293 Eglantina Gishti, Maklena Çabej: L’IMPORTANCE DE L’ASPECT CONCEPTUEL ... Eglantina Gishti UDK 81'25:34 Département de Français, Université de Tirana DOI: 10.4312/vestnik.14.293-306 Albanie Izvirni znanstveni članek eglantina.gishti@unitir.edu.al Maklena Çabej Département de Linguistique, Université de Tirana Albanie maklena.cabej@unitir.edu.al L ’IMPORTANCE DE L ’ASPECT CONCEPTUEL DANS LA TRADUCTION JURIDIQUE 1 INTRODUCTION Notre réflexion s’appuie sur la constatation que la traduction juridique exige une maî- trise presque parfaite du système du droit et de la terminologie. Les cours enseignés aux étudiants en langues étrangères fournissent des principes généraux de techniques et de stratégies de traduction, qui ne sont pas suffisants en traduction juridique. Force est de souligner qu’il ne s’agit que de réduire cette terminologie à l’étude des mots isolés, mais il importe, au contraire, de considérer l’aspect conceptuel représenté par le langage du droit. Il est communément admis qu’un terme technique ou scientifique a essentiellement un même référent universel et, par conséquent un équivalent exact dans une langue déter- minée. Par contre, les observations des particularités des systèmes judiciaires remettent en cause la validité de l’équivalence parfaite (Gémar, 1995 : 10). Chaque système de droit se caractérise par sa singularité fondamentale étant donné qu’il est élaboré dans un contexte national bien précis et destiné à répondre aux aspirations spécifiques d’une communauté. Pour cette raison, l’attention est particulièrement prêtée à l’équivalence des termes juridiques pour lesquels il est difficile de fournir des équivalents, en regard des dif- férences considérables existant parmi les systèmes conceptuels dues principalement aux différences entre les systèmes juridiques. Cet article vise à présenter quelques stratégies traductologiques auxquelles il est possible de recourir, selon la situation concrète, dans la traduction juridique, même si parfois, le résultat obtenu est loin d’être une solution idéale. Pour notre analyse, nous nous référons aux textes juridiques, concrètement aux arrêts de différents tribunaux en France, traduits en albanais par les traducteurs asser- mentés par le Ministère de la Justice. Deux éléments ont motivé le choix de ce corpus. Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 293 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 293 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 294 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE/JOURNAL FOR FOREIGN LANGUAGES Premièrement, les cultures réceptrices de ces textes partagent des systèmes juridiques différents. En deuxième lieu, la portée juridique d’une même décision est très variable. Les termes dénotent des concepts qui sont généralement organisés selon des modalités propres à chaque système. 2 LANGUE SPÉCIALISÉE « Français sur objectifs spécifiques » (FOS) (Keyong, Vandevelde 2008 : 31), « français de spécialité » (Charnock 1999 : 281), « langue spécialisée » (Lerat 1997 : 1-10), « fran- çais à des publics spécifiques » (Resche 1999 : 2), les appellations sont multiples et cir- culent dans le domaine de la didactique des langues étrangères depuis un certain nombre d’années. La distinction entre ces appellations tient essentiellement au fait que ces types de formations s’inscrivent essentiellement dans une logique qui concerne la demande due au besoin du public identifié et l’offre, à savoir une formation proposée par une institution à des publics potentiels. Certains chercheurs considèrent ces différences comme motivées sémantiquement reflétant des divergences de nature conceptuelle. Selon Resche (1999 : 2) par exemple, l’appellation langue spécialisée souligne « l’idée d’un continuum et non d’une rupture » avec la langue générale, ce par quoi elle se distingue de la langue de spécialité qui suggé- rerait une langue à part. Une autre approche est représentée par Charnock (1999 : 281) qui propose de faire la distinction entre la notion de langue de spécialité, « définie en fonction de la discipline concernée » et celle de langage technique considéré comme « mode d’ex- pression, susceptible de définition linguistique indépendamment du sujet traité ». Malgré toutes les appellations supra, c’est le terme « langue spécialisée » que nous utiliserons dans notre réflexion, le reconnaissant comme étant le plus fréquemment utilisé dans la traduction technique qui nous intéresse. Par langue spécialisée nous comprenons, d’après Lerat (Lerat 1997 : 2) « des usages spécialisés des langues naturelles », conçus pour assurer une communication professionnelle entre