Ana Zwitter Vitez Université de Ljubljana* UDK 811.163.6'42:808.56:801.6 principes narratifs dans l'échange oral spontané et leurs spécificités en slovène et en français 0 introduction Chaque manifestation linguistique est marquée par des éléments spécifiques, propres à la situation de communication dans laquelle elle est produite, mais l'émetteur du message a toujours et sans exception l'ambition de former un texte cohérent pour atteindre l'effet optimal auprès de l'adressé. Dans la situation de l'échange oral spontané, l'efficacité de la manifestation verbale du locuteur ne dépend pas seulement de la cohérence formelle de son message. En effet, lors de son intervention verbale, il doit veiller à ce qu'il utilise des moyens stratégiques complexes pour que celui auquel le message est adressé le comprenne et lui laisse garder son tour de parole. Dans la présente communication, nous allons essayer d'étudier en détail certaines stratégies universelles de la communication orale spontanée et de montrer certains moyens spécifiques de la narration spontanée en slovène dont le locuteur peut se servir pour atteindre le but communicatif de son récit. 1 DE L'ANALYSE TExtuelle À LA NARRATION ORALE SPONTANÉE La pragmatique et l'analyse textuelle de R. A. de Beaugrande et W. U. Dressler (1992 : 11-19) mettent un accent particulier sur les différents critères discursifs contribuant à l'efficacité du texte. Elles mettent un accent important sur certains critères discursifs, indispensables à l'efficacité de textes, comme les rapports grammaticaux adéquats, la cohérence du contenu des unités du texte (temporelle, causale et conséquencielle, contextuelle), l'intention de l'émetteur du message, la disposition de l'adressé et le degré d'informativité. Les études narratives montrent que l'émetteur du message se sert de procédés narratifs spécifiques comme par exemple de temps verbaux du passé et de la troisième personne (Benveniste 1966 : 237-250). Les études récentes de la narration spontanée (Vion, Colas 2000 : 645) ont également prouvé que la narration est majoritairement marquée par des connecteurs marquant principalement la succession temporelle des événements, parmi lesquels la forme la plus attestée est « après ». Pourtant, les critères d'analyse de toutes ces études sont majoritairement élaborés pour les textes écrits. A l'aide de la méthodologie de Morel et Danon-Boileau (1998), on va essayer d'analyser une narration orale et de montrer que pour structurer sa narration, le narrateur ne se sert pas seulement de moyens narratifs discursifs. Les stratégies narratives dans un récit oral spontané se manifestent dans une mesure importante * Adresse de l'auteur : Filozofska fakulteta, Oddelek za romanske jezike in književnosti, Aškerčeva 2, 1000 Ljubljana, Slovénie. Mél: ana.zwitter@guest.arnes.si à travers la prosodie de son discours qui joue ainsi un rôle important quant à la structuration des unités de l'oral. 2 CADRE MÉTHODOLOGIQUE Les hypothèses théoriques qu'on a adoptées ont été élaborées par l'équipe EA 1483 Recherche sur le français contemporain (Sorbonne Nouvelle - Paris 3) sous la direction de M. A. Morel. Pour la présente analyse, on ne prendra que l'hypothèse centrale développée par Morel et Danon-Boileau (1998) que chacun des quatre indices intonatifs présente une valeur iconique propre et contribue ainsi à la stratégie parlée du locuteur : La valeur de la hauteur mélodique permet d'attirer l'attention sur un fragment du discours. La montée mélodique indique ce que l'énonciateur juge négociable, argumentable dans son échange avec l'autre et veut atteindre un consensus sur ce point-là. La chute mélodique indique à l'inverse un repli sur soi et un désintérêt relatif pour ce que l'autre peut penser de ce qui est dit. L'intensité, en revanche, indique la façon dont le locuteur gère son tour de parole. S'il veut prendre la parole, l'intensité monte, s'il la conserve elle se stabilise, s'il l'abandonne ou s'il considère ce qu'il dit comme un à côté de son discours, elle chute. La durée relative d'une syllabe indique l'état de la formulation des idées que le locuteur s'apprête à exposer. Quand il ne sait comment poursuivre, la durée de la syllabe qu'il profère s'allonge, quand le discours se poursuit simplement, la syllabe conserve la durée des précédentes, et enfin, quand ce qui est dit est l'expression à voix haute d'un monologue intérieur, le débit s'accélère. La pause silencieuse permet d'homogénéiser ce qui vient d'être dit ou d'annuler une opération qui a pu être ébauchée, mais elle aide aussi à mettre en relief le discours qui va suivre. 