DANS LA TURQUIE D'EUROPE. Minili, irrnitiiiiiis DANS LA ---------s\s^/\J \f\J.jw-- DÉTAILS GROG H A PHIQU ES, TOPOGRAPHIQUES et STATISTIQUES su: cet EMPIRE PAR Dr. en médecine, Membre honoraire de la Société des Sciences tic Harlem, de La Société géologique du Cornouaitles, de la Société de Physique de Genève, du Musée de Bohème à Prague, de la Société géologique de l'Autriche intérieure à fir.it/. de la Société Wemérieaiie de Brunu et de la Soeiété d'Utilité publique de Trêves, Membre de l'Académie impériale des sciences de Vienne, des Sociétés géologiques de France et de Londres, des Sociétés Wernérienne et. de médecine d'Edimbourg et des Sociétés d'Histoire naturelle de Moscou, de Halle, de Francfort sur le Main et de Berne, Correspondant de la Société philomatique de Paris, de la Société de Géographie de Berlin , de l'Académie des Sciences naturelles de Philadelphie . de la Société de L'Université de Cracovie, de la société Linnéenne du Calvados, des Sociétés d'Histoire naturelle --------—---«nnJiAAAAAnnww------------ —------ V T E N N E. EN COMMISSION c H E Z W. B R A u M l" L L E K, LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE IMPERIALE DES SCIENCES. 18 54. imprimerie de charles g e kol d et fils. AVANT- PROPOS. Lorsqu'en 1840 je publiai à Paris ma Turquie d'Europe (en 4 vol. in-8°), je laissai en manuscrit le détail de mes Itinéraires, parce que je voulais donner à mon compagnon de voyage, Mr. Viquesnel, le temps de publier ses Itinéraires pour voir si mon manuscrit ne deviendrait pas inutile. Malheureusement mon ami ne s'est guère occupé que de topographie et spécialement de géologie, en négligeant la géographie physique, L'ethnographie et la statistique. (Voyez Mém. de la Soc. géol. de France. 1842. Vol. 5 et 1846 N. S. Vol. I. avec 2 cartes.) Ainsi mes Itinéraires ont conservé une certaine nouveauté, mais ce qui rend leur publication vraiment nécessaire, c'est que depuis mes voyages aucun ouvrage semblable n'a remplacé le mien. ]) D'ailleurs Mr. ') Parmi les voyages parus depuis 1841 les plus intéressans sont le voyage en Roumelie par A. Gricsbach (lleise i m Jahre 1839. Gottingue, 1841, 2 vol. 8°.), la brochure et la carte de l'Albanie septentrionale du Dr. Jos. Mûller (Albanien, Rumelien, etc. Prague, 1844 in 8°.); le voyage en Bosnie du botaniste Dr. O. Sendtner (Ausland, 1848 et 49); celui de Mr. Gardner Wilkinson dans le Monténégro et en Herzégovine (Londres, 1848) et celui de Mr. Edmond Spencer (Travcls in European Torkey in 1850. Londres, 1851, 2 vol. in 8°.); enfin les études snr l'Albanie (Albanesisehe Studien) de Mr. de Halin. Grain, 1854 in s". Viquesnel n'a pas fait même avec moi la moitié des routes que j'ai parcourues quoiqu'il en ait suivies d'autres, qui me sont restées inconnues. Une autre raison, qui m'a surtout excité à livrer au public toutes mes observations de détail, c'est que grâce à la toute nouvelle carte de la Turquie d'Europe (en 4 f.) de Mr. Kiepert, le lecteur pourra enfin me suivre. Je dois mille rcmercîmens à ce cartographe distingué pour ce beau et pénible travail, qui fait appercevoir d'un coup d'oeil les vuides à remplir dans la géographie de la Turquie. Il a utilisé toutes les nouvelles observations et môme en partie le canevas de la carte toute nouvelle du Rhodope et de la Thrace que Mr. Viquesnel va bientôt faire paraître. Il a de plus livré des cartes de détail pour la Servie, la Bosnie et l'Albanie eu employant la carte de la Servie de Bougarski (Belgrade 1845) ainsi que celles du Dr. Millier et de Mr. de Hahn pour la Haute Albanie. Il est fâcheux que Bougarski n'ait pas mis plus de soin au tracé de la montagne, car on n'y distingue pas assez les basses montagnes d'avec les chaînes élevées et les collines. Quant à la carte du Monténégro du colonel Karaczay, la partie albanaise contient des fautes géographiques, parce que l'auteur n'a pas été dans ce pays, quoiqu'il ait pu recueillir des renseignemens précieux sur l'existence véritable de bon nombre de hameaux avec leurs dénominations albanaises. vn Pour les détails sur la population, nous avons cru utile d'ajouter en abrégé quelques-uns de ceux fournis sur l'Albanie par le Dr. Muller et Mr. de Hahn, puis surtout les rapports officiels sur la Servie par Mr. Jean Gavrilo-vitch dans son dictionnaire géographique et statistique de ce pays. {Rietschnih geographiislco-statistitschnii Srbie. Bel-grad 1846.16°.) Malheureusement la liste des hameaux est incomplette et la position géographique précise des villages est omise, ce qui n'est pas remplacé par les détails administratifs. Quant à la Turquie proprement dite, nous ne nous sommes pas occupés de ses divisions gouvernementales. Les limites de ces dernières n'étant pas stabiles, comme en Europe et en Servie (voyez ma Turquie, vol. 3, p. 184). Celui qui voudrait les connaître, trouve dans la carte de Kiepert l'état actuel des choses. La porte ottomane, ne sachant que très approximativement le nombre de ses sujets, la plupart de nos assertions numériques sur la population des Paschaliks ne doivent être prises que pour ce qu'elles valent. (Voyez ma Turquie, vol. 2, pag. 1— 32.) Il y a en Turquie trop de causes, qui empêchent un relevé exact de la population. Nous rappelons au lecteur qu'il est d'usage en Orient comme dans les pays slaves de donner divers noms à différentes parties d'un même cours d'eau, de manière que parmi les noms des sources d'une grande rivière, souvent on ne retrouve pas celui de cette dernière. Ensuite les Itinéraires de différons voyageurs en Orient peuvent varier considérablement, non pas seulement à cause des nombreuses synonymies dans la nomenclature géographique, mais encore pour l'indication des distances et par la non-conformité des descriptions locales, parce qu'il n'y a pas partout des grandes routes comme en Europe et que chaque sentier presque peut servir de chemin au cavalier. D'ailleurs on n'y cherche pas toujours la plus courte voie pour aller d'un lieu à un autre; mille motifs divers et le plus souvent inconnus aux voyageurs peuvent les en faire dévier. Pour ne pas nous répéter, nous renvoyons toujours à notre grand ouvrage de 1840 pour des détails déjà donnés sur des forteresses, des châteaux, des couvens ou des monumens, ainsi que sur la distance de chaque hameau à un autre. Nous aurions souvent désiré d'examiner les villes plus en détail, mais du moins lors de nos voyages, cela n'était pas encore possible comme aujourd1hui, parce que le voyageur seul ou môme avec un Kavas s'exposait à des ennuis par des visites répétées, par le stationnement et les demandes de curiosité dans les quartiers surtout mahométans. Nous avons donné un soin particulier à l'orthographe véritable des noms slaves, dont une foule se retrouvent dans tous les pays habités par cette race, ce qui permet de rectifier des erreurs de géographes et d'historiens. Néanmoins il reste recueil de la prononciation bulgare et des fautes grammaticales du langage vulgaire de ce peuple ainsi que les changemens apportés par le temps dans certaines dénominations par les Turcs et surtout par les Albanais. Ainsi par exemple si les Serbes n'ont guère de mots à doubles consonnes, on serait tenté cependant, d'après le parler des habitons, d'en employer ca et là quelquefois. (Voyez ma Turquie d'Europe, vol 4, pag. 470.) Enfin le lecteur ne doit jamais oublier que nous avons représenté la Turqide comme elle était, il y 14 ans, à l'heure qu'il est bien des choses peuvent s'y présenter tout autrement. Dans ce tableau d'un état assez voisin de celui du moyen âge chez nous, aujourd'hui, comme en 1840, nous n'avons rien caché ni fardé, parce que la vérité peut seule être utile. Néanmoins n'oublions jamais qu'en grande partie le fanatisme et la cruauté des Turcs ne sont plus que des chevaux de bataille et que les Grecs surtout ont la même peine à mettre un frein à leurs haines. Rappelons-nous toujours les horreurs passagères de toutes les guerres, celles en particulier que les sectes chrétiennes se sont permises l'une contre l'autre et le fanatisme mutuel, qui les anime encore aujourd'hui. D'un autre part souvenons-nous de tout ce qui se passe, hors des usages humains du reste de l'Europe, chez ceux, qui s'intitulent, par pure politique d'envahissement, les élus du Très-Haut pour l'extermination des Musulmans et le bonheur du sxenre humain. Que le gouvernement turc s'européanise et leurs habitans seront bientôt heureux, sans avoir eu besoin de ces astucieux croisés. Que des chemins de ter coupent ces pays, que leurs richesses territoriales soient toutes utilisées, que l'Europe ne se laisse arrêter par aucune nouvelle duperie dans sa tâche divine de reculer les bornes de la civilisation* Que l'Orient ne fasse plus qu'un avec l'Occident, ce paradis terrestre prendra bientôt un rang élevé parmi les empires et nos descendans profiteront immanquablement de nos nobles efforts comme de nos souffrances actuelles. TABLE DES MATIERES. Pages Avant-Propos ... .............................................. v—vm Introduction....................*............................... 1— 4 TURQUIE ORIENTALE. N°. I. Itinéraire de Belgrade à Constantinople par Pojarévatz, Widdin, le Balkan de Tchipka et Andrinople.......................... 5— 53 Route de Pojarévatz à Milanovatz par Goloubatz .... .............. 16— 19 „ ,, ,, Voukovitché................. 19 „ ,, „ ,, ,, Maidanpck................... 20 N°. II. Itinéraire de Belgrade à Constantinople par Nisch et Sophie... 54— 75 BULGARIE et BALKAN. N°. III. Itinéraire de Nisch à Leskovatz, Trn, Sophie et depuis là a Etropol, Lovdscha, Trnova et Varna.......................... 76— 96 BULGARIE, BALKAN et THRACE. N". IV. Itinéraire de Nicopoli à Andrinople et Enos par le Balkan d'Islivné................................................... 97—106 N". V. Itinéraire de Itazgrad à Islivné par le Balkan...............107—112 N°. VI. Itinéraire de Routschouk a Constantinople par Schoumla, Kar- nabat et Andrinople ........................................113—121 N°. VII. Itinéraire de Sehoumla à Constantinople par Aidos et à travers la chaîne côtiere de la mer Noire........................122—135 N°, VIII. Itinéraire de Toultscha à Bourgas par Paravadi ou Varna . . 136—137 THRACE. N°. IX. Itinéraire de Philippopoli à Bourgas par Kalofer, Eski-Sagra, Janboli et Aidos...........................................138—143 N°. X. Itinéraire de Constantinople à Séres et Salonique le long de la Mer Egée à travers le Tékir-Dagh ...........................144—155 N*. XI. Le Rhodope ou Despoto-Dagh et ses routes .............. 155 — 163 TURQUIE CENTRALE, MACÉDOINE et HAUTE ALBANIE. Pages N*. XII, Itinéraire de Belgrade à Salonique par Kragoujévatz. Novi- pazar, Ipek, Prischtiria et Ouskoub...........................164— N°. XIII. Itinérairo de Salonique à Nisch par Séres, Radomir et Pirot »u Scharkoë...............................................215—24l N". XIV. Itinéraire d'Egrï-Palanka à Douratzo en Albanie par Karatova, Tstib, Monastir ou Bitoglia et Elbassan ....................... 242—V69 N°. XV. Itinéraire de Monastir à Salonique par Florina, Kastoria et Vodéna....................... ........................... 270—285 N". XVI. Itinéraire de Constantinople à Scoutari par Banja, Doubnitza, Kostendil, Ouskoub, Kalkandel, le Schar, Prizren, et le pays des Myrédites.................................................. 286-337 HAUTE MOESIE. N°. XVII. Itinéraire de Constantinople à Prizren par Doubnitza, Radomir, Trn, Vranja, Gujian et Prischtina............................. 338—IÎ52 ADDITION S. Page 31. La structure du pied méridional du Balkan diffère considérablement de celle du versant opposé. Les principales vallées longitudinales et mémo transversales, sont en bonne partie plus spacieuses. „ 36. Le boni septentrional de la vallée en grande partie longitudinale de ln Tondja sert à se rendre de Kezanlik a Schlivno ou Islivné. ,, 115. Les plateaux crétacés et même tertiaires de la Bulgarie orientale et d« la partit! méridionale du Dobrouscha rappellent un peu ceux de la Po-dolie. Les villages sont cachés dans des sillons a bords assez inclinés et ces cavités disparaissent à la vue. de manière qu'on croirait quelquefois n'avoir qu'un pays plat devant soi, lorsqu'on est sur les plate-formes. ,, 127. Katre Kitschalik et Petschiomale il y a des prés naturels énormes, qu'on ne fauche jamais; ce serait un trésor pour une armée. ,, 163. Pour une puissance maritime l'occupation du Rhodope avec son prolongement en Macédoine et avec le littoral de la mer Egée, rendrait en bonne partie illusoire les avantages gagnés par l'ennemi dans les bassins adjacents. C'est une grande forteresse, qui peut servir de refuge jusques à eo qu'on ait obtenu des renforts et d'où on peut alors aisément regagner lu partie. La corniche le long de la mer Egée n'a que deux portes et in défense de beaucoup des principaux défilés du Rhodope n'exigerait que peu de monde. Dans le cas d'une révolte conti'e les Turcs dans le centre du pays, on même en Thrace, ces derniers pourraient aussi se mettre provisoirement en sûreté dans ce même massif de montagnes. De semblables points stratégiques, fort importans pour une armée soutenue par une flotte, se trouvent encore dans les presqu'îles de la Chalcide comme dans celle des Dardanelles. En particulier le mont Athos est presqu'unc île: ses 20 k 24 couvents, bâtis en partie en pierres, seraient d'excellentes et vastes casernes pour les quartiers d'hiver de troupes européennes. (Voyez les voyages de Griesbaeb et de Viquesnel.) Si sur les côtes maritimes ces dernières auront toujours à souffrir des fièvres, principalement au printemps et en automne, ce ne serait point le cas dans le Rhodope et sur les hauteurs du mont Athos. ,, 219. Melnik est une petite ville fort commerçante et en partie grecque. INTRODUCTION. lies voyageurs qui visitent l'Orient ont le choix de la voie de t^ne ou de mer. Beaucoup d'entr'eux s'arrangent de manière à faire les deux routes ; néanmoins il est beaucoup plus avantageux d'aller gagner la Turquie par terre que par mer ou même que d'en revenir par le Danube. En employant la voie marine on ne voit que quelques côtes et quelques villes maritimes et on passe touf-à-coup de l'Europe à l'Asie, tandis que le voynge par terre rend beaucoup moins brusque ce changement complet dans la population, les habillcmens, les habitations, les usages et les mœurs. L'Allemagne, l'Autriche, la Hongrie et la Servie forment de véritables étapes entre la civilisation de l'Europe occidentale et celle de l'Orient. Si l'Allemagne est liée assez intimement à l'Ouest de l'Europe, c'est déjà moins le cas pour l'Autriche et surtout poui sa partie bordant sur la Hongrie. Le bassin de Vienne est 1? limite ue la flore et de la faune germanique, comme il est aussi le mur de séparation entre les coutumes et les mœurs des Allemands et des Hongrois. Le manque de pavé dans beaucoup de rues des faubourgs, la forme pyriforme des clochers, la fête des femmes encapuchonnées de mouchoirs comme les Orientales, la quantité de 1 moustaches, le mélange de ions les costumes orientaux à Vienne, tout montre à l'étranger qu'il se trouve déjà à la porte de la vie asiatique. En deçà de Presbourg les gros villages n'ont déjà plus autant de ressemblance avec des bourgs ou dey villes de l'Europe occidentale, comme c'est le cas dans la basse Autriche. En général ce ne sont plus que des amas de rez-de-chaussées entremêlés de jardins et d'arbres comme en Turquie, mais les rues en sont régulières et les maisons proprement blanchies. D'un autre part le costume et les vêtemens de l'habitant slovaque ou hongrois différent déjà considérablement de ceux en usage dans l'Ouest de l'Europe. L'étranger est surtout frappé de la coupe asiatique des manteaux slaves blancs (Bjelatsrhe) et de l'absence fréquente des cravates comme en Orient, tandis que le costume magyare caractérise particulièrement ces anciens ha-bitans des Steppes avec leurs nombreux troupeaux de chevaux et de bestiaux. Au milieu de ce monde demi-asiatique on est ébloui de la beauté extérieure de Pest, vis-à-vis de l'ancienne ville royale de Rude. On partage l'orgueil du Magyare, lorsqu'il compare sa capitale traversée par un beau fleuve à celle de l'Autriche arrosée seulement par un petit bras du Danube. Mais en mettant pied à terre, on remarque tout de suite à côté de la régularité et du go£t moderne des bâtisses, la rareté des pavés et des promenades, ainsi que la solitude particulière des steppes asiatiques aux environs de Pest. Les rives du Danube du côté de Bude sont couvertes d'ordures, la rivière y fait en partie l'office des balayeurs de rues comme en Turquie et un bain y reçoit encore ensemble, hommes et femmes du bas peuple, comme du temps des Romains. Enfin on y trouve un Teké de Dervisehes et une colonie de Serbes au pied du Blocksberg et même jusqu'à Saint-André au-dessus de Bude. Au-dessous de Pest on ne voyage plus qu'au milieu de ce dernier peuple de la Turquie mêlé aux Magyares et aux Valla-ques. C'est là qu'on voit pour la première fois les feux des bivouacs remplacer les auberges, les paysans préférer coucher en été à la belle étoile ou sous leur Veranda ou Tscliardak plutôt que dans leurs maisons, tandis que nos souliers ou même les hottes du Hongrois sont remplacés par des Sandales ou Opankes du moins chez les habitans non magyares. Cette population est sur une échelle un peu plus élevée dans la civilisation que les habitans de la Turquie en ce qu'ils connaissent et employent en partie certaines choses utiles de notre vieille Europe occidentale. D'un autre côté ils ont perdu souvent les bonnes qualités naturelles de l'Orient pour n'adopter des Européens que leurs vices. Avant d'atteindre la Save on traverse un vaste pays serbe avec tous ses usages et sa religion grecque ; les villes de Neusatz et de Semlin sont déjà même à moitié turques par le genre de leurs boutiques, mais en franchissant le Danube on est enfin tout-à-fait hors de l'Europe, lors même que l'ancienne quarantaine pour la peste ait été supprimée. Les rues, les maisons, les auberges, les boutiques, les professions diverses sont la plupart turques, les chapeaux ont disparu et sont remplacés par le Fess ou le Turban, les habillemens sont dans le goût oriental. Si même la domination ottomane n'était pas indiquée par le croissant de la forteresse et les habitans turcs, on ne pourrait manquer de reconnaître l'Asie dans les mœurs, les coutumes, les goûts et les idées des Slaves de l'ancienne II-lyrie. Le Mahométan asiate au milieu de ces derniers forme en tout un contraste beaucoup moins frappant que l'Européen à côté des Serbes ou des Bulgares. Notre civilisation européenne ne fait que prendre pied à Belgrade, mais hors de là on n'en voit guère 1 * plus que quelques traces ca et là dans l'intérieur des pays turcs, tandis que l'état de ces derniers se rapproche en certains points de celui de l'Europe au moyen âge. Si c'est là que gît l'attrait des voyages en Orient, dans ses rapports avec cette partie du globe l'Europe oublie trop souvent qu'elle ne peut pas espérer de plier tout-à-fait et surtout promptement à sa civilisation un monde si particulier et si entiché de la sienne; son caractère national et climatérique lui restera toujours. TURQUIE ORIENTALE. I. i g 1 '. f - Il -1 i ' M -1 DE BELGRADE A CONSTANTINOPLE. PAR POJAKEVATZ, MILANOVATZ, WIDDIN, LE BALKAN DE TSCHIPKA ET ANDRINOPLE. Jim considérant la Servie depuis Seralin (en slave Semouri) ') son relief ne présente rien de très frappant. Le petit cône évasé du mont Avala trône sur des contours ondulés et des pentes dénudées de bois. Derrière ces hauteurs paraît la pointe du mont Kosmai et dans le lointain à l'O. on distingue une partie de montagnes au S. de Schabatz. Comme la Servie orientale présente aussi une troisième chaîne, la dénomination de THbaïli, en albanais trois pointes , serait caratéristique pour le peuple, qui occupait la Servie avant l'arrivée des Serbes. Belgrade, le Beograd des Serbes ou la citadelle blanche, est le seul objet qui fixe l'attention. Toute misérable que sa forteresse est dans l'intérieur, elle ne se présente pas mal de loin et s'étend aussi bien au bord du Danube que sur un plateau d'environ cent pieds d'élévation. (Voyez ma Turquie d'Europe, vol. 3, page 508.) D'un autre part les minarets au milieu des habitations au pied du rocher à l'est donnent plutôt l'idée d'une grande ville que les édifices nouveaux épars sur la pente de la colline, qui borde la Save et où. n'habitent que des Serbes. ') Ce nom vient probablement de Zemlia ou Zem terre, le coteau de Sentira néiant composé que de Loess ou de marne argileuse. Cette ville renfermait en 1846 242(1 maisons ou 18,610 âmes. Les Turcs au nombre de 5800 occupaient 860 maisons, la commune juive de 1382 âmes 146 maisons et il n'y avait que 900 étrangers de diverses parties de l'Europe. La garnison de la forteresse compte en temps ordinaire 3 à 4000 hommes, et s'élève en temps de guerre jusqu'à dix mille. Il y a deux églises serbes, une mosquée et une synagogue. C'est la seule ville de Servie où les Turcs demeurent de droit hors de la forteresse, parceque le Hattischérif de 1834 relatif à cette question a été interprété dans ce sens qu'on devait entendre exceptionnellement pour Belgrade par forteresse toute la partie de la ville entourée jadis de murs. Dans la citadelle l'espace était trop restreint pour pouvoir héberger toute la population turque de Belgrade. S'il y a encore des espèces de porte, avec des corps de garde turcs, les anciens murs de Belgrade ne sont en grande partie qu'une ruine, parcequ'ils furent détruits par les Autrichiens lors de leur rétraite en 1789. Ils entourent une bonne partie de la portion turque ou danubienne de Belgrade ainsi que la cité sur la plate-forme voisine de la citadelle. La plus grande partie du quartier le long de la Save et le faubourg du Vratschar son hors de cette enceinte. Depuis long temps Belgrade serait une ville assez régulière sans cette cohabitation des Serbes avec les Turcs, qui empêche bien des embellissemens. Le Pascha a défendu même aux Turcs de vendre leurs maisons aux Serbes. C'est pour cela que le prince Milosch voulait transporter la ville plus loin du château fort et en dehors de son ancienne enceinte sur la pente des coteaux de la Save, mais le terrain plat y est marécageux et la colline inclinée. Néanmoins on y a bâti une caserne en fer à cheval et pouvant contenir mille hommes. Près de là on a construit un hôpital d'armée , une maison pour l'école militaire et une maison carrée d'un étage destinée à l'assemblée des Sénateurs. Le Prince Milosch s'y était même fait élever un petit palais carré de deux étages, ayant une quinzaine de fenêtres de front et un balcon. Dans la rue le long de la Save et surtout dans celle qui conduit de l'ancienne ville à ces nouvelles bâtisses sur la hauteur, on remarque des maisons neuves d'un étage, dont quelques-unes ont des jardins avec une vue étendue sur la Syrmie (dérivé du mot albanais Sirmea, argent?), et sur la chaîne du Phrouska-Gora ou montagne de la Plaine (du mot albanais Phrouske, plaine et de Gora, mont), à l'O. de Karlovitz, ainsi que sur les montagne de la Servie occidentale, savoir le Medvednik, le Tzer et la montagne pointue de Vidojevitza, qui est près de Leschnitza. Dans l'intérieur de la ville ancienne sur la plate-forme on retrouve encore mainte rue et boutique tout-à-fait turque, quoique le pavé soit mieux soigné, mais si je ne me trompe les rues et les maisons ne sont pas encore numérotées et il n'y a pas d'éclairage, de manière qu'il faut se servir la nuit de lanternes comme en Turquie. Les édifices les plus remareables y sont la nouvelle église grecque avec un clocher, la demeure voisine du Métropolite serbe, une seconde église slave et les Konaks ou maisons qu'ont habité le prince Milosch et son frère Jephrcm. On peut encore citer sur la grande place du marché la nouvelle maison à balcon construite par ce dernier, près de là deux maisons bâties par le prince actuel, dont Tune est une auberge, et quelques autres maisons, toutes fort massives et voûtées inférieure-ment d.ms le style hongrois. La grande place quadrilatérale ne peut être nivelée, parcequ'il y a des tombeaux turcs et que le côté oriental est garni d'habitations turques, en partie fort mesquines. L'imprimerie du gouvernement est aussi dans ce voisinage. Depuis le plateau on descend sur la Save par un chemin de voiture, tournant audessous de la forteresse ou tout droit par un mauvais escalier en pierre. Dans la grande rue le long de la Save est l'édifice de la douane au haut d'une pente rapide, qui conduit à la rivière et en rend l'abord incommode. Un petit glacis sépare la ville dela citadelle (voyez pour sa description ma Turquie, vol. 2, page 331) et le quartier turc principal est sur la pente du coteau entre le Danube et la grande place du marché de la plate-forme. Cette partie de Belgrade était comprise dans l'ancienne enceinte et est pleine de ruines, qui attestent qu'il y avait une fois quelques beaux édifices pendant l'occupation autrichienne. Deux rues pavées principales et garnies de boutiques à la turque traversent ce quartier de l'O. à l'K. et du N.O. au S. E. Les autres rues sont peu larges, des, murailles y précèdent souvent les cours des maisons , comme en Turquie et il y a assez de jardins à arbres fruitiers. Dans quelques-uns de ces derniers existent des rez-de-chaussées ou des bicoques d'un étage avec des balcons et des escaliers en bois comme en Asie. Enfin un petit faubourg précède Belgrade dans la direction de la plate-forme et de la hauteur du Vratschar. Une partie formait l'ancien faubourg appelé Mala Sava. En descendant depuis là vers le Danube on y remarquait en 1837 une espèce d'auberge ou lieu de délassement. A % 1. à l'O. de Belgrade le prince possède un très modeste Konak dans la vallée de Topschider ou Topschidere (la vallée des canoniers) et près de là il y a outre les dépendances, une petite église avec un clocher et une petite caserne de cavalerie pour 3 ou 400 hommes. Cette vallée recelé aussi une petite ferme-modèle ou école rurale, ainsi qu'un établissement agricole de correction pour les malfaiteurs. Belgrade est la capitale de la Servie et la résidence du prince quand il n'habite pas Topschidere ou Kragoujevatz. La Servie était partagée en JVahies (Haxnje) et Knejines (ÏÏHeîKHHe). Au déplaisir des patriotes serbes un souffle étranger a fait rejeter ces dénominations nationales, de manière qu'actuellement la Servie est divisée en 17 cercles ou Okroujie (Ofipyffiie) ou en 54 districts ou Sresove comprenant 1170 communes ou Obschiine. Ces cercles sont les suivans, savoir ceux de Belgrade, de Valievo, de Schabatz, de Podrina ou des bords dela Drina, d'Oujitze, de Tschatschak, de Kragoujevatz, de Roudnik, de Krouschevatz, île Jagodina, de Tchoupria, d'Aleksinatz, de Gourgousovatz, de Tzrna-Rieka, de Kraina, de Pojarevatz et. de Semcndria. A la tête de chaque cercle et de chaque district sont des commandants de divers grades , nommés comme en Russie Na-tschalnik, au lieu que jadis on ne distinguait que des Knes, des Kapelam et des Kmets. La population de la Servie s'élevait en 1846 d'après M. Ga-vrilomtch à 849,286 âmes, savoir 825,783 Serbes, 15,161 Turcs y compris 6370 hommes de l'armée turque régulière , 1368 Juifs, 900 étrangers européens et 6074 Zingares. La population serbe comprenait 783,652 habitans de la campagne, distribués dans 2018 villages et 193 hameaux, 38,022 habitans de 7 villes et de 27 bourgs, 832 employés ou pensionnés du gouvernement, 2529 soldats réguliers et 748 ecclésiastiques y compris 123 moines. Il y avait dans toute la Servie 126,789 maisons ou familles. Donc il n'y aurait pas 900 âmes pour chaque mille carré en Servie. Les Musulmans de la principauté vivent à Belgrade à Ada-kale (112 familles, 312 soldats avec 45 chrétiens dans 120 mai- sons), à Kladovo (70 maisons et 374 liabitans musulmans), à Oujitze (723 m. et 3695 h. m.), à Semcndria (150 m. et 750 h. m.), à Scha-batz (270 m. et 1350 h. m.), et à Sokol sur la Drina (270 familles). Le reste des Turcs se trouve concentré aussi sur les bords de cette dernière rivière dans les sept, villages suivans du district d'Asboukovatz, savoir à Kozla et Kalkan (10 f.), à Petrtz (241)» à Boutschie (14 f,), à Petchi (8 f.), à Postinie dolnie (10 f,), et à Postinie gornie (10 f.), et à Alouga (8 f.). Enfin il y en a encore dans ce même cercle dans le district de Radjevina à Mali-Zvornik (100 m. et 480 h.) et à Sakar (10 m. et 50 h.). La Servie se divise en 4 diocèces ou Eparclries, savoir ceux de Belgrade, d'Oujitze, de Schabatz et de Timok, à la tête desquels sont quatre évêques et quatre consistoires avec un métropolite pour chef. Ils comptent 298 églises, 38 couvents, 651 paroisses, 652 prêtres et 123 moines. Les Turcs ont en Servie 36 mosquées et 4 couvents de Dervischcs. Les couvents de la Servie sont placés surtout au haut des vallées et au pied des montagnes, comme cela se voit près du Tzer, du Kablar, du Jastrebatz, etc. L'importance des monastères en Orient m'engagent à en donner la liste aussi coraplette que possible. Ces couvents sont les suivans: savoir dans le cercle d'Alek-sinatz : ceux de Svetii Roman près de la Morava bulgare à l'O. de Rajan (1 archimandrite et 2 moines) et de Svetii Stephan sut-un affluent du Toponitza au N. E. d'Aleksinatz. Dans le cercle de Belgrade : ceux de Rakonitza dans le haut du Toptschidere (2 m.), de Rainovatz prés de Grotzka, une dépendance du précédent, et de Nemeni-Kouskia près du mont. Kosmai. Dans le cercle de Gourgousovatz : ceux de Sveta Troitza (l hiéromoine) et de Souvodol (distr. de Timok-Zaitschar), (5 m.). Dans le cercle de Jagodina: ceux de Lioubostnie (distr. de Levât schka) (5 m.), de Kalenitch (même distr.) (5 m.), et sa dépendance celui de Joschanitza sur le haut de Osivnitza (1 m.). Dans le cercle de Kraina : ceux de Sveti Andjel (distr. de Timok) (1 m.) et de Boukovo au N. de Negotin (4 m.). Dans le cercle de Kragoujevatz: ceux de VraUclienitza sur le Grouja (5 m.), de JJratscha à l'O. de Kragoujevatz, une dépendance du précédent (1 m.), et de Blogoviestenie près de Stra-gari et une dépendance du couvent de Voliiavtscha (3 hiéromoines). J Dana le cercle de Krouschevatz : ceux de Velouscha (distr. de Kosnik), dépendance de celui de Liobostinie, et de Sveta-Petka sur un affluent de la Morava bulgare au pied N. E, du Jastrebatz. Dans le cercle d'Oujitze : ceux à'Arilje sur la Morava près du débouché du Deschina, de Ratscha (1 archimandrite et 3 hiéro-moines) (distr. de Ratscha) sur le pied méridional de l'Ivitza, de Solotouscha (79 mais, et 003 h.), de Kovilie à la jonction de la Moravitza et de la Morava orientale, et de Slata à la source de cette dernière. Dans le cercle de Pojarevatz: ceux de Tournait près de Go-loubatz (1 m.), de Gornialc au pied S. E. de l'Omolie sur la Mlava (4 m.), avec sa dépendance à Vitovnitza ou Vischovnitzi, au pied N. O. de l'Omolie (distr. de Mlava) (1 m.), et de Terg (distr. de Mlava). Dans le cercle de Roudnik: ceux de Blagovieschtenie sous le mont Kablar sur la Morava (3 hiéromoines), de Voliiavtscha (3 hiéromoines), et de Nikolie (4 hiéromoines), avec sa dépendance à Vouian (4 hiéromoines), ces trois derniers sont aussi près de la Morava. Dans le cercle de Schabatz: ceux de Tschokeschina au pied N. E. du Tzer sur le Kamiischak (2 m.), de Tronoscha (distr. Po-drina) (4 m.), et sa dépendance à Radovatnitza au pied N. E. de Tzer sur le haut du Doumatscha. Dans le cercle de Tschatscbak: ceux de Jelendol- Srietëme (distr. de Dragatschevatz) (4 hiéromoines), de Troitza (même district) (2 hiéromoines), et de Stoudenitza près de lTbar (10 hiéromoines, 1 diacre et 1 adjoint). Dans le cercle de Tchoupria : ceux de Ravenitza sur le torrent du même nom (4 in.), de Sveta Petka (district de Para-tchin) , une dépendance du précédent, et de Manasia (distr. de Resava) (4 m. et une école). Dans le cercle de Valievo : ceux de Bogovatja (distr. de Ko-loubara) sur le Lvig (4 m.), de RadouscJia (distr. de Tamnava), de Tchelie sur le haut du Gradatz au S. de Valievo, et de Pousiina sur le haut du Jablanitza. La justice est rendue par des juges de paix (primiritelnii Soud) aux chef-lieux de district, et par des tribunaux supérieurs (Soud) dans les capitales de cercles et enfin parle tribunal .d'appel {Naiceicldi Soud) à Belgrade, Quant à l'instruction, toutes les études supérieures sont concentrés à Belgrade, où il y a un lycée composé de deux facultés, savoir la philosophie et le droit, puis une petite école militaire, un gymnase à six classes, une école de trois classes pour les artisans et les commerçans , une école grecque, une école de théologie de quatre classes, une école élémentaire de quatre classes et deux d'une classe. Dans le reste du pays il y a encore trois gymnases inférieurs à Negotin, Kragoujevatz et Schabatz et 232 écoles élémentaires. Le nombre des écoliers dans ces instituts dépasse 6766. En outre les Turcs ont 12 écoles élémentaires, 8 pour les garçons et 4 pour les filles, et les Juifs une école à Belgrade. Le cercle de Belgrade est divisé en 5 districts , savoir ceux le long de la Save (Posava) , le long du Danube (Podounava), du Kosmai, de la Touriia et du Koloubara. Il comprend 101 pavoises, une ville, 120 villages, 6601 maisons et 44,071 âmes. 11 y a 15 écoles et 3 douanes, savoir à Belgrade, Visehnitza et Topschidere. La résidence du commandant ou Natschalnik et le tribunal du cercle résident à Belgrade. Une poste à lettres et aux chevaux est aussi dans cette ville et une aux chevaux à Grotzka. La distribution de la population dans les districts du cercle de Belgrade est la suivante : Le long de la Save il y a 30 villages, 1610 maisons, et 10,312 âmes. Le commandant ou capitaine réside à Vranitchi (124 m. et 791 h.j. Le long du Danube il y a 1 bourg, 31 villages, 1991 maisons et 12,482 âmes. Le commandant réside à Grotzka. Da,ns le district de Touriia il y a 21 villages, 1032 maisons et 7361 âmes. Le comm ndant réside à Do-rosava. Dans le district du Kosmai il y a 18 villages, 1007 maisons et 7581 âmes, le commandant réside à Sopota. Dans le district de Koloubara il y a 21 villages , 961 maisons et 6335 âmes, le commandant réside à Veroschevtzi. Le diocèce de Belgrade comprend les cercles de Belgrade, de Semendria, de Pojarevatz, de Tchoupria, de Jagodin, de Kragoujevatz et de Krouschevatz. Il contient 277 paroisses, 103 églises et 15 couvents avec 45 moins et 269 prêtres séculiers. Le métropolite de la Servie réside à Belgrade. L'Archiprêtre de Belgrade a sous lui 14 paroisses et 7 églises, comprenant outre Belgrade une partie du district gouvernemental le long de la Save 1). A la sortie de Belgrade par la porte de Constantinople on se dirige au S. E. en coupant un plateau un peu incliné et formé par les hauteurs , qui s'étendent vers Vischnitza sur le Danube (56 m. et 381 h. avec une église et une école), ainsi qu'au Sud vers le pied du mont Avala. Il porte le nom de Vratschar, et près de Belgrade on y voit une petite mosquée en ruines. Ce terrain totalement déboisé est cultivé en partie en champs d'orge, de froment, de seigle et de maïs. La pente est divisée en étages bien marqués, qui indiquent les restes des anciens niveaux des eaux, qui ont couvert le bassin de la Hongrie. Non loin de la fontaine de Jeurmeuglouk à l3/* 1. de Belgrade on voit au S. au pied N. E, du mont Avala le village de Dolni-Mokri-Loug (bocage humide inférieur) avec 52 maisons et 360 habitans, tandis que le grand village de ce nom, le Veliki-Mokri-Loug, compte 76 maisons et 545 habitans. Au N. une ondulation du terrain empêche de voir le village de Mirievo (59 m. et. 376 h. avec une église) sur le ruisseau du même nom, qui y coule du S. au N. dans le Danube. Une seconde fontaine se trouve à x/2 1. plus loin et à 430 pieds de hauteur absolue. En deçà de cette plate-forme on laisse vers le Danube le village de Vin t se ha (81 rn. et 422 h.) et on atteint, des petits bocages et la vallée boisée de Biela-Ivieka (rivière blanche), où se trouvent les villages de Veliko-Selo (112 m. et 722 h.) et de Bolietsch (62 m. et 388 h.). Ces pentes laissent encore appercevoir deux grands terrasses bien distinctes. Grotzka est au pied des hauteurs non loin du Danube et à 5 1. de Belgrade. Ce petit bourg de 205 maisons et de 961 âmes, consiste principalement en une rue coudée et garnie de boutiques, où se vendent tous les objets les plus usuels de la vie serbe. Il y a une auberge, une nouvelle église avec un petit clocher en bois à côté et un cimetière palissade. Un ruisseau, nommé aussi Grotzka , coule à travers le village et se passe sur un pont de bois, en deçà est la maison d'une étage du commandant, les autres habitations n'étant que de rez-de-chaussés. Dans ce lieu se livra la bataille de 1739 entre les Turcs et les Autrichiens sous Charles VI. Dans le haut du vallon du cours d'eau de Grotzka est le petit couvent de Rakovitza avec 2 moines. ') four le reste de 1 administration serbe voyez ma furouie d'Europe, A Grotzka se séparent les routes de Constantinople et de Semendria. Pour gagner cette dernière ville, on côtoyé le Danube au pied des collines boisées et marneuses, qui le bordent. On monte ensuite dans les bois et traverse les hauteurs par un chemin profondement excavé et célèbre dans le combat de Grotzka. Dans ces lieux reste caché le village de Seona (43 m. et 209 h.) et on ne revient sur le bord du Danube qu'à 2 1. de Grotzka. Depuis là jusqu'à Semendria les rives de ce fleuve sont fort jolies On traverse des champs, et des vignobles sans échalats, des vergers de noyers et des bois des chênes, tandis que le hauteurs au S. sont complètement couvertes de chênes, de poiriers, de peupliers, au milieu desquels le tilieul argenté forme des touffes d'un effet admirable. Nous rencontrâmes dans ces lieux près d'une fontaine une file de charriots conduits par des Turcs, qui allaient passer la nuit dans la forêt, afin d'en ramener du bois pour le marché du lendemain. Plus loin un charriot élevé, couvert avec une toile et traîné aussi par des boeufs faisait voyager lentement une dame turque, qui n'était séparée de son cocher que par une simple toile. Semendria (en serbe Smederevo) est une ville de 743 maisons et de 3265 âmes, avec une église et une école de trois classes. C'est la résidence du commandant et du tribunal, ainsi que celle d'un archiprêtre, qui a sous lui 12 paroisses et 4 églises. Le cercle de Semendria comprend deux districts, savoir ceux le long du Danube (Podounava) et du Jasenitza avec 54 communes, 2 villes, 52 villages, 6020 maisons et 37,655 âmes. Il y a 8 écoles et la poste s'y trouve à Semendria, Palanka et Kolar, Le district le long du Danube contient 1 bourg, 27 villages, 2853 maisons et 16,711 âmes et le commandant réside à Palanka, tandis que le district de Jasenitza compte une ville, 25 villages, 3167 maisons et 20,944 âmes ; le commandant réside à Semendria. Cette dernière ville est bien située sur le bord du Danube entre le pied de coteaux en pente douce et le vieux château, qui occupe le point de la jonction de la Jezava et du Danube. La plupart des maisons y ont une petit jardin ou verger et beaucoup paraissaient neuves. Dans les rues principales elles ont un étage «t sont blanchies en dehors. Le prince y a un Konak et il y a une place avec des boutiques, qui sert de marché. L'église est située sur la pente de la colline et paraît fort ancienne, elle est basse et petite, et a une chapiteau polygone. Le cimetière à l'en-tour est environné d'une palissade. Les auberges principales sont sur le Danube, où stationnaient lors de notre passage plusieurs grands bateaux venus de Widdin. Comme exception à la pureté des mœurs serbes, une des auberges offrait , comme en Pologne, des filles publiques. Elle était tenue par un Zingare, qui de mahom (kan était devenu chrétien. Comme habitation Semendria parait bien plus agréable que Belgrade , à cause de ses environs, qui permettent de faire de jolis promenades. Il y a des vignobles renommés, appartenant en partie au Métropolite serbe, et la quantité .de mûriers y rendrait, l'éducation des vers à soie possible. Le vieux château fort (voyez ma Turquie d'Europe, vol. 2, page 334) est occupé par 150 habitations turques avec 3265 âmes, y compris la garnison. Ces Musulmans y vivent entassés dans «les rues étroites et obscures à cause des hautes murailles du ca-stel. C'est dans ce lieu que résidait le sénat du temps de Tzerni-(ieorges. Il y aurait, dit-on, encore quelques vieilles inscriptions serbes , mais l'examen soigné de l'intérieur est rendu difficile à cause de la jalousie des Turcs et la ridicule importance qu'ils attachent à cette ruine du moyen âge. Pour aller de Semendria à Pojarevatz (IloiKapenau), en ail. Poscharevatz, il faut franchir le pont en bois sur Ja Jezava ou le bras gauche de la Morava, et gagner à 1 l/i 1. de là cette dernière rivière à travers des vastes pâturages, souvent inondés. La Morava y est un peu encaissé entre des berges d'argile d'alluviale, et charrie outre des graviers beaucoup de troncs et de racines d'arbres, en changeant souvent de lit, ce qui fait qu'elle n'est guère navigable près de son débouché dans le Danube, où est la ruine du fort de Koulitsch. Il faudrait régler son cours. Un bac y passe les voyageurs moyennant une demi piastre turque (2 à 3 sols). Une foret de grands chênes clairsemés sépare la rivière de la plaine de pâturages et de champs , qui précède Pojarevatz et qui serait parfaite pour une revue ou un champ de bataille. Nous y trouvâmes un bon nombre de lourds charriots et des voyageurs. Pojarevatz est situé en plaine au pied occidental d'une basse crête, qui court du S. au N. Cette ville de 740 maisons ne contient que 3733 âmes. Il y avait à notre passage une garnison serbeyete 200 hommes avec un médecin attaché à la troupe, qui était casernée. Cette ville est la résidence du commandant et du tribunal du cercle du môme nom, ainsi que d'un archiprêtre, qui a sous lui 21) paroisses et 9 églises. Il y a une église et une école de trois classes. Malgré cela elle a plutôt l'air d'un grand village du Bannat que d'une ville, pareeque ses rues sont larges, non pavées et peu garnies de maisons, dont chacune est dans un enclos entouré de palissades ou de haies de branches sèches d'arbres. Ce n'est que sur la grande place et dans les rues , qui y aboutissent, qu'il y a quelques boutiques et un certain mouvement. L'église est située sur le pied du coteau et comme à Grotzka le clocher à jour et en traverses de bois est à côté, et un cimetière palissade environne le tout. Les plus grandes curiosités de Pojarevatz sont le Konah du prince et une petite mosquée avec un minaret qu'on conserve comme une relique. Le Konak a deux entrées, celle qui débouche près de la grande place a un portail avec les armes de la Servie, c'est-à-dire quatre briquets sur une couronne. Tout l'espace occupé par le Konak est palissade et à la porte il y a un corps de garde occupé, lorsque le prince y est. Le Konak en lui-même est une maison carrée de nulle apparence et d'un étage, auquel on peut monter par devant et par derrière au moyen d'un escalier en bois. Sur le devant il y a une galerie ouverte sans fenêtres, où le prince Milosch se tenait de préférence. Sur un des côtés on remarque qu'une cheminée fait saillie hors de la muraille. Dans l'intérieur étaient des tableaux d'anciens rois serbes, de personnes célèbres et celui du prince Milosch en pied avec son drapeau en main. Non loin de là est le Konak de la princesse portant les armes serbes, une autre petite maisonnette d'un étage pour les princes ou les secrétaires, enfin les cuisines, les écuries et une poudrière. A Pojarevatz habitait Miloutin Petrovitsch, frère du Haidouk Vcliko-Pctrovitsch, qui a péri à Negotin pendant la dernière guerre sous Tzerni-Georges. Près de Pojarevatz eut lieu en 1689 une bataille gagnée sur les Turcs par les Autrichiens sous le margrave de Bade. Dans ce lieu fut signé en 1718 la paix entre les Turcs et les Autrichiens. En 1804 les chefs serbes Jacques et Tzerni-Georges parurent devant cet endroit avec un canon pour y soutenir Milenko et en 1815 le prince Milosch prit ce bourg, défendu avec acharnement par les Turcs retranchés derrière des redoutes W dans l'église. Au N. O. de Pojarevatz se trouve Petka (77 va. Ki et 517 h.), où en 1813 les troupes de Chour8cliid-Pn.scha se réunirent à celles du Kapetan-Pascha. Le Cercle de Pojarevatz comprend cinq districts, savoir ceux d'Omolie, de Rieka et de Jvijd (JKuij/i), de Ram et du Pek, de la Morava et du Mlava, avec 151 Communes, 2 bourgs, 185 villages, 15,309 maisons et 93,747 âmes. Il y a 25 églises et 2 lieux de douane. La poste aux chevaux et aux lettres est à Pojarevatz et la poste aux chevaux à Neresnitza (205 m. et 1098 h.). Le district d'Omolie se compose de 17 villages, 1303 maisons et 8292 habitans. Le commandant demeure à Jagoubitza. Le district de Rieka et de Jvijd contient un bourg, 35 villages, 2257 maisons et. 13,444 habitans. Le commandant réside à Gornia-Krouschevitza. Le district de Ram et du Pek se compose de 45 villages avec 3504 maisons et 21,700 habitans. Le commandant réside à Veliko-Gradischte (300 m. et 1020 h. avec une église et une école de 2 classes). Le district de la Morava contient une ville, 44 villages, 4583 maisons et 27,104 habitans. Le chef-lieu est à Pojarevatz. Enfin le district de Mlava est composé de 38 villages avec 3660 maisons et 23,146 âmes. Le commandant demeure àSvinie (152 m. et 954 h.). Pour aller de Pojarevatz à Milanovatz on peut passer par Goloubatz, Voukovitch ou par Maidanpek. Route de Pojarevatz à Milanovatz par Goloubatz. Derrière et à l'E. de Pojarevatz la crête Sopot ayant 100 pieds sur le Danube ou 345 pieds de hauteur absolue, sépare la vallée de la Mlava de celle de la Morava. Des champs de maïs couvrent les pentes de cette hauteur, d'où on a une vue étendue tant sur les plaines et les montagnes du Ban-nat que sur les sommités les plus élevées de la chaîne centrale de la Servie ou du district de Schoumadia. Ces dernières crêtes semblant toutes liées ensemble, ne font plus que l'effet d'un grand plateau, sur lequel ressortent en proéminences toujours plus élevées, à mesure qu'on avance vers le S. le cône obtus du mont Avala, le dôme du Kosmai, les cîmes près de Boukovik et de Verbitza, le Ventschatz, enfin les montagnes un peu plus découpées de Roud-nik. D'un autre part s'élèvent au S.E. les monts Omolje avec leurs eecarpemens de calcaire secondaire et au S. on distingue même la chaîne schisteuse ancienne du Jastrebatz près de Krouschevatz. La vallée du Mlava est cultivée et a une demie lieue de large, de manière qu'on n'atteint la rivière qu'à 11/2 lieue de Pojarevatz, On la passe deux fois sur des ponts de bois. La vallée est surtout occupée par des prés et des bois. En deçà de la Mlava est une berge de 30 pieds de hauteur, sur laquelle est situé au N. Terania et au S. le village de Baré (103 m. et 738 h.) avec des bois de chênes. On est alors à 2 1. de Pojarevatz. On monte ensuite sur une colline courant environ parallèlement à celle de Pojarevatz du S. E. au N. O. et boisée vers le haut. Dans ce bois du Kot-schariska-Lipovatz, on est déjà à 538 pieds d'élévation et à 3 1. de Pojarevatz. Depuis là on a une vue sur les montagnes au S. E. dont toutes les têtes sont tournées au Nord. Après le village de Srechna (Heureux) entouré de quelques pruniers, on passe un bois de gros chênes et à x/± 1. delà on traverse le Pek au gué, rivière qui coule dans cet endroit du S. auN. Au pied des coteaux qui la bordent est le village de Milievitza ou Milievitche (52 m. et 342 h.), aussi entouré de pruniers et en deçà des hauteurs à 1 1, plus loin le hameau de Boritsch (59 m. et 339 h.) est caché dans un bois semblable. Une crête plus élevée que les précédentes et atteignant 583 p. sur le Danube sépare ce vallon d'avec ce fleuve. Le sommet formant plateau est en partie cultivé. En descendant sur Goloubatz on traverse Sadina, qui est dans un petit vallon orné d'un bocage de chênes et entouré de champs de maïs et d'haricots mêlés de melons d'eau. Le village de Goloubatz (de la Colombe) (107 m. et 608 h.) est 8 1, de Pojarevatz sur le bord du Danube et adossé à des pentes couvertes de limon argileux ou de Loess, dans lequel il y a des chemins creux. Ce hameau dévasté se repeuplait en 1838 et son auberge au bord de l'eau offrait une chambre pour les voyageurs. La route par terre de Goloubatz à Milanovatz est très mauvaise et oblige à des montées et des descentes réitérées qu'on peut tout au plus faire à cheval ; aussi la poste ne parcourt pas cette route et on préfère s'embarquer en bateau. A l/lk 1. du village se trouve déjà une grande montée fort roide, qui tourne les rochers élevés de calcaire secondaire, formant le premier défilé du Danube appelé par les Slaves Babakai. Bs supportent en avant de cette véritable porte et à moins de leur demi-hauteur la vieille et belle ruine du château fort de Goloubatz. (Voyez sa description dans ma Turquie d'Europe. Vol. 2. page 370.) Depuis cette 2 IS montagne on jouit d'une vue très étendue sur le Bannat et en particulier sur les environs dcMoldava. Cet obstacle surmonté ou depuis Bernista la route ne peut pas suivre toujours le Danube comme dans le Bannat, parce que les montagnes ou au moins leurs rochers viennent très souvent se terminer brusquement dans l'eau, tandis que sur la rive opposée il règne le long du Danube une terrasse alluviale plus ou moins large depuis le défilé de Go-loubatz jusqu'à celui deKasan. Sur le côté serbe au S. de Drenkova des rochers porphyriques et arenacés rouges forment même des murs, qui coupent tout-à-fàit la route, ce n'est qu'après ce passage qu'on peut longer l'eau comme en Bannat. A Goloubatz on trouve à s'embarquer dans des canots passables conduits par trois batelière, En deçà du château de Goloubatz dont les tours surplombent d'effroyables précipices calcaires, on entre dans le défilé, où le Danube est resserré par deux murs verticaux offrant ça et là des cavernes. Sur le côté du Bannat est à 20 pieds sur le Danube la caverne des Cousins (Mùckenhôhle), le Peschtschera Goloubatschka des Slaves, qui consiste en deux trous, d'où sortent en été, dit-on, des essaims de moucherons (Branitschevka ou Goloubatschka Moucha). Comme ils tourmentent le bétail, on a fait murer trois fois l'entrée de ces cavernes et on a débité beaucoup de contes sur ces insectes, qui affligent, dit-on, toujours la même portion des bords du Danube et qui sont très venimeux. Les Val-laques veulent môme lier leur existence avec celle d'un dragon fabuleux. ') Mais ils se trouvent partout dans ces environs et non point simplement dans ces cavernes; leur nom systématique est Similium reptans Golubatzense. (Voyez Comptes P. Acad. d. Se. de Vienne. 