S. Jakimovska: ANALYSE COMPARATIVE DU PHENOMENE... 9 Svetlana Jakimovska UDK [81U33.1:81U63.6]:340.113 Université « Goce Delcev » de Stip, Macédoine DOI: 10.4312/vestnik.5.9-20 svetlana_jakimovska@yahoo.com ANALYSE COMPARATIVE DU PHENOMENE DE LA SYNONYMIE DANS LES TERMINOLOGIES JURIDIQUES FRANÇAISE ET MACEDONIENNE « Intellectuel n'est pas toujours synonyme d'intelligent. » Alexandra David-Neel 1 INTRODUCTION : LA SYNONYMIE DANS LA TERMINOLOGIE1 La synonymie est un phénomène de langue, analysé en détail par les lexicologues. « On parle des synonymes quand deux ou plusieurs mots différents ont le même sens ». (Ull-mann 1975). Le terme synonymie concerne généralement les unités linguistiques d'une seule langue. S'il s'agit de langues différentes, on ne parle pas de synonymes, mais d'équivalents. Donc, en utilisant la terminologie des terminologues, on définit la synonymie comme « ...le fait, pour plusieurs formes linguistiques, de désigner le même concept ». (Depecker 2002). Il s'agit donc de désignations concurrentes pour une seule notion. La synonymie concerne différents niveaux de langue, mais dans la terminologie on se borne à la synonymie morphémique et terminologique. Il est inévitable de mentionner que la synonymie est différemment traitée par les lexicologues et par les terminologues. Pour les lexicologues, la synonymie est un phénomène positif, car l'existence de plusieurs signifiants pour un seul signifié contribue à la richesse de la langue et agrandit les possibilités expressives des locuteurs de cette langue. D'autre part, au prisme terminologique, les termes sont censés être univoques et monoréférentiels. La synonymie est donc vue comme un défaut de la langue naturelle, un phénomène qui ne peut pas être déraciné, mais qui doit être limité. La terminologie s'efforce donc, de la réduire au minimum afin d'éviter l'ambiguïté et de rendre la communication entre les spécialistes plus précise. Pour atteindre cet 1 Le terme terminologie dans cet article se réfère à la terminologie vue comme une discipline scientifique autonome, dans le cadre de laquelle la nature de la notion, les relations notionnelles, la relation notion-terme et la dénomination des notions occupent une position clé. Les bases de cette discipline sont fondées par Wüster, mais ses principes sont développés dans les œuvres de Rondeau, Cabré, Depecker etc. 10 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE objectif, la terminologie dispose de différents instruments, dont la désynonymisation - la différenciation sémantique. Par exemple, avant, on utilisait les termes néologisme et néonyme en tant que synonymes, mais aujourd'hui, on utilise le terme néologisme pour désigner une nouvelle unité lexicale et le terme néonyme pour une nouvelle unité terminologique. 2 TYPES DE SYNONYMES En général, les synonymes sont divisés en deux grands groupes - synonymes absolus (parfaits) et synonymes partiels, approximatifs ou parasynonymes. On considère que deux termes sont des synonymes absolus s'ils sont interchangeables dans tous les contextes sans qu'il y ait de changement du sens ou de la nuance affective de l'énoncé. Dans ce sens, seulement les termes techniques, clairement définis et utilisés dans un nombre limité de contextes, sont des synonymes absolus : magistrats du Parquet / magistrats debout.2 Les cas de synonymes absolus sont très rares et en général on parle de synonymes partiels c'est-à-dire de termes ayant un noyau sémique commun, mais qui ont des sèmes connotatifs ou dénotatifs différents ou bien, qui sont différents quant au niveau stylistique de la langue. On distingue, donc, plusieurs types de synonymes : • Si les termes représentent des variantes régionales d'une seule notion, dans ce cas-là on parle de synonymes géographiques. • Le phénomène de la synonymie temporelle est dû au caractère évolutif de la langue qui change en continu de sorte que certains termes disparaissent et d'autres, nouveaux, prennent leur place. Il s'agit de paires des synonymes, dont l'un est archaïque et l'autre fait partie de la langue contemporaine. • Les couples synonymiques sont parfois constitués de mots appartenant, l'un à la langue commune et l'autre à la langue spécialisée : mort/décès ; conjugal/matrimonial etc. • Les synonymes peuvent aussi appartenir à différents registres de la langue : policier/ flic ou en macédonien : nonanaen/ ^jKaH. • On trouve aujourd'hui des paires synonymiques de termes empruntés à l'anglais et de néonymes dont l'usage est recommandé. 