3 HYPOTHÈSES La première hypothèse1 est basée autour du problème du moment physique de l'énonciation et de la complexité des moyens utilisés lors de la production d'un message oral spontané pour atteindre un but communicatif. Ce problème, étudié dans la situation de l'échange oral spontané, a rendu l'unité linguistique traditionnelle, la phrase, inopérante. Malgré cet imbroglio apparent, après avoir vérifié les valeurs des indices prosodiques et leur interaction, nous allons essayer de montrer que c'est grâce à la prosodie et son rôle stratégique dans le discours qu'on peut délimiter l'unité de l'oral liée au rapport du producteur du message envers l'adressé et envers ce qui est dit. La deuxième hypothèse, tout en restant dans le cadre du problème de l'unité de l'oral et de ses parties constitutives, se concentre plus précisément à une caractéristique particulière de l'oral, la redondance. Nous allons montrer sur un 1 Cette hypothèse ne représente que l'application des hypothèses de M. A. Morel et L. Danon -Boileau à la langue slovène pour montrer le caractère universel du role stratégique de la prosodie dans le discours. exemple de notre corpus que dans la narration spontanée, les segments qui dans un texte écrit auraient pu paraître redondants se voient attribuer un rôle restitué dans le constituant suivant de l'unité de l'oral. 4 CORPUS L'enregistrement, fait en octobre 2003, présente deux locutrices qui se connaissent très bien. Dans le segment exploité pour cette analyse, la narratrice, âgée de 75 ans, raconte à une jeune fille comment un homme, un jour dans la rue, a voulu lui arracher le sac. N1 (1) pa zagrab torbo veš pa takole cukne {} (2) jst sem// {} tok sem držala torbo N2 da je nisem spustila {} (3) ne {} (4) ampak e {} sem kar tekla {} (5) ene tri korake N3 tekla {} (6) je on sp// {} m ni spustu ampak sam tok je// on se je ustavu { }2 5 ANALYSE Nous allons essayer de voir comment fonctionnent les valeurs stratégiques des indices prosodiques et quelles unités de l'oral on pourrait en délimiter. Puisqu'il s'agit d'un discours narratif, la valeur mélodique semble y jouer un rôle particulièrement important parce que, selon l'hypothèse de départ, elle reflète le désir d'attirer l'attention de l'autre. Le premier segment analysé pa zagrab torbo veš pa takole cukne consiste de deux propositions coordonnées mais qui comportent une seule modulation prosodique qui concerne la montée de la hauteur mélodique à la fin. La montée mélodique à la dernière syllabe témoigne du désir de garder l'attention de l'adressée, et une forte intensité indique la volonté de la locutrice de garder la parole. Le segment jst sem {}, même s'il n'est pas terminé, est suivi par le troisième segment prosodique tok sem držala torbo da je nisem spustila sans que la continuité de la narration soit entravée. L'allongement de 32 cs accompagné par le degré élevé de l'intensité témoigne du désir de garder la parole même si la locutrice ne sait pas encore comment continuer. Une fois le problème de formulation surmonté, la locutrice recommence par un débit rapide donné en intensité toujours forte et une mélodie montante ; la locutrice a donc l'intention de continuer son récit. 