Evanghélos Moutsopoulos La création musicale comme expérience esthétique Le champ dans lequel s 'exerce l 'action de la musique a été de tout temps un champ privilégié pour le quest ionnement philosophique, don t l 'aspect esthétique n'est pas le moindre. Nombreux sont les philosophes s'y sont référés et très diversifiées les doctrines qui en ont résulté. Il suffit de ment ionner les noms de Pythagore et de Platon, d'Archytas et de Boèce, d'Augustin et de Thomas, de Leibniz et de Rousseau, sans oublier les my- thes cosmogoniques toujours en vigueur dans diverses religions. J e m'attar- derai sur trois questions majeures résultant de la mise au point du problème, à savoir celles de l ' importance de l 'expérience esthétique en général; de la signification de la création musicale dans ce contexte; et du rôle que l'ex- périence de celle-ci est capable de j oue r dans l 'élaboration d ' u n e axiologie de l 'objet esthétique à la fois crée et savouré, avant de tirer quelques con- clusions relatives à l'évaluation de la contribution du fait musical pour une meilleure compréhension de la créativité, du point de vue esthétique. L'expérience esthétique On désignera d 'emblée la spécificité de l 'expérience esthétique en général par rapport à l 'expérience tout court, en évoquant l 'homologie des structures véhiculées par l 'objet de cette expérience et des structures viscé- rales du sujet contemplateur, qui procure une satisfaction p rofonde dans la mesure où l 'homologie est parfaite, relative si elle est partielle, ainsi que Platon et ceux qui s'en sont directement inspirés l 'ont déjà envisagée1. A l'évi- dence, si une telle homologie est inexistante, une absence de satisfaction, voire une aversion et une répulsion envers l 'objet en résultera. Dans ce cas, il ne conviendrait même pas de parler d 'expérience esthétique, puisqu'elle s'avère complètement négative. Cependant le système de structures viscé- rales réceptives est susceptible de s 'adapter au milieu environnant artistique 1 Cf. Platon, Timée, 80 a-b; Arist. Quintilien, ¿temwi., p. 117 Meibom; cf. E. Moutsopoulos, La musique dans l'œuvre de Platon, Paris, P.U.F., 1959; 2e éd., 1989, pp. 38-44; Idem, La participation musicale chezPlotin, Phitosophia, 1, 1971, pp. 379-389. Filozofski vestnik, XX (2/1999 - XIVICA Supplement), pp. 221-200 191 Evanghélos Moutsopoulos et culturel, et de s 'agencer en un ensemble de critères «gustatifs» d 'après lesquels les divers objets esthétiques peuvent être évalués et appréciés. Plus cet ensemble est orienté vers la réception de structures esthétiques particuliè- res à une culture donnée, plus il lui est difficile de s 'adapter à celles qui se rat tachent à une culture différente. Ce même ensemble ne résiste néan- moins guère aux structures esthétiques universellement reconnues et inhé- rentes au grand art. Ces considérations s 'appliquent, certes, à tous les arts, mais tout particulièrement à l 'expérience esthétique musicale. Le langage musical est universel par excellence, tout en ayant la faculté d 'ê t re extrê- memen t spécial à des cultures marginales qui communiquent difficilement entre elles. Une conscience esthétique peu ou mal cultivée peut alors éprou- ver un sentiment de réclusion et afficher une «fin de non-recevoir» vis-à-vis de tout objet esthétique provenant d 'une culture étrangère à la culture (ou, et c'est le cas le plus fréquent , la sous-culture) où elle est ancrée. Cette ré- clusion et cette «fin de non-recevoir» sont même susceptibles d 'affecter des objets esthétiques dont le langage relève de l'universalité propre au grand art, provoquant l ' isolement et le refus de ces consciences esthétiques débi- les à toute ouverture vers d'autres horizons. Dans un souci de fausse dispo- nibilité elles n ' admet ten t que des produits musicaux de facture non pas artistique, mais artisanale, qui affichent un faux-semblant de langage uni- versel, sont privées, en