nuits de la lune de Ramazann. Ce sont encore les seuls Muezzinns qui le chantent à minuit précis , sur le haut des minarets dans toutes les mosquées de l'Empire. Mais à Sainte Sophie} qui en est la principale , ce cantique a lieu dès le premier de la lune de Redjeb , soixante jours avant le Ramazann. On appelle toute cette période , Utsch-allar, ou les trois mois par excellence. Ce cantique consiste en ces vers : » O grand Dieu (i) ! ô Seigneur des Seï-» gneurs ! la clémence est ton partage : tu e* » seul , tu es unique en prescience et en gran-» deur. » Qu'il est étonnant de voir ses amis , ses » adorateurs , dans les bras du sommeil ! » Lève-toi, ô mortel endormi ; c'est trop se » livrer au sommeil : l'homme dont le cœur » est plein de l'amour de Dieu, ne dort jamais. » O Dieu clément, ô Dieu éternel ! ôsouve-» rain Seigneur , ô roi immortel ! » Cest à toi qu'appartient toute souverai-■» neté, toute puissance. » La caducité n'a point d'accès en toi. » O mon Dieu , ô l'arbitre souverain desmi-» séricordes et des vengeances célestes ! (i) Ya ha^rcth-mewla : ya mewl'el-m<.waly ent'elkerim y a Allah, ent'el-leçi teferredé Vil-fa^L, vel-ala. Adjeb'enn Fil muhhib kdfé yenamè, coumya naïmkemtenam'é aschik' Allah'u la yehamé, etc. Zij 356 CODE R E L I G I E U X. » Ole maître suprême du cœur et de l'esprit des humains ! » Sauve-nous des tourmens de la tombe et » du teu éternel ! » Il n'y a point de Dieu sinon Dieu, Seigneur » Dieu. « Dans chaque mosquée, quatre ou cinq Muezzinns d'entre ceux qui ont l'organe le plus doux et le plus mélodieux, l'entonnent régulièrement": tous ensemble montent sur un même minaret, et chacun, à tour de rôle, psalmodie l'un de ces vers, auquel les autres répondent d'une même voix : Ya Hazréth-Mcwla , •O Seigneur Dieu ! Dans un des couvens des DeriviseïisJDjelwe-iyskScutary ?. on récite ce même Temdjid pendant toute l'année , toujours à minuit., pour là consolation dés malades tourmentés d'insomnie. Les Dern>ischs eux-mêmes font alternativement cet exercice sur le haut du minaret de leur chapelle. On doit cet établissement à la piété d'un Molla très-riche, Khou-dayi Mahmoud-Efendy , qui, en 1626, quitta la magistrature et le monde , pour entrer dans CODE RELIGIEUX. 3Sj cet ordre de solitaires, à qui il fit donation de tous ses biens. A la suite de ce Temdjidy les Muezzinns des grandes mosquées chantent aussi à leur gré un ou deux Ilahjs, qui sont des poèmes spirituels composés par des Scheyldis ou des Derwischs morts en odeur de sainteté. Us roulent sur les attributs de la Divinité, sur le bonheur du ciel , sur le néant du monde, et sur l'obligation où sont les mortels de se dépouiller de tout amour temporel, pour ne s'attacher qu'à Dieu et à son Prophète, afin de mériter la béatitude éternelle. Quelques Muezzinns y ajoutent aussi la profession de foi, qu'ils répètent dix, quinze ou vingt fois de suite, en faisant à chacune, mention d'un des Patriarches ou des Prophètes les plus révérés par l'Islamisme. C'est ordinairement en ces termes : II n'y a point de Dieu sinon Dieu y et Adam est le pur en Dieu. Il n'y a point de Dieu sinon Dieu , et Abraham est lami de Dieu. Il n'y a point de Dieu sinon Dieu \ et Ismaël est le sacrifié en Dieu. H n'y a point de Dieu sinon Dieu-, e/Moyse est la parole de Z iij 358 CODE RELIGIEUX. Dieu. Il n'y a point de Dieu sinon Dieu _, et Jésus-Christ est l'esprit de Dieu. Il n'y a point de Dieu sinon Dieu , et Mohammed est le Prophète de Dieu 3 etc. Chaque Muezzinn chante à son tour l'un de ces vers ; et les autres répondent d'une même voix, Fa Ilazrêth-Mewla , O Seigneur Dieu 4°. Le Mewloud est une fête qu'institua Mourad III l'an 996 ( 1Ô88 ) , en l'honneur de la nativité du Prophète. On célèbre cette solennité le 12 de la lune de Rebiy'ul-ewell, par un sermon, ou plutôt par un panégyrique sur la vie de Mohammed, sur ses miracles, et sa mort. Mais elle n'est que pour la cour et non pour le peuple. Les cérémonies qu'on y observe , mélange de pratiques religieuses et de cérémonies civiles et politiques , s'écartent même de l'esprit du culte public de l'Islamisme. Ce Mewloud se célèbre toujours , comme les deux fêtes de Beyram , dans la mosquée Sultan Ahmedy par la commodité qu'offre au cortège du Sultan la place immense de l'hippodrome , qui est en face. Elle a lieu vers les CODE RELIGIEUX. 3S9 dix heures , entre le Namaz du matin et celui de midi. Lesdifferens ordres de l'Etat se rendent séparément à la mosquée ; ehaque Seigneur est suivi des officiers de sa maison et de son département. Us sont tous en demi-gala; mais celui qui se montre ce jour-là avec le plus de pompe , est le Kizlar-dgassy , chef des eunuques noirs du Sérail. C'est aussi le seul jour de l'année où il lui soit permis de paroître en public avec éclat , car il ne sort jamais du Sérail qu'à la suite du Sultan , toutes les fois que S. H. se rend publiquement à la mosquée. Il fait les honneurs de la fête en sa qualité de Nazir ou inspecteur général des deniers sacrés des deux cités de l'Arabie. Ce jour-là il sort du palais une demi-heure avant le Sultan , et se rend au temple avec un nombreux cortège composé de tout le corps des eunuques noirs et de celui des Baltadjys en uniforme. L'ordre et le rang des grands officiers de l'Etat à la mosquée sont réglés dans cette féte par une étiquette particulière. Le Grand Vézir et le Mouphty se placent devant l'autel, le Z iv 36o C O- D E RELIGIEUX. premier à droite, le second à gauche, tousdeux assis sur de hauts coussins en forme de tabourets. A la droite du Grand Pézirsont le Capow dan-Pascha , YAgha des janissaires , et le Dejterdar Efendy ou ministre des finances, à la tête de tous les Khodjéakeanns ou gens de plume, qui prennent séance après lui, chacun selon son grade. Ces officiers forment une longue file qui occupe la partie inférieure de la tribune de Sa Hautesse. Ils sont tous assis sur des Ihhrams ou petits tapis de Barbarie. L'aile gauche du coté du Mouphty est occupée par les Oulémas du premier rang. Cette file est continuée sous le Minnher ou chaire desImams-Kha/lhs , par les Oulémas subalternes , qui forment une seconde ligne parallèle jusqu'au Kursjr ou chaire des Scheykhs prédicateurs. Derrière cette ligne , les Muderrlss en forment une troisième : tous ces gens de loi sont assis sur des coussins. Au milieu des deux premières lignes , qui présentent la forme d'un quarré long , se tiennent le Eciss-Fjendy et le Tschaii'Ousch-Baschy , ministres d'Etat. Chacun d'eux est assis sur un Ihhram y tournés, non vers l'autel, mais vers la tribune de S. H..< Le Nakib'ul-Eschraf , qui est le chef des Emirs , jouit ce jour-là dune distinction particulière: il a un siège sépare de tout le reste des Oulémas , dont il est en même temps l'un des premiers membres. U se tient sous une tente verte , dressée vers la chaire des Scheyklis, et entourée d'une troupe de ses Tclwwouschs, tous également Emirs, et décorés du turban vert. Le Teschrijatdjy Efendy > grand maître des cérémonies , et le Cara-coulakofficier particulier du Grand Vézir, se tiennent debout derrière ce premier ministre, le dos contre l'autel. Le Zaghardjy-Bascliy*j et le Samsondjy-Baschy , officiers de l'état major des janissaires , couverts l'un et l'autre de leur bonnet de cérémonie à grands panaches, se tiennent aussi debout vers la chaire des Imams-Khatibs. Enfin toute cette cour est séparée du peuple par deux rangs des janissaires en bonnets d'uniforme. Voyez la planche 2Ô. C'est au milieu de cette ordonnance, que le Sultan paroît.à la mosquée avec son cortège 362 CODE RELIGIEUX, ordinaire , composé des seuls officiers de sa maison en demi-gala. Au moment où S. H. entre dans sa tribune , ce qu'elle fait toujours par une porte dérobée , l'un des premiers gentilshommes de sa chambre annonce son arrivée en ouvrant les jalousies. Alors toute l'assemblée se lève ; le Grand Vézir et le Mouphty font quelques pas vers la tribune ; et au moment que le Sultan laisse entrevoir une partie de sa tête, ou plutôt de son turban, ces deux premiers personnages de l'Etat lui font une profonde révérence ; et comme les jalousies se referment dans l'instant même , ils vont du même pas reprendre leur place, ce que fait également le reste de l'assemblée. La cérémonie commence par un panégyrique divisé en trois parties. Chacune est prononcée successivement par trois prélats; savoir , i°.par le Scheykh de Sainte-Sophie, comme le premier de tous les prédicateurs des mosquées Impériales ; 2.0. par celui de la mosquée où se célèbre la fête; et 3°. par l'un des Scheyhhs des autres mosquées Impériales, qui jouissent annuellement et alternativement de cette distinction , chacun à tour de rôle , suivant le rang de leur mosquée. Pendant le panégyrique , le Silihdar-Agha et le Tschocadar-Agha , qui sont les deux premiers gentilshommes de la chambre du Sultan, lui présentent trois fois, au milieu du discours de chacun des trois Shejhhs , du Scherbeth , de l'eau de rose et du parfum de bois d'aloès. Dans les mêmes momens une soixantaine de Zulujly-Baltadjys, officiers du Sérail, font les mêmes honneurs, à trois différentes reprises , à toute l'assemblée des Oulémas et des officiels. On commence par le Grand Fézirei par le Mouphlj. A mesure que chacun des trois Schejldis finit son discours et descend de la chaire, il est reçu sur les derniers degrés, par le Vazidjj-Efendy et le Baltadjiler-Kehajassy , deux grands officiers du Sérail , subordonnés au Kizlar-Aghassj-. Us soutiennent ces prélats sous les bras , par distinction , et les décorent d'une fourrure de zibeline au nom du Sultan. A la suite du panégyrique, les Muezzinns de la mosquée entonnent du haut de leur tribune le PJâtli-Schérif, hymne à la louange du r 364 CODE RELIGIEUX. Prophète. Quinze autres chantres appelés Mmvéschihs , et placés derrière un siège portatif, consacré à la cérémonie du jour, chantent ensuite un des cantiques Ilahliy. Après cela, trois ministres, que Ton nomme Mewloud-hhaiiann, montent sur ce siège, et psalmodient successivement le Mewloudijyé > espèce d'hymne en vers Turcs, sur la nativité du Prophète. Alors les Baltadjjs du Sérail, au nombre d'environ deux cents , s'avancent tenant en mains de grands cabarets, garnis les uns de confitures sèches, les autres de dix à douze vases de porcelaine ou de cristal , pleins de Scherbeth de nature et de couleurs différentes. Le Zaghardjy-Baschy et le Samsondjj-Bascliy cpiittent aussitôt leur place, et vont poser de leurs mains deux de ces plateaux devant le Grand-Véùry et autant devant le Mouphty. Les administrateurs èt les commis des différens bureaux relatifs à la régie des biens TVahfs des deux cités de l'Arabie , vont en même temps présenter deux de ces cabarets à chacun des Oulémas et des grands officiers qui forment l'assemblée. Rien de plus riche que ceux qui sont destinés pour le Sultan : le Silihdar-Jgha a seul le droit de les poser à côté de Sa Hautesse. Dès que le premier des trois chantres a fini la première partie de l'hymne Meivlou-diyé ? il descend de la chaire , et cède sa place au second, qui continue. Au moment où celui-ci profère les paroles qui annoncent la nativité du Prophète, toute l'assemblée se lève , et on procède à la cérémonie de la réception d'une lettre d'office du Schérif de la Mecque pour le- Sultan. Cette lettre est la'réponse à celle que Sa Hautesse adresse tous les ans au Prince de l'Arabie, au sujet de la sûreté des pèlerins y et de différens autres objets relatifs au pèlerinage. La lettre du Sultan est «remise entre les mains du Surré-Eminy , le jour qu'il part de Constantinople avec les deniers sacrés pour la Mecque j la réponse du Schérif ' estf confiée au Muzdedjy-Baschy , qui, retournant à; Damas avec le Pascha de cette province et la caravane des pèlerins , prend toujours les devans , pour arriver à Constantimplt 366 CODE RELIGIEUX, quelques jours avant la célébration du Mcn;-loud. Cet officier se tient ce jour-là dans la mosquée, du côté des Baltadjys , revêtu d'un caftan le turban entouré d'une mousseline noire et décoré d'un plumet. Sur l'invitation duCara-coulak 9qu'\ pour cet objet quitte alors sa place , ce député s'approche en tenant à main haute la lettre du Schérif enveloppée dans une bourse de satin vert, et la présente au Grand Vézir. Ce premier ministre la remet au Réis-Efendy, qui d'un pas grave se rend à la tribune du Sultan, précédé du Tschawousch-Baschy, du grand-maître des cérémonies, et du même Muzdcd/y-Baschy. Le Kizlar-Aghassy reçoit la lettre vers la porte de la tribune, la présente aii Sultan , qui la lui redonne après l'avoir parcourue ; le Kiz/ar-Aghassy la rend aussitôt au Reis-EJèndy > pour être, selon l'usage p déposée dans la Chancellerie Impériale. Au même instant le Kizlar-Aghassy est honoré d'une fourrure de zibeline, dont il se revêt en la présence du Monarque ; de son côté , ce chef des eunuques noirs fait décorer de caftans le Réis-Efendj et les trois officiers. Pendant cette cérémonie , le Mewloudiyé se continue; et aussitôt cette hymne finie , les trois ministres Meivloud-Khananns reçoivent aussi chacun un caftan d'honneur. L'office se termine par une courte prière de toute l'assemblée. Alors les deux officiers généraux des janissaires s'avancent vers le Grand- Fézir et le Mouphty , enlèvent de devant eux leurs cabarets , et les remettent à leurs valets-de-pied pour les porter à l'hôtel de leur maître. Les gens des Oulémas et des autres Seigneurs en font de même, ce qui occasionne un mouvement général dans la mosquée. Le sultan rentre au Sérail avec le même cortège. Il fait ce jour-là , comme aux deux fêtes de Beyram , des libéralités au peuple. Le Tschocadar-Agha jette à la multitude de l'argent monnoyé. Le Grand- Vézir, ni aucun officier de la cour ne suit alors le Sultan au Sérail. Le Kizlar-Aghassy même ne l'accompagne pas. Il ne rentre qu'un quart-d'heure après Sa Hautesse ; et au sortir de la mosquée, YAgha des janissaires l'accompagne à pied, et fait devant son cheval plus de cinquante pas. Tous les honneurs de la-fête, censés faits par ce chef des noirs, sont aux dépens de la caisse de cette même mosquée, toujours régie par le Vdivode de Ghalata , à titre de Muté-wely ou administrateur perpétuel. 11 a pour les frais de cette cérémonie une somme fixe de sept mille cinq cents piastres, qui font environ dix-sept mille livres tournois. Cette fête se célèbre aussi dans les autres mosquées Impériales , mais à'jours différens, et ordinairement dans le cours de la même lune ou de Ja lune suivante, toujours au gré duMutéwety de chaque mosquée/, qui prend jour avec Le Yaddjy-F.ffendy , avec les commis et tous les officiers préposés à9a.régie des TVahf-IIarjéméinns > sous l'inspection générale du Kizlar-Aghassy j eux seuls assistent à cette fête , qui dans les autres mosquées, se célèbre toujours sans éclat, avec très-peu de peu de cérémonies. ■ • :•() nrrVto sitn h ■■•« il . •; • IL §. IL Des Prêches dans les Mosquées. Les fondateurs de tous les temples Maho-tans ne manquent jamais de les doter, et d'établir à perpétuité les revenus nécessaires à l'entretien, soit de la mosquée, soit des ministres destinés à la desservir. Parmi ces ministres est ordinairement un prédicateur sous le nom de Schéjhh ou de Valz. Il est obligé de prêcher chaque vendredi, toujours après l'office solennel de midi, afin de ne gêner personne, et de laisser à chacun la liberté de suivre à son gré les mouvemens de son zèle. Selon Ahmed Efendy , dans les premiers siècles du Mahométisme , peu de mosquées avoient des prédicateurs. Les Khaliphes eux-mêmes, à la suite du Khoudibé des vendredis, faisoient au peuple une espèce d'exhortation qui tenoit lieu de prêche. Le Khaliphe Ahmed IV, l'un des plus sàvans de son siècle, avoit composé un ouvrage qui traitoit sommairement des dogmes et des pratiques le* Tome IL A a 3?o CODE RELIGIEUX, plus essentielles du culte Musulman. Par ses ordres on en fàisoit la lecture les vendredis, .après L'office public i dans toutes les mosquées de son Empire « sur-tout dans celles de Bagh-(lad. Cet usage fut aboli depuis , et l'on y substitua par-tout les sermons des Schéjkhs. Peu de ces ministres prononcent leur discours de mémoire : ils ne prêchent ordinairement que sur les dogmes, le culte et la morale ; rarement touchent-ils les points de controverse. Les plus zélés , les plus hardis de ces Schéjkhs se permettent aussi d'exposer dans leurs sermons les devoirs des ministres, des magistrats , des chefs de la nation , du Sultan même. Ils s'élèvent contre le vice, le luxe et la corruption des mœurs. Us frondent sans ménagement, et le plus souvent avec impunité , l'injustice , la vénalité , l'oppression , la conduite des tyrans qui foulent aux pieds la loi , la religion et les peuples. Les Sultans assistent quelquefois à ces sermons; ils sont même dans l'usage de gratifier alors le prédicateur de vingt , trente ou qua-rante ducats , qu'on lui remet en cérémonie, CODE RELIGIEUX. 371 au nom de Sa Hautesse, au moment qu'il descend de la chaire. Dans des temps de calamités et de troubles , la liberté avec laquelle ces ministres s'expliquent sur les désordres de l'Etat et les abus de l'autorité arbitraire , a souvent dessillé les yeux des Monarques, des Vézirsjdès favoris, sur l'état périlleux et de leur personne et des affaires publiques. On connoît les désastres qui affligèrent le règne de Mohammed III, et les refus opiniâtres de ce Prince foible et voluptueux, de marcher en personne à la guerre. Un sermon cependant opéra ce que n'avoient pu faire les remontrances de ses ministres, les sollicitations de ses courtisans, les cris de la nation entière. Le Schéyhh de Sainte Sophie , le fameux Meuhy 'ed-dinn Efendy , après avoir fait dans son discours un tableau touchant des calamités de l'Etat, des malheurs de la guerre , et des tristes circonstances qui exigeoient du maître de l'Empire de marcher à la tête de ses armées contre les ennemis de l'Islamisme, s'écria : ►» Où est donc » de nos jours le zèle de la religion , et 372 CODE RELIGIEUX. » l'amour des fidèles pour le plus auguste des » Prophètes ? « Cari yghatrèlh dinn ve muhab-beth rcssoid guzinn P Ces paroles, qui arrachèrent des larmes et des sanglots à tout l'auditoire , firent une si vive impression sur l'esprit de Mohammed III, qu'il se détermina aussitôt à quitter le Sérail , et à conduire lui-même ses armées en Hongrie. Indépendamment de ces sermons prononcés tous les vendredis, il en est d'extraordinaires dans les autres jours de la semaine : comme les premiers , ils ne se font jamais qu'à la suite du Namaz , et seulement dans les deux prières de midi et de l'après-midi. Ainsi chaque mosquée a quatre , huit , dix , jusqu'à quatorze sermons par semaine ; ce qui est déterminé suivant les chartres de fondation, et la volonté des ames pieuses , qui ajoutent à ces libéralités, en établissant à perpétuité un traitement honnête pour des prédicateurs surnuméraires, qui s'acquittent de cette fonction dans les jours et les heures marqués par les instituteurs mêmes. Nous parlerons du rang , de la distinction, CODE RELIGIEUX. 3y3 des prérogatives de tous ces Schéjkhs prédicateurs des temples Mahométans , dans le discours général qui termine ce premier Code, où nous donnerons le tableau des Oulémas et des ministres de la religion. Des sept Nuits saintes , Léïlé-y-Mubareké. Les Mahométans ont consacré à la vénération publique sept nuits , que l'on regarde comme les plus saintes et les plus augustes de toute l'année. C'est par cette raison qu'on les appelle Lédé-j-mubareké. Ces nuits, comme on le voit dans un fameux ouvrage théologique intitulé Ferkann , ont été instituées en mémoire des plus grand mystères et des plus grandes vérités du Musulma-nisme. Ce sont, dans l'ordre de leurs époques lunaires , i°. La nuit de la nativité du Prophète. C'est le douzième de la lune de Reùij'ulewel, ou pour mieux dire, la nuit du n au 12, parce que ces peuples, comme nous l'avons déjà dit, 374 CODE RELIGIEUX, comptent les jours civils , les vingt-quatre heures du jour , d'un coucher du soleil à l'autre. 2,0. La nuit de la conception du Prophète , Léileth uV-reghciib : c'est celle du premier vendredi de la lune de Redjeb. 3°. La nuit de sa prétendue assomption, Léileth ' id-miradj1iy\n 27 de la même lune. Le Sultan la célèbre ordinairement dans lamos-quée A ghaler-djêamissy du Sérail, à la suite du quatrième Namaz du jour, qu'il fait avec tous les officiers de sa maison, et avec deux des quatorzeSchéyhlis,des mosquées Impériales, qui jouissent alternativement de cette distinction. Les prières analogues à la solennité de cette nui t,se terminent par une offrande de lait que l'on fait au Monarque et à toute l'assemblée, en mémoire de celle qui, selon les traditions nationales , fut faite à Mohammed la nuit de son assomption : elles portent que les anges lui offrirent du lait, du miel et du vin , et que le Prophète ne goûta que du lait. 40. La nuit Ledeth 'ul-béraeth : on la célèbre le i5 de la lune de Schabann} toujours CODE RELIGIEUX. 070 avec des sentimens de crainte et d'effroi , parce.qu'on la regarde comme une nuit terrible , où les anges Kiramenn-keatîblnn \ postes sur les deux côtés de l'homme, pour écrire ses bonnes et ses" mauvaises actions, déposent leurs livres, et en reçoivent de nouveaux pour continuer le même office. On croit encore que dans cette nuit, l'archange Azrad , qui est l'ange de la mort, dépose aussi le sien , et en reçoit un autre , où sont marqués les noms de tous les hommes prédestinés à la mort dans. le courant de l'année suivante. 5°. La nuit Lededi'id-cadr. On l'envisage comme étant spécialement consacrée à des mystères ineffables , ce qui la met fort au dessus de toutes les autres. C'est une opinion commune , appuyée sur l'autorité du même docteur, que mille prodiges secrets et invisibles s'opèrent dans cette nuit; que tous les êtres inanimés y adorent Dieu ; que toutes les eaux de la mer perdent leur salure et deviennent douces dans ces momens mystérieux ; qu'enfin telle est sa sainteté , que les prières faites dans cette nuit seule , équivalent en 3j6 CODE RELIGIEUX, mérites à toutes celles que l'on feroit pendant mille lunes consécutives. » Il n'a cependant » pas plu à Dieu , ajoute le même auteur, de » la révéler aux fidèles : nul Prophète , nul » saint n'a pu la découvrir ; de sorte que l'on » ignore encore cette nuit si auguste, si mys-» térieuse , si favorisée du ciel. « On la suppose cependant dans une des nuits impaires du Ramazann ; c'est pourquoi on la célèbre tous les ans le 27 de cette lune déjeune et de pénitence. Enfin les deux dernières, Léileth-ul:id, sont celles qui précèdent les deux fêtes de Beyram , l'une le ier de Scheiial, et l'autre le 10 de Zilhidjé. Les Mahométans célèbrent ces nuits comme celles du Ramazann, par l'illumination des minarets et des mosquées. Ces temples sont ouverts ; et quoiqu'il ny ait aucune obligation canonique de s'y rendre , d'y faire des prières particulières, la dévotion néanmoins y attire beaucoup de monde de tout état et de toute condition. Lésâmes les plus religieuses gardent même dans ces sept nuits la plus grande con- tinence. Les maris ne se permettent pas de coucher avec leurs femmes, ni les patrons avec leurs esclaves, dans la crainted'avoir desenfans estropiés ou défectueux ; une opinion assez générale faisant regarder tous les enfans nés contrefaits , comme conçus dans l'une de ces sept nuits saintes. Le Sultan est censé exempt de cette continence, mais seulement pour la nuit Leïlelh-ul-cadr ? le 27 de Ramazann. C'est la seule de toute l'année où le Monarque sorte du Sérail pour aller à la mosquée de Sainte Sophie. A son retour ihest éclairé par une infinité de fanaux de différentes couleurs, dont la nation en général se sert ordinairement la première nuit des noces. Cette cérémonie est relative à l'usage où sont les Sultans de coucher alors avec une esclave vierge de leur Harëm. Si elle a le bonheur de concevoir , c'est un heureux pronostic pour la félicité de Sa Hautesse , de sa maison et de son Empire. Ainsi la même opinion qui fait envisager à la nation entière comme un péché toute cohabitation quelconque dans les sept nuits réputées saintes , semble inviter dans 378 CODE RELIGIEUX, celle-ci le Sultan lui-même , en sa qualité de Khaliphe et de premier Imam. Indépendamment des sept nuits , tous les peuples Mahométans, mais sur-tout les Der ivischSy honorent encore chaque semaine d'une manière particulière celle du jeudi au ven- . dredi, et celle du dimanche au lundi, en mémoire, l'une de la conception , et l'autre de la nativité de leur Prophète. De la vénération des Mahométans pour-différentes Reliques. La nation Musulmane a un respect profond pour les choses qui ont appartenu au Prophète , et dont la plupart se conservent au Sérail comme autant de reliques précieuses: Ce sont, i°. Le Sandjeah Schérif ou oriflamme sacrée. On le regarde comme le premier des drapeaux de Mohammed. U en avoit plusieurs, dont les uns étoient blancs, les autres noirs. Le principal de ces derniers étoit de CODE RELIGIEUX. 379 simple camelot, et avoit servi de portière àla chambre d'Aïscké sa femme. Le Prophète le distingua sous le nom à'Œucab , à l'imitation de la grande bannière des Couréyschs , qui étoit sous la garde du général perpétuel de la nation. Les Couréyschs l'appeloient ainsi Œucab , nom, à ce qu'on prétend, d'un oiseau qui devance toujours les autres par la rapidité de son vol. La grande vénération que lui portaient les Arabes païens, étoit fondée sur celle des anciens Perses pour leur oriflamme sacrée, connue sous le nom de Direfsch- Keabiyany. Personne n'ignore son origine. Elle remonte à Beyour-Essb , dit Dahhak > le cinquième Roi de la première dynastie des Pischdadicns j la mythologie des anciens Perses , qui donne à ce Dahhak un règne de 3s8 ans , le représente aussi comme un monstre de cruauté. Chaque jour il faisoit égorger deux hommes, pour en appliquer la cervelle sur deux ulcères qu'il avoit aux épaules. Cette cruelle boucherie dura plusieurs années. Un forgeron dTsfakanri délivra enfin la Perse de son tyran. 