3 Les synonymes mentionnés ci-dessus sont des synonymes stylistiques, mais il y a aussi des cas où les contenus des termes sont différents or, le nombre et l'intensité des traits distinctifs diffèrent. Dans ce cas-là, il s'agit de synonymes sémantiques qui seront abordés d'une manière plus détaillée ci-dessous. 2 Les linguistes sont de plus en plus inclinés à admettre que la synonymie parfaite n'existe pas et que chaque forme linguistique a ses propres nuances, sa propre connotation, son propre fonctionnement en discours etc. 3 Il faut souligner qu'il existe d'autres types de synonymie, comme la synonymie concurrente ou professionnelle qui ne sont pas d'intérêt particulier pour l'étude de la langue du droit. S. Jakimovska: ANALYSE COMPARATIVE DU PHENOMENE... 11 3 LA SYNONYMIE ET LA POLYSEMIE La synonymie ne peut pas être analysée isolément de la polysémie. Comme, Ullmann l'indique : " On parle de synonymie lorsque plusieurs mots ont le même sens, et de polysémie lorsqu'un seul mot a des sens différents". (Ullmann 1975). Or, en employant la langue des terminologues, il s'agit de la polysémie lorsqu'une dénomination renvoie à plusieurs concepts ou notions. Si l'un des synonymes est polysémique, la relation de synonymie s'établit entre l'une des significations de l'unité polysémique. Ainsi, par exemple, audience est synonyme du mot public, si l'on se réfère à l'une des significations du mot, mais aussi synonyme de séance de tribunal, si l'on se réfère à une autre signification. On peut citer à titre d'exemples : Juger 1. estimer, trouver : Il jugea qui était déjà trop tard. npov,eHyea, CMema 2. statuer, décider :Le tribunal jugera. npecyôyea. En macédonien: npaeeH 1. 3aKOHCKu, npaeeH aKm; légal 2. u3pa6omeH, HanpaeeH fait. 4 LA SYNONYMIE DANS LA TERMINOLOGIE JURIDIQUE FRANÇAISE Comme on l'a déjà mentionné, les exemples de la synonymie absolue sont très rares et on peut même mettre en question leur existence. Pour cette raison, notre analyse se concentrera sur les synonymes approximatifs. a. Les synonymes sémantiques Les synonymes sémantiques sont d'une importance majeure dans la langue du droit car leur signification est proche, mais pas identique. Du coup, ils ne sont pas interchangeables dans tous les contextes, surtout dans les contextes juridiques insistant sur la précision. Par exemple, beaucoup de dictionnaires de synonymes traitent les termes légal, juridique et judiciaire comme des synonymes. Il s'agit de termes qui ont un noyau sémique commun car ils concernent tous le droit, mais qui manifestent des différences importantes quant à la signification et quant à leur emploi dans des contextes : 12 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE légal : qui a valeur de loi, résulte de la loi, est conforme à la loi. juridique : qui a rapport au droit. judiciaire : qui concerne la justice rendue par les tribunaux judiciaires. Il faut noter que ces termes correspondent aux termes macédoniens : 3aKOHCKH, npaBeH, cygcKH dont l'emploi n'est pas identique à celle des termes français. Dans ce cas-là, le traducteur macédonien, ou n'importe quelle personne ayant besoin d'une ressource terminologique juridique française (dictionnaire, vocabulaire, base terminologique etc.) aura besoin d'une ressource exhaustive lui expliquant que le terme juridique est plus général et qu'on dit aide juridique car il s'agit d'un organe qui donne des conseils juridiques (npaeHU coeemu) et assistance