fait, de toute structure et de toute originalité pro- pres aux créations du grand art. Ainsi se perpé tue l 'éternel malen tendu culturel qui fait du grand art, déjà difficile d'accès, l 'apanage de certains esprits créateurs et de certaines élites contemplatrices, et demeure exclu de l ' intérêt, ne serait-ce que limité, dont pourraient bénéficier les masses, en même temps que s'amplifie, en raison d 'une diffusion de plus en plus sou- tenue par une technologie galopante au service d ' une commercialisation sans cesse accrue de l'aspect musical de l 'entreprise du spectacle et de la distraction, une société de consommation indifférente à tout questionne- men t éventuel, et persistant dans son insignifiance béate. On se réjouira néanmoins de constater que ces techniques de production, de reproduction et de commercialisation sont s imultanément mises aussi au service de la grande musique, pour une meilleure diffusion de l'art musical à résonance universelle. La création musicale Ici encore, mention sera faite, au départ , de l 'homologie déjà envisa- gée ent re structures esthétiques viscérales et objectives. La création et la 222 La création musicale comme expérience esthétique contemplation musicales sont les deux aspects complémentaires d ' u n pro- cessus unique dans sa continuité. Dans ce contexte, on admettra que, sur le plan de la création artistique, no tamment de la création musicale, le créa- teur procède, par homologie, à l'objectivation de ses structures viscérales au niveau de l 'œuvre qu'il crée. Ce faisant, il affronte une dialectique aux termes de laquelle il doit éliminer toutes les particularités de ses propres structures internes individuelles tout en cherchant d 'une part à renforcer l 'expression de leurs aspects les plus conformes au langage musical préva- lant, c'est-à-dire les plus universellement acceptés, et, d ' au t re part, à en préserver les traits les plus personnels pour conférer à sa création une mar- que d'originalité, certes, mais surtout l 'expression la plus adéquate de ses propres vécus: dialectique subtile et difficile à respecter, mais nécessaire à l 'écoulement des formes créées vers des consciences prêtes à recevoir son message intime. Universalité et unicité différenciée à l 'extrême demeuren t ainsi les deux pôles entre lesquels le créateur se meut tout au long du conti- nuum créationnel que constituent l'inspiration, la gestation, l 'ébauche, l'or- ganisation, la structuration, la formulation et la finition de l 'œuvre musicale. Chacune de ces étapes se prolonge dans la suivante qui, à son tour, prend ses racines dans celle qui la précède. Un flux incessant les traverse toutes dans les deux sens. On est en présence d 'un mouvement qui rappelle étran- gement le mécanisme de la procession et de Yépistrophénéoplatoniciennes: là aussi, les hypostases se délimitent en entités quasi autonomes, mais sont, par ailleurs, reliées entre elles par leur propre fluidité qui résulte de leur tendance à s 'épancher les unes envers les autres. Toute proport ion gardée, une mobilité semblable se retrouve à l ' intérieur de la conscience du créa- teur, au point que, ne serait-ce que dans des cas rares, la forme définitive de l 'œuvre crée procure de précieux renseignements sur les étapes succes- sives que son instauration a traversées. Tout au long de cette démarche le créateur s 'impose à la fois comme démiurge et comme contemplateur. La Genèse offre déjà, quant à la création ex nihilo, un témoignage de cette dou- ble efficience. Après chaque étape de la création du monde le Créateur s'ar- rête devant sa création: à l'instar de l'artiste satisfait du résultat de son la- beur, «Dieu vit que c'était beau.»2 2 Cf. Idem, Contemplation et création dans l'art religieux, La filosofía cristiana hoy. Primer Congreso Mundial de Filosofía Cristiana, t. 2., Córdoba (Arg.), Univ. Nac. de Córdoba, 1980, pp. 933-942; L'œuvre d'art et son statut de témoignage, Diotima, 18, 1990, pp. 99-100; L'artiste, créateur et critique, Critique et différence, Actes du XVIIIe Congrès de l'ASPLF ( H a m m a m e t , 1990), Tunis, Soc. Tunis ienne des Études Philosophiques, pp. 551-555. 