Les artefacts en os et bois de cerf a Bukovac, Lokve (Croatie) Une seconde flüte possible ? Relations entre les chasseurs de Lokve et les montagnards d'Olcheva au debut du Paleolithique super ieur Fran9ois Zoltän HORUSITZKY Izvleček Abstract V prispevku smo nakazali možnosti za obstoj še ene "pišča-li" iz jame Bukovac pri Lokvah. Razpravljali smo o kronologiji najdbe na podlagi sedimenta, ki se je ohranil v kosti. Podali smo verodostojen dokaz o vtisku zoba na znamenitem rebru s tremi luknjami. Obravnavali smo nepojasnjen primer radiusa z eno luknjo. Predstavili smo akustične lastnosti dveh femu-rjev z luknjami. Izdelali smo kronološko in razvojno shemo koščenih konic z razcepljeno in masivno bazo na podlagi kriterija o "enaki trdnosti". Konico iz jame Bukovac smo primerjali s podobnimi konicami iz drugih najdišč. Razpravljali smo o starosti, razvoju, kulturi in ljudstvu, ki je pustilo sledove v Potočki zijalki in v okolici Lokev. Najdbe iz teh najdišč smo primerjali z najdbami iz jamskih najdišč Badlhöhle, Salzofenhöhle in Iställosko. Predlagali smo vzporeden razvoj orinjasjena v obravnavanih najdiščih in v najdišču Aurignac, vendar s časovnim odmikom. Ključne besede: jama Bukovac pri Lokvah, Hrvaška, Potočka zijalka, Slovenija, orinjasjen, paleolitske piščali, koščene konice The possibility of another "flute" at the Bukovac cave near Lokve. Discussion of the famous rib of three holes with a clear contra-lateral biting by animal tooth. Mysterious, entirely closed cave bear radius with a man-made hole. Reconstruction and acoustical study of two preforated juvenile cave bear femurs. It will be shown that the well known spearhead could have been a split-base point. Discussion of analogies and chronology of bone and antler points with split-base and massive base. Equal resistance evaluation of the points and their evolution in the Early Upper Palaeolithic. Comparison of the Bukovac spearhead with similar points. Discussion of the "Olschewian" concept by Bayer. Relations between the cultural center of Olševa and the secondary hunting stations of Bukovac, Badl-höhle, Salzofenhöhle etc. Parallel evolution in Aurignac. Keywords: Bukovac cave near Lokve, Croatia, Potočka zijalka, Slovenia, Aurignacien, palaeolithic flutes, bone points INTRODUCTION La grotte Bukovac de Lokve pres de la cote adria-tique en Croatie, ä environ 16 km de la mer, sur une hauteur de 864 m, a ete exploree par Th. Kor-mos en 1911. Les fouilles n'ont livre aucun objet lithique. Les artefacts de Bukovac, c'est-ä-dire la pointe de "Lautsch-Mladeč" et les quatre pieces trouees ont connu par le passe des sorts et interpretations tres mouvementes, notamment en rapport avec "l'Olschewien" defini par Bayer en 1929. Nous commen9ons, par consequent, par la definition des mots qui figurent dans le titre. 1) Bukovac - Lokve. Etant donne que la locali-te de Lokve comprend quatre grottes, nous parle-rons des os trouves dans la grotte de Bukovac mais, quant aux gens, nous dirons culture de Lokve ou chasseurs de Lokve. 2) "Aurignacien" dans le contexte d'Europe Centrale signifie un degre d'evolution. Les chasseurs du Paleolithique superieur ancien, de degre d'evolution aurignacien (AMH), peuvent etre d'un age absolu correspondant ä la chronologie du site d'Aurignac, mais peuvent aussi etre plus anciens du fait que la migration AMH se faisait, probablement d'Est en Ouest. Cependant, ces chasseurs "aurignaciens" peuvent avoir eu une culture Fig. 1: La grotte de Bukovac ä Lokve (Photo d'Ivan Turk). Sl. 1: Jama Bukovac (Lokve) (Foto Ivan Turk). Pour le moment nous considerons chaque centre d'habitation comme un centre de culture. Notamment : Potočka zijalka est le centre de la culture olche-vienne. Szeleta est le centre de culture szeletienne. Iställöskö est le centre de la culture d'Iställöskö 1 et 2 (degre d'evolution Aurignacien I et II). Il est peu probable que ces centres de culture, etudies separement, soient ä tel point semblables qu'il soit permis de les reunir dans une appellation commune. Il est encore plus improbable que les centres de culture ä l'Est des Alpes soient identi-ques ä la culture definie ä Aurignac, compte tenu des distances et des obstacles geographiques. Il est cependant possible et probable que la meme culture se retrouve ä une distance considerable mais decalee dans le temps et traduisant des migrations lentes et non pas des echanges culturelles. De meme, il est arbitraire et illusoire de classer les sites sans large inventaire parmi les cultures semblables ou leur attribuer une culture propre. Evidemment la notion de peuple ne pourra s'ap-pliquer qu'ä des habitants de sites tres rapproches, mais pas sans discernement. Par exemple les habitants de Szeleta et d'Iställöskö, situes ä une di-zaines de kilometres les uns des autres, n'ont jamais forme un seul peuple, de meme qu'il existe des differences notables entre les chasseurs de Mokriška jama et les habitants de Potočka zijalka (Brodar 1985). "olchevienne" ou une culture indefinissable compte tenu de la pauvrete du materiel. 3) Le terme controverse "d'Olchevien" pour nous n'a qu'une signification unique et indiscutable : Olchevien est celui qui habite ä la montagne Ol-cheva sur la frontiere Austro-Slovenienne. On discutera la possibilite d'extension de ce terme ä une region ou une epoque. Il convient de traiter ä part les centres d'habi-tation et les stations de chasse. Les chasseurs ne peuvent pas etre d'une culture ä part. Les Olcheviens de la grotte Potočka zijalka et les chasseurs qui sillonnent autour de leur habitation sedentaire forment le meme peuple. Dans la region d'Olcheva, de Lokve et de la Badlhöhle les objets en os sont soit nombreux, mais accompagnes d'un grand nombre d'outils en pierre, soit tellement rares que l'absence ou presence d'objets lithiques par rapport aux objets organi-ques n'a plus de signification. HISTOIRE DE LA RECHERCHE DANS LA GROTTE DE BUKOVAC Les trouvailles de Bukovac sont des os manufactures et des os de la faune qui contribuent ä etablir la chronologie. Les artefacts sont au nombre de cinq dont quatre sont conserves au Musee National de Budapest : En bois de cerf : - Une pointe de sagaie (faussement) appelee de Lautsch ou Mladeč, Pb 6021 En os d'oursons des cavernes : - Un radius ä un trou, Pb 605 (sur l'etiquette, par une confusion inexplicable, on trouve femur) - Une cöte perforee ä trois trous, Pb 604 - Un femur ä un seul trou (piece perdue), Pb 606 - Un femur gauche ä deux trous, Pb 607 (ecri-ture superposee de Vertes : Tibia2) 1 Mottl a mentionne "bois de cerf" avec une pointe d'interrogation. 