2 Le corpus est divisé en 6 segments (selon le critère de cohérence syntaxique et prosodique ; la fin de chaque segment étant toujours marqué par une forte montée ou descente mélodique). Dans l'analyse, on se réfère chaque fois à des segments numérotés ci-dessous auxquels correspond la traduction suivante, maladroite à cause de sa fidélité à la structure syntaxique et discursive du récit : (1) et il prend le sac tu sais (] (2) moi j'ai// (] autant je tenais le sac que je ne l'ai pas lâché (] (3) hein (4) mais euh (] j'ai simplement couru (] (5) environ trois pas j'ai couru (6) il a lâ// m il n'a pas lâché mais just autant il a// il s'est arrêté (] Le marqueur discursif ne est donné en intonation montante, ce qui lui attribue le rôle de lier les segments précédent et suivant en gardant l'attention de l'adressée pendant que la locutrice formule la construction suivante. Même si le marqueur ampak (mais) représente la catégorie morphologique de conjonction adversaire, sa fonction discursive n'est pas celle d'opposition mais simplement d'un moyen dont la locutrice se sert pour lier son discours à ce qu'elle vient de dire. Il est donné en intonation montante et suivi de euh d'hésitation allongé, ce qui veut dire que la locutrice veille à garder l'attention de sa colocutrice, même si elle n'a pas encore préparé la formulation suivante. La deuxième partie du segment analysé, sem kar tekla, est donnée en mélodie descendante, il en va de même pour l'intensité. La locutrice ne manifeste plus son désir d'attirer l'attention ni de garder la parole, ce qui veut dire que c'est le moment où sa colocutrice aurait pu intervenir. Après une pause de 16 cs, la locutrice continue son discours par un segment qui, en tant qu'une répétition élaborée de ce qui vient d'être dit, n'est que peu informatif : ene tri korake tekla. Pourtant, du point de vue prosodique, on peut constater une grande différence : si le segment précédent a été donné en mélodie basse et descendante, la fin de celui-ci est modulée de mélodie montante. Cela veut dire que la locutrice tient à ce que son interlocutrice imagine bien les circonstances de son aventure : la fonction du présent segment n'est cette fois-ci pas celle de conclure une unité mais de représenter un cadre précis à ce qui suit. Le début du segment je on sp// {} m ni spustu ampak sam tok je// on se je ustavu {} est marqué par une rupture. après une pause de 36 cs, la locutrice fait une autocorrection en niant la construction probablement ébauchée je on spustu. vu que la locutrice veut atteindre le consensus sur la construction opposée à celle qu'elle a fait démarrer au départ, il n'est pas surprenant que le mot de négation ni est fortement modulé au niveau prosodique. La proposition ampak sam tok je//, légèrement gradée au niveau mélodique, finit également par une rupture discursive. La dernière partie du segment, on se je ustavu, se caractérise par une montée mélodique sur le pronom on, suit une descente de la mélodie ainsi que de l'intensité. Cela veut dire, pour la deuxième fois dans l'extrait analysé, que la locutrice ne tient ni d'attirer l'attention de l'adressée ni de garder la parole. 5.1 Synthèse Une brève synthèse de caractéristiques prosodiques de segments analysés est donnée dans le tableau (1) ci-dessous3 : Narration I M D (1) pa zagrab torbo veš pa takole cukne {} ++ t = (2) jst sem// {} tok sem držala torbo da je nisem spustila {} ++ t = (3) ne {} ++ t + (4) ampak e {} sem kar tekla {} - i = (5) ene tri korake tekla {} + t = (6) je on sp// {} m ni spustu ampak sam tok je// on se je ustavu {} - i = L'intensité avant les pauses à la fin des segments reste très forte ou forte sauf sur les segments 4 et 6 (voir 5.2). La hauteur tonale garde majoritairement un contour montant sauf sur les segments 4 et 6 (voir 5.2). La durée syllabique ne varie pas beaucoup sauf sur le marqueur discursif allongé ne (voir 5.2). 