judiciaire (npaeHa noMorn). Lorsqu'on parle des conséquences globales d'une situation, il faut utiliser l'expression implications juridiques, et non légales. On emploi aussi l'adjectif juridique, et non légal avec les noms avis, opinion. Un exemple similaire est celui des trois substantifs : décision, jugement, arrêt : décision : jugement qui apporte une solution. jugement : décision à caractère juridictionnel d'un juge. arrêt : décision à caractère juridictionnel rendue par une cour d'appel ou la Cour suprême d'un État. Dans les trois cas, il s'agit d'une sorte de décision, mais le terme décision est le plus général et concerne toutes les décisions de la juridiction judiciaire. Néanmoins, le terme jugement est le plus souvent utilisé quand il s'agit de décisions des tribunaux de première instance et le terme arrêt se réfère aux décisions des tribunaux et des cours appartenant à une instance plus haute dans le système judiciaire. Le choix de l'un de ces termes est souvent imposé par le contexte. On dit donc, décision exécutoire (u3epwHa oànyKa); se soumettre au jugement du tribunal, et rarement à la décision. On peut dire Le tribunal a rendu son arrêt, et non jugement, mais en vue d'éviter l'ambiguïté, on recommande l'emploi du terme arrêt dans les contextes où il s'agit des cours de deuxième ou plus haute instance. b. Les synonymes stylistiques Les synonymes stylistiques en français sont dus aux facteurs différents. Le phénomène de la synonymie géographique est très intéressant à analyser. Si l'on prend en compte le fait qu'il s'agit d'une langue qui est la langue officielle dans plusieurs Etats, il devient évident que le français est employé dans plusieurs différents systèmes juridiques. En outre, chaque Etat possède son propre système juridique et judiciaire (le phénomène de la nationalisation du droit) et il arrive que le même concept, dans la même langue soit désigné par des dénominations différentes qui correspondent aux S. Jakimovska: ANALYSE COMPARATIVE DU PHENOMENE... 13 variations géographiques. Par exemple, en France on utilise les deux termes Ministre de la justice et Garde des sceaux, tandis qu'en Belgique on n'emploie que le terme Ministre de la justice. D'autre part, en Suisse on n'emploie pas le terme ministre, qui signifie pasteur, mais le terme conseiller fédéral. En ce sens, l'équivalent suisse du terme Conseil des ministres est le terme Conseil fédéral. Quand il s'agit du terme maire, la langue française dispose de toute une série de synonymes qui sont en usage dans les administrations de différents pays francophones. Ainsi, en France on emploie le terme maire, en Belgique bourgmestre ou maïeur, en Haïti magistrat communal. Au Canada le terme chambrer est un synonyme du terme louer. D'autre part, à cause de variations géographiques, certaines institutions sont caractéristiques pour des pays particuliers. Pour les noms de ces institutions il n'y a pas de synonymes. Les termes de type le Conseil de communauté, la Chambre du conseil, la minorité prolongée sont des termes qui concernent des institutions qui n'existent pas en France. La langue juridique est très ancienne et elle est héritière terminologique des langues grecque et latine. En ce sens, il y a aujourd'hui des paires synonymiques temporelles, dans le cadre desquels un terme est latin et l'autre est français. Il y a comme on l'a déjà mentionné, tout de même, une tendance à supprimer les termes latins et à les remplacer par des termes français pour rendre la langue juridique plus compréhensible. Par exemple, le terme affidavit fait partie du Code de procédure civile mais ce terme est à remplacer par l'expression déclaration sous serment. Au terme latin subpoena, sont préférés les termes français ordre de comparaître, citation à comparaître, convocation, assignation. Il y a plusieurs paires de synonymes dont l'un terme est d'origine latine et l'autre est français : ad litem - procuration, mandat, provision ; item - en outre ; iure...