2 D'apres Mihäly Gasparik, du Musee d'Histoire Naturelle de Budapest, l'os est un femur. On peut rajouter que probablement d'un ours femelle aux os longilignes. Fig. 2: Les etiquettes au Musee National de Budapest (etablies par Maria Mottl en 1936).* Sl 2: Etikete Narodnega muzeja v Budimpešti (napisala Maria Mottl l. 1936).* Les os perforees ou troues envoyes par Kormos en Moravie pour expertise ont disparu, le livre d'inventaire ne les mentionne pas. La publication de Kormos (1912) comprend les donnees sur la faune et sur les gisements, ainsi que des donnees avec illustrations concernant le femur perdu, la pointe et la cote. On y trouve egalement l'illustration de trois fragments d'os d'ours, aujourd'hui introuvables. L'information suivante vient de Bayer (1929) : Bayer n'y ajoute rien et s'en sert pour creer sa conception de la culture d'Olschewa. Prochaines informations : Kadic (1934) : Copie de Kormos et comparai-son de la pointe avec celle de la grotte Jankovich. S. Brodar (1938) : Citation du texte de Bayer. References communiquees par Ivor Karavanic : Malez (1959) : Speleološka istraživanja krša u 1956. godini. Malez effectue trois sondages et confirme les resultats de Kormos en y ajoutant un oiseau (Lagopus alpinus = mutus) et en insistant sur les parois de la grotte polies par les ours. Un certain nombre de publications en croate reproduisent les conclusions de Malez (1959) : Malez (1967), (1971), (1979a). Parmi les references se trouve Malez et coll. (1979) qui indiquent que le gisement avec les ours des cavernes et les artefacts se trouvent au-dessous du gisement "b", lui-meme date par C14 ä 9040 BP. L'article Malez et coll. (1979) fournit un schema stratigraphique tres discutable : les ours des cavernes se trouveraient juste en dessous de la couche Dryas de 9040 ans BP, en plein Würm III (Figure 24). Un tableau dans le meme volume (Malez 1979b) retablit une situation plus equilibree, Bukovac serait repousse vers l'interstadial Würm II/III. Montet-White (1996) ignore completement Bukovac, reprend l'appellation "Olchevien" et deplace la pointe de Mokriška jama ä la grotte de Veternica. Paunovic et coll. (2001) enumerent les sites OIS 3 et OIS 2 en Croatie. On y trouve les references des articles de Malez et des renseignements mais avec un certain nombre d'erreurs : en realite la datation 9040 ans BP con-cerne la couche "b" et non la couche "c", qui serait * Source des Figures : 2. Musee National de Hongrie; 3. Malez 1971, Vertes 1965; 4. Brodar 1985, Karavanic 2000; 6. Malez 1967; Karavanic 2000; 7. Kadic 1934; 8. Zotz 1964/1965; 9. Vertes 1965; 10. Photo Joanneum Graz; 11. Photo Joanneum Graz; 12. Bayer 1929; 14. Turk 1997, Joanneum Graz; 15. Photo Joanneum Graz; 19. Turk 1997, Joanneum Graz = l'auteur. * Viri za slike: 2. Narodni muzej Madžarske; 3. Malez 1971, Vertes 1965; 4. Brodar 1985, Karavanic 2000; 6. Malez 1967; Karavanic 2000; 7. Kadic 1934; 8. Zotz 1964/1965; 9. Vertes 1965; 10. Foto Joanneum Graz; 11. Foto Joanneum Graz; 12. Bayer 1929; 14. Turk 1997, Joanneum Graz; 15. Foto Joanneum Graz; 19. Turk 1997, Joanneum Graz = avtor. d'ailleurs Aurignacien de "Würm - Late Pleistocene", ce qui est une indication plutot sommaire. EXAMEN DETAILLE DES ARTEFACTS EN OS ET EN BOIS DE CERF 1. La pointe de sagaie en bois de cerf (= "Lautsch/Mladeč" /?/) Longueur 126 mm, largeur maximale 28 mm, largeur ä la base 16 mm, epaisseur 10 mm. La section est concave-convexe. Les pointes d'Olcheva (=Lautsch/Mladeč) ont une caracteristique commune : elles ne sont pas ä base fendue. La base de la pointe de Bukovac est fracturee : on ne peut pas etre sur que la base etait sans fente. De plus, un examen recent ä Budapest, ä l'aide d'une loupe de grossissement 5, a montre une petite felure dans la section fracturee qui pouvait etre l'amorce d'une fente du ä la cassure ou le souvenir d'une ancienne base qui aurait pu bel et bien etre fendue. Nous introduisons ainsi un nouvel element dans la discussion sur la culture d'Olcheva. La pointe de sagaie la plus proche de Bukovac est celle de Mokriška jama, Fig. 4, ä base fendue si on ne tient pas compte de la courbure et l'epaisseur qui sont differentes. La piece de la grotte Jankovich, Fig. 6, men-tionnee et illustree par Kadic (1934), dont la base est cassee, a ete consideree par certains comme une pointe ä base fendue (Breuil 1923, Vertes 1955). Allsworth-Jones (1986) a examine la piece et n'a pas trouve des traces de fente. D'ici ä conclure que la base disparue n'a pas ete fendue est une affirmation, peut-etre, trop osee. Les calculs d'egale resistance (chapitre 6.3.2) suggerent que la base de la piece de Jankovich etait fendue. La pointe de sagaie Bukovac est tres differente de celle de Badlhöhle (Hilber 1922, Fuchs 2000), consideree comme Lautsch-Mladeč, laquelle a une Fig. 3: La pointe de Bukovac. Longueur 126 mm. sSl 3: Konica iz jame Bukovac. Dl. 126 mm. Fig. 4: La pointe de Mokriška jama. Longueur 132 mm. Sl 4: Konica iz Mokriške jame. Dl. 132 mm. Fig. 5: Superposition des pointes de Bukovac et de Mokriška jama reduite ä 70%. Sl. 5: Prileganje konic iz jame Bukovac in Mokriške jame. 70% naravne velikosti. forme beaucoup plus elancee et longue que celle de Bukovac. La piece la plus proche de Bukovac (Kormos 1912 et Malez 1967) est la pointe de Mokriška jama, Fig. 4. (Brodar 1985 fig. 5: 3, Karavanic 2000) Legerement reduite, elle se superpose convenable-ment ä la pointe de Bukovac, Figure 