223 Evanghélos Moutsopoulos Au risque d 'ê t re taxé de «platonisme», j 'a i indiqué à diverses reprises et de diverses manières3 comment l'artiste créateur débute par une concep- tion globale (ou très particulière, voire élémentaire4) de l 'œuvre à réaliser et comment , à l 'opposé du Créateur de l'Univers, il y parvient après une longue élaboration de son projet initial. Chez le Créateur divin l'intelligence s'identifie avec la volonté, et celle-ci avec la puissance de réalisation: il suf- fit que le verbe divin soit prononcé pour que la création soit effective et exactement telle qu'elle a été conçue. Il en est tout aut rement pour le créa- teur humain: obligé qu'il est d 'œuvrer laborieusement, il tente, quant à lui, d'arriver à ses fins par une succession d'efforts dont aucun n 'about i t à l'ins- tauration d 'une forme définitive qui représente exactement l 'idée qu'il s 'en est fait initialement; elle en dévie tant soit peu. Dès lors, pour la b o n n e marche de son travail, il doit concevoir, d 'après le résultat de son premier effort, une forme nouvelle dérivée, pour ainsi dire, de la forme initialement conçue et comme son prolongement . A son tour, cette forme dérivée non réalisée pleinement verra, en vertu d 'une nouvelle déviation, une nouvelle dérivée conçue à partir d'elle, et ainsi de suite. Il s'agit en l 'occurrence d 'un problème de maîtrise de la part du créateur: plus il est maître de son art et plus le nombre des dérivées intermédiaires sera réduit. Une nouvelle dia- lectique apparaît ici, aux termes de laquelle le créateur doit à chaque pas osciller entre dogmatisme apriorique et pragmatisme finitif. Ce processus a été admirablement illustré à propos de la musique de Beethovenr ', mais il est également décelable dans d 'autres formes artistiques, no t amment en peinture où l 'examen aux rayons «X» permet de distinguer certaines cou- ches inférieures d 'un tableau recouvertes en raison de quelque »regret« de l'artiste6. Cependant , on tiendra compte également de l ' importance du gé- 3 Cf. entre autres, Vers une phénoménologie de la création, Revue Philosophique, 86, 1961, pp. 261-291; L'expérience esthétique: contemplation et expérimentation, Revue de Synthèse, 1963, pp. 303-305; Alternative Processes in Artistic Creation, Proceedings of the 8th International Wittgenstein Symposium, Part I, Wien, Holder, 1984, pp. 107-113. 4 Cf. Idem, L'imagination formative, ibid., pp. 389-403 et Annales d'Esthétique, 2, 1963, pp. 64-67; Langage et inspiration poétique: le témoignage Valéryen, Recherches sur la Philosophie et le Langage (Grenoble), 11, 1989, Valéry: La philosophie, les arts, le langage, pp. 179-181. 5 Cf. Romain Rolland, Beethoven, à propos des esquisses successives du thème initial de la marche funèbre de VEroica. 6 Cf. E. Moutsopoulos, Les structures de la temporalité chez Watteau, Antoine Watteau, le peintre, son temps et sa légende, Paris-Genève, Champion-Slatkine, 1987, pp. 143-148, notamment pp. 146-147; L'art comme travail et l'artiste comme travailleur, Rotonde, 1971/3, pp. 277-279, et Questionnements philosophiques, t. 1, Conscience et création, Athènes, Hermès, 1971, pp. 327-332. 224 La création musicale comme expérience esthétique nie du créateur: en effet, le créateur génial ne s 'attardera pas à œuvrer la- borieusement sur chacune des dérivées conçues successivement, mais dé- passera d 'emblée cette dialectique en orientant sa création dans une direc- tion carrément inattendue. Ce «coup de génie» risque d 'arrê ter brusque- ment un processus déjà en cours, mais se révèle toujours salutaire pou r l 'œuvre à instaurer qui se voit ex abrupto réalisable sous un autre visage. Les procédés de cette nature sont différenciables à l'infini. Il convient seulement de ne point négliger, parmi eux, des cas extrêmes, tel celui de l ' intégration d'œuvres ou de parties d'œuvres précédentes dans des œuvres nouvelles que l 'on relève chez J.