les spécialistes. Quelle que soit l’appellation choisie, « la conduite de formation, destinée aux ap- prenants ayant des besoins de communication en langue étrangère, déterminés par leur activité professionnelle », présente toujours de sérieux défis (Sagnier 2004 : 97). De fait, un double problème réside souvent au cours de la traduction des textes spécialisés : un apprenant non-spécialiste de langues, n’ayant pas de fortes connaissances référentielles du domaine des textes à traduire, et ne maniant pas les outils conceptuels qui y sont utilisés, face à un enseignant spécialiste de langues et de didactique mais qui n’a qu’une connaissance limitée du domaine d’activité concerné et qui n’en manie pas toujours très bien les outils conceptuels. En fait, la traduction des textes spécialisés est une opération requérant un savoir-faire à plusieurs niveaux dans la mesure où le traducteur est censé posséder différentes Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 294 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 294 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 295 Eglantina Gishti, Maklena Çabej: L’IMPORTANCE DE L’ASPECT CONCEPTUEL ... compétences. À côté de la connaissance des deux langues et cultures confrontées dans l’acte de traduction, il doit savoir suivre correctement les principes de la traduction et connaître le domaine de spécialité non seulement du côté de la réalité extralinguistique correspondante, mais aussi au niveau « des pratiques discursives jalonnant la communi- cation professionnelle propre à la spécialité en question » (Walkiewicz 2012 : 441). Afin de réussir cet acte de communication, il est important de souligner que le tra- ducteur est censé analyser le texte de départ de façon à le confronter aux traits distinctifs conceptuels, propres à la langue et à la culture réceptrices. Pour y parvenir, il doit possé- der la langue juridique même, c’est-à-dire ses spécificités linguistiques, et, d’autre part le système de droit. 3 LES DIFFÉRENCES CONCEPTUELLES DANS LE LANGAGE DU DROIT Pour Binon/Verlinde (2004), les principes-clés de l’enseignement du vocabulaire, va- lables pour la langue spécialisée concernent la présentation organisée du vocabulaire, les critères de sélection, la nécessité de ne pas se limiter au vocabulaire thématique. Dans le contexte de sa traduction où il est commun de dresser des inventaires de fonctions de communication associées à des situations cibles, le danger de focalisation sur les seuls aspects langagiers est plus grand. L’enseignant tenant compte de ce que Sophie Moirand (Moirand 1990 : 31) souligne, ne doit pas confondre « une définition de contenus en fonction d’objectifs spécifiques avec une réduction de ces contenus en termes d’unités minimales de communication et de signification ». Ceci dit, il est nécessaire d’analyser l’organisation conceptuelle du langage de droit. Le lexique n’est pas un stock de mots ou un ensemble d’irrégularités mais constitue, en effet, un ensemble structurable et or- ganisable. L’organisation conceptuelle vise à l’analyse de différents sous-domaines du lexique spécialisé respectif. Il est vrai que dans les textes juridiques, les différences sont fondamentales au niveau du fond et de la forme et reflètent d’importantes divergences culturelles causant autant de problèmes, qui de leur part nécessitent à se résoudre. Mais, même dans les cas où l’on ob- serve des institutions comparables, elles ne coïncident pas totalement d’un pays à l’autre, au mieux elles se recoupent avec des parties communes et des parties spécifiquement nationales. Par exemple, les phases principales du circuit de la justice dans le domaine du droit pénal ne sont pas les mêmes : le méfait, l’enquête et l’instruction, le procès, les peines, les tribunaux responsables, etc. Illustrons par un exemple: en France, la victime ou le tiers porte plainte au Com- missariat ou en Gendarmerie, après le procès se renvoie au Parquet, qui de sa part dé- clenche l’action publique et saisie le juge d’instruction. Ce dernier le renvoie devant la Chambre d’Instruction laquelle prépare l’ordonnance de renvoi devant la Cour d’Assise. Tenant compte du type de l’infraction pénale, le Juge d’Instruction renvoie la poursuite au Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 295 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 295 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 296 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE/JOURNAL FOR FOREIGN LANGUAGES Tribunal correctionnel ou, la Procédure Pénale prévoit que la victime fasse une citation directe (l’avocat est obligatoire) au Tribunal de