5.2 Vérification des hypothèses Notre première hypothèse porte sur la délimitation de l'unité de base dans la conversation spontanée. Une preuve que les unités de la syntaxe traditionnelle ne peuvent pas servir à la description de l'oral est fournie dès qu'on essaie d'y compter les phrases et leurs propositions (e. g. combien de phrases ou de propositions représente le segment (6) je on sp//{} m ni spustu ampak sam tok je// on se je ustavu []?). Pourtant, si on réétudie en détail les valeurs de base des indices prosodiques (intensité pour prendre la parole, mélodie pour attirer l'attention, durée pour le travail de formulation), on se rend compte aussi du fait que ces indices interagissent constamment entre eux. Parmi les combinaisons des indices prosodiques, il y en a deux qui semblent particulièrement intéressantes : jusqu'au moment où le locuteur manifeste un désir de garder la parole et l'attention de celui auquel il s'adresse, l'intensité et la mélodie de son discours garderont un haut niveau. cela témoigne d'une liaison stratégique entre les éléments syntaxiquement indépendants, ce qui arrive à la fin des segments (1), (2), (3) et (5). Mais une fois que le locuteur ne fait plus attention à ce que son interlocuteur ne lui prenne la parole ou au degré du consensus sur l'objet du discours, il va baisser simultanément l'intensité et la mélodie. c'est la preuve que le locuteur juge qu'une unité sémantique et stratégique de son discours est close. ce phénomène est observable deux fois dans le corpus analysé, ce qui mène à la conclusion que les segments (4) et (6) représentent les fins de deux unités de base de l'oral. On peut en conclure que l'un des rôles les plus importants de la prosodie dans le discurs est celui de délimiter les frontières entre les unités de l'oral. Si l'hypothèse de base permet de délimiter l'indispensable unité de base de l'oral spontané, une analyse ultérieure pointe un autre phénomène, indissociablement lié à l'analyse de la narration spontanée. Puisque l'une des caractéristiques principales de la narration spontanée est l'absence d'un texte écrit préparé en avance, on peut y observer aussi tous les phénomènes liés au manque du temps, comme la reformulation et la redondance. Une fois que nous avons délimité l'unité de base liée aux stratégies communicatives du locuteur, nous pouvons étudier un segment répété deux fois de suite (la deuxième fois comportant une précision de plus) mais différemment du 3 Conventions de transcription pour les indices prosodiques : I - Intensité : ++ - très forte, + - assez forte, - - faible. M- Mélodie : t - montante, - - descendante. D- Durée : + - allongée. = - constante, - . point de vue prosodique. C'est le cas des segments (4) ampak e {} sem kar tekla {} et (5) ene tri korake tekla {}. Un exemple fictif, susceptible de figurer dans une narration écrite, suffit de montrer qu'une suite de ces deux unités auraient été quasiment impossible à l'écrit : ... ampak sem tekla kakšne tri korake (mais j'ai simplement couru environ trois pas). Quelle est donc la raison pour laquelle la locutrice se sert de deux énoncés indépendants si elle avait pu l'énoncer d'une manière plus rationnelle? L'une des raisons générales de la décondensation de l'oral (Morel, Danon-Boileau 1998 : 21) est incontestablement le manque du temps. Pourtant, le premier segment ne semble pas être insuffisamment formulé, ce qui prouve que la locutrice ne se trouve pas dans une situation de manque temporel. Si on reprend la méthodologie de délimitation d'unités narratives, on peut remarquer que le segment 4) ampak e {} sem kar tekla, représente la dernière étape après une suite d'événements et, donné en intensité et mélodie descendantes, a ainsi la fonction de clore l'unité narrative. De l'autre côté, le segment 5) ene tri korake tekla {}, caractérisé par une forte intensité et la mélodie montante, communique que la locutrice veut garder la parole et l'attention de sa colocutrice, ce qui veut dire qu'il représente un cadre auquel les segments suivants vont se lier. Les deux segments sont donc différents du point de vue de leur fonction discursive qui dépend dans une large mesure de la prosodie. 