-S. Bach, Beethoven ou Bizet, par exemple. Le composi- teur se rend l ibrement à toutes ces possibilités et opte pour celles qui con- viennent le mieux à la situation particulière qu'il affronte. Néanmoins toute initiative à prendre en l 'occurrence est pour lui un occasion supplémentaire d ' un nouvelle expérience esthétique vécue. À la lumière de ce qui vient d 'être souligné précédemment , le compo- siteur maître de son art aura peu de difficultés à créer une œuvre rigoureu- sement construite. Une fugue, par exemple, suivra un plan de construction savamment élaboré (d'après un modèle quasi définitivement arrêté) , don t l 'unité sera assurée grâce à l'utilisation répétée d 'un thème unique selon les divers procédés dans lesquels on reconnaît le principe d' imitation. En- tre les deux groupes thème-réponse de l'exposition initiale un semblant de divertissement est susceptible d 'ê t re inséré. Par contre, entre deux appari- tions consécutives du thème à des degrés différents de la tonalité choisie, le développement d 'un véritable divertissement est de rigueur. Ainsi des périodes de tension et de relâchement voient le jour alternativement, témoi- gnant de l'objectivation de structures internes dont le compositeur extéri- orise la signification. Il les adapte de son mieux à des structures auxquelles il suppose que ses auditeurs répondront de manière universelle. Il compte sur leur consolidation progressive, d 'après le retentissement qu'elles ont eu préalablement auprès d 'une succession de publics plus ou moins homogè- nes et avant d 'acquérir une portée universelle. L'alternance entre tensions et relâchements se poursuit grâce à la tension extrême que représente la strette avant que l 'œuvre se termine dans l 'apaisement que procure sa so- lution finale. De même, l 'unité de l 'ensemble du premier mouvement de la Symphonie n" 5, en ut mineur, op. 67, de Beethoven, est assurée grâce à l 'em- ploi d ' un motif de tierce descendante rythmiquement scandée par la dou- ble répétition du son aigu initial. Encore plus simple est le motif «ré, ut dièse, ré» auquel Brahms a recours pour construire, à partir de lui, l 'unité formelle de l'Allégro non troppo de sa Symphonie n" 2, en Ré majeur, op. 73, en l'utili- sant de manière aussi bien mélodique que rythmique, afin de le r e n d r e 225 Evanghélos Moutsopoulos moins apparent , mais aussi plus substantiellement consolidant et fixatif de l 'unité de sa composition. Il existe, par ailleurs, des symphonies entières construites sur un seul motif, sur une seule idée qui les transperce et les traverse d 'un bout à l'autre. Le souci d'unité n'est toutefois pas toujours aussi r igoureusement manifeste. Chacun des morceaux dont tout un ensemble de pièces pour piano de Debussy est formé présente une unité certaine en dépit de son manque de forme précise, au sens traditionnel du terme, ou plutôt en dépit de la forme totalement originale qu'il épouse et qui suscite des résonances en t iè rement nouvelles chez l 'audi teur en provoquant le réveil de structures viscérales latentes. En recourant à des structures éprou- vées, mais qu'il renouvelle sans cesse par son originalité, autant qu ' à des structures qu'il découvre lui-même en «violant les symétries»7, au t rement dit en enfreignant des règles établies, le compositeur s'engage dans une suite de découvertes fortuites ou savamment préparées qui sont pour lui autant d 'expériences esthétiques qu'il éprouve personnellement avant de les com- muniquer à son audience réceptive moyennant le caractère structurel uni- versel de son apport. C'est ainsi que progresse et évolue le langage musical qui, lui aussi, se veut universellement compréhensible. L'axiologie de l'objet