UDK 821.133.1'Ol.09 Huon de Bordeaux LE MERVEILLEUX DANS HUON DE BORDEAUX Irena Prosenc INTRODUCTION L'article présent se propose d'analyser le merveilleux dans la chanson de geste Huon de Bordeaux. Précédée par une définition théorique du merveilleux, l'analyse commence par un répertoire des manifestations du merveilleux dans le poème qui sont illustrées par des exemples textuels. Les chapitres suivants offrent une comparaison entre les origines profanes et les origines chrétiennes du merveilleux, avec une réflexion sur la signification du merveilleux dans Huon de Bordeaux. I. LA DÉFINITION DU MERVEILLEUX Lorsqu'on étudie le phénomène du merveilleux, on se trouve devant plusieurs termes appartenant au même champ sémantique: le merveilleux, le surnaturel, le fantastique, le magique, le miraculeux, l'étrange. Dans l'article présent je me concentre sur la notion de merveilleux, en utilisant les termes suivants: surnaturel; merveilleux; magique. La notion de merveilleux appartient au domaine du surnaturel. Le surnaturel est ce qui surpasse la nature, ce qui ne peut pas être expliqué par les lois naturelles connues, donc "ce qui surpasse la compréhension".1 Dans l'article présent, le terme surnaturel est utilisé à un niveau plus général que celui du merveilleux. Le merveilleux est considéré comme une des catégories qui font partie du domaine du surnaturel. Selon J. Le Goff, ces catégories sont: mirabilis; magicus; miraculosus.2 Le terme mirabilis dénote ce que l'on appelle le merveilleux et a des origines préchrétiennes. Le magicus ou le magique concerne le surnaturel maléfique, associé surtout à la magie noire: "Le terme en soi pourrait être neutre pour les hommes de l'Occident médiéval, puisque théoriquement on reconnaissait l'existence d'une magie noire 1 Dickman, Adolphe Jacques: Le rôle du surnaturel dans les chansons de geste. Paris: Champion, 1926, p. 7. 2 Le Goff, Jacques: "Le merveilleux dans l'Occident médiéval". Dans Id.: L'imaginaire médiéval. Paris: Gallimard, 1985, p. 22. 35 qui était du côté du Diable, mais aussi d'une magie blanche qui était licite. En fait le terme magicus, et ce qu'il recouvre, très rapidement a balancé du côté du mal, du côté de Satan."3 Dans l'article présent, le terme magique est utilisé surtout pour décrire les pouvoirs et les objets (pour la plupart associés à Auberon) qui produisent des effets merveilleux. Pour finir, le terme miraculosus ou le miraculeux dénote le merveilleux chrétien. A propos de la relation entre le merveilleux et le surnaturel, L. Harf-Lancner observe que "le merveilleux se superpose aujourd'hui au surnaturel: est merveilleux tout élément qui échappe à une causalité rationnelle. Au Moyen Age en revanche, la question sous-jacente à toute réflexion sur ce sujet ne porte pas sur la réalité du surnaturel mais sur sa signification."4 Sans faisant mention du terme surnaturel, D. Poirion décrit Y étrange, le merveilleux et le fantastique comme des manifestations du même phénomène appliquées aux domaines différents: "Yétrange, le merveilleux, le fantastique désignent le même phénomène mais selon différentes perspectives, à savoir celles de la psychologie, de la littérature et de l'art. Quant au phénomène lui-même, on peut le définir comme la manifestation d'un écart culturel entre les valeurs de référence, servant à établir la communication entre l'auteur et son public, et les qualités d'un monde autre"5. La base du merveilleux et de ses autres deux formes complémentaires est donc l'altérité. Le merveilleux est caractéristique de ce qui ne fait pas partie de notre monde - du monde que nous connaissons et qui fonctionne selon des lois toujours pareilles. Le merveilleux est donc une manifestation de l'autre qui fait irruption dans un univers familier. Selon M. L. Meneghetti, le merveilleux se manifeste toujours dans un contexte réaliste qui valorise sa nature extraordinaire.6 Il est donc le résultat d'une juxtaposition du surnaturel au naturel: "eventi e personaggi riconoscibili come appartenenti al piano epistemico del soprannaturale vengono giustapposti ad eventi e personaggi riconoscibili come appartenenti al piano epistemico del naturale".7 En créant un contact, un "court-circuit",8 entre les différents niveaux de la réalité, cette juxtaposition permet la manifestation du merveilleux. Le merveilleux se manifeste donc dans un "double univers"9 dans lequel les éléments du quotidien, du croyable, du rationnellement acceptable, servent de fond à l'irruption de l'insolite, de l'étrange et de l'irrationnel. 