1848. Cah. 2. p. 154.) On distingue sur les rochers ou plus loin au bord de l'eau les huttes couvertes de branches d'arbres, où sont logés les postes de la milice des frontières hongroises (Granitzer). Les sous-officiers ont des petites maisonnettes. Si on s'approche trop près du côté autrichien, le poste sort tout de suite et est sur le qui vive. Sur la rive serbe après ce défilé les pentes des montagnes descendent rapidement dans le Danube. Ce n'est qu'à 4 1. sous Goloubatz vers Dobra (120 m, et 627 h.), que leurs contours s'adoucissent et on voit môme quelques champs près de ce village. Au-dessus il y a les restes ') Voyez Gfschichte der Golubaczer Mùckenhôhle par Schônhanser. Vienne 1795. H» d'une ancienne fortification* C'est le premier point depuis Goloubatz, où on puisse passer aisément le long du Danube. Une caverne se trouve dans la montagne. Au-dessous de Dobra ce fleuve coule de nouveau entre des montagnes sauvages boisées et sur la rive serbe il y a des traces d'un chemin creusé dans le roc par les Romains. Il est tout pics du niveau de l'eau. On entend déjà à une demie heure de distance le bruit que fait l'eau coulant entre les rochers de Taschtali ou Grebené, qui traversent en biais le Danube à 3 ou 4 h. sous Dobra, Des croix et des pierres indiquent sur la rive serbe les malheurs, qui y sont arrivés. A une % 1. plus bas le fleuve est resserré de nouveau par un rocher qui s'avance depuis la Servie à 200 pas dans le Danube. C'est ce qui forme la porte de fer supérieure, le Gornie Demir-Kapi. En deçà de ce passage difficile il y aune chute d'eau à voir dans les hauteurs au-dessus du hameau de Bolietin (36 m, et 160 h.), qui est caché dans une gorge, et plus bas vient l'île, où était jadis sur le côté sud la ville de Poretsch avec une église ayant un clocher, bâti du temps de Tzerni-Georges. En 1813 Poretsch fut défendu longtems contre les Turcs par Hadji Nikles, qui fut fait prisonnier et décapité. Derrière cette île en partie cultivée en maïs, la rive est couverte de bois de chênes et de vignobles. Au-dessous de Poretsch est l'île longue et étroite de Hadji Nicolas et à 1 1. plus bas le débouché du Poretsch, sur la rive droite duquel est l'ancien castel de ce nom. A ]/2 h. avant cette rivière, se trouve sur le Danube et sur la rive occidentale d'un petit torrent le bourg de Milanovatz, fondé par le Prince Milosch et portant le nom de son fils aîné. Route de Pojarevatz à Milanovatz par Voukovitche. Cette seconde route est de plus de 20 h, de durée et on passe par Bratintze (50 m. et 313 h.), en deçà de laMlava et par Smolinatz (Smolintze) (131 m. et 1328 h.). Au N. reste à % 1. le hameau de Lioubinie (51m. et 334 h.) et au S. celui de Schepine (100 m. et 726 h.). Depuis là on franchit les hauteurs entre les vallées de Mlava et de Pek, et on atteint Bobrovatz. On passe cette dernière rivière et on se tient sur sa rive septentrionale au pied du mont Go-litch, où se trouvent plusieurs des affluens du Pek. Les endroits 2* qu'on rencontre successivement sont Voukovitche (71 ni. et 407 h.), sur un petit ruisseau, le hameau de Sbrtzi (37 m. et 211 h,), Liesch-nischtc et sur un autre ruisseau Krouschevitza (K. gornia) (124 m. et 755 h.) et K. Dolnia (43 m. et 305 h.). Après trois autres petits cours d'eau on laisse Douboka (Profond) un peu au N. sur un torrent et on atteint Volina au N. d'un grand torrent; depuis là le pays devient surtout fort boisé et sauvage et il faut franchir une haute montagne pour atteindre Milanovatz. Depuis Krouschevitza on peut se rendre par des sentiers à Goloubatz en passant près de gorges, où se trouvent les hameaux de Touria (102 m. et 555 h.) et de liakovabara (Bourbier à écre-visses), (84 m, et 497 h.) Au N. de ce dernier village vallaque sont les crêtes boisées du Vis, qui sépare le Danube de la vallée du Pek. Le Vis comprend le Prisoj au N.E. de Eakovabara, le Soumor au S. E. et le Strenik. A l'E. de cette dernière montagne le partage des eaux a le nom de Loulesch, et on appelle Tschaula l'arête qui s'étend de Strenik au Pek. Il faut monter beaucoup et descendre pendant une heure pour arriver dans le vallon de Touman, où est situé le couvent du même nom. Ce dernier ne renfermait en 1837 que de deux moines. On a encore deux heures depuis là pour atteindre Goloubatz, route qui se fait le long du torrent. Ce dernier se jette dans le Schitkovitza et celui-ci débouche dans le Danube à une lieue au-dessus de Goloubatz. Près du monastère de Touman il y a une source intermittente à périodes de flux et reflux de six heures de durée. Monte de Pojarevatz à Milanovatz par Maidan-Pek La troisième route de Pojarevatz à Milanovatz de 22 h. de durée passe par Maidan-Pek. En 1837 elle était comme la précédente très mauvaise pour des charriots, surtout dans le défilé entre Sena et Krouschevitza et la poste n'y allait pas. On l'a beaucoup améliorée ces dernières années, pareequ'on a repris l'exploitation des mines de cuivre de Maidan-Pek, que les Autrichiens avaient entreprise dans le siècle passé. La route quitte la précédente à Bratnitze pour gagner plus au S. les villages de Trniane (91 m. et 562 h.), de Tzrnoutche ou Trnovtsche (78 m. et 564 h.), et de Koula (99 m. et 638 h.), et arriver par Moustapitch (140 m. et 885 h.) sur le côté méridional du Pek. Les villages sur cette route sont Mischlienovtze (82 ni. et 504 h.), Sena (30 m. et 200 h.), Kavna, Nieresnitza (205 m. et 1098 h.), et enfin Doubok (profond) au grand coude méridional du Pek. Au S. le mont Voukan et le Komtsehi-Planina séparent la vallée du Pek de celle de la Mlava. Près du confluent du Todorovitza et du Pek venant tous deux du S., est Debeli-Loug (Fourré épais) (54 m. et 296 h.). Le Nikolan-Planina sépare ces deux torrens et derrière cette montagne vient au S. le Stava et l'énorme plate-forme de l'Omolie, A l'entrée de la vallée du Pek, il y a des cultures et même des vignobles, mais plus loin vers Sena le lit de la rivière est dans un défilé d'une lieue de longueur, à la sortie duquel est environ Krousehevitza. Au S. de Sena est dans une bassin de 2% !• de longueur le village de Koutschaina (52 m. et 360 h.), près duquel existaient une fois des mines d'argent. Jadis une route pavée conduisait depuis là au Pek. Le reste de la route à Mai dan-Pefe ou Maidanisk traverse un pays boisé en chênes et hêtres et très agreste. Aux sources du Pek derrière Debeli-Loug dans le Poretschka-Planina il y a encore, d'après Mr. Vouk Stephanovitch, une eau, qui sourde de terre en produisant un bruit, comme un sifflet, d'où, elle porte ainsi que les environs le nom de Zvijd (3BHîK/v sifflet). Le Pek se déverse dans le Danube à Veliko-Gradischte, où il y a, dit-on, une petite ruine. Il faut monter pendant plus de deux heures pour arriver à la cime des montagnes assez élevées, qui séparent le bassin de ^laidan-Pek de l'agreste vallée du Poretschka-Rieka. A une lieue plus loin on arrive sur une place nommé Lischkovatz, où la montagne est dégarnie d'arbres et d'où on a une vue sur les crêtes entre le Timok et les sources du Poretschka-liieka et du Pek. Tout de suite après on rentre dans les forêts de chênes et de hêtres, qui couvrent toute la longue pente de trois lieues jusque vers Milanovatz, et sur laquelle descend une route à 4 ou 5 contours. On peut aussi se rendre de Maidan-Pek à Milanovatz par le haut de la vallée du Poretschka-Rieka, savoir au moyen d'un sentier à travers la montagne aux sources du Raschka, la tête principale du Poretscka, tandis que l'autre vient du mont Deli-Jovan (Jean le fou). A leur confluent se trouve le village de Roudna-Glava (tête minière) et un peu au-dessus les mines de fer de ce nom. Dans la profonde vallée de Poretschka entre les montagnes boisées du Pekska-Planina et celles plus nues du Mirotsch-Planina, on passe par Miloscheva-Koula, Klokotsclievatz (85 m. et 413 h.), Topolitza (140 m. et 932 h.) et enfin sur le Danube en avant de Milanovatz à Oreschkovitza (05 m. et 228 h.). Depuis Roudna-Glava on peut gagner aussi la vallée du Timok et Negotin par un col d'environ 4000 p. d'élévation dans le mont calcaire appelé Stol (chaise) au S. du Deli-Jovan, qui est un prolongement méridional du mont Mirotsch. On y monte par un affluent du Poretschka et on descend sur une plus longue pente vers le hameau de Solani et vers Tschokoniar sur le Timok (20 m. et 114 h.). En deçà de la montagne élevée au S. de Roudna-Glava se trouve une eau thermale dans le haut de la vallée du Kresna, affluent du Timok. Milanovatz n'est que l'ancien bourg de l'île de Poretsch, qui a été transporté sur la rive serbe du Danube. Le Sultan avait fait présent au prince Milosch de cette île et de quelques villages voisins. Ce bourg compte 222 maisons et 1006 âmes, il y a une église et une école. On y pêche beaucoup d'esturgeons et y prépare du caviar. Depuis Milanovatz une nouvelle route conduit en 6 heures par la montagne de Mirotsch à Brza-Palanka (91 m. et 395 h.), village au confluent du Rietschka avec le Danube, La montée a lieu par plusieurs contours. On y jouit de la vue de sauvages montagnes, qui sont en partie boisées et on n'y rencontre que des bergers vallaques. En général la Kraina confinant à la Val-lachie est la seule partie de la Servie , où il y ait un certain nombre de Vallaques. On peut aussi longer depuis Milanovatz le Danube , on passe alors par Goîoubinie (81 m. et 426 h.), Schtirboutz (163 m. et 939 h.), Kobilievo (Kobilova), Tekiia (Tekie) (162 m. et 671 h.), Grad Tzaritze-Elene vis-à-vis d'Adakale, Dgedgeratz (Tisseracz) (69 maisons et 289 h.), Kladouschnitza (31 m. et 358 h.) et Kladovo (t. Phetislam) (201 m. et 751 h. serbes avec 70 m. ou 374 h. mahométans). Depuis ce bourg sur un grand torrent on a encore 4 1. jusqu'à Brza-Palanka. On traverse la presqu'île formée par un contour du Danube et on passe sur le bord de ce fleuve par Mali - Kamenitza (123 m. et 560 h.), Va-lioo-a et Grabovatz. Sur ce chemin on a occasion d'admirer le o défilé de Kasan bordé des deux côtés par de grands esearpeinens calcaires et de voir vis-à-vis d'un lieu entre Eschelnitza et Ogra-dina la table t raj an e sur ces rochers blancs, ainsi qu'à 1 1. sous Orschova la porte de fer véritable ou inférieure, le 1) ortie-Djerkap des Slaves, nom qui n'est que l'abréviation du mot turc de Demir Kapija ou de la dénomination de Demir - Kapou (en ail. Eiserne Thor '). Plus bas au-dessous de Kladovo est la place du pont de Trajan et la tour carrée, qui était jadis, dit-on, à son entrée. Ce dernier chemin n'est difficile qu'entre Plaschisevitza et Kobilievo. On y voit encore, ça et là, des traces de la voie romaine très près de l'eau 2). Depuis Brza-Palanka la route de Widdin longe le Danube, on ne traverse que de petits coteaux en partie cultivés. Après avoir franchi les torrents de Zamna et de Kamenitza, on atteint à 33/4 ]. le hameau de Djanièvo (243 m. et 1329 h.), puis après le torrent suivant on passe à Vidrovatz (104 m. et 710 h.) et à Koroglasch et enfin après 6 h. de marche on arrive à Negotin. Dans ce dernier bourg serbe il y a 013 maisons ou 2709 habitans, avec une église, un gymnase et une école de deux classes. Il y existait jadis un petit fort nommé Pasinardja, qui était entouré d'une muraille carrée avec des tours aux quatre coins. Lors de la guerre avec les Turcs on y avait ajouté des palissades et des rédoutes. Cette place fut assigée en 1809 par Jsaiev et Milenko et prise en 1810, mais les Turcs la reconquirent, en 1813 après un long siège, où périt le chef serbe Veliko , ce qui fut suivi d'un terrible carnage à Kladovo. Negotin est le chef-lieu du cercle de la frontière ou Kraina et la résidence de son commandant ainsi que du tribunal du cercle et d'un archiprctre, qui a sous lui 52 paroisses et 40 églises. Ce dernier est sous l'évèque de Timok , dont le diocèse comprend les cercles ecclésiastiques de la Kraina, du Tzerna-liieka (rivière noire), de Gourgousovatz et d'Aleksinatz, savoir: 69 églises, 120 paroisses, 7 couvents avec 19 moines et 125 prê- ') Ce nom est fréquent dans l'E. de l'Europe comme en Orient. Ainsi s'appelle le pa.ssagc entre la vallée du Tzcma dans le Bannat et celle de Hatzeg en Transylvanie. On le retrouve dans le Balkan d'Islivné et le Rhodope, en Assyrie, en Perse, en basse Autriche, etc. 2) Voyez ma notice sur le Bannat dans le Bulletin de la Société géol. de France, 1836. vol. 8, page 136. trea séculiers. L'évêque de Timok ainsi que le consistoire se trouvent à Negotin. Le Cercle gouvernemental de .Kraina comprend quatre districts, savoir ceux de Poretschka-Rieka, de Brza-Palanka, de Klioutsch et de Kraina. On y compte 74 communes, 3 bourgs, 77 villages, 9643 maisons et 50,021 babitans. Il y a 7 écoles et 3 douanes, savoir à Radouievatz, Kladovo et Tekie. Il y a une poste aux chevaux et aux lettres â Negotin et Kladovo et des postes aux chevaux à Milanovatz et Brza-Palanka. La quarantaine est à Radouievatz. Le district de Poretschka et du Rieka est composé d'un bourg, de 12 villages, de 1268 maisons et de 6742 âmes. Le chef-lieu est à Milanovatz. Le district de Brza-Palanka contient 21 villages, 2915 maisons et 15,242 âmes. Le chef-lieu est àNegotin. Le district de Klioutsch comprend 1 bourg, 18 villages, 1779 maisons et 7906 âmes. Le chef-lieu est à Kladovo. Le district de Kraina renferme un bourg, 26 villages, 3681 maisons et 20,131 âmes. Le commandant réside à Negotin. Le bac sur le Timok est près de Bregovska ou Bregovo. En deçà de la rivière on entre sur le territoire turc, et il y a un reste d'un ancien bâtiment. On passe sur une basse hauteur tertiaire àGirza et laisse au loin à gauche sur les bords du Danube les ruines du château de Florentin. De Widdin les routes principales en Bulgarie sont celle de Nisch (environ 20 h.), celle de Pirot par Arzer-Palanka et Tschi-provatz (environ 23—24 h.), celle de Sophie par Arzer-Palanka, Drinovatz (t. Drenofsche), Milkovatz (t. Melgovdscha), Berkovatz (t. Berkovdscha), et le Soumoughou-Balkan (35—36 h.). Enfin, les routes le long du Danube et au Balkan. La ville fortifiée de Widdin (si. Vidin) fait un bel effet avec ses 20 minarets. De vastes édifices en pierre et à deux étages appartiennent au pascha et sont placés sur une petite éminence. Autour de bon nombre de maisons, il y a des bouquets d'arbres. On y remarque aussi une espèce de château élevé avec des petites tours. Cette ville commerçante compte plus de 20,000 âmes, parmi lesquels il y a beaucoup de Bulgares et de Vallaques. Sur le Danube sont toujours stationnés de grandes barques. Vis-à-vis de la ville est une île dans le Danube. Widdin est la capitale d'un assez grand Paschalik, qui contient 12 à 13 bourgs et même cinq villes, savoir Widdin, Nikopoli, Plevna, Lovtscha et Sçhiatova, Sa population est éminemment bulgare, mais une petite partie de ces Bulgares comparativement au reste sont mahométans et un nombre très exigu est catholique romain. Les Turcs asiatiques disparaissent presque à côté de cette niasse slave. Le chiffre de cette population peut aller à 2 ou 300,000 âmes. Les Âyans principaux sont hors des quatre villes dans les bourgs suivants, savoir: Raova, Vischedrina, Dschibra-Palanka, Arzer-Palanka, Belgradschik, Drinovatz, Mclkovatz, Vratza, Ka-menopol, Pirsnik, Tschiprovatz, Sirischnik, Berkovatz, Vikrar et Isvor. De Widdin à Lovtscha (environ 3S h.) la route postale longeait autrefois le Danube jusqu'à Raova, mais d'après la carte de Kiepert elle irait maintenant d'Arzer-Palanka tout droit à Vischedrina (t. Vivardsche) et de là à Plevna ou Lovdscha en touchant ou ne touchant pas à Raova. De Widdin à Ostrova on côtoyé le Danube sur un sol ondulé de petits coteaux tertiaires, ou bien en plaine, tandis ^que la rive vallaque est toute plate. Jusqu'au Lom on traverse une douzaine de torrens, dont les principaux sont leTernek, leVidbaout (?), l'Arzer près d'Arzer-Palanka, et le Smorden. Lom Palanka est bâti sur la pente d'une colline et aussi sur un ruisseau. Après le gué du Lom qui prend sa source dans le Tzrni-Vr au-dessus de Pirsnik, on arrive à Zibrou ou Dschibra-Palanka, village avec une mosquée et des maisons en grande partie en bois entremêlés d'arbres. Le Zibritza, en turc Dschibra, prend ses sources au S. O. près de Tschiprovatz et Sirischnik, petits bourgs bulgares, dont dépendent assez de villages. Une crête secondaire à cimes uniformes, courant du N. O. au S. E., sépare ce district de la vallée du Ni? schava. Le Zibritza se passe après Dschibra-Palanka, mais l'Ou-goustoul avant Kostolin (t. Kodosli) et à peu de distance vient le débouché du Skidoul (Seidoul) dans le Danube. L'Ougoustoul ou Ogoustoul ou Ougoust est formé par plusieurs torrens dans le bassin de Berkovatz, qui est borné au S. O. par le Stara-Pla-nina (?) de Mr. Kiepert, tandis que les têtes du Skidoul sont aussi dans la partie orientale de cette dernière crête. Toutes les six grandes rivières entre Widdin etRaova coulent du S. O. au N. E. et ont leurs sources dans des vallées longitudinales, qui coupent à angle droit la première direction et sont parallèles au grand canal des temps géologiques tertiaires entre, les bassins de Nisch, de Sophie et de la Thrace supérieure ou à la grande voie militaire de Nisch à Tatarbasardschik. La carte de Mr. Kiepert élève fort bien le nombre de ces vallées à deux ou trois. Le sillon N. O.S. E. de Bania à Sophie est bordé par une crête , comprenant le Tzrni-Vr ou Vrch (Cime noire) au N. de Pirot et le Soumoughou-Balkan au N. de Sophie. En deçà vient le sillon de Petschenabrod sur la route de Berkovatz à Sophie et au S. O. du Stara-Planina (?). Puis le sillon où sont Sirischnik, Tschiprovatz, Lom, Isnebol et le Mali-ïimok. Enfin celui de Berkovatz, de Pirsnik, de Tergovischte et du Veliki-Timok. Mr. Kiepert donne le nom de Kirousch à une partie de l'arête au N. E. de cette dernière cavité. Comme dans le Jura et les Alpes, les eaux ne sortent de ces sillons parallèles qu'au moyen de cluses ou défilés transversaux en général calcaires, comme à Belgradschik sur l'Arzer, à Sredo-kiive sur le Smorden, au-dessus et au-dessous de Pirsnik sur le Lom, à Bielograd (Bjclgratz) et au-dessus de Melkovatz sur le Zibritza, au N. de Berkovatz sur l'Ogoustoul et au-dessus de Vratza sur le Skitoul. Cette orographie se continue en partie sur le pied septentrional du Balkan, mais elle y est moins clairement indiquée par suite des destructions postérieures et les sillons ainsi que les crêtes y courent presque O.-E. Après le passage du Skidoul on atteint Raova, appelé aussi Orova(?). Le bourg de Raova est situé au débouché d'un vallon dans le Danube, il y a une huitaine de mosquées et quelques habitations passables ainsique des bouquets d'arbres épars sur les coteaux et vers le Danube. Tous ces bords du Danube étaient déjà habités du temps des Romains. Maintenant ils paraissent surtout contenir les 2000 Bulgares catholiques, véritable oasis au milieu de l'église grecque de ce pays. Bs sont groupés principalement à Arzer et Lom-Palanka et ne sont surtout que les restes de colons hongrois lors du temps, où les rois bulgares se reconnaissaient vassaux de la couronne de Hongrie. Après le gué d'Insikra on arrive à Ostrova, où. on quitte le Danube pour s'enfoncer dans la Bulgarie. L'Isker se passe eu bac; à Glava (Tête), mais le Vid ou Schereschtoul des Vallaques à gué après Mahala (Magala des cartes) et à Plaschija avantPlevna, on traverse les dernières basses collines tertiaires de la Bulgarie, qui courent parallèlement au Danube et augmentent en hauteur à mesure qu'on avance vers le Sud. Plevna (t. Pilavna) est une ville bulgare de 10 à 15,000 habitant environ avec plusieurs mosquées, et le mélange ou l'entourage de groupes d'arbres ordinaire en Turquie. Depuis là on n'a plus que deux hauteurs à traverser pour arriver dans la vaste plaine alluviale, qui précède Lovdscha. Sur cette route militaire comme sur toutes celles où on a établi anciennement des colonies musulmanes, les villages bulgares restent éloignés ou cachés, quoique ce bas pays en contienne un bon nombre. Néanmoins on rencontre celui de Krjine (KpffiHHe). La seconde crête après Plevna est plus élevée que la première et son sommet applati est couvert de broussailles et atteint 1425 pieds d'élévation absolue. Depuis sa cime on jouit d'une vue étendue tant sur les contreforts du Balkan que sur la large vallée de l'Osma, qui coule au N. E., et contient maint village bulgare. On distingue entre le Danube et cette hauteur trois grandes ondulations de terrain, tandis qu'à son pied méridional il y à encore deux éminences entre lesquelles il y a des fontaines. C'est dans ces environs que sont cachés dans des gorges les villages bulgares de Schalkovitza, de Slatina et de Novo-Selo (nouveau village). Le reste de la route jusqu'à Lovdscha a lieu à travers une plaine sèche seulement en partie cultivée. Des prés précèdent l'entrée de la ville, qui est placée des deux côtés de l'Osma à la sortie d'une profonde gorge de montagnes calcaires, très escarpées et appartenant au système crétacé inférieur. Lovatz, en turc Lovdscha ouLoftscha, est une ville d'au moins 12 à 15,000 âmes. On y compte 300 maisons ou familles chrétiennes, le reste sont des Musulmans, qui habitent surtout la rive occidentale de l'Osma. Un pont en pierre couvert et garni de boutiques lie ensemble les deux bords de cette rivière. LeKonakde l'Ayan est près de la place sur la rive orientale; c'est un édifice carré d'un étage avec une vaste cour. Il y a une horloge et huit à neuf mosquées à minarets. La partie orientale de Lovdscha est adossée contre la montagne et bâtie en amphithéâtre ; des rues étroites y conduisent à la cime de la hauteur, qui s'avancant en promontoire vers la plaine, offre un excellent observatoire pour un mgénieur-géographe. Des officiers d'état-major y étant montés lors de l'occupation russe, les Ottomans n'aiment guère y appercevoir des étrangers. Une autre ruelle de maisons remonte l'Osma en- caissée entre de hautes murailles calcaires et en deçà de deux coudes décrits par cette rivière il y a un cimetière, D'autres lieux de sépulture se trouvent à la sortie de la ville vers l'Ouest et le Nord et le premier est entouré d'une bonne palissade, véritable innovation en Turquie, Enfin le grand Han avec sa vaste cour et son premier étage ne ressemble qu'à deux rangées de cages de ménagerie. Du reste la situation de Lovdscha est des plus belles, la fente des rochers gris occupée par l'Osma étant enchâssée dans un cadre de coteaux couverts de beaux vignobles et de vergers. Dans le temps de la floraison le coup d'œil est vraiment enchanteur. Pour un ennemi venant du Danube Lovdscha est un premier rempart pour la défense du Balkan, mais pour l'occupation de la Bulgarie la population musulmane de cette ville est d'autant plus importante qu'elle est comme celle de Schoumla au centre de plusieurs villages turcs ou de bulgares mahométans. Quoique ville ouverte, elle peut servir de refuge aux Ottomans comme aussi comme point de départ pour des opérations militaires. D'un autre côté cette ville est placée comme Trnava ou Tirnava à la sortie de vallées de montagnes, où se trouve la population slave, la moins soumise de la Bulgarie, savoir celle aux sources du Vid, de l'Osma, du Rousita et du Jantra. La sauvagerie du Ilaut-Balkan a servi de tout temps de retraite aux mécontens et depuis là ils peuvent gagner aisément le Ehodope ou d'autres groupes de montagnes tout aussi sûres en Macédonie ou Haute-Moesie. Aussi les passages du Ilaut-Balkan sont évités par les Turcs et il n'y a pas de relais de poste. Mais les commerçans de Tatarbazardschik et de Philippopolis et surtout les Kiradgis ou loueurs de chevaux de bât traversent quelquefois ces solitudes pour se rendre sur le Danube et surtout à Lovdscha. Suivant le point de départ la vallée du Troutscha ou du Koumsou leur sert à monter le Balkan et si leur but est Lovdscha ils longent l'Osma et passent à Kalouge-ritza, où est le couvent d'Ouspenie ou de l'Assomption de notre Dame, puis à Trojan et Latetz. Tous ces lieux avec quelques autres villages existent réellement et on m'a même parlé de défilés àes-carpemens près du couvent. La route de Lovdscha à Selvi sort tout de suite de la gorge de l'Osma et commence à monter à travers les vergers, les noyers et les cerisiers. Mais il faut une heure pour atteindre le plateau ondulé, qui est inculte ou couvert tout au plus ça et là de buis- sons de chênes. Il s'élève à 900 p. sur Lovdscha, qui serait environ à 800 p. sur la mer noire, À 3 1. de la ville on descend dans un vallon, où se trouve une fontaine, puis on remonte sur un plateau de plus de 2000 p. de hauteur absolue et du même genre que le précédent, et on n'apperçoit pas même de culture dans une vallée à l'ouest. A 4 1. de Lovdscha on franchit un vallon courant 0,-E. et à bonne terre végétale, il est arrosé par le Roubscher. Des buffles y utilisaient seuls les dons de la nature. Cette route étant une des principales de la Turquie, on ne doit pas être étonné que les Bulgares s'en soyent tenus éloignés. D'ailleurs les Ottomans eux-mêmes y ont favorisé l'établissement de villages musulmans et sont en général parvenus à refouler la population laborieuse des Bulgares plutôt vers le Balkan, la haute Moesie et la Macédoine. Les guerres avec les Busses ont fait le reste, de manière que de toutes les provinces de la Turquie la Bulgarie a le plus de terres en friche et présente le moins de ressources alimentaires pour une armée. D'un autre part les communications y sont plus faciles qu'ailleurs en Turquie excepté dans la Thrace, parce que ce pays éminemment de collines offre aussi le plus de voies propres aux charrettes. Un petit plateau sépare le vallon de Roubscher d'un autre, qui a la même direction et ce n'est que sur la hauteur plus au S.-E. qu'on laisse à droite le village turc d'Aghindjilar. Il est entouré de champs de blé et de maïs et à l'est il y a des vignobles et des arbres fruitiers. Au S. des collines boisées s'élèvent à 400 pieds au-dessus de cette espèce de vaste col. Des femmes turques sans voile y travaillaient dans les champs en même temps que d'autres étaient grimpées sur des cerisiers, dont nous aurions bien voulu avoir notre part, néanmoins la crainte d'être surpris.par des Turcs nous fit passer outre, sans adresser la parole à personne. La descente dans la plaine de Selvi à 1200 p. de hauteur absolue est très graduelle et on a tout le temps d'observer à l'est le cours du Rousita dans la large vallée de Selvi, et les vignobles sur les coteaux en deçà de l'eau, tandis qu'au S.-O. s'élèvent aux sources orientales de l'Osma les cimes élevées et gazonnées du haut Balkan (Kodja Balkan) au-dessus des zones des hêtres et des chênes. Ce sont surtout les sommets nommés Tourian - Balkan (5000 p.), Despotohailasi (5100 p.) et la cime de 5251 p. près de Svendol Bogoroditza au-dessus de Kalofer ou entre ce lieu et Ka-loujeritza sur l'Osma. Mr. Kiepert a raison d'indiquer une corn- :î() munication entre Selvi et Sladitza, car les contreforts du Balkan ne m'ont pas paru élevés dans cette direction. A trois quart d'heure avant Selvi on laisse au N. le village turc deGoermesi et on passe un petit ruisseau coulant encore O.-E. dans Rousita. Selvi devait contenir avant la peste de 1838 environ 5 ou 6000 âmes à en juger d'après son étendue et les trois mosquées à minarets. (Voyez ma Turquie. Vol. 3. pag. 563.) Comme carrefour de quatre routes elle peut avoir quelque importance et les plaines de la Rousita avec les coteaux voisins paraîtraient assez favorables aux déployemens de forces militaires, tandis que depuis Selvi on peut pénétrer avec quelque facilité dans les vallées au pied du Grand Balkan. On traverse la Rousita à gué au S.-E. du grand cimetière, qui est à la sortie de la ville. La rivière a un lit large et rempli de cailloux et est très peu profonde en été. Au S.-E. de Selvi on a une vue fort champêtre sur de petites coteaux de vignobles entremêlés de champs et d'habitations. Mais ces indices de culture disparaissent bientôt, car à 3/4 de 1. de Selvi on monte par des boeages de chênes sur une petite plateforme, d'où on apperçoit à l'est un contrefort calcaire crétacé du Balkan, qui court comme cette chaîne environ de l'O. à TE. et peut avoir une lieue de largeur. Dans son milieu on distingue des forêts et des prés entre ces sommets rabbattus, tandis que des escarpemens font face à la chaîne du Balkan, mais au-dessous de ces rochers la montagne descend en plan très faiblement incliné dans la vallée. Lorsqu'on est arrivé au col bas de 2100 p., qui lie cette crête à celle de près de Trojan, on domine tout le pays sauvage, qui sépare le voyageur du Balkan. Néanmoins vu l'ascension graduelle jusqu'à ce point, cette route ne paraît guère susceptible de longue défense, surtout vu le manque de grands bois et de contours importans ou de gorges profondes. D'un autre part comme poste d'observation ces lieux doivent avoir leur utilité d'autant plus qu'on peut depuis là gravir sur l'arête calcaire voisine de 2800 p. et embrasser une étendue considérable de pays. On distingue dans cette vaste cavité très boisée deux ou trois basses crêtes parallèles au Balkan et à la chaîne dont je viens de parler et qui s'élève environ de 500 à 1000 p. au-dessus du fond de la vallée. On y descend en coupant obliquement le pied de la crête voisine et on est tout étonné de voir que cette contrée n'est pas si sauvage qu'elle paraît l'être, car bien des villages sont cachés parmi ces masses d'arbres. Tout le pied septentrional du Balkan et surtout du grand Balkan jusqu'à Demir-Kapi étant très boisé et coupé autant par des vallées transversales que par des sillons longitudinales, est un échiquier de guerre, qui semblerait bien favorablement disposé pour ceux appelés à se défendre contre le Nord, d'autant plus qu'il y a à une assez grande distance des Balkans une espèce de dernière muraille seulement ça et là démantelée. On pourrait concevoir aussi que dans le cas d'une insurrection les Bulgares pussent se retirer dans cette contrée, que leurs villages disparaîtraient dans les forets comme en Servie et qu'à cheval sur les Balkans il pussent braver les Turcs quoiqu'incapablcs de leur tenir tète dans la plaine ou sur les basses plate-formes déboisées de la Bulgarie inférieure et orientale. La cavalerie y serait peu utile et môme embrassante. Seuls vu leur nombre les Bulgares de la Bulgarie ne peuvent pas songer à une pareille chose. Le premier village qu'on rencontre est Àsabelli, habité par des musulmans. Plus loin nous eûmes le spectacle de toute une Colonie de Zingares en voyage, les uns à cheval, les autres en char-riots ou à pied. Plus loin nous vîmes revenir d'un couvent voisin situé au pied de la montagne, une foule de Bulgares endimanchés. Après avoir fait leur dévotion, ils avaient bu et mangé joliment et au bruit qu'ils faisaient de loin, je crus au premier moment que c'était une foire; en effet un pèlerinage est toujours le point de rassemblement de marchands forains. Comme Gabrova était encore à 3 1. nous allâmes coucher à Kolibola, hameau bulgare de 60 feux, situé (à 1832 p. de h, abs.) hors de la route au S. en deçà d'un petit ruisseau. L'endroit est choisi admirablement pour soustraire tout le village à la vue des Turcs, car au premier moment on ne voit qu'un bois de gros chênes clairsemés sur une petite pente. Ce n'est qu'après être arrivé 8ur le haut de cette dernière qu'on découvre les maisons du village , dont chacune est avec son jardin et son verger dans un enclos de palissades de branches d'arbres tressées '). ') Le Soubaschi ou chef bulgare du village n'étant pas chez lui, nous cherchâmes nous-mêmes dans le village la maison, qui paraissait réunir a une bonne apparence le plus de commodités pour notre logement. Nous nous arrêtâmes à l'une qui avait une galerie ouverte ou Tschardak au premier, et sans attendre l'arrivée des maîtres du logis, nous ouvrîmes la porte de la cour, déchargeâmes nos chevaux, les mîmes à l'écurie et nous établîmes sous le Tschardak. La maîtresse du Depuis là à Gabrova, à 2 '/a h. de distance, la route ') n'offre rien de saillant et parcourt un pays légèrement ondulé, tantôt couvert de bocages de chênes, tantôt cultivé ou en prés, néanmoins on n'apperçoit pas de villages. A l'entrée de Gabrova la route est resserrée entre la Jantra et un rocher calcaire sur lequel il y a un Tscliardak turc. La ville est précédée par un pont en pierre de quatre arches, ouvrage des anciens rois bulgares d'après l'inscription. Gabrova est placée à 1984 p. de hauteur absolue au pied d'une colline rocailleuse sur une corniche bordant la rive orientale du Jantra. Ce bourg est composé surtout d'une seule grande rue très longue et mal pavée. Vers son milieu se trouve une espèce de place, il y a assez de boutiques et une tour avec une horloge. Les maisons n'ont toutes qu'un étage et sont en bonne partie en bois. La population est presqu'entièrement bulgare et peut aller tout au plus à 5000 âmes. Le sultan Mahmoud qui venait d'y passer avant mon arrivée en 1837, y avait fait, dit-on, de grandes largesses aux pauvres sans distinction de religion. On parlait de cent mille piastres et on ajoutait que c'était à cause de la conduite loyale des habitans de ce bourg pendant la guerre contre les Russes. Nous y trouvâmes logis ne se fit pas attendre longtcms et échauffée par le régal du pèlerinage, elle commença par nous recevoir de la manière la plus maussade possible et même a nous dire des choses, qui équivalaient pour notre Tartarc a des insolences. Ce dernier était accroupé tranquillement fumant sa pipe; mais au débit fougueux de cette belle dame, il mit les poings sur les côtés et l'accabla d'injures , ce qui joint a l'arrivée de son mari, qui nous salua, lui ferma la bouche. Un vieux barbon bulgare vint un moment après et le Tartare honorant l'âge comme tous les Turcs, lui offrit une prise de tabac et un verre d'eau-de-vie de prunes. Pendant ces entrefaites la dame du logis et sa compagne s'étaient tout-a-fait radoucies-, il est vrai qu'il était dur pour elles au lieu de se coucher, d'avoir à poser leurs beaux habits pour faire un soupe a des Turcs et des incrédules. Néanmoins nos manières affables, la perspective d'être payées, de partager même le reste de notre souper avec nos domestiques et notre Tartare engageant la conversation en bulgare, tout cela réuni produisit un rapprochement cordial et le Tartarc de s'écrier: ,,Quand on est poli, je sais être aussi doux (tatle) avec les femmes." Nous aurions bien voulu répéter avec nos hôtes le pèlerinage de la veille, mais l'église antique avait été démolie pour sa reconstruction. Du reste ces corvées du logement des voyageurs en Turquie sont bien préférables aux logemens de militaires exigés en Europe, car les propriétaires n'ont à déplorer aucun dommage et reçoivent encore un payement plus ou moins fort. ') Il est étonnant que la route postale de Sclvi a Gabrova manque dans la carte de Mr. Kicpert. une auberge passable avec trois chambres, dont une avait une cheminée et les autres étaient garnies de nattes ou de tapis. Gabrova contenait comme une exception parmi les petites villes de Turquie quelques filles de mauvaise de vie, mais on avait cru devoir les chasser de la ville à cause du Sultan, tandis qu'en Europe on croit fêter l'arrivée des têtes couronnées en rassemblant des comédiens, des danseuses et des femmes galantes. A peine est-on sorti de Gabrova qu'il faut repasser la Jantra sur un second pont de pierre, qui est encore un reste du temps des rois bulgares et est assez fortement bombé. On remonte la petite vallée inhabitée du Gabrovasou, qui décrit des contours, de manière qu'après avoir marché un quart d'heure au S., on va ensuite de l'E. 3 0 S. à O. 3 0 N., puis on se dirige de nouveau pendant un quart d'heure du N. au S., pour aller ensuite du N.-E. àS.-O, et de nouveau de l'E. à l'O. Les hauteurs voisines sont boisées en chênes ou présentent des rochers nus, en général cette route n'offre rien d'intéressant jusqu'au moment où on quitte la direction E.-O. pour entrer dans un vallon, qui conduit au pied du Balkan à 2198 p. de h. abs. Un petit défilé de rochers calcaires blanchâtres ferme son entrée et un petit pont est jeté sur le torrent, qui coule dans le Jantra et prend sa source à l'O. et S.-O. au pied du Balkan. A une grande lieue de Gabrova est la première partie de l'ascension du Balkan de Tschipka. Elle est très forte et dure plus d'une bonne demi-heure ou 35 à 40 minutes. Ce tracé de la route ne décrit pas assez de contours ; néanmoins toute espèce de voiture légère peut y monter aisément, surtout si on employé des boeufs; ces animaux sachant mieux que les chevaux se tenir sur un sol un peu argileux. Le transport de canons d'un certain calibre y serait même possible avec des boeufs ou à bras d'hommes. Mais si on n'était pas très pressé, ce ne serait pas un long travail de faire décrire à cette route deux ou trois zigzags et de consolider provisoirement la voie avec des pierres et des troncs de chênes, qui abondent dans les environs. Une fontaine est placée à propos près du baut de cette montée, où la route est extrêmement large. Lorsqu'on est arrivé sur le premier échellon du Balkan, on y observe quelques champs de maïs et des cerisiers, et se dirigeant au S.-O. on atteint bientôt le premier Karaoul. Les bois de hêtres commencent entre ce poste et le second, ce dernier est placé sur une autre corniche, a laquelle on parvient par une bonne route de voiture, décrivant 3 Si une vaste courbe à l'O. Depuis là jusqu'au col de la montagne on n'a plus qu'une petite demi-heure, de manière (pue toute l'ascension ne prend pas plus de deux heures et demie à compter depuis le pied du Balkan. On monte alors sur une crête, qui sépare des profondes vallées boisées et qui s'étend au S. Dans les contours de la route nouvellement réparée en 1837, on avait fait jouer la mine. On y jouissait quelquefois de percées de vue sur les contreforts du Balkan, mais le meilleur point d'observation se trouve sur un petit sommet déboisé à quelques centaines de pas avant d'atteindre, à 4453 pieds de hauteur absolue, l'auberge du col de Tschipka. Depuis ce monticule on domine un bon nombre de vallées et de basses crêtes, où on ne distingue rien autre chose que des forêts de hêtres et de chênes, tandis qu'on voit au-delà les bords ondulés de la plaine danubienne et à l'O. une petite cime gazonnée au-dessus des bois du Balkan de Tschipka. L'auberge est placée sur le col si étroit de la montagne qu'on plonge au S.-O. dans la plaine de Tschipka et au N.-E. dans les sillons supérieurs et boisés des vallées du Balkan. Cette habitation toute en bois est très utile pour les voyageurs, surtout en hiver, c'est le Sultan Mahmoud qui en a ordonné la construction à son passage. Elle consiste en une vaste écurie au-devant de l'entrée de laquelle sont deux pièces pour les voyageurs. Avant de commencer la descente rapide de Tschipka il faut encore monter quelques instans pour tourner un gros mamelon calcaire, qui domine le col au S. Ce n'est que lorsqu'on a franchi ce dernier obstacle qu'on jouit de la vue entière du bassin supérieur du Tondja ou Toundscha et de la petite chaîne, qui le sépare des plaines de laThracc. Une pente très inclinée et déboisée se trouve à l'E. de la route, de manière vu le passage du Sultan en 1837 on avait cru nécessaire d'y mettre une barrière en bois. Plus loin le chemin décrit plusieurs contours à travers les roches schisteuses dénudées et désaggregées au-dessus de Tschipka, de manière qu'on met une heure pour atteindre ce village. Cette route étant tout-à-fait artificielle est sujette à des éboulis, surtout dans sa partie inférieure. Muni de quelques pièces postées vers le haut du col de Tschipka, un petit nombre de troupes pourrait probablement tenir ce passage fermé et empêcher l'ascension de la montagne des deux cotée. Aussi les Russes ne l'ont pas pu forcer en 1829. Tschipka (Dentelle) à 1760 p. est entouré de jardins derosiers et le fumier des feuilles de roses y répand en tout temps un parfum agréable. Quoiqu'on y extraye l'huile de roses, on ne la purifie qu'à Kezanlik. Sans cette culture les environs de ce village seraien* peu attrayans, parce que la pente du Balkan est déboisée, la plaine en grande partie en pâturage sec sans arbres et la chaîne en deçà sans contours frappans. Al'O. on voit l'échancrure entre cette dernière et le haut Balkan, col par lequel on se rend à Kalofer et dans la plaine de Philippopolis. La plaine de Tschipka contient une douzaine de tumulus (Voyez ma Turquie. Vol. 3, pag. 349), qui tendraient à faire croire que la route de Kezanlik et même peut-être celle de Gabrova a déjà été en usage du temps des Romains, mais l'absence de toute trace de chemins ou d'ouvrages romains devrait faire croire qu'au moins le passage du Balkan avait lieu sur un point différent de celui d'aujourd'hui. La plaine est évidemment le fond d'un vaste lac, qui s'est écoulé avant les temps historiques par les gorges occupées aujourd'hui par la Toundscha. Il avait au moins 3 1. de long sur 1V2 1. de large et. son fond est actuellement à une hauteur absolue moyenne de 16 à 1700 p. Ail. de Tschipka le village turc de Schekerli (de Sucre) est entouré agréablement de noyers, d'autres arbres fruitiers et de rosiers. Une troupe de voyageurs bulgares établis sous un antique arbre, formait un de ces tableaux d'autant plus orientaux qu'un Tartare passait en même temps au grand galop et aux cris répétés de son surudgi ou postillon. Après cela la route ne traverse plus que de beaux champâ et des prés jusqu'à la ville de Kezanlik (à 1650 p.). Les rues y sont tenues propres par une grande quantité de ruisseaux d'eau vive, qui se rendent dans la Tondja coulant au S. C'est une ville d'environ 10,000 âmes, qui a plusieurs mosquées et un assez vaste bazar, où on remarque ça et là des ceps de vignes formant treille. La poste offre un Konah fort commode et des chambres propres et garnies de tapis pour les voyageurs. A peine débarqués, un marchand d'essence de roses vint nous rendre visite ; c'était un jeune Turc d'une très jolie figure. L'essence se vend au poids et dans de petites fioles de verre taillé plus ou moins ornées dans le goût des dames turques. Les marchands ont des assortimens de ces dernières et remplissent celles auxquelles on donne la préférence. Pour un ennemi 3* franchissant le Balkan dans ce point, Kezanlik est le premier lieu, où il peut espérer de pouvoir se ravitailler de provisions. Les environs de cette ville sont surtout fort agréables vers le N.