-par droit de... ; exequatur - soit exécuté ; in judicio - en justice ; per caput - par tête ; placet - plaise (au tribunal) ; ratio legis - raison de la loi. Le même principe s'applique à l'usage des termes appartenant au vieux français comme ledit, icelui, nonobstant. Par exemple, à la place de nonobstant les linguistes préfèrent l'usage de même si, sans égard à, en dépit de, malgré, selon le contexte, tandis que les formes icelui, icelle sont remplacées par celui, celle. L'existence de certaines paires synonymiques est due à la tendance de remplacer les mots d'origine étrangère ou des calques par des termes proprement français, notamment dans le cadre du système juridique canadien, où les anglicismes ne sont pas toujours correctement employés à cause de la coexistence des deux langues officielles. Ainsi, l'anglicisme fausse représentation devrait être remplacé par les expressions allégation mensongère, déclaration mensongère, fausse déclaration, présentation mensongère de la réalité ou, par les verbes induire en erreur, déguiser la vérité, tromper... 14 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE L'expression à Veffet que qui est un calque de l'expression anglaise to the effect that peut être remplacée de manières différentes i.e. par des synonymes correspondant aux contextes différents : • Par l'emploi de selon et un pronom relatif la doctrine selon laquelle le mort saisit le vif; • Par l'emploi du participe présent : il a envoyé une lettre avisant de son départ au lieu de : il a envoyé une lettre à l'effet qu'il partait; • Par l'emploi d'un supplément: il a envoyé un avis de départ; • Par l'emploi de que: il a avisé le locateur qu'il partait. Il peut aussi être remplacé par voulant que ou à l'effet de. Le terme soumettre est un anglicisme à la place duquel on recommande les synonymes affirmer, alléguer, dire, déclarer, exposer que quand on expose des faits ou avancer, faire valoir, prétendre, soutenir, plaider lorsqu'on formule une opinion ou une conclusion. Il y a plusieurs exemples de termes anglais qu'on emploie dans la langue juridique contemporaine, même si on recommande l'usage de synonymes français : proper law -loi appropriée ; lease back - cession bail. Les emprunts à d'autres langues sont très rares : putsch - coup dEtat. Des commissions travaillant dans les domaines terminologiques différents et guidées par la Délégation générale de terminologie et de néologie sont chargées de créer des néonymes et d'œuvrer sur leur enracinement dans la langue. Ce sont des néonymes de type : lay off - chômage temporaire ; delivered duty paid - rendu droits acquittés(RDA) ; delivered duty unpaid - rendu droits dus (RDD). Le néonyme juridique le plus récent, publié dans le Journal officiel est le néonyme action de groupe, représenté de manière suivante: action de groupe Domaine : Droit. Définition : Voie ouverte dans certains pays par la procédure civile, permettant à un ou plusieurs requérants d'exercer une action en justice pour le compte d'une catégorie de personnes sans en avoir nécessairement reçu le mandat au préalable. Équivalent étranger : class action. 5 LA SYNONYMIE DANS LA TERMINOLOGIE JURIDIQUE MACEDONIENNE Les synonymes absolus en macédonien, comme dans toutes les langues, sont très rares. On pourrait considérer comme synonymes absolus les synonymes du type : CBegoK OHeBHge^ (témoin); 3aKOHHT/3aKOHCKH (légal); He3aKOHHT/He3aKOHCKH (illégal). Dans la S. Jakimovska: ANALYSE COMPARATIVE DU PHENOMENE... 15 langue juridique macédonienne les termes 3aKOHHT et He3aKOHHT sont plus fréquents. La synonymie absolue est parfois due à la présence de préfixes synonymiques : He3aKOHCKH/ np0THB3aK0HCKH (illégal) ; HeneraneH/uneraneH (illégal) ; HeycTaBeH/npOTHBycTaBeH (anticonstitutionnel). 