3 Le Goff, Jacques: ibid. 4 Harf-Lancner, Laurence: Les Fées au Moyen Age. Morgane et Melusine. La naissance des fées. Genève: Slatkine, 1984, pp. 7-8. 5 Poirion, Daniel: Le merveilleux dans la littérature française du Moyen Age. (Collection Que sais-je?) Paris: Presses Universitaires de France, 1982, pp. 3-4. 6 Meneghetti, Maria Luisa: "Meraviglioso e straniamento." Dans II meraviglioso e il verosimile tra antichità e Medioevo. Edité par Lanza, Diego et Longo, Oddone. Firenze: Olschki, 1989, p. 229. 7 Meneghetti, Maria Luisa: op. cit., p. 230. 8 Meneghetti, Maria Luisa: op. cit., p. 231. 9 Meslin, Michel: "Cos'è il meraviglioso?" Dans II meraviglioso. Misteri e simboli dell'immaginario occidentale. Edité par Meslin, Michel. Traduction par Sanfelice di Monteforte, Annamaria. Milano: Mursia, 1988 (Le merveilleux. L'imaginaire et les croyances en Occident. Paris: Bordas, 1984), p. 8. 36 II. LE RÉPERTOIRE DU MERVEILLEUX DANS HUON DE BORDEAUX II.l. LES ÊTRES MERVEILLEUX II.l.l. Auberon L'agent principal du merveilleux dans Huon de Bordeaux est Auberon, le roi de Féerie, un pays imaginaire entre Jérusalem et la mer Rouge. C'est un nain bossu, mais en même temps le plus bel homme du monde. Auberon définit soi-même comme un homme en chair et en os, pour souligner le fait qu'il n'est pas une divinité: Ne sui pas Dix, ains sui uns hom carné (10433) Cependant, ce n'est pas un homme comme tous les autres. Quand il se présente à Huon, il lui dit qu'il est né d'une fée (la fée Morge) et d'un être humain (Jules César). Il a donc des qualités humaines et merveilleuses à la fois. A ce propos, R.-L. Wagner observe que "Aubéron se situe (...) dans une région intermédiaire entre la nature humaine et la nature spirituelle des fées".10 Les caractéristiques qui définissent Auberon comme un être merveilleux sont sa forme de nain, ses pouvoirs surnaturels et les objets magiques grâce auxquels il accomplit des actions merveilleuses. D. Poirion souligne l'importance des objets magiques en disant que "la qualité 'merveilleuse' du personnage est surtout rendue significative par le recours à des objets magiques qui lui sont attribués".11 Auberon est donc à la fois un "hom carné" et un être merveilleux. Sa déclaration explicite sur sa nature humaine sert à souligner le fait qu'il n'a aucune prétention de se comparer à Dieu (au cours du poème il dit à plusieurs reprises que son pouvoir est soumis à la volonté divine) et à confirmer l'autorité suprême de Dieu comme la seule divinité. II.1.2. Les géants Les nains et les géants "exagèrent d'une façon grotesque des disproportions humaines".12 Dans Huon de Bordeaux il y a deux géants, les frères Orgueilleux et Agrapart. Ils sont les fils du démon Belzébuth, et sont donc d'origine satanique. Orgueilleux habite dans le château de Dunostre qu'il a soustrait à Auberon avant même le commencement de l'histoire de Huon. A part sa grandeur et laideur (4958-4964), il a la particularité de manger des êtres humains (4924-4927). Il est tué par Huon au cours d'un duel. Au sujet de la relation entre Auberon et Orgueilleux, R.-L. Wagner observe: "De même qu'Aubéron a sa place dans une hiérarchie qui conduit de l'homme à Dieu, l'Orgueilleux occupe, en nature, un degré intermédiaire entre le Diable et l'homme."13 10 Wagner, Robert-Léon: "Sorcier" et "magicien." Contribution à l'histoire du vocabulaire de la magie. Paris: Droz, 1939, p. 89. 11 Poirion, Daniel: op. cit., p. 101. 12 Wagner, Robert-Léon: op. cit., p. 81. 13 Wagner, Robert-Léon: op. cit., p. 89. 37 Agrapart apparaît dans le poème pour venger la mort de son frère, mais Huon le vainc grâce au haubert enchanté dont il s'est approprié pendant le duel avec Orgueilleux. 