38o CODE RELIGIEUX. Cet artisan , nommé Keabj 9 voyant ses deux enfans égorgés, fait de son manteau un étendard , et soulève le peuple par ses lamentations et ses gémissemens. Dahhak se dérobe à leurs fureurs. Le peuple , dans son ivresse , offre le trône à son libérateur. Keaby le refuse généreusement, et fait proclamer Feridounn y petit-fils de Djemschid I. Les perquisitions rigoureuses du nouveau Monarque font découvrir Dah]\ak à Démaivend y où ce tyran expie par la mort toutes les horreurs de son règne. Cet événement ayant eu lieu le jour même de l'équinoxe d'automne , Feridounn en fit une grande fête-, dont l'anniversaire se célébra depuis dans toute la Perse, sous le nom de Béyram ou de Mihhrd/eann. La re-connoissance de Feridounn éleva en même temps Keaby aux premières dignités de l'Etat. U enrichit même son drapeau de pierres précieuses , en fit la première bannière de son Empire, et la consacra , sous le nom de Direfsch-Keabiyany y qui veut dire, le drapeau de Keaby. On le conservoit religieusement comme le symbole de la félicité et de la gloire de l'Etat: C'est ce même drapeau consacré par les hommages de tant de siècles et de tant de générations, qui, l'an i5(636), sous le Khaliphat d'Orner, tomba au pouvoir du fameux général Sad-lbn-Ebu-Wekhas y dans la1 journée de Cadsiyé , si funeste à Yezdedjiird III. L'oriflamme étoit couverte d'or et de pierreries , et enveloppée dans des peaux de tigre. Les Mecquois avoient pour leur Œucab'le même respect que les anciens Perses pour leur Direfsch Keabiyany j et ce sentiment se communiqua aux Mahométans pour les enseignes du Prophète. Son premier drapeau fut celui que lui présenta Sehhmy quelques jours après sa fuite de la Mecque} avec Ebu-Behir et son fils dbd'ullah : « Caché pendant trois » jours , dit l'historien Ahmed Efendy > dans » la grotte Ghar-Sewr, aux environ de la Mec-»que, il quitte sa retraite le quatrième , et » suivi de ses deux fidèles compagnons , il » prend le chemin de Médine , en opérant à » chaque pas de nouveaux miracles. Sa pré-» sence seule frappe et terrasse divers partis 382 CODE RELIGIEUX. » de Couréyschs , qui, à main armée, le cher->» choient de tous côtés. Les uns le manquent, » lesautres le fuient ; d'autres, éclairés à la pre-»raière parole qu'il leur adresse, se jettent à » ses genoux, embrassent sa doctrine, et le sui-» vent à Médine. De ce nombre fut Buréidé-» Sehhmy , qui s'étoit mis à sa poursuite à la »tête d'un parti de soixante-dix Mecquois. » D'ennemi cruel, c*et officier devient l'un de » ses plus zélés partisans. Dans l'ivresse de sa *> joie, Sehhmy dénoue son turban, en ôte la » mousseline , l'attache à sa lance , et en fait » un drapeau qu'il consacre à la gloire du Pro-» phète. Ce fut là le premier drapeau de l'Is-» lamisme. Les enseignes , les porte-étendards » de tous les MonarquesMusulmans ont depuis » tenu à honneur de se décorer du nom de » Sehhmy j comme étant le premier des en-» seignes de l'apôtre céleste. « Du vivant de Mohammed, ses généraux portoient seuls les drapeaux militaires. Ils combattoient , l'étendard à la main , chacun à la tête de son corps. Dans la première expédition de Bedr-oida , faite par le Prophète en personne, l'an a de l'Hégire, Harnza , son oncle , porta sa bannière, et après lui, Alj son gendre, eut le même honneur le jour de la conquête de la Mecque et de l'entrée triomphante du Prophète dans cette première des cités musulmanes. Après sa mort, Ebu-Bekir fut le premier à donner le plus grand exemple de respect et de vénération pour les enseignes de l'Islamisme. Comme il s'agissoit, d'après le plan même projeté par Mohammed , d'une nouvelle expédition contre les frontières de Syrie, que le camp étoit déjà dressé hors de la ville , et le grand étendard planté devant la porte du général Ussamé> Ebu-Behir le fait transférer au camp en grande cérémonie, et accompagne le général , marchant à pied à côté de son cheval. « Ce trait d'humilité » dit l'histoire , ces démonstrations, ce respect » pour l'oriflamme sacrée , sous laquelle les » Musulmans dévoient marcher dans la voie » du Seigneur pour combattre les ennemis de » la foi , ajoutèrent extrêmement à l'amour » et à la vénération des peuples pour ce pre-» mier des Khaliphes.» De son temps , comme sous ses successeurs c'étoit ordinairement l'un des généraux ou des premiers officiers de l'armée (pu* portoit le grand drapeau , lequel, toujours révélé sous les noms d'Œucab et de Sandjeah-Schérif, passa successivement des quatre premiers Khaliphes aux Om/niadesde Damas ; de ceux-ci , aux Abassides de Baghdad et du Caire > et finalement à la maison Othomane , lors de la conquête de l'Egypte sous Selim I. Cette oriflamme est couverte d'un autre drapeau dont se servoit particulièrement le Khaliphe Orner? et de quarante enveloppes de taffetas , le tout dans un fourreau de drap verd. Au milieu de ces enveloppes sont renfermés un petit livre du Cour'ann, écrit, à ce que l'on croit, de la main d'Orner 3 et une clef d'argent du sanctuaire Keabé 3 la même qui fut présentée par le Schérif de la Mecque à Selim 13 en signe d'hommage et de soumission. Cet étendard, long de douze pieds , est surmonté d'une espèce de pommeau d'argent, de forme quarrée, qui contient un autre livre du Coudann écrit de la main du Khaliphe Osman. Osman. 11 fut d'abord déposé à Damas , dont le Pascha, en sa qualité d'Emir' ul-hadjh , , le faisoit porter tous les ans à la Mecque 3 à la tête de tout le corps des Pèlerins, et avec le plus pompeux appareil. Ce n'est que sous Mou-rad III, l'an ioo3 (i5o5)., que ceSandjeah-Schérif fut transporté d'Asie en Europe , par un effet de la politique du Grand-Vézir Codjea Sinan Pascha, qui , alarmé des désordres de l'Etat et des séditions perpétuelles des milices , imagina d'échauffer leur zèle, et de les rendre plus dociles au commandement militaire, par l'aspect imposant de cette relique. On la porta par Gallipolj , et sous l'escorte de mille janissaires des garnisons de la Syrie , au camp de ce généralissime en Hongrie , où en effet elle produisit la plus grande sensation sur l'esprit des peuples et des milices. L'enthousiasme désarma la fureur séditieuse du soldat et lui fit faire des prodiges de valeur. Sur la fin de la campagne, le Grand-Vézir , retourna à Constantinop/e avec cette oriflamme i qui fut reçue et déposée au Sérail Tome II. B b avec les plus grandes- cérémonies. Au rapport de l'histoire, depuis la frontière jusqu'à la capitale , on avoit peine à traverser les villes et même les chemins publics, par l'afïluence des peuples qui accouroient de tous côtés , pour voir ce drapeau et lui offrir leurs pieux hommages. Dans la campagne suivante , le même Grand-Vézir eut le premier l'honneur de sortir de Constantinople avec cette bannière, l'unique fois qu'elle fut déployée. Des Officiers de Syrie la portoient, et tout autour une multitude de Muezzinns y de Derwischs et A'Emirs marchoient à pied , et chantoient des hymnes en l'honneur du Prophète. La Cour l'accompagna hors de la ville , et tout Constantinople étoit en pleurs. Aux approches de l'hiver , elle fut encore rapportée dans la capitale; et le printemps suivant, Mohammed III allant en personne à la guerre , se fit précéder par cette oriflamme, qui fut alors confiée à un corps de trois cents Emirs à la tête desquels marchoit le Nakib'ul-EschraJ' leur chef, avec le Molla de Ghalata : le Mir-Alem y chef des chambellans, Capoudjj- Baschjs , et dépositaire de tous les drapeaux impériaux , étoit aussi à la tête de sept grands étendards , un blanc , un vert ; un jaune , deux rouges et deux bigarrés. Depuis, ces exemples servirent de loi pour ne faire sortir du Sérail le Sandjeak-SchériJ>j que lorsque le Sultan ou le Grand- Vézir conduit en personne les armées contre les ennemis de l'Etat. Alors, une superbe tente est spécialement destinée à recevoir cette oriflamme. On la dresse toujours sur une espèce de support de bois d'ébène, qu'on enfonce dans la terre, et qui est garni de cercles et d'anneaux d'argent , dans lesquels on la passe. A la fin de chaque campagne, lorsque l'armée entre en quartier d'hiver , on a ordinairement soin de la détacher de sa lance, et de l'enfermer, comme on fait au Sérail, dans une caisse richement décorée. On y procède chaque fois avec beaucoup de cérémonies ; on y lait des prières , on y brûle des parfums de bois à\doès et d'ambre gris qui se renouvellent tous les jours. Quarante enseignes pris du corps des IJarern-Capuudjilerys du Sérail, sont, depuis Bb ij 388 CODE RELIGIEUX, le siècle dernier , préposés à le porter tour à tour. Ils sont distingués sous le nom de Sandjcakdar. Tous les Zdims possesseurs des fiefs militaires, et les différens corps de cavalerie , sont censés être les gardiens et les défenseurs de cette bannière, mais sur-tout les quatre régimens connus sous la dénomination générale de Beulukeath-Erbéâ. Comme ce Sandjeak-Schérif n'est exposé aux regards du public qu'en temps de guerre, les esprits s'enflamment à son aspect ; la vénération se change alors en enthousiasme. On voit des Emirs de tout état et de toute condition , des Deruischs de presque tous les ordres , une foule de simples citoyens marcher à la guerre en qualité de volontaires. Ils se font un devoir de combattre sous ce drapeau sacré les ennemis de la religion et de l'Etat. Ceux mêmes de ces volontaires qui ne prennent les armes que dans un esprit de brigandage , ont toujours soin de colorer leurs démarches de ce motif religieux. Le fanatisme de la nation pour cette oriflamme , a plus d'une fois opéré des prodiges CODE RELIGIEUX. 389 de valeur dans les armés Othomanes. Mais il a aussi entraîné quelquefois des excès scandaleux , absolument contraires à l'esprit de la religion et de la loi , et toujours désavoués par le gouvernement. Telle fut entre autres la journée du 27 mars 1769, si funeste à tant de familles chrétiennes, et même à des Eu» ropéens d'un rang distingué. Ce Salfdjeah-Schérif , que le Grand-VédrEminn Mohammed Pascha reçut au Sérail des mains de Moustapha III, avec l'appareil le plus brillant, fit verser dans les ruesde Constantinople le sang de plusieurs infortunés. Ils furent massacrés par une troupe fanatique cY Emirs^qui, disoient-ils, vouloient soustraire ce drapeau sacré aux regards profanes des non-Maho-métans que la curiosité avoit attirésà cette procession religieuse et militaire. Cette oriflamme, en temps de paix , est gardée religieusement au Sérail dans une espèce dechapelle, où se conservent en même temps les autres reliques du Prophète. 2°. Le Hirca'jShérif j ou Burdé'ySehérije, robe sacrée. C'est un habit de camelot noir B b iij que portoit Mohammed, et dont il revêtit dë sa main, l'an 9 de l'Hégire ( 63o ) le fameux Poète Kiab Ibn Zc/ihir > en récompense d'un poème sublime où l'auteur ebantoit , avec les miséricordes de l'Eternel, la grandeur et la gloire immortelle du Prophète. Muail'iyé I acquit depuis à prix d'or, des entajfjpcle Kiah , cette robe, qui, passant des Ommiades aux A bas si des , fut trouvée au Caire avec l'oriflamme dont nous venons de parler. • Cette robe eat enveloppée de qiïarante Boghtsrhas ou sacs , tous des étoiles les plus riches. On la découvre une fois l'an, le 10 de Ramazann. Cette cérémonie se célèbre avec autant d'appareil que de piété. Le Sultan s'y rend en pompe , suivi de tous les Officiers de sa maison. Le Grand- Vézir, le Mouphty ', les principaux Seigneurs de la Cour y assistent également. On développe la robe en faisant les plus ferventes prières ; le Sultan la baise le premier avec un respect profond. II assiste ensuite debout au même acte de dévotion que fait toute l'assemblée , chacun selon son rang et son grade, à quoi veille avec la plus grande attention le grand-maître des cérémonies , toujours présent à toutes les fêtes religieuses ' ou politiques de la cour. Le Silihdar-Aga , porte-glaive du Sultan , remplit ce jour-là l'une des fonctions les plus importantes de sa charge. Il se tient à côté de la relique, et à mesure qu'on la baise, il l'essuie ayec un mouchoir de mousseline qu'il présente ensuite à la même personne. Auprès de lui se place un officier chargé de tous ces mouchoirs. A la suite de cette cérémonie, le Mouphty et le Nakib'ul - Eschraf, chef des Emirs , lavent cette partie du manteau, qu'ils trempent légèrement dans un grand bassin d'argent rempli d'eau , très-vénérée, qui porte alors le nom d'Ab-Hircay-Schérif', c'est-à-dire, eau de la robe sacrée. La distribution en est réservée au Kizlar-Aghassy, qui en fait remplir le même jour une infinité de fioles, toutes scellées de son sceau, et que des Baltadjys du Sérail portent à toutes les personnes qui ont assisté à la solennité. Le Monarque, les Princes du sang, les Sultanes et les dames Bb iv du Harem de Sa Hautesse en reçoivent également, ce qui procure toujours aux officiers distributeurs, des présens assez considérables. Cette eau est servie ordinairement à table, les quinze nuits restantes du Ramazann. Oru rompt alors le jeûne avec un verre d'eau, dans lequel on verse quelques gouttes de celle qui est réputée sacrée. Le jour de cette cérémonie est encore intéressant pour la milice des janissaires. Comme ils assistent à la fête, tous en ordonnance, dans la seconde cour du Sérail, ils reçoivent du Sultan , au moment de la retraite, et par les mains des officiers de sa maison , un certain nombre de grands cabarets de Baldaiva j c'est une confiture de sucre et de pâte d'amandes douces, qu'ils portent eux-mêmes en grande pompe, dans leurs casernes, où les officiers majors en font la distribution par chambrées ou par régi mens. Le Hirca-y-Schérif du Sérail n'est cependant pas la seule robe du Prophète révérée dans la capitale de l'empire ; il en existe une autre que l'on croit avoir été léguée par Mohammed, au moment de sa mort, à l'un de ses plus zélés prosélytes, Uwéyss'ul Arémy , dans XYémen. Ce manteau , d'une étoffe grossière de poil de chameau , a été religieusement conservé par les descendans de cet A rabe, qui se trouvent établis à Constantinople depuis plus de deux siècles. Le fils aîné de la famille en est toujours le dépositaire , sous le nom de Hircay-Schërid-Scheykhy j c'est-à-dire,le Scheykh du manteau sacré. Le possesseur actuel se nomme Seyyih Osman Efendy. C'est un des premiers Muderriss de Constantinople. Cette relique , enveloppée comme celle du Sérail, dans quarante Boghtschas des plus riches, est gardée dans une superbe chambre qu'il a fait bâtir en pierres, dans son hôtel, situé au faubourg Essky-Aly-Pascha-Mahallessy. Il l'expose aux hommages du public chaque année , dans les quinze derniers jour du Ramazann. La dévotion y attire un monde prodigieux ; hommes et femmes de tout état et de toute condition s'y rendent avec des offrandes, non pas en argent, mais en étoffés, en bois d'aloès, en ambre gris , en mousselines ; 394 CODE RELIGIEUX ce qui fait tous les ans un objet considérable pour le dépositaire fortuné de cette robe. Pendant cette quinzaine, deux de ses plus proches parens se tiennent tour-à-tour, la tête baissée, les mains croisées , et dans le recueillement le plus profond , devant cette relique, dont on ne fait voir et baiser que le bord. Une dame de la même famille , le visage voilé, distribue à côté de cette chambre de l'eau sainte, absolument pareille à celle du Sérail. Chacun s'y présente avec de petites fioles, dont on débite ces jours-là une quantité prodigieuse, dans des boutiques établies pour cet objet aux environs de la même maison. L'afiluence y est d'autant plus considérable, que le peuple n'a pas l'avantage de visiter les reliques qui se conservent au Sérail ; cette partie du palais qui est occupée par le Sultan et par les officiers de sa maison , n'étant jamais ouverte que pour les Ministres et les Grands de l'Etat, et encore dans les seuls jours consacrés à des solennités religieuses ou à des cérémonies politiques. 3°. Sinn-Schérif ou dents sacrées. Ce sont r deux des quatre dents que le Prophète perdit dans la journée (YUhud : l'une est gardée au Sérail, et l'autre dans la chapelle sépulcrale de Mohammed II, où on l'expose à la vénération du public, la nuit Lédelul-cadr , 27 de Ramazann. 40. Lddùyé-y-Schérije ou barbe sacrée. On croit que c'est une partie de celle du prophète. 5°. Cadém-Schérij , ou pied sacré*. C'est une pierre qui porte l'empreinte d'un pied d'homme. 11 passe pour être celui de Mohammed, qui opéra , dit-on , ce miracle dans les premières années de son apostolat. Mahmoud I le fit déposer dans le mausolée d'Eyub. On conserve encore au Sérail des vases, des armes, et d'autres effets que l'on croit également avoir appartenu au Prophète , entre autres, un arc dont il s'armoit dans toutes ses expéditions guerrières. On y voit aussi tous les anciens ornemens du Keabé de la Mecque. Le commissaire Hassan Bey, qui fut chargé par Ahmed I de les renouveler à la suite de la rééducation de ce sanctuaire, les envoya ^Constantinople , l'an i6i3 , avec une plaque d'or ,kcivhéb-durry garnie de perles , de rubis et d'émeraudes, qui ornoit le sépulcre du Prophète à Médine, et qu'il remplaça par un diamant de grand prix. Il accompagna même ces reliques d'une belle canne , faite avec du bois de l'ancien Keabé et que le pieux AhmedI, disent les annales, reçut avec les plus grands transports de joie. Indépendamment de ces reliques directement relatives au Prophète , il en est d'autres que l'on honore également comme ayant appartenu à ses disciples. Les principales sont un tapis d'adoration , Sedjéadé > du Khaliphe EbuBekir; différentes armes des généraux qui ont combattu sous les étendards du Prophète, et le turban du Khaliphe Orner. Ibrahim I le porta le jour de sa proclamation , comme un heureux présage de la prospérité de son règne. Anciennement toutes ces reliques étoient déposées dans l'appartement du trôné, Takhth-Odassy : elles furent ensuite transférées dans une pièce particulière, que la dévotion con- sacra sous le nom de Hirca-y-Schërif'-Odassy ; c'est-à-dire , la chambre de la robe sacrée. C'est un édifice carré , au milieu duquel s'élève une espèce de tabernacle, revêtu au dedans et au dehors d'une étoffé noire brodée en versets du Coudann. Dans le centre on voit deux châsses placées à distances égales des quatre murs. L'une renferme la robe , et l'autre la bannière du Prophète, à laquelle on ne touche qu'à l'avènement d'une guerre , pour la suspendre à une pique, où elle reste toujours enveloppée dans un fourreau de drap vert. Au foud de ce tabernacle est une armoire ménagée dans le mur , et où sont déposées les autres reliques du Prophète. Les deux châsses sont environnées de deux grands chandeliers d'or, et de quatre au très d'argent massif. L'un des premiers et deux des seconds brûlent toutes les nuits , ainsi que les quatre lampes d'argentquiy sont suspendues. Cette chapelle est censée être sous la garde spéciale des gentilshommes de la chambre. Deux de ces officiers sont obligés tour-à-tour d'y passer vingt quatre heures deux fois par semaine , les lundis et 398 CODE RELIGIEUX-. les vendredis , en commençant toujours la veille au coucher du soleil, et cela par respect pour les deux nuits dans lesquelles on honore la conception et la nativité de Mohammed. Voyez les Planches 26 et 27. Les Sultans sont dans l'usage de visiter fréquemment cette chapelle ; ils y font ordinairement l'un des deux derniers Namas du jour : alors on allume tous les cierges, et on brûle du bois d'aloès ou de l'ambre gris dans une espèce d'encensoir d'argent. Rien ne ralentit la dévotion de ces princes. Lors même qu'ils s'absentent de leur palais pour passer la belle saison à Beschik - tasch > sur la rive septentrionale du Bosphore , vis-à-vis du Sérail, ils y viennent une ou deux fois la semaine , et le plus souvent incognito } uniquement pour faire leurs prières dans cette chapelle, dont la sainteté semble être à leurs yeux, comme à ceux du public, au dessus même de celle des mosquées. On peut encore ranger parmi ces reliques, le voile qui couvre le sépulcre du Prophète à Médine } et celui du Kéabé de la Mecque : les rapports qu'ils ont avec l'Islamisme et son fondateur, y attirent également les respects de tous les Mahométans. Nous en parlerons dans le chapitre qui traite du pèlerinage de la Mecque. Il n'existe nulle autre part dans l'Empire des reliques du Prophète. Ce n'est pas que des imposteurs n'aient tenté dans tous les siècles du Mahométisme , sur - tout clans les premiers , de mettre à profit la crédulité du public. Mais les Souverains et les ministres de la religion ont toujours été attentifs à prévenir ces abus , non en persécutant les faussaires , mais en leur ôtant des mains, en achetant à prix d'or et d'argent, les objets de leur prétendue vénération. On lit dans Ahmed Efendy ^que sous le règne du Khaliphe Mohammed Iy prince très-affable, un homme du peuple pénétra jusqu'à lui, et lui présenta de vieilles sandales, comme étant celles du Prophète. Le Khaliphe les prit, les baisa respectueusement , s'en frotta les yeux ; et après avoir renvoyé cet homme avec de l'argent, et gardé la relique, il dit à deux de ses officiers, qu'assurément le Prophète n'avoit jamais porté cette chaussure ; mais qu'il fàlloit compatir aux écarts de la simplicité ou de l'indigence, prévenir avec sagesse ces abus, et arrêter les propos indécens que ce vieillard auroit pu tenir , s'il lui eût fait une autre réception. La dévotion des Mahométans pour leurs reliques se borne simplement à les honorer : l'hommage qu'on leur rend se rapporte tout entier au Créateur. On ne leur attribue aucune qualité propre , aucune vertu miraculeuse. Tout se rapporte à Dieu, comme la source des grâces célestes et le seul dispensateur de tout bien. D'après cette opinion, qui est conforme aux vrais principes de l'Islamisme, ils ne se permettent jamais aucun acte de latrie envers les reliques des saints. S'ils les invoquent,ce n'est qu'en qualité d'intercesseurs auprès de Dieu; et lorsqu'ils adressent leurs prières à Mohammed luirmême, ce n'est non plus qu'à ce titre-, comme étant le saint par excellence. le dernier et le coryphée des Prophètes. Ce sentiment de vénération pour les objets qui qui concernent leurs saints , s'étend à tout ce qui regarde les anciens Patriarches , mais sur-tout à la personne de Jésus-Christ. Us ne se livrent cependant à aucun acte extérieur de dévotion envers l'homme Dieu; mais aussi ne se permettent-ils jamais la moindre irrévérence, ni même le déplacement d'aucune relique chrétienne. Ce seroit, disent-ils, attirer sur nous la colère et la malédiction de ce grand Prophète. Les annales de l'Orient offrent à ce sujet une anecdote assez remarquable. L'an 33 r (942), sous le Khaliphat à'Ibrahim II y Constantin VII Porphirogenète\ envoya à Baghdad une ambassade solennelle , dans le but principal de demander une relique que l'on con-servoit dans une Eglise*de Rouhhaj c'étoit un mouchoir sur lequel étoit empreinte l'image de Jésus-Christ j miracle , dit l'auteur, que ce saint Prophète opéra en s'essuyant le visage. Le Khaliphe se fit scrupule d'en disposer de son chef: il convoqua un conseil extraordinaire , et ce ne fut que d'après l'avis unanime des Oulémas de Baghdad } qu'il consentit aux Tome IL Ce désirs du Monarque Grec. Par ses ordres on remit à l'ambassadeur cette relique , qui (]e. vint le prix de la délivrance d'un certain nombre de captifs Musulmans, qui languissoient dans les prisons de Constantinople. LIVRE III. De la Dîme aumônière, Zékiath. O n divise ce Livre en cinq Chapitres ; le premier traite de la dîme en général; le second , de l'aumône paschale ; le troisième , du sacrifice paschal ; le quatrième, des fondations ou donations pieuses ; et le cinquième , des temples. CHAPITRE PR E M I E R. De la Dime en général. La dîme aumônière est d'obligation divine. Elle consiste dans le sacrifice d'une partie des biens du fidèle au profit des pauvres Musulmans, soit hommes, soit femmes , soit enfans, de toute famille et de toute tribu C c ij 404 CODE RELIGIEUX, quelconque , excepté celle de Béni-Haschim. Ci Cette dîme ne peut donc être donnée ni aux Musulmans aisés , ni à aucun infidèle , quel que soit son état d'indigence. La raison qui en exclut indistinctement tous les Béni-Haschims , c'est qu'étant la branche la plus illustre de la tribu des Couréïschs , ce seroit les avilir , les dégrader de leur noblesse , que de les faire participer à la jouissance de cette dîme, comme, étant une aumône que chacun doit faire en expiation de ses péchés et de ses iniquités envers Dieu. Leurs esclaves, et même leurs affranchis non-absolus, ne doivent pas également y participer. Mais, en compensation , cette tribu si distinguée, jouit de la cinquième partie du quint légal qui forme le droit du Souverain sur le butin que l'on enlève en temps de guerre aux ennemis de la foi. Cette concession, si honorable pour eux , est fondée sur ces paroles du Prophète : O /teW-Hascliim ! Dieu rend illicite à ton égard la dune aumônière, cette eau qui lave les mains humaines ? et les CODE RELIGIEUX. 