-E., car des jardins de rosiers et des vignobles y couvrent la pente de petits coteaux, dont on longe quelque temps le pied en se rendant à Eski-Sagra; mais à 1 1. de la ville on est obligé de traverser une plaine gazonnée et marécageuse, où paisaient des vaches, des buffles et des chevaux. A 1 ï/2 1. de Kezanlik on traverse un petit cours d'eau, qui vient de l'O. ou N.-O., et à 2'/2 1. il y a une fontaine, depuis laquelle la route tourne au S.-E. vers des crêtes boisées. Avant d'atteindre ces dernières, il faut passer la Tondja sur un ancien pont de pierre, en deçà duquel on a bâti depuis le passage du Sultan un café turc très propre d'un étage. On peut à la rigueur y passer la nuit. A peu de distance de là à l'E. sont les ruines d'un bain thermal hydrosulfureux. Sa destruction paraît être due aux débordemens du petit torrent, qui vient du S.-O. et coule dans la Tondja en passant à côté de ce bâtiment. Le bassin existant encore, nous ne pûmes résister à l'envie de nous y baigner, mais n'ayant pas nos caleçons, le Tartare ne crut pas devoir par décence se baigner avec nous et attendit que nous ayons fini. Depuis le bain on commence à s'élever graduellement pour franchir le contrefort du Balkan, qui surmonté d'une plate-forme sépare la plaine de Kezanlik des environs d'Eski-Sagra. A 3/4 1. de là cette route de voiture est excellente et on passe par un pays tout-à-fait déboisé, le haut du plateau est occupé par des champs et à 2 1. avant Eski-Sagra on remarque sur une hauteur à l'E. du chemin le village turc de Derbendkeui (le village du défilé). On jouit encore toujours de la vue des sommités du Balkan, qui dédommage du peu de beauté des petites cimes nues, qui entourent, le voyageur sur cette basse crête. Ce col n'a guère que 5 à 600 p. au-dessus de la Tondja et un peu plus sur la plaine d'Eski-Sagra. Une route bien tracée et taillée souvent dans les rochers calcaires descend le long du défilé, qui débouche dans le bassin de la Thrace. On marche d'abord au S.-O , puis au S. La seule chose qui alors manquait encore sur ce chemin, c'était deux ou trois ponts d'une arche, afin de ne pas trop entraver le cours du torrent. Ce dernier fait aller quelques moulins, dont l'un est placé à la sortie méridionale de cette fente naturelle. L'importance militaire de cette gorge pour empêcher un ennemi d'y pénétrer du S. est ai diminuée extrêmement par la facilité offerte par les cimes douces voisines pour tourner cette espèce de porte de quelque côté qu'on le veuille. Après n'avoir vu que des rochers et une nature agreste, on est ravi de se trouver transporté près d'Eski-Sagra, à 1249 p. d'élévation, au milieu de jardins et de vergers, offrant la plus belle végétation possible. Les basses pentes bordant la verdoyante plaine sont vraiment une serre chaude naturelle, étant abritées au N. par le Balkan et son contrefort. Des cultures de rosiers s'y retrouvent aussi et non loin de la ville les habitans avaient choisi avec beaucoup de tact un tel pied-à-terre pour y bâtir un petit pavillon, où. le Sultan a pu recevoir les hommages de ses sujets au milieu du parfum le plus estimé des Orientaux. Eski-Sagra est une ville de ressources de 15 à 20,000 âmes bâtie contre la pente douce de la chaîne que nous venions de passer. Elle possède 13 grandes mosquées à minarets, un vaste bazar couvert et à rues très tortueuses, et plusieurs grandes places ainsi que des fontaines. L'Ayan a son Konak sur le côté N.-O. de la ville et eut la complaisance de nous loger dans une exel-lente auberge tenue par un Zinzare. Cette maison appartenant à l'Ayan avait été jadis la demeure de l'autorité turque. L'entrée était pratiquée sous le premier étage et conduisait à une grande cour, autour de laquelle était un bâtiment de deux étages garni de galeries de bois. C'est sur ces dernières que s'établissent les domestiques, tandis que les maîtres sont dans les chambres dont les portes y débouchent. Cette auberge contenait environ 30 chambres, dont quelques-unes avaient des cheminées à la turque et dans le bas il y avait des écuries et des remises. Devant nous loger par ordre de l'Ayan, le fin Zinzare nous voulut colloquer d'abord dans une petite chambre n'ayant de fenêtres que sur la galerie, mais nous fûmes bientôt installés très proprement sur des tapis dans une pièce occupée avant notre arrivée par des femmes, et nous pûmes compter cette auberge parmi une des meilleures de la Turquie ') Parmi les personnes que nous y rencontrâmos se trouva un Autrichien de Klagcnfurt se disant médecin et parlant un peu toutes les langues. Sa barbe grise, son extérieur et surtout son indiscrète curiosité nous frappèrent. Plus tard nous apprîmes qu'il avait été longtemps médecin de l'Ayan à Islivné et qu'il s'y était rassemblé quelque argent. Comme on savait cela, il craignait a son départ En parcourant la ville d'Eski - Sagra je fua frappé d'y voir des gens avec des parapluies , rareté en Turquie. J'y vis aussi achever une grande église grecque en pierre de taille, qui était ornée intérieurement de colonnes de marbre et avait sur les côtés neuf fenêtres en plein ceintre. Mais le bazar et les places me déplurent par leur puanteur et leurs immondices, car quoiqu'en partie en pente, l'eau n'y est pas assez abondante pour rendre les balayeurs de rue inutiles comme à Kezanlik. Des jardins potagers cultivés par des Bulgares ou des Grecs entourent Eski-Sagra au S. Il y a de jolies promenades à faire parmi les jardins et les vergers au-dessus de la ville. J'y surpris dans l'un d'eux de jeunes femmes turques non voilées, qui cueillaient des fruits. Notre conversation ne fut pas longue vu le voisinage d'un petit café, où il y avait des Musulmans. Depuis les hauteurs derrière Eski-Sagra, la vue est bornée à quelque distance à l'O. par des coteaux courant au S. ou S. O., mais on a devant soi une plaine immense au milieu de laquelle un tumulus isolé fait un effet curieux. On ne peut distinguer la chaîne du Pthodope qu'en s'élévant sur les sommités agrestes, qui sont plus au N. Eski-Sagra doit occuper la place d'une ville ancienne comme l'indique déjà son nom de JEski significant en turc antique. Néanmoins on n'y voit plus de traces de monumens, à l'exception de quelques débris des murailles, qui ont pu jadis former une partie de l'enceinte de la ville vers la plaine. Après avoir traversé la campagne verdoyante au S. d'Eski-Sagra, on passe jusqu'à Ilarmanli ou Ilirmenli par un pays de petits coteaux en partie tertiaires. Au S.-E, de Karabounar (fontaine noire) non loin de la route s'élèvent deux petites buttes coniques de rochers trachytiques, qui font partie des dépôts volcaniques disséminés entre Karabounar, Jamboli et la Tondja. On descend peu à peu dans la vallée de la Maritza (t. Me-ridsche ou Meritsch), qui coule au N. de Ilarmanli entre des coteaux et on la passe sur un pont de bois (?) l). Cet endroit si- dc cette ville d'Être volé en route et se sauva à ce qu'il prétend , en trompant ses connaissances sur le moment véritable de son départ. Cela peut donner une idée des circonstances, dans lesquelles il peut être dangereux de s'aventurer seul sur les grandes routes en Turquie comme ailleurs du reste. ') Mr. le Feldmarschall-Lieutenant de Hauslab a eu la complaisance de me donner les détails sur la route d'Eski-Sagra a Ilarmanli. tué au pied oriental des hauteurs de gneiss a été probablement une fois bien plus grand qu'actuellement, car il n'est plus composé que d'une trentaine de maisons avec une mosquées et une immense caravansérail en ruines. Celui-ci donne une bonne idée des auberges du moyen âge, l'écurie servant de salle à manger et de chambre à coucher et chaque place pour un cheval ayant sa cheminée. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, p. 283.) Nous y rencontrâmes à notre passage une vingtaine de chevaux de bâts avec des Ki-radgis, qui retournaient en Albanie. La route d'Hebibdscho passe sur de bas plateaux dénudés de bois et n'offrent rien d'intéressant. Ilebibdsche, à 993 p., est un village, où il y a beaucoup des Zingares, l'auberge de la poste n'est bonne qu'en été, où on peut s'établir sur deux carrés plus élevés que la terre et couvert sous forme de berceaux avec des branches d'arbres sèches. Depuis ce lieu on distingue les extrémités tout-à-fait orientales du Bhodope ou Despotodagh ou les cimes du Kourtkoï-Kalesi, qui sont encore à 3 1. au S. et S. S. O. d'He-bibdsche. De ce village à Dschefair-Moustapha-Pascha ou par abrégé Moustapha-Pascha, on parcourt d'abord un plateau extrêmement bas et couvert, ça et là, de broussailles, d'où on apperçoit encore mieux les montagnes de médiocre hauteur et de formes ondulées, formant l'extrémité du Rhodope en particulier la crête du Jaila-dschick, qui s'avance sous forme de promontoire encore plus à l'E. que le Kourtkoï-Kalesi. Puis on n'a plus qu'une plaine cultivée le long de la Maritza. On la traverse avant Moustapha-Pascha sur un pont en pierre de 19 arches. Il est d'une architecture très massive, mais les voûtes sont fort peu bombées. Moustapha-Pascha, bourgade de 200 maisons, est sur la rive orientale, taudis que sur le côté opposé il n'y a qu'une auberge et une ou deux maisons. La plaine bordée au N. de petits coteaux tertiaires continue jusqu'au-delà d'Andrinople et la route est établie sur le plus bas écheilon de ces derniers. A 1 1. de Moustapha Pascha, on voit sur le côté méridional de la Maritza au pied des hauteurs le bourg de Tschirmen, qui donnait jadis son nom au Sandjak et que les géographes plaçaient à tort sur la rive septentrionale. Ail- plus loin est un minaret en ruine à côté d'une auberge, où des écuries environnent une cour carrée, tandis que sur le devant il y a un Tschardak. C'est l'usage de la poste de s'y arrêter, pour laisser souffler les chevaux, boire un verre d'eau et remplir une nouvelle pipe, parce que c'est la moitié environ de la station d'Andrinople à Hebibdsche. Depuis cehan appelé Jkik-Minaret-Han, on continue à suivre la plus basse corniche de la vallée de la Maritza et on finit par se rapprocher des coteaux couverts de vignobles ou en culture, qui forment les alentours d'Andrinople au N.-O., au N. et N.-E. A environ 2 1. avant cette ville on avait bâti pour le Sultan un Kiosk de grillages en bois autour d'une fontaine ; à notre passage des voyageurs s'en servaient avec plaisir. Parmi ces derniers il y avait des militaires turcs en congé, dont les figures maigres et les couleurs passées de leurs vetemens indiquaient un long voyage. L'un venait directement de Bagdad et était de Bulgarie et un autre je crois d'Erzeroum. Ils avaient fait le voyage à cheval. 11 y avait aussi des notables Kourdes exilés en Europe et un Arabe. Il y avait encore deux autres Kiosk semblables entre ce point et An-drinople, l'un à 1 1. et l'autre à 1 '/2 1. de cette ville. Dans le dernier étaient aussi des voyageurs et des vendeurs de fruits, qui étaient venus chercher des chalans dans ces lieux, recherchés par les habitans de la Turquie. Non loin de chacun de ces Kioks est un petit ruisseau qu'on passait alors sur des ponts en bois, dont la fragilité n'annonçait pas la durée. L'entrée d'Andrinople (à 25 h. d'Eski-Sagra et à 33 h. de Philippopolis) fait bien augurer de cette ville, parce que la rue principale est large et a un bon pavé carré. On passe la Tondja sur deux ponts de pierre et on observe à l'entrée de la ville un café placé sur la rue au-devant d'une petite mosquée, dont il semble faire partie et n'en est séparé que par un petit jardin bien entretenu et à la disposition du public. Dans le centre de la ville on admire quatre belles mosquées avec plusieurs minarets à deux ou trois rangs de galeries, deux assez beaux bazars voûtés, contenant chacun quelques centaines de boutiques ; celui d'Ali-Pascha en renferme de 150 à 200. Il y a aussi un immense bazar découvert ou autrement dit, un grand nombre de rues garnies complettemcnt de boutiques de toutes espèces et groupées d'après les différentes professions. Sur le devant de ces boutiques le toit s'avance pour former au moyen de petits pilastres de bois une espèce de galerie. Comme deux mille boutiques venaient d'être rebâties à neuf à la suite d'une incendie, ces toitures peintes récemment en blanc et bleu et ces boutiques propres faisaient un joli effet. Il y a aussi quelques places dans cette grande ville, qui peut bien avoir ses 130,000 âmes, malgré qu'on ne lui en donne communément que 130,000. Il y a un quartier tout occupé par des Grecs et assez de Juifs, mais les Maliométans y sont fort nombreux. Au S. de la ville les bords de la Maritza sont agréables par leurs ombrages. Un grand café avec un jardin est placé fort à propos à côté du grand pont, pour pouvoir jouir en été de la fraîcheur et voir en môme temps les passans. Entre la ville et ce pont est d'abord un vaste cimetière plus élevé que les rues et orné ça et là de petits cyprcsses et en deçà du pont est un faubourg. La Maritza forme comme la Tondja une île, de manière qu'il y a deux grands ponts, dont le dernier de pierre compte 12 arches. Une grande plaine en partie gazonnée entoure au S. la ville d'Andrinople, parce que c'est la jonction de l'Arda, de la Maritza et de la Tondja. Des Zin-gares y élèvent des chevaux. Sur le côté oriental de la ville se trouve le prolongement des petits coteaux qu'on longe en y entrant depuis Moustapha-Pascha, Si la Tondja roule une masse d'eau assez grande, celle des eaux de l'Arda (Sourmischa ?) décèlent une rivière encore plus considérable et venant de loin. En effet, en regardant à l'E., on apperçoit dans l'extrémité du Rhodope une échan-crure énorme, dont le milieu forme le lit de l'Arda coulant surtout presque O.-E. Les extrémités du Rhodope sont au N. le Jailad-8chik à environ 4 1. d'Andrinople et au S. le Kodschaila-Jaila à 9 à 10 1. au S.-O. de la môme ville. Cette configuration du pays donne tout de suite l'idée juste que ces montagnes à pentes assez rapides à l'est étaient à l'époque tertiaire les promontoires d'un vaste golfe occupé maintenant par des dépôts tertiaires, entrecoupés par l'Arda et d'autres cours d'eau et embellis par des villages et des cultures, tandisque le bassin de la Maritza était une vaste mer, dont le fond peu inégal actuel a servi à plus d'une bataille décisive. Andrinople, à 400 p de h. abs., est la capitale du plus grand et populeux Paschalik de la Turquie d'Europe. C'est celui qui renferme le plus de Mahométans et surtout de Turcs d'Asie ; le reste de lapopu-lation est grecque ou bulgare, mais les Grecs paraissent plus nombreux que cette dernière race. Il y a bon nombre de villages, de bourgs et môme de villes essentiellement mahométanes comme Islivné, Tschir- raen etc. Le chiffre de la population peut bien aller à 800,000 âmes ou même un million, mais s'il devait se trouver encore au-dessous de la réalité, il semblerait au moins ne pas devoir dépasser 1,200,000 âmes. Il est bien entendu que la population de Constantinoplc ou des bords du Bosphore n'est pas comprise dans cette estimation, car elle seule a été estimée à près d'un demi million. Si la Servie nous présente plus de 800,000 âmes, elle le doit à la quantité de ses villages, tandis que dans le Paschalik d'Andrinople, ce sont surtout 18 villes et 28 à 30 bourgs, qui enflent la chiffre de la population. Le Rhodope et les bords de la mer noire offrent le moins d'habitans. Les villes de ce Paschalik sont outre Andrinople les suivantes, savoir Tatarbazardschik, Philippopolis, Kezanlik, Eski-Sagra, Islivné, Kirkilissé, Visa, Tschorlou, Silivri, Rodosto, Galli-poli, Ousounkeupri, Diinotika, Tschirmen, Moustapha-Pascha, Enos et Kavala. Les bourgs sont les suivans, savoir Hasskoï, Jeni-Sagra, Jamboli, Papaskoï, Iniada, Midia, Sarai, Bounarhissar, Indschigis, Tschataldschc, les deux ïschekmedsche, Karischtiran, Loule-Bourgas, Eski-Baba, Airobol, Aimadscliik, Malgara, Keschan, Fered, Ipsala, Makri, Maronia, Kolmoudschina, Karasou-Jenidsche, Kirdschali, Tschepina et Bania. Ces villes et ces bourgs sont surtout les résidences des Musselims, des Ayans ou Aghas ou employés supérieurs du Pascha. Depuis Andrinople à la mer de Marmara et même jusque vers Constantinople (dist. de 42 xj% h.) le voyageur ne parcoure qu'un pays de petites collines à plateaux totalement déboisés, dont une partie est seulement cultivée en blé ou occupée par des pâturages secs. Aussi après la moisson cette région, surtout depuis Ilavsa a l'air d'un désert, quoiqu'elle offre eu général un assez bon terrain, qui est arrosé par une foule de cours d'eau venant du N. et N.-E. Mais la plupart ne laissent voir en été que des cavités sans eau et remplies de cailloux. Mon ami, Mr. Viquesnel, en a tenu une note exacte. Le sol étant tertiaire et alluvial les eaux n'ont eu que peu de peine à excaver ces sables, ces marnes et ces cailloux. Ce n'est que près des bourgs et des villes qu'existent des vignobles et des jardins ainsi que quelques bouquets d'arbres. Pour atteindre Havsa, il faut couper quatre petits affluons de la Maritza, dont le dernier, l'Iskender-Dere, est le plus grand. On a encore à franchir cinq autres torrens, qui coulent au S. dans I*A kadite-Dere (?). Le plus considérable est l'avant-dernier, savoir le Nedeler-Dere. Après Havsa, bourg de quelques milliers d'âmes, on passe le Hass-Deresi, sur le cours duquel reste au N. Ilass-ICoe, où il y a une source minérale-ferrugineuse (?) Il se grossit au S. de notre route de l'eau du Mourdarsar- Dere qu'on rencontre aussi. En général entre ce torrent de Hass-Deresi et Eski-Baba il y en a encore huit, dont sept se réunissent aux cinq précédens et produisent un cours d'eau coulant de l'E. à l'O. dans la Ma-ritza au N. d'Eltschili. Eski-Baba (vieux père) est placé dans la vallée assez excavée du grand torrent, de Teké-Deresi. C'est là que les troupes régulières de Semlin furent battus en Août 1806 par les Janissaires d'Andrinople. Le Teké-Deresi verse ses eaux au S. dans le Rema-Sou et a ses sources vers les hauteurs au S. d'Oumour-Paki. Ses nombreux afnuens venant du N.-E., dont je parlerai dans un autre itinéraire, servent à écouler les eaux de plate-formes de terrain surtout ancien, tandis que sur la rive opposée régne déjà principalement le terrain tertiaire, qui forme des coteaux bien plus bas. Entre Eski-Baba et Loule ou Tschatal-Bergas ou Bourgas coulent huit afjfiuens du Berna-Sou, dont les principaux sont le Kavak-Dere, Jarytschtschme-Dere et Karaghatsch-Dere. Loule-Bergas a reçu ce nom à cause de ses fabriques de pipes. C'est un bourg de 5000 âmes, il y a assez de boutiques, trois mosquées à minaret et un pont. Entre cette ville et le village grec de Karischtiran se trouvent encore huit autres affluons du Rema-Sou, entr'autres le Sinour-Dere et enfin en deçà de Karischtiran vient le Rema-Sou lui-même. Sur la route de Karischtiran (t. Karesch-Dervend) à Tschorlou on traverse à Sandoukli l'Erkene sur un pont de sept arches ; mait> en été il y a fort peu d'eau. Cette rivière coule dans une vallée assez évasée et s'élargissant encore plus bas, tandis que son lit supérieur n'est en général qu'un vallon étroit. Elle prend ses sources au loin dans les montagnes le long de la mer noire au N. de Ske-pasto sous le parallèle d Inada et a un cours très remarquable par ses changemens de direction. En effet elle coule N. O.-S. E. depuis sa source jusques derrière Visa, puis à angle droit de cette direction, savoir du N.-E. au S.-O. jusqu'à Sarlar ; ensuite elle reprend presque sa première direction entre Sarlar, Airobol et le confluent du Rema-Sou, et enfin elle court de nouveau du N.-E. au S.-O. par Osoun-Keupri jusqu'à son débouché dans la Maritza à Ipsala. •M Mon ami, Mr. Viquesnel, a rendu un véritable service à la géographie en déterminant le cours exact de cette rivière. Avant Tschorlou on traverse sur un pont de cinq arches le Tschorlou-Sou, qui coule de N.-E. au S.-O. et tournant au N.-O. se jette dans l'Erkené au-dessous de Sarlar. Tschorlou est placé sur un espèce de bas plateau cultivé en blé. Il y a environ quatre mille habitans et les environs sont plus peuplés qu'on le croirait d'après les cartes, car au moins au N. de la ville il y a à 1 et 2 1. trois villages qu'on m'a dit s'appeller Iladgischereta, Tschor-lidere, Maikvoda et à 2y2 1. un Tscldftlik ou une ferme l). ') Un accident arrivé à un de nos chevaux nous avait retardé en route de manière que nous calculâmes ne pouvoir arriver à Tschorlou que dans la nuit. Nous nous étions munis de quelques provisions pour souper en plein champ dans quelque localité favorable. Près de l'Erkené le soleil était déjà sous l'horizon lorsque nous sautâmes à bas de nos chevaux et vuidâmes nos bisacs. Quelques œufs durs, du fromage blanc, des concombres crus, quelques ognons, du pain et deux Tschoutras l'une de vin et l'autre de raki nous firent faire un repas vraiment ottoman. Dans l'intervalle nos chevaux ayant voulu aussi se mettre de la partie s'étaient éloignés considérablement de notre bivouac et la charge d'un cheval de bât avait tourné, ce qui troubla l'humeur joviale de mon Tartare et valut au postillon quelques coups de fouet pour son inattention. Une lune superbe éclaira ensuite notre route, qui du reste n'offrait aucun danger dans ce pays de plaine, mais lorsque nous entrâmes à Tschorlou le ciel s'étant couvert, nous manquâmes plusieurs fois de passer sur les corps d'hommes couchés sur les côtés de la rue principale. Devant une des grandes maisons de la ville stationnaient une dizaine de voitures ou arobas turques et une lanterne les éclairait. Le Pascha d'Andri-nople Moustapha ayant reçu le Paschalik de Janina envoyait son serail s'embarquer a Constantinoplc. La poste de Tschorlou est tout simplement une écurie grande et haute comme une église à la porte de laquelle il y a une chambre, où on sert du café. Vu qu'il était nuit, nous n'eûmes d'autre endroit pour nous coucher que le côté opposé du café, où la maison formait un petit angle rentrant. Mais nous fûmes éveillés de bonne heure par des chevaux, qui passaient si près de notre lit que nous crûmes plus prudent de nous lever. D'ailleurs le départ pour Constantinople des dix ou douze voitures produisait un grand mouvement. Un Tartare de l'Ex-Pascha d'Andrinople , Grec de naissance, allait et venait et faisait arranger symétriquement à terre les harnais pour tous les chevaux nécessaires. Nous vîmes bien qu'il fallait attendre le départ des belles dames avant de penser à obtenir les chevaux dont nous avons besoin. La file de voitures se mit enfin en mouvement, en tête était un officier turc en uniforme vert et de bonne façon, puis venaient quelques Kavas en brun avec un pistolet de chaque côté du corps ; enfin les arobas dont les grillages latéraux étaient ouverts et une ou deux garnis de dorures. Quatre femmes étaient couchées dans chaque voiture et ces dames avaient avec elles quelques esclaves blanches et noires. (Voyez ma Turquie, vol. 2, p. 463.) Tschorlou est précédé à l'E. de vignobles entremêlés d'arbres fruitiers et de jardins, mais cette fraîche végétation cesse bientôt et on ne rencontre plus aucun arbre jusqu'à Silivri. Tout ce pays ondulé, cultivé en partie en blé, est d'une nudité désolante. Le voyageur ne trouve d'abri contre le soleil que près des habitations. A peu de distance de Tschorlou dans le vallon très évasé de Balakasli - Dere nous rencontrâmes une voiture de charbon et une autre couverte de cages à volailles, c'était le premier indice de l'approche d'une capitale. Nous descendîmes plus tard par une grande descente dans le vallon d'Araplidere, où est le han de Kinikli. A 1 h. de là on passe le Tschodadere et on descend au bord de la mer de Marmara, qu'on apperçoit pour la première fois depuis les hauteurs autour de ce lieu. En deçà on distingue la côte asiatique avec quelques montagnes. Après avoir franchi un petit cours d'eau, on gravit sur le plateau aride, où était jadis l'extrémité méridionale de la muraille dAthanase. On n'y voit plus que quelques briques et pierres éparses. On comprend qu'au moyen âge une muraille garnies de tours pouvait dans ces lieux arrêter des hordes de cavaliers. La vue sur Silivri et son port rappelle certaines vues italiennes. Les ruines du château dominant un amphiteâtre de maisons et tout cela placé sur un fond de vignobles est d'un joli effet surtout pour celui qui ailleurs ne voit rien autour de lui qu'une nature aride ou brûlée par le soleil. On descend par un chemin sableux dans le fond de la baye, qui précède Silivri et où se trouve un pont ancien plat de 52 arches, parce qu'il y a un petit marécage derrière la berge de sable du rivage et que les vogues de la mer dépassent cette dernière dans les gros temps. La rue principale de Silivri est large, mais les autres sont étroites vu le peu d'espace entre la colline et la mer. La poste de Silivri n'est encore qu'une très vaste écurie, à l'entrée de laquelle il y a une place couverte avec une estrade élevée, où l'on dîne et couche. L'extrémité de la rue principale de Silivri est déjà sur la pente de la colline et le reste de la montée se fait à travers le cimetière de la ville, d'où on passe ensuite à côté des vignobles. Silivri peut avoir 3000 habitans en partie grecs; des Juifs sont logés dans l'enceinte de l'ancien château à épaisses murailles au-dessus de la haute falaise de 280 p. Entre les vignes de Silivri et Boados le terrain ondulé est inculte et souvent sableux, on rencontre une ou deux fontaines ruinées et sans eau, ce qui semblerait indiquer peut-être que le déboisement total du pays y a diminué les sources. Boados près d'un petit ruisseau n'est qu'un hameau grec de 60 à 80 maisons, qui est placé sur un petit plateau au-dessus de la mer. L'auberge probablement jadis en bon état est très grande, mais il n'y a plus que le café du bas, qui soit propre et élégant. Les chambres du premier sont sans tapis et tout y atteste la décadence. L'écurie est encore énorme. Néanmoins l'aubergiste, un Grec, sait bien traiter son monde et on paye volontiers un peu plus cher pour avoir ses mets bien accomodés. On côtoyé la mer de Boados à Koumbourgas, où la terre est cultivée en blé et maïs ou bien est couverte de vignobles. Koumbourgas est un hameau grec d'une quarantaine de maisons et l'auberge est au bord de la mer. Depuis là il faut monter par une pente insensible sur la colline dont le prolongement forme le promontoire à l'O. de Boujouk-Tschekmedsche. Sur ce dernier on apperçoit des cultures et il y a des villages , tandis que le long de la route à 489 p. on ne passe à côté des vignobles, qu'en descendant sur la lagune de Boujouk-Tschekmedsche. La peste régnant dans ce bourg nous avons logé à nos deux passages chez un Juif dans le petit hameau de Baligrad , qui est en deçà du pont de Boujouk-Tschekmedsche et que les cartes désignent sous le nom grec de Kalikratia. Les habitans sont en grande partie Grecs et s'occupent de la pêche et de l'agriculture. Si près de Constantinople on comprend l'impatience du voyageurs d'arriver, néanmoins vu les coutumes turques il n'est à conseiller à personne d'entrer trop tard dans la capitale, parce qu'on y aurait éprouvé en 1837 au moins les mêmes difficultés qu'ailleurs pour le logement et le souper. C'est aussi pour cela que la couchée de Boujouk-Tschekmedsche est un bon point de départ pour atteindre Constantinople, Fera ou même Therapia avant le terrible Akscham ou coucher du soleil. Les dénominations turques de Boujouk-Tschekmedsche et Koutschouk-Tschek-medtsche, en français grand et petit tiroir, caractérisent fort bien la position de ces deux endroits, qui sont au bord de deux profondes sinuosités ou lagunes. La première reçoit entre autres cours d'eau leKara-Sou, qui vient du N.-O. des environs de Karasakal. Lo pont de Boujouk-Tschekmedsche fait un curieux effet par ses trois hauts biseaux, dont le pavé glissant peut aisément faire tomber les chevaux. Le bourg lui-même contenant environ 1800 âmes est agréablement situé au bord de la lagune au pied d'un coteau couvert de verdure et d'arbres. On y distingue aussi quelques cypresses et plusieurs habitations turques. Un bâtiment ou magasin grec ancien couvert en plomb se trouve sur le chemin de Constantinople. Après avoir voyagé pendant un quart d'heure parmi des jardins ou des cultures, on arrive au pied d'une haute côte de 780 p., où la route cessait en 1831 d'être bien tracée, parce que le sol argileux et sableux y est sujet à des éboulis. Depuis lors il paraît qu'on a remédié à cet inconvénient. Néanmoins vers le haut le chemin assez incliné et graveleux doit surtout être pénible à passer en charriot. Du temps de l'empire grec une route pavée conduisait au haut du plateau, mais aujourd'hui on n'en voit plus que des portions isolées. C'est depuis cette plate-forme sèche qu'on a la première vue de la ville aux mille minarets et de St. Sophie 1). On dirait voir les mâts d'un port, parmi lesquels s'élève majesteusement le dôme de la sainte église. En deçà de Stamboul on distingue l'échancrure du Bosphore, les hauteurs de Belgrade et vis-à-vis en Asie le neigeux Olympe (le Keschisch-Dagh des Turcs) près de Broussa, au-devant duquel les charmantes îles des princes paraissent nager dans les eaux azurées de la mer de Marmara. La nouvelle route gravelée et assez bien tracée arrive de Constantinople jusques sur ce plateau, mais à en juger d'après les fragmens de pierre non concassés et les sentiers tracés par les cavaliers, peu de voitures y avaient roulé; à présent c'est différent, puisqu'il y a une diligence entre Andrinople et Constantinople. En général presque tous les arrivages de Constantinople ont lieu par la mer et môme jusqu'à la capitale nous n'avons rencontré depuis Tschorlou que deux ou trois caravanes de voyageurs à cheval. Ici nous fûmes joint par un Turc habillé à l'européenne et voya- ') En 1820 on comptait à Constantinople 14 mosquées impériales avec 2 a 0 minarets à trois rangs de galerie, 200 mosquées ordinaires et 300 petites mosquées. D'après une autre autorité en 1805 il y avait 485 grandes mosquées et 5000 petites mosquées ou dépendant des premières. géant à cheval avec un parapluie. Le vallon d'Aramiderc ou des voleurs est le seul endroit, où on ait envie de s'arrêter entre le Grand et Petit Tschekmedsche. On y trouve encore quelques grands arbres, reste d'un bois, et à côté des ruines d'un bain existe une source d'eau, où il y a moyen de puiser de l'eau pour se désaltérer. On raconte que ce lieu a été redouté anciennement par les voyageurs, aujourd'hui on ne voit guère, où pourraient s'y cacher des brigands. On descend et monte les côtés incultes de ce vallon sans s'inquiéter ni de la route nouvelle, qui décrit de longs contours, ni de l'ancien pavé grec, qui monte tout droit. En deçà du petit plateau entre ce vallon et la lagune de Koutschouk-Tschekmedsche, on descend sur une dune, que la mer a formé petit à petit à l'entrée de la lagune, de manière qu'à présent ses eaux ne communiquent avec la mer que par une espèce de canal placé vers le bourg du Petit-Tschekmedsche. Des tamarix et des hautes férules ainsi que des roseaux couvrent la dune, où on n'a établi qu'en partie une chaussée à l'européenne. Les bords de la lagune n'offrent pas une vue bien riante, parce qu'il manque d'arbres, le bourg de Tschekmedsche fait seul un effet pittoresque par ses cypresses et ses jardins pleins de beaux figuiers. On traverse le canal d'écoulement de la lagune sur un pont en bois ajusté bizarrement à une arche d'un pont antique en pierre. A sa sortie est une porte ou barrière et un corps de garde, parce qu'on y demande les passeports à ceux qui se rendent à Constantinople. Le coteau derrière Koutschouk-Tschekmedsche est aride et composé de calcaire tertiaire blanchâtre. A 2 1. de Constantinople on rencontre dans un fond une fontaine ruinée avec une inscription grecque en partie détruite. Le vallon de Csausch-Pascha et plus loin celui de Daud-Pascha sont les seuls endroits, où on voit des touffes d'arbres ; des fermes se trouvent dans ces petits sillons. Un charriot rempli de drap bleu de la fabrique impériale d'Islivné se trouvait sur cette route à notre arrivée, tandis que des caravanes de Bulgares d'Ouskoub, parmi lesquels on distinguait un moine, allaient rejoindre gaiment leurs pénates. La colline en deçà de Daud-Pascha ressemble à un rempart de ville qu'on a fait sauter, tant on y a extrait de toute ancienneté des pierres de bâtisse et rendu le terrain inégal. En en descendant, on arrive à un café en plein air sous un beau platane d'Orient à côté d'un petit ruisseau d'eau vive et d'une fontaine; Un peu plus loin il y a un autre café situé de même sous un platane et avec une plus grande maisonnette. Los dimanche! et les jours de fêtes beaucoup de promeneurs s'arrêtent dans ces lieux et des Zingares bien vêtus v exécutent des danses ou des scènes burlesques pour amuser le public. Un des cafetiers d'alors fut re-'uiinu par notre Tartare comme un homme jadis opulent. Dans ces lieux on a devant soi la forêt des cypresses des cimetières de Constantinople, qui forment son pourtour hors des murailles d'enceinte. Au S. on voit les redoutables sept tours à In sortie du Bosphore et au N. sur la hauteur un bel hôpital et une caserne. Le vallon qui conduit des cafés sous les platanes vers ce dernier édifice, est une autre promenade du dimanche. Lorsqu'on a traversé les cimetières à côté des maisons de Compagne du Koutsehouk-Baloukli, on éprouve un respect involontaire en touchant l'ancienne enceinte de Consrnntinoplc, formée par un assez large lusse' et une épaisse muraille crénelée, au pied de laquelle de vieux figuiers ornent une espèce de rebord ou plainpied. Il faut faire un assez long bout de chemin entre ces murs et les cimetières et on y a tout le temps d'ap-perçevoir qu'au moins en temps de peste les cimetières sentent mauvais. On observait malgré cela une foule de promeneurs, hommes, femmes et enfans au milieu de cet entassement vraiment extraordinaire de tombes. A mon passage des Arméniens enterraient un de leurs en entonnant des chants bizarres pour une oreille européenne, près de là un limonadier débitait ses glaces et des dames turques et grecques pensaient à tout autre chose qu'à la mort. Des voitures stationnaient même, attendant que leurs propriétaires ayent bien humé l'odeur cadavéreuse de ces tristes lieux. Il faut avouer qu'avec la beauté des environs de Constanti-nople, c'est un goût, tout-à-fait oriental d'aller se cacher pour s'amuser dans une forêt de cypresses, qui n'offre que des vues mélancoliques et où un Européen au moins ne peut avoir que dew •dées sombres. Le guichetier de la porté par laquelle on entre dans Cnn-stantinople reçoit un peti t pourboire de chaque voyageur (2 % piHSterel ^e tribut d'arrivée payé on descend dans la ville par une longue ''•le bordée de maisons à deux étages, avant un aspect fort triste 4 et l'air d'être très anciennes. C'est un quartier grec, dons lequel il est épouvantable de jeter les yeux dans les ruelles étroites latérales. Cette grande rue conduit à une place considérable ou plutôt à une pelouse, qui est placée au pied des murs de Constantinople. Près de ces derniers il y a de misérables maisonnettes habitées par des Zingares, comme on en voit dans l'intérieur de la Turquie. Depuis cette place jusqu'au port on ne fait que traverser des rues étroites, sales, puantes et pleines de poussière en été et trop souvent dans le genre de certaines ruelles près de la place Maubert à Paris, Les seuls momens, où on oublie cet effroyable entourage, sont en passant auprès d'un fragment de l'aquednct de Justinien, auprès d'une des plus belles mosquées de la capitale et entre d'immenses collèges. Quand on a parcouru l'intérieur de l'empire et qu'on y a trouvé tant d'étoffe de vie et de vigueur, le cœur se serre en parcourant le cloaque, qui forme une grande partie de Constantinople et où des îuines s'entassent sur des ruines au milieu d'une population en bonne partie dépravée. Ce n'est pas l'intérieur de la Turquie et ses belles populations, qui décèlent la décadence et la faiblesse de l'empire ottoman, c'est bien plutôt ces palais somptueux et ces belles mosquées ornées des dépouilles d'anciennes églises chrétiennes au milieu d"un i as de bicoques et de bâtisses d'un jour. Ce contraste atteste l'isolement d'un souverain luxurieux et de quelques grands dignitaires efféminés au milieu d'une population abâtardie par un système de gouvernement, qui a des défauts évidens à côté d'excellens principes trop négligés en Europe. Sans le ciel de Constantinople et les alentours de cette ville, l'enthousiasme des Ottomans pour cette capitale montrerait, seulement à quelle distance ce peuple de conquérans est resté en arrière des Européens. Ce n'est que sur le port qu'on ose reprendre haleine et qu'on admire toute la beauté de la position de la corne d'or, dont l'encadrement est formé par le Sérail, ses jardins et ses palais, Scu-tari en Asie, la tourelle de Léandre, la ville de Galata, sa tour, une forêt de mats et l'arsenal turc. Le pont de bateaux, liant Constantinople à Galata, ne fait qu'ajouter à l'effet magique de cette scène. Peint en blanc et bleu il a vers son milieu deux arches élevées pour le passage des barques, tandis qu'il s'ouvre pour les grands bâtimens. Le voyageur qui a mis plus d'une heure et demi à traverser Constantinople, est tout étonné de voir en deçà de cet immense amas d'habitations encore des villes devant lui. Ce n'est qu'alors qu'il prend une idée de la grandeur de la population accumulée sur les riants bords du Bosphore. Si dans la ville de Galata avec ses rues étroites et ses massives maisons bâties en pierre, il peut se croire un moment à Gènes, Topschana, Pera et Dimitri lui rappellent douloureusement que ces belles collines sont au pouvoir d'un peuple, qui en 1838 ne numérotait pas encore les maisons, négligeait le pavé, le tracé et la propreté des rues, regardait la vie de l'homme comme indifférente à l'état et se faisait cahoter lentement dans des charrettes tirées par des bœufs au lieu d'aller en voiture. Pera est une véritable collection de tous les peuples d'Europe et trop souvent de leur écume. Au milieu de cette singulière Babylone les édifices de quelques envoyés diplomatiques et certaines maisons de gens riches y sont le pendant des palais de Constantinople ou des habitations somptueuses répandues le long des rives du Bosphore. Placés dans une capitale d'Europe, un bien grand nombre de ces prétendus palais turcs, quelquefois seulement des rez-de-chaussée , ne s'appeleraient que de grandes maisons, tant l'architecture orientale est réculée ou soumise à des règles purement bizarres en foulant trop souvent aux pieds la symétrie. En particulier la multitude des fenêtres trop étroites pour leur hauteur rend beaucoup de palais semblables à des cages d'oiseaux, de manière que l'œil n'est, frappé que par la singularité de l'aspect et la propreté des couleurs des édifices. Avec la position des villes du Bosphore, un souverain européen y aurait bâti des quais magnifiques et établi sur de belles plate-formes des promenades publiques, qui n'auraient guère leur égal dans le monde. Au lieu de cela l'habitant même de Pera n'a que les ruelles au-dessus du champ des morts pour sa promenade et si on s'éloigne des habitations pour profiter au moins des dons, dont la nature a été si prodigue envers cette partie du globe, on a la douleur de voir que, loin d'en profiter, les hommes ont fait trop souvent tous leurs efforts pour ruiner les beautés naturelles du sol. Sur les plateaux àl'O. du Bosphore on s'attendrait à trouver des maisons de campagne; il n'y règne qu'une solitude aride avec des postes de gendarmes, de manière qu'on s'imaginerait être plutôt on Albanie que près d'une des plus grandes capitales du monde. Aux Eaux douces, à Kadi-Keui, à Therapia, dans le vallon de Boujouk-Dere ou celui du grand Seigneur, bref dans tous ces lieux charmans, où l'Européen peut oublier l'indifférence du Turc pour les agrémens de notre civilisation, c'est la nature qui a tout fait et elle serait bien plus belle encore sans les sacrilèges commis sur elle par l'humanité. Un gouvernement européen pourrait aisément y créer une foule de promenades, qui, vu la végétation et. les vues magnifiques du Bosphore, seraient délicieuses et feraient bien oublier surtout les beaux jardins, entourés de hautes murailles, de quelques richards ou diplomates du jour. Alors aussi la population libre ne se contenterait pas de garnir d'une seule rue le canal du Bosphore, mais des émigrations de toutes les parties de l'Europe uniraient bientôt en une ville Pera et Boujouk-Dere. Des omnibus rivaliseraient de promptitude avec les bateaux. Toutes les forets autour du Bosphore seraient soignées et fourniraient plus d'eau par leur augmentation. Les vallées sur le côte asiatique du canal, le beau Goek-Sou ou eau du ciel, le Kunkar-Iskelessi s'orneraient de maisons de campagne, qui laisseraient bien derrière elles certains misérables palais d'été du Sultan. En un mot quand on a vu Constantinople et ses environs, on comprend toute l'antipathie qu'un chrétien éclairé, sujet, de la-Porte, peut éprouver contre cette dernière en voyant ainsi si mal employé un des plus beaux points du globe, l'Eldorado de l'habitant de la Turquie. De quelque nation qu'il soit, il reconnaîtra avec plaisir l'autorité de celui qui siégera à Constantinople, pourvu que la barbarie du moyen âge en soit bannie à tout jamais. Le Sultan s'est contenté jusqu'ici de faire soigner un peu plus la propreté des rues, d'y diminuer le nombre des chiens marrons, d'établir une police stricte au moyen d'un grand nombre de corps de garde et à côté de cela il n'a cessé de se bâtir sans but des palais, les uns plus vastes que les autres. Si ces dernières années on a numéroté, dit-on , les rues et les maisons de Pera et de Galata et établi même quelques lampions, il faudrait étendre cette mesure à toute la capitale. 11 faudrait surtout l'assenir, défendre les enterremens en ville, porter les cimetières plus loin de l'enceinte, y régulariser les rues, élargir celles trop étroites , établir plus de places publiques, des promenades etc. ; mais on ne pense guère à toutes ces choses ou on se contente de les faire promettre quelquefois par des gazetiers soldés. Les incendies si fréquentes et si étendues et la fragilité des bâtimens donneraient cependant beaucoup de latitude pour renouveler dans peu d'années une grande partie de Constantinople et de ses annexes. DE BELGRADE A CONSTANTIN OPL E. PAB NISCH, SOPHIE ET PHILIPPOPOLIS, Depuis Grotzka on se rend par des vallons surtout boises en chênes à Hassan-Pascha Palanka ou Palanka. C'est une course postale de près de 15 heures, Grotzka étant à 5 h. de Belgrade, Kolar, la seconde poste, à 4 h. de Grotzka et Palanka à 6 h. plus loin. Entre Grotzka et Kolar on franchit la hauteur de Voloder (vallée des bœufs) et à 1 1. de Kolar on passe à Do-bratscha le torrent de Ralia coulant de l'O. à l'E., puis trois de ses afïluens venant du S. O. Il débouche dans le Jezava, branche occidentale de la Morava '). Dans ces lieux la route se bifurque, l'une va à Palanka, tandis que l'autre gagne à droite Kragoujevatz par Lopovo près de l'Ivanitza, derrière Palanka. Elle traverse ensuite la vallée du Koupernitza et remonte celle du Jasenitza à Jabari ; ce qui fait en tout une distance d'environ 6 à 7 h. Palanka est au confluent de l'Ivanitza venant de l'O. et de la Jasenitza (de Jasen, frêne), coulant du S. O. Il y a là une source acidulé en deçà du torrent et des vergers de pruniers à Pentour. Une partie de la vallée de la Jasenitza est cultivée et elle remonte jusqu'à Roudnik (50 m. et 395 h.), tandis que les hauteurs qui l'entourent sont le plus souvent boisées en chênes. ') D'après la Carte de Bongarski il semblerait que la partie inférieure «le ce cours d'eau s'appellerait aussi Dobratselia? Depuis Palanka on compte jusqu'à Jagodina 12 h. de route. On continue à parcourir les divers coteaux boisés, qui s'abaissent vers la vallée de la Morava. Au moyen de plusieurs petites montées et descentes on traverse au moins sept torrens, affluens de la Morava. Pour arriver au sommet de la première hauteur à un Han, on suit un petit affluent de l'eau de Palanka et on descend de là au bourg de Ratscha (112 m. et 439 h. avec une église et une école), il est à 3 '/2 h, du dernier lieu cité et sur le Lipovatscha venant du S. O. des hauteurs de Stragari. Plus loin vient le contrefort de la montagne du Goloubitza (Petit. Colombe). Le bourg de Batoschina (91 m. et 494 h.) est à 2V2 h. de là sur le Lepenatz coulant depuis Kragoujevatz à la Morava en général du S. S. O. au N, N. E., à l'exception de son passage au pied S. E. de la Planina - Goloubitza, où sa direction est 8.0.