5. Il faut noter la difference de l'epaisseur (5 mm contre 8 ä 10 mm) et la profondeur de l'entaille. Les deux pointes de Velika pecina (Malez 1979, Karavanic 2000), Figure 6, sont annoncees com-me "probablement ä base fendue". On voit claire-ment la fente surtout sur l'une des pieces. Plus petites que la pointe de Bukovac, elles possedent la meme forme ventrue et plate, plus plate que celle de Bukovac. La pointe de Jankovich (Kadic 1934) est plus elancee que la pointe de Bukovac mais on retrou-ve la forme ventrue, Fig. 7. La piece de Tischoferhöhle, Fig. 8 (Zotz 1964) est ventrue mais la largeur maximale se trouve pres de la base. La sagaie est beaucoup plus mince que celle de Bukovac. Les sections de Jankovich et de Tischoferhöhle sont fournies par la liste d'Albrecht et coll. (1972). Ä Potočka zijalka et ä Iställöskö les pointes ä Fig. 6: Deux pointes ä base fendue de de la grotte Velika peci-na. Longueur 68 et 74 mm. Sl. 6: Konica z razcepljeno bazo iz Velike pecine. Dl. 68 in 74 mm. base non fendue sont nombreuses et representent un degre d'Aurignacien superieur (Iställöskö 2). Difficulte : ä Potočka zijalka on a trouve parmi ces pointes aussi une unique petite pointe ä base fendue. L'os d'origine de la pointe : Kormos a affirme que la pointe a ete faite ä partir de bois de cerf. Fig. 7: Pointe de la grotte Jankovich, probablement ä base fen-due. Longueur 145 mm. Sl. 7: Konica iz jame Jankovich, domnevno z razcepljeno bazo. Dl. 145 mm. Sur la liste faunistique, ou il y a un grand nom-bre d'os d'ours sans enumeration detaillee, figu-rent cinq os de panthere, une dent de lapin et l'os de bois de cerf represente certainement par la pointe. Bayer a accepte l'identification de bois de cerf. Kadic qui a pu examiner la piece a ecrit bois de cerf en 1934. Mottl, en etablissement les etiquettes pour chaque objet en 1936, a mentionne bois de cerf avec un point d'interrogation. Vertes (1965), qui a vu certainement la pointe, l'a classee bois de cerf. Albrecht et coll. (1972) ont indique "os" (d'ours des cavernes), apres avoir pu faire, tres certaine-ment, des observations directes. Malez dans tous ses articles parle de bois de cerf. Heidi Knecht (1993) a ecrit que 371 pointes ä base fendue sur 381 de France, Belgique et de trois sites d'Allemagne, y compris Vogelherd, sont en bois de cerf. Fiig. 8: Pointe ä base fendue de Tischoferhöhle. Longueur 187 mm. Sl. 8: Konica z razcepljeno bazo iz jame Tischoferhöhle. Dl. 187 mm. Albrecht et coll. (1972) rangent toutes les pointes, toutes confondues, dans la categorie os ä l'exception de Vogelherd, Sirgenstein, Willendorf et de trois pointes d'Iställöskö. Le classement de la pointe ä base fendue de Mokriška jama parmi les pieces en os s'oppo-se ä l'affirmation de Knecht et accentue la difference entre les pointes de Bukovac et de Mokriška jama. Cette difference est visible aussi par la courbure de la pointe de Mokriška jama (dans le plan de l'epaisseur), tandis que la pointe de Bukovac est droite. L'opinion de Knecht favorise l'hypothese de la base fendue ä Bukovac et affaiblit le classement Fig. 9: La cöte ä trois trous. Longueur 158 mm. Sl. 9: Rebro s tremo luknjami. Dl. 158 mm. Fig. 10: Lempreinte contra-laterale. 6 mm /4,5 mm, profondeur 0,25 mm. Sl. 10: Odtisek na nasprotni strani. 6 mm /4,5 mm, globina 0,25 mm. comme os par Albrecht et coll. C'est ainsi que la question de l'origine de la pointe revet une certai-ne importance. Je suis incapable d'interpreter le point d'inter-rogation de Mottl. La face interieure de la pointe de Bukovac presente suffisamment d'asperites pour y voir les restes de bois de cerf sur toute la longueur (affirmation ä verifier). Par ailleurs les pointes de Potočka zijalka sont toutes compatibles avec l'origine ä partir de femur d'ours des cavernes (adulte, male). Si les Olche-viens auraient voulu fabriquer des pointes plus epaisses ils auraient pu faire appel aux bois de cerf dont l'interieur est completement ossifie avant la mue. Cette question sera davantage discutee dans un article prochain sur la pointe de Badlhöhle. 2. La cote a trois trous, Pb 604 La piece a connu des interpretations tres fan-taisistes comme flute. On peut affirmer que l'interieur de l'os est rempli de tissu spongieux, donc la musicalite est exclue. Il reste cependant l'enigme quant ä la destination de l'objet dont les trous sont de toute vrai-semblance artificiels. La particularite de l'objet est la presence d'une contre-marque de l'autre cote, sans doute occasionnee par une dent d'animal. Cet animal (ou homme, pourquoi pas ?) avait des dents de taille moyenne, tandis que sur la face perforee les trous sont trop grands pour les dents d'animaux. Seules les canines d'ours pouvaient percer des trous de 9 mm, mais Fig. 11: Le radius perfore de la grotte de Bukovac. Longueur 155 mm, largeur 16,3 mm, epaisseur 12 mm. Sl. 11: Radius z luknjo iz jame Bukovac. Dl. 155 mm, ši. 16,3 mm, db. 12 mm. Fig. 12: La reconstruction de la flute no1 de Lokve-Bukovac. Sl. 12: Rekonstrukcija piščali št. 1 iz jame Bukovac. Fig. 13: Les sons du modele de flute Bukovac no1. En haut: levres eloignees. En bas: levres rapprochees. Trait plein epais: tout est ferme. Trait plein mince: tout est ouvert. Trait inter-rompu epais: le trou est ouvert. Trait interrompu mince: l'ex-tremite est ouverte. C2 = 2x262Hz. Sl. 13: Zvoki modela piščali št. 1 iz jame Bukovac. Zgoraj: odmaknjene ustnice. Spodaj: prislonjene ustnice. Debela polna črta: vse je zatesnjeno. Tanka črta: vse je odprto. Debela prekinjena črta: luknja je odprta. Tanka prekinjena črta: konec je odprt. C2 = 2x262Hz. alors la pointe de la canine aurait du atteindre l'autre face aussi. Nous sommes, peut-etre, devant la preuve d'une collaboration homme-animal. Un loup a perce le premier trou, laissant une petite depression sur l'autre face aussi, et l'homme s'est mis ä agran-dir le trou et en faire deux autres. La depression clairement visible sur la face opposee aux trous est propice ä l'etude des degäts causes par les animaux. 