11.1.3. Le lutin Le mot lutin vient de neitun, signifiant "monstre marin" en ancien français. Le lutin qui apparaît dans Huon de Bordeaux est Malabron, un familier d'Auberon qui a été transformé en lutin en guise de punition (on ne sait pas pour quel genre de faute). Le lutin a la forme d'un animal marin. Il se présente à Huon lorsque celui-ci veut traverser la mer Rouge. Il lui montre sa vrai forme - la forme humaine - en enlevant sa peau (5350-5356). Sa nature de lutin est donc une espèce de déguisement qu'il peut enlever dans des occasions particulières. Le lutin prend Huon sur son dos et lui fait passer la mer Rouge en un instant (5397-5403). Malabron aide Huon une deuxième fois lorsque celui-ci est ligoté par des pirates et abandonné dans l'île Moisant. Il le délivre et le porte jusqu'au rivage le plus proche (7104-7154). 11.1.4. Les fées Dans le poème les fées n'apparaissent pas à proprement dire, elles n'y sont que mentionnées. Elles ont donné à Auberon ses pouvoirs magiques (voir aussi le chapitre II.2.1.), et elles ont fabriqué quelques uns de ses objets magiques, notamment le cor et le fauteuil (voir les chapitres II.3.2. et H.3.3.). II.2. LES POUVOIRS MAGIQUES D'AUBERON Le pouvoir d'Auberon est presque illimité, car il possède de nombreux dons magiques qui lui ont été accordés par les fées. II.2.1. Les dons des fées A la naissance d'Auberon, quatre fées se sont rassemblées autour de son lit. La première fée, qui était de mauvaise humeur, lui a accordé un don maléfique -celui d'être un petis nains bocerés (un petit nain bossu). Elle s'en est repentie aussitôt, mais elle ne pouvait qu'atténuer son don en accordant à Auberon d'être le plus bel homme du monde. Les autres fées lui ont accordé les suivants pouvoirs magiques: • Auberon connaît les pensées et le cœur des gens; • il peut se transporter immédiatement dans n'importe quel endroit et avec autant d'hommes qu'il désire; • il peut construire un palais et avoir de la nourriture et des boissons sur un simple souhait; • toutes les bêtes lui obéissent; • il connaît les secrets du paradis et entend les anges chanter; • il ne vieillira jamais; • quand il aura envie de terminer sa vie, il ira au paradis où il sera assis à côté de Dieu. En effet, à la fin du poème Auberon déclare qu'il ne veut plus vivre dans ce monde et qu'il a l'intention de se transporter au paradis au bout de trois ans (3520-3550, 3573-3583; 10510-10514). 38 II.2.2. Les actions merveilleuses Auberon est l'auteur de la plupart des actions merveilleuses dans le poème. Voici leur répertoire: • Lorsque les chevaliers français refusent de lui parler, il fait déchaîner une tempête et fait apparaître une grande rivière qu'ils ne peuvent pas traverser (3289-3299). • Quand Huon et Auberon deviennent amis, Auberon fait instantanément surgir un grand palais magique dans lequel il offre à manger et à boire aux chevaliers français (3607-3623). • Auberon met la barbe et les quatre molaires de Gaudisse dans le flanc de Gériaume en les scellant sur sa hanche (6724-6728). • A la fin du poème, Auberon sauve la vie de Huon. Il suffit d'un simple souhait pour que sa table soit dressée dans la sale où Charlemagne banquette avec sa court: Jou y souhaide ma tauble en son hosteit (10176) Selon le souhait d'Auberon, sa table est plus haute que celle de Charlemagne. Sur la table sont posés son hanap, son cor et son haubert (10176-10183): Tantost y furent comme il l'ot commandei (10183) Ensuite, Auberon libère Huon, Esclarmonde et Gériaume de leurs fers, toujours par un simple souhait (10240-10242). La barbe et les molaires de Gaudisse sont apportés dans la salle par magie (10398-10400). A la fin, Auberon punit les traîtres - Gérard, Gibouart, le faux abbé de Saint-Maurice-ès-prés et un moine - en les faisant pendre à des gibets apparus devant le palais par magie (10414-10425). II.3. LES OBJETS AUX POUVOIRS MAGIQUES Dans Huon de Bordeaux figurent plusieurs objets qui ont des pouvoirs magiques. La plupart de ces objets appartiennent (ou ont appartenu) à Auberon. 11.3.1. L'arc L'arc d'Auberon a le pouvoir de tuer toutes les bêtes (3246-3248). 