Police ou au Juge de Proximité. D’ailleurs, le système policier albanais ne prévoit pas l’institution de la Gendarme- rie. S’agissant de ses missions en France, une partie de l’activité de la Gendarmerie est consacrée également aux missions judiciaires (constatation des infractions à la loi pénale, rassemblement de preuve et recherche d’auteur sous le contrôle et l’autorité des magis- trats). En Albanie, ces missions s’effectuent principalement de la police judiciaire ou du Parquet comme des institutions responsables au niveau de l’instruction. Au cas d’une infraction, il est donc possible de se plaindre au Commissariat. La poursuite pénale conti- nue au Tribunal de Grande Instance. Une fois la décision prise, cette dernière se fait objet de pourvoi en Appel. On conclut qu’il y a des différences procédurales dans les phases principales du circuit de la justice dans le domaine du droit pénal. Le Tribunal de Grande Instance a une chambre pénale, divisée dans la section pénale et celle des mineurs. La loi albanaise prévoit le Tribunal de Grande Instance des crimes graves équivalent en français à la Cour d’Assise. Par contre, le Tribunal Correctionnel représente une juridiction ré- pressive dans certains pays comme la France et la Belgique. Le Tribunal de Police est une formation particulière du Tribunal d’Instance. Ceci dit, on confirme que la traduction de la catégorie notionnelle qui renferme les institutions juridiques, exige une étude préalable de leur champ conceptuel 1 . Dans ce sens, il serait utile de procéder à une organisation conceptuelle de la termi- nologie étant donné que son apprentissage est confronté à une réflexion complexe, car l’élaboration des termes exige une double compétence, linguistique et technique (Reboul 1995 : 197). Pour une meilleure compréhension de ce vocabulaire, nous pourrions opé- rer une division des catégories conceptuelles comprenant des groupes sémantiques très vastes qui constituent les notions de base dans l’organisation du lexique de spécialité – le lexique terminologique. Nina Cuciuc (Cuciuc 2004 : 2) a accompli, dans son étude, une classification des termes juridiques du domaine de la jurisprudence française basée sur le principe onomasiologique. Elle se limite à présenter des catégories terminologiques du langage juridique français établissant une énumération de quatre champs conceptuels: I. Classe conceptuelle des états : a) l’état des choses; b) l’état des personnes; c) l’état de l’infractionnalité. II. Classe conceptuelle des objets : a) la catégorie des actes juridiques; b) la catégorie des écrits juridiques. III. Classe conceptuelle des procès: a) des procédures juridiques; b) des actions juri- diques; c) des procès abstraits. 1 Il faut que nous précisions quelle est l’idée que nous nous faisons du champ conceptuel. Les unités lexicales, unies par des traits sémantiques communs (ceux qui constituent le concept central du champ) qui représentent une partie plus ou moins grande de leur contenu sémantique, forment une structure d’ordre supérieur que nous appelons champ conceptuel. Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 296 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 296 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 297 Eglantina Gishti, Maklena Çabej: L’IMPORTANCE DE L’ASPECT CONCEPTUEL ... IV. Classe conceptuelle des régimes et des activités: a) des institutions juridiques; b) de la qualité du personnel juridique. Examiner les termes en soi, sans se soucier du contexte discursif et des dimensions sociales et culturelles se montre erroné. On peut se demander, dans un premier moment, dans quelle mesure les notions représentées par les classes conceptuelles susmention- nées se correspondent dans les deux langues. De même, force est de nous nous poser la question s’il existe de différence d’extension sémantique des termes qui se rattachent aux différentes catégories conceptuelles. Pour répondre à ces questions, étudions la catégorie conceptuelle qui renferme les institutions juridiques. Un terme de base qui s’inscrit dans l’aire de catégorie conceptuelle désignant des institutions dans le cadre des activités juri- dictionnelles est par exemple, la Cour. Comparant les deux systèmes judiciaires de référence, cela nous communique les schémas suivants: Tableau 1: Ordre judiciaire en France Juridiction civile Juridiction pénale Cour de Cassation Cour de cassation Chambre sociale Chambre commerciale 3 Chambres civiles Chambre criminelle Cour d'Appel Cour d'appel Chambre sociale Chambre commerciale Chambre civile Chambre correctionnelle Cour d'assises d'appel Conseil de prud'homme Tribunal de