4o5 purifie de leurs souillures j et te donne en retour le retjuint légal (i). Cette dîme étant une aumône religieuse que le fidèle doit faire uniquement pour Dieu, dans les séntimens d'une charité pure, exempte de toute vue temporelle et mondaine, ne doit conséquemment être donnée qu'à des étrangers, et jamais à des parens ni à des alliés. C. On ne doit Ja donner à aucun parent , soit de la ligne ascendante , soit de la ligne descendante, à l'infini. Le mari ne doit pas non plus en disposer en faveur de la femme, , ni la femme en faveur du mari, ni le patron en faveur de son esclave, pas même de son affranchi non-absolu. Nul fidèle ne doit en disposer en faveur des pauvres d'une autre cité (i) Ya Beni-Haschim inn'Allahhé harremé aléïk'umghas-sahùh'i éyédiy 'un-nass cwsakhah'um we iwaçik'um mln'nha khoums'ul-khoumj. Ce iij 406 CODE RELIGIEUX, que celle où il demeure, à moins que ce ne soit pour des compatriotes réduits à la dernière misère. Il est cependant libre à chacun de la distribuer à son *gré , mais toujours aux personnes qui j ont un droit légal, sans qu'il soit permis à celles-ci d'en rien demander, supposé quelles aient de quoi vivre pour la journée, parce qu'un pauvre assuré de sa nourriture pour le jour même, ne doit jamais rien mendier pour le lendemain. Généralement toutes les personnes qui sont douées de sens , en âge de majorité, dè religion Musulmane* de condition libre, et dans un état d'aisance , sont obligées à cette dîme aumônière. C. Ainsi le mineur et l'insensé n'y sont pas tenus, en vertu de cette parole du Prophète : La plume ( des deux anges écrivains ) n'est pas en action à l'égard de trois classes d'hommes : des endormis , jusqu'à ce qu'ils s'éveillent ; des mineurs, jusqu'à ce qu'ils parviennent à majorité j et des insensés , jusqu'à ce qu'ils recouvrent le bon sens (. 1 ). Le non-Musulman n'y est pas obligé non plus, parce que la loi ne le soumet à aucune des pratiques du Mahométisme. Aussi ce n'est pas leur omission qui le rendra coupable aux yeux de l'Eternel, mais son infidélité, c'est-à-dire , le défaut de croyance aux vérités de l'Islamisme. L'esclave en est également dispensé , parce que, ne pouvant rien posséder en propriété, il ne peut rien donnera personne. Enfin l'état d'aisance exige que le fidèle soit possesseur d'une certaine quantité de biens, au moins de deux cents talens , Dir'hém j mais la possession de ce taux décimal, Nissab, doit être libre de toutes dettes civiles , sans égard à celles que la religion auroit pu faire contracter. Tels sont les vœux, l'acte de pèlerinage , les peines expiatoires , l'aumône (1) Refiî-Câlem y âhn selassé an èn-naïm hata ycssti-ka*è w- ai 'es-saby hâta yuhbîelem , we an d-medjnounn hata youkal. C c iv paschale, le sacrifice paschal , etc. Il faut cependant en excepter les dîmes aumônières arriérées , qui, comme les dettes civiles,doivent être prélevées sur le montant du taux décimal. Ce taux doit aussi être indépendant des premiers besoins de l'homme , maisons, vêtemens , meubles, bêtes de monture , bêtes de somme, esclaves, armes, outils , ins-trumens , même les livres de religion, en un mot, toutes les choses usuelles et nécessaires. En conséquence, la dîme n'est imposée que sur les objets de luxe , et sur tous les biens qui servent au trafic, de quelque nature qu'ils soient, acquêts, hérédité, legs , biens dotaux , etc. , excepté néanmoins les biens fonds , comme sont les terres décimales et les terres tributaires , parce qu'elles supportent les droits publics de YŒuschr et du , Kharadjh. V. L'Imam Schafiy ne dispense de cette dîme ni les mineurs ni les insensés : il exige qu'elle soit distribuée aux pauvres par les mains de leurs tuteurs. Selon lui, cette obligation est aussi indispensable que celle de pourvoir à la subsistance de leurs femmes , CODE RELIGIEUX. 409 et au paiement des droits publics pour leurs immeubles et leurs possessions. Cette dîme doit être annuelle, et toujours en raison des biens réels et effectifs de chaque Musulman : c'est pourquoi il faut ajouter chaque année aux capitaux les profits de l'année précédente. On doit cependant en excepter les biens qui seroient divertis , égalés, volés , ravis , usurpés, perdus en mer, ou enfouis dans un champ ouvert, dont l'endroit seroit réellement ignoré du propriétaire. Si on les recouvre , la dîme n'en est due alors que du jour de leur recouvrement. V. L'Imam Zufer et l'Imam Schafiy la prescrivent du jour même qu'on les a perdus. Mais si un bien est enfoui dans une maison ou dans un terrain clos, le propriétaire est toujours soumis à la dîme, quand même il en îgnoreroit l'endroit, 410 CODE RELIGIEUX, parce qu'il ne dépend que de lui d employer les moyens nécessaires pour le découvrir. On n'est cependant obligé à rien pour les biens enlevés de force ou confisqués par autorité souveraine, ainsi que pour toute dette active niée par un débiteur contre qui il n existerait aucune preuve testimoniale. Mais si la dette est avouée par le débiteur , quel que soit son état d'opulence ou d'indigence, ou si même étant niée , il exîstoit des preuves dont l'action judiciaire ne dépendront que du créancier, alors celui-ci, dans l'un et l'autre cas,est toujours obligé à la dîme, en raison du montant de sa créance. V. Les Imaméinns n'admet lent pas cette obligation, si le débiteur est déclaré insolvable par acte juridique. L'acquittement de cette dime doit toujours être accompagné de l'intention du fidèle : s'il en manque , il ne CODE RELIGIEUX. 411 peut être excusable qu'autant qu'il n auroit disposé que d'une partie delà dîme. Mais s'il la donne en entier sans avoir l'intention requise , le paiement de cette dette religieuse est pour lors réputé nul. V. L'Imam Schafiy admet dans ce cas le non mérite, mais pas la nullité de l'acquittement. Enfin le fidèle n'est proprement obligé qu'au quart de la dîme aumônière (deux et demi pour cent) sur tous les biens qui y sont légalement assujettis. C. Ces biens , quoique rangés en trois classes principales, qui comprennent les bestiaux, les métaux et les meubles, forment cependant cinq articles distincts et séparés , parce que l'estimation du taux décimal, et l'acquittement de la dîme sur chacun de ces articles, se font dans un esprit différent. / Article I". De la Dtme sut les Chameaux. Pour payer la dîme des chameaux , il faut en posséder cinq , ce qui équivaut à deux cents talens. Cette dîme consiste en un mouton. Neuf chameaux n'en paient pas plus ; mais le nombre de dix doublant la matière imposable ou le taux décimal, on est pour lors obligé de donner deux moutons. D'après cette règle , la dîme aumônière exige pour le nombre De \S à 19 chameaux,3 moutons. De .20 à 24 ........ 4 moutons. De 25 à 35........ 1 chamelle de 2 ans. De 36 à 45........ 1 chamelle de 3 ans. De 46 à 60........ 1 chamelle de 4 ans. De 61 à 75........ 1 chamelle de 5 ans. De 76 à 90........2 chamelles de 3 ans. De 91 à 120........2 chamelles de 4 ans. De 121 à ii5........2 chamelles de 4 ans et 1 mouton. De 126 à i3o........2 chamelles de 4 ans et 2 moutons. De i3i à i35........2 chamelles de 4ans et 3 moutons. De i36 à, 140........2 chamelles de 4 ans et 4 moutons. CODE RELIGIEUX. 413 De 141 à 145 chameaux, 2 chamelles de 4 ans et une de 2 ans. De 146 à 1S0 ......... 3 chamelles de 4 ans. De i5i à i55........ 3 chamelles de 4 ans et 1 mouton. De i56 à 16b........ 3 chamelles de 4ans et 2 moutons. De 161 à i65 ......... 3 chamelles de 4 ans et 3 moutons. De 166 à 170........ 3 chamelles de 4 ans et 4 moutons. De 171 à 175........ 3 chamelles de 4 ans et une de 2 ans. De 176 à i85........ 3 chamelles de 4ans et une de 3ans. De 186 à 200........ 4 chamelles de 4 ans. Après ce nombre on recommence sur le même pied. Article 2. De la Dîme sur les Bœiifs. La possession de trente bœufs forme le taux nécessaire pour en pajer la dîme : elle consiste en un veau de deux ans. Trente-neuf bœufs n'en paient pas plus. Ainsi, d'après cette règle, la dîme aumônière exige pour le nombre De 40 à 59 bœufs,, i bœuf de 3 ans. De 60 à 69.......2 bœufs de 2 ans. De 70 à 79....... 1 vache de 3 ans et un bœuf de 2 ans. De 80 à 89......1 2 vaches de 3 ans. De 90 à 99......."3 bœufs de 2 ans. De 100 à 109....... 2 bœufs de 2 ans et 1 vache de 3 ans. 414 CODE RELIGIEUX. De uo à 119 bœufs, 2 bœufs de i ans et 2 vaches de 3 ans. De 120 à 129...... 4 bœufs de 2 ans, ou 3 vaches de 3 ans. Après ce nombre on recommence sur le même pied. C. Les buffles sont censés compris dans cet article des bœufs. Article 3. De la Dîme sur les Moulons. Le taux pour les moutons fait une exception à la loi générale de cette dîme , puisque sur quarante il en faut donner un, et rien de plus jusqu'au nombre de cent vingt. De cent vingt-un , jusqu'à trois cent quatre-vingt-dix-neuf , il en faut trois. Les quatre cents en exigent quatre. En partant de ce nombre de quatre cents, on doit ajouter un mouton à chaque centaine de plus ; ce qui , d'après l'ordre exprès du Prophète, réduit cette dîme à un pour cent. C. La chèvre , le bouc et l'agneau sont également compris dans cet article. article 4. De la Dîme sur les Chevaux. Il faut posséder,cinq chevaux pour en payer la dîme, qui est d'un sequin par tête, on bien deux et demi pour cent sur leur estimation réelle, supposé que la valeur de cinq chevaux monte à la somme de deux cents talens. C. Les jumens, les mulets et les ânes sont censés compris dans cet article. Toute bête de somme et de monture à l'usage particulier du Musulman, est exempte de la dîme , ainsi que les petits des chameaux, des moutons et des bœufs, à moins qu'il n'y en ait de grands dans le troupeau même. Dans ce cas, un seul suffit pour les soumettre tous à la dîme. C. Si donc un homme possède quarante moutons, dont trente-neuf seroient encore des agneaux, il est obligé de donner en aumône 416 CODE RELIGIEUX. le quarantième, c'est-à-dire, le seul mouton du troupeau. Si les biens en bestiaux appartiennent en société à différens particuliers , le taux se règle alors, non sur la masse'totale de ces biens communs, mais sur la portion de chaque co-intéressé. Cette dîme sur les bestiaux, comme sur les autres objets , est payable au gré du fidèle , ou en nature, ou en espèces. Article 5. De la Dîme sur l'Or , l'Argent et les Effets mobiliers. La somme d argent sujette à la dîme est de deux cents dragmes, et celle de for de vingt médicaux. Cette dîme est de deux et demi pour cent sur lune et sur l'autre. C. La dragme, Dirhém, est de quatorze karats, hyraths ; et le médical, misscal, de vingt karats, chacun de cinq grains d'orge. CODE RELIGIEUX. 417 Ce poids a été ainsi déterminé par le Khaliphe Orner, de l'avis unanime de tous les disciples du Prophète , attendu la confusion des différens poids d'or et d'argent qui avoient cours alors dans toute l'Arabie. Sur les deux cents dragmes d'argent, et sur les vingt médicaux d'or, la loi fait grâce de tout ce qui pourroit excéder ces sommes jusqu'à là concurrence de quarante dragmes pour l'argent, et de quatre médicaux pour l'or; mais tout ce qui est au-delà de ces poids sur l'un et l'autre métal, est soumis à l'entier acquittement de la dîme. Ce taux est le même pour Tor et l'argent, morinoyé ou non , comme pour les ornemens et les bijoux de l'un et de l'autre sexe , bagues , montrés , colliers , bracelets , boucles d'oreilles 7 etc., et pour tous lés ustensiles , vases, coupes en or ou en argent, dès qu'ils sont un objet de luxe ou de commerce. C. Le Prophète voyant un jour deux femmes faire leurs tournées, Tawaf, autour du Tome II. Dd 4t8 CODE RELIGIEUX Keabé de la Mecque , toutes deux portant des bracelets d'or, leur demanda si elles en payoient la dîme; elles lui répondirent que non. Foulez-vous, clone, répliqua-t-W, porter an lieu de ces bracelets d'or, des bracelets de Jeu P A Dieu ne plaise ! répondirent-elles avec la plus vive émotion. Eh bien, continua, le Prophète, soyez attentives désonnais, à en payer la dune aumônière. Au défaut de la quantité nécessaire clans chacun de ces métaux, le lidèle doit joindre l'or à l'argent , et même la valeur réelle d'autres effets pour compléter le taux légal, et en donner la dîme aux pauvres. Si l'or et l'argent sont mélangés, il faut pour lors s'en tenir au plus dominant des deux métaux. S'ils ont un alliage de cuivre au dessus de la moitié du poids , ils sont dans ce cas envisagés comme marchandises,, et par-là soumis à une juste estimation. Mais si l'or ou l'argent domine CODE RELIGIEUX. 419 sur le cuivre , alors la monnoie est censée avoir sa valeur intrinsèque, et la dîme aumônière en est due comme or ou comme argent massif. Observations. Si les Musulmans sont exemplaires dans l'exercice de diverses pratiques de leur culte, ils ne le sont pas moins sur cet article de la dîme, comme sur tout ce qui tient à la charité , aux actes d'hospitalité, d'humanité , de bienfaisance. Les personnes les moins aisées, du moment qu'elles possèdent le taux légal de deux cents talens, qui font environ 12,0 liv • tournois, s'empressent d'en sacrifier une partie en faveur des pauvres , ou de leurs parens indigens. Les alliés, tels que le gendre, la belle-fille, etc. et les collatéraux , les frères même et les sœurs , peuvent participer à la jouissance de cette dîme. La loi n'en exclut que les ascendans, les descendans et les conjoints , parce qu'ils ont le droit, en cas d'indigence, de réclamer les secours nécessaires à leur Dd ij entretien, à titre d'alimens, Ntfaca. Quant aux Béni-IIuschims _, également exclus de la jouissance de cette dîme, on sait que ce sont les Emirs descend ans du Prophète et des autres branches du célèbre Haschim son bisaïeul. Les plus indigens d'entre eux , ceux même qui languissent dans les dernières classes de la nation, reçoivent des secours, non sous le nom de dîme, mais à titre d'aumône, Sadaca. A ce mot , la main du Musulman s'ouvre aux pauvres de tonte famille , de toute nation , de toute religion , de tout pays. On verra dans la partie morale jusqu'où s'étendent les libéralités et les aumônes qui sont encore prescrites au Musulman. Quanta la dîme , on ne se règle pas toujours sur les déterminations de la loi pour s'acquitter de ce devoir important. On omet les détails d'un calcul exact et minutieux de ses moyens. On se contente de faire en gros des charités, toujours clans l'esprit de la loi , et le plus souvent fort au dessus des sommes que l'on devroit donner à raison de sa fortune , de ses revenus , de ses profits annuels. Ceux même qui pendant leur vie ont quelquefois manqué à cette obligation, n'oublient rien pour y satisfaire à la^fin de leurs jours, soit en répandant de grandes aumônes au lit de mort , soit en disposant , par testament , d'une partie de leurs biens au profit des pauvres. Ces sentimens de charité et de bienfaisance ont fait dans tous les temps le caractère distinctif de ces peuples. Les annales du Mabométisme en fournissent mille traits édifians. Les hommes les plus vicieux et les plus avares, les ministres les plus corrompus , les princes même les plus durs et les plus cruels , ont toujours respecté ce grand précepte de l'Islamisme. Le tyran qui d'une main dépouille les maisons les plus opulentes , pourvoit de l'autre à la subsistance du pauvre et de l'indigent. Ces devoirs que la nature impose à tous les hommes , semblent avoir été plus scrupuleusement observés encore par les princes de la maison Othomane. Un voit dans Sad'ed-dinn-Bfendy, qu'Osman I ne cessa, pendant toute sa vie , de répandre des aumônes au sein des veuves et des orphelins. Tous les Ddiv 422 CODE RELIGIEUX, jours on servoit dans son palais plusieurs tables destinées aux malheureux. Il y assistoit souvent ; il posoit même de sa main les plats 6iir la table , et toujours d'un air de bonté et de satisfaction qui étonnoit les officiers de sa cour. Par-tout où il rencontroit des pauvres , il leur faisoit l'aumône; et il lui arriva plus d'une fois, ajoute le même auteur, de leur donner jusqu'à son manteau. Mohammed 1 étoit dans l'usage d'en nourrir chaque vendredi un nombre considérable. Le prince Emir-Suleyman } fils de Ba/yézid I, rachetoit tous les jours un esclave , ou délivroit un captif, Bayéddll rccherchoit de préférence les pauvres des familles distinguées , et tous les ans il faisoit toucher de grosses sommes aux gouverneurs des provinces, avec ordre de les distribuer aux plus indigens des villes et des campagnes. D'autres Sultans s'attachoient plus particulièrement à ceux de la Mecque et de Médine. Enfin les Monarques, lesGrands et les personnes opulentes , indépendamment des sommes prodigieuses, qu'ils versent tous les ans au sein de la misère, se font encore un devoir CODE RELIGIEUX. 423 d'employer une partie de leurs biens à des fondations pieuses et à des établissement charitables , pour la subsistance des pauvres et le soulagement des malheureux. Nous en parlerons plus bas , à l'article dés Temples' CHAPITRE IL De F Aumône Paschale , Sadacath'ul-fitr. L'aumône paschale est d'une obligation canonique. Elle consiste en une demi - mes ure , Sâ{r), soit de blèd , soit de farine , soit de raisins , ou bien en une mesure entière de dattes ou d'orge que Ton doit distribuer aux pauvres. On est cependant le maître de faire cette aumône en nature ou en argent. Tout Musulman aisé est soumis à cet acte charitable : il y est obligé , et pour lui, et pour ses enfans mineurs s'ils sont indigens , et pour (1) Le Sa est de mille quarante dragmes; Dd iv 424 CODE RELIGIEUX, ses esclaves , soit Musulmans, soit non-Musulmans , et même pour ses affranchis non absolus. C. Il n'y est donc jamais obligé ni pour les enfans mineurs et opulens, ni pour les enlàns majeurs, quelles que soient leurs facultés , ni pour les esclaves communaux , ni pour les affranchis absolus, ni même pour sa propre femme. V. LTmam Schafiy admet l'obligation du mari pour la femme ; l'Imam Zufer, celle du père à l'égard des enfans mineurs , soit indigens , soit opulens ; et les Imaméinns, celle des co-patrons de l'esclave communal, chacun en raison jde son intérêt ou de son droit de propriété sur lui. L'obligation du fidèle pour cette aumône n'existe que depuis l'aurore jusqu'à l'heure de l'oraison paschale, le i" de la lune de Schewal , jour de la fête Td-fitr. 'C. D'après cette détermination temporaire, cette aumône ne sauroit faire une dette religieuse pour la personne qui mourroit un CODE RELIGIEUX. 425 instant avant I'aurone, ni pour l'enfant qui naî-troit, ou l'infidèle qui embrasseroit le Musul-manisme un instant après l'oraison paschale. On est cependant maître de s'en acquitter avant ou après ce temps prescrit , et même de faire ces aumônes par anticipation pour plusieurs années à la fois. V. L'Imam Schafiy fixe le temps de cette obligation à la veille même de la fête , c'est-à-dire, au coucher du soleil, dans le dernier Jour de Ramazann ; au moment qu'expire l'obligation du jeûne canonique de cette lune. CHAPITRE III. Du Sacrifice Paschal, Udd'hiyé. Le sacrifice paschal est l'immolation que l'on fait d'un animal , dans la vue d'honorer l'Eternel le jour de la grande fête des sacrifices , Id-ad'hha. Cet acte est d'obligation canonique ; ainsi tout Musulman aisé , de condition libre et de demeure fixe , est tenu à cette 426 CODE RELIGIEUX, offrande, qui consiste en un mouton (i) ou en un bœuf, ou en un chameau. Différentes personnes peuvent s'associer jusqu'au nombre de sept pour l'immolation du bœuf ou du chameau. Tous doivent s'unir d'intention à cet acte auguste , comme étant une œuvre agréable à l'Eternel ; et tous doivent être Musulmans , de condition libre , et y entrer chacun pour un septième , jamais pour moins, C. Or si un seul cîe ces associés y entre pour une moindre portion , s'il est de condition serve, ou non-Musulman, s'il participe au sacrifice par pur motif d'intérêt, pour avoir une partie de la victime, le sacrifice est réputé nul pour tons. L'acte d'association , fait avant ou après l'acquisition de l'animal , est (i) Le bouc , la chèvre et l'agneau y sont censés compris. également bon et valide, mais il est toujours plus louable et plus méritoire de le former avant Tachât. L'animal acheté et destiné au sacrifice, ne doit plus être revendu. Le temps consacré à cette auguste offrande , est celui des trois premiers jours de la fête Id-acThha : il commence à l'aurore du premier jour, et finit au troisième, vers le coucher du soleil. C. Cependant les momens les plus salutaires sont ceux de la matinée du premier jour de la fête. C'est pourquoi ce jour est consacré sous le nom de Yewrri un-ndhhr ( jour de la maetation ou de l'immolation), et cela depuis le lever du soleil jusqu'à midi, temps distingué sous le nom à&Douhhaj d'où dérive le mot tXUddthiyé, qui désigne l'acte de ces sacrifices. Les citoyens des villes où les mosquées ont le droit de faire l'oraison paschale, sont même obligés de procéder à ces sacrifices immédiatement après l'office solennel du jour. Ces sacrifices doivent être faits pendant le jour. Ceux de la nuit , quoique valides, ne laissent pas d'être blâmables aux jeux de la religion. Après l'expiration du troisième jour, il n'est plus permis d'immoler des victimes, et les animaux qui y seroient destinés , doivent être distribués vi-vans aux pauvres. Si l'homme aisé ne s'en est pas pourvu , il n'est pas dispensé pour cela de leur en donner la valeur, sur-tout s'il a eu l'intention de se conformer au précepte de la loi. Mais l'homme indigent n'y seroit obligé qu'autant qu'il auroit déjà fait l'acquisition de la bête, car alors il ne peut se refuser à la donner aux pauvres. Pour être légalement propres à ce sacrifice religieux, les moutons doivent avoir un an complet, les bœufs deux, et les chameaux cinq. Le défaut de cornes, les vertiges, ët la gale dans les moutons qui seroient d'ailleurs gras et sains, ne sont pas des vices' propres à infirmer la validité du sacrifice. Les moutons coupés y servent également; mais s'ils sont borgnes , aveugles, extrêmement maigres, ou boiteux au point de ne pouvoir gagner le lieu destiné à leur immolation, ils ne peuvent servir au sacrifice. Il en est de même s'ils ont les pieds de devant ou ceux de derrière mutilés, ou s'il leur manque la majeure partie ou d'une oreille, ou d'une cuisse, ou de la queue. Si, au milieu de l'acte même, l'animal vient à s'estropier ou à se blesser, par ses mouvemens et ses efforts , ce vice accidentel ne sauroit invalider le sacrifice. Le maître doit immoler la victime 4'3o CODE RELIGIEUX, de sa propre main , pour en rendre lacté encore plus méritoire. Et si, par impuissance, ou par quelque autre motif légitime, il est obligé de se servir d'une main étrangère , il faut toujours qu'il j soit présent, et que celui auquel il a recours , soit aussi Musulman. C. On pourroit absolument employer la main d'un Kitaby ((ahrétien ou Juif), mais ce seroit toujours un acte répréhensible. Celui qui immole une victime , doit en manger une partie, et distribuer le reste à son gré , soit à des personnes indigentes, soit à des personnes aisées ; mais cette portion ne doit jamais être au dessous du tiers. S'il est père de famille , il peut alors se dispenser d'en rien donner. La peau de la victime doit être pour les pauvres , ou ne servir qu'à l'usage du maître. S'il en dispose autrement , CODE RELIGIEUX. q&* ou s'il la donne en échange, il ne peut prendre en retour que des objets qui ont de la résistance et de la solidité , comme bêches , couteaux , etc. S'il en échange la-peau, la viande ou la graisse contre des comestibles ou des effets fragiles (i) , sujets à dépérir, il est pour lors obligé de donner ces mêmes effets en aumône. Le sacrifice du mouton ou de la bête d'autrui , immolée à son insu , et celui que feroient deux hommes qui, par méprise , immoleroient le mouton Tun de l'autre, sont des actes censés opérés par voie de procuration , et dès-lors bons et valides. Enfin le sacrifice que le Musulman feroit d'un mouton qu'il auroit ouvertement enlevé ,: est également valide : mais il n'en est pas de même, s'il immole la ( ) Muistehhlek'al-âinn. bête qui lui auroit été confiée à titre de dépôt. C. C'est que dans lé premier cas, la propriété du mouton est censée acquise au moment même de l'enlèvement qu'en fait le ravisseur, moyennant l'indemnité à laquelle il est tenu ; tandis que dans le second cas , le vol est censé opéré par l'acte même de l'immolation. Observations. Les offrandes de l'aumône et du sacrifice paschals ont également pour objet le culte de Dieu , et la charité envers le prochain. Toutes les classes de la nation observent religieusement l'un et l'autre précepte. A l'époque des deux Beyrams > on distribue aux pauvres l'aumône paschale ; et dans celui des sacrifices, on ne manque jamais d'immoler une victime. Les Grands, les personnes aisées en immolent plusieurs : ce sont ordinairement des agneaux, des moutons ou des boucs, que l'on décore de différentes manières , comme on l'a vu plus haut dans la planche 21. Cette Cette cérémonie se fait ordinairement après l'office solennel du jour. Chaque père de la-mille , en revenant de la mosquée , immole sa victime au milieu de la cour de sa maison; ensuite il en coupe un morceau, le fait rôtir, en goûte avec sa famille , et distribue le reste aux pauvres. Quelquefois les Grands et les personnes d'un certain âge , se font remplacer par leurs enfans ou les intendans de leur maison. Le Sultan remplit ce devoir en personne ,' toujours dans l'intérieur de son Sérail ,et avec le plus pompeux appareil. Dès son retour de la mosquée il se couvre d'un tablier de soie, prend en main le glaive du sacrifice , et immole ainsi lui-même un ou deux agneaux, au milieu des vœux et des prières de tons les grands officiers du palais. 