-N. E. comme celle de beaucoup de torrens du pays de la Schoumadia. Bagrdan (De-beva grda des cartes) (56 m. et 282 h.) est à2Y2 h. plus loin sur l'Osivnitza, et sur cette route on traverse encore deux autres ruisseaux; le mont Sobovitza (de Soba, hibou) reste à droite, enfin Jagodina est à 3'/2 h. de Bagrdan. Dans ces bois et ces bocages on ne rencontre que le hameau du f rnavatz. Avant Jagodina on parcourt à côté de la Morava une vaste plaine en culture et pâturage. Sur les deux rives de ce fleuve s'élèvent à distance d'assez hautes montagnes boisées sous le double nom de Tzrni-Vr (Cime noire). Jagodina ou Jagodin est situé sur le Levât schka-Rieka, qui coule du S. O. au N. E. entre la Planina - T i k va au S. et une autre crête au N. que Mr. Bougarski appelle, je crois par erreur, Kotlenik. B reçoit à Glavintze (25 m. et 172 h.) le torrent de Kavadar et avant Jagodina celui de Belitza, qui réunit les eaux du Tzrni-Vr, placé au S., et celles des hauteurs boisées au N. E. de Kragoujevatz. Cette ville comptait en 1845 722 maisons ou 3166 âmes; il y a une église, une école à trois classes et une expédition des postes. La rue principale est pavée et garnie de boutiques et à ce milieu de la ville aboutissent des rues courant du N. au S. et de l'E à l'O. On y observait en !838 assez de nouvelles bâtisses, les rues sont droites et larges et en partie pavées, Dans les rues principales les maisons ont un étage. Les jours du marché cette ville est vivante et eu général elle est bien placée pour le commerce de détail de l'intérieur. En deçà d'un prés à l'E. de la ville on voit encore les restes d'une mosquée et un petit fort carré. Le prince Milosch possédait dans le voisinage de belles fermes et des vignobles. Jagodina es; la résidence du commandant et du tribunal du cercle de ce nom, ainsi que celle d'un archiprêtre. Ce dernier a sous lui les districts de Jagodina, de Levatschka et d'une partie de celui de la Temnava, c'est-à-dire 25 paroisses et 8 églises. Le cercle de Jagodina comprend les deux districts de la ïemnava et du Levatschka avec 69 communes, 1 ville, 143 villages, 8032 maisons et 47,371 âmes. Il y a 8 écoles. Le district de Temnava compte 1 ville, 61 villages, 4269 maisons et 23,952 habi-tans. Celui de Levatschka contient 82 villages , 3763 maisons et 23,419 habitans. Les deux commandants de districts résident à Jagodina. Pour aller à Tchoupria (t. Keupri, pont), on est. obligé de passer à gué à l/2 1. après Jagodina le petit torrent du Lougovina- liieka, qui coule de l'O. à l'E. Des vignobles restent vers les collines à droite. A l/2 b plus loin on franchit un petit monticule de gneiss, qui s'avance dans la plaine sous forme de promontoire. Le reste de la route se fait en plaine. Un méchant Han se trouve à 1 h. de Tchoupria. Avant d'atteindre à moins de 2 1. de Jagodina le pont de Tchoupria, qui a 20 à 24 toises de longueur, on voit encore les restes des remparts de terre ou de la tète de pont que les Turcs y avaient élevé. Dans ce temps là Tchoupria était une palanke et un point important pour pouvoir envahir la Schoumadia à la moindre insurrection. Ce pont étant, le seul sur la Morava, cette rivière a servi plusieurs fois de fossé de séparation entre des camps ennemis. Le bourg de Tchoupria sur le Iiavanitza, à 260 p. de haut.abs., a une nouvelle église, 262 maisons ou 1477 habitans et était, en 1837 en bonne partie rebâti à neuf. Il y a une école à deux classes. Entre le pont et la rue principale on voyait encore les ruines d'anciens édifices détruits. Cette rue est assez longue et large, mais garnie surtout de rez-de-chaussée, au milieu desquels on remarquait ça et là de nouvelles maisons d'un étage et de bonne apparence. Il y avait deux auberges , l'une près de la Morava, où il y avait à côté de la cuisine une grande chambre avec une estrade en bois réhaussée, comme dans les cafés turcs. La nouvelle auberge à l'extrémité opposée de la rue avait l'aii «l'une vaste maison de paysans de la Souabe. Elle était en grande partie en bois, et aurait pu aisément offrir quelques chambres au voyageur, mais on s'y établissait à terre sur des nattes, tandis que le fond de cette grange était l'écurie. Tchoupria est la résidence du commandant et du tribunal du cercle de ce nom ainsi que celle d'un archipretre, qui a sous lui en outre le district de Resava ou en tout 20 paroisses avec 6 églises. Le cercle de Tchoupria comprend les deux districts de Resava et de Paratchiu ou 74 commîmes, 3 bourgs, 03 villages, 0309 maisons et 39,151 âmes. Il y a 11 écoles et une poste au chef-lieu. Le district de Resava comprend un bourg, 55 villages, .3755 maisons et 23,581 habitans. Le commandant est à Svila-nitza. Celui de Paratchin compte 2 bourgs, 38 villages , 2554 maisons et 15,570 âmes. Le commandant habite Paratchin. Une plaine uniforme et cultivée, ça et là, comme celle de Jagodina, conduit en 2 h. à Paratchin, où il y avait, aussi beau* coup de nouvelles bâtisses, en particulier une nouvelle église et un moulin avec plusieurs roues ou trois meules. Ce bourg est plus grand que Tchoupria, mais ses 521 maisons avec 2705 âmes sont dispersées sur une moindre étendue de terrain. Un petit cours d'eau, le Tzrnitza, avec un pont de bois, passe au milieu de cette ville naissante et coule comme la Ravanitza du N. E. au S. O. A '/4 1. de Paratchin on voit à gauche le village deTekiia (33 m. et 194 h.) situé au pied de petits coteaux, derrière lesquels paraissent à l'E. des montagnes calcaires escarpées faisant partie de la chaîne du Goloubinie. A l'O. s'élève à 1855 p. la cime assez pointue du Bior, Gior ou Jouchor, dénomination probablement albanaise et provenant du mot Giouri(genou), parce que cette montagne simule ce membre relativement à la séparation des deux Moravas. 11 est le point le plus élevé des hauteurs boisées s'étendant sur la rive occidentale de la Morava depuis Jagodin jusqu'au confluent des deux Moravas. On distingue dans la petite plaine au pied de ces montagnes plusieurs villages, tels que Raschevitza (102 m-et 585 h.), Pototsehatz (100 m. et 575 h.), Svoinovo (04 m. et 375 h.), Obreje (Odpeat) (109 m. et 1123 h.), Katoun (en albanais Chalet) (122 m. et 792 h.) et Varvarin (90 m. et 015 h.). Au S. O. on a «n face les crêtes ondulées du Mali-Jastrebatz, au-devant duquel h' débouché de la Morava serbe forme 'me échancrure profonde, tandis qu'à i'E. des basses hauteurs indiquent le passage des défilés de la Morava bulgare entre Kovanlouk à gauche et Stalatch à droite. A 3/4 1. de Paratchin on passe le hameau deLebina (leLe-binatz de Bougarski) (32 m. et 178 h.) et on monte par des pentes insensibles à 2 1. de Paratchin à une auberge isolée (Pitovatz ?) et un peu plus loin à environ 4 1. de Paratchin aux trois auberges de Schoupeliak non loin du Schoupeliaka-Rieka. On est alors à 442 p. de hauteur absolue, Paratchin étant à 280 p. Ce sont des maisons carrées, basses, couvertes en tuile et n'offrant qu'une grande chambre commune. Comme en Bosnie, il y a autour du foyer dans l'une un lieu plus élevé pour s'asseoir ou se coucher. Une grande écurie se trouve à côté de chacune. Entre ces auberges et Raj an (PaifiaHJ l'espace de 2 h. de chemin est occupé par un petit plateau couvert de bocages de chênes. La descente dans le vallon de Rajan, à 640 p. de h. abs., offre l'occasion de suivre les contours du défilé de la Morava bulgare, qui coule à l'O. Elle y entre un peu au N. O. de Rajan et la vallée se rétrécit toujours plus en allant d'Aleksinatz vers le X. On est donc déjà en deçà de la digue qui sépare le bassin de Nisch de la plaine de la grande Morava et qui, vu le manque d'aecidens naturels favorables, ne serait guère susceptible d'être défendue sans les montagnes vers Bania. Au milieu du bourg de Rajan composé de 67 habitations éparses avec 310 habitans, est situé l'auberge, qui est en bonne partie en bois et offre au premier étage un Tschardak assez convenable pour les voyageurs. Les environs très dénudés d'arbres n'offrent du reste aucune vue agréable. En deçà de Rajan est une hauteur semblable à celle qui précède ce village et couverte aussi de bocages de chênes. A '/4 1. de Rajan on traverse un vallon, dont l'eau courant du N. E. au S. O. vient du bassin dé Banja, de manière qu'on a une vue sur le mont Rtagn (pTan.) et les montagnes de Banja à travers l'é-chancrure, qui donne issue à ces eaux dans les petites crêtes à l'E. de la route. On distingue de plus que ce torrent est formé par la réunion de deux autres, dont l'un vient du S. et l'autre du N. *)• ') La Carte de Bougarski ne donne pas une idée vraie de cette configuration et même si la dénomination de 'Mosna-.PIam'na était juste, elle semblerait s'appliquer à la chaîne près du litagn cl non « celle près de Rajan. A 1 V2 J. de Eajan il y a deux Hans isolés, le Delilogorhan, au-dessus desquels était la redoute serbe de l'an 1806, nommé Deligrad (fort des fous). Après cela viennent des petits bois de chênes, puis à l/2 1. plus loin sur le bord d'une plaine l'auberge de Haidouk-Tschesine-Han (l'auberge de la fontaine des brigands). Un hameau et une fontaine se trouvent près delà; dans la plaine est situé le village de Roudovitza et à '/2 h pbJS S. O. est celui de Popovitza. La vallée de la Morava y a déjà 1 1. de largeur et la rivière décrit des contours. A 3'A 1. de Raj an on longe le bord d'une grande prairie, qui s'étend vers la Morava et au milieu de laquelle il y a une fontaine, le Chitchdoun-Tschesme. Depuis là on n'a plus qu'à traverser une petite colline couverte de bocages, pour atteindre Aleksinatz ou Aleksinitze à 4 1. de Bajan. Ce bourg est situé dans un vallon arrosé par le Toponitzsi ayant ses sources dans le bassin de Bania. Il est composé de 302 habitations éparses avec 1684 habitans. Le capitaine a sa maison au N. E. du ruisseau, tandis que de l'autre coté est la seule rue d'Aleksinitze et là sont aussi des auberges et un café. Il y a une église et une école de deux classes ainsi qu'une quarantaine et une douane. Le lazareth est situé à la sortie méridionale du village sur la pente de la colline qu'on monte pour se rendre à Nisch. Aleksinatz est la résidence du commandant et du tribunal du cercle ainsi que d'un archiprêtre qui a sous lui 17 paroisses et 7 églises. Le cercle d'Aleksinatz se compose de deux districts, savoir celui d'Aleksinatz et de Rajan et celui de Bania; il comprend 37 communes, 2 bourgs, 82 villages, 3013 maisons et 20,099 âmes. Tl compte 7 écoles; la poste est à Aleksinatz ainsi qu'à Bania et Schoupeliak. Le district d'Aleksinatz et de Rajan ne contient qu'un bourg, 50 villages, 1975 maisons et 12,385 âmes, et celui de Bania 1 bourg, 32 villages, 1038 maisons et. 7714 âmes. Les commandans des districts habitent à Aleksinatz et Bania. Sur cette route on rencontre tous les quarts d'heure des postes de milice serbe, dont les sentinelles étaient encore sans abri quelconque à mon passage en 1837. Ce n'est qu'à 2 1. d'Aleksinitze qu'on arrive à la frontière turque, où on trouve en deçà d'un ruisseau coulant de l'E. le Karaoul et Han de Dragevatz. La route passe sur les dernières pentes basses des montagnes au m N. de Nisch, c'est une contrée couverte souvent de Paliurus acu-leatus, de Ltgustrum vulgare avec quelques petites chênes et des poiriers sauvages isolés. À 3% h. d'Aleksinitze est situé le village de Topolnitze et plus loin dans un vallon évasé celui de Popolitze, nommé ainsi à cause de quelques beaux peupliers, en serbe Popola. En se rendant de là à Nisch par une lande sèche en pente insensible, on a une vue étendue à l'O. et au S. Au pied oriental du Jastrebatz est le mont Kobasitza (Saucisse) et son revers méridional est garni de petites collines tertiaires, comme celles sur lesquelles on se trouve, mais elles sont un peu plus élevées. Plus au S. est la vallée du Toplitza, qui remonte à l'O. en produisant une vaste échancrure. En deçà sont les montagnes des Arnaoutes (Arnaout-Planina), qui sont bien moins hautes que le Jastrebatz et à quelques lieues à l'O. du cours de la Morava et du Paschalik de Leskovatz. Derrière ces crêtes de 1000 à 2000 p. sur la vallée du Toplitza, se trouve à l'O. la plaine de Kosovo. En deçà de Nisch s'élève au S. et S. E. les hautes cimes coniques et pelées du Stara-Planina, qui atteignent au-delà de 3600 p. De là s'étendent vers la Morava de Leskovatz des crêtes boisées plus basses, à l'extrémité N. O. desquelles se trouve la singulière entaille du Kourvinhan. (Voyez l'itinéraire suivant.) Une espèce de petit faubourg composé de rez-de-chaussée précède la citadelle importante de Nischa ou en turc Nisch, doni une des portes de l'enceinte extérieure est en même temps la porte de la ville. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, p. 340.) La route court entre les remparts du fort et la Nischava, un pont couvert placé vis-à-vis de la porte de la citadelle conduit en ville. Nisch est une ville bulgare populeuse, on y compte 16,000 âmes dont environ 6000 sont Musulmans. Il y a onze mosquées à minaret, une ou deux églises grecques, une tour à horloge, un grand bazar bien fourni de boutiques et fie grands Hans. Le bazar a une toiture en planches et des rues si larges qu'on peut y passer à cheval et en voiture. Les Plans, tenus par des Bulgares, ont un étage et offrent plusieurs chambres pour des voyageurs. J'y ai même trouvé une ou deux chaises dans l'un d'eux; le seul désagrément est que les l'ennuies ries aubergistes ne demeurent pas dans les iîans. In grand faubourg est à l'E en deçà du petit rempart de terre à moitié détruit, qui entoure lit ville, et un troisième faubourg est sur la rive septentrionale de la Nischava à l'E. de la citadelle. Des habitations de Zingares se rencontrent dans ces derniers lieux. Nisch est le siège d'un petit Pascha qui commande essentiellement à une population bulgare et chrétienne. Pirot et Ak-Palanka ou Moustapba-Pascha sont presque les seules petites villes, où il y ait des employés supérieurs turcs et même les Musulmans n'y forment qu'un chiffre restreint de familles. 11 n'y !" guère de bourgs, si ce n'est Isnebol et Tzaribrod, mais un nombre considérable de villages, de manière qu'on peut soupçonner qu'il y a là au moins 60 à à 6000 âmes. Elle est renommée par ses confitures et surtout par ses Ilalva. (Voyez ma Turquie d'Europe. Vol. 2, p. 247.) On y confectionne des draps grossiers. On y passe la Tondja sur un pont et on continue à la longer sur la rive orientale jusqu'à Jenedscheli ; avant le confluent occidental du Jaousdere, on repasse sur le côté opposé au moyen d'un autre pont, pour ne plus le quitter qu'à l'entrée d'Andri-nople. D'après Mr. Kiepert on peut faire aussi cette route totale- ment sur la rive occidentale. Tout ce trajet a lieu dans la vallée même ou sur les dernières extrémités des coteaux tertiaires, qui bordent cette fertile et belle cavité. Au S. d'Andrinople se trouvent en deçà de la Maritza quelques habitations, en partie de zingarcs, à '/> 1. plus loin est le village de Hadgi-Ilbegi en deçà de prairies marécageuses, qui ont nécessité l'établissement d'une chaussée. Le pays y est cultivé et les arbres isolés y sont des raretés. C'est au milieu de ces champs qu'on se rend au village turc d'Emerli, qui est à 1 V2 1. d'Andrinople. Il est déjà hors de la plaine de cette ville et situé sur la première des terrasses, qui l'environnent de tous les côtés. Elles y indiquent bien le retrait d'une vaste masse d'eau par des débâcles successives comme suites d'accidens volcaniques. Une petite mosquée avec un minaret et une auberge se trouvent dans ce village, au S. duquel on arrive par un court talus à une seconde terrasse, qui à un niveau plus haut que la première conduit au village et à la ferme de Boghaz situé à 2 1. plus au S. Boghaz est placé sur un sol caillouteux immédiatement au pied d'un talus presque vertical et formé d'argile alluviale couverte de gravier. On dirait voir le bord d'un étang, qui se serait écoulé sous vos yeux. Depuis là on parcourt un pays inculte, aride et plus élevé jusques près de Dimotika. Le sol est ondulé et entrecoupé surtout par trois vallons assez profonds et évasés. Quelques bocages se rencontrent sur leurs pentes ainsi que sur les plateaux de quelques cents pieds de hauteur, d'où on a une vue étendue au N, mais elle est peu agréable, vu le voisinage de la plaine d'Andrinople et l'éloignement trop grand des amas de hauteurs du bassin de la Thrace. D'après la carte de Mr. Kiepert on peut aussi longer la Maritza depuis Andrinoplc; cette route plus longue de voiture offre plusieurs villages. Dimotika est précédé de quelques vignobles et de jardins établis sur la pente des coteaux. Cette ville d'environ 6 à 8000 âmes est bâtie dans la vallée du Kisildeli-Tschaï (le Krisoldeni des cartes) non loin de son débouché dans la Maritza. Ce torrent a ses sources multiples dans les extrémités orientales du Bhodope, savoir sur le pied du S. du Kodja-JaVla. Vers sa sortie du Bhodope il reçoit le Soheïtan-Deressi (eau de la vallée du Diable), qui descend du Moukaté-Jaïla et plus bas à (loekdschebounar le Boltschibouk - Tsohai venant du pied N. du Kodja-Jaïia. Le Ki- zildeli - Tschaï passe au S. de Dimotika en faisant le tour de la butte au pied oriental de laquelle est bâtie la ville. Sur la colline de 2 à 300 p. sont les restes d'un ancien château à casemates souterraines et immédiatement à l'E. et au S. au-dessous de sa double enceinte de murailles sont les ruelles pavées, élevées et en pente de Dimotika. Dans le moyen âge le château devait avoir de l'importance comme interceptant la route de Fered à Àndrinoplc, maintenant il en est tout autrement. Il est célèbre parmi les Turcs comme une prison d'état fort redoutée à cause de ses cachots humides et pleins de rats. Les parties les mieux bâties de la ville sont dans la vallée et l'A y an y a son Konak. Il y a une mosquée et une tour avec une horloge. Les Grecs paraissent les principaux habitans de Dimotika. L'éducation des vers à soie y est une branche principale d'industrie. Les collines de Dimotika ayant environ toutes la même hauteur, la vue depuis le vieux château ne recompense nullement de la peine d'y être monté. En été du moins les environs à part les vignobles ont l'air très arides. Le large lit de cailloux du Kizildeli - Tschaï se passe h gué et une belle route fort spaciense conduit par Karabeïli (à 2 h.) à Saltikoï fà.f>22 p. de h.) à travers un véritable jardin composé de toute espèce de cultures, parmi lesquelles les mûriers et le tabac ne sont pas oubliés. La vallée de la Maritza est large et on ne voit que de loin les coteaux sur la rive orientale opposée, tandis que sur le coté où. on voyage, on vient toucher à 1 1. de Dimotika la dernière pente des collines et qui plus est les ruches de gneiss du Khodopc. Saltikoï est un gros village bulgare situé au pied du prolongement do ces coteaux et entouré d'un assez grand nombre d'arbres et de belles prairies Après avoir longé pendant une ') Trouvant l'auberge fermée, nous moulâmes dans la partie du village sur le coteau pour demander un logement an Saubaschî. Mais il était aussi absent de ebez lui et en désespoir de cause nous nous établîmes sous sou Tsebardak fort propre, car QOUS apprîmes que les lialmans du village allaient coucher hors de chez eux pour éviter la peste et les voyageurs pestiférés. Ayant encore vu ouvert un épicier dans le village en lias, nous nous haiàmes d'y envoyai un de nos domestiques, mais a peine ce marchand nous avait appereu qu'il avait fermé sa boutique et avait été rejoindre les siens dans je m: sais quoi coin des collines, exténués de fatigue et de chaleur nous allâmes a la maraude comme les sol- demi-heure les collines de gneiss, à la sortie de Saltikoï, on traverse un petit torrent venant de l'O. et on arrive bientôt sur le bord même de la Maritza, où la route de voiture met à découvert le gneiss formant de petites hauteurs couvertes de bocages. Ail. de là on traverse le village de Soflou en partie grec, il est au milieu de vergers d'amandiers, de mûriers et de noyers ainsi que de champs de tabac, de coton et de soumac. Cette vallée de Maritza est en un mot un Elysée. Depuis ce point jusqu'à Fered, qui est à 6 1. de là, on se tient toujours éloigné de la Maritza, parce qu'elle décrit un coude considérable vers l'E. Cette partie de la route passe sur de petits plateaux trachytiques bosselés, souvent incultes et couverts ça et là de Paliurus aculeatus ou d'autres arbustes des terrains secs et graveleux. Le premier village après Soflou est Kara-Bounar, qui est situé à %/2 1. A 1 '/2 1* plus loin se trouve Tscholmetschi. Les agglomérats de ponce broyée rendent cette partie de la route toute blanche. On y traverse à 1 1. de Kara-Bounar un petit ruisseau, qui coule dans la Maritza et qui sera probablement le Tscherna- ou Kara-Bounar-Sou de Mr. Kiepert et à l'O. duquel le trachyte vient former des mamelons abruptes comme ceux à l'extrémité des coulées de lave. Tscholmetschi est un gros village turc *), où se rencontrent dats et trouvâmes des amandiers, sur lesquels nous fîmes main basse jusqu'à ce qu'enfin le' Soubaschi voulut bien paraître. Ce brave Bulgare nous traita de son mieux, du fromage, du pain, du vin et du raki furent procurés, mais il était bien tard quand fut prête la soupe de poulets, à laquelle nous avions ajouté du riz de notre provision et il ne restait plus que peu d'heures jusqu'au départ du lendemain, car on ne peut guère voyager dans ces pays au milieu de la plus grande chaleur. ') Il n'y a pas d'auberges, mais un homme riche y est dans l'habitude de rafraîchir les voyageurs. Suivant l'usage la porte de sa cour était ouverte, mais personne ne s'y montrait. A la fin le Tartarc s'étant aventuré à taper contre la porte de la maison, une voix féminine repondit qu'on allait venir. En etfet un jeune enfant de 7 à 8 ans sortit bientôt et nous apprit que son père était absent, mais que sa mére serait charmée de nous donner ce que nous désirions. Nous nous établîmes sans façon dans un Tschardak on Kiosk fort propre, qui était dans un coin de la cour et nous eûmes a peine le temps de fumer une pipe, que l'enfant nous apportait déjà des oeufs sur le plat, du fromage blanc, une halua, quelques fruits et de la bonne eau. Une petite pièce de monnaie au petit garçon fut le seul moyen de montrer notre gratitude à nos hôtesses inconnues, qui probablement de leur côté nous avaient bien examiné clandestinement. les routes de Fered et d'Ipsala. Ail. de là se trouve un autre village musulman appelé Semenli au pied de petits coteaux de 200 à 800 p. de h. A 1/4 de 1. de là est situé à l'O. de la route Koïgngeri, hameau aussi ottoman, et dans un pays de petits bocages. Depuis làjusques près de Fered on traverse un pays volcanisé, inculte et agreste. Ce dernier forme les hauteurs auxquelles Mr. Viquesnel donne le nom du village de Tchampkeu'ï et attribue une élévation de 350 à 400 mètres. A 1 l/a 1. de Koïgngeri on franchit le ruisseau de Katranschi-Deressi venant de l'O. et du N. O. ou du pied S. E. du Moukaté-Jaïla et se rendant dans la Maritza. De petits bois de chênes couvrent le pays, et plus loin il y a même quelques touffes de grands arbres, après lesquels on passe entre deux monticules d'agglomérat tra-chytique blanc, enfin on longe des buttes trachytiques et on débouche sur les environs cultivés de Feredschik ou par abréviation Fered. Cette petite ville est bâtie à 480 p. de h. sur deux collines rocailleuses séparées par un ravin, qui n'a guère de l'eau que quand il pleut. La partie la plus considérable des habitations est sur le côté septentrional de ce ruisseau. On y distingue surtout le Konak de l'Ayan avec son harem assez grand à deux étages et avec un jardin. La mosquée principale était une fois une église grecque, à laquelle on n'a fait qu'ajouter un petit minaret. Fered est une ville ouverte de 3 à 4000 habitans turcs et grecs. Etant placé sur un niveau assez haut comparativement aux plaines sur le bord de la Maritza, on en a une vue étendue. On voit au S. E. la petite chaîne de montagnes, qui vient se terminer près d'Enos et en deçà d'un bras de mer l'île massive et élevée de Samothrace (Samothraki) semble toucher le ciel. Néanmoins l'élévation de cette double sommité du mont Phengari ne doit guère aller au-delà de 3000 p. (?), autant, qu'on peut en juger de loin. Mr. Kiepert y figure à sa cime un cratère. Au N. O. on apper-çoit l'extrémité orientale du Rhodope formée surtout par deux grandes montagnes en pyramides à base fort large. Ce sont les montagnes de Moukaté-Jaïla et Kod ja-Jaïla(1000 à 1100 mètres), entre lesquelles une vaste échancrurc décèle l'entrée d'une vallée. Plus à l'O. on voit une série de montagnes plus basses avec quelques petites pyramides, forme particulière aux terrains de schistes cristallins; tandis qu'au N. sont les pitons trachytiques du groupe de Tchampkeu'ï. Pour aller à Enos il faut passer la Maritza sur un bac près de Kalerkos à une petite lieue de Fered. La route jusques là a lieu au milieu de cultures, d'arbres fruitiers et d'arbrisseaux sauvages méditerranéens, tels que le grenadier, le Vitex Agnus castus, le Paliurus aculeatus. La vigne sauvage couvre ça et là les arbres en ajoutant à la richesse de cette végétation. La Maritza est assez large dans ce point et sa rive orientale est couverte d'une grande zone de hauts Tamarix, dans lesquels il y a tant do chemins qu'on peut d'autant plus aisément s'y égai-er que même le cavalier y est comme enseveli dans une mer de verdure. En deçà de cette singulière foret est une immense plaine occupée par des prairies et des marécages. A l/2 1. de la Maritza on passe sur un pont la petite rivière du Kara-Asmouti ou Kara-Asmak de Mr. Kiepert, qui va se perdre dans les marécages au S. On ne quitte les roseaux ou les prés qu'au pied de la petite colline, où. est situé le hameau grec dAkhorkeui, qui est à 1. de Fered et à une petite heure au S. d'Ispala. Depuis là on est obligé de se tenir toujours sur la hauteur pour éviter les marais, qui s'étendent au golfe d'Enos et sont surtout alimentés par un cours d'eau venant des hauteurs au S. de Malgara et de Keschan. Ces dernières séparent ces plate-formes d'autres semblables et plus larges qui bordent au N. O. le golfe de Saros. On passe ce torrent à Tschelebikoï d'après Grisebach et on rencontre encore trois villages avant Enos, savoir: Tscheriban, Dschinidgekoï et Amygdalia. Ce bourg est renommé par ses pêcheries et a un bon port ; sur ses derrières quelques buttes trachytiques forment le Tschatal-Tépé. Près de là au N. E. est le couvent de St. Athanase, nommé Scaluti (escalier), à cause de la forme des rochers tracyhtiques. a ï? a r i su i a i DE SILISTRIE à ISLIVNÉ par RAZ G RAD. silistrie est une forteresse placée sur le bord plat du Danube et au pied de petits coteaux. On y remarque surtout une grande mosquée avec un haut minaret et une dizaine d'autres mosquées à minarets. Cette ville avait perdu une partie de sa population turque après sa prise par les Russes, mais depuis lors elle s'est repeuplée. Elle comptait jadis plus de 20,000 âmes. Silistrie est la résidence d'un Paseha supérieur , car il a sous lui un des plus grands Paschaliks, qui comprend tout le territoire turc du N. E. le long de la mer noire et qui dépasse même le Balkan jusqu'à Bourgas. La population de ce Paschalik peut bien s'élever à 2—300,000 âmes, ce qui serait bien peu comparativement à son étendue, mais le pays de Dobroutscha est fort désert. Le fond de la population est essentiellement bulgare, mais les Mahométans y sont assez nombreux, soit qu'ils descendent de Turcs asiatiques , soit surtout de Bulgares devenus Mahométans. Ces derniers forment à eux seuls des bourgs et des villages, surtout à l'entour de Schoumla et de Silistrie. Il y a des Tartares dans le Dobroutscha et des Grecs au S. du Balka . Ce Paschalik compte 7 à 8 villes, savoir: Silistrie, Schoumla. Varna, Paravadî, Bourgas, Iladji-Oghlou, Basardschik, Aïdos et 16 à 18 bourgs, savoir: Eski-Stamboul, Kosladschik , Misivri, Jeni-Basardschik, Kainardschi, Kousgoun, Rasova, Kostensche, Mangalia, Kavarna, Baltschik, Hiraova, Mafsehin, Isaktschi, Toultscha et Babudagh. Pour aller de Silistrie à Islivné il s'offre plusieurs routes, parmi lesquelles celle par Schoumla est la plus fréquentée et la plus courte. Elle passe par Kadana, Aincndschik, Karalar, Tscho-ban-Sou (Eau du berger), Kockludsche, Erikli et Seklik sur l'E-rikli-Sou, une des têtes principales du Sirischendere à Paravadi. Depuis Schoumla on remonte la vallée encaissée de l'Akali-Kam-tscbik jusqu'à Tscliatak. La route de Silistrie à Raz grad n'a lieu qu'à travers un pays de bas coteaux ou de plate-formes tertiaires, dont les parties cultivées ne se trouvent en général que près de villages. On passe le Scbara ou Drista, on se dirige sur Semer-schikoï et Jounosapada et on arrive par Douschitabak. De Razgrad (à 913 p.) on passe par Arnaoutkoï, d'où on monte sur le plateau de 1654 p. de h., en deçà duquel est situé dans un vallon crayeux le village de Schouschak. Un second plateau inculte conduit, à Schekere (de sucre), village turc , entouré de champs de blé. Plus loin on descend dans le vallon de Koubadin. Depuis là on a encore trois plateaux, séparés par trois vallons, à traverser pour atteindre le plateau d'Eski-Djoumaa (vieux vendredi). Dans la première vallée après Koubadin on laisse au N. O. à Y2 1. de la route le village d'Eiradin ou Eiladin. Cette cavité est bordée de petites hauteurs de 150 p. et s'étend de l'O. à l'E. Un vallon venant du S. O., y débouche sur la partie où passe la route. L'avant-dernier vallon, à 1 y2 h. avant Eski-Djoumaa, court du N. O. au S. E. et dans le dernier se trouve le hameau de Taous-lartschifli-Keui. Eski-Djoumaa, ville turque de 5 à 6000 âmes , est bâtie à 949p. de h. abs. sur les deux bords d'un petit torrent, qui coule vers Schoumla. Il y a plusieurs mosquées à minarets. Nous y logeâmes chez un Bulgare, qui nous fit dîner fort agréablement dans son jardin et qui avait outre son logis deux pièces pour recevoir des étrangers. Les environs d'Eski-Djoumaa offrent beaucoup de mûriers pour l'éducation des vers à soie et assez de champs de Dolichos-Lepleb. Pour aller de cette ville à Osman-Bazar on remonte le torrent, qui vient se jetter dans celui d'Eski-Djoumaa et qui s'appelle le Kirgetschi-Sou (l'eau qu'on passe 40 fois), parce qu'à 1 1. de la ville la route est resserrée dans un défilé, où on franchit à gué ce torrent à peu près ce nombre de fois. On voyage dans une vallée cultivée et à vignobles jusqu'à l'entrée de cette gorge. Si on regarde à l'E. on a environ à 2 1. devant soi les hauteurs de Schoumla, qui se présentent sous la forme de deux grosses montagnes crétacées isolées et à sommets rabattus. On dirait voir une île s'élevant au-dessus d'une mer agitée. Le Kirkgctschi-Sou sort d'une fente dans des crêtes boisées, qui s'étendent presque de l'O. à l'E. sur un espace de 2 à 3 1. A leur pied sont des vignobles donnant du vin blanc, et dans la vallée des pâturages couverts de bestiaux ou des champs. Ce sont les dernières vignes qu'on voit sur cette route au N. du Balkan. Le défilé tortueux du Kirkgctschi-Sou est bordé d'escarpe-mens calcaires ornés de chênes, de tilleuls, de saules , de noisetiers et de vignes sauvages. Vers son milieu il y a deux petites cascades dont l'une a 30 p. de h. Cette gorge courant de S. O. au N. E., dure une lieue. A sa sortie à 2V2 1. d'Osmanbazar on trouve le village de Derbend-Keui (le village du défilé), d'où on se dirige au S. O. en traversant deux plateaux séparés par un vallon, où il y a une ferme. De petits bois de chênes mêlés de peupliers et de cormiers couvrent le sol, mais sur le second plateau, près du village de Karascholi, il y a des prés avec des cerisiers épars x). On voyage alors à une altitude absolue d'environ 17 à 1800 p. Entre le plateau de Karascholi et celui d'Osmanbazar il y a un vallon arrosé par un ruisseau, qui coule du N. au S. Sa profondeur est assez grande pour qu'on mette plus d'une demi-heure pour y descendre. Osmanbazar est situé dans une espèce de cavité très évasée sur un plateau, qui a 1663 p. d'élévation absolue. AuN.E. il est entouré d'un petit bois, tandis que sur les autres côtés on ne voit que des pâturages arides. C'est une ville turque de 4000 âmes ; il y a deux mosquées à minaret et une église grecque. La route d'Osmanbazar à Tschatak est peu intéressante et a lieu à travers un pays élevé et souvent inculte ou couvert de bocages de chênes. On monte d'abord au S. E. puis au S., où ') Selon la mode turque de regarder les arbres sur la route comme un domaine public, nous fîmes main basse sur les cerises et le Tartare ayant arraché même une énorme branche, sous le feuillage de laquelle disparaissait son cheval, continua ainsi sa route en cueillant des cerises. L'usage d'enlever ainsi les branches aux arbres fruitiers sur les chemins est si général qu'en automne ils en paraissent tout-à-fait défigurés du moins dans le bas, mais quelquefois on se donne aussi la peine de monter sur les arbres et do les dépouiller en règle. on atteint un plateau plus élevé que celui d'Osmanbazar ou la partie la plus haute de la plate-forme sur la pente septentrionale de laquelle est cette ville. On traverse ensuite quatre plateaux séparés par des cavités assez profondes et dont les eaux coulent à l'E. Depuis ces hauteurs à 1090 p. on ne voit que les contreforts du Balkan à l'E. de la route sont fort bas, tandis qu'à l'O. il y a des montagnes boisées, qui peuvent bien avoir de 2500 à 3000 p. Avant d'atteindre la pente, qui conduit au vallon du Grand-Kamtschik à Tschatak, il faut passer une espèce d'échan-crure ou de col de près de 2000 p. d'élévation, au-devant duquel est à '/4 1. au N. de la route le village de Badela. Tschatak est un village habité par des Turcs et des Bulgares et à la sortie des contre-forts véritables du Balkan, car depuis là on n'a plus jusqu'au Danube que des plateaux et des collines d'autant plus basses qu'on avance plus vers le N. Mais à l'O. de Tschatak s'élèvent aux sources du Kamtschik des montagnes ou plate-formes élevées sous le nom d'Indsche-Baïr. Une assez forte montée conduit sur la plate-forme inclinée, qui règne au pied de la dernière crête latérale du Balkan, arête qu'on traverse par une coupure, au-dessus de laquelle s'élèvent des sommités de plus de 300 p. Ces montagnes forment une série de cimes pointues et présentent sous les bois une suite d'escar-pemens de grès blanchâtre ou jaunâtre, qui font un assez bel effet. On peut suivre ces crêtes jusqu'à quelques lieues à l'E. de Tschatak, comme cela est indiqué sur la carte militaire de Vienne. Au col de 1923 p. de h. le grès produit par sa décomposition des rochers bizarrement entaillés, en petit comme ceux de la Suisse saxonne. On en descend par une pente déboisée à Kasan et on a devant soi un amphithéâtre de montagnes et de sillons, dont l'aspect, le mélange des prairies et des bois , rappelle les parties montueuses de la plaine suisse au pied des Alpes. Ce sont surtout les crêtes boisées entre Kasan et Baschkoë et celles aux sources du Petit-Kamtschik. Kasan, sur lTsvorot (?), est un gros bourg bulgare de 4 à 500 maisons en bois et pierre avec des toits fort avancés. Il y à une horloge et une église grecque nouvellement bâtie. Un torrent venant du N., passe à coté do ce bourg et parcourt au S. E. ut) vallon profond, où se trouve le chemin de Baschkoë. La route se bifurque dans ce lieu, l'une allant à Islivné et l'autre à Kar- nabad par la vallée de lTsvorot, une échancrure du bas Balkan, et par Soungourli. Si on choisit l'autre voie, on quitte, au contraire, la vallée de Kasan. A 1 1. du bourg près d'un moulin à foulon pour le drap on monte au col, qui le sépare du bassin du Petit-Kamtschik. Cette ascension, probablement susceptible à quelque défense, est assez longue et conduit le voyageur autour d'un petit sommet isolé, comme l'indique la carte de Vienne. Depuis là on est bientôt sur le col à 2163 p. de h., d'où on a la vue sur la crête principale du Balkan. Baschkoo est un beau village bulgare de 180 à 200 maisons en bon état, vu l'industrie des habitans; on y fabrique des habits à la turque pour la vente et on y élève beaucoup de bestiaux. Il est situé sur la pente élevée du bassin du Petit-Kamtschik, qui coule à une petite demi-heure au S. C'est un point excellent pour juger de la hauteur relative des parties du Balkan oriental depuis Islivné à Karnabad. Les crêtes élevées dTslivné sont suivies à l'E. par l'échancrure peu considérable, où passe la route de Vetschera à Islivné, mais en deçà l'arête se relève un peu et ne s'abaisse que peu à peu en présentant des contours toujours plus doux. Des forêts de haute futaie couvrent la plus grande partie de ces montagnes. l). Le Petit-Kamtschik se passe à gué et ne forme point de lac comme on le croirait d'après les cartes, mais des inondations momentanées peuvent lui donner cette apparence. De très basses crêtes boisées en chênes et hêtres le séparent seules de son affluent principal, savoir le torrent de Vetschera. La carte de Mr. Kiepert est dans l'erreur en confondant le Kamtschik avec ce dernier. La première colline porte le nom de Vodo-Balkan, abréviation de Vodeno-Balkan ou Balkan aqueux. Le torrent de Vetschera (le soupe) coule de l'O. à l'E. dans un sillon longitudinal bordé au S. par de grands escarpemens de rochers. L'auberge du hameau de Vetschera à 1270 p. de h. abs. est assez visitée, parce qu'on commence à % de là à monter le Balkàn. On y trouve du bon vin, des oeufs, des poulets, en un mot, plus qu'on ne pourrait attendre d'un endroit si écarté et si sauvage. ') Nous eûmes d'abord de la peine à nous loger à Baschkoë, parce que ces Bulgares aisés se rejetaient les uns sur les autres cette corvée, mais une fois easés nous nous trouvâmes au milieu d'exeelklltea gens. Apres avoir remonté quelques instans le torrent, on aborde la pente extraordinairement inclinée et boisée du Balkan d'Islivné par des sentiers tournoyans et assez rapides. On peut compter deux heures jusqu'à ce qu'on soit en haut ou une heure pour la descente. La cime peu large, à 2876 p. de h. abs., est déboisée et offre des pâturages, la vue y est obstruée par les sommités voisines, qui atteignent 3076 à 3176 p. La route d'Islivné estétablie sur le côté occidental de deux vallées, l'une, la plus petite, s'éten-dant du col jusqu'au débouché dans la grande vallée et cette dernière montant au N. 0. dans le Balkan. Le chemin est donc obligé de décrire un grand coude autour de l'angle saillant de la montagne, qui sépare ces vallées pour pouvoir atteindre par une descente graduelle le fond du plus grand sillon. Arrivé là on est obligé de remonter un peu pour redescendre profondément dans une petite gorge latérale, où un torrent descend de l'O. des hauteurs derrière le ïchataldagh. Ce cours d'eau une fois passé, on n'a plus qu'à parcourir une descente insensible sur le pied du côté oriental de ce dernier groupe de montagnes. Depuis la cime du Balkan jusqu'à la sortie de la grande gorge sur la plaine de la Thrace, on est dans une forêt continuelle, composée de chênes dans le bas et de hêtres dans le haut, des tilleuls noirs et d'autres arbres se mélangent aux chênes dans une zone intermédiaire. Les torrents se passent sur des ponts en bois et même la route est practicable pour les voitures depuis Islivné jusques vers la cime, mais non pas plus loin, ce qui ajouté à l'escarpement de la pente septentrionale rend facile l'interception de ce passage en temps de guerre. Il est encore plus aisé à défendre que celui du Tschipka-Balkan et même que celui du Demirkapi. Un Karaoul bulgare est placé sur le grand torrent à 1 1. sous la cime, ce qui n'est pas assez dans une contrée si bien disposée pour cacher des brigands. Aussi eûmes-nous beaucoup de peine à engager notre Tartare à nous laisser prendre cette route, mais si vraiment des négotians ou des gens chargés d'argent peuvent y courir des risques, c'est surtout en partant d'Islivné, parce que des habitants de cette ville peuvent aller les attendre sur la route. Pour notre part nous pouvons dire que ce passage du Balkan, un espace de 5 à 6 h. de route, est. un des plus pittoresques de toute la chaîne à cause de sa sauvagerie. Au milieu de ces bois un ouvrier serrurier d'Allemagne donnait profondément à notre passage et nous le ré- Il» veillâmes pour lui apprendre que ces lieux étaient peu sûres, ne fusse que pour les bêtes fauves. Plus loin deux Turcs armés et mangeant tranquillement donnèrent quelques instans de l'inquiétude à notre guide. A la sortie de la gorge du Balkan se trouvent de petits monticules sableux, en deçà desquels on n'a plus que les vergers et les vignobles d'Islivné à traverser pour atteindre cette ville. L'eau du torrent de la gorge coule déjà dans le bassin de Ka-rinabad ou Karnabat, d'après ce que j'en ai pu voir et ce qu'on m'a dit à Islivné. Entre ce point et cette ville il y a une espèce de partagé des eaux extrêmement bas. VL de ROUTSCHOIJK A CONSTANTINOPLE r*AR SCHOUMLA , KARTNABAD et ANDRINOPLE. Tjc Lom est formé par la réunion du Kara-Lom (Lom noir) ou celui de Kazelevo et d'Ajaslar et de l'Ak-Lom (Lom blanc) ou de Razgrad. A son débouché dans le Danube est placé Routsehouk. C'est une ville considérable et commerçante, bâtie sur une petite éminence au-dessus du Danube en face de Giourgevo. On y Compte plus de 30,000 âmes d'une population mélangée de Bulgares, de Valaques, de Turcs ainsi que de marchands grecs et juifs. Elle offre plus d'une douzaine de mosquées ainsi qu'une tour à horloge, et est. entourée d'une enceinte garnie de canons, surtout vers le Danube. B y a aussi des batteries sur la rive même du neuve , qui y ressemble à un bras de mer. Le Pascha y a une vaste résidence. Routsehouk est le chef-lieu d'un petit Pascbalik de médiocre étendue, qui a essentiellement une population bul- 8 gare, parmi laquelle les Mahométans forment une certaine quote-part assez forte, car ils composent à eux seuls presque des villes, des bourgs et des villages. On peut croire qu'il contient pour le moins de 90 à 100,000 âmes, car outre Routschouk il y a sept villes ou gros bourgs, savoir: Selvi, Trnava, Osmanbazar , Eski-Dschoumaa, Razgrad, Tourtoukan et Gabrova. De plus il y existe plusieurs autres bourgs, comme Kasan , Dranova, Iljana, Loscbova etc. Les Ayans ou employés turcs supérieurs se trouvent surtout dans les villes et les bourgs nommés. De Routscbouk à Razgrad (ville close?) on voyage à travers un pays fort uniforme de collines peu élevées , mais à large dos applati. Sur les hauteurs, ça et là à bocages, entre Siniouscha et Tourlouk ou Tourlak, on apperçoit pour la dernière fois la vallée du Danube et on commence bientôt à remonter la vallée assez large de IAk-Lom, au milieu de laquelle est situé Razgrad. De petits bois de chênes couvrent par-ci par-là les hauteurs, des villages bulgares avec des pruniers ou des vignobles sont placés sur leurs pentes vers le Lom. Jousendscha, Dranovitza et Ma-schanlar sont les noms de trois de ces villages. Razgrad est une ville ouverte, qui a des rues larges et contient plus de 15,000 âmes. Le nombre donné de 18,000 me paraît exagéré. Ce sont presque tous des Musulmans, car on n'y compte que 80 familles bulgares. Il y a sept mosquées à minaret, dont deux sont fort grandes et ont plusieurs coupoles, l'une n'a qu'un haut minaret et l'autre deux. Il y a une horloge, mais pas de bazar couvert. L'Ayan y occupe un vaste Konak et les chaises sur son Tschardak ou balcon me prouvèrent qu'il ne dédaignait pas les usages européens. Il nous logea dans une auberge bulgare à l'extrémité S. de la ville, où nous nous trouvâmes fort bien et eûmes le plaisir de passer un jour de fête, de manière que nous pûmes à loisir observer les usages des paysans bulgares des environs. Dans cette partie de la Bulgarie on sent déjà le voisinage des pays plus civilisés. Les jupes des femmes sont européennes, le pain de ménage aussi excellent qu'au milieu de l'Europe et les maisons moins asiatiques par leuis poêles. En me promenant dans Razgrad je fus aussi frappé de voir une Musulmane agacer les passans depuis sa fenêtre de papier troué, tandis que non loin de là son maître se reposait probablement sous un Tschardak. De Kazgrad on se rend à Arnaout-Koï (village albanais) en traversant une hauteur occupée par des pâturages secs; en général les environs de Kazgrad ne présentent des jardins et des cultures que sur les côtés et au N. de cette ville, tandis qu'au S. on ne voit que des rochers blanchâtres ou des pelouses incultes. Au pied des coteaux est une carrière de pierre, une fontaine et une petite plaine, où. paraît se tenir le marché. Arnaout-Koï est dans un étroit vallon à 1 1. de Kazgrad. Il y a 20 ans, me disait-on, ce misérable hameau était un gros bourg, dont on voit encore les ruines et les arbres fruitiers ça et là sur les deux pentes de cette cavité. Un Ayan s'y étant révolté, les maisons bâties en amphithéâtre lui ont servi de citadelle, ce qui a amené la destruction de cet endroit. A l'E. du village le vallon est encaissé entre des escarpements calcaires et débouche dans la vallée de l'Ak-Lom ou de Kazgrad, c'est là que passe la route de voiture d'Arnaout-Koï à cette dernière ville. Au S. d'Arnaout-Koï est un plateau sec couvert de bocages, où se