3. Le radius a un seul trou, Pb 605 Le trou a toute l'apparence d'une origine arti-ficielle. Sur la face opposee on ne voit pas d'em-preintes dues ä une eventuelle morsure. L'os est plein de tissu spongieux, les extremites sont bouchees. La question brulante est l'utilite d'un tel objet. Alors que pour les deux femurs on peut envisager la fonction de flute, ici et dans le cas de la cote ci-dessus notre imagination fait defaut. L'etude de Harrison (1978) sur les sifflets de phalange fait penser ä un accessoire de medecin-sorcier soit pour produire des sons plutot graves et mysterieux, soit comme recipient pour les drogues, medicaments ou epices. Voir : ANNEXE 2. 4. La flüte possible (piece perdue), Pb 606 Longueur : 157 mm, largeur minimale 24 mm. Voir egalement notre site (http://site.voila.fr/ horusitzkymusic2/lokve.html). Fig. 14: Similitude entre l'embouchure presumee des "flutes" de Divje babe I et de Badlhöhle. Sl. 14: Podobnost domnevnega ustnika piščali iz Divjih bab I in jame Badlhöhle. Autour du trou on peut observer une surface circulaire elaboree laquelle rappelle le contour du trou no1 d'Iställöskö. table aux proprietes anatomiques de l'os. La face opposee sur les photos de Salzofenhöhle et de la piece Lokve no1 n'est pas visible. Celles de Divje babe et de Badlhöhle montrent clairement une encoche qui pouvait servir d'em-bouchure. En revanche les "flutes" d'Iställöskö et de Lokve no2 ne s'expliquent que par la supposition d'un jeu transversal. Est-ce qu'il s'agissait vraiment "d'embouchure" ? Nous connaissons des exemples ou le nez a remplace la bouche : chez les Tahitiens ä l'epo-que des explorateurs Cook et Bougainville ou dans le cas du flutiste cite par Curt Sachs (1929, Tafel 12). Cette fa9on de jouer par le nez, la raison et le mode d'execution, depasse completement notre imagination. Vertes (1965, 183) fait un melange entre les "flutes" no1 et no2 : La Table LII de son livre represente le femur no2 mais ä l'envers, le cote proximal en bas, com-me s'il s'agissait d'un tibia. Le grand trou n'est pas rond, comme il dit, mais ovale. Cet os est vraiment rempli mais seulement en partie de l'os spongieux, la diaphyse est pleine de terre sableuse. De ce fait il est hautement possible que le canal etait degage, donc la piece pouvait servir d'instrument de mu-sique. Kormos bien sur, a dit "Pfeife?" = sifflet ? au sujet de la piece disparue, dont on peut penser que le canal etait vide, du fait de la mention de Kormos comme flute ou sifflet possible. Vertes n'a pas remarque le demi-trou sur la face poste-rieure de l'objet no2. L'embouchure Les quatre pieces : Lokve no1, Divje babe I, Salzofenhöhle et Badlhöhle ont l'extremite distale coupee en biais. On se demande si ce n'etait pas intentionnel, d'autant plus que le femur de Divje babe I est de gauche et le femur de Badlhöhle est de droite. Donc la similitude ne serait pas impu- 5. Le femur a deux trous, Pb607 : deuxieme flüte possible Examen de l'objet : sur la face avant, pres de l'extremite distale, on trouve un trou ovale assez regulier de 9,5 mm de grand diametre. Fig. 15: La flute n°2, face avant avec l'embouchure presumee. Sl. 15: Piščal št. 2, sprednja stran z domnevnim ustnikom. Fig. / Sl. 16 I Fig. / Sl. 17 d' = 9,4mm d =12,5 d" = diametre equivalent / eiiak premer Fig. 16: La flute n°2, face arriere avec le demi-trou. Echelle 0,5. Sl. 16: Piščal št. 2, sprednja stran s polovično luknjo. Enkrat pomanjšano. Fig. 17: Modele equivalent de la flute n°2. Sl. 17: Ustrezen model piščali št. 2. Longueur 157 mm, largeur minimale 23 mm. Sur la face opposee, au niveau de la cassure, la presence d'un deuxieme trou, de 9 mm de diame-tre, est hautement probable. L'os, du cote proximal est rempli de terre sableuse. L'extremite distale est completement fermee par le tissu spongieux. Dans le trou on voit le tissu spongieux qui bouche l'os en direction distale. Sur les cotes du trou, le tissu spongieux remplit l'os. En direction proximale on ne voit pas clairement le tissu spongieux, probablement un canal degage existe en direction longitudinale ou bien il exis-tait avant le remplissage du canal par la terre sableuse. Quelle etait l'utilite de cet os manifestement sorti des mains d'homme ? 1) Premiere hypothese : il servait ä quelque chose que nous ignorons. 2) Deuxieme hypothese : il pouvait etre un instrument ä vent, soit un sifflet, soit une flute produisant plusieurs sons et des sequences melo-diques elementaires. Nous allons elaborer cette deuxieme hypothese sans faire aucune affirmation precipitee. Le trou, presume embouchure, a permis une excitation traversiere mais, physiquement, il etait l'equivalent d'une embouchure longitudinale, comme sur la flute presumee no1, puisque la cavite buc-cale, entre le trou et l'extremite distale, etait inexis-tante c'est-ä-dire bouchee. Le degagement du tissu spongieux du cote d'em-bouchure ne pouvait etre parfait, il convient donc de partager le canal en trois segments differents : Segment 1) du cote distal, avec tissu spongieux incompletement degage. Segment 2) le canal jusqu'au trou proximal. Segment 3) le canal elargi jusqu'ä l'extremite proximale. Sur la figure 16 la flute est superposee ä un femur longiligne (femelle) de Postojnska jama dont le croquis m'a ete envoye aimablement par Ivan Turk. Fig. 18: Les sons du modele equivalent. En haut: levres eloi-gnees. En bas: levres rapprochees. Trait plein epais: tout est ferme. Trait plein mince: tout est ouvert. Trait interrompu epais: le trou est ouvert Trait interrompu mince: l'extremite est ouverte. Sl. 18: Zvoki modela piščali št. 2. Zgoraj: odmaknjene ustnice. Spodaj: prislonjene ustnice. Debela polna črta: vse je zatesnjeno. Tanka črta: vse je odprto. Debela prekinjena črta: luknja je odprta. Tanka prekinjena črta: konec je odprt. Essayons de suivre la fabrication de notre flute. L'homme de Bukovac (ou d'Olcheva) a voulu faire une flute bouchee d'un cote et, par consequent, un modele ä excitation transversale. Il fallait couper l'extremite proximale