11 goûte également d'une partie de ces victimes, et lait donner le reste aux pauvres avec de grandes aumônt s. Indépendamment de ces sacrifices prescrits par la loi pour la fête Courbann-Beyram^ la nation suit encore aujourd'hui l'ancien usage des Arabcs,d'immoler des victimes à différentes Tome II. Ee époques et dans divers événemens de la vie , tels que la naissai cj d'un enfant, la cérémonie de sa circoncision, le rétablissement d'un malade, la mort même d'un parent, le succès d'un voyage ou d'une entreprise intéressante, le premier et le dernier jour de la construction d'un hôtel, d'un édifice, d'une mosquée, d'un bâtiment quelconque : toutes les personnes opulentes sont attentives à satisfaire à cette pratique, qui est d'ailleurs consacrée par l'exemple du Prophète. A la naissance $ Ibrahim son fils, il s'empressa d'immoler un certain nombre de victimes; il fit même .présent d'un esclave à la sage-femme , et distribua aux pauvres de grandes aumônes, et de l'or pur, du poids des cheveux de l'enfant, qui avoient été coupés, dit AdmcdFjendyy et cachés soigneusement dans la terre. Cet acte superstitieux , respecté sans doute de son temps, n'est plus en usage chez les Musulmans de nos jours. Le gouvernement lui-même observe aussi cet acte important de l'islamisme dans les événemens publics , tels qu'une victoire remportée sur les ennemis , le commencement CODE RELIGIEUX. 435 d'un siège, la prise d'une ville, la cessation d'une calamité, etc. Anciennement , lorsque les Sultans marchoient en personne à la guerre, on faisoit également des sacrifices , et le jour de leur départ, et celui de leur retour à la capitale. Dans ces occasions , les habitans de toutes les grandes villes se faisoient aussi un devoir d'immoler des victimes au milieu des rues , des chemins publies,, et pour ainsi dire, aux pieds du Monarque. En général tous ces sacrifices sont accompagnés de libéralités immenses. L'Arabie païenne , qui n'offroit jamais à ses idoles que des holocaustes de chameaux , vit toujours avec horreur l'usage barbare des Egyptiens, qui immoloient à leurs dieux des victimes humaines. L'islamisme abolit cet usage lors de la conquête de cette contrée par le célèbre Amr ibrf ni-A s s. Ce Général, in formé que les Egyptiens jetoient tous les ans dans le Nil une jeune esclave, et l'ofT'roient en sacrifice aux dieux, pour les rendre propices au débordement du fleuve, ordonna d'abord de différer cet te cérémonie; mais bientôt, Ee ij inquiet des clameurs de l'Egypte entière, il instruisit Omer , et lui demanda ses ordres. Le Khaliphe lui répondit que l'Islamisme de-voit détruire tout ce qui étoit contraire aux maximes du Cour'ann , et lui ordonna en même temps de faire jeter clans le Nil, au lieu d'une victime humaine, une feuille volante, avec ces paroles singulières : Au nom de Dieu très-clément et très-miséricordieux , de moi Omer Jils de Khatab, serviteur de Dieu , à toi , Nil d'Egypte l si le cours de tes eaux est un effet de ta propre nature , mes ordres sont inutiles , je n'ai aucune injluence sur toi } mais s'il est l effet de la volonté divine , que ton mouvement, que ton action s'exécute au nom du Très-Haut ! Le Général Amr, ajoute l'historien Mahométan , s'acquitta avec le plus grand appareil de l'ordre du Khaliphe ; et le débordement du Nil, plus abondant encore cette année que les précédentes , contribua à faire revenir les Egyptiens d'une coutume aussi barbare et aussi révoltante. CODE RELIGIEUX. A^>7 CHAPITRE IV. Des Donations ou Fondations pieuses 9 Wakfs. Les TVakfs ou fondations pieuses, sont des biens dont le fidèle donateur où fondateur , Wakif^mt censé s'être volontairement dépouillé pour en céder la propriété absolue à Dieu, et l'usufruit ou la jouissance aux hommes (i). Ainsi lorsque le donateur a une fois disposé de ces biens, ni lui , ni sa postérité ne conservent plus aucun droit sur eux ; et la donation devient à jamais irrévocable. V. Cette loi est fondée sur l'opinion des Itnamcïans : elle a prévalu sur celle de l'Imam A^am , qui ne croit pas qu'on puisse regarder généralement ces dispositions comme absolues, à moins que les fondateurs (i) Wakfhabs'ul-àir. âla mulk'ullah'u âla wedjhiyeoudè nef'âh'u il 'el-ibad. Eeiij 438 CODE RELIGIEUX. de ces biens n'aient rendu eux-mêmes leurs donations perpétuelles et à jamais inaliénables, par un acte formel et juridique. La volonté seule et l'acte d'abandon du propriétaire suffisent pour constituer une donation. Celle même que Ton fait de son droit ou de sa portion dans une propriété commune , est également valide et légale. C. Les W"akfs sont des fondations consacrées à la subsistance des pauvres ou à l'utilité publique. Ce sont des hôtelleries, des cimetières, des fontaines, des puits, des terres labourables , enfin des biens meubles et immeubles, de toute espèce et de tout genre ; car, d'après l'opinion de l'Imam Zujer, les JVahfs peuvent également être faits en deniers ou en espèces. Le donateur est absolument le maître de disposer à son gré de l'usufruit de ses biens ; et ses dispositions une fois constatées par un acte juridique et CODE RELIGIEUX. 439 solennel, Wikfiyé , ne peuvent plus être révoquées. Toute donation exige rétablissement d'un administrateur Mutéwelly ; et c'est entre ses mains que le donateur doit remettre les objets ou les actes de sa libéralité. V. L'Imam Ebu-Youssouph ne croit pas que la nomination d'un administrateur soit nécessaire. Il peut encore se constituer lui-même le Mutéwelly de sa fondation : mais en cas de négligence ou d'infidélité de sa part, le Cady, le magistrat du lieu , est en droit de le destituer pour toujours , et de nommer à sa place un autre administrateur. On peut, au besoin , échanger un immeuble contre un autre, pourvu qu'il soit de la même valeur et du même revenu ; et dès-lors le Wakf de la fondation primitive rentre dans le Ee iv 440 CODE RELIGIEUX, commerce, et reprend sa qualité de bien libre ou de propriété absolue, Mulk, Les frais de réparations d'un Wakf consistant en biens immeubles , doivent toujours être pris sur les revenus de ces fonds , qui doivent y être employés par préférence à tout , même aux pauvres auxquels ils seroient destinés. Celui qui a la jouissance ou l'usufruit d'un JVakf, est également tenu aux réparations nécessaires ; s'il ne les fait pas, soit par mauvaise volonté, soit par défaut de moyens, le magistrat est en droit de donner l'immeuble à bail. Mais après avoir assuré par cette voie l'état des réparations, il est obligé de remettre l'immeuble entre les mains de l'usufruitier, • On doit toujours y employer les vieux matériaux; s'ils sont hors d'état CODE RELIGIEUX. 441 de servir, il faut les vendre, et en affecter le produit aux réparations de l'édifiée , jamais au profit de l'usufruitier ; parce qu'on ne doit pas perdre de vue la différence qu'il y a entre l'usufruit de la donation , qui peut appartenir aux hommes, et la donation elle-même, le Wakf, qui appartient à Dieu. Cependant si un Khann (hôtellerie) est presque abandonné , il est permis alors d'employer ses revenus à l'entretien d'un autre plus fréquenté, et cela pour remplir l'objet de sa fondation , qui est l'utilité publique. Toute donation pieuse , faite par un malade , n'est valide et exécutoire que pour le tiers. C. C'est que toute disposition faite par un malade, est envisagée comme un testament; et que tout testament fait par un malade, ne peut jamais avoir d'action et d'effet que pour le tiers de l'objet dont il dispose. A moins d'une clause expresse dans les dispositions du donateur, le Mutéwelly ne doit jamais donner le Wakf à bail perpétuel, mais pour un temps limité ; les terres labourables pour trois ans , et tout autre bien meuble ou immeuble pour un an. Tout bail portant sur un plus long terme, ne seroit ni légal, ni valide. En général, les baux de tous les biens consacrés par la dévotion et la charité des fidèles , doivent être faits d'après une juste estimation ; et alors ils ne peuvent être résiliés pour quelque cause que ce soit, avant l'expiration du terme convenu. La disposition de ces objets doit toujours être pleine et entière entre les mains de l'administrateur, sans qu'il soit tenu de prendre ou de suivre lavis de personne, pas même celui de l'usufruitier du Wakf; enfin aucun Wakf, CODE. RELIGIEUX. 443 soit meuble , soit immeuble , ne peut jamais être hypothéqué ni mis en gage : dans tous les cas l'acte en seroit illégal ; et par conséquent nui. CHAPITRE V. Des Temples, Messdjids. L.a construction d'un Messdjid n'emporte avec soi ni le caractère d'un Wakf, ni l'obligation de le consacrer à perpétuité au culte public , à moins i°. que le fondateur ne l'ait fait élever hors de l'enclos de sa maison , sur un terrain séparé par la grande route ; 2°. qu'il n'ait permis au public d'y faire la prière Nama^; et 3°. que cette prière n'ait été réellement faite en corps d'assemblée , sur-tout si c'est le Jyamâ^ solennel des vendredis. Dans ces ess seuls on peut regarder le Messdjid 444 CODE RELIGIEUX, comme un monument public élevé â la gloire de l'Eternel, et dont le fondateur ne peut plus changer la destination. Cependant il est le maître de s'y réserver un lieu souterrain, d'élever même au dessus du temple une maison ou un édifice quelconque , et d'en disposer à son gré. Mais si le Messdjid est bâti dans l'enceinte de la maison , il ne peut jamais être regardé comme un Wakf, quand même lé fondateur auroit permis au public d'y faire la prière Nama^. Toujours maître absolu de cet édifice , il peut le céder , le vendre , le transmettre à ses héritiers , sans avoir à craindre aucune opposition légale. Si un Messdjid dévoué aux fidèles est trop petit, on peut l'agrandir aux dépens du chemin public, comme il est permis , en cas de nécessité , d'élargir CODE RELIGIEUX. 445 le chemin aux dépens même du temple. Tout Messdjid peut être décoré et embelli même avec de la dorure. C. Les Khaliphes Omer et Osman ont été les premiers à en donner l'exemple. L'embellissement des temples ne doit cependant pas se faire aux dépens de leurs JVdkfs, à moins qu'une partie de ces rentes fondées ne soit expressément affectée à leur décoration. Au défaut de ces moyens, si l'administrateur Mutéwelly y emploie arbitrairement les revenus des Walijs qui lui sont confiés , c'est sur lui que retombe alors tout le poids des dépenses qu'il auroit faites en décorations. Les Messdjids publics étant des lieux consacrés à l'adoration de l'Etre suprême , doivent par cette raison être toujours ouverts. C. On ne doit en refuser l'entrée à personne , ni en fermer les portes pendant le jour, à moins que ce ne soit par une crainte bien fondée d'exposer au vol les ornemens du temple. Si un non-Mahométan, un sujet tributaire, Zimmy, entre dans un Messdjid, la chose en soi est indifférente pour la religion. C. Le Prophète nous en a donné l'exemple, en y admettant le député de Sakif, qu'il fit même placer sous une tente dressée au milieu du Messdjid. V. L'Imam Schafiy ne le permet pas : il s'appuie sur un passage de la loi où il est dit que Tout infidèle tst la souillure même (i). Enfin les Messdjids, les temples du Seigneur doivent être respectés. Personne ne doit jamais s'y permettre rien contre la piété et la religion. C. On doit respecter jusqu'au toit de ces saints édifices , sur lesquels il est de la décence de s'interdire même les actes les plus licites et les plus innocens. (i) hincm 'd muschnkïouni ncdjcss. CODE RELIGIEUX. Observations. Ces deux Chapitres nous conduisent à l'exposition de tout ce qui concerne les Wakfs et les temples du Mahométisme. Ainsi nous parlerons i°. de ces édifices; des divers bâtimens qui les entourent, et qui ont pour objet l'instruction de la jeunesse et le bien général de l'humanité ; et 3°. des Wahf's , biens consacrés au service des mosquées et a d'autres fondations d'utilité publique. §• i" Des Temples. Anciennement tous les temples Musulmans portoient la dénomination générale de Messdjid, qui signifie, édifice voué à l'adoration. C'est sans doute de ce mot que dérivent ceux de Meschita, et de Mosquée dans les langues Européennes. On a depuis appelé les plus considérables de ces temples , Djéami'jr-Messdjid} ou simplement Djéamj , lieu de congrégation ou d'assemblée. Enfin on a spécifié ceux qui sont de la fondation des Monarques , des princes et princesses de leur sang, sous le nom de Djëwami-y-Sêlatinn , qui répond à celui de basiliques ou de mosquées Impériales : Djéwamy est le pluriel de Djéamy , et Sélalinn celui de Sultan. Ces temples , distingués déjà entre eux par leur nom, le sont encore par leur structure, leur étendue et les différentes, prérogatives qui y sont attachées , dans l'ordre religieux, civil , et politique : ils forment donc trois classes distinctes et séparées ; les mosquées Impériales, les mosquées ordinaires, et les simples Messdjids. L Les mosquées Impériales ne se trouvent que dans les grandes villes de la monarchie , telles que Brousse, Andrinople , le Caire, Damas , Constantinople , etc. Cette capitale en compte aujourd'hui quatorze, qui, par leur prééminence respective , sont placées dans l'ordre suivant : i°. Sainte Sophie , à qui les Mahométans ont conservé le nom grec d'Aïa-Sq/ia. On sait que Mohammed II convertit cette superbe église en mosquée , le jour même qu'il arbora arbora ses drapeaux sur les murs de l'ancienne capitale de l'Empire d'Orient. Elle fait depuis cette époque la mosquée cathédrale ou la première chaire de l'Empire Othoman. 2°. Sultan-Ahmed, du nom & Ahmed I, son fondateur. On l'appelle encore Alty-Mi-narély y ou mosquée à six minarets , à cause des six flèches qui la décorent extérieurement. 3°. Sultan - Suleyman ou Suleymaniyé y qui a pour fondateur Suleyman I. /f.Sultan-Bayézidy élevée par BayézidII, 5°. Sultan-Mohammed 9 de la fondation de Mohamm ed II. 6°. Nour-Osmany y qui veut dire, la lumière Othomane : elle fut commencée par Mahmoud I, et achevée par Osman III. 70. Sultan-Selim : elle est de la fondation de Selim Iy quoiqu'elle n'ait été achevée que sous Suleyman I y son fils et son successeur," 8°. Eyub y élevée par Mohammed II. 90. Lalély y qui est aussi le nom du faubourg où Moustapha III la fit construire. io°. Validé-Sultane y appelée encore Yéni-Djéamy y mosquée neuve : elle est de la Tome II. Ff fondation de la Validé Terldiann-Sultaney mère de Mohammed IV. n°. Schahzadé-Djéamissy , ou mosquée du prince royal. Suleyman I la fit construire en l'honneur du prince Mohammed son fils. 12°. Validé-Djéamissy > de la fondation de Rabiâ-Gidnousch-Sultane y mère de Mous-tapha II et & Ahmed III. i3°. Aiazma-Djéamissy, qui a pour fondateur Mous tapha III. 140. Islavroz-Djéamissy y du nom du faubourg- où elle a été élévçe par le Sultan régnant, Abd'ul'IIamidI. On l'appelle encore Zéilj, nom commun à toute mosquée Impériale qui se trouve la dernière en rang. Ces édifices sont de la plus grande magnificence : comme-jls s'élèvent presque tous au milieu d'un vaste parvis, il se déploient dans toute leur étendue aux yeux du spectateur. Assis d'ailleurs sur les parties les plus élevées de Constantinople y ils ajoutent beaucoup à ce que cette ville immense offre d'imposant par sa seule situation. Les dômes et les toits en sont couverts de plomb, comme le Sérail CODE RELIGIEUX. 4?1 et tous les édifices publics. Nous ne répéterons pas ici ce que divers écrivains ont déjà exposé sur l'architecture de ces basiliques j le lecteur peut recourir à leurs ouvrages. Toutes ces mosquées ont également droit de célébrer l'office solennel des vendredis et des deux fêtes de Beyram ; et les ministres attachés à leur service, sont distingués par certaines prérogatives. Les Sultans y ont leur tribune, et tour-à-tour ils se rendent les vendredis à chacune de ces mosquées : mais en lu ver ils donnent souvent la préférence à Sainte Sophie, comme étant plus près du Sérail. On a vu plus haut que dans les deux fêtes de Beyram et dans la solennité du Mew-loud, ils ne vont jamais qu'à la mosquée Su/fan-Ahmed , à cause de la commodité qu'offre à leur cortège la place de l'hippodrome qui règne devant cette mosquée, l'une des plus grandes et des plus magnifiques de la'tapi-taie* Voyez les planches .28, 29 et 3o. II. Les mosquées ordinaires sont des temples construits par la pure libéralité des Vczirs, des Paschas des Bey s , des seigneurs de la cour, ou de riches particuliers. Quel-ques-uns même sont de la fondation des Validé-Sultanes. Les.plus considérables sont les mosquées de Khasséhy-Vjéamy 3 d'Ifà* Minarély , et de TschlnUy-Djéamy , élevées , la première par la Validé Khourrem-Sultane , mère de Selim I j la seconde parla Validé Nour Banou Sultane , mère de Mou-radIII ; et la troisième par la Validé Mahh-Péiher- Keuschem-Sultane p mère de Mou-rad 1 VetcïIbrahim I. Ces temples, quoique fondés par des reines-mères, ne sont pas dans* la classe des mosquées Impériales, parce qu'ils n'ont pas été élevés pendant le règne de leurs fils. On compte plus de deux cents de ces mosquées du second ordre dans Constantinople.*'La plus ancienne est celle d'Areb-Djéamissy au faubourg de Ghalata. Elle fut construite par le prince Messlémè, frère du Khaliphe Su-leymanl, lorsqu'il assiégea Constantinople, l'an 98 de l'Hégire (716). On y conserve encore aujourd'hui un vase d ebène , qui passe pour être celui dont se serYoit ce général Mahométan dans ses expéditions militaires. Ce vase est en quelque sorte consacré par la superstition : les ministres du temple font accroire au vulgaire que l'eau qu'on y boit a le goût du lait, et la vertu de procurer aux femmes enceintes une heureuse délivrance. La plupart de ces temples ont aussi le droit de célébrer l'office public des vendredis et des -deux Bejrams ; et deux ou trois fois dans l'année, les Sultans vont faire le Namaz solennel de la semaine dans quelques-unes de ces mosquées. Celles qui ne jouissent pas de la même prérogative , peuvent l'acquérir par l'établissement d'un Imam-Kkatib^par l'érection d'une chaire pour le prône Khouthbê, et par la construction d'une tribune pour Sa Hautesse. Il est même permis à tout Mahométan de pourvoir à ces fondations, et d'assurer au ministre Khatib un entretien perpétuel. Par-là, et au moyen des diplômes du Souverain, la mosquée rentre dans la classe des premières, ce qui arrive a:-sez souvent à Constantinople et dans les autres villes de la monarchie. III. Les Messdjids sont les temples les moins considérables de l'Empire. On peut les regarder comme des chapelles publiques : il n'en existe point d'autres dans les bourgs, les villages et les campagnes; les villes principales en ont même plusieurs. On en compte environ trois cents dans les faubourgs de Constantinople. On n'y célèbre jamais l'office public des vendredis et des deux fêtes de Beyram. Ces temples peuvent cependant acquérir à perpétuité , comme les simples mosquées , un Khatib et sa chaire. Des ames pieuses se chargent quelquefois de cet établissement, et alors le Messdjid qui a eu cet avantage, se convertit en Dje'amjr j et passe dans le rang des mosquées ordinaires. On ne doit pas confondre ici le temple de la Mecque ni celui de Médine , consacrés l'un et l'autre sous le nom de Messdjid-SchériJ, temple saint, temple sacré: leur construction est absolument différente de celle des autres mosquées, et leurs prérogatives sont supérieures à celles de tous les temples Musulmans, comme on le verra dans l'article du Pèlerinage, Tels sont les caractères principaux qui distinguent entre eux tous les édifices sacré de l'Islamisme. On peut J ajouter encore le nombre des minarets qui les décorent. Les Messdjids n'en ont jamais qu'un , tandisquelesmosquées Impérial es et les pri ncipales de celles du second ordre, ont deux, quatre, et quelques-unes même jusqu'à six de ces flèches, dont la plupart se terminent par un croissant de cuivre ou de bronze doré. Tout ce que prescrit la loi , faite dans les premiers siècles du Mahométisme, relativement aux droits des fondateurs sur les Messdjids qui seroient dans l'enceinte de leur maison , n'est pas applicable à l'état actuel de ces édifices. Ils sont tous élevés sur des terrain? indépendant , et consacrés à perpétuité au culte public. Il n'existe plus aujourd'hui aucun Messdjid, pas même de chapelle privée, ni dans les hôtels des Grands, ni dans les maisons des particuliers. Lorsqu'on fait la prière chez soi , sur-tout en commun, on s'en acquitte , comme nous l'avons déjà dit,dans des sallonsou des antichambres, qui ne sont distinguées du reste de l'habitation que par une niche creusée, ou simplement dessinée sur le mur qui regarde le Keabéde la Mecque, On doit cependant excepter de cette loi générale le palais du Grand-Seigneur, où il y a sixgrandes chapelles à l'usage particulier de Sa Hautesse et des officiers de sa maison : les principales sont X Aglia-djéamissy , le Sojd-djéamissy et le BostandjUer-djéamissy , qui est de la fondation de Moustapha III. L'Islamisme ne prescrit aucune cérémonie pour laconsécration de ses temples. Lepremier Namaz que l'on y fait en corps d'assemblée suffit pour le vouer au culte de l'Eternel ; et ordinairement on observe que ce soit le Namaz solennel des vendredis. Si c'est une mosquée Impériale, le Monarque s'y rend alors avec toute sa cour et avec presque tout le corps des Oulémas. Il est aussi d'un usage assez général que tout Sultan qui ordonne la construction d'une mosquée, y pose de sa main la première pierre : cette cérémonie est toujours accompagnée de sacrifices, d'aumônes, et même de libéralités envers tous les Oulémas qui se joignent à son cortège. Aucun temple d'ailleurs n'est jamais sous l'invocation des Saints. Ils portent tous le nom de leur fondateur , ou bien celui du faubourg ou du quartier dans lequel ils sont élevés. Rien n'égale le respect des Musulmans pour ces édifices sacrés. Ce sentiment les engage à ne pas y faire légèrement des réparations. Ils ne les ordonnent que lorsqu'elles sont absolument nécessaires. Il faut qu'un temple menace évidemment ruine pour qu'on ait la liberté de l'abattre et de le réédifier. Lorsqu'il s'agit de l'agrandir , on ne le permet jamais qu'autant qu'il est le seul du village ou du faubourg, et trop étroit pour recevoir dans son enceinte tous les habitans du lieu : supposé que le terrain voisin fut nécessaire à l'agrandissement de ce temple, alors, et dans ce cas seulement, la loi autorise la force et la contrainte contre le propriétaire de l'immeuble qui s'obstineroit à en refuser la vente à un prix raisonnable. On trouve ces détails expli-catifs de la loi dans la collection des Fethwas* du Mouphty Behdjc-Abd'uîlah-FJcndy. En général tous ces temples sont ouverts pendant le jour. Quoique la loi n'en défende pas l'entrée aux non-Mahométans, personne néanmoins n'ose y pénétrer que sous l'escorte des Càims y qui en ont la garde, et qui exigent des étrennes proportionnées à la condition de ceux qui s'y présentent. Les régnicoles tributaires ne témoignent presque jamais cette curiosité; elle est émoussée chez eux par la crainte ou par la prudence;sentimens que dicte impérieusement l'état de sujétion perpétuelle et absolue à laquelle ils sont réduits devant la nation dominante. Les Européens, comme étrangers , y pénètrent plus aisément, mais jamais pendant l'office. Ils sont même obligés, ainsi que les Musulmans, de laisser leurs souliers à la porte, ou de prendre de doubles chaussures, pour ne pas souiller les tapis de la mosquée. Sainte Sophie , Suleymanvyé et Eyub sont de tous les temples ceux pour lesquels on éprouve le plus de difficulté , sur-tout si le Caïm-Baschy j premier custode, suit le rit de Ylman Schafiy , qui regarde la présence du non-Mahométan dans la mosquée ! tomme une profanation : les ministres étrangers sollicitent ordinairement un Fermann de la Porte , au moyen duquel ils voient et visitent avec plus de liberté les mosquées principales. Nous avons décrit plus haut tout ce qui concerne l'intérieur de ces temples : quant aux ministres qui les desservent , nous en donnerons le tableau à la suite des Oulémas, dans le discours général qui termine ce premier Code. §• I î* Des Edifices qui entourent les mosquées. Les temples que l'Islamisme consacre au culte public , et principalement les mosquées Impériales , sont ordinairement environnés de divers édifices dont la fondation a pour objet l'instruction fie la jeunesse, le soulagement des pauvres, et en général l'utilité publique. Ce sont des Imareths ou hôtelleries; des hôpitaux pour les malades ; des hôpitaux pour les fous ; des écoles; des collèges; des bibliothèques , et des chapelles sépulcrales où reposent les cendres des Empereurs, des Validé-Sultanes et de tous les princes et princesses du sang. ï°. Des Imare dis. Cesontdeshôtellerîesoù les enfansdes écoles et lesétudians des collèges vont prendre leur nourriture. On y distribue aussi desvivresàun certain nombre de malheureux. On leur donne -du pain, et deux plats chauds en viande de mouton et en légumes. On joint encore à ces alimens une libéralité de trois, quatre , cinq et même jusqu'à dix aspres (i) par tête chaque jour. Presque tous les Khaliphes et autres princes Mahométans ont consacré des sommes considérables à la fondation comme à l'entretien de ces lmaretli\àans les principales villes de leur monarchie. Le premier de l'Empire»Othoman fut érigé à Nicée , sous le règne ftOrfdian I, qui consacra cet édifice au soulagement de l'humanité, (i) Cent vingt aspres font une piastre , qui équivaut à quarante-cinq sous. avec les plus grandes cérémonies. Ce jour-là il fit de sa main la distribution des mets aux pauvres, et alluma le premier les lampes et Tes bougies de son Imareth. Mourad II} fondateur de la fameuse mosquée Mouradiyé à Andrinople , en fit de même à la suite d'un festin qu'i 1 donna à tous les Oulémas de sa cour dans V Imareth même. Les Sultans et les princes de cette maison ont donné dans presque tous les temps des marques édifiantes de leur humanité et de leur charité envers les classes les plus indigentes de la nation. Enfin les Imareths seuls de Constajitinople nourrissent tous les jours plus de trente mille ames. s,0. Des Hôpitaux pour les malades. On les appelle Taby-khané. La plupart des mosquées Impériales en ont ; mais les plus considérables sont ceux de Sultan-Bayézid> Sul tan-Selim et Sultan-Suleyman. A 1 égard des autres temples, Khasséky-D/éamy , Tschi-nily- Djéamy f Mihhrmah - Sultane - Djéa* missy,etKilid/'h'Aly' Pasch a- D/'éamissy^on t les seuls où se voient de pareils établissemens. Les hôpitauxordinairesreçoivent environ cent cinquante malades; les autres jusqu'à trois cents : dansquelques-uns on admet indistinctement les Mahométans et les Chrétiens. On ne doit cependant pas s'imaginer que ces hospices soient entretenus sur le pied de ceux des grandes villes de l'Europe, bi leur établissement l'ait l'éloge du cœur et des sentimens de la nation entière , le régime qui s'y observe ne fait guère honneur à sa civilisation bien éloignée encore de celle des Européens. Ces hôpitaux ne sont que des asyles très-imparfaits pour les personnes qui gémissent sous le poids de la misère et des infirmités. De larges sojas , qui garnissent le pourtour des chambres et des salles , leur servent de lits. La nourriture est la partie la mieux soignée. De nombreux domestiques servent ces malheureux. Mais on y néglige les secours de la médecine. C'est là que s'exercent plus qu'ailleurs les funestes préjugés qui -résultent du dogme de la prédestination. L'indolence du gouvernement à surveiller la régie des administrateurs, ne contribue pas peu aux abus qui régnent dans ces hôpitaux, sur-tout dans ceux où des Mutéwellys peu scrupuleux sacrifient à la cupidité les devoirs les plus sacrés de leur religion et de leur état. Dans les hospices où l'on reçoit aussi les femmes, elles sont absolument séparées des hommes, et toujours soignées par des personnes de leur sexe. 3°. Des Hôpitaux pour les fous. Ces bâti mens portent le nom de Dadusch-schifa ou Bimar-hhané , vulgairement dit Timar-hhané. A Constantinople , ceux des hommes sont à côté des mosquées Sultan-Mohammed , Sultan-Sulejman et Sultan-Ahmed. Les hôpitaux des mosquées Tschinilj-Djéamj et Khasséhj Djéamj ne reçoivent que des femmes. Le dernier de ces hospices .