trouve le village turc d'Utjuler ou Utjukleré. On en descend dans un vallon pour remonter tout de suite sur un plateau plus bas que le premier et couvert de terre noire et on observe à l'O. et à l'E. de petits monticules boisés. Un vallon courant du S. O. au N. E. barre la route à 4 1. de Kazgrad et on y passe le village turc de Bualkésen et à l/2 1. plus loin est le hameau ottoman de lîuratlaré. Situé aussi dans un petit sillon parallèle au dernier, il compte environ 80 maisons1). Alors on est déjà passé du sol tertiaire dans le terrain de craie. ') Comme il n'y avait pas d'auberges, nous nous rendîmes directement dans la maison destinée aux voyageurs et tenue par le maire turc du hameau. Lu porte de la cour était ouverte, mais on n'y voyait personne, et les habitans étant la plupart occupés dans les champs, le village était pour ainsi dire désert. Par délicatesse et dans la crainte d'y surprendre des femmes, notre Tartare appela à haute voix, enfin on entra dans la maison, qui était aussi ouverte et qui contenait deux pièces. Dans la chambre principale était une cheminée dont le feu comme les tapis du divan attestaient que quelqu'un ne l'avait quittée que depuis quelques heures. Nous fîmes décharger nos effets sous le Tschardak et attendîmes le retour de nos hôtes. Après une petite heure le fils du propriétaire vint nous saluer, ooa chevaux furent placés dans une écurie voisine et sa mère et sa soeur nous envoyèrent un excellent souper. Onze piastres, un peu plus de trois francs, soldèrent le lendemain la dépense de cinq personnes et de sept chevaux, ce n'était Pas seulement, payer le manger des bêtes, mais le Tartare l'avait réglé ainsi, et " n'y avait mot a dire. Le plateau en deçà de ce village a la largeur d'une lieue et est inculte. On en a pour la première fois la vue sur le groupe proéminent des hauteurs de Schoumla en deçà desquelles se déploient les crêtes du Balkan oriental. Le village de Vetesch-lar se trouve à l/2 1. au S. de la route dans le vallon, qui succède à ce plateau. Des buffles buvant à une fontaine à notre passage y étaient les seuls êtres vivans. Le plateau suivant est fort étendu, inhabité et en partie boisé sans haute futaie. On peut prendre depuis là une bonne idée de la configuration du pays. Au N. les plate-formes s'abaissent graduellement et ont l'air de tuiles d'un toit très faiblement incliné, tandis qu'à l'E. elles diminuent rapidement de hauteur, de manière qu'on apperçoit la baie de Varna. Vers ce côté une petite butte conique isolée ressort sur un plateau au S. E. J'aurais voulu savoir si c'était une éminence volcanique ou un Tumulus, mais il aurait fallu s'éloigner à 1 ou 2 1. de ma route, La vallée de Paravadi vue de ces hauteurs, forme un très vaste sillon. Les hauteurs de Schoumla ont de 3 à 400 p. d'élévation sur le pays environnant, leur pied est entouré d'un vallon assez évasé, d'où on monte par une pente rapide et en biais sur les collines de craie. De petits bocages de chênes en couvrent les pentes et arrivé au haut la route est obligée de décrire un coude à l'O. à cause d'un enfoncement ou d'une combe comme on dit dans le Jura. C'est vis-à-vis de ce contour qu'on a érigé une batterie. Au plus haut point de la colline sont de vastes carrières de craie exploitées pour les nouvelles bâtisses. Il y en a aussi entre ce point et la citadelle placée à l'extrémité orientale de ce plateau. Depuis cet endroit, fort animé alors par le grand nombre des ouvriers, la route décrit un grand zigzag, du milieu duquel ou a enfin la vue sur ia ville considérable de Schoumla placée dans une cavité cratériforme à demi ouverte du côté de l'E. La descente depuis ces hauteurs de 000 à 1000 p. de h. abs. a lieu en biais en ayant d'un côté des vignobles ci, de l'autre le roc crayeux blanc. Plus bas le sol est argileux et coupé par deux petits ravins. Schoumla se présente très bien. Un de ses principaux or-nemens sont une cinquante de mosquées à minarets et parmi ces dernières quelques belles Djamis ont plusieurs coupoles et même des péristyles dans le genre do la grande mosquée d'Andrinople m ou de • St. Pierre de Home. De plus huit grands bâtimens militaires frappaient déjà alors par leur étendue, leur propreté et leur style européen. Ce sont des casernes d'infanterie et de cavalerie, un bâtiment pour l'artillerie, des magasins et une poudrière. Les alentours de la ville sont du reste peu agréables surtout au S,, où la roche blanche s'élève en pente rapide au-dessus des cimetières et des maisons. Les vignobles du côté septentrional font un meilleur effet d'autant plus que là comme aussi à l'O, la craie est revêtue de gazon et même quelquefois de broussailles. A Ï'E. il n'y a que de bas coteaux en pâturage et la plaine. Les brouillards ou le peu de transparence de l'air même au milieu de la grande chaleur indiquent déjà à Schoumla qu'on est près de la mer. Les vignobles y donnent un vin blanc rosé. En parcourant les rues de cette ville qui compte au moins ses 20,000 âmes, on trouve qu'elle est plus belle de loin que de près. Lu propreté publique y était trop négligée, le pavé des rues mauvais et il y avait même en 1837 le long du petit cours d'eau, qui traverse la ville, de véritables quais d'immondices. Nous espérions trouver un logement à la poste, mais c'était impossible, car quoiqu'un édifice très vaste et contenant plus de 80 chevaux, la cour était, tellement remplie de monticules de fumier et les réduits pour les voyageurs si sales que nous poussâmes plus loin. Nous entrâmes dans plusieurs Hans avant d'arriver à en trouver un dans le quartier bulgare ou méridional, où nous fûmes fort bien. L'aubergiste bulgare avait plusieurs chambres propres pour les voyageurs dans un rez-de-chaussée séparé de son logement par un petit jardin. La grande majorité des habitans de Schoumla sont musulmans, néanmoins les Bulgares y sont assez nombreux pour avoir une église entourée d'une enceinte murée. La poste n'avait pas de chevaux à me donner, parce que Schoumla est à l'entrecroiseront de plusieurs routes fréquentées et a de longues stations à parcourir. Un ïartare était déjà dans le même cas que nous et passait son temps dans une espèce de grand Han à un étage où on jouait au trictrac, au domino et aux dés et où il y avait des danseurs zingarcs et d'autres gens encore plus vils. Nous ne fîmes qu'entrevoir ce palais royal de Schoumla pour parcourir ses environs et prendre une idée des fortifications de ce lieu célèbre. Sans en être prié, mon guide bulgare me conduisit dans la cita- IIS délie dont un officier ne me pria de sortir qu'après que je l'avais traversée. Depuis ce point le plus élevé des environs on a à ses pieds le grand village de Strandscha situé dans un vallon entre les remparts naturels de la ville et la seconde colline à l'E. Sur ce dernier côté on voit deux rangées semicirculaires de collines, la plaine qui s'étend vers Paravadi et plus loin la large vallée du Sirischen-Déré. On reconnaît sans peine dans les hauteurs blanches au S. 0. et S. de Paravadi le prolongement des crêtes crétacées de Schoumla. Elles ont environ la même hauteur et n'en ont été séparées que par une érosion marine comme le prouve la nature tertiaire des coteaux semicirculaires. Le village de Madara habité jadis par des Zingares et des filles publiques a été détruit dans la dernière guerre et c'est Schoumla qui a hérité ce rebut de la population. Schoumla est à l'intersection des routes suivantes, savoir: celle d'Andrinople à Silistria et au bas Danube, celle de Varna à Routschouk, Schistova et Widdin, celle de Bourgas par Aïdos à Tourtoukan, enfin celle qui conduit par le milieu de la Bulgarie ou par Trnava et Lovdscha de la mer Noire à Sophie. Ces voies de commerce et des opérations militaires suffiraient déjà pour en faire une place importante, sans ses avantages naturels comme grand camp retranché. Les Turcs n'ont eu que la peine d'élever des citadelles aux extrémités d'un demi-cercle de forts remparts et de couvrir de redoutes l'autre partie moins élevée du pourtour de cette cavité. (Voyez pour plus de détails ma Turquie. Vol. 2, p. 336.) Si les forteresses du Danube forment la première ligne de défense de la Bulgarie, Schoumla vient couvrir justement la portion la plus faible du Balkan. Néanmoins malgré les grandes difficultés du passage à travers le Balkan occidental, la distance de Nicopoli à Widdin paraît trop grande pour empêcher l'ennemi de pénétrer par l'Isker à Sophie et dans la Turquie centrale. Il devrait y avoir là une place intermédiaire d'autant plus que l'intérieur du pays en deçà des Balkans est totalement dépourvu de forteresses de nouvelle construction et n'a pour se défendre que les avantages naturels du terrain dans certains points. Les Pa-lanka et les fortins du moyen âge ne peuvent plus guère entrer en ligne de compte. On arrive par là à reconnaître que les Ser- bes avec les Monténégrins tiennent en main le sort actuel de l'empire turc en Europe, car s'ils se joignaient à ses ennemis du N. E. et profitaient de l'absence des Arnaoutes irréguliers dans ce moment hors de leur foyer, îIb pourraient s'emparer de la Haute Mcesie, révolutionner les Bulgares, donner la main aux Grecs de l'Epire et du S. O. de la Macédoine et déboucher enfin dans la Thrace. Les Ottomans seraient pris entre deux feux et obligés à repasser en Asie, tandis que les Bosniaques resteraient enfermés dans leurs montagnes et les Albanais musulmans et catholiques seraient tenus en échec. De grands désastres éprouvés par les Turcs sur le Danube amèneraient immanquablement ce dénouement, qui ne peut être paralysé que par les grandes puissances de l'Europe ou par une occupation passagère du territoire turc au N. et au S. Heureusement les Slaves ne sympathisent guère avec les Grecs et n'entendent point se mettre sous un nouveau joug byzantin. La route de Schoumla à Karinabad ou Karnabat est une large voie qu'on avoit raccommodée en 1837 pour le passage du Sultan. Après la sortie de la porte délabrée de la ville et semblable à une porte de ferme, on laisse à droite un beau fort avec des fossés en maçonnerie et en parfait état, mais sans garde aucune. Un peu plus loin on traverse des vignobles et on arrive à la séparation des routes allant à Karnabat et à Aïdos. La dernière va au S. E. et la première au S. S. O., on traverse une grande plaine en pâturage et on va passer à gué le Grand-Kam-tschik (Beujuk- ou Akali - Kamtscldk) à l'E. d'Eski-Stamboul (le vieux Stamboul) *). On gagne de là Tschali-Kavak par un pays accidenté et en partie couvert de bocages, ou bien on passe par Smiadova. Dans ce dernier cas on longe la rive méridionale du Petit-Kamtschik occupé surtout par des pâturages traversés par un cours d'eau venant du S. O. De Simadova on remonte le torrent qui vient de Tschali-Kavak et qui coule dans un vallon rocailleux. On le franchit environ 18 fois et passe, si on veut, par le village de Baïram. D'après la carte de Mr. Kiepert on monterait tout droit au S. sur des hauteurs par un affluent du Grand-Kamtschik à Dragoi. On y traverserait les vallons du Laskovitza et du Fa-nartschi, ainsi que la vallée plus profonde du Kutschuk-Kam- ') Je tiens cet itinéraire U'Eski-Stamboul a Amlrinoplv à" un negociaut voyageur. tschik pour monter enfin à Tschali-Kavak. Ces différens itinéraires prouvent, qu'il y a plusieurs routes. Celle tracée par Mr. Kiepert parait être l'itinéraire de Mr. Keppel, qui fît le voyage de Schoumla à Kirklissé. (Narrative of a Journey aeross the Balkan. 1831. 2 vol. in 8.) Tschali-Kavak est un gros village bulgare de 1200 âmes, au haut d'un des affluens du Grand-Kamtschik. Un des cours d'eau supérieur, qui forme ce torrent, s'appelle Bela-Reka et est séparé par une basse échancrure du vallon boisé de Jeri, dont les eaux coulent dans le Petit-Kamtschik, appelé Kutschuk- ou Deli-Kam-tschik Cette dernière dénomination signifiant la folle Kamtschik, a été donnée à cette rivière, parce qu'elle est sujette à grossir subitement, lorsque des nuages viennent à se décharger sur le Balkan d'Islivné, dont elle reçoit toutes les eaux. De plus elle charrie beaucoup de cailloux, ce que ne fait pas le grand ou doux Kamtschik, qui ne passe qu'au milieu de petites montagnes. Le Petit-Kamtschik coule dans une vallée en général très encaissée do manière que si les Turcs avaient du savoir-faire, ils pourraient aisément y construire un pont suspendu au lieu d'un pont en bois sujet à être enlevé, et on ne verrait plus des cou-riers obligés d'attendre l'écoulement des eaux pour pouvoir passer sans trop de danger. Le pont actuel n'a été établi que pour le passage du Sultan en 1837. On traverse une terrasse en ayant le Kamtschik à gauche et le petit cours d'eau de Mypadepens (?) à droite. Dobrol, village d'une soixantaine de maisons, est placé en deçà d'une terrasse au haut de la petite vallée du Kereme-tschi, qui débouche dans le Kamtschik au-dessous de Kamtschik-Magalessi et depuis là on n'a plus que quatre lieues pour arriver dans le bassin de Karnabat. Le Balkan en partie boisé se passe au moyen d'une très basse échancrure, à laquelle vient aboutir de chaque côté un vallon. A Komarova ou Koumarova la vallée s'ouvre et à la dernière descente sur Karnabat en deçà de Kadi-Keui on a une vue agréable sur cette plaine fertile, qui a de 5 à 6 1. d'étendue. Karinabad ou Karnabat est une ville surtout bulgare et grecque de 4 à 5000 âmes, qui a souffert dans la dernière guerre. De Karnabat à Papas-Koï on traverse àKara-Koughalouk le Bokloudze-Déré et on se rend à Chaf'tan par un pays en partie cultivé en blé. On longe et traverse la crête basse, agreste et, couverte de bocages, qui sépare le bassin évasé de la Tondja de ta vallée plus étroite, par laquelle les eaux du Balkan de Karnabat se rendent dans le golfe de Bourgas. A denikoï on est sur une plate-forme déboisée, mais plus loin les bocages recommencent jusqu'au-delà de Derbend. De Pa-pas-Koï à Kutschuk- Derbend on passe par une espèce de plateau inculte, dont découlent plusieurs torrens, qui se rendent dans la Tondja, mais entre ce dernier point et Beujuk-Derbend le terrain devient montueux et rocailleux avec des buissons. Kutschuk-Der-bend a 4 à 500 habitans et Beujuk-Derbend en a environ le double. Beujuk-Derbend (le grand défilé) est une gorge plus profonde que les précédentes, parce que ces montagnes sont les parties occidentales des portions les plus élevées de la chaîne côtière primaire de la mer Noire. Son torrent coule dans la Tondja et. de ses hauteurs descend au S. O. celui plus grand de Pravada, qui débouche dans la même rivière à '/2 h. d'Andrinople. En deçà de Beujuk-Derbend les collines diminuent beaucoup de hauteur et à Akbounar il n'y a plus que de petits coteaux tertiaires en partie cultivés, comme ceux qui entourent Andrinople sur le coté septentrional. A '/a 1. avant cette ville on passe sur un pont le torrent sec en été de Pravada. Le reste de la route de cette ville à la capitale a été détaillé dans l'itinéraire de Belgrade à Cons-tantinople par Widdin 1). ') Aperçu de l'itinéraire de Mr. Kcppel. De Schoumla à Dragoï 3 h, de pays plat, puis on voyage au pied du Balkan sans monter beaucoup d'abord, puis on monte et descend fortement. Chaloviteh est d ans une vallée de 2 à 3 milles de long, qui court de 1*E. à 1*0. Ensuite on arrive a la vallée du Dcli-Kamtschik. Une '/2 h. après on est au pied de l'arête du sommet du Balkan et après l'avoir passé, on descend à d'où une plaine s'étend a. Karnabat. A 2'/2 h. do là est Beglcrbané et ■ 3'/2 h. Begmahalé et plus loin Kara-Bounar. Entre ce lieu et Kibillerah il y a des hauteurs boisées de 16 milles anglais d'étendue. Entre Eakhi et Kibillerah régnent aussi des bois. Eski-l'ylos est une ancienne ville grecque avec un cas tel sur un roc. À 1 1. de la est Petra où il y a sur le sol beaucoup de blocs granitiques épars et a 3 h. de là est Kirkklisia. VIL é ' to2 j i 11 I k i DE SCHOUMLA A C O N S T A N TI N O P L E PAR AIDOS et la CHAINE CÔÏTÈRE de la MER NOIRE. Ija colline crayeuse au 8. de Schoumla a une pente très roide et n'est garnie de vignobles que près de la ville à la sortie vers Constantinople. Ailleurs une vaste plaine, couverte de pâturages et ça et là de broussailles, s'avance jusqu'à ses pieds et remonte au loin vers les hauteurs à l'E. d'Eski - Djoumaa (vieux vendredi). Cette plaine favorablement disposée pour la nourriture des bestiaux comme de la cavalerie stationnant à Schoumla, n'est maintenant qu'une terrasse étendue du bassin ancien du Petit-Kamtschik, tandis qu'elle a formé une fois le fond d'une baye marine, comme le prouvent les dépôts argileux tertiaires près d'Eski-Djoumaa. La vue qu'on a depuis là sur le Balkan montre déjà de loin le peu de hauteur de cette partie de la chaîne. Ces montagnes ont des contours très doux et des échancrures y semblent indiquer les passages près de Dobrol. Après avoir traversé cette plaine, on arrive à Zl/2 1. de Schoumla à Kcupri-Keui (le village du pont), qui n'est qu'une ferme avec quelques maisons éparses et est entouré de champs. On y passe sur un pont de bois un petit cours d'eau, qui venant de Schoumla coule dans ce point presque du N. E. au S. O. pour se rendre dans le Grand-Kamtschik. Au midi ce vallon est bordé de petites hauteurs boisées en chênes et hautes de 8 à 900 p. La route tourne au S. pour faire le tour de ces dernières et à leur pied on traverse à l/2 1. du pont le village de Kirnouva. A 1 1. de Keupri-Keui il y a une fontaine au pied oriental des collines. Un certain nombre de charriots turcs y stationnaient, et étaient remplis de femmes, d'enfans et d'effets de ménage. Nous descendîmes de là dans la vallée du Grand-Kamtschik par une très courte pente et nous y rencontrâmes de nouveau des Turcs, qui émigraient en charriots traînés par des bœufs. Tous ces voyageurs venaient de Jakova, grand village à 51. de Schoumla, que nous atteignîmes bientôt. Ses habitans avaient eu un procès avec un village voisin relativement à un droit de pâture et l'avaient perdu. Se croyant mal jugés ils avaient résolu de quitter le Paschalik, ce dont ils étaient les maîtres. C'était singulier de voir un grand village presque désert et il aurait été curieux de savoir, si cette menace a fait revenir l'autorité à quelque mesure conciliatrice ou si en effet ces gens ont été former une colonie ailleurs. Un Turc sensé à qui nous en parlions, nous dit franchement que ces paysans reviendraient d'eux-mêmes et qu'ils ne feraient pas cela, s'ils n'étaient pas des Turcs ! Il faisait probablement allusion à cette espèce d'Ottomans encroûtés de préjugés, qui paraissent en bon nombre dans la Bulgarie orientale et tiennent beaucoup à se distinguer des autres par leurs Turbans verts, couleur du prophète. Le Fess les choque, aussi les employés non militaires y ajoutent-ils un mouchoir noué autour en guise de Turban. Du reste ces Ottomans de la Bulgarie semblaient très excusables, et leur attachement aux anciennes traditions des glorieux temps de l'empire ottoman n'indiquait que leur clairvoyance, car il est certain qu'ils étaient les plus exposés à perdre leurs propriétés ou à avoir du moins leur fortune ébréchée au premier renouvellement d'une guerre avec la Bussie. La vallée du Grand-Kamtschik quoique peu élevée n'offre plus de vignes, mais elle est en grande partie bien cultivée. On remonte cette rivière par des chemins tournoyant tantôt au milieu de champs de blé, tantôt dans des bosquets. Dans un point on franchit une petite éminence boisée, qui barre la route et qui se trouve à 6'/2 1. de Schoumla, en deçà d'un petit torrent coulant du N. au S. dans le Karntschik. On traverse ce dernier à gué à 1 1- plus loin sous une digue établie en-travers de l'eau pour un moulin. Cette rivière n'y a guère que 12 à 14 toises de largeur. En deçà est le hameau turc de Kouroukheli, où il y a un ruisseau venant du S. et se rendant aussi dans le Grand - Karntschik. Les montagnes des deux côtés de la vallée sont boisées en chênes et peuvent avoir 300 à 400 p. En continuant à remonter le Karntschik sur sa rive méridionale, bordée de bocages, on arrive à 7l/2 1. de Schoumla à un ruisseau venant du S. O. et coulant au N. E. et au village turc de Jedekmale. Sur la rive opposée du Karntschik est situé Koimli, les montagnes y deviennent un peu plus hautes et présentent une belle coupe des couches crétacées inclinées au N. On quitte le Karntschik pour remonter le torrent de Jedekmale, qui débouche au S. par une gorge, dirigée du S. au N., mais à % 1. du village de Jedekmale on tourne à l'O. dans une vallée longitudinale comme celle du Grand-Kamtschik et courant de PO, à PE. au pied de la crête centrale du Balkan. Le torrent de cette dernière vallée se rend aussi à PE, dans le Grand-Kamtschik et coule dans une cavité assez large et cultivée. Ses bords comme les côtés de la vallée présentent des coupes de schistes crétacés dénudés. Les montagnes ne s'y élèvent, qu'à 3 à 400 p. sur le fond du torrent. Nous arrivâmes enfin au village de Lo-poutschka à 8l/2 1. de Schoumla et à 1400 p. d'élévation absolue. Les habîtans bulgares comptent parmi eux aussi quelques Turcs. Leurs maisons sont entourées de vergers, et des barrières sur la route empêchent leurs cochons d'aller dans les champs. Le passage de la cime du Balkan est au S. de ce village et se réduit depuis là à une ascension d'une demi-heure et les sommets sur les côtés du col ne s'élèvent qu'à environ 100 p. plus haut que ce dernier, qui est à 1800 ou 2000 p. sur la mer. Toute cette crête est boisée en chênes et comme les couches y inclinent, au S. E. la pente méridionale est parsemée de grandes plaques de rochers. La descente dure % h. ; la route décrit un grand zigzag pour arriver enfin dans un vallon encaissé et aussi boisé. On suit ce dernier, qui coule de PE. à l'O. et se rend dans le Petit-Kamtschik , en se frayant une route à travers des petits rochers de grès crétacé. On est obligé de franchir plusieurs fois ce torrent et enfin on débouche sur la petite plate-forme, où. est situé à 1309 p. de h. abs. le village turc de Tikeni, entouré de beaux arbres fruitiers et en particulier de noyers et de mûriers. Les gens du pays ne comptent que 11/% 1. de là à Lo-poutschka. La crête du Balkan, vue de ce lieu, ne paraît pas non plus fort élevée. On voit combien ce passage du Balkan est favorable à un ennemi venant du N., heureusement sa marche peut etre retardée par l'état mauvais de la route surtout dans les bois, par quelques petits accidens de terrain et le petit nombre de villages ainsi que par quelques redoutes. Depuis là on descend dans la profonde vallée du Petit-Kamtschik dont le cours est assez bien indiqué dans la carte de Vienne, tandis qu'on n'y trouve rien sur la route de Jakova à Tikeni. Lé Petit-Kamtschik court tantôt de l'O. à l'E. et tantôt du 8. au N. et occupe ainsi une série de sillons longitudinaux et de défilés garnis de rochers. Comme il avait plu à notre passage, il était, malgré son nom, plus large que le Grand-Kamtschik. On longe son bord septentrional assez longtemps en marchant d'abord de l'E. à l'O. et à 3 1. de Lopoutschka du N. au 8. A l/2 1. plus loin on trouve le village Boujala, d'où on apperçoit au N. E. les montagnes pointues du Balkan, qui ne paraissent depuis là que des sommités de 3 à 400 p. et plus à l'E. de 6 à 800 p. La vallée de Karntschik tourne de nouveau à l'O. et un torrent s'y rend en coulant du N. O. au S. E. Ce n'est qu'à 4 1. de Lopoutschka rpi'on arrive au moulin, où cette rivière est guéable. Pour atteindre ce point il faut s'éloigner un peu des rives trop encaissées de la rivière et franchir un mamelon, d'où une descente sur un sol argileux conduit à ce gué. Le meunier nous félicita d'être arrivé en temps opportun, car la rivière grossissait à vue d'oeil et bientôt on n'aurait pu la passer. II est très essentiel d'avoir un guide pour guéer l'eau, car une digue étant tirée à travers la rivière pour le moulin, l'eau est très profonde sous cette chaussée. On franchit d'abord le cours d'eau du moulin,, qui est assez profond, puis on arrive en deçà d'un petit filet d'eau à un amas de gravier, d'où on traverse le bnis principal du Karntschik très en biais du N. O. au S. E. au moyen d'un banc de cailloux. Un pont suspendu y serait bien à sa place. En deçà est le village turc d'Iskodua, qui est situé sur une petite plate-forme, d'où on voit bien le contrefort méridional de la crête principale du Balkan, c'est-à-dire, les montagnes pointues et boisées sur les bords inférieurs du Petit-Kamtschik. Près de ce village leur hauteur ne pouvait guère excéder 300 p. au-dessus du point d'observation, à environ 1000 p. de h. abs. Ce village n'a pas d'auberge, mais le paysan le plus aisé du lieu tient maison ouverte pour les voyageurs. Au S. d'Iskodna on se rend dans la vallée de Boghaz-Déré (le vallon du défilé), qui court du N. au S. et offre à '/2 !• d'Iskodna un moulin. Ce vallon étroit et boisé se termine par des rochers arénacés, qui forment une espèce de porte, d'où vient son nom. Après cela la vallée s'élargit beaucoup et tourne à l'E. et on arrive à Boghazdéré-Keui, village à 5 1. de Lopoutschka. On traverse en biais la plaine en pâturage, qui couvre le fond de cette partie de la vallée, au N. de laquelle il y a des crêtes boisées de 800 p., tandis qu'au S. il y a un plateau assez large et ayant 1423 p. d'élévation. La pente de ce dernier est peu considérable et le haut du plateau est inculte et couvert ça et là de bocages. Quoiqu'il ne soit pas fort élevé, on en a une vue étendue sur les Balkans: les plus hautes sommités au N. paraissent être celles sur le Petit-Kamtschik et ont l'air d'avoir 800 à 900 p. de plus que le plateau, tandis que les montagnes plus près de ce dernier n'ont guère que 300 p. de plus. Au N. O. on distingue aussi vers le Balkan de Karnabat quelques petits sommets plus élevés que le point où on se trouve. La plus jolie vue est celle au haut de la descente, qui conduit dans la plaine d'Aïdos. C'est l'affaire de 20 à 25 minutes pour atteindre cette dernière par un chemin pierreux et dans des bocages. Ce dernier comme bien des endroits de toute cette route ne comporterait que difficilement un voyage en charriot. Néanmoins les gens du pays y descendent avec leurs charrettes, aussi bien qu'ils traversent de même tout le Balkan par la route décrite. Le cul de sac derrière Aïdos est couvert d'assez beaux champs, dont la richesse contraste avec la laideur des rochers py-roxéniques noires et nus sur ses côtés et avec l'aspect uniforme des derniers échellons du Balkan. 11 nous fallut encore près d'une petite heure pour atteindre Aïdos, et chemin faisant nous rencontrâmes trois dames turques, qui erraient toutes seules dans la campagne. Au S. d'Aïdos se trouve le cimetière de la ville et un pays peu ou mal cultivé. Nous avions déjà eu occasion de remarquer depuis Schoumla qu'auprès de tous ces villages turcs et bulgares les champs n'étaient pas si bien tenus et si dépourvus de ronces que dans la Mœsie. Kitschalik est un hameau situé à 760 p. d'élévation absolue au pied d'une butte pointue de porphyre pyroxénique à 1 1. d'Aïdos. À peu de distance de là on entre dans de petits bois de chênes auxquels succède jusqu'à Rousoukastro un plateau totalement inhabité couvert de très hautes herbes ou bien de bocages de Paliurus et de chênes. Une espèce de Fertile de 7 à 8 p. de h. y faisait un singulier effet. Nous y surprîmes des daims. On comprend que dans un tel pays on ne craint pas d'aller tout droit à travers les champs sans suivre les routes. Aussi ne touchâmes-nous pas l'endroit où était jadis Benli, village détruit dans la dernière campagne des Russes et sur le Kabasalar-Déré, qui coule de l'O. à l'E. dans la mer Noire. En deçà du petit vallon d'Aschlar-Déré ou de Rousoukastro (t. Rousoukaster) la route passe par un autre plateau tout aussi sauvage mais plus boisé. Après une pelouse couverte surtout d'une belle espèce rouge et élevée de trèfle, on s'enfonce dans une véritable forêt de chênes ornée ça et là de lis et de grandes mauves à fleurs rouges. Cette éminence est composée comme la précédente de roches pyroxéniques, qui ont formé par leur décomposition un sol noir très fertile. Les plus belles cultures pourraient d'autant mieux y réussir que le voisinage de la mer y entretient toujours une certaine humidité dans l'atmosphère et assurerait l'écoulement de leurs produits vers la capitale. Jadis ces fertiles terrains étaient probablement habités et utilisés. Un gouvernement rationnel trouvera un jour à faire des profits considérables par leur vente à des colonistes industrieux. Ce n'est qu'une bien petite partie des territoires fertiles, que les Turcs pourraient donner en hypothèque pour un emprunt. Kara-Bounar (la fontaine noire) est situé à 4 1. d'Aïdos à «10 p. de h. dans la vallée peu large du Bakloudscha-Déré coulant de l'O. à l'E. et recevant peu au-dessous de ce hameau l'eau du Derbend-Déré. Des bois couvrent les coteaux au 8. et des prés ceux au N. Il n'y a guère qu'une soixantaine de maisons. On monte sur le plateau au S. de ce village par une gorge assez rapide et graveleuse et on voyage de nouveau au milieu de belles forêts, d'où on n'a d'autre vue que celle des arbres qui vous entourent. Ce sont surtout des chênes avec quelques frênes et des cormiers. A I '/2 I. avant Fakhi on arrive au plus haut point du plateau granitique, savoir à 1183 p. de h., où nous trouvâmes un boulet indiquant que les Russes avaient passé par cette route. On y remarque aussi quelques restes d'un ancien pavé peut-être grec. La descente vers Fakhi est brusque, mais arrivé au bord du médiocre torrent du Fakhi-Déré coulant à l'E. et au N. E., il faut encore franchir une petite crête avant d'appercevoir ce village, qui comme tous ceux de ce pays, est situé dans un vallon. Notre arrivée y mit en émoi tous les chiens et nous atteignâmcs ainsi escortés la maison du Bulgare, où nous avait logé le Sou-baschi turc. Un Tschardak ouvert devant une petite maison fut notre chambre à coucher et une petite pelouse, qui s'étendait vers le torrent notre promenade du soir l). Fakhi est un village bulgare et turc d'environ 1G0 maisons ou 600 habitans. Les hauteurs qui environnent, la vallée de Fakhi n'ont que 300 p. au N. et 500 p. au S. La route dans cette dernière direction traverse de beaux pâturages jusqu'au-delà de Pe-tschiomalé, où on voyage à une hauteur de plus de 2400 p., si on peut se fier à une seule mesure barométrique. A 2l/2 1. de Fakhi on franchit un petit vallon rocailleux et un torrent coulant du N. au S. Petschiomalé est un hameau bulgare situé à 4'/2 de Fakhi, au-dessus et au N. du Petschiomalé*Déré, torrent assez encaissé entre des escarpemens et coulant du N. au S. et plus loin de l'O. à l'E, Un honnête paysan nous y donna à déjeûner et nous reçut avec cette véritable hospitalité qu'on ne comprend guère plus dans les contrées où il y a des auberges. Malgré la chaleur nous continuâmes à marcher dans ce pays où on ne trouve plus que des broussailles et des prés. A 2 1. de Petschiomalé on traverse le ruisseau du Téké - Déré coulant presque du N. au S. et plus loin après un autre vallon, on atteint un vaste plateau d'environ 2000 p. d'élévation, il est couvert de bocages de chênes et d'épine Porte - chapeau (Paliurus) sur un sol graveleux. Ce genre de terrain règne sur presque tout le pied occidental de la chaîne côtière de la mer noire. Ce premier ') Pendant la nuit on nous vola un petit sac, ou on donne a manger aux chevaux et qui contenait une pipe et un gobelet, nous ne pouvions avoir des soupçons que contre le postillon, un Zingarc, a qui le Tariarc avait appliqué quelques coups de fouet en route pour le rendre plus attentif. Il avait pu vouloir se venger ou croire que ce sac était le sien. Néanmoins le courier ne pensait pas qu'un postillon ait pn lui manquer a ce point, de respect et il en accusait h bcau-tils de notre hote, qui par jalousie avait été un peu bourru. plateau est dominé à l'E. par trois sommets isolés et à PO. par une cime et des collines s'étendant environ de l'O. à l'E. Les cimes isolées paraissent être le Gœk-Tépé de Mr. Kiepert en deçà de PAï-Déré. qui coule dans le Velika-Déré et la mer Noire. Deux lieues avant Erekli est le ruisseau de Kutschatalera-Sou, qui coule de PE. à l'O. et à % de 1. de là à PE. est le village de Tastapé situé au pied des coteaux. Après cette petite cavité, on est de nouveau sur un plateau du même genre que le précédent, mais encore plus rocailleux; à l'E. se voient de petites hauteurs gazonnées à sommets rabattus. Probablement à cause des ondulations du terrain, je n'ai pas apperçu Kovtschat sur le Foun-dikli-Déré de Mr. Kiepert. Erekli est un petit village turc de 150 maisons avec une mosquée, il est situé dans une vallée dont les eaux coulent au S. O. ; le cimetière se trouve sur le côté septentrional du ruisseau. A 1 1. à l'O. en deçà du Téké-Déresi la ruine d'une vieille tour grecque sur le haut d'une petite montagne forme l'objet le plus en vue. Quelques champs entourent Erekli. Le plateau entre Erekli et Kirklissé est couvert de rochers grotesques de granite, dont quelques-uns présentent des blocs mobiles ou troués de part en part. Mr. Kiepert indique sur cette route trois torrens ou affluens du Téké-Déresi, savoir : le Jeri-Déré, le Sirsabat-Déré et Kitenli-Déré, ce ne sont dans tous les cas que des ruisseaux à sec en été, qui ont pu m'échapper. La plaine de la Thrace méridionale est égalée à la vue du voyageur et ce point est excellent pour prendre une idée de l'état de ce pays, lorsqu'il ne formait qu'un golfe marin tertiaire. Une pente très insensible comme celle d'un rivage et un sol graveleux comme celui d'une berge marine conduit à des vignobles établis sur un terrain argileux ou une fois vaseux. On respire de revoir un beau pays bien cultivé après avoir parcouru tant de solitudes, où un corps d'armée ne devrait trouver guère que des fourrages, si la mer n'était pas si voisine et ne pouvait lui fournir les approvisionnemens nécessaires. En deçà des vignes le calcaire blanc tertiaire ressortant de terre offusque les yeux et se prolonge jusques dans la ville de Kirklissé situé à 703 p. de h. abs. sur deux éminences sur le bord de la vallée de PIskipé-Déré 1). ') La peste étant, dans cette ville, nous aurions bien évité d'y coucher, fii cela avait été possible, mais Erekli était aussi infecté et si nous aurions pu bi- 9 Kirklissé (quarante églises) est une ville ouverte de 18 à 16,000 âmes avec six mosquées, dont deux sont belles et à plusieurs coupoles. Il y a aussi des églises grecques, un bazar, assez de boutiques ; les confitures en sont renommées. La population est un mélange de Grecs, de Bulgares et de Turcs. Depuis là les voyageurs se dirigent à l'ordinaire sur Andrinople , mais je voulais , risque à passer pour un original aux yeux des Turcs, aller tout droit à Constantinople. Cette détermination de ma part donna lieu à de longs pourparlers, qui vinrent s'ajouter aux autres agrémens de ce séjour. Notre Tartare lui-même désireux de se reposer dans la capitale était contre moi et les postillons ne voulaient pas marcher à cause des prétendus voleurs sur la route latérale, que je voulais prendre. On y avait vu dernièrement des traces de sang, probablement de quelqu'un qui avait saigné du nez. Je tins bon et, patientai sans me fâcher nullement, parce que c'est la plus mauvaise argumentation en Turquie, le vulgaire vous taxant de suite de fou et perdant le respect qu'il vous est dû. Enfin le jeune fils du Menzildgi fût obligé de monter à cheval et nous partîmes. La route passe par une bonne partie de Kirklissé, qui est bâti sur une pente très douce, ensuite on traverse des vignobles et des cultures et après avoir franchi le ruisseau de vouaquer sans manger, nos chevaux déjà bien maigres demandaient à être nourris. D'ailleurs si nous n'avions pas couché à Kirklissé, nous n'aurions pas été sûrs d'avoir le lendemain des chevaux dans ce pays, où les pâturages sont quelquefois loin des villes. Evitant donc les Hans nous nous rendîmes a la poste, où nous ne trouvâmes qu'un des plus affreux locaux, où nous ayons jamais couché. C'était le pendant de la poste de Schoumla sur une plus petite échelle. A côté d'une véritable montagne de fumier était un Tschardak ou une galerie ouverte, dont le plancher troué et la barrière endommagée attestaient la vétusté, mais le pire était l'es-calier-échelle, qui y montait, à cause des marches manquantes. A ce contre-temps se joignit encore la circonstance importante que le soleil était couché. L'Akscham avait fait fermer toutes les boutiques et notre hôte, le Menzildgi, était déjà dans son harem, néanmoins un de ses domestiques, son Kiaya peut-être, nous disait du ton le plus grave qu'il était prêt à nous procurer tout ce que nous désirerions Avez-vous de la viande? Non. Avez-vous des poulets? Non. Avez-vous du lait? Non. Enfin à force de passer en revue le menu d'un repas turc, nous parvînmes à voir que nous serions bien heureux si en interposant l'autorité de notre Tartare nous pouvions appaisser un peu notre faim avec une croûte de pain, du fromage blanc, un peu de vin et du café. Le lendemain il n'y eut pas non plus moyen de boire le café au lait, parce que les Turcs prétendaient que les Grecs avaient la peste et que c'étaieut eux seuls qui vendaient du lait. l;vi Beujuk-Déré et l'extrémité d'une colline de gneiss on atteint un petit bois de haute futaye. C'était là le lieu terrible, où nous devions avoir l'occasion d'essayer nos pistolets. Le Tartare, qui tenait les siens toujours cachés sous un morceau de drap, les mit â découvert et était prêt à faire sa besogne. Mais nous ne vîmes que quelques tombes éparses, qui nous prouvèrent qu'en effet on avait jadis arrêté quelquefois les voyageurs dans ce point assez bien placé à cause de son isolement des habitations et les contours décrits par la route au milieu de cette forêt. Nous fûmes bientôt hors de ce bouquet de grands arbres et continuâmes gai-ment notre route des voleurs à travers un pays tout ouvert au S. E. duquel s'élèvent des hauteurs de 5 à 600 p. En approchant du village grec de Jena nous vîmes de loin un parapluie, et pensions avoir la rencontre de quelque voyageur franc, mais ce n'était qu'un Turc à cheval, qui paraissait trouver dans ce pays si sec nos parapluies très commodes comme parasols. Jena est dans une plaine bien cultivée, qui forme un anse au pied des coteaux; après y avoir pris un verre de bon vin rouge chez un aubergiste grec, nous galoppâmes sur Bounar-Hissar, qui est à l'autre bout de la plaine au pied des coteaux de calcaire tertiaire blanc. Des vignobles se voyent à l'E. de la route. Bounar-IIissar (fort de la fontaine) est un grand bourg grec avec un certain nombre d'habitans turcs. La structure massive de beaucoup de maisons en pierre et les rues pavées indiquent assez que cet endroit a dû être une fois plus important qu'à présent. La ruine d'un château fort, pris par les Turcs sur les Grecs, donne la date du déclin de ce bourg, qui ne compte guère que 2 à 3000 âmes. Nous nous y rendîmes chez l'Agha chargé de procurer des chevaux, car le Menzil ou la poste organisée avait cessé dans cette direction. B nous reçut dans son divan et se mit tout de suite en quête lui-même pour nous satisfaire. En attendant nous allâmes dîner dans un flan voisin établi très pitto-resquemment à côté d'un cours d'eau vive. Nous y comprîmes ce qui avait valu à la ville son nom. Là, étendus sous une treille, ûous jouissions de tout ce qui fait les délices de l'Ottoman, savoir de la fraîcheur, quand le soleil est brûlant et d'une eau délicieuse. Cette station était une compensation pour celle si mauvaise de Kirklisse. Un bon dîner nous mit en si bonne humeur y* qu'un de mes compagnons se mît à répondre par des baisers aux œillades des dames aux fenêtres au grand scandale des Ottomans, qui étaient dans la rue. A 3/4 de lieue de Bounar-Hissar est le lieu appelé Téké. A en juger d'après les citernes écroulées cet endroit a pu être jadis un bourg, aujourd'hui on n'y voit plus qu'un pays couvert de broussailles , au milieu duquel il y a une petite mosquée et vis-à-vis un bâtiment carré entouré d'une muraille. La mosquée n'est que le monument qui recèle les restes du général Achmed, le conquérant de ce pays, et ceux de quelques-uns de ses parents. Une natte entoure le tombeau afin qu'on puisse y prier. Un cimetière est autour de cet édifice, qui est un lieu de pèlerinage et le bâtiment carré sert à héberger alors les dévots. Mon Tartare, en fidèle Ottoman, ne manqua pas de s'agenouiller et de prier avec ferveur que le bon Dieu voulût envoyer de nouveaux héros de cette espèce, car il pensait qu'il en était grandement temps. Qui sait s'il ne pria pas pour le Pascha d'Egypte, qui était en 1837 l'idole et l'espoir de beaucoup de Musulmans. A côté du cimetière se trouve une touffe de platanes énormes à l'ombre desquelles coulait jadis une fontaine, maintenant elle est détruite, mais la source existe toujours et est aussi fraîche et excellente que toutes celles, qui sourdent au contact des sols tertiaire et ancien le long de la chaîne cotière de la mer Noire. Cette dernière crête abritant assez cette contrée contre les effets délétères des vents du N. E., elle présente une végétation presque méditerranéenne comme les bourgs de ce pays ont déjà ce je ne sais quoi de méridional. A 2 1. de Bounar-Hissar est le village de Tourouschak après lequel on passe sur le dos de collines graveleuses et couvertes en bocages de chênes. Leur plus haut point paraît s'élever à 1000 p. sur la mer ou à 300 p. sur la plaine voisine, qui s'étend au loin à perte de vue. Ail. avant Visa les hauteurs forment un cul de sac, et on est surpris tout-à-coup par l'aspect pittoresque de cette ville bâtie semi-circulairement autour d'une proéminence avancée des montagnes à l'E. Cette dernière supporte un château ruiné et domine une vaste plaine couverte de Tumulus. Le pavé étroit, qui descend de la colline à cette ville, est peut-être un ouvrage grec. Après cette descente, qui dure une petite demi-heure, on voyage à travers un pays cultivé et ombragé ça et là par de beaux noyers. Un torrent coule près du pied de la colline, vient de l'E. et se jette dans l'Erkéné à Sinaki. Nous montâmes tout de suite dans la partie la plus élevée de la ville au Konak de l'Àyan non loin du château. Ce vénérable Turc nous reçut très poliment et nous envoya loger chez une famille grecque dans le bas de la ville. Il fallut donc redescendre ces pavés inclinés et sortir de nouveau de l'enceinte de l'ancienne ville, dont on voit encore les énormes murailles bâties en briques. Le jardin de l'Ayan est soutenu par une partie de cette épaisse fortification. La plus grande partie de la ville est au pied de la butte sur son côté est et sudest. Sa population peut aller à 5000 habitons principalement grecs l) Arrivé devant la porte de nos hôtes grecs, on ne voulut pas d'abord nous laisser entrer ; enfin la porte de la cour s'ouvrit à deux battans , mais on voyait clairement que notre arrivée avait jette l'épouvante. De jeunes femmes se sauvaient do la maison principale dans une dépendance, des portes communiquant avec d'autres habitations se formaient avec des cris de désespoir, et la maîtresse du logis, une grosse Grecque habillée en pantalons attachés très haut a la turque, se présentait à nous en se tenant à distance et faisant aller sa laugue avec une volubilité sans égale. A force de parlementer et de la rassurer que nous n'avions pas la peste et que nous ne l'avions pas même prise à Kirklisse, elle consentit enfin, puisqu'il le fallait, à nous loger et nous colloqua dans la salle très chaude, où elle élevait des vers à soie. Notre Tartare , qui connaissait depuis longtemps les ruses des Grecs , ne se laissa pas mener par le nez et devinait déjà que la maison principale contenait des appartemens plus convenables. Enfin après une demi-heure de bavardages nous étions établis dans un premier, où il y avait un grand divan, sur lequel débouchaient plusieurs chambres. Le divan était une espèce de Tschardak avec des fenêtres et des contrevents , et le plafond était formé par le toit; il était garni de jolis tapis et de cousins et à côté se trouvait une énorme pile de couvertures, do tapis et de cousins pour la nuit. Aimant l'air, ûous voulûmes ouvrir davantage de fenêtres , mais on nous avertit charitablement rltie la peste était dans la maison a côté et qu'elle pouvait arriver par la fenêtro 'fuc nous voulions ouvrir. Petit à petit nous fîmes connaissance avec toute la famille, qui paraissait à s°u aise. Nous eûmes à nous louer beaucoup du talent culinaire des Grecques, qui °nt bien plus de tact pour les ragoûts que les Serbes, mais nous no pûmes nous entendre pour la fermeture des fenêtres, qui devaient être tenues closes la nuit, Parce que la peste entrait surtout à ce moment dans les habitations. Nous avions t>eau faire semblant de dormir pour nous donner de l'air quand nous jugerions nos argus endormis, mais ces dames étaient plus fines que nous et ne cessèreut Pour aller de Visa à Midia on n'a qu'à franchir les petites crêtes boisées à l'E. de la ville et de descendre le Tolopaz-Déré, mais pour longer de là la mer Noire jusqu'au Bosphore il faut avoir ses chevaux , car il n'y a point de poste sur ses côtes ni même de moyens de pouvoir s'en passer. L'Àyan de Visa nous avait procuré des chevaux pour Seraj, qu'il avait fait prendre à Pierre et à Paul et confié à un habitant contraint aussi de fournir une bête. La route de Visa à Seraj se fait en plaine cultivée ou au milieu de pâturages et en se tenant assez loin des collines à l'E. On y remarque encore quelques sommets en cônes évasés que Mr. Kiepert a figurés sous le nom de Bei-Tépé et au N. du Tschaliga-Déré. Les villages turcs d'Er-véni (Evrenli) et de ïschakerli sont à 2 1. de Visa à l'E. de la route et plus loin est le village de Kavatli (Kabakli). Avant de l'atteindre on passe l'Erkéné, qui coule du N. E. au S. O., tandis que plus haut il roule ses eaux du N. O. au S. E. en deçà des collines du Kara-Tépé à l'E. et au N. E. de Visa. Seraj ou Saraj est un petit bourg d'un millier d'habitans et entouré de prairies. On y remarque un bâtiment pour une salpê-trière, une mosquée et un vaste Konak délabré, où. demeurait jadis l'Agha, mais comme tant d'autres endroits des côtes de la mer Noire, Seraj paraissait avoir souffert de la dernière guerre. L'Agha habite un petit rez-de-chaussée et nous reçut avec beaucoup d'amabilité, mais il était hors d'état de nous donner des chevaux avant quelques heures. Un de nous voulut alors forcer l'homme qui était venu avec nous de Visa d'aller plus loin ; mais ce Grec répondit toute de suite que lors même que l'Agha voudrait lui faire couper la tête, il ne ferait pas un pas de plus. En effet il n'en avait pas l'ordre et on avait grand besoin des chevaux pour les moissons. En attendant que les chevaux fussent trouvés, l'Agha nous fit servir un petit dîner dans un pavillon de sa cour, le seul lieu où leurs lamentations et leur historique sur la peste que quand nous eûmes accédé à leur demande d'étouffer plutôt que d'ouvrir la porte à ce terrible démon. Sachant que l'un de nous était médecin, elles ne nous auraient pas laissé partir, je crois, si nous ne leur avions pas laissé des préservatifs immanquables contre la peste et la stérilité, et leurs offres sur ce dernier chapitre étalent uniques en leur espèce, aussi notre Tartare se lamentait de n'avoir pas leur confiance médicale. on pouvait se mettre à l'ombre, car il n'y a pas d'arbres dans ce bourg. Après cela nous parcourûmes les environs au S, Al 1. dans cette direction est une ferme ou Tschiftlik entouré de quelques arbres et à l'/4 1. plus loin le grand village de Karlouk (mal placé dans la carte de Mr. Kiepert) ; puis en deçà du vallon assez encaissé du Marouka-Déré, affluent oriental de l'Erkéné, est un plateau tertiaire de 925 p. d'élévation absolue, qui domine assez la contrée, pour qu'on puisse depuis ce point prendre une idée du pays. Les voyageurs doivent s'attendre aux mômes délais à Jeni-Koï et Tschataldscha, de manière que cette route n'est à conseiller à personne, à moins qu'on ait du temps à perdre et à risquer une journée pour chaque poste. La route ne se rapproche des collines que vers Jeni-Koï, d'où on a à franchir les hauteurs sur lesquels des débris de murailles indiquent l'ancienne place du mur d'Athanase. Les coteaux d'Indschigis et de Tschataldscha sont tout aussi dépourvus de bocages et d'arbres que ceux aux environs de Tschorlou. On passe ensuite le vallon du Karasou-Déré (vallon de l'eau noire) et un autre torrent, qui traverse presque toute la péninsule et prend ses sources au Kousch-Tépé, hauteur au bord du lac de Delkos. Tous les deux se jettent dans la lagune de Beujuk-Tschekmedsché et on peut aller tout droit à Constanti-nople ou bien par ce dernier lieu. VIIL B j $ ji à121 ÏÏt suit I.A ROUTE de MATSCHIN ou TOULTSCHA à BOURGAS PAK PARAVADI ou VARNA. Nous ne citons cette route importante que pour la recommander aux voyageurs futurs, car ceux qui l'ont parcourue n'ont guère publié d'observations notables. B serait bien temps qu'on connaisse positivement la structure physique et géologique du Besch-Tépé ou de ces hauteurs assez considérables entre 7 à 800 p. d'élévation entre Matschin, Isatschi, Toultscha et Babadagh. A Matschin même il y a des falaises de 30 à 40 toises de hauteur. On ignore aussi la constitution de l'île aux serpents au-devant du débouché du Danube. La steppe tertiaire et alluviale du Do-broutscha réclame encore son observateur de détails. On sait seulement que ce terrain souvent aride est, ça et là, assez élevé au-dessus de la mer et qu'il se termine par de petites falaises ar-gilo-sableuses, soit sur le Danube comme à Ilirsova, soit sur la mer Noire comme à Koustendsche. L'eau y manque en été dans beaucoup de localités et la population y est fort clair-semée, surtout depuis que les Russes en ont transporté une partie des ha-bitans dans les îles du Delta du Danube que les Turcs ont eu la bévue de leur céder. B y a assez de bergers. Par contre la route de Rasova à Koustendsche a été souvent décrite. Hadgi-Oghlou-Bazardschik est sur une plate-forme au S. du Taban-Déré. C'est, dit-on, une ville de 5000 habitans, la plupart Musulmans, et il y a une dizaine de mosquées. Les environs sont cultivés et il y a des jardins autour de la ville. La route de cette ville à Koslidscha est oouverte de beaucoup de bocages et passe sur plusieurs plate-formes crétacées, qui augmentent un peu en hauteur en allant du N. au S. Koslidscha est un bourg de 3000 habitans, surtout Mahométans. Depuis là on va gagner le Sirichen - Déré et Paravadi, on traverse de basses hauteurs pour atteindre la vallée du Kamtschik, on coupe PEminé-Balkan par celle du Delidsche-Sou et on descend dans la large cavité du Nadir-Déré, qui n'est séparée d'Aïdos que par une plate-forme basse et couverte de petits bocages. (Voyez: Originalnachrichten und Beobachtungen ùber den Schauplatz der Kriege zwischen Bussland und der Pforte par un militaire. Berlin. 