11.3.2. Le cor Le cor d'ivoire, fabriqué par les fées, a plusieurs pouvoirs: • celui qui l'entend est guéri de toute maladie; • celui qui l'entend est rassasié et désaltéré; • celui qui l'entend commence à chanter et à danser; • dans n'importe quel pays que l'on sonne du cor, Auberon l'entend à Monmur, sa cité (3251-3270). 39 Au cours de ses premières apparitions aux chevaliers, Auberon sonne du cor plusieurs fois pour les faire chanter (3271-3272, 3380-3383). En plus, il le frappe d'un doigt et déclenche une tempête (3289-3295). Par la suite, il donne le cor à Huon pour que celui-ci puisse l'appeler à l'aide en tout endroit. Cependant, il spécifie une condition: Huon ne doit l'employer que dans un péril mortel (3737-3752). Huon sonne du cor quatre fois: • Premièrement, il veut vérifier le fonctionnement du cor, tout simplement parce qu'il n'y croit pas. Dès qu'il en sonne, Auberon arrive avec cent mille hommes armés (3846-3871). Quand il voit que Huon n'est pas en danger, il se fâche, mais il lui pardonne aussitôt. • La deuxième fois que Huon sonne du cor, il se trouve réellement en danger. Il est assiégé dans la ville de Tormont par le traître Oede. Auberon arrive à son aide avec cent mille hommes (4509-4528) et tue tous les païens dans la ville qui refusent de se faire baptiser. • Lorsque Huon sonne du cor pour la troisième fois, Auberon refuse de l'aider, parce que celui-ci avait dit un mensonge en dépit de son interdiction (5605-5613). • La quatrième et dernière fois, Huon sonne du cor parce que Gaudisse refuse de se convertir à la foi chrétienne, au cours d'un festin à Babylone. Cette fois-ci Auberon lui avait déjà pardonné et il arrive de nouveau avec cent mille hommes armés (6668-6682). Comme à Tormont, il fait massacrer tous les païens qui refusent de se faire baptiser. 11.3.3. Le fauteuil Dans le palais qu'Auberon fait surgir pour Huon et ses chevaliers au milieu de la forêt, il y a un fauteuil magique qui a été fabriqué par les fées. Celui qui y est assis (dans ce cas, Auberon) est protégé du poison et du feu (3637-3641). 11.3.4. Le hanap Le hanap appartient à Auberon, mais celui-ci le donne à Huon. Il se remplit si l'on y trace le signe de la croix et il est inépuisable, sous la condition que celui qui y boit ait un cœur pur. Dès qu'il s'agit d'un pécheur, le hanap se vide immédiatement (3676-3695). (A ce propos, voir aussi le chapitre IV.2.) II.3.5. Le bâton d'or Le bâton d'or a le pouvoir de séparer les eaux d'une rivière pour y créer un passage. Il est employé par un familier d'Auberon qui aide Huon et ses chevaliers à traverser une rivière en séparant ses eaux (3776-3795). II.3.6. Le haubert A l'origine, le haubert enchanté appartenait à Auberon, mais il lui a été soustrait par le géant Orgueilleux, probablement en même temps que le château de Dunostre. Quand Huon tue le géant, il s'approprie du haubert. Le haubert a les pouvoirs suivants: • celui qui le porte ne peut pas être blessé; • il ne peut pas se noyer; 40 • il est protégé du feu (4605-4608). Cependant, le haubert ne peut être endossé que par des personnes sans péché mortel et dont la mère est vertueuse (5089-5097). (A ce propos, voir aussi le chapitre IV.2.) II.3.7. Les automates Dans Huon de Bordeaux il y a deux groupes d'automates: • les deux automates qui défendent l'entrée au château de Dunostre. Ils sont en cuivre et frappent sans cesse avec des fléaux de fer pour empêcher l'entrée au châteaux à tous ceux qui n'en connaissent pas le mécanisme (4590-4598, 4746-4754); • les quatre oiseaux qui figurent au bords du lit du géant Orgueilleux. Ils annoncent le jour en chantant doucement (4950-4955). Aujourd'hui les automates sont considérés tout simplement comme des machines, mais au Moyen Age ils faisaient partie du répertoire merveilleux, soit parce que l'on ne comprenait pas la manière dont ils fonctionnaient, soit parce que les auteurs mêmes choisissaient de ne pas la révéler. Selon D. Poirion, "les prouesses techniques de l'Orient son à dessein confondues par les narrateurs avec les effets de la magie".14 En effet, dans Huon de Bordeaux le mécanisme des automates au château de Dunostre n'est pas expliqué de manière rationnelle, même si l'on sait qu'un tel mécanisme existe. Bien au contraire, l'auteur dit