étoit, dans l'origine de sa fondation, pour l'un et l'autre sexe. Mais sous Ahmed III; le Grand-Féûr Ibrahim Pascha l'affecta à l'usage des femmes, et fit transférer les hommes dans les autres hôpitaux. L'humanité de ce ministre augmenta même considérablement les revenus de cet hospice , auquel il voua à perpétuité une partie de sa fortune. Tous ces hôpitaux sont réservés aux Mahométans : on n'y reçoit même personne sans un Fermann de la Porte , toujours émané d'après un acte juridique, Ilam, qui constate formellement l'état de démence du malheureux pour lequel on réclame les secours de ces tristes asyles. 40. Des Ecoles publiques y Mekteb. Elles sont ouvertes à tous les enfans des familles indigentes. On leur apprend à lire et à écrire ; on leur enseigne aussi la religion et les premiers élémens de la langue Turque. Chaque école a un certain nombre d'étu-dians, qui sont nourris et logés aux dépens de la mosquée. Les recteurs, Kodjea> n'exigent jamais rien des païens, dont les marques de reconnoissance sont toujours volontaires. 5°. Des Collèges, Médressés. Dès l'origine du Musulmanisme, les fondateurs des mosquées se faisoient encore un devoir CODE RELIGIEUX. 465 devoir d'élever h côté de leurs temples, ur collège, uniquement destiné à l'étude du droit et de la théologie. Aussi n'y recevoiton que les personnes vouées à la carrière des Oulémas > qui i partagés en deux classes , formoient , comme ils forment encore aujourd'hui , la magistrature et l'état sacerdotal. Les progrès des Arabes dans les lettres et les beaux-arts ayant suivi ceux de leurs armes etdeleUr domination dans les trois parties de l'ancien continent, on vit bientôt ces collèges cultiver avec le plus grand succès toutes les sciences qui ont tant contribué à la gloire des Grecs et des Romains. On y étudioit la géographie , l'histoire , la médecine, la physique , la métaphysique, l'astronomie, les mathématiques , etc. On voit dans les annales de l'Orient l'énumération des superbes Médressés que les Khaliphes , les anti-Khaliphes et les autres Potentats Mahométans élevèrent à la Mecque j hMédine^ h Kiujfé, h Baglidadj à, Damas y en Perse en Afrique , en Espagne , etc. La décadence de la monarchie Khaliphale, et celle des dynasties, qui , s'élevant sur ses Tome II. G g 466 CODE RELIGIEUX, ^ruines , se renversèrent successivement les unes sur les autres , influèrent sur le sort des lettres. Elles languirent par- tout , et les Médressés finirent par être restreints de nouveau à L'étude du droit et de la théologie , seuls objets de leur institution primitive. Tel étoit le tableau qu'offroient tous les collèges Mahométans en Asie et en Afrique , vers la fin du treizième siècle, lorsqu Osman I jeta à Seugutdjih les fî^ademens d'un nouvel Empire. Plus occupé cfe sa fortune et du succès de ses armes que du progrès des sciences dans sa monarchie naissante , il se contenta de maintenir les anciens Médressés sur le pied où ils étoient alors. OrhhanI son fils et son successeur, ayant,cn y3i ( i33o),élevé kNicée une mosquée Impériale , y érigea aussi un Médressé y qui pendant plus d'un siècle fut regardé comme le premier de tous les Médressés Odiomans. Il l'appela de son nom , Médressé-j-Orlihanijé, et en confia la direction au Schejddi Davoud Caïssary ^ sous le titre de Muderriss j à l'instar de tous les Médressés du Mahométisme. Mais ce collège, ! comme ceux qu'établirent dans la suite les Sultans de sa maison et les Grands de l'Etat, n'ont eu également pour objet que les con-noissances nécessaires aux ministres de la religion et de la loi. Il est vrai que Mourad I, Mourad II, Mohammed II, Selim I et Suleyman I, tous protecteurs zélés des sciences , voulurent faire renaître dans la nation les beaux jours de la littérature Arabe. Ils ne négligèrent rien pour donner ce même lustre aux principaux Médressés de leur empire , sur-tout à ceux qui étoient de leur fondation; mais leurs vues n'ont été que foiblement secondées par leurs successeurs, sur-tout depuis la fatale époque de l'emprisonnement des princes du sang. Ainsi les études de tous les Médressés de l\Empire ne roulent plus aujourd'hui -que sur deux objets , le droit et la théologie. Ces études se font cependant avec beaucoup d'ordre et de méthode : elles se partagent en dix classes, sous la dénomination commune fYllm, qui veut dire, science ; savoir, i°. la grammaire, Ihn-Saïf ; la syntaxe, Ilm-Nahhwj 3°. la logique , Ilm-Marintik j 4°. la morale, llm Adab ; 5°. la science des allégories , îlm^ Meâny , qui tient aussi lieu de rhétorique y 6°. la théologie, Ilm-Kelam ou Ilm-Illahhy j 70. la philosophie, Ilm-Hiïtmeth j 8°. la jurisprudence , Ilm-Fihihh} 90. le Coud ami et ses commentaires, Ilin-Tefsirj et io°. les lois orales du Prophète, Ilm-Hadiss (i)^ Ce sont là les sciences principales que l'on enseigne dans ces Médressés seuls collèges qui existent dans l'empire. Le nombre en est cependant considérable, puisque dans toutes les grandes villes, les mosquées principales ont chacune leur Médressé j plusieurs en ont (1) On étudie la syntaxe dans V Awamil-djcdid y Awamil-àtik , Cawaïd-irab , Imtihhanul-c^kiya , I^hhar , Kéafiyé , Missbahh , Mufassal, Molla-djeamy , Eljiyé , Moughnî-yrul-lebib , etc. La logique , dans Issjghoudjy , Hussam - keaty-, Meulihy^cd - dïnn , Molla - fenaty , Schemssïyè , Tchhçib , Tawaly , Tessawurath , Tassdi-cath, crc. La morale, dans iVclèdlyèr Husscïniyé, etc. La science des allégories, dans Ttlkhiss, Mouktassaf, Miftahh et Muttawwel. La théologie , dans Akaïd-Omer-Ntsséfy , Bahhrul-kîlam 3 Scharrh-âkaid, Khaï.t'y , deux, trois et même quatre, sur-tout les mos" quées Impériales : celle de Sultan-Suleyman en a cinq, dont l'un est spécialement consacré à l'étude de la médecine. La mosquée Sultan-Mohammed est la seule qui en ait huit. Ce sont tous des édifices bâtis en pierre,où Ton voit depuis douze jusqu'à trente chambres ou cellules que l'on appelle Heudjreth y et qui sont occupées par un ou plusieurs étudians, en raison de leur nombre dans chaque collège. Ces élèves portent le nom de Softa, mot corrompu de Souhhtè> qui signifie un être brûlé, et dans le sens figuré, un patient, un-sou rlrant. On les appelle encore Muld ou Muridj c'est-à-dire, disciples ; et Danischmend, DjcLrb, etc. La philosophie, dans Caçmir, Hlkmeth-ul-aïnn, Moukhtassar, Munntehha , etc. La jurisprudence , dans Muluka , Durer t Tewçihh, Telwihh , Mir-kath, Mirâthy etc. Les commentaires du Courann, dans Cù{i'y-Bcï{awy. Et les lois orales du prophète, dans Boukhary , qui , après le Cour'ann, est respecté comme le premier de fous les livres canoniques. Nous parlerons ailleurs de l'esprit, de la méthode et des principes de ce» livres classiques. G g iîj dont la véritable et seule acception est celle d'étudiant. Des recteurs , sous le titre de Khodjca y dirigent leurs études en la place des professeurs, Muderriss } qui , dérogeant aux règles primitives de leur institution , se dispensent le plus souvent de ce devoir, et se bornent à des actes d'apparition une ou deux fois le mois. Anciennement les Mouphty s se rendaient de temps à autre dans les Médressés de Sult.aii-Bayézidy et donnoient eux-mêmes des leçons publiques aux Soft as les plus avancés , se faisant un devoir, dit A hmed-Efendy y d'éclairer ces collèges du flambeau de leur science et de leur doctrine. Toutes les études relatives aux lois canoniques , ne se font que dans les ouvrages des J mams-IIanéfys y excepté à la Mecque # à Médine y au Caire y à Alep à Damas 3 et à Jérusalem. Comme dans ces contrées le nombre des partisans des trois autres rits, également réputés orthodoxes , a toujours été considérable, les anciens Khaliphes y avoient permis Tétude des opinions particulières de leurs fondateurs. Ils avoient établi dans quelques-uns des Médressés de ces villes principales, des professeurs , Muderriss, de ces quatre différentes sectes, qui même à la Mecque et au Caire avoient chacune un collège particulier. Les souverains Othomans respectèrent ces anciens établissemens. Suleyman I fit élever encore à la Mecque quatre nouveaux Médressés , chacun destiné séparément aux sectateurs de ces quatre rits. Nous avons déjà observé que la liberté de les suivre indifféremment , est restreinte à la seule partie du culte privé, c'est-à-dire, aux pratiques religieuses qui sont imposées individuellement à chaque Mahométan ; mais que sur tous les points relatifs au culte public et à la jurisprudence, on s'en tient dans toute l'étendue de l'Empire, aux opinions et aux lois des seuls Imams Ilanéfys. Dans quelques-uns de ces collèges, lesSoftas étudient en commun ; dans les autres, chacun fait ses études en son particulier. La vaste étendue de la langue Arabe, la complication de quelques-uns de ses principes, et la multiplicité des auteurs classiques rendent toutes ces études longues et pénibles. Gg iv On sait que le Turc , le Persan et l'Arabe sont les seules langues connues des Othomans. Le Turc primitif, peu riche et peu harmonieux, est l'idiome du peuple. Le Persan, dont la prononciation est très-douce , n'est cultivé que par ceux qui ont du goût pour la poésie. Rien n'approche de la richesse et de la majesté de la langue Arabe , malgré les sons âpres qui résultent des lettres gutturales âïn, ghain, hayhhyy etc., assez dures dans la bouche des Arabes , mais non dans celle des Otho-r mans. Cette langue demande une application suivie de plusieurs années, pour la posséder à fond. L'étude en est indispensable, parce que le Coudann et tous les anciens ouvrages sur la théologie, la philosophie et le droit , sont écrits en Arabe, dans l'idiome Couréysch, qui a peu d'affinité ayee cette multitude de dialectes qui régnent dans les différens cantons de l'Arabie, de l'Egypte, de la Syrie et de l'Afrique. Aussi oxigc-t-elle une étude particulière , sur - tout à Constantinople et dans les provinces circonvoisines , où l'Arabe est pour ainsi dire une langue morte $ et CODE RELIGIEUX. où communément on ne parle que le Turc. Cette dernière langue , très-cultivée sous les premiers Sultans Othomans , mais particulièrement sous Suleyman 1, emprunta les richesses du Persan et de l'Arabe ; de sorte que ce nouvel idiome , qu'il faut distinguer de l'ancien Turc, abandonné au commun de la nation, fait, pour ainsi dire, une quatrième langue consacrée à l'usage de la cour et de tous ceux qui ont une certaine éducation. C'est dans cet idîome , aussi noble qu'harmonieux, que s'écrivent tous les livres historiques, tous les ouvrages scientifiques , les édits du Souverain ^ les ordonnances des ministres , les décrets des tribunaux , enfin tout ce qui émane de la chancellerie Impériale, et des divers bureaux ou départemens des affaires publiques. Ces différentes langues ont les mêmes ea-> ractères, un même alphabet ; et quoique dans cet alphabet il n'y ait proprement que trois voyelles, une application de quatre mois est suffisante pour apprendre à lire et à écrire ; l'orthographe étant, infiniment plus simple 474 CODE RELIGIEUX, et plus conforme à la prononciation, que ne le sont pour un étranger le François , l'An-gtofs,etc. Les divers caractères que présente l'alphabet Arabe , commun au Turc et au Persan , ne diffèrent entre eux que par la terminaison des lettres , par leur enchaînement et leur ponctuation ; ce qui n'ajoute pas beaucoup aux premières leçons nécessaires, soit à l'indigène, soit à l'étranger. Ces caractères se diversifient en dix manières. Chacun a sa dénomination et son emploi particulier. Le plus simple, et par-là même le plus ordinaire, est le Nesskh ou Nesskhy : on s'en sert exclusivement pour les livres, manuscrits ou imprimés. Le Vhvany est employé pour les lettres missives , les affaires en général , plus particulièrement pour les ordonnances , Fermanns , et pour tout ce qui est du ressort des bureaux publics. Le Siyacalh est réservé au seul département des finances. Le Elk'â est pour les requêtes, les mémoires, les placets, etc. Le Tâ/ibetlç Diwany-Nesskhissy sont spécialement consacrés aux poèmes, aux chronogrammes,aux pièces fugitives , etc. Le Suluss, le Suluss-djérissy , et le Nesshh-djérlssy , ne sont que pour les devises , les épigraphes, les légendes; et le Djéry pour les brevets} les diplômes , comme pour les inscriptions des mosquées, des mausolées, ou autres édifices public^. On se sert quelquefois aussi du Kiujy pour les inscriptions des temples. Le Nesskhy et le Bhuany sont les caractères les plus usités dans toutes les classes de la nation. U n'y a que les commis , Keatibs , qui s'appliquent aux autres caractères. Presque tous les tracent si bien , qu'on les prendroit pour des lettres gravées. Voyez la planche C. Les élèves des Médressés ne s'occupent guère de cette diversité de lettres Arabes : mais ils ajoutent à leurs exercices, à la science du Courann et de ses commentaires, celle de la prononciation consacrée pour toutes les paroles de ce livre réputé céleste. Les accens, les inflexions, les pauses dans la simple lecture, et dans la psalmodie des prières publiques , exigent d'eux une étude particulière, Plusieurs s'appliquent encore à la poésie Persanne , dont les ouvrages les plus estimés sont le Pcnd-attar , le GidusstannyBosstann, Schewketh , Hafiz Sàib-œurfy y etc. Ce sont encore autant de livres classiques , qui ne contiennent que des maximes de morale et de philosophie. On trouve également dans les trois langues, des poèmes épiques, des vers erotiques , beaucoup d'autres ouvrages de poésie , et des recueils considérables de proverbes, d'adages, d'apophthegmes très-judicieux. Ceux qui ont du goût pour les sciences, s'adonnent aussi à la médecine , à la physique, à l'astronomie et aux mathématiques. Mais comme ces études sont, pour ainsi dire, accessoires , qu'elles n'ont d'autre objet que la satisfaction particulière des sujets qui s'y livrent, et que ces su j ets sont dévoués à une carrière qui les mène ou à la magistrature ou au ministère des temples, Ton sent que leurs progrès dans ces sciences abstraites et étrangères à leur profession , ne peuvent guère être brillans. Tel est l'état actuel de tous les Médressés de l'Empire, que l'on peut regarder comme les pépinières qui fournissent, d'un côté, les Schejrkhs Imams y les Muezzinns de tous les temples du Musulmanisme, et de l'autre , les Muderriss j les Cad/y s , les Na'ibs, etc. qui remplissent les grades subalternes de la judicature. Rarement parviennent-ils aux premières charges : depuis plusieurs siècles, elles sont réservées aux familles les plus distinguées parmi les Oulémas , dont les enfans , comme ceux du reste des citoyens, ne reçoivent d'instruction que dans la maison paternelle. Ces études particulières sont réglées sur le même plan que l'on suit dans les Médressés. Celles que font la jeune noblesse et toutes les personnes qui se vouent à l'état politique, sont moins étendues. L'histoire orientale et les ouvrages philosophiques sont les objets auxquels ils s'appliquent le plus particulièrement. Il en est peu qui étudient la métaphysique, la géographie , les mathématiques, la politique et les principes du gouvernement. Ces sciences languissent chez eux , parce que l'Etat ne s'en occupe pas d'une manière sérieuse, et que sur ces objets importans, il y aune insouciance presque universelle dans la nation. Anciennement l'instruction étoit. plus générale chez les Othomans, p«rce que les Sultans eux-mêmes étoient instruits, et qu'ils encourageoient les lettres et les sciences, autant par leur exemple que par la sagesse de leurs lois. Si tous les Monarques de cette maison, depuis Osman I jusqu'à AhmedI, quoique formés dans les armées et dans le conseil de leurs aïeux , comme dans le gouvernement des provinces, n'ont pas également brillé sur le trône par leurs vertus et leurs qualités guerrières , presque tous se sont cependant distingués par leur érudition et leur amour pour les lettres. Ils n'avoient dans leur cour et auprès de leurs personnes que des hommes instruits : ils soutenoient des thèses avec les plus doctes des Oulémas > et leur faisoient des questions savantes qui les embarrassoient souvent. Ils composoient en vers et en prose avec beaucoup de goût et d'éloquence. On trouve dans les annales de la monarchie, de superbes morceaux de leurs ouvrages, et des traits frappansde leurgénie, de leur caractère, de leurs sentimens. Osman I} au lit de mort, adressa à Orkhann ces paroles remarquables: » Mon fils (1) , essuyez vos larmes; ne » vous affligez pas en vain sur mon triste état. » Nous devons tous une résignation parfaite » aux décrets du ciel. Telle est la destinée »> des hommes. Les zéphyrs de la mort souf-» fient également sur les jeunes comme sur » les vieux , sur les Rois comme sur Içs » sujets. Je finis ma carrière avec joie, je » ferme les yeux avec alégresse, puisque je » considère en vous l'héritier de ma fortune » et le successeur de ma puissance. Prêtez » cependant l'oreille à ma voix : écoutez mes «conseils, et respectez mes volontés suprê-»> mes, comme un testament que vous devez » exécuter avec un amour filial et une fidé-» lité religieuse. Possédez mon sceptre, mais » avec magnanimité; régnez sur mon empire, » mais avec équité. Que les rayons de la (1) Sud 'ed-dinn Efendy. 480 CODE RELIGIEUX » justice brillent autour de votre trône, ét » se répandent sur l'horizon entier. Bannissez » loin de vous l'injustice et la tyrannie : » soyez le défenseur du Goudann, le soutien » de la foi , le protecteur des sciences 3 le h bienfaiteur des Oulémas. Recherchez et » honorez par-tout les hommes recomman-» dables par leur piété et leur doctrine. » Marchez constamment et toujours de pied » ferme dans le sentier de la gloire, de la » valeur, de l'héroïsme. Suivez en tout mes s> traces; observez en tout mes maximes : ne j* tirez jamais vanité de vos forces,- de vos »> richesses , de Votre puissance , de vos ar-» mées, quelque nombreuses , quelque in-» vincibles qu'elles soient. Regardez toujours » notre sainte religion comme le levain de » la grandeur et de la majesté, et ,nos lois » sacrées comme la base de l'autorité et » de la puissance suprême. Ne perdez jamais » de vue les voies mystérieuses de l'Eternel, » qui a béni nos armes, non pour nous pro-» curer des grandeurs mondaines et périssa-» bles, mais pour soutenir l'édifice d'un culte « céleste CODE RELIGIEUX 481 » céleste, et protéger ses fidèles adorateurs. » Consacrez donc tous vos soins, toutes vos » sollicitudes , tous vos efforts , à cet objet » auguste , comme au bonheur de vos peu-»ples, dépôt sacré que le Très-Haut vous » confie et remet dans vos mains. Sachez » enfin que vous ne régnez, que vous n'êtes » Sultan , que pour protéger l'Islamisme , » défendre vos domaines, chérir vos sujets, » et faire sentir à l'univers entier les doux » effets de la justice, de la générosité et de » la clémence royales, seuls moyens depros-» pérer et d'attirer sur votre personne les » bénédictions de Dieu et de son Prophète. « Mohammed I, quelques jours avant sa mort, écrivit à Mourad son fils, alors gouverneur d!'Amassie} de se rendre en diligence auprès de sa personne, et traça au bas de sa lettre ce distique Persan : » Si notre nuit » s'écoule , elle sera suivie d'un jour brillant : » si notre rose se fane, elle sera remplacée » par un rosier délicieux (1). « (1) Zima guer scheb'y refth rou[i ressed ; Gui"y refit Gulsch.cn y furou^l ressed. Tome II. H h Bajezid II, alarmé d'apprendre que le prince Djem son frère , si fameux en Europe sous le nom de Zizim , à son retour de l'Egypte et du pèlerinage de la Mecque a/moi t de nouveau dans XAnatolie pour lui disputer encore le trône, lui adressa ces vers : » Puisque tu peux aujourd'hui te glorifier * » d'avoir remplir le devoir sacré du péleri->* nage, pourquoi, mon Prince, brûles-tu de » tant d'ardeur pour un royaume terrestre ? » Puisque l'Empire m'est échu par un efïèt » des décrets éternels, pourquoi ne te rési-» gnes-tu pas aux volontés adorables de la » Providence ? « Djem lui répondit par ce distique : » Tandis qu'étendu sur un lit de » repos, tu vis dans les ris et les plaisirs , » pourquoi Djem, privé de toute douceur, >» doit-il poser sa tête sur un oreiller d'épines? « Selim I, l'un des Sultans les plus instruits, excelloit-aussi dans le Persan et l'Arabe. La lettre qu'il écrivit de sa main au Schah-Ismdil y et que nous avons rapportée plus haut dans nos observations sur le septième article de Foi, montre assez son génie et CODE RELIGIEUX. 483 son érudition. Mais du moment que les princes héritiers du trône ont été frappés de l'arrêt fatal qui les condamne à un étroitemprison-nement, où s'énervent tous les ressorts de l'esprit et du cœur , on ne voit plus le génie des Osmatis j des Moharnmeds > des Sélims , etc. briller sur le trône. L'influence de cet usage , ou plutôt de cette loi arbitraire du Sérail , principe de tous les malheurs dont ce vaste Empire est affligé , frappe de stérilité tous les esprits, et suspend, chez les souverains comme chez les sujets, tout progrès dans les arts et dans les sciences. De cette première cause dérive une infinité d'autres, qui concourent aux mêmes effets: les préjugés populaires, ou , pour mieux dire,lé respect superstitieux delà nation pour ses anciens usages, le défaut de communicatgjfei intime avec les Européens, les progrès lents de l'Imprimerie, la prévention contre les langues étrangères, la négligence à faire traduire les bons ouvrages de l'Europe chrétienne, la répugnance à voyager hors de l'Empire , le système de ne jamais entretenir des ministres 484 CODE RELIGIEUX, publics chez les Puissances étrangères , enfin la foible sensation que font naturellement sur les esprits des objets dont l'importance échappe à ceux qui n'en ont que des notions imparfaites. A ces causes générales , ajoutons les eon-' séquences toujours renaissantes des vices de l'administration : le plus grand de tous, est l'instabilité des charges. Le ministre , l'officier public qui s'est élevé par la faveur ou par l'intrigue, et qui tremble à tout moment qu'une autre intrigue ne le renverse à son tour, s'en tient strictement aux devoirs de son état ; et sacrifiant son zèle à sa sûreté , il ne s'occupe que foiblement des objets qui lui paroissent étrangers à son office. Les gens même les plus instruits , ceux qui approfondissent le mietiftt les choses , qui connoissent tout ce qui manque à la nation, qui sentent parfaitement la nécessité des réformes, se contentent de gémir dans le silence et l'inaction. Personne n'a le courage de faire le premier pas, de mettre en avant un projet , de parler dune réforme , de proposer un établissement; mais si quelqu'un leur fait des représentations, ils écoutent volontiers , ils font des objections judicieuses , ils paroissent même empressés à y concourir , de manière cependant à ne s'exposer ni aux traits de l'envie et de la cabale , ni aux censures du public. Lorsqu'un officier se laisse entraîner par son zèle , lorsque son habileté amène à son avis les ministres, les premiers personnages de l'Etat, sur-tout le Grand-P'ézir et le Mouphty , rien n'arrête l'exécution des plans qui sembieroient heurter le plus les préjugés de la nation. Alors l'aménité qui leur est propre, plus encore que le sentiment impérieux du besoin , les porte à se laisser conduire , même par une main étrangère. Vers la fin du dernier règne , on leur parla d'une nouvelle école de Mathématiques : elle fut aussitôt établie. On leur exposa les avantages de la baïonnette , d une machine à mater, d'une nouvelle fonderie de canons, d'un nouveau corps d'artilleurs , etc. ils s'y prêtèrent avec empressement. On leur insinua la nécessité d'élever de nouveaux forts à 486 CODE RELIGIEUX, l'embouchure dé. la mer Noire : ils y sacrifièrent aussitôt des sommes considérables. Si tous ces établissemens n'ont pas' eu un égal succès , s'ils n'ont pas été suivis de beaucoup d'autres également avantageux, on doit principalement l'attribuer à des causes particulières, qu'il ne nous appartient pas de dévoiler; mais ils n'en prouvent pas moins l'aptitude de la nation et les dispositions du ministère à s'instruire, à prêter l'oreille aux conseils de l'amitié , à adopter de nouveaux systèmes, et à s'élever, suivant les circonstances , Mau dessus des préventions nationales. Quelques jeunes Musulmans de familles distinguées, qui s'instruiroient dans les principales villes de l'Europe, opéreroient, à leur retour à Constantinople , une révolution sensible dans les lettres , comme dans l'administration publique. Si même des étrangers instruits dans la langue et dans les mœurs du pays, vêtus à l'Orientale , très-attentifs aménager, et la dignité des Grands, et l'amour-propre 'des officiers qu'ils auroient pour coopér \teurs, se faisoient recommander par leur savoir, leur habileté , mais sur-tout par une conduite sage et modeste , il n'est pas douteux que se conciliant la confiance des ministres, ils né parvinssent sans peine à leur faire adopter des maximes nouvelles , et à diriger , par eux-mêmes , sous main, sans éclat, une foule d'éta-blissemens utiles et avantageux. 