esthétique Il n'existe pas d 'expérience esthétique qui ne soit une pure évaluation de ce qui est à la fois sa cause et son objet. Tout un système, ouvert à l'in- fini, de catégories esthétiques forme un arsenal de la conscience, disponi- ble à cet effet8. Le compositeur s'en empare dans le but d 'en qualifier les produits de son inventivité, avant de laisser ce soin à ses auditeurs. Tout devient possible sur ce plan grâce à la médiation exercée par les structures universelles objectivées dans une création musicale. Pour sa part, le com- positeur véhicule ses propres structures viscérales dans ses créations qui les véhiculent, à leur tour, jusqu 'aux consciences des contemplateurs où elles suscitent des émotions esthétiques. Cette médiation s'entendrait comme une simple transmission indirecte, n'était-ce l 'œuvre musicale qui, elle, une fois instaurée, existe désormais en soi comme valeur unique et irrépétible qui 7 Cf. Idem, Le viol des symétries et le ta'roscorame métron de l'art, Metrum of Art, Third International Conference on Aesthetics, Krakôw-Przegorzaly, 1991, pp. 13-H37, et Poïésis et Technè. Idées pour une philosophie de l'art, t. 2, Instauration et vibration, Montréal, Montmorency, 1994, pp. 23-27. 8 Cf. Idem, Les catégories esthétiques. Introduction à une axiologie de l'objet esthétique, Athènes, Hermès, 1970; 2e éd. illustrée, Athènes, Arsénidès, 1996, pp. 11-17. 226 La création musicale comme expérience esthétique irradie en toute direction. Elle devient ainsi, dans son ensemble, un objet d 'expérience esthétique non seulement pour l'auditeur, mais encore pour son créateur qui s'y reconnaît d ' une part à un niveau existentiel en se réfé- rant au processus particulier d' instauration qu'il a suivi (creo ergo sum)9, et d 'autre part à un niveau purement ontologique, en raison de l 'assurance (hélas! passagère) que lui procure la présence de la réalité esthétique ins- t au rée , n o r m a l e m e n t des t inée à lui survivre (exegi monumentum aere perennius)10: assurance passagère par le fait que le créateur, son admiration première (elle-même entendue comme un expérience esthétique) pour sa création, vite dépassée, se passionne aussitôt pour une nouvelle expérience esthétique procurée par l'instauration d 'une autre œuvre envisagée dans son ensemble et dans ses détails, aut rement dit par chacune des étapes de sa réalisation. Le créateur d ' u n e œuvre musicale, comme tout créateur, se nourri t des expériences esthétiques répétées que lui offre sa propre activité. Au terme des réflexions qui précèdent il ressort que l 'expérience es- thétique en matière de création musicale résulte, pour le créateur, de l'éla- boration patiente de chacune des parties dont une composition est, coup après coup, constituée, autant que de la contemplation de l 'ensemble; et, pour l 'auditeur, de la découverte de l 'unité de l 'œuvre écoutée autant que de son analyse mentale qui fait réapparaître à rebours la suite des expérien- ces esthétiques particulières qu 'à l 'origine elle a procurées au compositeur par étapes, lors de son élaboration. Cette vision des choses serait privée de sens si on se refusait à admettre, ne serait-ce que comme hypothèse de tra- vail, le principe de l'existence d 'une homologie entre structures viscérales et structures objectives entrevu par Platon11. Ce principe semble pouvoir expliquer à lui seul l'existence indubitable d 'une «dialectique du plaire» telle qu'elle apparaît déjà dans l 'esthétique de Kant12, et qui associe la stricte subjectivité du plaisir esthétique à sa prétention légitime à une validité uni- verselle. 9 Cf. Idem, Vers une phénoménologie de la création, in fine. 10 Cf. Horace, Carmina, III, 30, 1. 11 Cf. supra, et la n. 1. 12 Cf. Kant, Critique du jugement, §§ 31-33; 36-37; 39-40; 56-57. Cf. E. Moutsopoulos, Forme et subjectivité dans l'esthétique kantienne, Aix-en-Provence, Ophrys, 1964; 2e éd., 1997, pp. 85-120. 227