Commerce Tribunal de Grand Instance Tribunal correctionnel Cour d'assise Tribunal d'Instance Tribunal de police Tableau 2: Ordre judiciaire en Albanie Juridiction civile/pénale Cour de cassation Cour d'appel Cour de Grande Instance Les présents tableaux rendent compte de la différence organisationnelle qui existe entre les ordres judiciaires respectifs. En France, il se divise en deux catégories de juridictions : les juridictions civiles et les juridictions pénales. Pour les juridictions civiles, le tribunal compé - tent change selon la nature de l’affaire et le montant en jeu. Devant les juridictions pénales, Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 297 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 297 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 298 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE/JOURNAL FOR FOREIGN LANGUAGES c’est le type d’infraction qui définit la juridiction compétente. Par contre, en Albanie les deux juridictions se jugent par le même Cour. C’est dans ce sens que l’on peut dire que l’une des caractéristiques du droit est son irréductibilité : l’édifice juridique d’une nation est rarement semblable à celui d’une autre nation et encore moins transposable. Cette irréductibilité (Mo - retti 2016 : 53) peut être totale (pour tout ce qui a trait à l’organisation de la réalité propre d’une nation et d’une langue comme le cas de l’organisation du pouvoir judiciaire). En complémentarité de l’approche « socio-terminologie », empruntée à Gaudin (Gau- din : 2003) qui se penche sur la diversité des usages, sur le plan fonctionnel et sur la cir - culation sociale des termes, il est aussi important de souligner le rôle de la démarche du traducteur qui essaie de s’occuper à la fois au traitement systématique des termes et aux relations conceptuelles. Sur cette interaction citons Sager et Kageura (1994-1995, p. 138) : Cognition is concerned with ordering items of our perception and experience, which implies relating and comparing these items in order to classify or struc- ture them into concepts and concept classes. Our perception initially discovers similarities among items which it associates with, and groups into the exten- sion of a concept, reserving for the intension of a concept those elements which have motivated our grouping of items in the first place. In a simplified manner we could also say that perception is a process which maps extensional items to provisionally established and intensionally defined concepts Reconnaissant que le processus de la traduction exige un haut degré de compréhen- sion des concepts, souvent aussi élevé que celui des spécialistes du domaine, la réflexion exacte de la langue, au sens saussurien, dans ses aspects lexicaux ou l’inventaire fini de termes, n’y seraient pas très utile. Il paraît indispensable qu’on analyse toutes les fluc- tuations terminologiques et conceptuelles du domaine dans les deux langues. Les équi- valents en langue cible ne soient pas donnés dans une optique prescriptive ou normative, mais dans le but d’instaurer des usages propres à chaque système. 4 ÉTUDE DE CAS: QUELQUES STRATEGIES DE LA TRADUCTION DU LANGAGE DU DROIT Pendant le cours de la traduction des textes de spécialité, les étudiants de la section de la traductologie ont à traduire des textes provenant de différents domaines de spécialité. Indépendamment du genre discursif dont relèvent les textes à traduire, avant de procéder à la réalisation de la traduction, les étudiants sont obligés d’accomplir quelques exercices préparatoires ayant pour but d’attirer leur attention sur la complexité de la dimension conceptuelle et discursive et de les sensibiliser à leur impact sur le processus de traduc- tion. En général, dans un premier temps les étudiants ont à identifier le genre représenté Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 298 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 298 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 299 Eglantina Gishti, Maklena Çabej: L’IMPORTANCE DE L’ASPECT CONCEPTUEL ... par le texte qu’ils traduisent, en le localisant dans le contexte générique de départ et d’arrivée, pour ensuite analyser les textes traduits sous l’angle des similitudes, des diffé- rences conceptuelles et linguistiques et, finalement, proposer une version définitive de la traduction. De cette façon, les étudiants apprennent comment faire correspondre les élé- ments constitutifs conceptuels de la langue cible dans celle d’arrivée, ainsi que comment interpréter et confronter le langage juridique, aidés par les outils lexicographiques mis à leur disposition. C’est donc ce que