et percer le trou d'embouchure sur l'autre extremite. L'artisan a pu commencer de percer le trou suivant le procede suppose : avant-trou par rotation alter-nee d'un outil quelconque suivi d'un poin9onna-ge ä l'aide d'une canine tronquee, ou d'un morceau d'os fa9onne pour cet usage, ou encore ä l'aide d'une pointe naturelle de bois de chevreuil ou de cerf. Ensuite une operation delicate consistait ä degager le canal sans percer l'os spongieux distal. Pour cela il fallait disposer d'une baguette dure (os ou bois) de 20 cm au moins et la manipuler jusqu'ä l'embouchure. Le degagement ne pouvait reussir que partiellement, par consequent la section de la cavite est reduite du cote distal. La täche suivante etait le per9age du deuxieme trou avec une rotation alternee d'une pierre plus ou moins pointue. L'avant-trou ainsi engage, l'ar-tisan a du choisir une dent ou un os pour poin-9onner le trou ä l'aide d'un marteau improvise Fig. 19: Le deuxieme trou du femur Pb 607 et la fracture proximale. Similitude des demi-trous des flutes de Divje babe I et de Bukovac n°2. Echelle 2. Sl. 19: Druga luknja femurja Pb 607 in proksimalna poškodba. Podobni polovični luknji piščali iz Divjih bab I in št. 2 iz jame Bukovac. Dvakrat povečano. (procedure valable aussi pour l'embouchure). Les essais ont pu commencer : l'objectif etait d'obtenir le plus de sons possibles, suffisamment espaces. L'experience a montre qu'il ne fallait pas reduire trop la longueur de l'os. Il restait un parametre dont l'ob-jectif etait fortement dependant : l'elargissement du canal du cote proximal rempli d'os spongieux. L'ar-tisan n'avait pas interet a oter cette substance, au contraire il fallait la sculpter pour obtenir l'espace-ment des sons. C'est cette derniere manipulation ancestrale que nous avons simulee par le calcul. La piece presente une troublante similitude avec la flute de Divje babe I : le demi-trou no3 de Divje babe, ainsi que la fracture de l'extremite proximale sont tres semblables au deuxieme trou et ä la fracture proximale de la piece Pb607 de Bukovac. Si nous acceptons l'existence du demi-trou no3 sur la face arriere du femur de Divje babe I, nous devons admettre egalement le deuxieme trou arti-ficiel de Bukovac no2, et reciproquement. Sur la figure 19 on voit la trace du per9age, conforme ä la technique que les contestataires des flutes paleolithique considerent comme principa-le preuve de la fabrication humaine. 6. La datation et I'evolution des sagaies La datation de Bukovac est delicate. Nous devons nous appuyer sur la faune, sur les analogies des os troues, sur les analogies de la pointe et sur la stratigraphie. 6.1 La faune La grotte est une grotte ä ours, ce que l'on peut definir par la preponderance des restes d'ours par rapport aux autres grands mammiferes. Nous fixons arbitrairement ce rapport ä 90%. En dehors des ours nombreux (spelaeus et arctos), Kormos a trouve cinq os de panthere (Leopardus pardus), une dent de lapin et le cerf represente par la pointe. La grotte de Bukovac se trouve ainsi en compa-gnie d'Iställöskö 1, de Potočka zijalka, de Mokriš-ka jama, de Divje babe I, de Salzofenhöhle et de Badlhöhle. Iställöskö 2 (30 900 ans BP) n'a plus la preponderance massive des ours (environ 70%) et Šandalja II (23 000 ä 28 000 ans BP, Karavanic 2003, 599) est dejä domine par le cheval sur la cote adriatique. D'apres la presence massive des ours, les os troues de Bukovac, Salzofenhöhle (34 000 ans BP) et Badlhöhle auraient un äge plus proche de 35 000 que de 30 000 ans BP. 6.2 Les analogies des os troues Les dates se situent entre 46 600 ans BP (40 900 - 52 300 BP, Turk 2001b, Divje babe I) et 30 900 ans BP (Istallöskö 1). Les quatre femurs troues de Bukovac, de Salzofenhöhle et de Badlhöhle sont tres similaires. Seul Salzofenhöhle est date ä 34 000±3000 ans BP (Fuchs 2000). La similitude des trous et l'opinion de Mottl (1950) sur la similitude du femur perdu de Bukovac et de la piece de Salzofenhöhle donnent un indice assez vague sur l'äge possible de Bukovac. Il s'agit d'une confirmation de donnees dejä estimees par d'autres analogies. 6.3 Les analogies de la pointe La sagaie de Bukovac etant le seul objet qui peut fournir des indications chronologiques plus precises, nous devons etendre l'etude ä l'ensemble des pointes de la region concernee : Croatie, Slove-nie, Autriche, Hongrie avec des allusions aux sites aurignaciens en France. Pour la pointe de Bukovac nous avons ä faire un choix entre deux hypotheses. Premiere hypothese : la pointe est du type Olche-va (= Lautsch/Mladeč). Hypothese osee puisque la pointe ne ressemble ä aucune des pointes connues. Deuxieme hypothese (retenue) : la pointe, dont la base est fracturee est une pointe ä base fendue. Les analogies peuvent etre, de taille, de forme, ou de technique (=base fendue ou non). La technique des fentes est une innovation : les pointes ä base fendue existent depuis une epoque precise, probablement ä partir d'Iställöskö 1, mais ne disparaissent pas ensuite. Neanmoins, les pointes ä base fendue etant fragiles, sont abandonnees ensuite quand on chasse aux grands animaux, mais conti-nuent ä exister comme pointes de fleche et pour d'autres usages, par exemple comme alenes (voir Badlhöhle). Les pointes petites font ensuite des apparitions sporadiques dans presque tous les sites d'Europe Centrale sans representer un indicateur chronologique (jusqu'ä Šandalja II, couche H). Par la suite nous n'allons prendre en consideration que les sagaies (grandes pointes) ä bases fendues ou non fendues. höhle, Salzofenhöhle et meme celle d'Iställöskö. Considerer les anciens comme des individus, et non comme des groupes, augmente considera-blement la complexite de la periode examinee mais enleve en meme temps bon nombre de contradictions apparentes. Le premier critere de classement des pointes doit etre la taille. Curieusement ce critere est reste le plus souvent secondaire. Les archeologues ont prefere de regrouper les pointes suivant la technique de fabrication - base fendu