5.1. Les synonymes sémantiques Comme en français, en macédonien aussi, il y a des synonymes qui possèdent un noyau sémantique commun, mais dont les traits distinctifs sont différents et dont l'usage varie. On peut citer à titre d'exemple les termes neraneH (légal), 3aKOHHT (légal), npaBeH (juridique): ne^aneH: 3aKOHum, eo co^nacHocm co 3aKOHume (conforme aux lois); 3aKOHum, 3aKOHCKu: eo co^nacHocm co 3aKOHume (conforme aux lois); npaeeH: Koj ce oÔHecyea Ha npaeomo eoonmmo (qui concerne le droit en général). Le choix de l'un de ces termes est conditionné par les contextes. Comme le terme npaBeH concerne le droit en général, les termes de la science juridique et certains termes généraux de cette langue spécialisée utilise l'adjectif npaBeH. Pour cette raison, on dit npaBeH nopegoK (ordre juridique), npaBeH aKT (acte juridique) et non neraneH nopegoK, neraneH aKT. Il y a npaBeH ^ayrreT (Faculté de droit), npaBeH CHereM (système juridi-uqe), npaBHa HopMa (norme juridique) etc. Certains mots composés utilisent le terme npaBO (droit), comme npaBOCHAHOCT (validité), par exemple, ou npoTHBnpaBHOCT (illégalité). Dans certains contextes les termes npaBHo et 3aKOHHTO sont interchangeables: npoTHBnpaBHo/He3aKOHHTO (illégal). D'autre part on dit neranHo/HeneranHO gejcTBO (action légale), et non npaBHO ou öecnpaBHO. Les exemples sont nombreux. Même si les synonymes 3aKOHCKH et neraneH ont le même sens, la seule différence étant leur étymologie, il y a des contextes dans lesquels l'usage de l'un des deux termes est inacceptable. On dit 3aKOHCKH h nOg3aKOHCKH aKTH (actes légaux et statuts) et non neranHH et nOgneranHH aKTH. 5.2 Synonymes stylistiques Le système juridique contemporain sur le territoire de la République de Macédoine s'est établi après la Deuxième guerre mondiale. Pourtant, un certain ordre juridique existait depuis longtemps, même à l'époque des Ottomans. En ce sens, aujourd'hui, la langue macédonienne dispose de synonymes juridiques de caractère temporel qui sont le plus souvent des mots d'origine turque. Il s'agit de termes qui ne font pas partie du discours juridique d'aujourd'hui, qu'on traite d'archaïsmes et dont l'usage est limité à de rares contextes. Les synonymes temporels de ce type sont : Kaguja - cyguja (juge turc); anc, ancaaHa - 3aTBOp (prison); öajpaK - 3HaMe (drapeau). Ainsi, le proverbe Kaguja Te Ty®H, Kaguja 16 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE Te cygu (Etre juge et partie), qui indique les injustices du système judiciaire ottoman est employé encore pour désigner certains irrégularités dans le travail des tribunaux. Après la Deuxième guerre mondiale, un nouveau système politique est établi. Certes, ce système présuppose une nouvelle organisation institutionnelle et étatique, ce qui entraîne le besoin de nouveaux termes. D'autre part, un grand nombre de nouveaux termes trouvent leur place dans la société macédonienne contemporaine et on abandonne la terminologie de l'époque communiste. En conséquence, dans la période allant de la Deuxième guerre mondiale jusqu'aux années 90, les termes sont formés d'après les modèles russes, qui ne sont plus suivis aujourd'hui. Ainsi, l'institution 3aBog 3a BpaôoryBa&e s'appelle Eupo 3a BpaôoTyBa&e (ANPE) et pour un certain nombre de termes de cette époque-là il n'y a pas de synonymes contemporains. C'est le cas des termes nepecrpojKa (perestroïka), Konxo3 (kolkhoze) qu'on n'emploie plus et qui sont en train de disparaître. Récemment, on se rend compte d'une nouvelle tendance, dans la langue juridique macédonienne, surtout dans la langue de la politique, d'employer des termes d'origine étrangère, le plus souvent d'origine latine, bien qu'il y ait des désignations correspondantes macédoniennes pour les notions en question. Certains d'entre eux sont enracinés dans l'usage quotidien et on peut dire qu'il s'agit de synonymes, quoique dans ces cas-là, l'emploi du terme macédonien soit recommandé : aeoKa^ja - omnoeuKyeame (révocation); anponpuja^ja - npuceojyeawe, cmemyeawe concmeeHocm (appropriation); uMmeMeHma^ja - cnpoeedyeawe, u3epmyeawe, npuMeHa (implémentation); uHme^pa^uja - oôeàmyeawe, 3Ôpy^yeawe (intégration); mpaHœpecuja - npecman, npeueKopyeawe (transgression); ^euneH - ^pa^aHCKu (civil); $opeH3uuHa Meàu^Ha -cydcKa Meàu^Ha (médecine légale); yHW,amepaneH - edHocmpaH (unilatéral). Les termes suivants sont d'origine anglaise : uMnuvMeHm -omnoeuKyeame (Ha bucok ôpwaeeH fiyH^uoHep) (impeachment); nuàep - eoàau (leader); npec-KOH$epe^uja -KOH$epeH^ja 3a neuam (conférence de presse). Le terme nyn - âpwaeeH ydap (Coup d'Etat) est d'origine allemande, et le terme OMÔyàcMaH -HapodeH npaeoôpammen (Médiateur de la République) est d'origine suédoise. Les termes latins, sous forme originale, sont très rares dans la terminologie macédonienne. Cela est dû au fait que le macédonien utilise l'alphabet cyrillique, et donc, dans la pratique, notamment dans la jurisprudence, on ne retrouve presque jamais de termes latins. Ces termes se retrouvent dans les milieux scientifiques, dans les manuels universitaires et dans la littérature spécialisée. Ils sont le plus souvent accompagné de synonymes macédoniens : abusus -3noynompe6a Ha npaeHO oenacmyeawe (l'abus); conditio -ycnoe (la condition); tempore -poK (le temps); modus - Hano^ (le mode) (EajanyHeB:1999). Dans la langue de la politique, pour des raisons de style (afin d'éviter les répétitions), on emploie des synonymes décrivant les termes correspondant : napnaMeHT -3aK0H0gaBeH goM (Parlement); npeMuep - npercegaTen Ha Bnaga (premier ministre) ; npercegaTen - me$ Ha gp^aBa (Président-chef d'Etat). S. Jakimovska: ANALYSE COMPARATIVE DU PHENOMENE... 17 6 COMPARAISON DU PHENOMENE DE LA SYNONYMIE JURIDIQUE DANS LES DEUX LANGUES La synonymie est un phénomène complexe. Certaines de ses manifestations sont identiques dans les langues différentes, mais les manifestations de ce phénomène varient dans les différentes langues spécialisées. Par exemple, la synonymie est moins répandue dans les langues spécialisées des sciences naturelles que dans les langues spécialisées des sciences sociales, ce qui s'explique par le fait que les sciences sociales utilisent un plus grand nombre de mots de la langue générale. D'autre part, la synonymie se caractérise par des traits particuliers dans chacune des langues spécialisées, et surtout dans la langue du droit, qui est étroitement liée aux conditions sociales d'un pays donné. Lorsqu'on parle de synonymes absolus, on peut dire qu'ils sont rares dans les langues juridiques française et macédonienne, ce qui s'explique par la définition même de la synonymie absolue, mais aussi par le caractère spécifique de cette langue spécialisée qui se veut d'être le plus précis possible. En ce qui concerne les synonymes géographiques, qu'on retrouve dans la langue juridique française, leur existence est due à l'usage de cette langue dans des pays différents, ayant des systèmes juridiques différents. La langue macédonienne, d'autre part, n'étant la langue officielle qu'en Macédoine, ne connaît pas ce type de synonymie. Quant à la synonymie temporelle, les deux langues manifestent des variétés résultant de différentes conditions historiques et sociales qui ont marqué le développement des deux pays. Ainsi, dans la langue française, les synonymes temporels sont des mots latins ou des mots du vieux français, tandis qu'en macédonien ce sont des mots d'origine turque. Mais, à la différence des mots d'origine turque, traités aujourd'hui d'archaïsmes et absents du discours juridique, les mots du vieux français, à cause de la longue tradition du droit français, font encore partie du vocabulaire juridique, même si, on s'aperçoit que leur usage se minimalise. L'héritage du droit romain, par les emprunts latins, et encore aujourd'hui fortement présent dans les deux langues, mais à des degrés différents. En macédonien, l'usage des emprunts latins est limité, tandis qu'en français il s'agit d'un corpus de mots et d'expressions latins qui est beaucoup plus abondant et dont l'usage n'est pas seulement limité aux cercles scientifiques, mais qu'on retrouve aussi dans les documents officiels, comme certaines dispositions