nous allons démontrer sur des exemples qu’ils ont exécutés en vue de traduire des textes du droit du français vers l’albanais. La terminologie juridique et administrative constitue la langue technique utilisée par la Justice et le monde des juristes, par opposition à la langue commune, dont elle se distingue des traits sémantiques, outre sa nomenclature particulière. L’écrit est sa source principale, qu’il s’agisse de documents à caractère officiel (lois, traités, décisions de jus- tice...) ou non (contrats, testaments, opinions...). Cette spécificité de la terminologie juri- dique pose un nombre de problèmes au traducteur, notamment quant à la compréhension et à l’interprétation du texte de plus, le passage d’un système à un autre présente des difficultés singulières tant sur le plan conceptuel que sur le plan de la forme. Il est compréhensible qu’un étudiant s’affronte premièrement à des difficultés de traduction de la terminologie qui décrit des concepts souvent inconnus dans les deux langues. Alors, on conseille aux étudiants une comparaison terminologique entre les deux langues laquelle selon de Saussure, est basée sur des concepts et des termes (Lane : 1982). En langage, un concept est identifié par un terme (simple, syntagme, collocation, etc.). Au processus de la traduction du terme d’une langue à l’autre, ce serait absolument nécessaire de procéder par la compréhension du concept qui s’associe au terme respectif et d’analyser s’ils correspondent. Les étudiants révèlent si les concepts sont identiques, diffèrent partiellement ou entièrement d’un système à l’autre. Considérons le cas de la traduction d’un exemple type de Jugement du Conseil de prud’hommes. Les étudiants s’affrontent dès le début à un terme qui désigne une juridiction principalement française, celle du Conseil de prud’hommes. Au niveau de la compréhension, il est indispensable d’analyser les caractéristiques conceptuelles du terme parce que l’albanais ne dispose pas d’un équivalent étant donné que le système du droit ne prévoit pas de juridiction pareille. Hunout (1987 : 454) dans son analyse de terrain consacrée à une juridiction du travail originale, comme il la considère, définit le Conseil de prud’hommes comme ci-dessous : Les conseils de prud’hommes sont une juridiction « élective » (c’est-à-dire qu’elle n’est pas constituée de fonctionnaires d’État, mais de juges élus) et « paritaire » (c’est-à-dire que les juges élus sont les « pairs » des justiciables qui se présentent devant le conseil ou, autrement dit, qu’ils sont eux-mêmes employeurs ou salariés). Ils ont pour mission officielle de régler par voie de conciliation les différends « individuels » qui peuvent s’élever à l’occasion du contrat de travail entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés (ou, Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 299 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 299 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 300 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE/JOURNAL FOR FOREIGN LANGUAGES en d’autres termes, les différends opposant un salarié pris individuellement à son employeur, et non les conflits entre les salariés pris collectivement - dans le cas d’une grève, par exemple - et l’entreprise qui les emploie). D’après la loi, ils jugent de ces différends lorsque la conciliation n’a pas abouti. Une fois les caractéristiques du concept dans le domaine où il s’applique dans la langue source, les étudiants doivent chercher le terme qui désigne le concept possédant les mêmes caractéristiques dans le système judiciaire albanais. En comparant les fonctions du Conseil de prud’hommes en France avec celles des différentes juridictions, nous aboutis - sons à la conclusion que la Juridiction dont les fonctions s’approchent à celles du Conseil, c’est la Cour Administrative. Cet exemple démontre donc les divergences au niveau des concepts que les systèmes judiciaires, source et cible, réservent à une situation de commu - nication. Il est indispensable d’en avoir conscience pour bien manier la langue spécialisée dans le milieu professionnel, notamment lorsqu’il s’agit de traduire des textes de spécialité. L’approche conceptuelle dans le processus de la traduction n’est pas l’unique défit. Les « ambiguïtés lexicales » sont considérées comme un obstacle majeur à la « clarté » du langage juridique (Novak-Korcz 2015 : 31), parce que le droit implique des univers de référence, des niveaux de langue et des sources d ’énonciation trop variés. Cette caractéristique du droit entraîne des difficultés accrues quand il s’agit de traduire des textes juridiques. La suite de