1829. in 8°. avec une assez bonne carte en 2 f. Si on passe par Varna on s'y rend de Bazardschik en traversant de bas plateaux, qui viennent mourir vers Téké-Koï, le lieu du tombeau de Vladislas IV, roi de Pologne, et voisin du champ de la malheureuse bataille du 10 novembre 1444, où furent battues les troupes réunies hongroises, polonaises et valaques, événement, qui acheva d'établir définitivement les Turcs en Europe. Un plateau plus élevé sépare le golfe de Varna du Kamtschik qu'on passe à gué pour gagner Foudoukli. On est alors au pied des crêtes de l'Hœmus, qui viennent se terminer assez brusquement sur le rivage de la mer Noire par l'Eminé-Dagh dont les sommets n'atteignent guère que 2000 p. On en peut faire le tour en se tenant à une certaine élévation au-dessus de la mer. C'est le chemin qui passe par Kasak-Koï et Eminé et débouche sur Mi-sivri et Achioli. Outre la vallée du Kasak-Déré il traverse plusieurs gorges et ravins et offre, m'a-t-on dit, des vues assez agréables sur les rivages escarpés. Une voie plus directe est celle par des lieux plus élevés, savoir par Dervisch-Jovan, Arnaoutlar et Aivadschik, village situé au milieu du Balkan dans la vallée du Kasak-Déré. De ce point °n a encore à passer une mince crête du Balkan, et on descend assez rapidement dans la plaine du Taschi-Déré ou Hadgi-Déré de Mr. Kiepert. Entre le fond de cette ancienne baie marine et la plaine de Bourgas on n'a plus qu'une très basse plate-forme sauvage et aride. T H R A C E. IX. de TATARBASARDSCHIK ou de PHILIPPOPOLI a BOUR-GAS par KALOFER, ESKI-SAGRA, JAMBOLI et AIUOS. u ne plaine alluviale très unie et presque dépourvue d'arbres s'étend au N. de la partie de la Maritza entre Tatarbasardschik et Philippopoli. Elle est arrosée par six cours d'eau, savoir: le Harman-Déré, le Kouslou-Déré, le Troutscha réuni à l'Alvan-Déré, le Koumsou-Déré (val de l'eau à sable) et le Vopdsché de Mr. Kiepert ou Jopsou de la carte de Vienne. Si l'on part de la première ville, on emploie 24'/1d'h. pour atteindre Eski-Sagra, tandis que depuis Philippopoli ce n'est qu'une course de ÎQ1/^ h. La route la plus courte depuis Philippopoli est naturellement celle par Papazli, Tschirpan et Pascha-Déré dans le haut du Sloujou-Déré, auquel Mr. Kiepert donne le nom de Sasli-Déré. C'est un trajet de 1S à 16' h. Mr. Frère et un habitant de Turquie, qui avaient l'ait ces diverses routes, ont eu la complaisance de me communiquer à cet égard quelques détails. Si on part de Tatarbasardschik, on se rapproche des basses hauteurs, qui sépare le pied immédiat du Haut-Balkan de la plaine alluviale et on y franchit successivement ses six torrens. On y rencontre ou plutôt on passe dans les environs de bon nombre de villages surtout bulgares, dont quelques-uns se trouvent seulement sur les cartes, tels que Tchernagora sur le Kouslou-Déré, Kara-Mnustaphlar sur le Koumsou-Déré, Demirschiler et Pavla. D'autres villages restent cachés surtout dans les vallées boisées remontant vers le Haut Balkan (Kodja Balkan). Depuis Pavla on se rend à Bidga ou Lisa (?) dans la vallée du Raschka, qui porte aussi ou plus bas le nom turc de Vop-dsché. Si on part de Philippopoli on gagne Bidga par Tschoban-Bounar (le puits du berger) en remontant la vallée duVopdsché. Il y a là des eaux chaudes hydro-sulfureuses. Il est évident que la carte de Mr. Kiepert est fautive dans ce point de la route et celle de Vienne assez juste, car Mr. Frère m'a positivement assuré qu'après avoir traversé le partage des eaux aux sources de la Raschka et de la Tondja, on passait au village de Kalofer. Or j'ai vu ce col depuis la plaine supérieure de la Tondja et j'ai pu estimer la hauteur des montagnes boisées voisines à 2900 p. de h. abs., mais Bidga étant déjà dans la montagne (à 1500à 1000 p.?) et le bassin de la Tondja ayant une altitude de 1700 p. on arrive à la conclusion que ce passage a lieu à travers une assez basse échancrure, comparativement au moins au Haut Balkan. Depuis ce col (d'environ de 2200 à 2400 p. ?) la vallée des sources de la Tondja conduit assez graduellement le voyageur jusques dans la plaine alluviale et verdoyante de Tschipka et de Kezanlik, d'où, on coupe tout droit sur cette dernière ville. Il y a plusieurs villages sur cette route, j'en ai apperçu moi-même. Ayant déjà communiqué l'itinéraire de Kezanlik à Eski-Sagra, je me suppose p.irtant de cette ville. On se porte à l'E. en longeant le pied de la chaîne N. d'Eski-Sagra et on traverse une suite de jardins et de belles cultures. A l/2 1. de la ville on franchit une proéminence de calcaire intermédiaire et on passe un ruisseau, qui coule du N. au S. Al l/2 1. plus loin est le village de Resta et après cela celui de Durbok, qui est habité par des Musulmans et orné de noyers. Un autre ruisseau y traverse les pâturages en sortant aussi au N. ou du prolongement oriental de la chaîne d'Eski-Sagra. Ces montagnes peuvent avoir encore 1000 p. et près de leurs bases il y a des collines de 4 à 500 p. Elles portent dans le pays, dit-on, le nom de Gradista. A 3 1. d'Eski-Sagra il y a au N. de la route un village turc avec une mosquée et un de ces singuliers Karaouls, où le premier etage déborde sur la tour carrée qui le supporte. B était tout délabré. La plaine en grande partie en pâturage paraît inclinée un peu à l'O. et il s'y trouve un ruisseau qui coule du N. au S. On laisse à gauche le village de Kirkoï, qui est placé à la sortie d'une gorge calcaire à % del. à distance de la route. Karabounar, la fontaine noire, est un autre village à 3% L d'Eski-Sagra et un peu plus loin on distingue après 1% b au N. de J a route un autre village turc, d'où vient un ruisseau coulant N.-S. La chaîne au N. de la route s'abaisse considérablement depuis ces environs et à distance des montagnes les cultures font place à de vastes pâturages ayant un sol noir, indice du séjour ancien des eaux. On y entretient beaucoup de bestiaux. Les puits qui y sont pratiqués n'ont guère de bonne eau, parce que comme dans la plaine de Hongrie on ne les creuse pas assez profondément. Jeni-Sagra est un petit bourg turc, qui par ses rues non pavées et très larges ressemble assez à un village magyare. Il peut contenir un millier d'âmes. Il y a une mosquée et un Ayan. Entouré d'excellens pâturages on comprendrait qu'on dusse y trouver du beurre, mais en Turquie rien ne nous a plus étonné que ce beurre frais de Jeni-Sagra, car nous n'en avons pas revu ailleurs *). Les montagnes qu'on voit au N. de Jeni-Sagra, portent le nom de Bairdagh et ont l'air d'avoir de 3 â 500 pieds de hauteur. A 1 L au S. E. du môme bourg commencent les petites crêtes, qui se prolongent jusques vers Jamboli. Elles se présentent sous la forme d'une colline allongée de 150 à 200 p. d'élévation et s'é-tendant du N. E. au S.O. sur un espace d'une lieue de terrain. Plus loin â l'E. dans la plaine on distingue une seconde série de crêtes ou plutôt deux crêtes semblaient n'en faire qu'une. Leur hauteur paraissait aller de 100 à 300 p. et elles occupent un espace de 2 à 3 lieues de longueur. ') Nous logeâmes chez le maître de poste, qui nous fit faire un véritable régal pour la Turquie, puisqu'à la soupe de ris au poulet vient s'ajouter une oie rôtie, des haricots verts, du laitage et du beurre. N'ayant pas de vin, il fallut qu'il entra en pourparler à cet égard avec l'intendant de FAyan ou avec un habitant du lieu, ce qui nous procura la visite de quelques officiers turcs. Ce brave Ottoman nous avait pris en grande affection, aussi ne me permit-il pas de partir sans que j'aie tâté le pouls à sa femme placée derrière la porte de sa cour et ayant je ne me rappelle pas quelle maladie incurable. Le sol noir fertile continue en deçà de Jeni-Sagra et la route large, mais non pavée est tracée à travers des champs de blé, qui sont à perte de vue. Dans les temps de pluie cette route doit être impracticable. C'est cette argile qu'on employé pour faire des briques sechées au soleil et, mêlées de paille, ce qui indique assez que le climat de la Romélie est fort sec, car de semblables matériaux seraient dissous en boue, si on les plaçait dans un atmosphère aussi humide que l'Angleterre. A 1 1. de Jeni-Sagra on laisse au N., à !/4 de 1. de la route, le village turc de Hadidgé et à une demi lieue en delà on est déjà assez loin des montagnes, courant presque de l'O. à l'E., pour que l'œil soit trompé sur leur hauteur. On passe à côté d'une petite butte isolée de 60 p. de hauteur, qui est composée de calcaire compacte intermédiaire ancien. A 2 1. de Jeni-Sagra un minaret indique au N. au pied des montagnes le village turc d'Assoli. Ces crêtes déboisées n'ont l'air de loin de n'avoir que 150 à 200 p. de hauteur et à travers leurs échancrures on apperçoit de temps à autre les cimes bien autrement élevées et boisées du Balkan. Sur cette partie de la route il y a de grands champs de Lepleb ou d'une espèce de pois chiches qu'on mange simplement rôti. Nous y fûmes rencontré par un homme qui jouait de la cornemuse. Un Karaoul avec un étage débordant sur le bas était près d'une ferme ou Tschiflik, dont les haies étaient garnies de têtes de chevaux et de bœufs. Cette plaine uniforme et sans arbres fut ensuite interrompue un moment par un ruisseau coulant du N. au S. et en deçà duquel il y a un espace énorme occupé par une espèce de grande légumineuse sauvage de hauteur d'homme (Galega officinaHs). On aurait dit qu'on l'avait planté exprès tant elle couvrait complètement tout le terrain. A 21/2 1« de Jeni-Sagra on traverse le village de Mengeli et on atteint de petites séries de collines trachy-tiques en partie cultivées et en partie couvertes de pâturages secs. Vers leur milieu est situé le village de Kirmeni, qui a aussi quelques habitans ottomans et une grande ferme. Un Bulgare y tient auberge dans une grange. On est alors à moitié chemin entre Jeni-Sagra et Islivné et entre Jeni-Sagra et Jamboli ou Jambol, dernière ville qu'on voit presque à l'E. S. E. à 4 1. devant soi au milieu des bouquets d'arbres de la vallée de la Tondja. Pour l'atteindre, il faut passer par les villages de Kiopekli (de chien), de Bosadge et d'Amsoria, en descendant une pente insensible. Si au contraire on va à Is-livné, on monte à l'E. 3 0 N. au hameau bulgare de Jajaki-Keui, qui est à une petite demi-lieue de Kirmeni et précisément au col peu élevé, d'où on descend dans la vallée de la Tondja. Des bocages couvrent la pente des hauteurs,un village se distingue sur le bord de la Tondja et en deçà s'élèvent les sommités des Balkans derrière Islivné. Pour atteindre le grand pont de bois et les moulins sur la Tondja, il faut suivre son bord pendant une bonne heure. De Jamboli on se rend à Chaftan en traversant un partage des eaux très bas, une de ces collines si fréquentes dans la chaîne côtière de la mer Noire. On remonte ensuite la vallée du Bo-kloudze-Déré ou Bokloudscha-Déré, pour arriver dans le joli bassin de Karnabat, entouré de vignobles et d'une belle végétation. Karnabat n'est scparé d'Aidos que par des coteaux en partie cultivés et dont le peu d'élévation ressort au premier coup d'œil à cause du voisinage du Balkan, qui lui-même ne dépasse guère 2000 p. Aidos est situé sur le côté oriental et au débouché d'une vallée, qui remonte vers le pied du Balkan et est bordée de rochers nuds ressemblant aux anciennes coulées basaltiques de l'Auvergne. Aidos a beaucoup souffert dans la dernière guerre, son bazar n'existe presque plus, le milieu de la ville est plein de ruines et en outre la peste et l'émigration ont décimé sa population grecque et bulgare. On ne peut guère l'estimer qu'à 3000 âmes. Le ruisseau de la vallée traverse la ville, un pont de pierre y est pratiqué et sur sa rive orientale sur le pied de la colline est le Konak de l'Ayan avec son harem. Vis-à-vis de cette habitation entourée de murailles est une petite mosquée. Les Grecs demeurent surtout dans la partie opposée de la ville. L'Ayan nous reçut avec beaucoup de politesse et les manières turques du grand monde, quoiqu'il n'eut été, il y a peu de temps, qu'un Tartare du Pascha de Silistria. D'Aidos à Bourgas la contrée est occupée par des plaines incultes et séparées par un prolongement des collines volcaniques près d'Aidos. A 1 1. de cette ville on voit dans le coin N. E. de la première plaine le village de Kadi-Keui au pied des collines Ensuite on traverse des éminences rocailleuses au milieu desquelles il y a un petit cours d'eau et en en descendant on atteint à 2'/2 1. d'Aidos un bain d'eau thermale hydrosulfureuse. L'établissement n'a qu'un local et est isolé au milieu d'une plaine stérile au bout de laquelle brille l'eau du golfe de Bourgas. A '/2 b au N. se trouvent quelques maisons habitées par cinq Turcs et deux Bulgares. C'est là que loge la famille des deux ou trois personnes attachées aux bains. Quelques voitures traînées par des bœufs stationnaient près de là et récelaient des femmes turques. La peste avait empêché en 1837 l'arrivée des baigneurs et on n'avait pas même bâti les maisonnettes de bois qu'on dresse à l'ordinaire pour la vente de divers objets ou la commodité des voyageurs. On doit avouer qu'il faut être Ottoman ou bien malade, pour se colloquer dans ce désert, où les seules ressources sont le foyer du Kafedgi et un pavillon élevé et non couvert au-devant du bain. Après nous être baigné et avoir vu avec dégoût le lavage du linge sale que certains Musulmans se permettaient dans le bain, nous nous accroupîmes sous le Tschardak pour dîner et satisfîmes la curiosité des Ottomans sur les nouvelles du pays des Ghiaours, (Voyez mon aventure ultérieure dans ma Turquie d'Europe. Vol. 2, pag. 475 ').) ') Si le sentier entre Kczanlik et Eski-Sagra par Harmankoï, Hamour-soutza et Adatene existait réellement, le nom du hameau de Lischa ou llidga '( 7 indiquerait peut-être une eau thermale. if i ij i Ai ti DE C O N S T A N TIN O P L E A SALONIQUE. PAR LE TEKIR-DAGH et SERES. Jjoados est une bonne couchée pour ceux, qui partent de Constantînople, mais il y a dix bonnes lieues à faire outre le passage de Constantînople pour ceux qui partent dePera. Depuis Si-livri on longe la mer sur des falaises sableuses et brûlantes en été jusqu'au Vieux-Erekli (Eski-Erekli) misérable hameau de huit à dix maisons grecques avec un café turc, dont un cep de vigne est tout l'ombrage. Les alentours sont très pierreux et la roche est en jour, de manière que les restes de la ville ancienne doivent être dans les champs si toutes fois il y en a encore. Sur la carte est marqué entre Erekli et Silivri un village de Papazli, que nous n'avons pas apperçu. Sur cette route nous vîmes embarquer pour Constantînople la paille hachée, qui restait après avoir battu le blé au moyen de chevaux sur les champs voisins de la mer. Elle y sert à la nourriture des chevaux, le foin y étant trop cher. D'Eski-Erekli à Turkmenli ou Turkmeni on voyage pendant 3 1. par un pays ondulé, dont le sol fertile brun foncé est couvert de champs de blé, mais après la moisson le coup d'œil en est désolant à cause de l'absence totale d'arbustes. On y franchit le vallon d'Arabli-Déré, un second sans nom et un troisième le Balakasli-Déré. Je n'ai pas vu le village d'Osmandschi à PO. du premier vallon. Turkmenli, bourg ruiné, n'est plus composé que d'une mosquée et d'une huitaine de maisons, situées dans un fond, tandis que sur son côté oriental est l'auberge turque et vis-à-vis le Bakalin ou l'épicier-traiteur grec. C'est une station misérable. La route depuis là à Kodosto (t. Tekirdagh) est aussi sans aucun intérêt, car on parcourt pendant 7 1. un pays ondulé sans arbres, ni haies, ni habitations; il est traversé par quatre cours d'eau, dont le troisième ne serait pas, d'après Mr. Kicpcrt, le Tschor-lou-Sou, comme le voulait la Carte Viennoise. Tout ce que je puis dire sur cette dissidence, c'est que le premier et le troisième vallon après Turkmeni, sont à terroir noir et assez grands, mais il y a très peu d'eau en été. De plus le lit du troisième cours d'eau n'est pas si large qu'il semblerait devoir l'être si c'était vraiment celui du Tschorlou-Déré, Ce dernier aurait donc un cours N» E.-S. O. parallèle à celui de l'Erkéné et irait, le joindre dans un sens opposé du S. E. au N. O. Les vues sur la mer de Marmara, l'île de ce nom et la côte d'Asie sont les seuls dédommage-mens de l'ennui de cette route, pendant laquelle on se tient assez loin de la mer et on n'apperçoit pas de villages, quoiqu'il puisse y en avoir. Ail, avant Kodosto la scène change, la végétation la plus belle succède à la monotonie de l'aridité. Les coteaux sont couverts de vignobles, Je chemin bordé de figuiers* des peupliers y ornent un vallon, dans lequel on voit des champs de maïs et de coton. Pour arriver à Kodosto on cotoye pendant un bon quart d'heure la mer et on y jouit d'une de ces vues liguriennes, où les bergers, les pêcheurs ainsi que leurs filets jouent un si grand rôle. Rodosto est un ville d'environ 18,000 âmes, il y règne beaucoup d'activité parmi les habitans grecs, bulgares et turcs, parce que c'est le point d'où on expédie par mer à la capitale beaucoup de poissons, de fruits et de légumes. Il y a plusieurs mosquées, un nombre considérables de boutiques, un bazar couvert quelque-lois seulement par des treilles de vignes. La ville est bâtie sur une pente inclinée et entourée de tous les côtés d'une large zone des plus beaux jardins et surtout de superbes vergers, si toutefois on n'y cherche pas la régularité européenne, mais seulement la quantité des produits. Pour aller à Ainadschik on sort d'abord par une des rues montantes principales de Rodosto, d'où on descend dans une belle vallée toute cultivée ou remplie d'arbres fruitiers et courant de 1*0. à l'E. Des Arobas turcs stationnaient sur la route au moment de mon passage, et avaient amené des dames et des messieurs dans leurs jardins. Un Juif habillé à l'européenne et 10 arrivant à pied do Saloniqtie m'y accosta on allemand. En deçà de cette cavité les cultures cessent bientôt et on monte pendant plus d'une heure un talus peu incliné, au haut duquel est un plateau inculte. Un groupe de peupliers y entoure une fontaine et invite à une halte. De nombreux conducteurs de chevaux y étaient déjà établis avec leurs bêtes. Depuis ce plateau à 1020 p. d'élévation on touche presque le sommet du Tékir-Dagh, qui est indiqué sur la carte sous le nom de Kagri-Dagh; quoique paraissant fort élevé depuis la mer, il ne me sembla avoir guère plus de 1480 à 1500 p. d'élévation. Des bocages couvrent ses pentes supérieures, d'où on doit avoir une belle vue sur l'île de Marmara, les îlots voisins, l'entrée des Dardanelles et les contreforts du mont Ida. Le prolongement S. O. du Tékir-Dagh est le Kourou-Dagh (mont sec), qui est juste à l'O. de l'île de Marmara. Au pied occidental de ces deux montagnes coule le Kavak-Sou dans le district d'Ivridschi. A l'entrée de la presqu'île de Gallipoli, Mr. Viquesnel a découvert que le terrain des schistes cristallins du Rhodope ressort à Kayak, ce qui ajouté à ceux des bords de la Maritza entre Salti-Koï et Karabeïli et entre Mandra et Dimotika, d'après Mr. Viquesnel, constate incontestablement la liaison du Rhodope avec l'Ida. De plus Mr. Viquesnel comme Mr. de Ilauslab ont vu un terrain prinniire s'étendre sur le bord de la mer de Marmara, de Ganos à Gallipoli et entre Kavak et le mont St. Elie. On continue à voyager sur ce plateau en tournant de temps à autre autour de petits monticules de 50 à 00 p. et on descend enfin dans un vallon, dont le niveau est bien plus élevé que Rodosto et qu'on remonte jusqu'à Aimadschik. Cette cavité en pâturages secs n'offre des cultures que près de ce dernier bourg, qui est à 840 p. de h. abs. L'auberge d'Aimadschik ou Ainadschik a dû être une fois fort bien, car il y a plusieurs chambres pour les voyageurs, mais en 1837 le plancher de la meilleure avait de tels trous que notre premier soin fut de les fermer avec nos effets. Sous le premier étage était une vaste écurie avec beaucoup de petites cheminées. A la porte trafiquait d'un côté un cafetier turc et de l'autre un épicier-traiteur grec. Le plus agréable était l'avis officieux que la peste avait fait l'an passé de grands ravages dans ce lieu. En deçà d'Aimadschik on remonte une vallée cultivée en blé, qui s'étend au S. O. et on passe un petit col couvert de bo- m ; cages. A 2 1. d'Aimadschik on laisse à droite le village de De-veli et on trouve un Han dans ce vallon, qui dépendrait, d'après Mr. Kiepert, de celui des eaux d'Airopol; on voyage alors sur une espèce; de plateau ondulé de 1068 p. de h. avec de petites éminences de 20 à 30 p. Nous y rencontrâmes une douzaine de Tartares de Janina, qui venaient féliciter Moustapha-Paseha de sa nomination à ce Paschalik et l'y accompagner. Plus loin d'autres Tartares appartenant au même Pascha, revenaient de la môme ville, où ils avaient installé le Kiaya du Pasclia, A peu de distance voyageaient à cheval des recrues pour l'armée, les unes attachées par les pieds aux étriers et les plus mauvais garnemens les bras liés de plus au corps. Un père y suivait son fils, qu'on venait de lui enlever et poussait des cris de désespoir. Ce plateau passé on trouve à droite le village de Scher-mehen. A V/2 1. d'Aimadschik il y a des restes d'une route pavée, en apparence fort ancienne, près de laquelle sont deux Tu-mulus, qui sont hors de la route actuelle. On commence plus loin à descendre graduellement et on traverse à près de 23/4 h. avant Malgara (g. Migalaura) une vallée fort évasée, qui ne peut guère être que le Podscha-Déré de Kiepert. Il y indique un village de Karaman que je n'ai pas remarqué. Cette cavité court du N. E. au S. O., d'où on remonte sur une crête un peu moins élevée que la précédente et qui s'étend à l'O. Il faut encore franchir un autre vallon étroit pour atteindre la plate - forme de 1188 p. d'altitude, sur laquelle est bâtie en pente le bourg de Malgara. Il est assez propre et contient 2000 habitans grecs et turcs; le pavé y est bon, l'eau excellente et il y a cinq mosquées. Nous y logeâmes chez un Grec aisé , dont la cour de la maison offrait une treille , sous laquelle c'était un plaisir de passer une nuit sous un si beau ciel. Cet homme avait derrière chez bii un vaste jardin et lui comme sa femme et ses filles firent tout Ce qu'ils purent pour nous rendre le séjour de Malgara aussi agréable que possible. Depuis là on peut gagner Gallipoli et les châteaux des Dardanelles en descendant la vallée du Kavaktschai. Des salines listent au fond du golfe de Saros et la crête entre ce bassin et 1 entrée des Dardanelles n'est qu'une petite hauteur. En général tas bords de ce détroit ne sont pas très pittoresques, n'étant pas habités partout comme le Bosphore de Thrace et n'étant composés que 10 * do basses collines. La chaîne de l'Ida se voit bien surfout depuis les hauteurs à l'O. de Gallipoli. Cette dernière ville ayant une population d'environ 12,000 âmes , est habitée surtout par des Turcs et des Grecs, elle possède des fabriques et est très commerçante. Pour aller de Malgara à Keschan on traverse une vallée, pour gagner un autre plateau, on laisse à l'/2 1. de Malgara à gauche le village de Ruzgiar (vent ?) et à V2 1, plus loin est Alisch-Koï. *) Au S. vers la mer est une crête, qui est un peu plus haute que le plateau sur lequel on est et qui est couverte de petits bocages de chênes. Le plus haut point du plateau est à 1 '/2 1. avant Keschan, mais il y a des éminences voisines qui ont encore 100 à 150 p. de plus ou 1305 p. sur la mer. On descend de ce plateau agreste dans une vallée, qui court de l'E. à l'O., direction qui est aussi celle des collines. Le gros village bulgare de Boulgarskoï y est situé et des citernes y indiquent que l'eau est rare dans ce sol pierreux et tertiaire. Pour aller de là à Keschan, on longe le pied de petites buttes pointues, couvertes de broussailles et on emploie pour cela le lit d'un petit torrent à sec en été, qui sort de ces éminences et a un lit rocailleux. On remonte ce ravin et franchit à l'O. une crête, en deçà de laquelle on voit devant soi sur un plateau les quarantes moulins à vent de Keschan alignés comme des soldats. Keschan (t. Rouz-Koï ou Rousch-Keui) est un assez misérable bourg d'environ 2000 âmes. Il y a dans ses environs de petites buttes dont l'une au N. est le Mal-Tépé (petite butte). L'Ayan y a un assez vaste Konak et un harem. Il n'y reste aucune trace de l'ancien château byzantin. Le Menzil ou la poste n'offre au voyageur qu'un bâtiment très dégradé et sale. Un vaste Tschardak nous parut préférable surtout en temps de peste à ces chambres, qui n'avaient pas été balayées depuis bien longtemps. En compensation au-devant de notre gîte était un superbe platane d'Orient, qui ombrageait une belle fontaine avec un grand bassin rond en pierre en bon état. Ce fut là que nous eûmes la première fois un différent avec le Tartare causé par l'inexactitude des cartes relativement au dessin de la vallée de la Maritza et de la position de Ther-molitza et dTpsala que Mr. Viquesnel a enfin fixé. De guerre ') Dans la carte il y a Atesch-Koi ; qui a raison? lasse, le maître de poste et le Tartare voyant notre entêtement finirent par se taire et purent avec raison nous taxer d'un peu fou (delt), A 1 1. de Keschan se trouve Jeni-Koï, situé sur un bas plateau un peu au-dessous de celui de Keschan. Un orage nous ayant surpris, nous nous réfugiâmes dans une ferme, où nous fûmes bien accueillis par un Turc, qui avait fait la campagne contre les Russes et y avait été blessé. Une pente très douce et occupée surtout par des pâturages conduit à Akhor-Keui, qui est un hameau grec à près de 1 1. au S. dTpsala et sur le bord de la grande plaine de la Maritza. l) La plaine jusqu'à la Maritza est un terrain marécageux et de prairies, d'où l'île de la Samothrace fait un effet gigantesque. On passe la Maritza sur un bon bac. Nous logeâmes à Fered chez des Grecs fort complaisans. Cette petite ville dont j'ai déjà parlé a aussi deux moulins à vent. A 2 1. de là au S.O., à llidga (le Lydscha de Mr. Kiepert), il y a un bain thermal hydrosulfureux, auquel les gens du pays vont surtout en mai faire une cure de dix jours. A 1 1. à l'O. d'Ilidga est le village de Chainlar. La route do Fered à Kavala (de Kaval (?), en turc et albanais un fifre de berger) 2) est tracée sur l'espèce de corniche, qui règne entre la mer et les dernières pontes duRhodope et on y a assez de torrens à guéer. Néanmoins, excepté près de Makri et de Kavala, cette plate-forme est trop large pour qu'on puisse comparer cette route à celle de la corniche en Italie. Les îles voisines et ça et là des villages grecs, bulgares ou niahométans dans la montagne viennent ajouter du relief aux vues maritimes le long de cette côte. Quoique je n'ai pas fait la traversée de Fered à Kavala, je crois devoir ') Apres une libation un peu trop copieuse de vin, mou Tartare s'était ap-Pcreu que mon domestique, ancien gendarme serbe, avait gardé pour lui 2 ou :$ Paras sur ce qui me revenait du compte. Il lui reprocha en termes assez vénitiens ce mince larcin ainsi que d'avoir laissé dépérir nos chevaux à Constanti-nople par pure coquineric. D'ailleurs comme il cherchait depuis longtemps l'ôe-c*ision de lui montrer son autorité et de rabaisser son orgueil slave, il lui appliqua u,i léger coup de fouet. Mon Serbe furieux met la main sur ses pistolets , mais u' Turc est plus leste et avait déjà son pistolet armé a la main avant que l'autre ei1 eût tiré un de sa ceinture. ,,Tire, si tu oses," lui dit-il avec sang froid ; a iis de notre maison il y avait un billard, mais on ne pouvait s'y procurer M'»' de la limonade et du café. Heureusement on nous adressa à un Suisse de Nyon, Mr. Bovet, qui tenait alors avec sa femme, une Bretonne, une espèce de Maison de traiteur. Mr. Bovet avait été militaire dans un régiment français, puis (;ommis, commissionnaire et enfin maître de langue; c'était bien le type de ces aventuriers, qui forment une si grande partie des Francs en Orient. Du reste il n°us traita fort bien. Four trois francs nous avions nos trois repas et nous aurions pu oublier chez lui que nous étions en Turquie, car rien ne nous manquait Pas même les tables et les chaises. Néanmoins un énorme flacon contenant UIU' dizaine de bouteilles de vin nous dépaysait, et le vin doux de Snnios pour 0 8o,s la bouteille était après nos fatigues une nouvelle connaissance fort agréable. ,Jit servante de ce singulier couple, tous deux très volumineux, était une Cohour-Hcoise de moins de vingt ans, qui avait l'ait a pied le voyage de là Grèce a Sa- Nous eûmes l'occasion de voir que Salonique ne manquait pas de société européenne. À présent que les bateaux à vapeur y touchent, cette ville est assez visitée par les touristes, qui peuvent prendre une idée d'une grande ville turque, autre que la capitale, sans se donner la peine d'un voyage par terre. D'ailleurs il y a des localités dans les environs qui doivent y attirer les étrangers. Nous fumes invités par une famille grecque à une soirée musicale et fumes aussi chez le consul d'Angleterre, qui semblait pour le moment le point de réunion le plus goûté. Un grand désagrément de Salonique paraît etre le peu de moyens d'arrêter les incendies, car le consul de France nous disait qu'il était toujours obligé d'arranger ses papiers les plus précieux avant d'aller à la campagne de crainte d'une incendie. La plupart des consuls et des gens riches ont des maisons de campagne en deçà de la baye au S. de Salonique ou bien dans les gorges au pied du Kortiasch, montagne de 3804 p. au S. E. Les thermes d'eau sulfureuse de Salonique sont à l'E. de Sedes dans la vallée de Vasilika en deçà de ces campagnes, vallée dont les eaux viennent du mont Cholomonda. Le commerce de Salonique est fort étendu et consiste surtout en envois de coton, de soie, d'huiles etc. H y a aussi des teintureries et des fabriques d'étoffes. Salonique est le chef-lieu d'un Paschalik riche et assez considérable. Sa population doit probablement s'élever àplus de 250,000 âmes et peut-être moins de 300,000 âmes. Veria, Niaousta, Vodena, Kepinia, Jenidsché-Vardar, Doiran, Auret-IIissar, Kirkitsoh, Platamona, Katcrina, Libanovo 'Orphani, Nizvoro, Laregovi, Po-ligyro, Galatista, Vasilika, Langasa, Klissali, Betschik sont les résidences des principaux employés du Pascha. Une population grecque assez compacte s'y trouve surtout dans la Chalcide, qui est divisée en six districts, savoir les trois presqu'îles de Kas-sandra, de Longos et du mont Athos (gr. Agios Oros, si. Sveta Gora et t. Aineros) et les trois districts de Kalameira au S. de Salonique, de Cbassia au N, du golfe de Casandre et de Made-niochoria ou de Sidero-Kapsa dans la partie orientale. Le reste de In population du Paschalik est composé de bon nombre de Grecs et de Zinzares dans la portion S. O., taudis que dans les autres lunique pour suivre son amant, déserteur de la troupe bavaroise et devenu menuisier. L'n prêtre catholique fanatique était occupé a la convertir a la foi catholique avant de vouloir l'unir a son élu. districts ce sont surtout les Bulgares chrétiens grecs, qui prédominent, quoiqu'ils soient mélangés ça et là de quelques Serbes comme à Vodena. Les Musulmans soit asiatiques, soit européens, c'est-à-dire d'origine slave, grecque ou albanaise, se trouvent surfout dans les villes et les bourgs, quoiqu'il y ait aussi quelques villages composés presqu'uniquement de Mahométans. L'élément albanais pur y est presque nul. XI. LE RHODOPÉ ou DESPOTO-DAGH et ses ROUTES. ayant fait qu'une seule des routes à travers le Rhodopc, je n'en aurais pas parlé au long sans le nouveau et important voyage de Mr. Viquesnel et son résumé dans la carte de la Turquie de Mr. Kiepert. Malheureusement mon ami ne pourra publier ses observations que dans un ou deux ans. D'une autre part j'avais recueilli de Mr. Frère et d'autres voyageurs quelques renseigne-mens sur les routes principales du Rhodope ; mais je n'ai pu saisir ces derniers qu'au moyen de la carte de Mr. Viquesnel l). Je crois donc faire plaisir au lecteur en donnant pour la première lois en peu de mots une idée juste de la structure de cette chaîne importante. Le Rhodope s'élevant entre les plaines d'Andrinople et la vallée de la Maritza et la grande fente N.-S. occupée par le Strymon est une chaîne composée de plusieurs séries de crêtes, qui sont placées parallèlement l'une à côté de l'autre dans une direction O. N. O. à l'E. S. E. On peut y compter au moins huit grandes î'ides entre lesquelles il y a toujours des vallées longitudinales plus ') En 1837 je fus empêché de visiter la vallée de F Arda, parce que lu poste et même les Kiradgis ne vont pas dans cette direction et que j'avais été Obligé de me défaire d'une partie de mes chevaux. Ils ne pouvaient plus marcher; un aubergiste de Constantinople et un de mes domestiques les avaient laisse dépérir et avaient empoché l'argent, et je n'avais pas de lettre de crédit pour Aidritiople ou moins grandes, tandis que partout se trouvent des fentes transversales de dimensions très variées. La plus grande vallée de la première espèce est occupée par l'Arda et ses nombreux affluens, c'est elle qui donne à la partie orientale du Rhodope le cachet d'un grand golfe entouré de promontoires montueux et à falaises escarpées, tandis que la portion occidentale du Rhodope est éminemment caractérisée par le nombre et l'importance de ses grands sillons transversaux, dont les quatre principaux sont connus sous les noms des vallées du Strymon (b. Strouma, t. Karasou), du Mesta ou Karasou de Razlog et de Ncvrekop, du Dospada-Déré et du Kritschma-Déré. Leur direction principale est du N. au S., tandis que les parties inférieures du Strymon et du Karasou sont des sillons du N. O. au S. E. comme ceux de la Haute-Moesie. Ne dirait-on pas voir en petit les Alpes allemandes centrales, dont la partie orientale bifurquée corresponderait à la même portion dans le Rhodope, tandis que les chaînes centrales du Tyrol et du Salzbourg seraient représentées par le reste du Rhodope et son prolongement en Macédoine. Des deux côtés de la grande échancrure de l'Arda, le Rhodope se décompose en quatre chaînes principales, savoir au N. on trouve sur une première ligne le Rilo-Dagh, le Dcmir-Kapou-Tépessi (mont de la porte de fer) aux sources de la Maritza et les montagnes au N, des sources de la Tschepina, du Bclova, affluent de ce dernier, et du Karli-Déré. Cette chaîne escarpée au N. se termine surtout fort brusquement au N. O. et à l'O. par le haut Rilo-Dagh d'au-delà de 7000 p. de hauteur. En deçà des vallées longitudinales du Rilslca-Rieka, duJam-beska, du Jokourout (Jokourou de Mr. Viquesnel), de la partie supérieure de la Tschepina et du Karli-Déré s'élève la seconde ligne de montagnes composées depuis Djoumra dans la vallée du Strymon jusques vers Tschirmen sur la Maritza des montagnes suivantes, savoir le Djoumaa-Balkan, l'Arivanitza au S. du Jam-beska, le Karlouk-Dagh à la tête du Karli-Déré, les montagnes de Stanimak au S. de Philippopoli, celles dans le haut de la vallée de l'Ousoundscha et enfin le Kourkoi-Kalési à l'O. de Tschirmen. Si cette série de montagnes varie d'abord de hauteur entre (j—7000 p. et descend à l'E. à 3000 et môme à moine de 2000 p. la troisième ligne de rides s'élève plus haut en général et comprend le del-Tépé, une partie du Dospada-Jailasi, lo PèrseriK au 8. de l'hilippopoli, le Kouschanlar au S. de Papazli, les montagnes au N. du Perperek-Déré et. enfin le Jailadseliik à l'O. d'Andrinople. Cette ligne de hauteurs est bien moins distinctement séparée de la précédente par des vallées longitudinales que les deux premières. Le Perperek-Déré en paraît être une de plus considérables. Plus au S. viennent encore rangées de l'O.-E. comme des soldats les grosses sommités du Perin-Dagh, la partie méridionale du Dospada-Jailasi, ainsi que l'Eschek-Koulaghi et le Kajalou-dsclia-Tépesi. Aux sources-mères de l'Arda est, pour ainsi dire, le centre de ces énormes rides du Rhodope, qui se présente sous la forme d'une plate-forme très élevée et bosselée, d'où descendent comme d'un petit St. Gothard des eaux dans toutes les directions, savoir au N. N.E. le Stanimak, au N.N. O. les sources-mères du Kritschma-Déré, à l'E, le Tschatak-Déré et l'Arda, au S. un affluent du Karasou et à l'O. coule le Dospada-Déré. Comme proéminences de ce bourrelet s'élèvent au N. le Kajaloudscha-Tépesi, à l'O. l'Eschek-Koulaghi et au S. le Dschoura. Les trois ou quatre chaînes du Rhodopc au S. de ce bouton de montagnes et de la vallée de l'Arda sont constituées sur la première ligne par l'Arnaout-Balkan entre le Strymon et Nevrekop et séparé du Perindagh par deux vallées longitudinales, puis parle Dschoura, l'Ala-Dagh et le Kodja-Jaila (1000 mètres), tous trois au S. de l'Arda. En seconde ligne on trouve l'Ala-Bouroun au N. de Melnik, l'Ali-Boutsch au N.-E. de Singel et à côté le Sfragatsch, puis les montagnes au S. du Soegudlu-Sou (si. Snoutla d'après Mr. Viqucsnel), affluent de l'Arda et à l'extrémité orientale de la chaîne; au S. de la vallée longitudinale du Schcitan-Déresi, le Moukaté-Jaila. Au S. de cette chaîne sont les sillons longitudinaux de Singel, de la cavité de Lissa et des sources supérieures des eaux de Ooeksche-Bounar, du Kourou-Tschai et d'autres torrens. Puis vient le troisième dos, produit par le Singel-Dagh, le Sminitza, le Bosda gh au N. N. O. de Drama, le Tschal-Tépé au N. N. O. de Karasou-Jcnidgé, le Karaoghlan au S. de Bourichane, le Kar-loiik au N. de Komouldschina et le Jardimli-ïépé au N. de Ma-renia. De la quatrième chaîne il ne reste plus que le Tschairli-Balkan, leMénikion, certaines hauteurs au N. de Kavala et Béreketli et au de Maronia et Makri. Enfin Thasos, le Pirnari et le Betschik- Dftgh on Macédoine pourraient être regardés comme le reste d'une neuvième chaîne dans la même direction que le Rhodope. En attendant que Mr. Viquesnel nous précise la hauteur relative de ces chaînes, nous pouvons avancer, d'après nos ren-seignemens et ce que nous en avons pu appereevoir, que les chaînes centrales avec des neiges en été doivent plutôt dépasser 7000 pieds que d'être plus basses. D'après les détours des routes il paraîtrait positif que les plus hautes cimes du Rhodope sont dans le Dospada- Jaïlasi et dans de ce que j'ai, nommé le petit St. Gothard de cette chaîne ainsi que dans le Périn-Dagh. Depuis ces chaînes au haut de l'Arda leur élévation diminue soit au S., soit surtout à l'E. Je ne crois pas être fort loin de la vérité en assignant comme limite 1500 p., même 1800 à 2000 p pour la hauteur de ces parties extrêmes dans la portion septentrionale, car sans cela je n'aurais pas pu les voir de loin. Quant aux chaînes méridionales, leur extrémités orientales au N. N. O. de Féréd m'ont paru plus élevées, ce que Mr. Viquesnel confirme, puisqu'il donne 1000 à 1100 mètres au Kodja-Jaïla. Le Rhodope se termine contre la grande cavité du bas pays tertiaire de la Maritza environ comme les chaînes de la Bosnie vers les collines tertiaires au S. de la Save. La différence de hauteur est très marquée et le caractère de promontoire ou de presqu'île élevée est essentiellement prononcé dans ces montagnes. Sur la mer Egée leur élévation doit varier pour le moins entre 2 à 3000 p., s'il m'était permis de prendre pour échelle comparative celle du Ménikion et des montagnes autour de la cavité de l'Anghista. Après cette description générale du Rhodope je passe aux routes principales, par lesquelles Mr. Viquesnel, Mr. Frère et autres voyageurs ont coupé cette chaîne, en laissant à notre compagnon de voyage le plaisir d'échelonner ces routes de nouveaux noms de villages et de nous en donner la géographie physique complette. Il ne faut pas oublier que les crêtes du Rhodope n'offrent nulle part une absence de cols comme certains points de nos Alpes, parce qu'il n'y a pas de ces sommités après comme les pics dolomniques ou les aiguilles de la Savoie et qu'il n'y a pas non plus de glaciers. Ainsi un cavalier et surtout un piéton trouvera partout, au moins en été, des passages plus ou moins pénibles d'une vallée à une autre et il ne sera arrêté que quelquefois par des neiges trop molles. Les passages les plus élevés sont, dit-on, ceux au S. O. do Tatarbazardschik et celui au S. de Bania, les neiges les rendent impraticables en hiver. La première route à travers le Rhodope à l'E. du Strymon est celle de Bania à Razlog Nevrekop, Melnik, Séres ou Drama. L'entrée de la gorge derrière Bania est étroite et toute boisée ; on y rencontre sur la Maritza le village de Michala et plus haut dans la montagne celui de Radoïl. On franchit ensuite la chaîne la plus septentrionale du Rhodope à une hauteur qu'on m'a assurée n'être pas moindre de 4300 p. (?) et on descend dans la vallée du Jokourout coulant N. N. O. au S. S. E., d'où on passe dans celle du Belitza courant N.O.