légales et rarement des verdicts. Certes, la langue juridique faisant partie de la langue commune, n'est pas isolée de toutes les influences ressenties dans le cadre de la langue commune, surtout de celle de la langue anglaise. Pour cette raison, dans la langue juridique, on retrouve des termes et des emprunts d'origine anglaise. Ce phénomène se fait le plus fortement ressentir au Québec à cause du bilinguisme officiel, mais il arrive souvent que pour ces termes on propose et recommande l'emploi des néonymes français correspondants. En Macédoine, 18 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE la politique linguistique officielle prescrit la substitution de ces termes par des synonymes macédoniens. Pourtant, dans la pratique, surtout dans la langue des médias, on retrouve fréquemment des anglicismes. REFERENCES APCOBA -HHKO.HK, .HgHja, 1998 : CipaHCKH HMHBa bo MaKegoHCKHoT ja3HK. CKonje: Mara^ MaKegoHCKa. ATAHACOB, neTap & nOnOCKH, AneKca, 2007: MaKegoHCKo-®paH^ycKH peranK. CKonje : npocBeTHo geno. ATAHACOB, neTap & nOnOCKH, AneKca, 1992 : ®paH^ycKo-MaKegoHCKH peranK. CKonje : MaKegoHCKa KHHra-npocBerao geno. AUGER, Rousseau et coll., 1978 : Méthodologie de la recherche terminologique Montréal : Office de la langue française. 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Ključne besede: terminologija, pravo, sinonimi, francoščina, makedonščina ABSTRACT The Phenomenon of Synonymy: A Comparison of the French and Macedonian Legal Terminologies Synonymy is a language phenomenon that is viewed in a different way by the lexicologists and the terminologists. For the lexicologists synonymy contributes to the diversity of the language, whereas for the terminologists it leads to the imprecision of the specialized communication. The aim of this paper is to compare the manifestations of this phenomenon in both French and Macedonian language of law, specialized language that insists a lot on the precise formulation. The comparative analysis takes into consideration two big synonym groups: semantic and stylistic synonyms. The analysis of the synonyms belonging to the first group shows the role of the context when choosing an adequate synonym. On the other hand, the analysis of the stylistic synonyms, concentrates more on the expressive values of different terms. It also shows the presence of different types of synonyms in different languages i.e. presence of geographic synonyms in French, or presence of different types of historic synonyms in the two languages. 20 VESTNIK ZA TUJE JEZIKE Pointing out the different meaning nuances and the proper ways of use of the terms can be of crucial importance for the translator, especially for the legal texts translator. Key words: terminology, law, synonyms, French language, Macedonian language. RÉSUMÉ Analyse comparative du phenomene de la synonymie dans les terminologies juridiques Française et Macedonienne La synonymie est un phénomène linguistique différemment vu par les lexicologues et par les ter-minologues. L'objectif de cet article est d'analyser les manifestations de ce phénomène de point de vue terminologique - dans le cadre d'une langue spécialisée - la langue du droit, imposant des critères particulièrement élevés par rapport à la monoréférence et à l'univocité des termes. L'analyse comparative qui tiendra en compte deux langues, le macédonien et le français, portera sur deux groupes de synonymes : les synonymes sémantiques et les synonymes stylistiques. L'analyse des synonymes appartenant au premier groupe montre le rôle du contexte dans le choix d'un synonyme adéquat. D'autre part, l'analyse des synonymes stylistiques, se concentre davantage sur les valeurs expressives des différents termes. La mise en valeur de différentes nuances de sens et de l'emploi précis des termes peut être d'une importance cruciale pour le traducteur, en particulier pour le traducteur de textes juridiques. Mots clés : terminologie, droit, synonymes, français, macédonien