notre étude consiste à la mise en évidence de ces difficultés et à leur résolution possible. Notre échantillon, loin d’être un inventaire exhaustif, est composé des termes (noms ou syntagmes) 2 , dont l’usage est borné au domaine juridique. Comme ces termes sont présents à la fois dans le vocabulaire général et dans d’autres domaines spécialisés, il serait inévitable d’analyser en détail les contextes dans lesquels ils peuvent être employés pour arriver au sens exact du domaine dans lequel les étudiants proposent la traduction. Citons à titre d’exemples le cas où les « ambiguïtés lexicales » correspondent à des mots morphologiquement identiques, appartenant à une même classe grammaticale, mais qui ont des sens différents. AFFIRMATION S 1 Action d'affirmer, de donner pour vrai un jugement. S 2 Caractère d'une proposition dans laquelle la relation énoncée par la copule est donnée comme réelle et positive. S 3 Action, manière d’affirmer, de manifester de façon indiscutable (une qualité). ABUS S 1 Action d'abuser d'une chose; usage mauvais, excessif ou injuste. S 2 Absolt. Cet usage, lorsqu'il s'est établi dans une société; coutume mauvaise. 2 Les termes analysés à la suite de notre étude. Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 300 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 300 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 301 Eglantina Gishti, Maklena Çabej: L’IMPORTANCE DE L’ASPECT CONCEPTUEL ... Le problème est plus aigu quand ces mots entrent dans des relations syntagmatiques avec d’autres mots, d’où par exemple affirmation de créance ou abus de majorité. De plus, les étudiants peuvent se heurter à deux termes juridiques identiques à première vue, mais qui sont porteurs de concepts complètement ou partiellement différents, citons à titre d’exemple Tribunal de première instance, dont la traduction proposée par les étudiants est souvent Gjykata e Shkallës së Parë (traduction littérale). En fait, les compétences du Tribunal de première Instance diffèrent de celles du Tribunal de Grande Instance. Tenant compte de ces compétences, la traduction Gjykata e Shkallës së Parë référerait parfaitement au Tribunal de Grande Instance. L’étudiant opte souvent pour la traduction littérale glissant vers une « fausse équivalence » entre deux termes juridiques. Même si la traduction littérale permet de se faire une idée du concept que ce terme représente, dans ce cas il conviendrait mieux de proposer la paire Tribunal de Grande Instance/Gjykata e Shkallës së Parë. Gémar (1982 : 314) précise que « contrairement à ce que l’on peut ob- server dans les sciences exactes, les concepts juridiques présentent une certaine instabili- té et se prêtent mal à l’analyse. Ce phénomène est amplifié par la diversité des systèmes en présence. Les étudiants doivent se rendre compte que dans la traduction juridique, il n’existe pas toujours de solution concrète à tous les problèmes de traduction. Avant de choisir la stratégie appropriée pour la situation concrète, il est nécessaire de soumettre le terme juridique concerné à une analyse conceptuelle, comme nous avons montré au-des- sus de cette analyse. En ce qui concerne l’équivalence au sens terminologique, les spé- cialistes s’accordent, en principe, sur le fait qu’il faut distinguer trois situations, à sa- voir l’équivalence complète (parfaite), tels les termes de base qui existent dans presque tous les systèmes de droit, cour, conseil, droit, pénal, accord, clôture, etc., l’équivalence partielle et l’équivalence nulle (absence d’équivalence). De manière analogue, Pigeon (Pigeon 1982 : 277) distingue les termes qui ont un équivalent sémantique, ceux qui n’ont pas d’équivalent exact mais pour lesquels on peut trouver un équivalent fonction- nel et ceux qui sont carrément intraduisibles. Les termes parfaitement équivalents (ou presque) sont ceux qui affichent une correspondance complète des notions dans deux ou plusieurs systèmes juridiques, c’est-à-dire que tous les traits notionnels des deux termes en question sont en parfaite correspondance. Revenant à la classification des champs conceptuels, on pourra y classer des termes de base qui existent dans presque tous les systèmes de droit tels, contrainte, engagement (la catégorie conceptuelle des procédures juridiques) ou encore, action, admission, affirmation, communication, force (la catégorie conceptuelle désignant les actions juridiques), abus, accord, clôture (la catégorie concep- tuelle des procès abstraits), conseil, juge, etc. En revanche, deux termes qui sont partiellement équivalents n’affichent pas la cor- respondance complète des notions (de tous les