que les automates ont été créés par magie: Par ingremance i furent compassé (4955) Mais leur magie n'a pas d'effet sur celui qui en connaît le mécanisme - la jeune Française qui est enfermée dans le château les immobilise d'un simple geste pour faire entrer Huon. II.4. LES LIEUX MERVEILLEUX Dans Huon de Bordeaux il y a plusieurs lieux merveilleux, mais pour la plupart ils n'y jouent pas un rôle actif, à part le verger de Gaudisse à Babylone. II.4.1. Le verger merveilleux A Babylone il y a un verger merveilleux où poussent les exemplaires de toutes les espèces d'arbres existantes. Dans le verger surgit une fontaine qui provient du paradis. Elle a la force de rajeunir ceux qui se lavent les mains dans son eau (5571-5588). La fontaine est gardée par un serpent, mais celui-ci n'a pas de pouvoir sur Huon qui est protégé par le haubert magique. Après avoir bu de l'eau de la fontaine, Huon oublie momentanément sa mission à Babylone (5589-5596), mais il s'en souvient après avoir fait appel à Notre-Dame. 14 Poirion, Daniel: op. cit., p. 26. 41 II.4.2. Les autres lieux merveilleux Parmi les autres lieux merveilleux, celui qui figure directement dans le poème est la forêt dans laquelle Huon rencontre Auberon. Les événements merveilleux qui s'y produisent sont l'œuvre d'Auberon et ne proviennent pas des particularités du lieu même. Dans la forêt, Auberon sonne du cor et force les chevaliers à chanter, il frappe le cor d'un doigt et déclenche une tempête, il fait apparaître une rivière que les chevaliers ne peuvent pas traverser, et à la fin il fait construire un palais en un instant et leur offre à manger et à boire. Auberon habite dans la Féerie, dans la cité de Monmur, qui est située "dans un au-delà inaccessible":15 Lonc est de chi, je vous di par vreté, Quatre cens lieues i puet on bien conter. (3552-3553) La forêt sert de lieu de communication entre Auberon et ce monde. Selon R.-L. Wagner, "le domaine d'Aubéron, sa forêt, est isolé avec précision et, avant que d'y atteindre, le héros de l'histoire doit traverser des pays fabuleux".16 Ces lieux merveilleux que Huon traverse avec ses compagnes sont: la Femenie, un pays pauvre et désolé, la terre des Commains, êtres sauvages et poilus, et la terre de Foi, pays de l'innocence et de l'abondance. Leur voyage vers la forêt d'Auberon peut être interprété comme un voyage d'initiation.17 Parmi les lieux merveilleux dans Huon de Bordeaux figure aussi l'île Moisant dans laquelle Huon est abandonné par des pirates. Ce qui permet de la caractériser comme un lieu merveilleux est sa position près de l'Enfer qu'Auberon définit de manière suivante: A trois lieuetes est Infers le puant (7086) II.5. LE SONGE PRÉMONITOIRE Dans Huon de Bordeaux il n'y a qu'un songe prémonitoire. C'est le songe que Gérard, le frère de Huon, fait au début du poème. Huon et Gérard doivent se présenter devant Charlemagne. Pendant leur voyage de Bordeaux à Paris, Gérard a un songe dans lequel il pressent qu'il leur arrivera un malheur. Dans son songe, trois léopards lui tirent le cœur de la poitrine; Huon se sauve, mais Gérard est blessé (596-603). Le songe de Gérard se réalise par la suite: les deux frères tombent dans l'embuscade tendue par Chariot et Amauri, dans laquelle Gérard est blessé grièvement, tandis que Huon reste intact. 15 Poirion, Daniel: op. cit., p. 100. 16 Wagner, Robert-Léon: op. cit., p. 88. 17 Wagner, Robert-Léon: ibid. 42 II.6. LES SERMENTS Pendant la cérémonie qui précède le combat judiciaire provoqué par la mort de Chariot, Huon et Amauri doivent se coucher devant l'autel. Les cierges que l'on met autour de Huon restent debout, tandis que ceux qui entourent Amauri tombent par terre (1504-1510). Ensuite, Amauri commet un parjure en jurant sur les reliques, ce qui le fait chanceler (1612-1635). Ces deux signes sont donnés par Dieu pour prouver que Huon est innocent. II.7. LA PRIÈRE Pendant le duel entre Huon et Amauri, l'abbé de Cluny prie pour Huon qui est près de succomber. Grâce à sa prière fervente, Huon retrouve sa force. Tout comme les deux signes cités ci-dessus, cet événement sert à prouver que Dieu est de la part de Huon. III. LES ORIGINES DU