ou non - en melan-geant des pointes de taille extremement differen-tes, de 3 ä 40 cm de longueur. Or il est evident que les fonctions de ces pointes de tailles si diffe-rentes ont du etre fondamentalement differentes. Classement par la taille : Il est primordial de classer les pointes par leur taille. C'est la taille qui indique l'usage et les habitudes de chasse. C'est la taille qui est en rapport avec la robustesse et la necessite de changer de technologie en fonction des casses constatees. Dans une etude plus specialisee, les pointes de tailles differentes devraient former quatre ou cinq categories differentes. Nous nous contenterons de partager les pointes en deux groupes : pointes reconstruites inferieures ä 10 cm et superieures ä 10 cm, mais le besoin d'un groupe de 8 ä 12 cm se fait sentir egalement. Classement suivant la technique : Technique de fabrication : base fendue ou base massive. Cet element est essentiel pour estimer la resistance de la pointe ä la rupture. Classement suivant la forme : 6.3.1 Classification des pointes de sagaie Il existe une difference fondamentale entre la classification des objets lithiques et osseux. Les objets lithiques, souvent atypiques ou de mauvaise qualite, sont faits par les Neandertaliens, par les Olcheviens ou par les Gravettiens. Les os perfores et les belles pointes, en revanche, ont ete fabriques par UN Neandertalien ou par UN Ol-chevien. Cet individu pouvait avoir du talent, pouvait etre inventif, astucieux et habile, pouvait avoir 10 000 ans d'avance sur les terriens d'epoque. C'est dans cet esprit que l'on peut interpreter l'origine de la flute de Divje babe I qui rejoint par sa conception la production des flutistes de Bukovac, Badl- La forme de la sagaie est egalement en rapport avec la resistance ä la rupture. Le partage entre bases fendues et non fendues n'a de sens que si on procede ensuite par le groupement suivant la forme. Pour un groupe de longueur don-nee la largeur et sa variation le long de l'objet, ainsi que la section, sont des criteres decisifs : - Les petites pointes ä base fendue representent une innovation et definissent une date butee : la pointe ä base fendue ne peut pas etre anterieure, par exemple, ä 40 000 ans. Par la suite les petites pointes n'evoluent plus necessairement et n'ont plus de signification chronologique. - Les pointes de sagaie longues ä base fendue evoluent et prennent des formes variables qui peuvent avoir une signification chronologique. - Les pointes de sagaie longues ä base non fen-due prennent des formes optimales d'efficacite et de robustesse. Pour trouver des analogies coherentes pour la pointe de Bukovac il faut que les pointes ä base fendue aient une forme et taille comparables. On a pu choisir 5 sagaies de comparaison : Jan-kovich, Mokriška jama, 2 fragments de Velika pečina et Tischoferhöhle. Comme on n'a pu voir sur les figures, chacune de ces pointes a ses particularites malgre un aspect proche de la pointe de Bukovac. Jankovich : d'apres Kadič (1934) elle est sem-blable ä Bukovac. D'apres Breuil (1923), elle est en bois de cerf et probablement ä base fendue (bien qu'on ne le voit pas). Vertes (1955; 1965) a des doutes mais il fait figurer Jankovich sur la liste des bases fendues. La pointe peut etre associee avec des outils szeletiens, d'ou une idee de son age. Sa forme plate et large ne correspond pas ä la grande variete des pointes de Lautsch-Mladeč. L'ensemble lithique Jankovich est du mousterien tardif. La datation de la pointe de Jankovich est fragile : il parait qu'elle provient de la meme couche que deux pointes lithiques "Hochsolutreens" dont l'age serait de 32 000 ans. Mais la couche du "Hochsolutreen" est d'une epaisseur de 1 m, et on ne connait pas les localisations precises dans la grotte Jankovich. Mokriška jama : on peut admettre que les stations en altitude Potočka zijalka, Mokriška jama et Salzofenhöhle fleurissaient ä la meme epoque interstadiale. D'apres Brodar (1985) les deux grottes tres proches ont ete habitees par des gens qui ne se frequentaient pas. La datation de Salzofenhöhle est connue (34 000 ans BP). La base fendue de Mokriška jama est sure mais l'age ne peut etre estime qu'ä partir des gisements correspondants de Potočka zijalka lesquels ont un age en gros entre 29 000 BP ä 36 000 BP (Pacher 2001), mais le detail et les correspondances entre les gisements de ces deux grottes ne sont pas connus. Les deux pointes de Velika pečina, couche "i", sont fragmentaires. leur forme semble epouser tan-töt celle de Jankovich, tantöt celle de Mokriška jama. Leur taille reconstruite depasse ä peine 10 cm que nous avons choisi comme ligne de partage entre les sagaies et les pointes de fleche. La couche "i" de Velika pečina est datee ä 33 800 ans BP (Kara-vanič, Smith 1998) mais la couche est tres epaisse, 85 cm, donc la localisation souleve des doutes. Si on place la piece de Jankovich entre celles de Bukovac et de Mokriška jama, on a une forte impression que les trois font partie de la meme famille et on a tendance ä accepter l'opinion de Breuil sur la base fendue sans connaitre son argumentation. Pour Bukovac les analogies datees indiquent 34 000 ans BP, et les autres estimations hors examen sedimentologique qui reste encore ä faire, re-presentent une periode intermediaire entre 35 000 et 30 000 ans comme par exemple une periode entre Iställöskö 1 et 2. Pour etablir une ligne d'evolution nous sommes limites par la rarete des pieces. Au lieu d'avoir au moins une dizaines de pointes comme ä Iställöskö et encore plus ä Potočka zijalka, nous n'avons qu'une seule piece ä Bukovac, deux pieces de type different ä Badlhöhle, aucune ä Salzofenhöhle, une pointe ä Lieglloch contestee par Brodar (1968). Admettons que cela n'est pas le produit du hasard et faisons de la science fiction en imaginant une dizaine d'exemplaires semblables dans chaque grotte. L'evolution pourrait etre la suivante : Les petites pointes ä base fendue d'Iställöskö evoquent la chasse au petit gibier par fleches. L'etape