6°. Des Bibliothèques publiques. L'histoire nous apprend que tous ceux des Khaliphes , des Monarques Mahométans et des hommes d'Etat qui se sont distingués par leur amour pour les lettres , et par l'érection des monumens utiles à la nation, ont eu également soin d'établir de riches bibliothèques à côté des Médressés ou collèges publics. Sous les Khaliphes Abassides, l'une des plus remarquables bibliothèques de l'Orient fut celle du célèbre VézirErdschir : elle contenoitdix mille quatre cents volumes manuscrits, qui, en 451 ( io5q ) , furent brûlés dans un incendie où presque toute la ville de Baghdad fut réduite en cendres. Les princes Othomans, jaloux d'imiter les 488 CODE RELIGIEUX, plus célèbres potentats du Mahométisme, ont pareillement donné toute leur attention à ce moyen de favoriser la culture des lettres dans leurs Etats. Aussi la plupart des mosquées Impériales, et les principales même de celles que des particuliers ont élevées dans les grandes villes de l'Empire, ont des bibliothèques publiques que l'on appelle Kitab-Khanès. Il en existe aujourd'hui trente-cinq dans la seule ville de Constantinople, Les plus considérables de ces Kitab-Khanès des mosquées Impériales , sont ceux de Sainte-Sophie , de Sultan* Bajézid } de Nour-Osmany > de Sultan-Selimx de Sullan-Suleyman > de Sultan-Mohammed , iïEyub y et de Schahzadé-Djéamissy. Il en est aussi de séparés des mosquées, et élevés dans les différens quartiers de la ville, tels que celui Abd'ul- HamidI> aujourd'hui régnant , et ceux du Grand- Vézir Kupruly Ahmed Pascha , du Grand-Vézir Raghib Pascha , d'A t if Efendy , et à'Ismad Efendy, qui tiennent le premier rang entre les bibliothèques consacrées par des seigneurs à l'usage du public. Ces édifices sont bâtis avec autant de goût que d élégance. Les moins considérables contiennent mille ou deux mille cinq cents volumes, et les autres jusqu'à cinq mille, tous manuscrits de différents formats , et proprement reliés en maroquin rouge, vert ou noir. Les Mahométans ont une manière qui leur est particulière, de coter , de ranger et de conserver les livres. Chaque volume est renfermé dans un étui, aussi de maroquin , qui le garantit de la poussière et des vers. Le titre est tracé en grosses lettres sur la tranche du livre et sur celle de son étui. On les range les uns sur les autres dans des espèces d'armoires garnies déglaces ou de treillage, et placées le long du mur, ou dans les quatre coins du bâtiment. Dans quelques-unes de ces bibliothèques on voit aussi, au milieu de Ja pièce, une grande cage formée de tringles de bronze doré, et artistement travaillée, dans l'intérieur de laquelle on range les livres. Voyez les Planches 32 et 33, qui représentent les biblio-théques iVAbd'id-Hamid Ij et de Raghib Paschaainsi que la Planche 39, qui donne 490 CODE RELIGIEUX, une idée de la forme et de la reliure de ces volumes. . Excepté les mardis et les vendredis, ces bibliothèques restent ouvertes dans toutes les saisons de l'année. Elles sont confiées cha^ enne à la garde et aux soins de trois ou quatre bibliothécaires, Hafiz-Kutub, qui y passent la journée , et qui reçoivent avec la plus grande honnêteté tous ceux qui s'y, présentent.Chacun est le maître de parcourir l'ouvrage qu'il veut, d'en faire des extraits , même de le transcrire en entier, mais en travaillant toujours dans la bibliothèque , les règlemens de ces fondations ne permettant jamais de prêter aucun livre. On sent que la plus grande partie de ces ouvrages ne peuvent être qu'analogues aux études et aux connoissances actuelles de la nation. Il n'y est donc question que du Coitr'ann, de ses commentaires, des lois orales du Prophète, de la jurisprudence , de la philosophie , de la métaphysique, de la médecine, de la morale et de l'histoire. Chaque bibliothèque a un catalogue exact ; et tous les livres orientaux , CODE RELIGIE UX. 491 tous les ouvrages connus dans les trois langues du pays, sont recueillis dans un état général, où l'on trouve le titre et le sujet de chaque ouvrage. Ce précis, aussi curieux qu'intéressant, porte le nom à'Essami'y - Kutub > et forme un volume in-folio. Nous désirons pouvoir le-' donner au public , après avoir rempli la tâche importante que nous nous sommes imposée sur la législation Mahométane et l'histoire de l'Empire Othoman. Répétons ici que la doctrine, le droit, les maximes de la morale et de la philosophie, ont été traités par une foule d'auteurs, soit en Persan, soit en Arabe. Les livres historiques sont encore en plus grand nombre. Indépendamment de l'ancienne histoire Orientale, la vie de Mohammed , de ses disciples et de tous les Khaliphes ses successeurs» l'histoire de toutes les dynasties Mahomé-tanes , les vies mêmes des princes lesplus illustres , et des plus grands hommes de l'Orient, sont écrites séparément par une multitude d'auteurs contemporains. Les ouvrages les plus estimés- dans les différens genres de 492 CODE RELIGIEUX, littérature, sont ordinairement en plusieurs exemplaires, niais principalement le Cour'ann et les livres ca/ioniques. Ils sont écrits avec le plus grand soin, sur le plus beau vélin; les lignes de chaque page avec un entourage ifl'or,' et tous les chapitres, toutes les sections en grosses lettres également-en or. Ce luxe ajoute beaucoup à la valeur de ces manuscrits , dont le prix est en raison de la beauté du caractère. Les épargnes de ces fondations , jointes aux libéralités continuelles des particuliers, augmentent chaque jour la masse des volumes dans les différentes bibliothèques. Le commis qui a une belle main se fait ordinairement un devoir de transcrire le Courann et de le donner pendant sa vie , ou à sa mort, à l'un de ces Kitab-Khanès. L'homme de loi, l'homme d'Etat, l'homme de lettres qui possède une collection de livres, la lègue en entier ou en partie à une bibliothèque publique, pour attirer sur son tombeau les vœux et les bénédictions de tous les Musulmans qui en feront usagev Nonobstant la cherté de ces livres, tout citoyen, pour peu qu'il soit aisé , a soin d'en acquérir un certain nombre. Il est toujours dirigé dans son choix, ou par la religion, ou par son goût personnel, rarement par un esprit d'ostentation, pour en faire une vaine parade aux yeux de ses amis, vu les mœurs et le génie de vie de la nation. La collection des livres manuscrits à l'usage particulier des Sultans , forme aujourd'hui deux bibliothèques assez considérables dans l'intérieur du Sérail. L'une est de la fondation Ahmed III, qui l'établit au milieu des quatre Odas., ou chambrées des pages et des gentilshommes de la chambre. Il réunit encore aux anciennes collections de ses aïeux une infinité d'autres manuscrits. L'autre est de Mous tapha III, tjui l'éleva à coté de la mosquée Boslandjiler-Djéamissy , dont il est également le fondateur. Il composa cette nouvelle bibliothèque de tous les ouvrages qu'a-voient recueillis Mahmoud I et Osman 111, et de tous ceux qu'il avoit acquis lui-même pendant son règne. Ces deux bibliothèques , qui renferment plus de quinze mille volu-mes, grossissent tous les jours , soit par de nouvelles acquisitions, soit par les présens de ce genre que font au Monarque les Grands de l'Etat ,. soit par les confiscations que l'on exerce sur les biens des officiers publics , dans le mobilier desquels on trouve toujours un certain nombre de livres. Le commerce de ces manuscrits fait subsister une infinité de commis, sans cesse occupés à les transcrire r et un grand nombre de libraires, Sahhaf y qui en trafiquent dans toutes les villes de l'Empire. Indépendamment des magasins considérables établis dans Constantinople> des colporteurs parcourent continuellement les hôtels publics, et les différons quartiers de la ville, où. ils débitent chaque jour ejes ouvrages en tout genre. C'est la multiplicité de ces manuscrits, et la crainte de réduire à la mendicité une foule de copistes, qui ont le plus contribué à retarder chez les Othomans rétablissement de l'imprimerie. ' L'usage de la presse n'a été introduit à Constantinople , que sous le règne $ Ahmed III ^ par les soins éclairés du G rand-Vézir Ibrahim Pascha et du Mouphty Abd9ullah Efendy. Le fameux renégat Basmadjy-Ibrahim (1) fut le premier qui en donna le projet , dans un mémoire où il exposoit fort au long tous les avantages de l'imprimerie. Cet officier , alors Muléjerica de la cour, eut même l'habileté d'associer à son entreprise Saïd Efendy} l'un des premiers commis du bureau du Mehtoubajy-Ejèndy. Le Grand-Vézir et le Mouphty , connoissant l'empire des préjugés , ne négligèrent aucune des formalités légales pour faire réussir cette innovation , prévenir les murmures du peuple , et rendre cet établissement aussi solide qu'avantageux. Cependant ils se virent obligés de respecter l'opinion des Oulémas, qui jugèrent contraire à la religion et à la dignité du Musulmanisme, de permettre l'impression du Courann, od d'aucun livre qui traitât de la doctrine et de la loi du Prophète: ces ouvrages , objeetoient-ils , leur ayant été transmis en manuscrits, (1) Biismadjy veut dire imprimeur. 496 CODE RELIGIEUX, dévoient également être transmis à la postérité sous les mêmes caractères. D'après cet arrêté, le Mouphty délivra un Fethwa , pour constater d'une manière authentique la légitimité et les avantages de l'imprimerie. Comme les sentences que prononce ce chef de la loi et de la magistrature Maho-métane ne se délivrent jamais que sur des questions formelles qu'on lui adresse toujours sous des noms simulés, nous rapporterons ici la question et la réponse qui ont formé le Fe/hna relatif à cet objet. Question. Si Zeïd s'en* gage à imiter les caractères des livres manuscrits j tels que les dictionnaires > les traités de logique j de philosophie y d'astronomie y et autres ouvrages scientifiques , pour fondre des lettres y faire des types y et imprimer des livres absolument conformes aux modèles manuscrits y peut-on l*autoriser légalement à faire cette entreprise P Réponse. Dès qu'une personne entendue dans Vart de la presse a le talent de fondre des lettres et de faire des types pour imprimer des manuscrits exacts et corrects } dès que son opération offre de grands grands avantages , tels que la Célérité du 'travail , la facilité de tirer un grand nombre d'exemplaires j et le bas prix auquel chacun peut s'en pourvoir y si l'on prépose quelques personnes très-instruites dans la littérature pour corriger les épreuves y on ne peut alors que favoriser V imprimeur dans son entreprise y qui est des plus belles et des plus louables. Indépendamment de cette décision légale au Mouphty, le ministère engagea encore les principaiix Oulémas à donner leur avis ; et six des Ex-Cazi-Askers de Roumilieet d'Ana-tolie, Dam ad- zadé Ffendy y Mirza-zadé Ejendy y Abd'ullah Efendy y Féyz'ullah Ffendy , Salih Efendy et Durry Efendy } les deux Cazi-Askers en exercice^ Es-Seyyid-Mohammed Ffendy et Mous tapha Efendy j cinq des Ex-Jstambol-Cadissys y Selim Ejendy y Isshak Ffendy , Abd'ur-Rahmann Ffendy y Scheyldi-zaàé Mohammed Ejendy et Isshak-zadé Ffendy s V.Istambol-Cadissy en exercice, Zulaly Efendy ) et le Nakib'ul-Eschraf y ou chel'des Emirs y Zem'ebAbid/nn Efendy, donnèrent leur approbation par écrit. Tome IL Ii Ce fut d'après ces pièces solennelles qu^h. med III accorda un Khatdj-Schérij'pour l'établissement de l'imprimerie. Le préambule de cet édit remarquable parle d'abord des avantagés inappréciables de l'écriture : que c'est par son moyen, y est-il dit, que l'on conserve d'un côté les principes de la loi et de la doctrine , ainsi que les règlemens de l'Etat et de la-nation ; et que, de l'autre , l'on instruit les peuples , l'on propage et l'on perpétue les lettres et les sciences , en les transmettant d'une génération à l'autre : on y lit ensuite, qu'outre les productions des anciens philosophes, l'Orient , à compter de l'heureuse époque de la naissance du soleil de l'Islamisme , abon-doit en toutes sortes d'ouvrages d'érudition et de littérature , mais principalement en ceux qui concernent la parole de Dieu, les lois orales du Prophète, et la législation religieuse ; que tous ces ouvrages, auxquels tant d'Oidc/nas et de gens de lettres avoient consacré leurs veilles et leurs sueurs, étoient propres à procurer à l'homme des mérites éternels et des prospérités temporelles; que CODE RELIGIEUX. 499 par une suite de la révolution des temps et des vicissitudes humaines , cette multitude immense de manuscrits avoit subi la destinée commune à toutes les choses du monde ; qu'ils avoient péri dans les ravages des incendies , dans les calamités des guerres , dans les dévastations des villes , mais sur-tout dans les temps désastreux de Djinguiz-khan > le fléau de l'Orient; de Hélaheouy le destructeur dè Baghdad, et des princes Chrétiens, y est-il dit, qui ont expulsé les Mahométans des di vers royaumes de l'Espagne : qu'après la perte irréparable de tant de bibliothèques publiques et particulières, une infinité d'ouvrages, surtout les plus volumineux , n'existoient dans les Etats Musulmans qu'en très-petit'nombre d'exemplaires; que peu de sujets avoient la patience de les transcrire , et très-peu le talent de les copier exactement ; de sorte que la rareté et le haut prix des manuscrits corrects et parfaits , faisoient le plus grand toit à la propagation des lettres et des sciences : que pour remédier à ce mal, S. H. avant pris en considération le mémoire des entrepreneurs Said et Ibrahim , où Ion détailloit tous les avantages de l'imprimerie, les autorisoit, en vertu du Fethwa du Mouphty ( qui est cité tout au long dans ledit même) , à établir une imprimerie, et adonner au public tous les ouvrages qui traitent de la philosophie, de la médecine, de l'astronomie, de la géographie /de l'histoire, ou de toute autre science quelconque , excepté les livres canoniques, c'est-à-dire, le Coudann le Hadiss (lois orales du Prophète), leurs commentaires, Te/sir, et les livres de jurisprudence ; qu'enfin S. H. se féli-cîtoitde ce qu'un établissement de cette nature avoit été réservé par la Providence à son règne glorieux , et qu'elle ne doutoit pas d'accumuler sur son auguste personne les bénédictions!de ses sujets et de tous les Musulmans des siècles à venir. Le Khatt'y-Schérif finit par exhorter les deux imprimeurs à consacrer à cette entreprise leurs soins réunis, et à donner la plus grande attention à la correction des feuilles , objet pour lequel le Monarque préposoit, à titre, pour ainsi dire , de censeurs, les magistrats , Isshak Efendy Ex-Cady de Constantinople y Sahhib Efendy Ex-Cady de Saloniquc , Es s'ad Efendy Ex-Cady de Galata , et Moussa Ffendy Scheyhh de l'ordre des Mewlewys y et supérieur de la maison du même ordre dans le faubourg de Cassim-Pascha. Cet édit est daté du i5 Zil-cadé i i3q , ce qui revient au 5 juillet 1727. Pour donner toute la publicité requise à ces titres légitimes , sur lesquels portoit le nouvel établissement, on ordonna aux imprimeurs déplacer Te Khatdy-Schérif du Sultan, le Fellui'a du Mouphty, et les Taluizs ou approbations des principaux Oulémas , à la tête de Wann-Gouly > le premier livre qui fut mis sous la presse. Nonobstant toute l'activité de Basmadjy Ibrahim y et le zèle du ministère , cette imprimerie ne mit au jour que quinze ouvrages , dont on tira, à la vérité, un très-grand nombre d'exemplaires. Les voici : i°. Deux volumes de Wann-Couly , dictionnaire Arabe. 2°.Peux volumes de Ferhhenh-SchouôuryS dictionnaire Persan. I i iij 3°. Deux volumes de Naïma qui traitent de l'histoire de la maisou Othomane, depuis l'an 1591 jusqu'à l'an 1669. 40. Deux volumes de Raschid y continuateur de la même histoire , qu'il conduit jusqu'à l'an 1728. 5°. Un volume de Djddiann-Nouma y qui veut dire, le belvédère du monde. C'est une description géographique, avec un précis historique de presque tout l'Orient. Cet ouvrage , qui contient aussi des cartes géographiques , et un discours sur les mathématiques etsur les élémcns d'Euclide , a pour auteur le célèbre Kéalib Tschélébj. 6°. Un volume Tahvlt/i - Ttvuirikh y ou tableau chronologique de tous les Monarques et de tous les grands Hommes de l'Orient, depuis la création jusqu'à l'an 1732, par le même Kéatib - Tschélébj. 70. Un volume Tœithhjeddul-Kitbar : c est une description de la mer Blanche, avec l'histoire de toutes les expéditions maritimes des Othomans jusqu'à l'année i65ô. Ce livre, qui traite aussi des principes de la navigation et des règlemens nécessaires à l'Amirauté , est encore de Kéatib-Tschéléby. 8°. Un volume Gulscheriy-YJiouléfa. C'est un précis historique des Khaliphes et des différentes dynasties Mahométanes , depuis l'an 744 jusqu'à l'an 1643, par Nazmizadê. 90. Un volume Tarildi - Timour , ou histoire de Timour , par le même auteur. io°. Un volume Tarildi-Missr, ou histoire de l'Egypte relie ne parle que de la conquête de ce royaume par Selim 1. Cet ouvrage est de Suhhédy. Un volume Tarildi-Aghwaniyann , ou histoire des Aghivanns , avec un précis historique de la maison Sajcwy , ou Sophis de Perse. 12°. Un volume Tarikh-Bosna , ou histoire de Bosnie: elle ne parle que des guerres de 1736 à 1739. i3°. \Jnvo\umeTarikhul-Hind-ul Gharby, ou précis historique des Indes Occidentales. 14°. Un volume Feyouzath-Miknatissiyé. Cet ouvrage parle des propriétés de l'aimant, et de l'utilité de la boussole. I i iv i5°. Un volume OussouVuî-Hihcm , ou principes philosophiques. C'est un petit traité qui expose les différentes formes de gouvernement, les maximes principales d'une bonne administration, et l'art militaire, suivant la tactique des Européens. Nous en donnerons l'esprit dans nos observations à la-suite du Code Militaire. Ces cinq derniers ouvrages sont de l'imprimeur Basmadjj Ibrahim 3 qui avoit de l'érudition , et dont le zèle ne négligeoit rien pour répandre les connoissances des Européensparmi les Mahométans. Il imprima aussi deux grandes cartes, l'une de la mer Noire, l'autre de la mer Caspienne. Outre les bénéfices ordinaires de son entreprise, il jouissoit encore de diverses libéralités de l'Etat. Il avoit un fief militaire, Timar, et un traitement de quatre-vingt-dix-neuf aspres par jour. L'imprimerie travailla ainsi pendant dix-huit ans : mais la mort de son auteur, en 1746, six ans après celle de son associé, fit CODE RELIGIEUX. 5z5 oublier et abandonner cet établissement. MahmoudI et le Grand- Vézir Terjaky El Hadjh Moha/nmed Pascha eurent bien le projet de le maintenir; mais la difficulté de trouver un homme aussi entendu et aussi zélé que Basmadjj Ibrahim y fit suspendre alors les ordres nécessaires de la part du Gouverne-ment;et l'objet une fois perdu de vue, les successeurs de ce Vézir y portèrent la même négligence ; de sorte que l'imprimerie resta dans une entière inaction jusqu'au présent règne. Tous les livres imprimés se trouvent dans les bibliothèques publiques ; mais depuis quelques années ils sont rares chez les libraires , et se vendent presque au double de >leur ancien prix, qui étoit de cent vingt piastres, ou environ deux cent soixante-dix livres la collection entièfe. Ce n'est pas sans peine que j'ai pu les recueillir pour les joindre aux manuscrits qui forment ' les annales de l'Empire, etc. On a déjà vu que ce fut la lecture de ces ouvrages qui me fit concevoir, en 1764, la première idée de celui que je donne actuellement au public , et que j'ai 5o6 'CODE RELIGIEUX, entrepris d'après les encouragemens de M. Gustaf de Celsing, alors Envoyé Extraordinaire, de Suède à Constantinople et aujourd'hui Président du Conseil Roval de Commerce à Stohholm. Il m'est doux , en rendant ici hommage à son amour pour les lettres , à ses talens , à ses vertus , de lui payer le juste tribut de ma reconnoissance. On sait que sous Osman III le ministère accorda le privilège de l'imprimerie à Kutschuk - Ibrahim j élève de Basmadjy Ibrahim. Mais ce nouveau directeur ne s'occupa que d'une seconde édition de IVann-Couly , qu'il donna au public en 1757. Comme il s'étoit voué à la judicature, et qu'il eut le moyen de s'avancer dans l'ordre des Cadys , il s'en tint à cette carrière, comme infiniment plus honorable et plus lucrative , et abandonna l'imprimerie. Abd'ul-Hamid-I eut la sagesse de la rétablir par un nouveau Khatt y-Schérif], en date du 18 Rebi'ul-akhir 1198 ( 12 mars 1784). Ce nouvel édit expose, comme le premier, les avantages de l'imprimerie, parle de son établissement sons Ahmed III, déplore les circonstances qui l'ont l'ait négliger , soit après la mort de BasmadjyAbrahim, soit après la démission de Kiitschiik-lbrahim y et excuse en quelque sorte les Monarques précédera de cette inattention , nommément Moustapha III', à cause des événemens orageux de son règne : il nomme pour directeurs de la même imprimerie le Beylikdjy, ou vice-grand chancelier MohammedRascldd Ejendy , et AIdned IVassij Ejendy } historiographe de l'Empire; il les autorise à acquérir de la veuve du dernier imprimeur les types avec tous les instrumens qui appartiennent à la presse, et leur enjoint de veiller avec une attention suivie à l'impression de tout ouvrage qui traite de l'histoire , des sciences, des belles-lettres , etc., sans jamais loucher aux livres canoniques, conformément à l'esprit et aux règles primitives deeette institution. Cet édit accorde aussi aux deux Ejendy s directeurs un privilège exclusif; leur donne une liberté entière d'employer à l'imprimerie telles personnes que bon leur semblera; leur impose un droit d'un aspre par cahier de dix feuilles, à payera la caisse du Wahf Impérial, pour tous les exemplaires qui seroient imprimés, soit en Turc, soit en Persan, soit en Arabe , et leur défend enfin de vendre aucun livre qui ne porteroit pas le sceau de l'officier chargé de la perception de ce droit public. Ces conditions ont été offertes par les directeurs eux-mêmes, qui, loin d'exiger les avantages que l'Etat avoit accordés aux deux premiers imprimeurs, se sont soumis de plein gré à ce droit modique, en faveur des TVahJs domaniaux, dans la seule vue d'intéresser davantage au' maintien de cet établissement le Sultan lui-même et ses successeurs. Ainsi , depuis trois ans , l'imprimerie se trouve rétablie à Constantinople, et travaille à mettre au jour la suite de l'histoire Otho-mane. La nation est redevable de ce bienfait au zèle et aux lumières du Grand-Vézir Ilamid-Kha/il Pascha, qui deux ans après eut le sort le plus déplorable. Ce ministre doué de qualités éminentes , ne s'étoit élevé à la première dignité de l'Empire que par son mérite et ses talens. Dépouillé de presque tous les préjugés de sa nation , il sentoit mieux que personne la nécessité d'une réforme générale, et s'en occupoit sérieusement. La confiance dont il m'honoroit, à la suite de quatorze années de liaisons particulières, et la connoissance parfaite que j'ai eue de son zèle, de son habileté et de ses vastes desseins, me font présumer que s'il eût été secondé par la fortune, ou s'il n'eût pas précipité l'exécution de son plan____, il eût donné au moins le premier- mouvement aux réformes qu'il méditoit profondément lorsqu'il n'étoit encqre que dans les grades subalternes du ministère. 