MERVEILLEUX Les pouvoirs magiques d'Auberon proviennent de deux sources: une source chrétienne et une source profane. III.l. LES ORIGINES PROFANES Auberon est né d'une union entre une fée et un être humain (3514-3515). Tous ses pouvoirs magiques lui ont été accordés par les fées (3520-3550, 10445-10460). En plus, son cor et son fauteuil ont été fabriqués par les fées: Fees le fissent en une ille de mer (3251) A ce propos, L. Harf-Lancner fait mention des fées marraines, qui ont leur origine dans le folklore.18 En tant qu'héritières des Parques, elles assistent à la naissance d'un enfant et décident de son futur en lui accordant des dons positifs ou négatifs. Selon L. Harf-Lancner, dans le cas d'Auberon "les pouvoirs d'un être surnaturel, inexplicables et inexpliqués, se trouvent justifiés par un autre élément merveilleux, l'intervention des fées".19 III.2. LES ORIGINES CHRÉTIENNES En dépit de l'influence des fées sur sa vie, Auberon déclare à plusieurs reprises et avec beaucoup d'insistance que son pouvoir magique lui a été accordé par Jésus-Christ: Le grant pooir que Jhesus m'a donné (3673) 18 Harf-Lancner, Laurence: op. cit., p. 27. 19 Harf-Lancner, Laurence: op. cit., p. 32. 43 Dans ses discours, il se réclame sans cesse de l'autorité de Dieu et de Jésus-Christ en se déclarant loyal à la foi chrétienne. Au cours du poème, l'autorité et la puissance de Dieu comme la suprême force surnaturelle ne sont jamais mises en doute. Dans Huon de Bordeaux, la notion religieuse et la notion profane de merveilleux sont présentées comme parfaitement compatibles. Les termes féerie (indiquant la puissance des fées) et Dieu sont fréquemment juxtaposés pour expliquer l'origine du merveilleux: Par faerie, par le Dieu volenté, A Tormont vint, la mirable cité. (4527-4528) Tantost i fu comme il l'ot dévissé, Par faerie, par le Dieu volenté. (6681-6682) (Voir aussi les vers 6728 et 9785.) L'auteur ne se pose pas de question sur la coexistence du féerique et du religieux, mais il est clair que c'est l'explication chrétienne qui prévaut. Si Auberon a reçu ses dons magiques des fées, c'est que leur puissance même leur a été accordée par Dieu. Et si le fauteuil et le cor magiques ont été fabriqués par les fées, le hanap l'a été par Dieu: C'est de par Dieu que chis hanas est tés. (3683) Pour répéter avec A. J. Dickman, "Dieu est tout puissant en féerie".20 D. Poirion va aussi loin que d'assigner à Auberon le rôle de l'Ange gardien: "Auberon lui-même fait l'objet d'une christianisation assez poussée, qui contribue à édulcorer le monde des sortilèges dont il est le promoteur. Ainsi la double nature, bonne et mauvaise, de l'enchanteur Merlin, fait place à la nature uniquement bonne et morale de l'enchanteur Auberon, tout le mal étant attribué au Diable. Le merveilleux y perd de sa puissance, la littérature l'exploitant surtout comme fantaisie susceptible de ranimer et agrémenter les fonctions de l'Ange gardien, en face des démons."21 Cependant, si l'origine du merveilleux est chrétienne, la forme sous laquelle il se manifeste est féerique. En effet, plusieurs auteurs affirment qu'au fond, c'est le féerique qui l'emporte sur le chrétien. A propos d'Auberon, A. J. Dickman observe que "sa puissance lui vient de Dieu et c'est une puissance purement magique".22 20 Dickman, Adolphe Jacques: op.cit., p. 11. 21 Poirion, Daniel: op. cit., p. 103. 22 Dickman, Adolphe Jacques: op. cit., p. 11. 44 Selon R.-L. Wagner, la juxtaposition du merveilleux chrétien au merveilleux profane est due à l'intention de l'auteur de "justifier les thèmes magiques (...) Dans une telle intention (...) il se voit alors contraint de les accommoder aux croyances chrétiennes qui seules, évidemment, lui paraissent en rendre raison".23 Mais il ne s'agit que d'un "christianisme de façade dont le poète se sert comme d'un ornement".24 IV. LA SIGNIFICATION ÉTHIQUE DU MERVEILLEUX La signification éthique du merveilleux dans Huon de Bordeaux est très importante et fait partie de la morale chrétienne. Les qualités exaltées dans le poème sont: la sincérité; l'innocence; la loyauté; la pureté. IV.l. LE PROBLÈME DU MENSONGE Auberon avertit Huon qu'il ne