traits notionnels) qu’ils représentent dans le système juridique source et dans le système juridique cible. Pourtant, ils sont compré- hensibles pour leur destinateur, car ils produisent plus ou moins le même effet juridique dans la langue cible que les termes de la langue source. Pour résoudre cette situation, Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 301 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 301 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 302 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE/JOURNAL FOR FOREIGN LANGUAGES nous suggérons aux étudiants de recourir à certaines stratégies. En cas d’équivalence partielle, nous adoptons à Pigeon (Pigeon 1982 : 280) la notion d’équivalence notionnelle « l’on traduit en utilisant un mot qui ne correspond pas rigoureusement au même concept juridique mais à un concept analogue ». Nous soulignons, par exemple que l’équivalent du terme procédure pénale serait en albanais seanca dëgjimore (la première séance du procès pénal), constituant ainsi l’équivalent fonctionnel, car les deux termes renvoient plus ou moins au même concept juridique et porteront les mêmes effets juridiques. Tou- tefois, il convient de remarquer, à cet égard, que le traducteur doit procéder avec précau- tion. Dans ce contexte, on pourrait se demander si syntagme marrja në pyetje (interroga- toire) serait acceptable comme équivalent fonctionnel du terme français interrogatoire au fond et vice-versa, car en comparant les concepts des deux termes, on ne constate qu’une équivalence partielle. 3 Le choix de la stratégie traductionnelle dépend toujours de la situation concrète que le traducteur doit bien analyser avant de procéder à la décision finale. Cependant, pour certains termes juridiques, il est vraiment difficile de trouver un équivalent adéquat. Ci- tons à titre d’exemple que le syntagme abus de majorité poserait des problèmes sérieux au traducteur juridique. La traduction littérale de ce terme abuzimi i shumicës, n’est pas, à notre avis, une solution satisfaisante, car le destinataire non initié ne parviendra à se faire aucune idée du concept représenté par ce terme. En considération de l’impossibilité de trouver un équivalent fonctionnel pour ce terme en albanais, dans ce cas, nous pro- poserions de recourir plutôt à la reformulation du sens du terme ou à la reprise par une définition. 4 5 EN GUISE DE CONCLUSION Dans le cadre de la traduction des textes de spécialité, la traduction juridique représente toujours une catégorie spécifique. La diversité des systèmes du droit dérive, en effet, des différences du découpage de la réalité socio-culturelle qui exige une élaboration conceptuelle entraînant une variété de systèmes des concepts et, par conséquent, de terminologies dont l’unification est difficile. La plus grande difficulté de la traduction juridique réside dans l’absence de correspondance conceptuelle entre le système du droit source et le système du droit cible. 3 Le législateur distingue entre deux types d’interrogatoire : l’interrogatoire de première comparution et l’interro- gatoire de fond. C’est un interrogatoire préliminaire qui permet au juge d’instruction de connaître l’inculpé de près et il permet à ce dernier d’avoir une connaissance exacte des faits qui lui sont reprochés et des droits dont il peut bénéficier. Après l’interrogatoire de première comparution, le juge d’instruction procède à l’interrogatoire de fond, cet interrogatoire ne peut avoir lieu qu’après la convocation de l’avocat de l’inculpé. 4 Vendim i shumicës së aksionerëve në dëm të interesit të përgjithshëm të shoqërisë dhe aksioneve të pakicës, me qëllim favorizimin e tyre. La traduction en albanais consisterait à cette définition: l’abus de majorité suppose qu’une décision de la majorité des actionnaires ait été prise contrairement à l’intérêt général de la société, dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité, et au détriment des minoritaires. Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 302 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 302 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 303 Eglantina Gishti, Maklena Çabej: L’IMPORTANCE DE L’ASPECT CONCEPTUEL ... Au cours de la traduction, les étudiants se confrontent à des situations où le concept d’un terme dans la langue source n’a pas d’équivalent exact ou bien n’a même aucun équivalent dans la langue cible. Devant cette situation, on leur suggère de recourir à plu- sieurs stratégies traductionnelles. Selon la situation concrète, qu’ils doivent analyser en détail, on leur conseille d’étudier les champs conceptuels de la langue source et de celle cible. Une fois les concepts étant clairs, ils décident d’opter pour la traduction littérale, au cas où il existe un équivalent parfait. Ce serait tout à fait possible pour les termes bases dans les deux systèmes pris en examen. Ils peuvent également chercher un équivalent fonctionnel qui est considéré comme un terme, dont la notion ne correspond que par- tiellement à celle de la langue source mais qui sera compréhensible pour le destinataire et produira le même effet juridique dans le texte cible. Pourtant, il est essentiel, dans ce cas, de confronter les ressemblances et les différences entre les deux systèmes juridiques en question. Cette approche sera entièrement productive, si l’on efface complètement les différences. On n’exclurait absolument pas d’autres stratégies et procédés de traduction tenant compte des obstacles d’ordre différent, à savoir, conceptuel, lexical et grammati- cal. Pour conclure, nous constatons que toute situation de communication est particulière et doit être analysée et interprétée en profondeur et que la traduction idéale ne pourra pas exister, n’étant souvent qu’un compromis du traducteur. 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Usvajanje pravne terminologije presega proučevanje posameznih besed; zahteva tudi razumevanje konceptov, ki jih poimenujejo pravni izrazi. Običajno imajo tehnični oz. znanstveni termini univer- zalne nanosnike, zato v različnih jezikih zanje obstajajo popolne, pomensko prekrivne ustreznice. Področje prava je v tem pogledu drugačno. Vsak pravni sistem je poseben, saj je oblikovan v okvi- ru države in zasnovan z namenom izpolnjevanja specifičnih ciljev dane skupnosti. Pri pravnem prevajanju zato posebno pozornost posvečamo zlasti ugotavljanju pomenske prekrivnosti izrazov, katerih ustreznice je zaradi precejšnjih razlik med posameznimi pravnimi sistemi in njihovimi poj- movnimi svetovi težko najti. Da lahko prevajalec najde zadovoljivo ustreznico pravnega izraza v jeziku ciljnega pravnega sistema, mora obvladati tako terminologijo kot pomenski izvor terminov. Namen članka je predstaviti nekaj prevajalskih strategij, ki jih je mogoče uporabiti pri pravnem prevajanju, pri čemer idealne rešitve včasih ni. Ključne besede: prevajanje, pravni sistem, terminologija, strategija, koncept ABSTRACT THE IMPORTANCE OF THE CONCEPTUAL ASPECT IN LEGAL TRANSLATION The diversity of legal systems derives from differences in the division of socio-cultural reality, which requires conceptual elaboration involving a variety of systems and, consequently, termi- nologies whose unification is difficult. The greatest difficulty with legal translation lies in the non- correspondence of concepts between the source law system and the target law system. Students of foreign languages are taught courses on the general principles of translation. However, legal translation necessarily requires a full command of the legal system and terminology. It should be emphasized that legal terminology does not consist of the study of isolated words, but it is impor- tant to consider the conceptual aspects represented by the legal terms. In general, a technical or scientific term has mostly the same universal referent and therefore an exact equivalent in a given language. The legal world operates differently. Each legal system is characterized by its fundamen- tal singularity as it is elaborated in a specific national context and is designed to meet the specific aspirations of a community. For this reason, attention is paid particularly to finding the equivalence Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 305 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 305 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03 306 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE/JOURNAL FOR FOREIGN LANGUAGES of legal terms for which it is difficult to provide equivalents, in view of the considerable differences existing between different legal systems, and thus also among their respective notional systems. For the translator, the task is also to master the terminology and the semantic derivation in order to find a corresponding and satisfying equivalent in the target legal system. Thus, the article aims at presenting some translation strategies that can be used, depending on the actual situation, in legal translation, despite the fact that, sometimes, the result obtained is far from being an ideal solution. Keywords: translation, legal system, terminology, strategy, conceptual Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 306 Vestnik_za_tuje_jezike_2022_FINAL.indd 306 24. 01. 2023 09:19:03 24. 01. 2023 09:19:03