suivante est l'organisation des chasses au gros gibier : les pointes ä base fendue prennent une forme de losange, une forme ventrue, mais elles deviennent vite fragiles (Bukovac). L'adoption des pointes ä base massive indique une chasse plus efficace aux grosses betes par groupe. Les bases massives deviennent progressivement rondes et arrivent ä la robustesse maximale. Cette reflexion est completee par les considerations de resistance de materiaux : 6.3.2 Evolution en fonction de la resistance ä la rupture On a toutes les raisons de penser que l'evolution des pointes est liee aux problemes de fragilite. Le critere de fragilite nous amene d'abord ä diviser les pointes en deux categories : - Pointes ou la robustesse est secondaire : ce sont des petites pointes utilisees par femmes, enfants, vieillards pour le ramassage de petits animaux, oiseaux ou poissons. Cette categorie n'evolue pas puisque cette activite reste ä un niveau permanent. Les pointes sont au bout de fleches pour arc, au bout de peti-tes lances utilisees par les adolescents et les fem-mes ou elles servent de projectiles de sarbacane. La consommation est importante donc la fixation et la realisation doivent etre simples. - Pointes (sagaies) ou la fragilite pose probleme lors de la chasse aux grands animaux par la population adulte, masculine. Il s'agit de pointes de taille plus grande, d'une elaboration soignee, d'une attention particuliere et d'une evolution permanente. Il convient donc, tout d'abord, d'evaluer la fra-gilite des sagaies. Pour une pointe de surface mediane/distale plus ou moins triangulaire la piece peut casser ä la base c'est ä dire ä l'emmanchement ou dans une region plus pres du bout. Il existe un critere "d'egale resistance" : soient la largeur d'une pointe, de forme triangulaire et de section carree, ä la base "a" et l'epaisseur "b". La cons- tante C = a.b2 a une valeur critique ou la rupture peut se produire ä n'importe quel endroit de la pointe. Si "a" est petit la pointe se casse ä l'emmanchement, s'il est grand elle se casse plutot vers le bout (Fig. 20). En plus, en cas de base fendue la resistance ä l'emmanchement est deux fois plus faible que lä ou l'os est massif. Emmanchement (Fig. 21) : a Sigma = 1000 kg / cm /?/ L cm la force du chasseur moč lovca Fig. 20: Pointe de sagaie ä "egale resistance". Sl. 20: Konica kopja / sulice z "enako trdnostjo". Fig. 21: L'evolution et les deux filiations des pointes plates. Fixations par collage et ficelage. L'ensemble est fragile dans tous les cas. A: Pointe ä base fendue en bois dur. B: pointe ä base fendue en os. C: Pointe szeletienne et manche fendu. D: Pointes en os ou en bois de cerf ä base fendue. E: Pointe en os, le manche est fendu. Le manche est plus large que la pointe. Sl. 21: Razvoj in dva rodova ploščatih konic. Pritrditev z lepljenjem in povezovanjem. Povezava s toporoščem je v vseh ozirih slaba. A. Konica iz trdega lesa z razcepljeno bazo. B. Koščena konica z razcepljeno bazo. C. Seletjenska konica in razcepljeno toporišče. D. Koščene konice ali konice iz jelenovega rogovja z razcepljeno bazo. E. Koščena konica z razcepljenim toporiščem. Toporišče je širše kot konica. Les pointes sont devenues tres larges, il fallait que le manche soit assez epaisse. Lorsque la base est fendue, l'emmanchement s'arrete ä la profon-deur de la fente. On arrive ä une situation para- doxale ä Bukovac. La pointe est large, beaucoup trop large pour le manche, donc l'emmanchement se fait ä une section moins large ou la resistance est encore plus affaiblie du fait de la fente. Calcul du point de rupture des sagaies 1. Cas. Pointe ä section ronde. Le rayon "R" varie en fonction de "x" ä partir du sommet. R = (— x) , ä l'emmanchement x = L et R = (— L) ^ TtG ' ^ na ' avec L = 150 mm, P = 20 kg et a = 10 kg/mm^ le diametre doit etre > ä 14,6 mm 2. Cas. Pointe de surface triangulaire, section rectangulaire, plate. Largeur ä l'emmanchement: "a", epaisseur : "b" = 10 mm, longueur : "L" = 150 mm. RP fiP a = ä l'emmanchement x = L et a = —r-^L = 18 mm. 3. Cas. Pointe de surface triangulaire, section rectangulaire, plate. La base est fendue. Largeur ä l'emmanchement: "a", epaisseur : "b", longueur: "L". A l'emmanchement: CT = 6P/2L 12 L P 2a(1/2b)2 ab2 2 ' il faut diviser P par 2 pour rester ä l'emmanchement dans les limites de rupture. 4. Cas. Pointes des grottes Bukovac, Jankovich et Mokriška jama: largeur de limite de rapture ä l'emmenchement: a largeur de la pointe ä l'emmenchement: A - Bukovac : a = 23,6 mm, A = 16 mm, d'ou rupture ä l'emmanchement, meme en cas de base non fendue. - Jankovich : a = 17,4 mm, A = 32 mm, inferieur ä 2a = 34,8 mm done la rupture n'est possible que si la base est fendue. - Mokriška jama : a = 32,3 mm, A = 32 mm. Si la base etait massive la rupture pouvait se produire n'importe oü. Avec la base fendue la rupture se produit obhgatoirement ä l'emmanchement. (II faudrait une largeur de 64,6 mm pour que la rupture ä la base ne soit pas systematique.) Les donnees ct et P sont des exemples identiques pour les trois pointes. Les conditions de rupture des pointes et les habitudes de chasse ethnographiques ont ete etudiees par H. Knecht (1993, 1997) et Pierre Cattelin (1997). Le progres technique a pu etre le suivant : Le point de depart est le fragment median/distal 3/10 de Divje babe I. La base manque, il est impossible de deviner la technique utilisee pour l'emmanchement. Le fragment est tres semblable ä la partie mediane/distale de la pointe de Vindi-ja G1, Malez 1988, fig. 3: 1, ä base massive. La couche G1 de Vindija contient des restes de Nean-dertaliens. La piece 3/10, comme la flute, fait penser ä un remplacement du bois par l'os ä une Epoque mousterienne, de meme que la pointe de Vindija, contemporaine avec les flutes presumees de Bukovac, Badlhöhle et Salzofenhöhle fait penser ä une nou- velle periode ou le bois a ete remplace par les os. La pointe de Vindija nous relie donc avec les Ol-cheviens tandis que le Neandertalien de Vindija fait la liaison