doit jamais mentir: dès qu'il dira un mensonge, il perdra son amitié, tandis que les objets magiques qui lui ont été donnés perdront leur pouvoir magique (3720-3725): Mais ja si tost mençoigne ne dirés Que ne pergiés du hanap le bonté Et de mon cors trestote l'amisté. (3723-3725) Malabron, le lutin, répète l'avertissement d'Auberon en ajoutant que Huon doit toujours garder un cœur pur. Tien bien ton cuer et bien ta loiauté, Que ja si tost mençoigne ne dirés Que tu ne perges d'Auberon l'amisté. (5421-5423) En dépit de ces avertissements, Huon commet une "grant foleté" (5461) en disant deux mensonges pour se sauver des situations dangereuses: • Lorsqu'il arrive au premier des quatre ponts qui mènent au palais de Gaudisse, il dit qu'il est sarrasin pour pouvoir passer, car il ne se souvient pas qu'il pourrait utiliser l'anneau d'Orgueilleux (5461-5467). Il s'en repent aussitôt et jure qu'il ne mentira plus jamais (5472-5474), mais c'est trop tard - Auberon a entendu son mensonge dans la Féerie et Huon a perdu son amitié. Par la suite, Huon sonne du cor dans le verger magique, mais Auberon refuse de le secourir en le nommant "larron" (5605-5613). • Huon ment pour la deuxième fois lorsqu'il rencontre, tout nu et affamé, le ménestrel Estrument. Celui-ci lui demande de quel pays il vient et comment il s'appelle. Huon hésite entre la vérité et le mensonge, mais il décide de mentir pour se sauver la vie. Il dit alors qu'il s'appelle Garinet et qu'il vient de l'Afrique (7247-7248, 7272). 23 Wagner, Robert-Léon: op. cit., p. 91. 24 Wagner, Robert-Léon: op. cit., p. 92. 45 Chaque fois que Huon dit un mensonge, il perd la protection d'Auberon pour un certain temps. Puisqu'Auberon tient son pouvoir de Dieu, cela signifie que Huon, en mentant, perd la protection divine. IV.2. LA PURETÉ COMME LA CONDITION DU MERVEILLEUX Dans Huon de Bordeaux, deux objets font fonction d'épreuve morale: le hanap et le haubert magiques. Leur pouvoir magique dépend de la probité de la personne qui les utilise. Le hanap est inépuisable, mais on n'y peut boire que sous la condition d'avoir un cœur pur: Nus n'i puet boire s'il n'est preudom, par Dé, Et nés et purs et sans pecié mortel. (3692-3693) Au festin des pauvres organisé par Huon dans la ville de Tormont, Oede ne réussit pas à boire du hanap, parce qu'il est un traître (4253-4260). Plus avant dans le poème, Gaudisse - le païen - n'y arrive pas non plus (6641-6651). A la fin du poème, Auberon apporte son hanap au banquet de Charlemagne et offre à boire à tout le monde. Personne n'y réussit, à part Huon, Esclarmonde, Gériaume et le vieux Naimes. Même Charlemagne n'est pas sans péché. Auberon, qui connaît le cœur des gens, sait qu'il a jadis commis un horrible péché dont il ne s'est jamais confessé. Pourtant, il a de la compassion pour lui et décide de ne pas le dire publiquement (10245-10286). Le haubert, de sa part, protège des blessures, de l'eau et du feu, mais il ne peut être endossé que par des personnes sans péché mortel et dont la mère est vertueuse (5089-5097). Le géant Orgueilleux offre à Huon de l'essayer, et Huon subit l'épreuve avec succès. Par la suite, le haubert le protège pendant le duel avec le géant Agrapart. Il le protège aussi à la fontaine de jouvence, où le serpent qui la garde ne peut pas lui faire de mal. Mais il s'agit aussi de la pureté physique. Avant que Huon et Esclarmonde partent de Babylone pour aller se marier à Rome, Auberon défend à Huon d'anticiper sur les droits que lui donnera le mariage (6734-6741). Huon, emporté par la passion, ne lui obéit pas. Son bateau est alors détruit par une tempête, Esclarmonde est emmenée par des pirates sarrasins et Huon reste ligoté sur une île déserte d'où il sera sauvé sur l'initiative de Malabron (et non pas sur l'initiative d'Auberon). Auberon finit toujours par prendre Huon en pitié, mais non sans lui avoir fait subir des épreuves. Quand Huon commet des fautes, Auberon l'abandonne dans des situations difficiles. C'est justement à travers la souffrance dans de telles situations que Huon reconquiert l'amitié d'Auberon. A ce propos, D. Poirion observe que "Ainsi l'épreuve merveilleuse est-elle en rapport avec la purification morale."25 A la fin du poème, lorsque la vie de Huon est en danger, Auberon lui pardonne toutes ses fautes et vient à son secours (10149-10244). En outre, il le désigne pour héritier du royaume de la Féerie (10490-10493). 