-S.E. Razlog, bourg de 15 à 1800 âmes, dit-on, est placé entre ce torrent et un autre venant du S. O. Deux ou trois villages sont dans ces environs. Le reste de la route a lieu jusqu'à Nevrekop sur le bord du Mesta ou Karasou. On passe par Banjschko, on traverse à Kiz-Der-bend le Dobronischta, affluent dirige de l'O. à l'E. et venant du Jel-Tépé. C'est entre ce point et Banjitza que se trouve le grand Kiz-Derbend ou passage de la fille. Mr. Frère me l'a décrit comme un superbe et étroit défilé garni d'escarpemens de rochers cristallins. La route, établie fort an ûennernent en corniche, a été obligée en partie de s'élever sur la hauteur, de manière qu'on a le torrent a plusieurs centaines de pieds au-dessous de soi. On longe ce dernier pendant 6 h. Il y a remarqué la ruine d'un château, qui paraîtrait lié à la tradition qu'une jeune fille a commandé une fois dans ces lieux ou s'est précipitée d'un rocher. Mr. Kiepert y indique le Han de Goustan et un hameau (?) de Ziropolie. Nevrekop, entouré, dit-on, de quelques anciens murs, est dans une pe-hte plaine ou un élargissement de la vallée du Karasou, où ce dernier reçoit un torrent venant du S. O. Sa population ne s'élève qu'à 2500 habitans. Ses environs offrent des vignobles et le miel de ses montagnes est renommé. Pour gagner depuis là Melnik on passe de nouveau la montagne entre les sommités de l'Alabouroun au N. O. et le Stra-gatsch et l'Aliboutousch au S. E. et on descend par le torrent du ^istritza à Melnik, d'où on peut remonter le vallon du Stroum-nitza et aller à Istib ou sur le Vardar ou bien gagner Séres par la ') Ce mot Raz viendrait-il du mot albanais Rraié, plaque de pierre? m vallée «lu Strymon et Démir-llissar ou par la vallée de Singe! ei la montagne du Tschairli-Balkan. Si on va à Draina il faut franchir à Libeova l'extrémité N. E. du Stragatsch et passer à Bilitintza, qui est placé dans une cavité dépendant de celle de Lissa et où sont une partie des sources des eaux de cette dernière. Ensuite on franchit une hauteur et débouche à Tzrnova dans cette grande Doline ou cet entonnoir entouré en partie de montagnes calcaires, qui ont permis l'écoulement souterrain de ces eaux. Entre Lissa et la cavité de l'An-ghista s'élève au S. la crête, qui lie le Sminitza au Bos-Dagh et à la descente dans la plaine de Draina on voit à 5 h. à l'E. N.E. de Drama le Moutnitza sortir des rochers et déceler par la quantité de -ses eaux qu'elles ne proviennent que du Katavotron du bassin de Lissa. Depuis Tatarbazardschik se présentent deux routes pour traverser le Rhodope, savoir celle par Pestera (à 2 1, de Tatarbazardschik), le Karli-Déré et le Dospada-Jailasi à Nevrekop et Mel-iiik et celle par la vallée de Tschepina à Razlog et dans la vallée du Strymon. La première est la plus sauvage et remonte le Karli-Déré à ses sources sur le pied oriental du Karlouk, d'où elle franchit, l'extrémité méridionale de cette montagne et pénètre dans la vallée du Dospada-Déré , le plus grand affluent du Karasou ou Mesta. Leur confluent est à Borova. Dans cette longue vallée solitaire est le Dospada-llan, presque la seule habitation entre Ba-tak et Nevrekop. Depuis là on monte sur le Dospada-Jailasi et descend à Nevrekop sur la rive occidentale du Karasou. Mais on peut aussi descendre du Dospada-llan la vallée de ce nom et gagner depuis Borova la cavité de Lissa par Tzrnova, chemin qu'a parcouru Mr. Viquesnel. Ces routes m'avaient été particulièrement détaillées par Mr. Frère. B m'a dit que toutes ces montagnes élevées du Dospada-Jailasi étaient fort boisées en hêtres, même en sapins et mélèzes et que la route décrivait de nombreux contours pour éviter de petits sommets ou des proéminences. Les vues très sauvages sont en général celles d'amas ou de sommets de montagnes et de vallées avec d'énormes forêts. Le déboisement ne se montre que dans les montagnes sur la mer Egée et à l'extrémité orientale du Rhodope. Depuis Philippopoli il y a surtout trois routes, qui traversent le Despoto-Dagh, l'une se dirige au S. à la mer Egée à Kara- 1(51 sou-Jenidgé ou à Drama et Séres en servant en môme temps à gagner les parties supérieures des vallées de l'Ousoundscha et de l'Arda. La seconde conduit à Nevrekop et Melnik ou à Drama par Lissa et la troisième à Razlog et à la vallée du Strymon. La première entre dans le Rhodope par la grande vallée de Stanimak, où se trouve le couvent de Batschkova un peu au-dessus du débouché d'un affluent du Stanimak venant du S.O., tandis que ce dernier torrent coule presque S.-N. et prend ses sources au S. du Persenk-Dagh et presque au pied du Kajalou-dscba-Tépesi. On le remonte sur sa rive orientale jusqu'au delà du mont Persenk-Dagh, puis par une traversée de montagne exécutée entre la cime du Kajaloudscha-Tépesi à l'O. et celle du Kouschanlar à l'E. on atteint Paschmakli sur le Tschatakdéré, affluent supérieur de l'Arda, qui a ses sources au N. O. dans le Kajalouscha-Tépesi. Dans ce point la route se trifurque, l'une descend à l'E. la longue vallée de l'Arda à Andrinople, où la carte de Mr. Kiepert nous communique déjà une partie des nombreux villages que Mr. Viquesnel y a découverts. Une autre route va au S, traverser l'Arda et remonte à Palasa un de ses affluons, en laissant assez loin à l'E. l'Ala-Dagh. Puis elle arrive dans la vallée du Soegudlu-Sou (si. Snoutla), grand affluent de l'Arda coulant d'abord O.-E., puis S. O.-N.E. Enfin depuis là on n'a plus qu'un col à franchir pour arriver sur le torrent descendant à Skje-dsche (Xanti) et à Karasou-Jenidgé. Si on veut gagner Drama, on va joindre de Paschmakli le bameau d'Arda aux sources de la rivière du môme nom sur le côté oriental du Dschoura, d'où on descend presque du N. au S. un torrent, qui provient aussi du pied méridional du Dschoura et conflue à Bouk avec le Karasou. Entre ce point et Drama on franchit au moyen du coi de Ravka-Boghas une large montagne au S. E. du Bos-Dagh et on descend rapidement sur Drama. La seconde route est celle qui va directement deP hilippo-poli à Batak par Jeni-Koï, d'où on traverse successivement en hiais les vallées du Dégirmen-Déré, du Perouschtitza et du Kri-tachma-Déresi. Dans cette dernière vallée on passe au hameau de Michalkova, d'où on tourne au N, O. pour gagner la vallée de Batak et la route de Tatarbasardschik à Nevrekop. Cette ville est située a % de 1. du Karasou, assez loin du pied S. E. du Perin-Dagh. 11 La troisième route remonte par Airanli la vallée (lu Karli-Déré, d'où on a le choix de se rendre à Nevrekop par Pestera (bulg. Prestova), village à maisons en bois bâties à la valaque, ou par la grande vallée du Kritschma-Déresi et Batak, d'où on va gagner par le Karlouk-Dagh le Dospada Plan et on entre dans la route, qui mène de Razlog au S. et que j'ai déjà esquissée. Mr. Frère comptait 9 h. de Pestera au Dospada-Han. Le Kri-tsohma-Déré coule du S. E. au N. O. et a trois sources-mères, savoir deux entre la montagne de l'Eschek-Koulaghi au S. O. et le Kalaloudscha-Tépesi au N. E. Leur confluent est à Dovlen. La troisième source coule plus au N. entre le Kajaloudscha-Tépesi et le Persenk-Dagh. Ce dernier torrent se réunit aux précédons à Michalkova, et le Kritschma-Déré reçoit au 8. O. de ce hameau un petit affluent, qui coule du N. O.-S.E. entre le Karlouk au S. O. et une autre montagne au N. E. Mr. Frère m'avait parlé d'une partie de ces routes, mais bien moins distinctement que de celles depuis ïatarbasardschik. Enfin on peut aussi depuis la vallée du Karli-Déré gagner celle de Tschépina et par conséquent Razlog, d'où en remontant au N. O. la Bélitza, on peut déboucher sur le Strymon par la vallée de Rilo ou bien même gagner depuis Razlog par son torrent la crête au N. du Jel-Tépé et descendre à Kreschna comme on me l'a dit dans ce dernier lieu. Enfin d'après la carte de Mr. Kiepert Mr. Viquesnel a exécuté une traversée du Rhodope oriental depuis Sémitschin ou Sé-mitsche ou de la vallée de l'Ousoundscha à Komouldschina, ce qui lui a fait connaître une foule de torrens surtout affluens de F Arda. B a passé de la vallée de Sémitsche, courant du S. O. au N. E., par des montagnes basses à Kireslu dans la longue vallée d'Ousoundscha ou d'Oghlou-Tschaï ("rivière du fils). Ce cours d'eau coule O.-E., puis S.O.-N. E. De là il a gagné par dessus un partage des eaux, le Perperek-Déré et le Sulimenler-Déré, deux torrens qui coulent de l'O. à l'E., se réunissent et coulent alors du N. O.-S. E. dans l'Arda entre Ada et Makamout. Le Perperek-Déré a ses sources dans le Kouschanlar-Dagh. Le nom de la montagne traversée n'est pas donné, mais il est exprimé que sur son prolongement O.-E., elle se termine à quelque distance du bourg de Tschirmen par le Kourtkoï-Kalesi. Depuis le Sulimenler-Déré on e rend par des hauteurs sur un torrent, affluent de l'Arda et à Kirdschali sur F Arda. Dans ce point conflue le Sœgudlu-Sou, qui coule depuis Maschtanli du S. O.-N. E, On le remonte jusques là et on passe par le district de Soultan-Jeri, pour s'élever dans les montagnes, en laissant les sommets du Tokatschik-Dagh à l'E. et on descend à FE. du Karlouk-Dagh le long d'un torrent à Komouldschina. Depuis ce dernier bourg on peut aussi gagner Andrinople par l'extrémité S. E. du Rhodope. Cette voie assez courte passe par le district de Kaza ou de Komouldschina et remonte à Bero-hama le torrent, qui joint celui de Komouldschina au-dessous de ce lieu. De là on va franchir le Jardimli-Déré coulant surtout N.-S. et on longe sur la hauteur son bord oriental jusques vers ses sources dans le Kodja-Jaila. Un col se trouve entre cette montagne et le Tokatschik-Dagh, où se trouvent au N.O. les sources du Bergas-Déré (Bourgas de Mr. Viquesnel). On les atteint vers Tschalabou et on gagne de là vers Avrem un torrent coulant S.-N., qui conflue dans le Bergas - Déré à Koschikavak. On longe enfin ce dernier sur sa rive occidentale jusqu'à Ada dans la vallée del'Arda et on continue son chemin le long de cette grande rivière. La population du Rhodope est extrêmement clairsemée et bigarrée, si elle comprend au N. des Bulgares, elle paraît essentiellement grecque au S., tandis que dans son milieu il y a, dit-on, d'anciennes colonies musulmanes. Il n'y a que peu de villages et six à sept bourgs. Ces montagnes ont recelé de tous temps des brigands et des mécontens. L'occupation militaire du Rhodope et du Balkan isolerait la Thrace du reste de la Turquie. TURQUIE CENTRALE, MACEDOINE et HAUTE - ALBANIE. m BVIBlll AIll DE BELGRADE A SALONIQUE PAR KRAGOUJEVATZ, KROUSCHEVATZ, NOVIPAZAR, IPEK, PRISCHTINA et OUSKOUB. Ijo chemin de Belgrade au mont Avala monte par les plateformes dénudées du Vratschar et plus on s'élève, plus la vue s'étend au loin sur la plaine hongroise et la crête du Phrouska-Gora en Syrmie. Ce n'est qu'à 1 '/2 1. de Belgrade que les pâturages secs sont remplacés par de petits bocages de chênes et on voit à PO. la partie supérieure déboisée du vallon de Toplidéré, qui se dirige au N. Entré enfin dans ces petits bois, on perd la vue de Belgrade et on atteint le hameau de Rakovitza (23 m. et 102 h.) situé dans un vallon de même nom dirigé vers la Save. Un misérable Han s'y trouve, au-devant duquel il y a un petit abri ou Tscliardak, entouré d'une petite galerie en bois d'un pied de hauteur et avec une natte, à côté de laquelle était un grand tonneau pour faire la vendange. Depuis Rakovitza au pied septentrional du mont Avala (nom peut-être dérivé du mot alb. Aveli, la vapeur) on peut aller à Ri-panj (Punaife) par le côté occidental ou oriental de cette montagne. En choissant la dernière route, on va gagner le haut du vallon de Bela-Rîeka (ruisseau blanc), où est situé un hameau de ce nom et qui a été appelé ainsi à cause de la couleur blanche de la serpentine décomposée de ces lieux. Ensuite on parcourt des forêts de chênes jusques vers Ripanj, en se tenant sur le bas des pentes E. et S. E. du mont Avala. L'autre route est celle qu'on suit, quand on veut monter au haut de cette butte, à laquelle conduit à travers la forêt un chemin bien tracé et décrivant quatre contours. Dans ce cas on laisse à droite sans l'apperçevoir le village de Resnik (56 m. et 431 h.), qui est situé sous le petit mont de Babin-Drog dans une gorge supérieure du Toplidéré. Le bois de chênes couvrant la montagne d'Avala, est embelli par des tilleuls, des frênes, des poiriers, des noisetiers et des cerisiers. Le sommet de cette montagne atteignant 1195 p. ou s'élevant à environ 400 p. sur le plateau qui la supporte, est occupé par une petite plate-forme ovale; au N. sont quelques tombeaux et le jardin de l'ancien château et au S. les ruines de ce dernier. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, pag. 369.) La vue qu'on a depuis cette cime, est très étendue au N., mais dans la direction opposée elle n'est pas trop engageante pour les personnes voulant visiter la Servie, car on ne voit de tous côtés au S. que des forêts touffues. C'est le véritable pays de la Schoumadia ou des bois , qui comprend les cercles de Belgrade, de Semendria, de Rragoujevatz, de Roudnik et de Jagodina. Depuis le pied de cette butte jusques vers le vallon de Ripanj, (pron. Ripagne), on ne fait que traverser un bois de chênes, où on remarque un petit ruisseau d'eau croupissante. Ripanj (158 m. et 1069 h.) est situé à é1/^ 1. de Belgrade au milieu de bosquets de pruniers que les habitans cultivent pour en extraire de l'eau-de-vie. Les maisons en sont éparses et nous n'avons pas vu d'église. L'auberge est fort mauvaise, ne consistant qu'en une cuisine sans cheminée et un chenil tout ouvert, fait plutôt pour loger des poulets que des hommes. L'écurie n'y est aussi qu'une maisonnette en clayonnage et sans porte, de manière que l'expérience nous prouva que les chevaux n'y sont guère en sûreté, lors même qu'un de nos domestiques fût couché en travers de l'entrée. Ail. environ à ''E. de Ripanj se voient dans la forêt des indices d'exploitation de mines ou du moins l'entrée d'une galerie et d'un puit. B paraît probable qu'on n'a fait dans ces lieux que des essais infructueux. La route de Ripanj à Rabotschevo traverse des prairies et des bois de chênes et passe par un terrain ondulé et formé par les contreforts du mont Kosmai. On y rencontre le Treschna-Meana (auberge des cerises), ainsi que deux fontaines avant le vallon étroit de Ralia, où est placé une auberge avec un pavillon carré, isolé, tout ouvert et servant de salle à manger et chambre à Coucher. Rabotschevo est un hameau au milieu de pruniers dans une enceinte de basses palissades avec des portes sur la route. On y trouve un misérable Han. Un peu plus loin reste à distance de la route à l'E. le hameau de Sopot, dont le nom a frappé Mr. Vouk Karatschitch, parce qu'il n'existe pas chez les Russes et indique très souvent chez les Slaves du midi le lieu d'une belle source. En Bulgarie nous avons déjà parlé d'un village et d'un torrent de ce nom près dTsvor. Il y a plusieurs lieux de ce nom en Servie et même en Epire près de Delvino, tandis qu'un Sopotschani est à la source du Raschka non loin de Novipazar. B est curieux à cet égard que le mot albanais Sop indique le morceau de bois troué, à travers lequel l'eau tombe sur la roue du moulin. A 2 h. de Rabotschevo on est aux sources de l'Ivanitza près du pied N.E. du mont Kosmaï et on apperçoit à '/4 1. dela route au S. O. dans les bois l'église du couvent de Nemenikouska-Na-mastir près de Nemeni-Koutchie (99 m. et 744 h.). En tournant dans les bois autour de la montagne sur son prolongement entre Rouschalovatz et Koratschitza, on atteint ce dernier lieu sur un affluent de l'Ivanitza. C'est un village composé de 933 habitans ou de 124 maisons éparses dans des bois de pruniers et dans une clôture de barrières en bois, pour empêcher la sortie du gros et menu bétail. La maison du capitaine est la seule, qui ait un étage, elle est placée dans une cour environnée d'un mur assez haut. L'auberge de Koratchitza consiste en deux maisons et l'écurie; l'une de ces habitations contient la cuisine, le four et le comptoir de l'auberge et l'autre est composée de deux pièces avec des fenêtres sans vitres et à l'entrée est une petite galerie avec un balcon carré couvert. Sur ce dernier étaient établies des dames serbes, qui se rendaient à Belgrade sous la conduite d'un Turc. Un des nôtres ayant un peu dérangé les effets de ces dames placées sur le rebord de la galerie, il s'ensuivit une querelle, qui amena sur ces lieux le capitaine du village. L'Ottoman avait cru qu'on avait voulu offenser celles, qui lui étaient confiées, et se montrait en consé- un quenee fort irrité, mais l'affaire expliquée, les daines aillèrent se coucher dans une des chambres au lieu de rester sur le balcon. Depuis Koratschitza s'embranche la route, qui traverse le centre de la Servie jusqu'à Tschatschak (une distance de 13 à 14 h.) ou même jusqu'aux sources de la Morava serbe (une distance de 27 à 28 h.). Elle passe par Boukovik, le mont Ventschatz et Vou-kosavtzi et descend dans la vallée du Jasénitza vers Schatornia, en profitant d'un de ces affluens près de Tresehnievitza. Elle remonte ensuite la vallée de Jasénitza et franchissant un contrefort du Schtouratz, elle gagne la vallée du Despotovitza. De Tschatschak elle coupe les montagnes entre l'Ovtschar et le Jclitza et passe àPogatscha, àïouritza, hameau dépendant avec Krivatscha de Goutscha (205 m. et 1351 h.) et à Kotrije (KoTpnJK, pron, Kotridge) (177 m, et 1257 h.) dans la vallée du Gorouschitza, affluent de la Morava. On traverse cette rivière vers le bourg dT-vanitza (122 m. et 501 h. avec une église et une école). Depuis Koratchitza on s'éloigne insensiblement des montagnes, qui restent à droite et voyageant sans cesse dans des bois de chênes, on y franchit les deux ruisseaux de Milatovitza et Mi-'zatscha, qui sont des affluens de l'Ivanitza ou de lTvantscha-Hieka coulant au N. E. de Koratchitza. Non loin de la route à l'O. restent deux villages, dont l'un se nomme Kadmilovitch (le Bali-novich des cartes). Au sortir des bois on entre dans un pays de gras pâturages, où on a la première fois l'occasion de remarquer que les montagnes sont déjà à plus d'une lieue à l'E. de la route. Dne source acidulé excellente se trouve au pied oriental de celle nommée Boukoulja à Boukovik (67 m. et 420 h.) près de Ver-hitza. Le village de Kobljare est aussi dans ce voisinage. C'est dans ces lieux que se trouvent des propriétés ayant appartenu à Izerni-George et en particulier une source placée dans un fossé en dépendait. Topola (139 m. et 1040 h.), son lieu de naissance, 11 est pas éloigné. Il a été tué dans la forêt de Banitschina, qui «e trouve plus à l'E. dans le cercle de Sémendria sur la route de Kragoujevatz à cette ville. Belosavtzi est un hameau de 66 maisons et 432 âmes avec un mauvais Han situé sur la route assez près du torrent du Ivou-perschitza (Kupernica des cartes), qui coule à l'E. et afflue dans •e Jasénitza. Dans la vallée de ce dernier se trouvent à 2 h. à ]'L. de Belosavtzi le village de Schoume (Bois) (02 m. et 451 h.). HÎH à 4 h. au N. E. celui de Saranovo (135 m. et 930 h.), à 3 h. à l'O. celui de Verbitza-Mala (36 m. et 228 h.) et 3 h. au S, est Jabari. Tout le pays environnant est plat et déboisé, le sol en est noirâtre et argileux, comme s'il y avait eu des marécages. La vue des montagnes boisées à l'O. est étendue, icar on apperçoit non pas seulement le petit dos arrondi du Kosmaï (1250 p.) mais aussi celui assez semblable au-dessus de Boukovik (1400 r>.), puis après de bien plus basses hauteurs la masse triangulaire du Venschatz de 1913 p. d'élévation absolue et avec le bain thermal de Bania à ses pieds. TOnfin viennent les petites plate-formes de plus de mille pieds de Trescbnievatz et aux sources multiples du Jasénitza les monts bombés de Koudnik de plus de 3000 p. De Belosavtzi à Jabari (JKaôapn) la route rentre de nouveau dans les forêts de chênes et y reste jusqu'à la descente sur des roches tertiaires dans la vallée du Jasénitza, où on a le plaisir de revoir un pays cultivé. Jabari (le Schabari des cartes) est à 15 à 16 h. de Belgrade et 6 h. de Kragoujevatz, mais la poste ne compte que 18 h. de Belgrade à Kragoujevatz. C'est un grand village de 85 maisons et 589 âmes; les habitations entourées de pruniers sont placées surtout sur le côté septentrional de la vallée et sur le bord du torrent du Jasénitza. Dans le milieu de la cavité se trouve une assez bonne auberge bâtie en 1836 et offrant outre une galerie couverte une chambre des voyageurs avec un poêle. Le reste de ce bâtiment est occupé par la cuisine sans cheminée et le comptoir, tandis qu'en 1836 au moins le fond de cette grande pièce servait encore d'écurie. La partie la plus remarquable était le toit en tuile de cette auberge, car dans tout le village il n'y en avait pas d'autre semblable, si on exceptait toutefois la maison d'un sénateur, qui a un étage et est blanchie en dehors. Nous fûmes pour rendre visite à ce personnage, qui demeure à l'extrémité orientale du village dans une maison isolée au milieu d'un bois de pruniers. N'étant pas à la maison, nous fûmes reçus par ses gens dans un carré occupé par des dépendances. Les dames de la maison tout-à-fait en costume serbe vinrent nous embrasser la main et nous offrirent de mauvais escabauds en bois pour nous asseoir. Comme raffraichissement on servit l'eau-de-vie de prunes, du lait et du fromage. A ]/4 h. du village de Jabari se trouve au S. dans une petite gorge et au pied des hauteurs une auberge isolée avec une galerie délabrée à un premier étage. Un très petit ruisseau coule dans ce vallon et se rend dans le Jasé-nitza. La montée commence toute de suite derrière cette auberge, se tient à l'E. du Jasénitza sans qu'on le voye et ramène promp-tement le voyageur dans les bois, où on ne rencontre que des cochons et quelquefois des bergers. On arrive àTrnava (119 m. et 831 h.) et en deçà de cette plate-forme boisée et d'un vallon arrosé par un affluent du Lipovatscha on atteint l'auberge isolée de Schoumitsch, qui est placée sur un pâturage déboisé, tandis que les maisons du village du même nom paraissent disséminées dans la forêt un peu au S. Dès qu'on a dépassé l'auberge, on rentre dans les forêts de chênes, dont la monotonie n'est même que rarement interrompue par des échappées de vue sur les montagnes à PO., en particulier sur celles de Roudnik. Stragari reste à l'O., il en est de même de Loujnitza (./lyjKHHiia) (38 m. et 662 h.) sur un affluent du Lépenitza, et plus loin de Grbitze (G. Gornia 31 m. et 223 h. et G. Dolnia 55 m. et 458 h.). A 23/4 h. une hutte dans les bois forme l'auberge de Sou-schitza, où au moins on trouve un peu de vin et d'eau-de-vie. Ce n'est que vers ce lieu qu'on a quelque vue sur les cavités séparant à l'O. ce plateau boisé des montagnes. Le Jasénitza occupe ces profondeurs en prenant sa source à quelques lieues au S. O. à Tépheritsch dans le cercle de Roudnik, tandis que le Lépenitza coule assez loin à PE. entre la montagne de Goloubitza (de Golouba, Colombe) au N. et celle de Sobovitza (de Sob, Hibou) au S. A 1 1. de Kragoujevatz les bois cessent et on domine la vaste cavité évasée, où est située cette ville avec ses toitures en tuile rouge. De tous les côtés entouré de forêts et de hauteurs, la verdure des prairies et les champs de ce bassin d'environ 2 1. de diamètre offrent une de ces vues champêtres, dont abonde la Servie. Kragoujevatz est placé plus près des forêts, qui sont à l'O. que de celles à l'E. De plus de ce côté ne sont que des émi-nenccs dépendantes du Trzni-Vr (cime noire), tandis que de l'autre régnent des montagnes formant les derniers contreforts des monts de Roudnik. Une crête à V/2 h. au S. S. O. de la ville fait surtout de l'effet par ses escarpemens, elle porte le nom de Balko-vatza-Kosa. On descend à Kragoujevatz par une pente insensible et sur un terrain noirâtre. Avant d'atteindre la ville, on passe un ruisseau, affluent du Lépenitza, à Dcsimirovatz (42 m. et 282 h.) ; c'est là que les habitans reçurent le prince Milosch après la révolte de 1835. L'issue si paisible de cette levée de boucliers aurait dû le faire réfléchir sur sa conduite au lieu de le laisser persister dans ses erreurs gouvernementales. Kragoujevatz n'était du temps des Turcs qu'un très petit bourg avec une ou deux mosquées, dont on voit encore les restes d'une, mais depuis la révolution serbe et surtout depuis que le prince Milosch y a établi sa résidence, cet endroit a acquis quelque importance et comptait déjà en 1840 039 maisons et 2376 âmes sans la garnison. Il y a un gymnase et une école élémentaire de 3 classes et c'est la résidence du commandant et du tribunal du cercle, qui porte le nom de cette ville. L'archiprêtre de cette ville a sous lui les districts de Lépenitza et de Grouja, savoir 37 paroisses et 15 églises. Le cercle de Kragoujevatz comprend les trois districts de Grouja (rpyîKa) , de Lépenitza et de Jasénifza et contient 9820 maisons et 02,374 âmes distribuées dans 72 communes, 3 villes ou bourgs et 109 villages. Il y a 17 écoles et une expédition postale à Kragoujevatz et à Batotschina. Le district de Grouja consiste en 1 bourg, 81 villages, 4397 maisons et 26,260 habitans. Le commandant réside à Kragoujevatz. Celui de Lépenitza contient 2 bourgs, 58 villages, 3590 maisons et 23,871 âmes. Le commandant réside à Ratscha-Gornia (129 m. et 904 h.), (Ratscha-Dolnia a 64 m. et 401 h.). Enfin celui de Jasénitza compte 30 villages, 1838 maisons et 12,733 âmes. Le commandant est à Topola. Le centre de la ville de Kragoujevatz est formé par l'ancien Tschartschiou (marché) ou par une large et longue rue toute garnie de maisons à un étage, au rez-de-chaussée desquelles sont des boutiques. Quelques-unes s'avancent sur ces dernières et sont supportées par des piliers en bois. C'est la seule rue pavée de la ville. A l'extrémité septentrionale du Tschartschiou se bifurquent les rues conduisant d'une part à Belgrade et de l'autre à Roudnik ou Valievo. Au bout opposé le Tschartschiou se termine par une petite mosquée en ruines, un café et un pont sur le Lépenitza ou torrent de Kragoujevatz, d'où on sort de la ville pour aller à Krouschevatz ou Jagodina. A l'E. du Tschartschiou il y a 4 à 5 rues alignées et coupées par d'autres rues à angles droits, mais la plupart des maisons n'y sont que des rez-de-chaussée et sont séparées de la rue à la turque par une cour entourée d'un palissade en branches d'arbres tressés. Dans ce quartier se trouve la ni police avec ses bancs toujours prêts à y mettre des hommes ou des femmes condamnées à la bastonnade comme en Hongrie. A côté est l'édifice destiné à la chancellerie de l'état, mais qui sert aussi à la magistrature de la ville et au tribunal supérieur. Ce bâtiment carré d'un étage est d'une architecture hongroise très lourde et à murs épais. Il est garni d'un côté d'une galerie, qui sert d'antichambre. Un large corridor traverse l'édifice et sur chacun de ses côtés sont trois salles, où il n'y a justement que le mobilier nécessaire pour les employés, de manière qu'ils ne peuvent pas seulement offrir une chaise à ceux qui les visitent. Une des salles dans le bas était sans meubles et contenait le tableau en pied du prince Milosch. Chaque salle a sur sa porte un écriteau désignant son emploi. Le même enclos palissade renferme outre cet édifice une autre maison, qui paraît habitée et une petite maisonnette en bois et à fenêtres. Ce dernier pavillon sert de chambre à manger et de lieu de séance au tribunal supérieur. En dehors est un banc sous des arbres. C'est le lieu de repos des employés. A l'O. du Tschartschiou est une place longeant le ruisseau, qui coule parallèlement au marché. Sur les côtés de ce dernier se trouve le Konak du prince, celui de la princesse et la maison du trésor, le Konak des Tartares ou couriers du prince et son apothicairerie. Sur la place se trouvait jadis un poirier, auquel le prince Milosch a fait pendre les têtes des mutins dans les premières années de son gouvernement. Le Konak du prince est une maison carrée en bonne partie en bois dans laquelle un vestibule énorme et tout ouvert d'un côté occupe le plus de place, soit au rez-de-chaussée, soit au premier. Sur ce dernier s'ouvrent les portes des chambres. Le vestibule d'en bas servait d'antichambre, tandis que celui d'en haut était le lieu favori de réception, où le prince Milosch passait à la turque la plus grande partie de sa journée. Pour monter au premier étage il part du vestibule inférieur un escalier en bois fermé dans le haut par une trappe, tandis que sur le derrière de la maison et en dehors est un autre escalier dérobé. Autour de ce Konak est une petite cour entourée d'une haute palissade crénelée en planches. Sous un hangard étaient placés les six canons de bronze que le Sultan Mahmoud avait donnés au prince. La palissade à deux sorties, où ne se trouvaient pas plus de sentinelles qu'à la porte des Konaks de la plupart de Paschas. Mais à 30 pas d'une des entrées et vis-à-vis de la galerie, où se tenait le prince, est un corps de garde d'une vingtaine d'hommes avec une sentinelle, qui sert en même temps à défendre l'entrée du trésor. Le Konak de la princesse fait face à celui du prince et n'a aussi qu'un étage. A la manière turque les murs blancs en sont enjolivés par quelques arabesques ou fleurs pointées. Dans la même cour de cette habitation le trésor occupe le rez-de-chaussée et la sentinelle n'y laissait entrer personne sanB un ordre du prince ou d'un de ses employés supérieurs. En deçà du ruisseau, près du Konak, il n'y a que peu d'habitations, mais par contre on y trouve l'église, la poudrière et une grande caserne. Deux ponts de bois lient ce quartier au reste de la ville. Comme en Gallicie l'église n'avait alors qu'un clocher en bois placé à côté d'elle et l'édifice était si petit que la plupart des fidèles étaient obligés de s'agenouiller sur le gazon dans la cour, lieu qui servait plus tard d'endroit de danse. Cette église et sa cour ont même vu quelquefois des réunions populaires et le prince Milosch y a été, je crois, proclamé chef du peuple ou du moins prince héréditaire. Peu au-delà de l'église sont de petites éminences, où se trouve le cimetière. Au N. du Konak il y avait dans une rue quelques maisons passables avec des jardins. Kragoujevatz ne comptait en 1832 que deux auberges , où des Européens pouvaient loger. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, p. 281.) En général Kragoujevatz se ressentait comme le reste de la Servie du manque d'un maître sachant emprunter aux Européens les choses utiles, qui peuvent servir à humaniser et civiliser le pays. Pour conserver à son peuple sa simplicité de mœurs et pour ne pas froisser la vanité des moins fortunés par un luxe inutile, le prince Milosch avait dépassé dans ses intentions bonnes au fond toutes les limites du rationnel. Ainsi les rues auraient dû être pavées, il aurait pu y avoir quelques promenades et l'endroit de l'ancien cimetière offrirait une localité favorable pour un pavillon, où on pourrait placer un cafetier. Au lieu de cela la place même devant le Konak princier était fort boueux quand il pleuvait et n'était orné d'aucune plantation d'arbres. Au-devant de la demeure du prince il n'y avait en 1838 qu'une solive de bois avec un lion tenant entre ses pattes un agneau et le banc propre à donner la bastonnade aux employés. Les jardins des particuliers m n'étaient tout au plus que des champs de légumes et plus souvent des bosquets de pruniers avec de la mauvaise herbe. Au lieu d'encourager les innovations en fait d'art le prince en paraissait si jaloux qu'un des conseillers ayant voulu ajouter à sa maison quelques figures en bois et gypse, l'ordre lui fut donné de ne pas le faire et même les statues déjà achetées furent brisées. Il était honteux pour la Servie que sa seconde capitale n'eût pas seulement une église avec un clocher et qu'on avait pensé plutôt à une belle caserne qu'à un endroit convenable pour le service divin, quand le trésor regorgeait pourtant d'argent. Kragoujevatz n'étant pas placé sur une grande voie de communication et n'étant surtout habité que par des employés et des agriculteurs, il aurait été plus nécessaire qu'ailleurs d'offrir aux habitans des exemples d'amélioration et de les familiariser avec ce que l'Europe a de bon et d'utile. Tout ce qu'on avait fait jusqu'alors se réduisait à une auberge et à quelques essais de faire représenter des pièces de théâtre par de jeunes élèves du gymnase. Dans les audiences chez le prince on était obligé, comme en Turquie, d'ôter ses souliers pour monter à la galerie où il se tenait assis sur un canapé, quoiqu'aucun tapis n'orna ce lieu. Le prince saluait les étrangers en ôtant son Kalpak hongrois et leur faisait donner quelquefois des chaises. D'autres fois il les recevait debout et ne se rasseyait pas. S'il lui plaisait, il les invitait à dîner, ce qui était cependant devenu une faveur plus rare dans les derniers temps à cause du nombre plus grand d'étrangers. En 1836 sa conversation roula surtout sur les eaux minë-les et les mines, parce qu'il est amateur de bains et d'eau acidulé et parce qu'il aurait voulu faire profiter son pays de toutes ses richesses territoriales. Pour cela il fit rebâtir tout à neuf Banja, où il y a des eaux thermales, mais pour les mines il n'a jamais pu prendre une décision, ne trouvant pas des gens com-pétens à qui il pût se fier. Son successeur, Kara-Georgevitch, a été plus heureux. Pour nous faire bien voir les montagnes de Roudnik, il nous donna un de ses conseillers les plus instruits, Mr. Radischevitch. En 1839 il eut aussi la complaisance d'ordonner à un capitaine retournant chez lui de nous accompagner jusqu'à la frontière, ce qui était une chose d'autant plus nécessaire que le pays de montagnes que nous devions parcourir ne pouvait guère offrir que de cette manière les choses nécessaires m h la subsistance de notre compagnie et surtout de nos chevaux. En général on doit lui rendre ce témoignage que jamais un étranger désireux de voir la Servie, sous quelque rapport que ce soit, ne s'adressa en vain au prince Milosch, même sans avoir pour lui aucune recommandation. Dans les environs de Kragoujevatz nous ne trouvons à citer que la vallée champêtre au S. S. O. et le très petit couvent isolé de Dratscha (8 m. et 50 h.). Ce dernier est placé à l'O. dans un vallon étroit et boisé, tributaire du Lépenitza. Il est entouré de tombeaux et de maisonnettes pour recevoir les gens, qui y viennent en procession à certaines époques de l'année. La vallée au S. S. O. de Kragoujevatz est celle de Lépenitza, qui prend sa source près du village de Gomtschelo dans le district de Grouja et se réunit au Jedralitza (JKApajlllu;a) (de Jedral, une grue) à l'O. de la caserne de cette ville. On s'y rend directement en traversant l'extrémité du coteau, qui sépare cette cavité de celle de Kragoujevatz. Elle est assez large et ne se rétrécit qu'à % h. de la ville, où elle devient une gaine bordée souvent de petits escarpe-mens de rochers, qui obligent de passer d'un bord du torrent à l'autre. Ce n'est qu'à une grande demi-lieue plus loin qu'elle s'évase, parce que les sources du torrent sont multiples ou triples et sont séparées par des dos arrondis et gazonnés. On remarque dans ces lieux quelques habitations, tandis qu'à l'entrée de l'étranglement de cette vallée se trouve sur la hauteur à l'E. le village de Dragobratchia ou Dragobratia (Dragobracsa des cartes) (43 m. et 237 h.) et sur le côté opposé Beloschevatz (65 m. et 335 h.). Ces lieux habités sont placés assez pittoresquement sur le dernier échellon de la montagne boisée en chênes de Balko-vatza-Kosa et bordée à sa cime d'une longue suite de rochers escarpés. Au pied de ces hauteurs dans le district du Grouja est le village de Baikovatz (40 m. er 263 h.). La route de Kragoujevatz à Krouschevatz parcourt une distance postale d'un peu plus de 12 heures. Elle monte à l'E. par la petite vallée de Tépheritsch, hameau de 20 m. et 116 âmes. On laisse à l'E. sur une colline le parc de chasse du prince et on monte dans des forêts de chênes. On rencontre à % h. le village de Boukoravatz sur les premières pentes. Plus loin la route se bifurque, l'une allant à l'E. à Jagodina et l'autre au S. à Krouschevatz ; en continuant à monter sur une dépendance du Trzni- Vr, on laissé après l/2 h. à l'O. les deux villages de Sabanta bas et haut (S. Dolnia, 76 m. et 492 h. et S. Gornia, 60 m. et 391 h.), qui sont situés dans le haut de la vallée du Jedralitza. Au milieu de la forêt on trouve sous un beau chêne une estrade, qui sert de lieu de repos ou même de couchée. On est alors à environ 1500 p. de hauteur et il y a à l'O. des crêtes plus élevées de 300 p. Ensuite en descendant on atteint Ratkovitché (90 m. et 592 h.) et à 4 h. de Kragoujevatz Rékovatz (69 m. et 450 h.) et Kava* dar sur le Rékovatzka-Rieka (54 m. et 327 h.). On va gagner par ce vallon et une crête en partie boisée le village de Tetschitché (39 m. et 236 h.) et la large vallée du Lévatschka-Rieka, où est le village et le Han de Bélouschitch (Betusich des cartes) (59 m. et 381 h.). L'eau de Rékovatz coule au N. E. dans le Lévatschka. Les hauteurs au N. du Lévatschka-Rieka portent à tort le nom de Kotlenik dans la carte de Mr. Bougarski. Une basse partie N. E. du Tikva-Planina sépare Bélouschitch de la vallée du Kamenska-Rieka courant de l'O. à l'E. Sur son bord septentrional se trouve le village de Krtschin (K. Dolnii, 32 m. et 254 h., K. Gornii, 18 m. et 102 h.) et sur le bord opposé Karanovtschitch (37 m. et 240 h.) et Toîievatz (Tollovatz des cartes) (54 m. et 293 h.). Dans ce dernier village est un mauvais Han et à peu de distance au N. le hameau de Tzrnitza. Les hauteurs au S. sont si peu considérables qu'on apperçoit par-dessus elles le mont Jastrcbatz au S. de Krouschevatz. Elles font partie du Temnitschka-Planina, qui borde le côté septentrional de la Morava depuis la vallée de Grouja (FpyîKa) jusqu'au confluent des deux Moravas serbe et bulgare. Entre Toîievatz et Padedge (lla^eat) (40 m. et 220 h.) on franchit une hauteur boisée en chênes, d'où on apperçoit de nouveau les montagnes au S. de Krouschevatz ainsi que celles aux sources du Timok en particulier le pic pyramidal et isolé du ïitagn (PTaib). On rencontre le village de Salogavatz ou Sa-logava et on passe ensuite un vallon, où il y a le hameau de Ka-ntenare (10 m. et 61 h.) et quelques champs de maïs. Son eau débouche au S. dans la Morava. On n'a plus enfin qu'une plateforme boisée à traverser pour atteindre le village de Jasika (Ju-8ika des cartes) sur la Morava. La vue depuis la hauteur embrasse tout le bassin triangulaire de Krouchevatz avec son beau pourtour de montagnes boisées occupé principalement par la chaîne du Jastrebatz (Vautour) à formes massives et saris rochers à découvert. Cette montagne se divise en grand et petit Jastrebatz (Veliki-et Mali - Jastrebatz). Sous ce dernier nom on comprend les contreforts au S. et surtout S.E. du grand Jastrebatz, qui se trouvent en grande partie sur territoire turc. En avant au S. O, il y a de petites collines déboisées et dans cette même direction paraissent par-dessus leurs crêtes assez voisines les cimes du Jelin et plus au S. celles du Kopaonik. Un bac nous fit franchir la Morava et nous mîmes encore trois quart d'heure pour traverser la plaine en partie cultivée, qui précède Krouschevatz, une des anciennes résidences des rois serbes. Ce bassin de 3 1. de long sur une dans sa plus grande largeur à Krouschevatz semble fait pour une grande ville, ses abords sont faciles et son sol fertile ; si la Servie s'étendait une fois comme jadis jusqu'à la Macédoine, Krouschevatz comme Ka-ranovatz s'offriraient comme points centraux pour le siège du gouvernement. Comme le district de Krouschevatz n'appartenait en 1836 que depuis trois ans à la Servie, les environs se ressentaient encore de la présence des nonchalans Turcs. Bien des parties de la plaine étaient couvertes de buissons et des plus beaux champs de maïs on passait à des terrains vagues, où des moutons trouvaient tout au plus quelque nourriture. Le bourg de Krouschevatz1) (t. Ala-dschahissar) à 330 p. sur la mer a maintenant plus de 358 maisons et 1417 habitans, tandis qu'en 1836 il comptait à peine mille habitans et avait été réduit lors du départ des Ottomans à une ou deux ruelles au pied de la petite plate-forme, à l'extrémité desquelles était l'ancien château des rois serbes et en particulier du Knes Lazare. Cette résidence royale avait été transformée tant bien que mal en un fort, dont les remparts étaient les restes d'une tour et de l'ancienne enceinte murée ainsi que des amas de terre et de fascines. L'église du château, le seul monument encore un peu bien conservé de ce lieu, servit de magazin à foin.2) Depuis ') Ces dénominations de Krouschevatz, Krouschevitza, Krousehintzi, Krou-schie et Krousehina sont fréquentes et dérivent probablement de Krouck, pain, tandis que des mots albanais paraissant assez semblables au premier instant, ont pour racine Krouschk signifiant descendants telle que la dénomination de Krouschvelj 5) Voyez la description de ce monument dans ma Turquie. Vol, 2, p. 381. là les Turcs dominaient une rue sombre, sale et garnie de boutiques, au bout de laquelle se trouvent quelques huttes de feuillages habitées par des Zingares, en partie forgerons. Dans la même ruelle existait une fontaine et la ruine d'une ancienne mosquée sans minaret, édifice couvert d'une toiture en bois. Les Turcs pressés par les Serbes de rendre ce bourg, s'étaient réfugiés au nombre d'une soixantaine au haut de cette bicoque, d'où ils tirèrent encore en mai 1835 sur les assaillans et d'où ils ne furent dénichés que par la famine. La position basse de toutes ces habitations avait engagé le gouvernement à reporter la ville sur la plate-forme au S., où a été probablement jadis l'ancienne ville. En 1837 on avait déjà tracé au cordeau plusieurs rues et bâti bon nombre de maisons nouvelles, parmi lesquelles se distinguait celle du commandant Pierre Lazarovitch, plus connu sous le nom de Pero Soukitsch, parce qu'il avait été sous Tzerni-George au service d'un chef serbe de ce dernier nom. Ce Konak avait été bâti par le prince Milosch. Il est entouré d'une haute palissade en planches. Au-devant se trouvent quelques dépendances, en deçà desquelles est la cour avec Un édifice en forme d'équerre. Des galeries bordent le rez-de-chaussée comme le premier, un pavillon carré est annexé à chacune des galeries et sert agréablement de salon de réception en étant muni d'un beau tapis au premier étage. Les portes des appartenons débouchent, comme partout en Turquie, sur les galeries. Dans les chambres à coucher le fond près de la porte en est séparé par des boiseries découpées à la moresque. C'est le lieu, où se trouvent le fourneau de terre et l'endroit pour mettre des effets. Les fenêtres ont de petits vitraux, dont quelques-uns sont de couleur. Il y a des cabinets de toilette avec des conduits pour jeter l'eau. Le commandant ou colonel nous hébergea deux jours et vivait moitié â la turque et moitié à l'européenne. Ainsi il portait le beau costume rouge serbo-turque des capitaines et sa femme fort séduisante était aussi vêtue à la mode du pays. S'il dînait à table avec des chaises, le dîner commençait, comme en Servie, par le verre d'eau-de-vie de prunes et chacun trouvait à ®a place la gousse d'aile et un morceau de fromage blanc, pour ouvrir l'appétit. Le maître de la maison se servait le premier et faisait passer le verre d'eau-de-vie à son voisin, tandis que sa 12 femme lui mettait sa serviette, lui demandait la permission de s'asseoir et lui baisait la main avant de le faire. Le colonel nous engagea d'aller voir son cocher, un Irlandais, qui s'étant enivré était tombé de la voiture et s'était cassé la jambe. Ce pauvre diable avait fait en Albanie des voyages avec des Anglais, ce qui l'avait amené en Servie. Il était presque délaissé dans un rez-de-chaussée1 et on lui avait appliqué l'appareil si mal qu'il boitera probablement toute sa vie. La position de cet homme aurait dû exciter la pitié, mais il ne paraît pas qu'on en ressentit beaucoup pour lui. Krouschevatz, à 12% h. de Kragoujevatz , est à présent la résidence du commandant et du tribunal du cercle ainsi que d'un archiprêtre, qui a sous lui les districts de Krouschevatz et de la Joschanitza ou 20 paroisses et 7 églises. Il y a une église et une école de deux classes et une expédition des postes. Le cercle de ce nom comprend les trois districts de Koznik, de la Morava bulgare, de la Joschanitza et de Krouschevatz, savoir: 64 communes, 2 bourgs, 104 villages, 19 hameaux, 7181 maisons et 47,110 âmes. Il y a 6 écoles. Des douanes et des Sastanak ou parloirs sont sur la frontière à Soupovatz et Jankova-Klisoura. Le district de Koznik comprend 53 villages, 9 hameaux avec 1655 maisons er 12,243 âmes. Le commandant réside à Vitkovo (29 m. et 195 h.). Celui de la Morava contient 55 villages, 1471 maisons et 9799 habitans. Le commandant est à Koula-Vitanovtzi (Tour de Vita-novtzi). Celui de Joschanitza compte 20 villages, 6 hameaux, 701 maisons et 6201 habitans. Le commandant réside à Bania. Enfin dans le district de Krouschevatz il y a 2 bourgs, 66 villages, 4 hameaux, 3294 maisons et 18,873 âmes. Le commandant a sa résidence à Krouschevatz. Nous fûmes voir depuis Krouschevatz le défilé de la Morava entre Schanatz et Maskare sur la rive septentrionale et Makre-schani (45 m. et 274 h.) et Stalatch (76 m. et 422 h,) sur la rive méridionale. Nous passâmes à gué la Rasina ou Raschina, qui a son origine à plus de 10 I. au S. O. de Krouschevatz. Ses sources-mères sont dans le Plotscha et le Kopaonik ; elle passe ensuite entre le