6 CONCLUSION Malgré l'extrême complexité des moyens linguistiques qui construisent la cohérence de l'oral, on peut conclure que la prosodie joue un rôle très important en tant que moyen stratégique délimitant l'unité de base de l'oral en français et en slovène. Ainsi, le locuteur assure la cohérence à l'interieur d'une même unité de l'oral par l'intensité et la mélodie montantes, la fin de l'unité se caractérise par la chute conjointe de ces deux indices. Pourtant, même si la méthodologie élaborée pour le français est applicable aussi à la langue slovène, il faut tenir compte de quelques modifications dues aux différences systémiques entre ces deux langues. Parmi celles-ci, la plus importante semble être celle entre l'accent lexical fixe en français et l'accent lexical mobile en slovène. C'est pourquoi la montée et la chute des deux indices prosodiques s'opèrent en slovène sur la dernière syllabe accentuée avant la pause et non à la fin de l'unité accentuelle comme en français. L'analyse montre que la récurrence d'un segment dans le discours spontané n'est ni aléatoire ni redondante. En effet, si sa première occurrence en intensité et mélodie descendantes fonctionne comme une étape dans la suite d'événements précis au passé, sa récurrence assume un rôle restitué grâce à la montée des deux indices prosodiques. La prosodie fonctionne alors en tant que moyen rhétorique important qui contribue à la structuration logique du discours, nécessaire pour la compréhension de la part de l'adressé, et indispensable au travail de formulation du locuteur. Contours mélodiques (Segments 1 et 2) Contours mélodiques (segments 2, 3, 4 et 5) Contours mélodiques (segments 5 et 6) Bibliographie Beaugrande, Robert Alain de/Wolfgang Ulrich Dressler (1992) Besediloslovje. Trad. Aleksandra Derganc et Tjaša Miklič. Ljubljana : Park. Benveniste, Émile (1988) Problemi splošne lingvistike I. Ljubljana : Studia humanitatis. Kerbrat-Orecchioni, Catherine (1999) L'énonciation. Paris : Armand Colin. Morel, Mary-Annick/Laurent Danon-Boileau (1998) Grammaire de l'intonation. Paris: Ophrys. Tisset, Carole (2000) Analyse linguistique de la narration. Paris : Sedes. Vion, Monique/Annie Colas (2000) « L'emploi des connecteurs en français : contraintes cognitives et développement des compétences narratives. » [6ème Congrès international de l'ISAPL, Caen.] http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/24/15/27/PDF/1321.pdf Vitez, Primož/Ana Zwitter Vitez (2004) « Problem prozodične analize spontanega govora. » Jezik in slovstvo XLIX/6, 3-24. Povzetek NARATIVNA PRAVILA SPONTANE GOVORNE IZMENJAVE IN NJIHOVE SPECIFIKE V SLOVENŠČINI IN FRANCOŠČINI Vsako jezikovno manifestacijo zaznamujejo določene značilnosti glede na različne dejavnike komunikacijske situacije, tvorec sporočila pa mora glede na svoj komunikacijski namen za ustrezen učinek pri naslovniku vedno tvoriti formalno in vsebinsko koherentno besedilo. V govorni komunikaciji učinek govorca ni odvisen samo od koherence sporočila, temveč mora govorec sproti in glede na odzive naslovnika uporabljati dodatna strateška sredstva, da bo pritegnil naslovnikovo pozornost in ohranil pravico do besede. Prispevek analizira govorjeno pripoved v slovenščini in na podlagi metodologije M. A. Morel skuša pokazati, da se narativni postopki tvorjenja govorjene pripovedi poleg rabe preteklih časov, tretje osebe in časovnih konektorjev na pomemben način kažejo tudi skozi prozodijo izrekanja. Tako govorec s spreminjanjem F0 ohranja naslovnikovo pozornost, s povišano jakostjo vzpostavi željo po ohranitvi besede, s trajanjem posameznih govornih enot kaže stopnjo pripravljenosti svoje formulacije, s premori pa naslovniku omogoča miselno sintezo tistega, kar je že bilo izrečeno. Sočasen spust tonske višine in jakosti torej pomeni, da govorec ne potrebuje več naslovnikove pozornosti in pravice do besede, kar pomeni, da s prozodičnimi kazalci zaključi govorno enoto. Prek vloge prozodije pri strukturiranju posameznih govornih enot, veljavne za francoščino in slovenščino, tako dobi segment, ki bi v pisnem besedilu deloval redundantno, zaradi drugačne prozodične podobe v diskurzu novo vlogo. Osnovne prozodične strategije v govorjeni naraciji torej lahko označimo kot posledico univerzalne ambicije vsakega govorca, da doseže pri naslovniku svoj komunikacijski namen, sredstva, ki jih uporablja pri njihovi realizaciji, pa so odvisna od sistemskih razlik med posameznimi jeziki.