70. Des Chapelles^sépulcrales où reposent les cendres des Sultans , etc. Ces chapelles , que l'on appelle Turbés, sont des édifices superbes élevés à côté des mosquées Impériales. Ordinairement chaque Sultan en fait construire une pour lui et pour ses enfans. Celui qui a négligé cette précaution pendant son règne , choisit à sa mort 5io CODE RELIGIEUX, l'un des Turbés de ses aïeux ;'mais ses dispositions sont toujours soumises à la volonté du Monarque qui lui succède, et qui souvent le fait inhumer dans une autre chapelle. Les Validé-Sultanes ou reines-mères ont aussi je droit de faire construire des Turbés , qui servent également à la sépulture des Sultans ainsi que des princes et princesses de leur sang. Les corps y sont inhumés , et au dessus de la fosse , simplement couverte de terre, s'élève une espèce de catafalque ou de baldaquin , Sanndouca , de simple bois , couvert d'une riche étodè brodée en or, avec des versets du Condann , et ordinairement garni, du coté de la tête , d'une large bande des anciens voiles du Kéabé de la Mecque , ou du sépulcre du Prophète à Médine. La plupart de ces rnouumens sont, entourés d'une espèce de grillage enrichi de nacre de perle; ceux des Monarques et de tous les princes du sang , Sont distingués par un turban en mousseline du côté de la tête. On compte aujourd'hui à Conslantinoj)le dix-sept de ces Turbés Impériaux ce sont: i°. Celui de Mohammed II, le conquérant de Constantinople. Voyez la Planche 34. SLP. Celui de la Validé-Sultane A limé -Khanirn , mère de Mohammed II. 3°. Celui de la Validé-Sultane Gul-Bahhai' Khatami , mère de Bayézid II. A ses côtés sont les deux Sultanes ses filles, qu'elle eut de Mohamdfèd II. Voyez la Planche 35. Des historiens nationaux donnent cette Validé-Sultane pour une princesse de France. Ifs prétendent qu'elle fut prise par un armateur Othoman dans l'Archipel, à bord d'un navire destiné pour les côtes de Jérusalem } que conduite à Constantinople , elle subit les lois de la captivité , et fut rangée-dans la classe des premières dames du Sérail ; qu'elle eut le bonheur d'être admise au lit de Mohammed11, et de lui donner, entre autres enfans, Bayézid 11 son successeur. C'est cette opinion sur la naissance de Gul-Bahhar-Khatu/in, bien plus que l'alliance entre François 1 et Suleyman I con-tre Charles-Quint, qui encore aujourd'hui fait regarder à la nation entière la maison de Bourbon commealliée delà maisonOthomane. 5i2 CODE RELIGIEUX. 4°. Celui de BayézidIIy dit IVély ou le Sairï,t. 5°. Celui de Selim I. On voit à côté de son mausolée celui de la Validé-Sultane Hajza-Kliatunn , mère de Suleyman 1} et ceux de divers princes et princesses du sang. 6°. Celui de Suleyman I. Dans le même Turbé reposent les cendres de Suleyman II y & Ahmed II, de Khourrem-Sultane , mère de Selim II, de Dil-Aschub-Sultane y mère de Suleyman II, et de divers princes et princesses du sang. 7°. Celui de Selim II y près duquel est le Sanndouca de Nour-Banou-Sultane, mère de Mourad III} et célèbre sous le nom dAl-tika- Validéy qui signifie, l'ancienne ou la mère. 8°. Celui de Mourad IIIy où repose aussi le corps de Safiyé-Sultanc > mère de Mohammed III. cf. Celui de Mohammed III. On y voit aussi le monument de KhanndSm-Sultane ? mère d'AhmedI. io°. Le Turbé connu sous le nom de Schahzadé- Schahzadé-Turbessy , où sont inhumés tous les enfans de Mourad III. 11°. Celui de Mous tapha I. Dans la même chapelle reposent les cendres de la Validé-Sultane 6a mère, $ Ibrahim 1 ; et de plusieurs princes et princesses du sang. Ces cinq derniers Turbés , de n° 7 à n° 11, sont dans l'enceinte extérieure de Sainte-Sophie. 12°. Celui d'AhmedI : on voit autour de son mausolée ceux d'Osman II , de Mourad IVet de Mah-Pédœr-Keussem Sultane, mère de Mourad IV et d'Ibrahim I j cette princesse est connue sous l'épithète dé Va-lidé-y-Maktoulé , qui veut dire , la Validé massacrée, à cause de la fin déplorable qu'elle eut dans les troubles qui agitèrent Constantinople , l'an i65i. i3°. Celui de la Validé-Terldiann-Sultane, mère de MohammedIV, et fondatrice de la mosquée Yeny-djéamy. Ce Turbé, le plus considérable de tous , renferme aussi les corps de Mohammed IV , de Mous tapha II, dAhmed III , de Mahmoud I , d'Osman III, de Salihha Sultane , mère de MahmoudI, et Tome II. Kk 5i4 CODE RELIGIEUX, de plusieurs princes et princesses du sang. Voyez la Planche 36. 140. Celui de la Validé Rabiâ-Gtdnousch Sultane y mère de Moustapha II et d'dh-medlïl, et fondatrice de la mosquée Validé-djeamissy. i5°. Celui de la Validé Schehsouivar-Sul-tane y mère d Osman III. 160. Celui de Moustapha III. Ses enfans sont inhumés à ses côtés. Voyez les Planches 3i et 37 , dont l'une représente l'extérieur et l'autre l'intérieur de ce monument. Et 17°. celui (Xslbd'ul-IIamid I y où reposent les cendres de plusieurs enfans de ce Monarque aujourd'hui régnant. Brousse y l'ancienne capitale de l'Empire, possède les corps des six premiers Sultans de cette maison. Us sont dans trois Turbés j 1°. celui de Gumusch-Coubbêy où reposent Osrdan I et Orhann Ij 2.0. celui de Djihirké. où son t Mourad 1 y Bayézid I et MouradII j et 3°. celui de Kesclul-Imarethy qui renferme le corps de Mohammed I. La plus grande simplicité règne dans ces anciens mausolées, sur-tout dans celui d'Osman I, comme on peut le voir dans la Planche 38. Les murs de ceux de Constantinople, sont pour la plupart revêtus au dedans de carreaux de porcelaine , et tapissés d'inscriptions en gros caractères d'or : ordinairement ce sont des vers en l'honneur du Prophète, Medh-Mohammed y de la composition d'un Arabe aveugle , nommé Bardé, qui , par son génie poétique, se rendit célèbre dans tout l'Orient. On n'allume presque jamais les flambeaux qui sont aux deux extrémités de chaque monument ; mais les lampessuspendues aux voûtes, en forme de lustres, brûlent toutes les nuits. Chaque Turbé a quatre ou six gardiens sous le nom de Turbédar, et dix ou quinze vieillards , dont l'ofHee est de réciter tous les matins le Cour'ann en entier , pour le repos de J'ame des personnes quLy sont inhumées. Comme chacun se charge de deux ou trois des trente cahiers , D/uz'y j de ce livre , on les appelle D/uz'yKlzanann , c'est-à-dire , récitateurs des cahiers sacrés. Les Sultans qui ont eu la dévotion de K k ij 5i6 CODE RELIGIEUX, transcrire de leur main le Coudann , font toujours déposer leur exemplaire clans le Turbé même où ils sont enterrés. Les Turbédars se font un mérite de les faire voir à ceux qui les demandent , sur-tout les exemplaires de Mohammed II et d'Ahmed Ilï, parce qu'ils sont écrits en entier et signés de la main de ces princes. Us conservent d'ailleurs avec le plus grand soin un certain nombre de livres du Coudanriy pour les mettre entre les mains de tous les Musulmans qui vont visiter ces Turbés , et prier pour l'ame des Monarques défunts. Les uns sj rendent par un reste d'amour et de reconnoissance envers leurs anciens maîtres, sur-tout les officiers du Sérail attachés au service personnel des Sultans , des princes , des Validés - Sultanes> etc. ; les autres, par un pur mouvement de dévotion et de respect pour la mémoire des Souverains, considérés pendant leur règne comme Khaliphes et vicaires du Prophète. Ainsi beaucoup de Mahométans rendent souvent leurs pieux hommages à ces Turbés, notamment à ceux de Bayéùd II j de Mohammed II, de Sellai I et de Suleyman I j du premier, à cause de la réputation de sainteté que lui acquirent ses vertus ; des autres, comme ayant illustré leur règne par leur sagesse et leurs exploits militaires, Tous les jours on les visite , mais avec plus d'af-fluence dans les trente nuits du Ramazann , et principalement dans les sept nuits saintes dont nous avons déjà parlé. La nation , surtout les Grands et les officiers de la cour , s'acquittent de ce devoir plus particulièrement encore dans les quarante premiers jours de la mort d'un Sultan. Le nouveau Monarque s'empresse toujours d'en donner l'exemple. Mourad III visitoit régulièrement deux fois par semaine , les lundis et les jeudis, le Turbo de Selim II son père. Tour-à-tour, et le plus souvent incognito, les Sultans vont réciter le même jour des prières à deux ou trois de ces Turbés , font des largesses aux Turbèdars , et répandent des aumônes : actes de dévotion plus éclatans encore à l'époque d'événemens fâcheux , de calamités publiques, d'entreprises importantes. Ces Souverains implorent alors Kkiij Sih CODE RELIGIEUX, publiquement l'intercession de leurs aïeux et des Saints du Musulmanisme , mais sur-tout d'Eby-Eyiib-Enssary. Nous avons dit plus haut que cet Eyub > l'un des disciples du Prophète , mourut l'an 48 (668), sous les murs de Constantinople , pendant la fameuse expédition du prince Yezid fils de Muaniyé I, Contre le Bas-Empire. La manière prétendue miraculeuse dont on découvrit son tombeau quelques semaines après la conquête de cette ville, sous Mohammed II, releva infiniment l'opinion de sainteté où il étoit clans les esprits. Ack-Schems1 ud-dinn , l'un des Scheykhs favoris de ce Sultan, crut voir en songeun être céleste, qui lui indiquoit le lieu où reposoient les cendres de ce saint personnage, en l'assurant qu'on y trou ver oit pour preuve de cette révélation, une source d'eau, et un marbre 'blanc avec une inscription hébraïque. A son réveil le Scheyhh courut exposer sa vision au Monarque, qui sur le champ ordonna de fouiller la terre à l'encfroit marqué, hors de la ville , à l'ouest de Constantinople. Le hasard sans doute ou l'imposture Ht trouver au milieu des fouilles un marbre blanc et une source d'eau. Il n'en fallut pas davantage pour consacrer ce lieu comme étant celui de la sépulture d'Eby-Eyub. Mohammed II y fit élever un superbe Turbé, et à côté une grande mosquée du nom de ce Saint, ainsi que le faubourg même qui s'éleva bientôt aux environs de ces deux édifices. Le Turbé achevé , le Sultan s'y rendit avec pompe , et après quelques prières , Ach-Schemz'ud-dinn , assisté des principaux Oulémas , ceignit Mohammed II d'un superbe sabre, comme, en 1842,, le Khaliphe AhmedIX l'avoit pratiqué à l'égard de Melik-Mensour, au moment de son élévation sur le trône d'Egypte. Depuis, tous les successeurs de Mohammed II observèrent cette cérémonie, qui leur tient lieu de sacre et de couronnement. Elle se fait le cinquième ou le sixième jour de leur avènement au trône, et toujours dans le même Turbé. Ces circonstances élèvent dans l'opinion publique la sainteté de cette chapelle sépulcrale au dessus K k iv 520 CODE RELIGIEUX. , même de celle des Turbés Impériaux : aussi l'aflluence y est-elle prodigieuse; la chapelle est ouverte jour et nuit, et les deux flambeaux placés aux deux extrémités de la tombe, brûlent continuellement. Les pieux hommages que les Musulmans de l'un et de l'autre sexe vont rendre aux cendres de ce Saint, sont presque toujours accompagnés d'offrandes en argent , en bois d'aloès , en ambre gris , mais sur-tout en cire blanche. On se fait encore une dévotion de boire de cette eau trouvée aux pieds de la fosse , et dont on forma un puits dans l'intérieur même du Turbé. Vers la tête , on voit un étendard enveloppé d'un drap vert, symbole de la condition du Saint, qui fut l'un des Enseignes du Prophète, et ensuite du Khaliphe Muawiyé I. Voyez la Planche 40. Ce Turbé et la chapelle du Sérail où l'on conserve les reliques du Législateur Arabe, sont les seuls lieux de ,1a capitale rigoureusement interdits par l'opinion, aux Chrétiens, et à tous ceux qui no professent pas l'Islamisme. Mes efforts pour y pénétrer ont été CODE RELIGIEUX, ôzi inutiles ; et ceux des Grands qui avoient les moyens de m'en ouvrir l'entrée , ont été les premiers à me conseiller d'y renoncer , pour ne pas m'exposer aux insultes du fanatisme. Je suis cependant parvenu à engager des peintres Mahométans à en prendre les dessins, ce qu'ils ont exécuté à la dérobée, et à plusieurs reprises , pour vérifier chaque fois le travail secret qu'ils faisoient chez eux. On a observé que les Turbés Impériaux ne renferment que les corps des Monarques , ceux de leurs enfans, et des Vali dé-Sultanes leurs mères. Les Cadlnns et toutes les esclaves qui forment le Harem du Sérail, ont un cimetière particulier, presque au centre de la ville. U est entouré d'un haut grillage de fer. A l'un des coins de ce cimetière , dans la partie qui regarde le chemin public, le Sultan régnant fit inhumer le Grand-Vèzir Silihdar Sejjid Mohammed Pascha qui à sa mort, en 1779, reçut, au grand étonnement du public, cette dernière marque de la bienveillance et de l'extrême affection de son maître. Pour terminer notre discours sur les divers édifices qui s'élèvent autour des mosquées, nous remarquerons encore que quelques-uns de ces temples entretiennent aussi des hôtels, sous le nom de Mihman-hhané ou Mussafir-khané 9 destinés aux voyageurs indigens : d'autres ont des bains publics où les pauvres vont se baigner et faire leurs purifications, sans autre charge que celle de bénir la mémoire des instituteurs de ces pieux établissemens. Indépendamment de toutes ces fondations primitives , chaque Musulman est maître de contribuer à leur entretien ou à leur amélioration par de nouvelles largesses, par de nouveaux fonds que l'on ajoute aux anciens. Toute personne aisée est réputée soumise à cette obligation, mais sur-tout les Monarques,qui ne peuvent cependant y employer que leurs épargnes ou une partie des avantages résultans des succès de la guerre. Il ne leur est pas permis de disposer, pour aucun de ces objets, des deniers publics que la loi consacre aux besoins de l'Etat. C'est pourquoi la plupart des mosquées Impériales et des établissemens voués au bien général de l'humanité , sont CODE RELIGIEUX. 5i3 de la fondation des Sultans qui ont fait des conquêtes : circonstance qui ajoute à leur obligation de s'occuper sans cesse des choses relatives au culte public , à l'instruction de la jeunesse et au soulagement des pauvres. §• m. Des Wakfs ou Fondations. Cet article important, qui intéresse à-la-fois la religion et la politique, demande à être développé avec quelque étendue. Chez les Mahométans, tous les biens consacrés aux temples ou à des fondations pieuses, portent la dénomination générale de JVakf, vulgairement dit Wakouf. Ce mot, qui répond à ceux de cession, consignation , abandon , dépôt, emporte cependant dans son acception ordinaire l'idée d'une chose sacrée, d'un objet voué aux besoins de l'humanité et du culte public , par un sentiment de piété et d'amour envers Dieu. Ces ÏVakfs se partagent en trois classes : la première comprend ceux des mosquées qui forment, pour ainsi dire , les biens ecclésiastiques de la nation ; la seconde , les FVakfs publics ou fondations établies pour le soulagement des pauvres et le bien général de l'humanité; la troisième, les fVahJs eou-tumiers qui relèvent des mosquées. I. Les TVahfs des mosquées sont tous les biens meubles et immeubles qui y sont consacrés , soit pour leur entretien perpétuel, soit pour la subsistance des ministres qui les desservent. Tout fondateur est maître absolu de ses dispositions : il les règle à son gré, et pourvoit en même temps à l'administration économique de ces biens. Il défère cette administration , Tewliyeth > à un officier quelconque, sous le nom de Mutéivelly ou WelVy-Wakf\ qui signifie directeur , régisseur, administrateur. Mais il soumet sa régie à l'inspection , Nazareth ? d'un officier supérieur, sous le titre de Nazir, et c'est à lui que le Mutéwelly est obligé de rendre un compte exact de son administration tous les six mois ou une fois Tan. Cette règle est générale pour tous les temples Mahométans. Les mosquées Impériales sont sousl'inspec - CODE RELIGIEUX. "525 tion des premiers personnages de l'Empire. Mohammed II y Selim Iy Suleyman I, établirent à perpétuité pour JYazir des mosquées de leur fondation , le Grand-Vézir y et pour Mutéwelly y le Harém-Kéhayassy de son hôtel. Bayézid II et Ahmed I constituèrent aussi Naziràe leurs mosquées, le Mouphty y et pour Mutéwellys y l'un le premier intendant, Kéhaja y de ce chef des Oulémas y et l'autre le grand douanier de Constantinople. Tous les autres Souverains ont déféré l'ins-j>ection des mosquées et de leurs PVakfsy d'abord au Capou-Aghassyy ensuite au Kizlar-Agassy y dont le premier est le chef des eunuques blancs, et l'autre celui des eunuques noirs du Sérail. Anciennement le Capou-Aghassy étoit le grand-maître de la maison du Sultan , et le principal officier du palais. Attaché par état au service personnel de Sa Hautese, et fixé au Sérail à perpétuité, la plupart des Sultans ont préféré de lui confier la régie de leurs temples, plutôt qu'au Grand-Vézir et au Mouphty ? dans la vue de surveiller eux-mêmes l'administration de cet officier, et la garde des épargnes annuelles de* leurs Wakf s dans l'intérieur du Sérail. Mais les déprédations que se permirent quelques-uns de ces chefs des blancs et leurs substituts, leur firent perdre sous Mourad III cet office important. En 1691 ils furent remplacés par le Kizlar-Aghassy ; ce qui ajoutant à la considération de cet officier , premier gardien du Haretn de Sa Hautesse et de tous les princes du sang., lui donna irtsensïMemenit la prééminence sur le Capou-Aghassy lui-même. Mourad III le chargea aussi de l'administration générale de tous les fVakfs fondés par 6es aïeux, soit pour l'entretien du Kéàbé de la Mecque et du sépulcre du Prophète à Médine, soit pour la subsistance des pauvres de ces deux cités. Depuis cette époque, les Kizlar-Aghassys jouissent du titre éminent dè Ha-r nU'ùi'usclirschérijëinh Naziry } c'est-à-dire, inspecteurs des H'aifs des deux cités saintes. Les fondateurs des mosquées ordinaires et des simples Messdjids suivent absolument les mêmes règles dans leurs dispositions. Les uns nomment à perpétuité pour Ndzirs de leurs CODE RELIGIEUX. 527 temples et de leurs Wabfs, ou le Grand-Vézir, ou le Capou-Aghassy , ou l'un des premiers-' officiers de l'Etat , soit dans l'ordre civil, soit dans Tordre politique. Les autres y préposent les premiers personnages du corps des Oulémas, tels que le Mouphty^ les deux Caziaskers, Vïstamhol'FJendissy, etc. ou bien le magistrat ordinaire, Molla , Cady, Naïb, de la ville même où ils élèvent leurs temples. Mais la plupart de ces bienfaiteurs publics s'en tiennent, comme les Sultans , au Kizlar-Aghassy dii Sérail. Ils sont censés par-là confier l'inspection générale de leurs TV ah f s au Souverain lui-même , dans Ja personne, du premier officier de son palais , de celui qui possède l'entière confiance de son maître, et qui surveille la régie dé presque toutes les fondations pieuses de la maison souveraine. Quand à l'administration , Tewliyefh, chaque fondatenr est également le martre de la déférer à qui bon lui semble. Les uns en disposent en faveur des officiers subalternes; les autres les confient aux ministres mêmes des temples, Scheyhhs , Imams , etc. j d'autres 528 CODE RELIGIEUX enfin s'en rapportent au choix et à la volonté du Nazir lui-même. Toutes ces dispositions en général * soit des princes, soit des sujets, se font par acte juridique , dans un des tribunaux de l'Empire , parce que les magistrats chez tous les peuples Mahométans, remplissent en même temps les fonctions de notaire. Après cette première formalité, la charte, IVakfiyé, s'enregistre par un ordre exprès du Gouvernement, dans les bureaux de la *Defterdarie , Defterdar-Capoussy , qui est le département du ministre des finances. Des trente-trois bureaux qui le composent, trois sont uniquement destinés pour les Wakfs. Le premier , que l'on nomme Haremeinn - Mouhassebéssy - Calemy , embrasse ceux de toutes les mosquées impériales, comme aussi de tous les temples de Constantinople et des provinces Européennes : le second, Hareinelnn-Moucateâssy-Calémyy est pour les Wakf s de toutes les province;; d'Asie et d'Afrique : le troisième, que Von appel 1 e Kutschuk - Ewcaf- Mouhassébessy-Calémy > a principalement pour objet les hôtelleries, CODE RELIGIEUX. 5 du Kizlar-Aghassy , toujours déposée et gardée au Sérail, fait un objet de plusieurs millions. Dans des temps de détresse les Sultans en disposent pour subvenir aux besoins de l'Etat ; mais c'est toujours à titre d'emprunt, et sous l'obligation formelle du ministre des finances , qui s'engage au nom de l'Etat à'restitution , comme étant la dette la plus sacrée du Sultan et de l'Empire. Tous ces Wakf s augmentent chaque année, soit par des économies , soit par de nouvelles fondations, soit par des donations faites aux anciens établissemens , soit enfin par les ressources que présentent les Wàkfs coutu-miers , dont nous parlerons plus bas. IL Les Wahfs publics sont les fondations relatives au soulagement des pauvres et au bien . général de la nation. On a vu dans le texte , que c'étaient des hôtelleries , des fontaines, des puits, des cimetières , etc., auxquels il faut ajouter encore les hôpitaux , les écoles, les collèges, les bibliothèques publiques, les ponts , les oratoires élevés sur les grands chemins, les alimens fondés pour les pauvres, les rentes constituées au profit des différens ordres de Dcrivischs > les pensions distribuées aux ministres des mosquées ou aux parens et amis des fondateurs■", à la charge de prier et de réciter tous les jours tels ou tels chapitres du Courann pour le repos de leurs ames. Il en est d'autres , affectés aux réparations des châteaux , des forteresses, des places frontières , etc. Les fondateurs de ces Wahfsrqui ont pour objet la défense de l'Etat, sont ordinairement des Paschas , des Bey s , et autres officiers militaires. La fondation et la régie de ces biens sont réglées par les mêmes principes que ceux des mosquées. Les uns forment ces établissemens; les autres y ajoutent de nouveaux fonds, pour les augmenter, les entretenir, et empêcher leur dépérissement. Parmi ces bienfaiteurs, il en est qui font leur donation d une manière absolue , en la laissant à la disposition arbitraire de l'administrateur fondé du même établissement. D'autres , au contraire , règlent par avance l'emploi de ces nouveaux biens , et y préposent quelquefois un Mutéwelly particulier, pour les régir d'après les conditions qu'ils ont prescrites eux-mêmes. Comme tout fondateur est maître de disposer à son gré, et de la régie , et du produit de son Wakf, il a par conséquent le droit de réunir sur une même tête l'une et l'autre de ces prérogatives , l'administration du Wakf et la jouissance ou l'usufruit de sa fondation. Il a même la faculté, comme dans les Wakf s des mosquées, de se les réserver à lui seul, ou d'en disposer en faveur de sa femme , de ses enfans de l'un et de l'autre sexe* de ses 544 CODE RELIGIEUX, proches, ou de ses amis. Mais à la mort de ceux-ci, c'est-à-dire , en cas d'extinction des branches désignées par le fondateur , l'usufruit et les revenus dont ils jouissoient, sont toujours adjugés aux pauvres, sans que le magistrat du lieu , ni même les autres héritiers du donateur, aient jamais le droit d'en disposer autrement. II en est de même dans tous les cas où les dispositions et les intentions du fondateur sur l'emploi des produits de «on TVakj ne seroient pas énoncées d'une manière claire et positive. Dans les Wakfs constitués en termes généraux, au profit des pauvres , les enfans, les descendans, en un mot tous les parens pauvres du donateur ont la préférence sur les autres, chacun en raison du degré de consanguinité avec le fondateur du Wakf. On appelle Djiheth ou Véza'f toute disposition faite , soit à titre de pension, soit à titre d'aumône , en faveur de qui que ce soit ; et tous ceux qui en jouissent , portent la dénomination commune de Murtézica , qui signifie , participant aux bienfaits charitables. Ces Wakf s exigent, comme les premiers , la la nomination d'un administrateur , et un acte judiciaire , passé pardevant un magistrat, et enregistré au greffe de son tribunal; comme aussi un énoncé clair et précis de l'emploi de leurs produits. Au défaut de ces formalités , l'acte verbal du citoyen propriétaire du Wakj\ n'est censé légal et valide qu'autant qu'il le respecte lui-même. Il est toujours maître de le révoquer quand bon lui semble: mais s'il meurt sans cette rétractation, et que ses héritiers réclament l'objet comme une propriété libre, alors c'est au magistrat à prendre connoissance de l'affaire , à bien examiner toutes les clauses, à prononcer enfin sur la nature de l'objet contesté , en le déclarant, d'une manière positive , ou un bien libre , Muïkou un bien engagé, Walij\ sur-tout s'il s'appuie de l'opinion de l'Imam Ebu-Youssouph qui n'admet pas l'absolue nécessité de la nomination d'un administrateur. Dans le premier cas , l'objet est pleinement dévolu aux héritiers ; dans le second, ils sont déchus de leur droit pour jamais. En ces circonstances ,1e magistrat nomme provisoirement un Tome II. Mm Mutéwelly,^ autorisé par-là à Taire des oppositions juridiques à la demande des héritiers. Cependant une donation destituée des formalités requises , a toujours son eflèt, si le fondateur déclare que son Wakf aura lieu après sa mort,parce qu'alors elle est assimilée à une disposition testamentaire : elle ne peut cependant excéder le tiers de son hérédité, la loi, comme on Ta vu plus haut, n'accordant au citoyen la faculté de disposer de ses biens par testament que jusqu'à concurrence du tiers de sa succession. Mais si le Wakf est constitué par une personne atteinte d'une maladie mortelle , et qui décéderoit chargée de dettes , alors l'acte n'est pas valide. Au défaut d'autres biens, les créanciers ont droit d'exiger la nullité du Wakf, et de se l'approprier , en tout ou en partie , au prorata de-leurs créances. Tout Wakf exige d'ailleurs que ce qui en fait l'objet, soit dans la possession absolue du propriétaire, et par-là pleinement disponible. S'il se trouve en main tierce , l'acte de donation n'est jamais légal ni valide. Il faut donc que les dispositions du donateur soient, dans tous les eas, conformes à l'esprit, et au prononcé de la loi : alors elles deviennent irrévocables , et sont toujours respectées par l'autorité publique. Pour distinguer les administrateurs de ces fondations particulières , de ceux des mosquées, on appelle les premiers, TVakj-Muté-wellissys , administrateurs des TVàkjs j et les autres , Djéamy-Mutéivellissys , administrateurs des temples. Au défaut d'un inspecteur, Nazir, tout Mutéwelly quelconque est comptable de son administration envers le Molla ou juge ordinaire du lieu; tous les magistrats de PEmpire étant censés représenter le Souverain , administrateur suprême des biens publics , des fondations pieuses et de tous les établissemens qui ont pour objet le culte de Dieu ou le bien général de la nation. La loi exige de tous les Mutéwelly s en général la plus grande attention dans la régie de leurs'Wahfs. Elle les oblige à se conformer scrupuleusement à la volonté des fondateurs ; elle leur défend d'intervertir par des M m ij changemensla destination qu'ils en ont laite , d'employer à un objet les revenus consacrés à un autre , et d'appliquer à leur usage ou à celui de leur famille aucun immeuble du Wahfy même en s'obligeant de pa3^er le cens ou le loyer d'usage. Elle les rend même responsables du mauvais emploi qu'ils auroient fait des fonds appartenais aux fVahfs qui leur sont confiés, et de toutes les dépenses qui pourroient contrarier les intentions du fondateur. En cas de malversation dans leur régie, l'inspecteur , ou à son défaut le magistrat, a le droit de les destituer, et de les remplacer par d'autres plus fidèles et plus intègres. Le magistrat peut aussi , dans tous les cas où un JVakJseroit sans administrateur légitime, le régir lui-même , ou nommer provisoirement un Mutéwelly } jusqu'à ce que le Cazi-asher de Roumilie en ait autrement disposé. Ce magistrat qui , après le Mouphty, est le premier personnage du corps des Oulémas , et qui occupe le premier tribunal de l'Empire, aune inspection générale, Nazaréth-âmmèy sur tous les Wahfs , de quelque nature CODE RELIGIEUX. 