avec le Mousterien de Divje babe I. On peut en deduire que Vindija a joue un role capital dans la transition de Paleolithique moyen au Pa-leolithique superieur. Ce role est bien connu et notre reflexion n'est qu'une petite contribution ä ce probleme qui fait l'objet de nombreuses recherches. Le remplacement de bois par les os en deux periodes si espacees permet de supposer que des conditions climatiques semblables ont fait rare-fier periodiquement les bois specifiques necessaires tantot pour les pointes, tantot pour les flutes, et en meme temps signalent l'abondance des os-sements d'ours. Table 1: Evolution et comparaison des pointes de fleche ä base fendue et des sagaies. L'evolution parallele en France (probable-ment decalee dans le temps). Sources: B/C4,5,7,13 Turk et al. 1997, 2001b; A6 Mottl 1951; B6 Fuchs 2000; A11,C11,12,40 Vertes 1955; C10,14,15,23 Kadic 1934, Allsworth-Jones 1986; C18,19,33 Brodar 1985; A43,C27,31,32,35,36,42-43 M. Brodar, S. Brodar 1983; A28,C28 Hilber 1922; C39 Mottl 1950; C21,30 Malez 1988; A44,B44 Karavanic 2003; C20; Karavanic 2000 = en bois de cerf; C26 Karavanic, Smith 1998 = bois de cerf;B6 Fuchs 2000;B10,11,14,40 divers; B20,21,26,30 Karavanic, Smith 1998; B27,31*,32,35,41,42*P.z. 121 datation directe ä 29760 BP Parcher 2001; C23 Breuil 1923 = probablement ä base fendue, bois de cerf. -^ Tab. 1: Razvoj in primerjava puščičnih konic z razcepljeno bazo in velikih konic. Vzporeden razvoj v Franciji (verjetno časovno odmaknjen). Viri: B/C4,5,7,13 Turk et al. 1997, 2001b; A6 Mottl 1951; B6 Fuchs 2000; A11,C11,12,40 Vertes 1955; C10,14,15,23 Kadic 1934, Allsworth-Jones 1986; C18,19,33 Brodar 1985; A43,C27,31,32,35,36,42-43 M. Brodar, S. Brodar 1983; A28,C28 Hilber 1922; C39 Mottl 1950; C21,30 Malez 1988; A44,B44 Karavanic 2003; C20; Karavanic 2000 = jelenovo rogovje; C26 Karavanic, Smith 1988 = jelenovo rogovje; B6 Fuchs 2000; B10,11,14,40 razno; B20,21,26,30 Karavanic, Smith 1998; B27,31*,32,35,41,42*P.z. 121 direktna datacija 29760 BP Parcher 2001; C23 Breuil 1923 = verjetno z razcepljeno bazo, jelenovo rogovje. Le passage des pointes ä base fendues en bois dur aux pointes ä base fendue en os est une hypothese defendue par Ivan Turk (communication personnelle). Il n'est donc pas impossible que le passage de la technique de bois ä celle de l'os a transfere la pratique de la fente du bois ä la base fendue des pointes en os. Dans cette hypothese il nous est permis de suggerer que la pointe 3/10 de Divje babe pouvait etre ä base fendue. Le bois des pointes ä base fendue a du etre particulierement resistant, de sorte que la resistance de la pointe, avec affaiblissement de la resistance ä cause de la fente, a pu etre egale ä celle du manche en bois leger. L'ensemble pointe et manche aurait pu constituer ainsi une lance ä resistance homogene sans zones de fragilite parti-culieres. Mais en parallele une autre evolution aussi est en route. La pointe fendue en bois noble a son concurrent ou le manche est fendu et la pointe est en pierre. Cela suppose que l'outil lithique devient plat et mince pour s'inserer dans la fente d'un manche en bois leger. Pour compenser la fragilite consi-derablement accrue ä cause de la minceur, la pointe devient de plus en plus large. Les fabricants de lance ont retenu la le9on, les pointes ä base fendue adoptent aussi une forme large et ventrue. La fusion de ces deux chemins conduisent aux pointes en os ä base massive, plates, minces et ventrues. Les pointes larges ont du avoir une section tres aplatie pour que la realisation ä partir d'os longs des ours soit possible. Le diametre des manches est calculable et doit remplir, logiquement, la condition d'une meme resistance ä la rupture que celle de la pointe en os. La forme de la base est egalement une consequence logique pour que le manche ne soit pas trop affaibli ä l'endroit ou la base de la pointe touche le fond du trou. Ces problemes nous menent loin de la pointe de Bukovac et seront traites dans le cadre d'une future etude sur la flute et la pointe de la Badlhöhle. Coupe B Prerez B B VueA Pogled A Fig. 22: Sagaies "Olcheva" ä section convexe-convexe. Le manche n'est pas fendu : un trou est creuse dans le bout. Fixation par colle renforcee par ficelage. La section de la pointe n'est pas ronde, afin d'eviter le decollage par rotation pendant la recuperation. Sl. 22: Velika olševska konica s konveksno-konkavnim presekom. Toporišče ni razcepljeno: vanj je s konca izdolbena odprtina. Konica je prilepljena in privezana. Presek konice ni okrogel, da se ne bi konica odlepila zaradi obračanja pri izdiranju. Le modele ventru est reste tout de meme assez fragile. La solution a ete vite (en quelques milliers d'annees) trouvee : ne pas augmenter la largeur mais plutot l'epaisseur des pointes. Progressivement, l'augmentation de l'epaisseur qui a entraine necessairement la reduction de la largeur ä cause de l'anatomie des os longs, a conduit ä la pointe d'Olcheva. La pointe ainsi est de-venue solide mais l'emmanchement a pose de nou- 1 A) Petites pointes B)BP 2 <10 cm Notes annees 3 p. = piece, c. = couche 4 Riddi 750 >49200 5 ESR 40900 - 52300 46600 6 Repoiusth. base massive 41400 7 Riddi 735 >43400 8 9 Bases fendues: **** 10 GxO-197 >41700 11 istäiiösi<ö1 (11 p.) >39700 12 GrN-4658 >39700 13 Riddi 734 35300 14 GrN-4950 34600 15 16 ****************** **** 17 18 19 20 GrN-4979 33850 21 ETH-12714 33000 22 23 24 ****************** **** 25 26 GrN-4979 33850 27 30000? 28 Badihöhie (1 p.) 29 30 ETH-12714 33000 31 29700 32 GrN 23501 29000 33 34 35 30000? 36 37 ****************** **** 38 39 40 GrN-1935 30900 41 30000? 42 28000 43 Potoei10 cm tous modeles Epoque: Mousterien Divje babe I n"3 couchelO, fragment median Divje babe I couclie 8a FLUTE Divje babe i Epoque: "Aurignacien" Tres fragiles effilees, plates : Szeieta (1 p.) base fendue c. inferieure istäiiösi<ö 1 (7 p.) base fendue c. 9 istäiiösicö 1 (5 p.) base biseautše c. 9 Divje babe, c. 2 (1 p.) base fendue Pesl<0 (1 p.) base fendue c. inferieure Dzerava si