25 Poirion, Daniel: op. cit., p. 102. 46 Après tout, Huon s'est donc prouvé digne de la confiance du petit roi. S'il ne se soumet pas totalement à ses désirs et à ses avertissements, c'est par curiosité et impétuosité, et non pas par méchanceté. Ses fautes ne sont pas graves, elles sont tout simplement humaines. En plus, il s'en repent toujours, ce qui n'est pas sans importance si on pense au rôle de la pénitence dans la religion chrétienne. C'est par la probité de son caractère que Huon gagne l'amitié d'Auberon: Moult aime droit et foi et loiauté; Pou chou aim jou Huon le baceler, Car preudom est et bien l'ai esprové. (10463-10465) A ce propos, R.-L. Wagner remarque: "Si Aubéron ne retient pas Huon dans son royaume, s'il lui accorde son aide, s'il pardonne à son protégé chaque fois que celui-ci, par démesure, transgresse ses ordres, c'est que le chevalier a le cœur pur et se présente, en fin de compte, comme un Perceval au petit pied."26 L'idée de base est donc qu'il faut mériter la protection des forces merveilleuses. Et puisque la protection d'Auberon représente la protection divine, cela signifie que Dieu aide ceux qui le méritent selon les critères de la morale chrétienne. CONCLUSION L'agent principal du merveilleux dans Huon de Bordeaux est Auberon, le petit roi de Féerie. Il a des pouvoirs surnaturels qui lui ont été accordés à sa naissance par les fées et grâce auxquels il accomplit de nombreuses actions merveilleuses. Les autres êtres merveilleux figurant dans Huon de Bordeaux sont les géants, le lutin et les fées. Auberon et son protégé Huon utilisent plusieurs objets aux pouvoirs magiques: l'arc, le cor, le fauteuil, le hanap, le haubert et le bâton d'or. Dans le poème figurent aussi des automates dont le mécanisme n'est pas expliqué et qui sont présentés comme magiques. La plupart des lieux merveilleux ne joue pas un rôle actif dans le poème, à part le verger à Babylone, où surgit une fontaine de jouvence. Les autres lieux importants sont la forêt dans laquelle Huon rencontre Auberon et l'inaccessible pays de la Féerie. Parmi les manifestations mineures du merveilleux dans Huon de Bordeaux on peut mentionner le songe prémonitoire de Gérard, les serments de Huon et Amauri et la prière de l'abbé de Cluny. Le merveilleux dans Huon de Bordeaux provient de deux sources: une source chrétienne et une source profane. Même si Auberon a reçu ses pouvoirs magiques des fées, il insiste sur le fait que son pouvoir lui a été accordé par Jésus-Christ. La notion religieuse et la notion profane de merveilleux sont présentées comme parfaitement compatibles; toutefois c'est la notion chrétienne qui prévaut. L'autorité et la toute-puissance de Dieu ne sont pas mises en doute. 26 Wagner, Robert-Léon: op. cit., p. 91. 47 Le merveilleux dans Huon de Bordeaux a une signification éthique qui relève de la morale chrétienne. Dans le cas de Huon, la notion de péché se traduit en celle de mensonge, pour lequel il est puni par la perte de la protection d'Auberon. La condition de toute intervention merveilleuse est la pureté morale et physique, qui est testée même par certains objets magiques. En dépit des fautes qu'il commet, Huon gagne l'amitié d'Auberon par la probité de son caractère. L'idée de base est donc qu'il faut mériter la protection des forces merveilleuses, et donc la protection divine, en respectant les règles de la morale chrétienne. BIBLIOGRAPHIE Huon de Bordeaux. Edité par Ruelle, Pierre. Bruxelles - Paris: Presses Universitaires de Bruxelles - Presses Universitaires de France, 1960. Dickman, Adolphe Jacques: Le rôle du surnaturel dans les chansons de geste. Paris: Champion, 1926. Faral, Edmond: "Le merveilleux et ses sources dans les descriptions des romans français du XIIe siècle." Dans Id.: Recherches sur les sources latines des contes et romans courtois du Moyen Age. 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