549 qu'ils soient , du moment qu'ils vaquent par la mort des Mutéwelly s nommés et constitués par les fondateurs mêmes de ces pieux établissemens. On n'en excepte que les Wahfs affectés aux deux cités de l'Arabie , et dont l'administration est constamment dévolue, dans la vacance, au Kizlar-A'ghassjr du Sérail, qui, dans cette partie de son office, est censé représenter le Schérif de la Mecque. Généralement tous les biens Wahfs sont inaliénables, parce que la propriété est censée, aux termes de la loi , transportée à Dieu même, et que les hommes n'en ont que l'usufruit ou la jouissance. La vente, la cession , l'aliénation d'un Wahf est par conséquent invalide et nulle. Les Mutéwelly s n'ont que le droit de les échanger, en cas de besoin, contre d'autres immeubles , plus avantageux , ou pour le moins d'une valeur absolument égale. Ces échanges religieux , connus sous le nom ë?Isstibdal, sont cependant soumis par la législation civile à l'inspection de l'Etat, qui s'est réservé, il y a environ un siècle, le droit d'en prendre connoissance , et de les Mm iij autoriser par un Fcrman ou ordonnance du Souverain , dans la vue de prévenir toute malversation de la part des Mutéwelly s peu scrupuleux et peu fidèles. Quoique toute hypothèque constituée sur un Wakj %eî\i un acte invalide et nul, cependant si elle étoit antérieure à la fondation, le créancier hypothécaire n'en conserveroit pas moins ses droits sur cet immeuble ; et au cas que le fondateur n'eût aucun autre moyen de paver sa dette , la fondation seyanouiroit, et l'immeuble, toujours envisagé comme un bien profane , comme une propriété libre , ser-viroit à acquitter sa dette , soit de son vivant, soit à sa mort, sans que ni ses héritiers , ni même le Mutéwelly qu'il auroit nommé, pussent jamais y faire la moindre opposition légale. La loi qui proscrit l'usure et tout intérêt quelconque dans le commerce et clans l'ordre civil , se relâche cependant de sa rigueur en faveur de ces biens. Ainsi, lorsqu'un tVahf quelconque exige des réparations urgentes, qu'il ne se trouve pas dans les épargnes des deniers sufïisans pour y pourvoir , et qu'il n'est pas possible de s'en procurera titre gratuit, alors le Mutéwelly est autorisé à emprunter à intérêt les fonds nécessaires, jusqu'à un et demi sur dix , c'est-à-dire, quinze pour cent. Mais dans tous les cas , il faut au préalable obtenir le consentement formel du magistrat. Il est également permis aux Muté-ivellys de placer à intérêt les économies des Wahfs confiés à leur administration; et cet intérêt , Vwer-schery , est toujours de dix à quinze pour cent, jamais au-delà. Ils peuvent les employer encore en acquisitionsd'im-meubles, qui prennent également le nom de Wakf Mais dans ces cas, les premiers sont distingués sous le nom de Wakfâssl y qui signifie Wakf s principaux ; et les biens acquis de leurs revenus, sous celui de Wakj-fery , c'est-à-dire, Wahfs secondaires. Ceux-ci , dans un cas de besoin ou d'avantage réel et évident pour les premiers Wahfs constitués, peuvent être,sans aucun inconvénient, aliénés, convertis et vendus comme des biens absolu- -Mm Iv ment libres, attendu que la loi les envisage comme des fruits provenans des biens Wahfs, et non comme des propriétés constituées en Wahfs. Toute fondation ou donation faite par un Chrétien ou par un sujet non-Mahométan , est également reçue et respectée dans l'Empire , excepté celle qui seroit en faveur d'une église : encore la loi n'en rend-elle les actes invalides et nuls qu'en cas de réclamation formelle de la part des héritiers légitimes. Enfin tous les Wahfs de la première et seconde classes portent la dénomination de Wahfschery , Wahf légal, parce que leur fondation est dictée etsanctionnée par la législation religieuse même. On les distingue par-là de ceux de la troisième classe , que l'on appelle Walf-âdy , Wahfs coutumiers , comme n'étant autorisés que par la législation civile, ou l'autorité privée du Souverain et des Oulémas modernes. III. Les ^FVz/<-/5 coutumiers sont distingués par leur nature et par des caractères qui leur sont propres. Anciennement, lorsque les mos- CODE RELIGIEUX. 553 quées opulentes vouloient profiter de leurs épargnes, et grossir par des acquisitions la masse de leurs Wakf s , elles payoient seulement la moitié du prix de l'immeuble qu'elles achetaient, et en laissoient au vendeur la jouissance, pour un temps limité, moyennant un cens ou un loyer annuel. Les propriétaires se prêtoient à ces espèces de baux emphytéotiques, non-seulement par convenance , mais encore par un motif de dévotion : c'est que la vente, ou plutôt la cession de l'immeuble à la mosquée , se faisoit toujours comme une donation absolue , sous le nom sacré de Wakf. On en dressoit les contrats dans cet esprit; et le propriétaire de l'immeuble n'étoit censé en jouir que comme simple locataire, sous le titre de Mittessarif, qui signif/e occupant, possesseur , tenancier. On inséroit même dans les registres de la mosquée, que le propriétaire jouiroit un tel nombre d'années de l'immeuble déjà réputé Wakf t moyennant une somme censée payée une fois pour toutes , sons le nom (Xldjcar-maâdjéléy loyer antérieur , ou denier d'en- trée , et une autre encore qu'il s'obligeoit d'acquitter en effet tous les ans , sous celui cYld/ëar-muedjélé y cens ou loyer postérieur, toujours évalué au dixième de la rente annuelle Convenue entre les parties. A l'expiration du terme, le possesseur perdoit tous ses droits sur l'immeuble , qui entroit alors absolument dans le domaine de la mosquée. Si avant le terme convenu , le possesseur venoit à mourir, la mosquée, toujours fidèle à ses engagemens , tenoit compte des années restantes aux héritiers légitimes du décédé, ou à leur défaut, aux fermiers publics, Emin BeUh'ul-mals y qui sont autorisés à recueillir les successions des citoyens morts sans héritiers naturels. Comme en ce genre de TV ahfs les répara-tionsde l'immeubleétoient toujours à la charge de la mosquée , il naissoit de cette clause des disputes continuelles , sur-tout à l'époque où la mosquée prenoit possession de son nouveau JVakf. Les procès qu'entraînoient ces contestations, soit par le zèle peu éclairé des Mutéwelly s y soit par les mémoires peu fidèles des propriétaires ou de leurs héritiers, devinrent enfin si scandaleux dans le dernier siècle , que le Gouvernement établit de nouvelles lois au sujet de ces Wahj's. II y est ordonné que les mosquées acquerront désormais ces immeubles à un prix modique , que les réparations seront toujours à la charge des tenanciers, et que ceux-ci auront la jouissance de l'immeuble à perpétuité, eux et leurs enfans de l'un et l'autre sexe. D'après ces nouvelles dispositions , qui sont observées rigoureusement, voici les règles que l'on suit aujourd'hui relativement aux TVakfs cou{umiers. Le propriétaire d'un immeuble quelconque en lait cession à une mosquée à titre de JVakf\ pour une somme qui ne monte guère à plus de dix, douze ou quinze pour cent. Par exemple , pour un fonds de la valeur de cinquante mille livres , la mosquée paie cinq , six ou sept mille livres, et le propriétaire , qui continue à jouir de son immeuble, comme d'un don qu'il est censé tenir de la générosité de la mosquée, lui paffe annuellement une rente de soixante,quatre-vingt ou cent livres. Ce cens est positivement l'intérêt de la somme que paie la mosquée, et se règle par conséquent dans la même proportion. Au reste, les conventions sont libres, et absolument soumises à la volonté des parties. Il en résulte pour les fondateurs et les mosquées des avantages d'autant plus précieux , qu'ils s'écartent des lois ordinaires sur tous les objets relatifs à l'ordre civil. D'un côté , le fondateur y trouve ceux, i°. de rester maître de l'immeuble , et d'en tirer parti à sa volonté, soit en l'occupant lui-même, soit en le donnant à loyer; 2,0. en cas de dettes passives postérieurement contractées, d'être à l'abri des poursuites juridiques , parce que tout JVahf quelconque est un bien sacré sur lequel nul créancier ne peut former de prétentions ; 3°. de le transmettre à ses enfans de l'un et de l'autre sexe, qui partagent également ces hérédités; tandis que dans les propriétés libres, meubles ou immeubles, la loi en adjuge une portion aux femmes, et deux aux mâles; 40. dédis- CODE RELIGIEUX. 55j ' poser librement du même Wakf, en le cédant, ou en transportant ses droits sur une autre tête ; 5°. de le soustraire au retrait vicinal, Schéf'y , qu'exerce tout propriétaire sur l'immeuble contigu au sien, pour avoir, en cas de vente , la préférence sur tout autre acquéreur. Ces Wahfs ne sont pas moins avantageux aux mosquées, puisqu'ils leur assurent, i°. la constitution solide de leurs fonds, dont l'immeuble est garant ; 20, la décharge des réparations nécessaires, qui restent au compte du tenancier, intéressé d'ailleurs à maintenir l'immeuble en bon état ; 3°. le bénéfice des augmentations , décorations, embellissemens éventuels de l'immeuble, tous au profit du temple, sous le nom sacré de Téberru , qui veut dire, bénéfice gratuit; 40. les droits qui reviennent à la mosquée, lorsque le propriétaire dispose de l'immeuble en faveur d'un autre; et 5°. celui d'hériter de ces immeubles, qui sont pleinement dévolus à la mosquée, si le propriétaire meurt sans enfans. Ces deux derniers articles intéressent 558 CODE R E L I G I E U X. efsentiellement les mosquées. D abord les Wahfs ne peuvent être aliénés qu'avec la participation et l'agrément formel du Milieu ctl y. Lui seul est en droit de l'autoriser, soit par l'enregistrement de l'acte au greffe de la mosquée, soit en délivrant au nouvel acquéreur un écrit sous seing-privé, Témessuh, où l'aliénation est toujours indiquée sous le nom de cession, Fcraghath , sans qu*on y parle de la somme convenue entre les parties contractantes. Les héritiers légitimes, et les acquéreurs , quels qu'ils soient , jouissent également de ce droit de cession. Mille circonstances nécessitent souvent la vente de ces immeubles ; et à chaque mutation la mosquée retire des bénéfices assez considérables , sous le nom de Ressm-Feragliath , qui répond à lods et ventes. Ces bénéfices se renouvellent même toutes les fois que le possesseur de l'immeuble l'engage par hypothèque, ce qui n'est permis que pour les seuls Wahfs coutumiers. Dans ces cas, rengagement et la libération du JVahf se font par l'autorité du Mutéirciir j et sous le simple nom de Feraghath ^ la manière de procéder des administrateurs des mosquées étant uni forme dans toutes, les opérations relatives à ces biens. Les seuls magistrats, Mujeltischs,pu à leur défaut les juges ordinaires, examinent, en cas de litige, la nature de ces cessions, en distinguant celles qui sont absolues de celles qui ne le sont pas. Ils caractérisent les premières sous le nom de Féragh-Caiy et les autres sous celui de Feragh-uil-Wéfa, D'après ce prononcé, les Mutéivellys renouvellent ou non l'acte de reconnoissance de ces propriétés en faveur de celui dont le droit est reconnu. Quant à l'hérédité, les mosquées en retirent un avantage plus considérable encore. Elles héritent de tout immeuble dont le propriétaire, quel qu'il soit, ne laisse pas à sa mort des enfans de la première génération. Le Wakf est alors dévolu à la mosquée comme un bien vaquant, MaJihloul, à l'exclusion de tous les autres héritiers naturels, même des petits-fils. La raison en est que le droit de succession de l'enfant qui décéderoit du vivant de son père ou de sa mère, sur la tête desquels seroit le Wahfs, n'est pas transmissible à ses descendans. Si même un enfant meurt sans postérité , après le père ou la mère propriétaire de l'immeuble , sa portion échoit également à la mosquée , à l'exclusion de ses frères et sœurs, cohéritiers du même immeuble. Cette exclusion s'étend jusqu'aux enfans qui seraient en pays étranger, conformément à la loi canonique, qui prive du droit de succession, dans les propriétés libres, rout héritier qui se trouverait hors de l'Empire. La mosquée exerce également son droit d'hérédité s*ur tous les Wahfs dont le propriétaire qui n'a pas d'enfans auroit disposé en faveur d'un autre, pendant sa maladie. Cette donation ne peut être valide que dans le cas où lè malade recouvrerait sa santé : s'il meurt, la mosquée seule hérite de ces biens. Une infinité de ces immeubles passent donc aux mosquées, soit par la négligence des propriétaires à les assurer , au défaut d'enfans, à leurs plus proches héritiers, au moyen des cessions formelles ; soit par les ravages ravages presque continuels de la peste dans plusieurs provinces de l'Empire, mais sur-tout à Constantinople y où assez souvent des famil* les entières sont enlevées dans l'espace de huit ou quinze jours, par ce fléau destructeur, sans qu'aucun des héritiers légitimes ait, dans ces momens de désolation, le temps ou la présence d'esprit de rien statuer sur les Wakf s de la famille. Nonobstant le préjudice qui résulte de la nature de ces fondations pour les parens et les héritiers éloignés , les propriétaires se laissent éblouir par les avantages dont ils jouissent personnellement dans ces aliénations. Comme la loi les accorde indistinctement aux Musulmans et aux non-Musulmans, les citoyens de toute nation et de toute religion s'y laissent entraîner; de sorte qu'aujourd'hui une grande partie des immeubles se trouvent engagés envers les temples Mahométans. On conçoit aisément combien cet article contribue à augmenter vd'un côté les possessions et les revenus de* mosquées, de l'autre les for- j tunes particulières de leurs administrateurs , Tome II. Nn par les droits qui leur sont attribués, sans parler des gains illicites qu'ils font quelquefois dans l'exercice de leurs fonctions. Ordinairement la moitié de ces profits est réservée au Mutéwelly. Le quart se partage entre tous les commis, Kiaùbs '> de son bureau. On cècle un huitième au greffier , Rouznamédjy , et le huitième restant aux Djabys, collecteurs ordinaires de tous les revenus de la mosquée. L'un des motifs qui engagent les citoyens à aliéner leurs immeubles, est la crainte des incendies, si fréquens dans un pays où toutes les maisons sont bâties en bois. Dans ces accidens , le propriétaire, outre la somme qu'il a déjà perçue lors de la conversion de l'immeuble en Wakf , a encore le droit de réduire le cens annuel auquel il étoit tenu envers la mosquée. Cette réduction se règle sur la valeur du terrain, qui , quoique incendié, ne perd jamais son caractère de WakJ : on en fait une estimation; et dès-lors il prend le nom à'Arsa-y-Moucaléd j terrain estimé , ou Moucatéâ-y-Wakf, Wakf évalué ; et la nouvelle redevance, celui de Moucatéâ-y-Arsa, ou Edjhr-Missl, c'est-à-dire, cens du terrain, cens comparatif ou de réduction. Le possesseur, toujours maître de disposer à son gré du terrain, n'a cependant pas la liberté d'y rebâtir sans l'agrément formel de la mosquée, et sans un écrit authentique du Mutéwelly. Manque-t-il à cette formalité , la mosquée a le droit de faire démolir l'édifice, ou de se l'approprier absolument, eût-il été élevé sous l'autorité et avec la permission expresse du magistrat du lieu. Elle ne seroit, en outre, obligée à aucune sorte d'indemnité, à moins que le propriétaire ne mourût insolvable : alors cette indemnité en faveur des créanciers est fixée, non sur la valeur de l'immeuble, mais sur l'estimation de ses matériaux, l'édifice supposé entièrement démoli. La rigueur de ces lois oblige donc le possesseur du terrain à n'en jamais disposer sans l'ordre et la permission expresse de la mosquée. Ces formalités remplies, il est le maître de construire son bâtiment ,ou à titre de Wakf, ou à titre de propriété libre, Mulk 564 CODE RELIGIEUX. ( parce qu'il est bien permis d'élever un édifice de propriété libre sur un terrain Wakf} mais jamais un bâtiment Wakfsur un terrain libre ). Dans le premier cas, il arrête ses conditions avec la mosquée, reçoit un retour en argent , se soumet à un cens annuel proportionné à la somme qu'il touche, et constitue ainsi le nouveau bâtiment sur le pied de l'ancien. Dans le second, l'édifice devient une propriété absolue et libre de tout engagement envers la mosquée : elle se transmet aux héritiers les plus éloignés du propriétaire , conformément à la loi de succession sur les biens libres ; elle se vend même sans la participation de la mosquée, sans Témessuk du Mutéwelly , mais par contrat, Hœudjeth > passé en présence du magistrat, comme cela se pratique dans l'Empire pour tous les. biens libres. Le propriétaire, ainsi que l'héritier ou l'acquéreur, n'ont jamais d'autre charge envers la mosquée, que le cens annuel imposé sur le terrain, toujours réputé Wakf Ce cens fait un droit tellement inaliénable, que dans le cas même où le possesseur de l'immeuble voudrait le convertir en Wakf légal ou coutumier, au profit d'une autre mosquée, celle-ci n'en seroit pas moins tenue au cens du terrain à l'égard de la première. Le paiement de cette redevance annuelle pour tout /^//'quelconque, exige même la plus grande exactitude de la part du tenancier : s'il le néglige trois ans de suite, sur-tout pour cause d'absence , la mosquée a le droit de s'approprier l'immeuble, et d'en disposer comme il lui plaît. Ces lois relatives aux terrains des Wahfs incendiés, sont absolument les mêmes pour toutes les terres vaines et vagues que les Sultans ont concédées à différentes mosquées, sous le même nom d'Arsa-y-Moucaléd. Ces mosquées ne jouissent aussi que d'un cens annuel, mais à cet "avantage elles joignent les droits de culture, de construction , de transport, de cession, toutes les fois que les propriétaires veulent en tirer parti eux-mêmes, ou en disposer en faveur d'un autre. Autrefois le cens annuel de ces terres n'étoit que de quatre aspres pour quarante pics carrés; 566 CODE RELIGIEUX, mesure crue l'on appelle Deunum. Dans le dernier siècle on le porta h huit aspres pour les terres possédées par les Musulmans, et à dix pour celles qui appartenoient à des non-Musulmans. Le terrain du faubourg de Pcra à Constantinople > qui présentoit un vaste vignoble, lorsque Mohammed II fit la conquête de cette capitale , fut cédé , à titre à'Arsay Moueatéâ, par Bayézid II, à la mosquée de sa fondation. Le cens qu'elle en retire, fait annuellement un objet de douze mille cinq cents piastres, ou environ vingt-huit mille livres tournois. Le sol sur lequel est bâti l'hôtel des ministres de Suède, et qui appartient en propriété à la couronne, fait partie de ce terrain, et paie tous les ans à la même mosquée un cens, Moucatéâ-y-Arsa^de cent quatre-vingts aspres, qui font environ trois livres dix sols. Tels sont les caractères de toutes les fondations Musulmanes, et l'esprit qui les dirige. On trouve l'explication des lois qui les concernent dans les collections des Fethwas , sur-tout dans celle du Mouphty Behhdjé Abd'ullah Efendy. Par cet exposé de leur état actuel et des règles de leur administra* tion, on voit qu'elles embrassent une grande partie des terres, des immeubles, des richesses de l'Empire; qu'une infinité de citoyens en jouissent également ; que leur administration est entre les mains des officiers de tous les ordres de l'Etat; et que les ministres des temples, rangés dans la classe des simples pensionnés , forment le dernier grade des Oulémas, comme on l'indiquera dans le Discours général qui termine ce premier Code. FIN DU SECOND VOL L1 ME. • TABLE DES CHAPITRES CONTENUS DANS CE VOLUME, PARTIE RITUELLE. L I V R,E Ier. Des Purifications, page 7 Ç h ap. Ier. Des Purifications en général , ibid. Art. ier. Du Lavage , 8 Art. 2. De l'Ablution , 14 Art. 3. De la Lotion, »5 C h ap, II. Des Eaux pures ou impures , et par-là même propres ou non propres aux purifications, 29 Ch ap, III. De l'état d'impureté légale de» femmes dans leurs infirmités périodiques, ainsi que dans leurs couches, 38 Ch ap. IV. De l'impureté continuelle de l'homme et de la femme, par l'effet de différentes incommodités naturelles, 45 C h a p. V. Des Purifications pulvérales, 46 Observations, 02 des chapitres; 569 livre II. De la Prière, page 69 c h a p. Ier. De la Prière en général, 70 Art. ier. De la Prière Dominicale, Nama\ , ibid. Art. 2. Des quatre conditions requises pour la Prière Namaç, 71 Art. 3. De Fesprit et de l'essence de la Prière Nama^ y jS Observations, 90 Chap. II. De la Prière dans les cinq heures canoniques, 99 Art. 1er. De 1'£{jm, ou annonce des heures canoniques , 108 Art. 2. De Vlkameth, 116 Art. 3. De la PrièreNama^en commun , 117 Art. 4. Des souillures qui peuvent survenir au milieu de la prière, et qu exigent le renouvellement des purifications , 127 Art. 5. De tout ce qui invalide la Prière , et en exige le renouvellement, i3o Art. 6. Des souillures qui surviennent au milieu du Nama^y et qui exigent le renouvellement, soit des purifications y soit de la prière, i35 Art. 7. De tout ce qui est blâmable dans la prière, i36 Art. 8. Des Prosternations satisfactoires , 141 5-jO table Art. 9. De la Prière Dominicale des voyageurs , page 141 Art. 10. De la Prière Dominicale des malades, i5o Art. 11. De la Prière satisfactoire, i53 Observations, i58 Chap. III. De la Prière SaUth-witr avant l'aurore , 104 Observations, 186 Chap. IV. De la Prière publique des vendredis, 192 Observations, 200 Chap. V. ' De l'Oraison Paschale dans les deux fêtes de Beyram , 222 Observations, 227 Chap. VI. De la Prière Teruwihh pendant les trente nuits du Ramazann, z32 Observations, 235 Çll AV. VIL De la Prière à l'occasion des écl ip- ses de soleil ou de lune, 236 Chap. VIII. De la Prière dans les disettes . d'eau, 239 Observations, 244 Chap. IX. De la Prière des militaires au moment du combat, 253 Observations, zâj Chap. X. Des Prières à faire dans le Kéabè de la Mecque, 2.65 Observations, 267 des chapitres. 571 Chap. XI. De différentes Prières de dévotion, pages 68 Chap. XII. Des Prières surérogatoires, 270 Chap. XIII. Des Vœux religieux , 273 Chap. XIV. Des Prosternations auxquelles tout Musulman est tenu lorsqu'il lit, récite ou entend différens passages du Courann, 2^3 Chap. XV. Du Courann à réciter par cœur, 278 Observations, 279 Chap. XVI. De l'attention du Musulman à ne pas suivre ]es pratiques des non-Musulmans, 282 Observations. 283 Chap. XVII. De la Circoncision , 285 Observations, 286 Chap. XVIII. Des Prières pour les agonisans et les morts , 296 Art. ier. Delà Lotion funéraire, 299 A r t. 2. Des Linceuls , 3o3 A r t. 3. De la Prière funèbre , 3o6 Art. 4. De la Sépulture, 3i3 Art. 5. Des Obsèques des Martyrs , 319 Observations, 3s5 Discours sur quelques autres Pratiques qui entrent dans le culte public des Mahométans, 351 gpg T A B L K §. Ier. De diverses Prières de surérogation , page 35i II. Des Prêches dans les mosquées , 369 III. Des sept Nuits saintes , 3y3 IV. De la vénérât ion des Mahométans pour. les Reliques du Prophète, 378 LIVRE III, De la Dîme Aumônière, 403 Chap. Ier. De la Dîme en général, ibid. Art. i«. De la Dime sur les Chameaux, 412 Art. 2. De la Dîme sur les Bœufs, 414 Art. 3. De la Dime sur les Moutons , 414 Art. 4. De la Dîme sur les Chevaux , 415 Art. 5. De la Dîme sur l'Or , l'Argent et les Effets mobiliers, 416 Observations, 419 Chap. II. De l'Aumône Paschale, 423 Chap. III. Du Sacrifice Paschal, Observations, 432 Chap. IV. Des donations ou Fondations pieuses, 437 Chap. V. Des Temples, 443 Observations, 447 §. Ier. Des Mosquées, ibid. i°. Des Mosquées Impériales , 448 20. Des Mosquées ordinaires , 453 3°. Des simples Messdjids , 454 §. II. Des Édifices qui entourent les mosquées , 459 DES CHAPITRES. 5j3 i°. Des Imareth ou Hôtelleries, pag,46o 2°. Des Hôpitaux pour les malades, 461 3°. Des Hôpitaux pour les fous, 463 40. Des Ecoles , 464 5°. Des Collèges, ibid. 6°. Des Bibliothèques publiques , 487 70. Des Chapelles sépulcrales où reposent les cendres des Sultans, etc. 5oo §. HT. Des jTakfs ou Fondations. S23 i°. Des fl^akfs des mosquées, 524 20. Des A^akfs publics, 542 3°. Des ZPrakfs coutumiers , 55z vin de la table du second volume. & M • >u • • Mi! • • • * • • • 4L • • M • ■ » • * , • • • • • • • • • •* • • • • • ♦ • • '•: '+s f* • • g* i • * • •: '0 % :: • ■k- • 1^1 m] i* * .* • • :J « :: • • • m . m • | :• * ■■*. • * • • * • • — • • • • • :: i : ^ : • • • * • • • M • • • NI • • • <<(:• • v •:V; - • • '. m • • * ! • *. * •* ♦ *. - * • m • • « # • ïm : • • é • « • • • • • *• • • • • • • • • • ■ 'M