Stanischitza-PIanina au N. O. et le Lepenatz-Planina au S. E. et reçoit à l'E. de Krouschevatz un petit torrent venant du pied du Jastrebatz ; sur ce dernier sont les villages de Moudra-kovatz (36 m. et 219 h.) et de Lipovatz (10 m. et 64 h.). Elle Coulait jadis au pied de la plate-forme de Krouschevatz et en a été détournée, il y a longtemps. Cette eau fait mouvoir un moulin à dix roues appartenant au colonel et bâti par le prince Miloseh. En deçà du torrent est le village de Bivolie de 68 maisons ou 426 âmes, qu'on était occupé en 1837 à rebâtir tout à neuf pour cause de salubrité. Ce déplacement est peu coûteux pour les ha-bitans, car les maisons ne sont bâties qu'en solives de bois avec des clayonnages garnis en argile et blanchis à la chaux. Une telle habitation ne revient qu'à moins de 14 francs, le bois étant livré gratis. L'établissement de la route dans le défilé de la Morava a exigé de faire sauter les rochers avec la poudre, de manière qu'à présent la voie est practicable pour les voitures. Les hauteurs voisines sont extrêmement basses et seulement couvertes de petits bocages de chênes. Le long de la rivière quelques rochers de gneiss sont à nud. Pour atteindre depuis le village la ruine de l'ancien château de Stalatch (voyez ma Turquie. Vol. 2, pag, 371), il faut monter pendant 3/4 heures, mais la vue étendue depuis cette localité historique récompense bien de la peine, car ces pâturages dominent au loin le pays surtout au N. E. et à l'E. On y voit allant du N. au S., les hautes et longues cimes surbaissées de la chaîne de calcaire secondaire de l'Omolie (4000 p.). Cette espèce de toit plat paraît faire masse avec celui de l'Ain - Planina, quoiqu'il y ait entre eux la partie supérieure de la vallée profonde du Mlava. Puis viennent, en deçà de la Resava, le Trni-Vr (3000 p.) et les cimes plus arquées du Paratchina-Breg ; ensuite les deux sommets arrondis du Baba avec leurs escarpemens calcaires et gris près de Tzernitza, la chaîne plus haute du Goloubinie ou Golou-batz (plus de 3000 p.) à cimes ondulées, enfin au S. E. le Mosna-Planina, la double pyramide du Rtagne (3900 p.) et les hauteurs vers Boukovik (2000 p.). De basses collines tertiaires sont placées au-devant de ce rideau de hautes montagnes secondaires et surtout calcaires ; elles s'étendent de Paratchin par Schoupéliak vers Aleksinatz. A l'O. s'offrait la longue crête du Temnitschka-Planina et plus au S. s'élevaient du N. au S. le Joschanitschka-Planina, le haut dôme du Jelin et après plusieurs cimes plus basses le roi de ces montagnes, le Kopaonik. De Krouschevatz nous gagnâmes à l'O. S. O. des plate-formes peu élevées et couvertes de bocages de chênes et de bouleaux , qui séparent la vallée de la Rasina de plusieurs aftluens 12* I KO de la Morava. Ces hauteurs augmentent en élévation en allant au S. O. et sont les contreforts du Stanischitza, qui se rattache au S. O. de Brouss au Plotscha. Nous traversâmes ensuite le vallon de Pépéliouscha, où se trouve au nord le village de Pépélicvatz (le Prepolotsch des cartes) et plus loin nous atteignîmes le village deTrebotin (39 m. et 346 h.) dans le vallon du Verbitschka-Ricka et nous descendîmes l'eau jusqu'à Verbitza placé sur la rive occidentale et non loin d'une source acidulé nommée Slatina. Les deux cours d'eau mentionnés sont des affluons de la Morava. En deçà des hauteurs au S. on trouve dans la vallée de la Ra-sina le village de Schaphrani (26 m. et 182 h.). Le colonel de Krouschevatz nous avait fait préparer à souper à quelque distance du village sous un groupe de beaux arbres. Des tentes de feuillages avaient été élevées pour lui et ses gens, qui étaient en tournée pour des affaires administratives. Ce bivouac avec tout ce monde en costumes variés était quelque chose de nouveau, mais la vingtaine de paysans requis pour nous préparer à souper ne nous laissèrent guère de repos, parce qu'ils ne mangèrent qu'après nous et bavardèrent une bonne partie de la nuit comme d'anciens amis, qui ne se seraient pas vus depuis des années. Notre route nous fît traverser après Verbitza deux vallons et deux plate-formes plus élevées que celles que nous avions passées. Des pâturages secs couvraient ces lieux, où l'eau paraissait rare. Dans le fond de la seconde cavité est le hameau de Bo-bota ou Bobote (14 m. et 64 h.) tandis qu'au S.O. sur la hauteur se trouve celui de Botounia (le Batina de Bougarski) (39 m. et 306 h.) entouré de vignobles et de collines à terrain blanc, qui nous rappelaient le calcaire d'eau douce des environs d'Aiguillon dans le Lot et Garonne. Ce district porte le nom de Joupa et fournit un excellent vin connu sous le nom de joupsko vino. Au N. de Bobota reste caché à distance le couvent de Li-oubostènié appelé Vélouscha. Depuis Botounia nous eûmes une vue assez étendue au N. O., à l'O. et au S. O. sur les montagnes du Kri-va-Rieka et du château de Koznik ainsi que sur le cône obtus du Jelin et le massif élevé et plus large du Kopaonik. A la rencontre de ce dernier avec le Jelin le haut Plotscha (du mot Plotscha, lame ou plaque de pierre) nous restait caché. La position si isolée et élevée du vieux manoir de Koznik nous donna envie d'aller le visiter. Nous abandonnâmes donc le colonel et sa suite pour nous rendre directement au château, qui est à 3 h. de ce village. Ce chemin passe sur la colline de Bo-tounia et descend dans le profond vallon du Vratar, dont on suit le torrent pour traverser ensuite le contrefort de 2000 p. entre cette vallée et celle cultivée de la Rasina. On rencontre sur cette route à 1 1. de Botounia le hameau de Trmenitza. Nous remontâmes la Rasina jusqu'au village de Botouritchi (24 ni. et 178 h.) à l3/4 1. de Botounia et y ayant pris un guide, nous commençâmes notre ascension au château à 2868 p. de hauteur absolue. L'ancienne route existe encore et décrit un énorme coude au S. O. Elle passe d'abord par des bois de chênes et ensuite par des pâturages. Depuis ce point on va gagner un bois de hêtres, dans lequel on tourne autour de la source d'un petit torrent et on arrive enfin en se dirigeant au N. au pied de la butte escarpée, qui supporte la ruine du château serbe de Koznik. (Voyez sa description dans ma Turquie. Vol. 2, p. 372.) De Botouritchi nous descendîmes la vallée de la Rasina jusqu'à Brouss, où nous devions retrouver le colonel. Nous remarquâmes sur notre passage plusieurs villages, savoir Milentia, Ribari (41 m. et 209 h.) et Osrcdtzi (75 m. et 651 h.). Le petit torrent d'Osredatz vient joindre du S. la Rasina entre les deux premiers hameaux. Il était déjà nuit à notre approche de Brouss, dont la position nous était indiquée par de grands feux de bivouacs. Quelques coups de pistolets annoncèrent notre arrivée et bientôt nous nous trouvâmes réunis avec notre compagnie de Serbes. Elle était composée du colonel, de trois capitaines, d'un Ispravnik ou juge, de quelques Kmets ou maires, d'un pope ou curé. Une trentaine de paysans avaient érigés quatre cabanes en planches et feuillages, dont l'intérieur était garni de foin et de tapis grossiers. Une grande table était dressée et non loin de là avaient été fichés dans le sol les poteaux nécessaires pour attacher les chevaux, qui mangeaient leur foin à terre. Notre souper fut servi par nos domestiques et les restes leur furent abandonnés, les pauvres paysans durent se contenter de ce qu'ils voulurent bien leur laisser. Le colonel était venu en partie à Brouss pour examiner la construction d'une église qu'on y était en train de bâtir. Il avait atteint le but de son excursion et prit congé île nous après avoir envoyé des pavsans pour nous préparer des cabanes sur la pente du mont Kopaonik. La route de Brouss à cette montagne remonte au S. O, le vallon du Gratschevatzka-Bieka, qui débouche dans la Rasina presqu'en même temps qu'un autre torrent coulant du S. E, L'ascension est graduelle et a lieu tantôt sur un côté de la vallée, tantôt sur l'autre. Au lieu d'une route practicable pour des voitures nous ne suivions plus qu'un sentier, où de mauvaises charrettes auraient eu même ça et là de la peine à passer. Des rochers de serpentine y donnent lieu à cinq défilés, où le torrent est encaissé et tombe quelquefois en cascades. Des vallons latéraux débouchent près d'une des plus grandes gorges, à laquelle l'entassement des rochers nuds donne une sauvagerie pittoresque. En deçà de ce lieu on quitte bientôt la vallée du Gratschevatz-ka-Rieka pour se porter à l'O. dans une gorge, qui remonte au lieu dit Brezetje. Des rochers escarpés de calcaire blanc ou ferrugineux forment le commencement de cette montée et quelques trous y semblent indiquer qu'on y a cherché du minerai de fer. A y2 h. sous Brzetje ou Brzetche (dérivé de Brzitza, lieu où l'eau coule très vite sur des cailloux) existent quelques maisons formant le misérable hameau de Radmanovo ou par abréviation Rad-mono (15 m. et 147 h.), auquel appartient un petit moulin mu par le torrent. Notre lieu de bivouac près de Brzetje n'était qu'une concavité déboisée, qui est sous un col et est préservée assez du vent par les cimes et les bois voisins. Les paysans y avaient bâti trois huttes de feuillages, qui nous furent très utiles , car nous arrivâmes trempés et furent obligés de nous sécher à d'énormes feux allumés devant nos cabanes. Néanmoins la pluie d'orage ayant cessé, nous passâmes dans ce lieu élevé à 3367 p. une soirée agréable. L'eau-de-vie mit en train les paysans et nos domestiques -, il se trouva des joueurs de Gouzlé, des danseurs et même une cornemuse. Un paysan passait pour un virtuose en fait de chants serbes, parce qu'il avait le talent de prolonger longtemps les mêmes intonations d'une voix creuse. Le lendemain nous prîmes congé du capitaine de Brouss, qui nous avait accompagné et nous poursuivîmes notre route dans la seule compagnie du capitaine do Roudnîtza. L'ascension du mont Kopaonik a lieu très facilement depuis Brezetje, car on n'a plus qu'à passer un col très bas et une profonde vallée boisée pour se trouver au pied des cimes de la montagne. Dans la vallée coule un torrent qui va au S. E. et tonne probablement un affluent du Gratsohevaizka-Kieka. Le corps de la montagne n'est occupé de ce côté N. E. que par de beaux pâturages, où on observe diverses fleurs des Alpes. Plus haut des rochers stériles forment les sommets, qui sont alignés du N. N. O. au S. S. E. sous la forme d'une crête bosselée et se prolongent en deçà de la frontière serbe. Des trous y indiquent ça et là qu'on y a recherché du minerai de fer oxidulé, d'où est venu à la montagne son nom de Kopaonik du mot Kopati, creuser, Le 17 juin on y voyait encore ça et là des plaques de neige, qui disparaissent plus tard et n'existaient déjà plus sur le revers méridional. A l'O. sous la crête sont d'assez grandes forets de sapins. La vue depuis le haut est une des plus belles de la Turquie et elle permet surtout de prendre une idée parfaite de l'é-chancrure, où coule 1Tbar, des crêtes de la Bosnie méridionale, des accîdens orographiques de la Haute Moesie, en particulier des plaines de Kosovo et de la Metochiia. Lorsque l'horizon est clair, on apperçoit aussi une portion du Schar. En descendant de la eime du Kopaonik un peu à l'O., on est surpris tout-à-coup de voir par-dessus le pays extrêmement montagneux et boisé de la Bosnie, les pyramides et les aiguilles dolomitiques du Dormitor au Nr. E. du Monténégro *). Cette véritable scie gigantesque de plus de 8000 p. de hauteur forme un contraste complet par la nudité et la blancheur de ses rochers avec le verd foncé des nombreuses crêtes boisées, courant surtout S. E. - N. O. en Bosnie. Le col du mont Kopaonik est sur son côté N. O. et on en descend à l'O. sur une plate-forme boisée en sapins. Cette terrasse passée on ne cesse presque pas de descendre jusqu'à ce qu'on ait atteint le vallon et le hameau de Roudnitza ou Roudniak, qui n'est qu'à '/4 de h. de l'Ibar et compte avec Tzernie 48 maisons et 333 aines. Toute cette pente est très faiblement couverte de broussailles et dans le haut, de petits bois de chênes. Pendant cette course de plus de 2 heures on ne rencontre d'autres habitations que le hameau de Lisina (0 m. et 27 h.). Le capitaine de Roudnitza nous avait aussi préparé des huttes de feuillages et une ') Mr. Viquesncl a dit (Mém. Soc. géol. de Fr. 1842, Vol. 5, p. 68) qu'on y voyait le Kom ; c'est une erreur de nom, car le Kom est caché au Kopaonik par le Stari-Kolaschiu et le Qlieb, d'ailleurs celui qui a vu les deux montagnes ne les confondra jamais ; le Dormitor ressemblant a une scie et le Kom n étant qu un !~'ios piton bifurque au sommet. tablo pour prendre nos repas, mais, comme à Brezetje, chacun était déjà obligé d'employer sa propre vaisselle de voyage. Accompagné d'un gendarme serbe nous passâmes lTbar par un gué assez profond pour empêcher le passage dans les temps de pluies considérables. LTbar forme la limite serbe depuis les hauteurs appellées Arilska-Kosa (Chevelure d'Arilj). En deçà de l'eau commence le territoire du Paschalik de Novipazar, qui comprend dans ce lieu tout le triangle au S. du confluent de la Raschka et lTbar. Ces lieux paraissaient avoir été le théâtre de plusieurs petits combats et on y montrait encore sur territoire serbe une ferme ayant appartenu au Pascha de Novipazar. Nous descendîmes quelques instans cette dernière rivière, qui est bordée de rochers porphyriques escarpés, et ensuite nous parcourûmes une espèce de plateau bosselé et couvert ça et là de petits bocages. Nous n'y vîmes que quelques bergers et aucun village. Plus au S, on y trouve cependant le hameau de Kondjoulitch. Nous traversâmes le vallon de Kravitscha et descendîmes d'une plateforme près de Beotschin dans le vallon du Douk-Phetova, sillon latéral et à l'E. du Doukimpotok, qui débouche au N. O. dans la Raschka. Après avoir guée cette dernière, le gendarme serbe nous quitta dans ce lieu pour gagner le poste serbe, qui se voyait dans le bois de pins sur la hauteur au N. O. Nous avions rejoint enfin une route adaptée aux voitures et même ça et là pavée et nous n'étions plus qu'à environ il/2 à 1% 1. de Novipazar. Le chemin longe la rive septentrionale de la Raschka et passe non loin de plusieurs villages chrétiens, en particulier de Touschimlie, qui est composé d'une centaine de maisons divisées en trois hameaux placés sur la hauteur au N. de la route. De ce côté se trouve aussi Dvoriste, tandis qu'au S. dans la vallée est le village de Posténie (pron. aussi Postienie et Poschtiegnie) à 1310 p. de h. abs. On franchit trois petits cours d'eau, dont le plus considérable est celui du Dègéva-Rieka au pied occidental de la colline de Dègéva ou du couvent des colonnes de St. George (Djourdjovi Stoupovi) à 1/2 1. à l'E. de Novipazar. Cette eau coule de N. N. O. au S. S. E. ou presque N.-S. et a ses sources sur le territoire serbe dans le mont Javor. Elles ne sont séparées de celles de la Morava serbe ou du Moravitza que par la crête du Branianska-Planina. A l'O, de cette colline trachytique il y a un autre petit torrent bordé de schistes arenacés, dont les eaux se rendent dans la Raschka. Environ vis-à-vis au S. du Dègéva-Rieka débouche la vallée de lTlidgaska-Rieka, où il y a à 1 h. de Novipazar un bain d'eau thermale hydrosulfureuse. Novibazar (si. Novipazar, t. Jeni-Pazar)à 241/& h. deKrousche-vatz et 28 V4 h. de Kragoujcvatz et à 1315 p. de h. abs., est précédé par une plaine inculte et par un cimetière. Comme pour toutes les villes turques l'aspect de près ne répond pas à ce qu'on en attend, lorsqu'on voit cette cité de loin. Elle est placée sur la rive septentrionale de la Raschka et occupe plus que la largueur de la vallée, puisqu'une partie des habitations s'élèvent en amphithéâtre sur le pied des collines au N. Vers son milieu elle est traversée environ du N. au S. par un grand torrent, sur lequel se trouve un pont et qui coule sur le pied oriental de la citadelle de la ville. (Voyez sa description dans ma Turquie. Vol. 2, p. 344). Il faut une petite demi-heure pour traverser la ville de l'E. à l'O. On y compte environ 2000 maisons, ce qui donnerait 8000 âmes, nombre que d'autres réduisent à 6000. Les chrétiens serbes habitent surtout au pied de la colline. Les autres habitans sont des Bosniaques mahométans. Les seuls étrangers sont quelques Albanais, des Zinzarcs, des Zingares et des Juifs. Les rues y sont mal pavées et il n'y en a guère qu'une au milieu de la ville, qui soit garnie de boutiques. Il y a au moins trois mosquées visibles par leurs minarets, mais aucune n'est remarcable, pas même celle d'Altoun sur le marché. Le Konak du Pascha, près de la Raschka, n'est qu'un méchant édifice autour d'une cour carrée. Il n'a qu'un étage et est en grande partie en bois. La citadelle délabrée est sur le côté N. O. de la ville. Les cimetières sont à l'E., en deçà de la Raschka au S. et S. O. et sur la hauteur au N. O. Près de la ville la vallée est cultivée à l'O., mais non pas à l'E. Pour reconnaître les environs nous montâmes sur la butte au S. de la ville, où il y a eu en temps de guerre un poste palissade, mais un observatoire bien préférable est la cime de la montagne, qui est à 1 h. au N. E. de la ville et qui supporte les restes du couvent royal serbe des colonnes de St. Georges (Djourd-jovi Stoupovi). Toutes les hauteurs voisines de la ville sont déboisées au N. et en grande partie aussi au S. Depuis le couvent, à 2007 p. de h. abs. ou à 750 p. sur la vallée, on distingue parfaitement le cirque de montagnes élevées, dans le fond duquel gît Novipazar et la plupart des vallées, qui y débouchent de tous les côtés, comme nous le détaillerons plus bas dans l'itinéraire Nr. 23. Novipazar est le chef-lieu d'un petit Paschalik, qui s'étend au S. E. jusqu'au-delà deMitrovitza, au S. jusqu'au Mokra-Gora, auS.O. jusqu'à Bischeva sur la Makva sous Kojai (Pomaj) et au N. O. au-delà de Souodol et de Dougopolie, tandis qu'au N. N. O. et N. E. est la frontière serbe, qui s'avance jusqu'à 2 et 3 1. de Novipazar. Ce Paschalik comprend une population mélangée de Bosniaques chrétiens et mahométans avec des Serbes et un certain nombre d'Albanais, en partie à moitié libres et vivant dans les montagnes. Il ne comprend qu'une ville et le bourg de Mitrovitza, mais il y a assez de villages épars dans les vallées des montagnes, qui forment, pour ainsi dire, tout ce Paschalik. Sa population ne peut guère dépasser 20,000 âmes, si toutefois elle atteint ce chiffre. Le Pascha de Novipazar était en 1836 un homme paraissant fort peu spirituel et si ignorant qu'il ne savait pas lire. Il parut blessé de ce que nous ne lui avions point apporté de présents; néanmoins il nous donna un Kavas pour nous accompagner jusqu'à Ipek en Albanie. A y2 1- de Novipazar sur la rive méridionale de Kaschka, nous quittâmes la vallée de ce nom pour en remonter une autre, qui était assez boisée et sauvage. Mi*. Viquesnel lui donne le nom de Joschanitza dérivé, de Jocha (Joxa), une aune, dénomination caractéristique. Néanmoins ce serait ma vallée du Kosmik ouJe-leschnitza (?). Près de l'entrée de ce sillon est le village de Lou-tae (?) et plus loin Mekinie. Il nous fallut sans cesse franchir le torrent décrivant mille contours au milieu de bosquets d'aulnes, ainsique des petits affluens venant surtout de l'E. Le plus grand de ces derniers est le Kojene (?), qui joint de l'E. et du S. E. le torrent de la vallée à ll/2 ou 2 1. de Novipazar, A 2]/2 h. de cette ville nous commençâmes à monter par des sentiers sur le côté oriental de la cavité et nous mîmes 1 ya h. pour atteindre le col du mont Vré-nie, en avant duquel nous passâmes près de quelques habitations formant le hameau de Vrénie, Les hommes en étaient absens et occupés en apparence à couper les foins sur la montagne à l'O., où se trouvait caché le vieux château serbe de Jelesch avec un hameau ; aussi poussèrent-ils des cris de surprise en voyant passer tant d'Européens, ou bien ils nous prirent probablement dans le premier moment pour des brigands. !S7 Le col du mont Vrénie (du mot albanais Vrinie, côte, pente et hauteur) boisé en partie en hêtres et à 3084 p. d'altitude offre une vue magnifique sur les montagnes voisines et surtout sur celles en deçà de l'Ibar, qui coule à son pied méridional. Des deux côtés du col s'élevaient d'assez grosses têtes calcaires à 6 à 700 p. plus haut que le col, leurs escarpemens et leurs rochers contrastaient agréablement avec les pâturages et les bois à leur pied, en même temps que ça et là des rochers grisâtres étaient isolés dans cette fraîche verdure. En deçà de l'Ibar régnait dans le Stari-Kolaschin (du mot albanais Koli, troupeau) une grande arête calcaire à cimes rabattues et à murailles verticales, tandis qu'à l'O. se voyait les crêtes élevées, rugueuses et à plaques de neige du Mokra-Planina et du Glieb (5Kvinje6). Enfin au S. E. déplus basses montagnes environnaient le cours de l'Ibar. La descente sur cette rivière fut aussi très pittoresque, parce que toute la pente est déboisée et couverte de prairies, de champs et d'habitations isolées formant le hameau de Vresnik(?). Le Bo-loubaschi qui nous accompagnait, diminuait seul notre plaisir en nous priant de presser nos pas à cause des habitans. Au pied de la montagne la vallée offre aussi au N. O. un superbe et profond défilé, où l'Ibar est resserré entre de hauts rochers à pic, en deçà desquels on apperçoit les cimes neigeuses du Mokra-Planina. Les montagnes du défilé portent le nom de Vratsche (de Vrata, porte) et sont séparées du mont Vrenic par le vallon de Vischentza, qui court environ du N. au S. Au passage de l'Ibar sur le petit pont de Kibaritch (de Riba, poisson) nous rencontrâmes quelques Bosniaques armés à cheval et l'un d'eux nous suivit quelques instans, probablement par curiosité. La route descend la rivière à travers de petits bois interrompus par des prairies marécageuses. Chemin faisant, nous passâmes près de la tombe d'un Spahi turc assassiné par son fermier chrétien. Ce dernier s'étant sauvé, les Turcs n'avaient cru pouvoir venger la mort d'un des leurs qu'en faisant exécuter le frère de l'assassin, espèce de justice, qui nous fitfrisonner d'horreur. En général dans l'O. de la Turquie le gouvernement deCon-stantinople a encore quelques réformes importantes à exécuter. Nous atteignîmes enfin pour notre couchée à 1600 p. de h. abs. le moulin de Brniatz (pron. Bregniatz). (Voyez les détails de notre aventure dans ce lieu dans ma Turquie. Vol. 4, pag. 450). Il est mu par le Brniatschka-Kieka, dont la source est au S. dans les montagnes du Stari-Kolasehin. Ce dernier nom est aussi celui du district et il a le surnom de Stari ou vieux par opposition au véritable Kolaschin, qui est. un district situé plus à l'O. entre les tribus des Koutschi et des Vasœvitchi dans le Monténégro et les Nachies de Bichor ou Bij or, de Rojai et de Novipazar. Nous montâmes la montagne du Stari-Kolaschin par des chemins tournans et excavés au milieu des bois et suivîmes une crête, qui dominait à PO. un vallon occupé par des prairies et quelques cabanes. Des bois couvrant une pente plus élevée nous amenèrent insensiblement au plus haut col de la montagne à 3800 p. de h. abs., à l'O. duquel s'élevaient des cimes obtuses et bordées de rochers calcaires escarpés. Ces montagnes font partie du Mokra-Planina. A TE. on appercevoit une partie du Rogosna-Planina entre Bagniska et No-vipazar. Depuis là nous vîmes aussi la continuation orientale du cours de lTbar, qui décrit un grand coude en coulant au S. E. et enfin à l'E. D'autres sentiers étroits, tournoyant et profondement entaillés dans le sol nous firent descendre dans un vallon déboisé, dont l'eau coulait au S. E. et il nous fallut ensuite gravir une pente assez forte pour atteindre les cabanes des bergers de Tschetschevo *) (au-delà de 3000 p. de h.), qui sont à un quart de lieue au S. S. E. des cimes calcaires se liant avec celles que nous avions vues depuis le col. En un mot nous avions tourné autour d'une partie de la montagne de Stavitza (?), qui peut avoir près de 5000 p. Ces pâturages de Tschetschevo entourés de bois et dominés au N, par des murailles blanches de rochers rappelaient une de ces vues champêtres, telles qu'on en voit tant dans les Alpes calcaires. Les bergers albanais qu'on nous avait représentés comme de grands coquins, nous reçurent dans leurs cabanes en forme de tentes et nous y raf-fraîchirent avec du lait, du fromage, des œufs et du pain. N'ayant rien pris depuis 24 heures, ce repas ne fut pas de trop. Nous nous rendîmes depuis là à Tschcrkoles ou Tzrkoles en côtoyant sans cesse le haut de la pente élevée des montagnes immédiatement sous les cimes de ce grand massif calcaire, dont descendent bon nombre de petits vallons. Si nous avions marché eu- ') Ce nom rappelle évidemment le Tschetschm des chansons serbes, existe peut-être même encore comme village au bas de ces montagnes. viron au S, O. depuis Brniatz à Tschetschevo, nous nous rapprochions toujours plus de la direction de l'E. à l'O. pour passer même à celle du N. 0. et du N. N. O. Nous quittâmes toute de suite le vallon de Tschetschevo courant du N. O. au S. E. et entrâmes dans un autre dirigé de l'E. à l'O. et ensuite au S. De ce dernier nous passâmes dans une cavité descendant du N. au S., ce qui nous conduisit à une crête, en deçà de laquelle était de nouveau un autre vallon courant du N. O. au S.E. De ce fond nous montâmes sur une espèce de plate-forme irrégulière et coupée par de nombreux petits ravins. C'était une terrasse basse ou corniche du Soua-Planina (t. Kourilo-PIanina, mont sec; le Zuva-rika du Dr. Millier), qui s'élevait au-dessus de nos têtes au N. Les bois y cessent tout-à-coup, de manière qu'on y jouît d'une vue très vaste au S, et S. E. Néanmoins on ne peut pas appercevoir clairement le débouché des torrents. Il paraîtrait qu'une partie va joindre lTbar à l'E. ou à l'E. S. E., après avoir parcouru plus haut des directions différentes, tandis que pour l'autre portion provenant surtout de la plate-forme citée ils se réunissent au S. l'un après l'autre et sortent des montagnes ou entrent dans le bassin de la Me-tochiia ou du Drim blanc (Biela-Drima) près deSouvogrlo ou Sogrlo, (le Grlo sec) au 8. de Tscherkoles, d'où ils gagnent le Drim. Telle est du moins l'opinion de feu Vasoevitch, ainsi que du Dr. Millier, mais ce dernier y voudrait voir les sources-mères du Drim, qui seraient suivant nous au S. et S. E. du Glieb. Une autre question de nomenclature est relative au nom de Drim, parce que jusqu'ici les géographes ont confondu ce nom avec celui de la Drina en Bosnie, tandis qu'en Albanie on n'entend toujours parler que de Drim et de Drima et Mr. Jourischitch adopte aussi cette orthographe. Ce qui paraît décider cette question, c'est qu'une partie du milieu de la Metochie porte environ entre Djakova et Prizren le nom de Podrimlia (inférieur au Drim) et les rives du Drim entre Alessio et Daitschi forment le district de Zadrima (le long du Drim). Or ces dénominations se revoyent sur les cartes et dans les chansons serbes. En Servie et Bosnie on ne retrouve qu'un Podrina et Zadrina. Si Drim était la dénomination véritable, elle proviendrait peut-être du mot guégue Drimis, qui signifie hocher la tête en dormant, cette rivière décrivant en effet des contours singuliers. Or les Slaves appellent aussi Drijeiv, l'envie de dormir ou l'action de s'endormir, et les Busses Dremota, l'assou- im pis sem en t. Au contraire le mot de Drina viendrait de Dren ou Drijen, cornouille. Nous marchâmes enfin au N. N. 0. immédiatement sous les escarpemens calcaires des cimes du Kourilo-Planina, montagne à sommets rabattus, rocailleux et couverts ça et là de forets de hêtres. Des bergers albanais armés de pistolets et jouant sur un flageolet particulier gardaient ça et là leurs moutons et devaient appartenir aux villages voisins de Kaloudra, Zakoul, Mcleja ou Meletjan (du mot albanais Melj, millet?), Drian etPetzkij, qu'on nous dit exister plus bas dans la montagne. A l'extrémité S. O. de cette dernière nous rentrâmes pour quelques instans dans de petits bois de chênes, d'où nous jouîmes tout-à-coup de la superbe vue de la plaine du Drim blanc ou de la Metochiia. Elle a 10 1. de long sur 4 à 7 1. de largeur et une hauteur absolue d'au moins 1000 à 1100 p., qui s'accroît un peu du milieu vers ses bords. Elle contient beaucoup de villages et est en bonne partie cultivée, surtout vers le Drim, tandis qu'ailleurs le sol est occupé par des pâturages ou même des bocages de chênes. Sa forme est un quadrilatère irrégulier, c'est évidemment comme le bassin du Sitnitza ou de Kosovo une vallée longitudinale s'étendant du N. O. au S.E., dont les côtés N. et S. ont été produits par un système de montagnes de plus récente formation. C'était un golfe d'un bassin tertiaire adriatique ( ? ) à l'époque éocène et miocène. Il n'est pourtant pas possible de voir toute la surface de la plaine, parce qu'entre Klin et le Soua-Rieka coulant du S. E. au N.O. s'élève une digue de basses hauteurs, tandisqu'au N. de Djakova s'avancent un autre groupe de collines. Son fond septentrional est bordé de montagnes escarpées et boisées à cimes rocailleuses de plus de 6000 p. ; les gros pitons calcaires du Peklen et du Koprivnik au-dessus d'Ipek produisent le plus d'effet et rappellent un peu par leurs formes l'entrée des Alpes sur le Lech à Eussen en Bavière. A l'E. viennent encore le Glieb et une partie de la montagne de Mokra, qui lie cette dernière au Stavitza et au Kourilo-Planina. A l'O. s'allongent au S. O. d'autres crêtes un peu plus basses en môme temps que l'extrémité méridionale du bassin du Drim est fermée par la longue arête du Schar, chaîne de plus de 6 à 8000 p. avec des taches de neige en juin. A l'E. on n'apperçoit que de très basses montagnes. La descente à Tscherkoles eut lieu par des bois de chênes et ne dura guère qu'une demi-heure. Le village est placé sur le pied do la montagne à la sortie du torrent de Kourilo, mais l'auberge isolée est déjà dans la plaine à une dizaine de minutes du petit village. Ayant fait une observation barométrique près d'un champ, où travaillaient des femmes albanaises, elles jetèrent des cris de surprise nous prenant probablement pour un sorcier. L'au-ber.) Mr. Kiepert a suivi les indications de Mr. Viquesnel et le fait passer au N. de notre route au Vardar. L'Ayan du lieu nous força d'accepter une tasse de café dans son misérable divan, où nous grimpâmes par une échelle et nous nous accroupîmes sur des nattes. A 1 % de 1. de Négotin est à 550 p. d'alt. abs. le gros bourg de Kavadartzi, qui est situé plus avant dans la vaste cavité parcourue par le Vélitza ou Vélischa (zinz. Vélischta, t. Vélid-scha), qui fertilise avec le Tscherna le large espace de bas pays entre les montagnes dePrisrindge et de Babouna (Baboussa des cartes). Lors de notre passage en juillet le large lit du Vélitza était pres-qu'à sec et il paraît même qu'il n'y coule en été de l'eau que lors des orages dans les montagnes. Entre Négotin et Kavardatzi (pron, aussi Kafadartzi, t. Kaffadan) ') on rencontre les villages de Marina et de Glisitsch. A '/4 de h. en avant de Kavadartzi nous voyagions paisiblement au milieu d'un pays cultivé et admirions les belles formes des hautes montagnes au S. et S. S. E. vers Démir-Kapou, quand nous vîmes venir à notre rencontre une vingtaine de cavaliers turcs et chrétiens, qui renouvellèrent la cavalcade dTstib. Nous étions maintenant sur les terres du Pasehalik de Monastir et étions étonnés de voir que sans avoir vu le Pascha on continuait à nous recevoir comme l'avait ordonné dans son Pasehalik celui d'Ous-koub. Nous nous empressâmes d'aller présenter nos devoirs à l'Ayan Ismaila. Il était absent, mais on l'avait averti de notre arrivée et pendant que son frère nous faisait les honneurs de son Selam-lik il arriva. Ces messieurs étaient tous les deux de jolis hommes, leur habitation situé à l'E. du Vélitza était spacieuse et leur divan bien airé pour le climat si chaud en été. Après nous être retiré, nos gens, accoutumés dans le Pasehalik d'Ouskoub à re-cevoir des Ayans l'orge et le foin des chevaux, eurent l'impolitesse d'aller faire semblable demande à l'autorité du lieu, or l'Ayan déclara nettement que notre Firman ne spécifiait rien de semblable et notre Tartare fut expédié pour faire nos excuses à cause de la méprise de nos domestiques. Ce mésentendu provenait encore en grande partie de notre Tartare asiate et désobligeant, car à l'ordinaire les couriers connaissent au juste les Paschas et les Ayans, qui sont généreux, hospitaliers ou avares, riches ou pauvres, et on ne court nullement risque avec eux de faire de pareilles be- ') Il y ii un village de Kavadar près de Jagodin en Servie. vues l). Kavadartzi n'est qu'un petit bourg surtout bulgare, qui peut compter tout au plus 2 à 3000 habitans. Il est traversé par le torrent du Vélitza. La route de Kavardatzi à Prilip franchit par des pentes douces la colline de Schivez, qui sépare le Vélitza du ïscherna ou ïzerna (t. Kutschuk-Karasou, mot, dont les cartographes ont fait Saragoul). Néanmoins la descente est plus rapide que la montée et cette éminence rappelle celle des calcaires d'eau douce des environs de Paris et est aussi déboisée. De belles montagnes à grosses têtes calcaires et à gorges profondes bornent l'horizon assez près au S., Mr. Kiepert y place le nom d'un mont Schesehkova. Le ïscherna coule dans une vallée cultivée et ombragée ça et là de noyers ou d'autres arbustes. Cette rivière a l'air de sortir d'étroites et grandes gorges ou fentes directement au S. ; les ruines de Stobi y indiquent peut-être l'existence d'un ancien château comme garde de ce défilé. Elle est assez profonde et large pour nécessiter un grand pont en bois. Après avoir longtemps coulé du S. au N. elle se rend dans le Vardar de l'O. à l'E. Au pont sur le ïscherna se trouve sur la rive orientale le village de Vozartzé (t. Vozadgé) appelle ainsi du mot Vozar, qui veut dire rameur à cause de l'ancien bac en ce lieu. Plus au N. sur le bord opposé est Rosaman. En deçà de cette rivière nous nous enfonçâmes dans le vallon de Ractz, qui est cultivé et bordé de petites hauteurs. Au bout de 1V2 I. nous nous arrêtâmes à un Han pour y boire de l'eau. Nous étions arrivés à l'entrée du défilé du Dêvol (Diable) ou du Varisch-Derbend, bordé de couches calcaires qu'on dirait coupées au couteau, tant cette fente transversale E. - O. était verticale et avait l'air d'une porte. Un grand torrent, coulant dans le ïscherna, occupe tout le fond de ce passage, qui dura un quart d'heure et servirait en cas de guerre au moins de poste comme une des routes de Monastir. Après avoir dépassé cette crête assez pittoresque et en partie boisée nous nous trouvâmes dans une vallée fort large; au milieu des bocages et des pâturages il y avait ça et là des cul- ') La couchée à Kavadartzi fut une des plus pénibles, parce qu'on ne savait a la lettre où se mettre pour éviter la vermine sur la galerie. L'un de nous se coucha sur le haut d'un tonneau. Nous nous étions mis d'abord au milieu tic la cour et malgré les absurdes rapports sur des Haidoukes rôdant dans la campagne, nous allâmes achever plus tard la nuit dans un champ voisin. ture8. Nous descendîmes dans un ravin assez profond courant du N. au S. ou du N. E. au S. O, et nous gravîmes au haut d'un petit col, où le chemin est peu praticable pour des charrettes et qui, suivant Mr, Viquesnel, porterait tout particulièrement le nom de Varisch-Derbend. Depuis ce point à environ 1500 p. de h. abs. nous distinguâmes au S. la partie supérieure du lit profond et encaissé du torrent, qui débouche dans le grand défilé en coulant d'abord du S. au N. ou du S. E. au N. O. et ensuite de l'O. à l'E. D'un autre côté à PE. était sous nous la vallée de Trojak, dont le fond était occupé par le même torrent de Raetz coulant de PO. à PE, et encaissé entre des murailles rocailleuses. Au N. cette cavité est bordée par les rochers gris blanchâtres des cimes coniques du Koziak ou Kozak (de Koza, la chèvre). Au N. N. O. est le sommet semblable du Béliak (de Bèlo, blanc) et au S. ainsi qu'à PO. s'élèvent des montagnes assez boisées. Pour atteindre les maisons éparses et le Han de Trojak (triple à cause de la rencontre de trois routes), on voyage sur la plateforme, qui borde au N. le torrent et qui est couvert en partie de pâturages. Pendant ce trajet de 33/4 d'h. on laisse après 1/2 h. de chemin à droite le hameau de Toplitz et après l'/2 h. sur le plateau de la rive opposée du Raetz celui de Radobil. L'auberge de Trojak est exactement au S. du mont Koziak, d'où une gorge se prolonge jusqu'au torrent de la vallée. C'est dans cette cavité qu'est le poste et le Han de Trojak, qui offre une fontaine d'eau très fraîche. Nos gens nous ayant précédé nous n'eûmes qu'à nous attabler, ce qui est un plaisir rare en Turquie, où il faut attendre à l'ordinaire jusqu'à ce qu'on ait préparé le repas. Il fallut ensuite chercher chacun une place convenable pour dormir, car la galerie était insuffisante pour nous tous. Des grottes, se trouvant le long des côtés de la gorge, nous essayâmes de nous y mettre, mais ayant été employés comme étables à moutons les moucherons en rendaient le séjour insupportable. Les bosquets près de l'auberge parurent plus convenables. Depuis Trojak au col de PIévat (de Plédjat, à larges épaules?) on ne cesse de monter assez graduellement sur la gauche du torrent, qui remonte au S. Les cultures disparaissent, on passe des prés et on arrive sur le sol pierreux des schistes cristallins. A % d'h. sous le col et au pied S. O. du mont Koziak sourde une belle fontaine à l'ombrage de quelques arbres. On voit depuis là que le torrent de la vallée vient du S. et S. O., un col doit y conduire dans la plaine de Monastir, comme c'est le cas dans une direction opposée pour Plévat. On me donna le nom de Béla-Voda pour un village au S. O. Sur le col à 2684 p. et à 11/2 h. de Trojak se trouve un poste établi dans une cabane. La vue depuis ce point est magnifique, car on découvre tout-à-coup une grande partie de l'énorme plaine de Prilip et de Monastir en deçà de laquelle règne un rideau complet de montagnes élevées de 4 à 7000 p. de h. avec de nombreux villages à leurs pieds. Au S. O. de Monastir est le pointu Soagora ou Souagora (montagne sèche) ]) ou en grec Péristéri (pigeon) et en albanais Boréa (neige). Avec ses 7237 p. de h. abs. et ses plaques de neige il forme la partie la plus saillante de ce tableau. Les montagnes à l'E. du bassin de Monastir n'ont au contraire que 2 à 3000 p. Si ces chaînes offrent partout des zones de forêts, les montagnes de Prilip par contre frappent par leur déboisement complet et la bizarrerie de l'entassement de leurs rochers de gneiss. D'un autre part près de nous les montagnes boisées au S. O. du col faisaient un assez bel effet et s'élevaient au dessus de lui à 7 à 800 p. en contrastant par leur verdure avec la roche nue de la petite pyramide du mont Koziak, qui restait au N. et se liait avec les montagnes de Babouna. La descente sur Prilip (t. Perlépé) est douce et a lieu sur un sol noirâtre, un peu raviné et déboisé. On rencontre à ]/4 d'h. du col le hameau d'O-réovatz, on laisse à '/i d'h. plus loin à gauche Linischta et à % d'h. de là au bas de la descente est situé à droite, à '/^ d'h. du chemin, le village de Krestetz, d'où on a encore % d'h. jusqu'à Prilip. Cette dernière ville est toute ouverte, compte 6 à 7000 âmes et est située dans la plaine ou le milieu d'une vallée de plus de 2 1. de long sur environ une lieue de large. Elle est arrosée par le petit cours d'eau du Kandrisou, où on jette à Prilip toutes les ordures. Cette ville est surtout peuplée par des Bulgares mêlés de Serbes et de Zinzares et a un bazar assez considérable. Nous y fûmes bien logés chez un prêtre, dont la maison était très propre et avait un cour avec une fontaine et un jardin. L'Ayan nous reçut dans un divan, où il fallut monter par un escalier étroit et obscur. A peine étions-nous de retour de cette visite que nous ') Mr. Kiepert l'a mal placé. fumes celle de marchands vainques, qui se plaignirent qu'on leur imposait comme Haratsch une légère contribution, quoiqu'ils ne fussent plus turcs. Prilip est situé à l'intersection de quatre à cinq routes, savoir celle du N.E.-S.O. ou la voie militaire de Keuprili sur le Vardar,à Monastir, celle dTstib, celle de Kritschovo (12 h.) en remontant le Tscherna et celle de Florina et Kaiîari ou de Vodena. La première route de 12 à 13 h. a été décrite récemment par Mr. Griesbach, elle remonte de Keuprili le Babouscha, qui se grossit à Monastitza surtout du Potska-Rieka, dans le haut duquel le nom de Banja semble indiquer une eau thermale. Ses sources seraient au N. O, dans le Mousdatsch ou Mousdagh dont je n'ai pas entendu parler. 11 se relierait à la chaîne vers Zajns et les montagnes de Kritschovo (si. Krstsehava) n'en seraient que des contreforts occidentaux. En général la direction des montagnes y est parallèle à celle du Schar et non à celle du Khodope, direction, qui ne commence qu'à l'E. du Vardar. La route traverse ensuite le col du mont Babouna derrière le Koziak et à environ 2600 p. d'élévation. (Voyez la voyage de Mr. Grisebaeh.) Quant à celle qui va de Prilip à Kritschovo, je peux assurer qu'il y a vraiment sur le Tscherna environ à moitié chemin un village du nom de Dotzi et non pas Doja comme l'écrit Kiepert. Nous visitâmes sur une butte à ï/2 1. à l'O. de Prilip le château bizarre du héros serbe Marco-Kraljevitch, d'où on a une vue encore plus étendue sur toute la plaine de Monastir et de Florina. A l'O. on voit le Tscherna sortir des montagnes et arriver avec une direction du N. O. au S. E. dans la cavité précédente. Les montagnes à l'O. et au N. du château sont en grande partie dépourvues de bois. Le château est à environ 200 à 250 p. sur Prilip. (Voyez sa description dans ma Turquie. Vol. 2, pag. 305.) Ail. au S. de Prilip le hameau de Lago reste à gauche et à ya l- plus loin à droite celui d'Oba (deux) et à l/i de h. de là un ruisseau sort des montagnes et le village de Stavitscha se voit à */2 1. à la gauche. On est alors au pied d'un des deux éperons opposés l'un à l'autre, qui rétrécissent la communication entre la cavité de Prilip et la plaine de Monastir. C'est la seule colline qu'on ait à franchir entre ces deux villes. Sur sa base septentrionale est à % 1. à gauche le village de Houstzé. Depuis la cime de cette hauteur à 2 ou 300 p. sur la plaine on distingue déjà par la fumée la place de Monastir, qui a l'air d'être au pied de l'élégant Soagora, quoique cette ville en soit à plusieurs lieues. Après V4 °"e h. de marche le village de Moustolintzé reste à gauche et Krouschévo est situé dans la même direction à 1 1. du chemin. Après 3/t de h. on a franchi cette espèce de petite digue à Schélévo ou Schévélerzti ; en deçà se trouve une grande ferme bulgare et enfin on est réellement à 2V2 h. de Prilip dans la plaine de Monastir, qui a une altitude absolue entre 1400 et 1500 p. et forme un ovale de 13 à 14 1. de long sur 2 à 3 1. de largeur. On passe à Klépotsch et laisse à gauche Konaklé ou Konaklar et à droite Ragosch et à % de h. plus loin estNoschpol. La route passe continuellement entre des champs de blé ou de maïs et ça et là des moissonneurs étaient en plein travail. Cette plaine offrant toute sûreté et étant aussi habitée que l'Europe centrale, notre caravane s'était tout-à-f'ait désorganisée. Une partie avait pris les devans et avait été aussi vite que possible à Bitoglia, nous étions restés avec les bagages, or ceux-ci étaient dans le même désordre. Le Tartare les avait abandonné pour aller attendre les domestiques à l'ombre et devant une auberge ; les domestiques de leur côté laissaient aller les chevaux de bât tellement à leur volonté qu'il y en avait qui s'arrêtaient ou allaient brouter dans les champs. Les paysans bulgares riaient de ce désarroi et auraient pu aisément nous voler, s'ils l'avaient voulu. Au milieu de la plaine on passe sur un pont en bois le Tscherna, qui a un cours croupissant et est bordé d'un terrain noir marécageux, ce qui a obligé même à faire décrire des contours à la route pour approcher du pont. Abîmé du soleil, nous abandonnâmes enfin nos bagages et nos domestiques et nous allâmes les attendre au grand village de Mouschila (le Morliva des cartes) à 1 % de lieues avant Bitoglia. On y a bâti une nouvelle église chrétienne, qui ne manque pas d'une certaine élégance. Cet endroit offrait deux auberges, dans l'une desquelles était un Chrétien et par conséquent du vin, nous étions occupés à nous y rafraîchir, quand un Kavas entra avec son cheval dans la salle commune et occupa tout de suite l'aubergiste pour son service. Le Pascha de Konieh ou de Koutajé était venu en visite à Monastir et retournait chez lui, il était descendu à l'autre Han et était accompagné de plusieurs officiers. Après avoir passé le torrent du Schemnitza ou Sehénitza, un temps de grand trot, et de galop nous amena prompement sur les cimetières de Bitoglia, qui sont en deçà d'une petite colline. Ce n'est qu'au détour de cette dernière qu'on apperçoit la ville cachée dans des arbres et ne se montrant que par ses minarets. A son entrée une troupe de forçats enchaînés étaient occupés à bonifier la route pleine de cailloux et d'eau. Toli-Monastir est appelé en slave Bitoglia, comme il n'est guère permis de dériver ce nom de l'ancienne dénomination de Pé-lagonia pour une ville un peu plus au S., il pourrait provenir du mot albanais de Vittoja, qui signifie un pigeon, parce que les Schkipétares ont habité ce pays avant les Slaves. Ainsi s'expliquerait aussi fort bien le nom grec de Péristéri, pigeon, donné par les Grecs et les Zinzares à la haute pyramide, qui domine cette ville. Elle est placée à 7% del. de Prilip au large débouché d'une vallée, qui forme la plaine de Dobritscha. Elle est traversée par un assez grand cours d'eau presqu'à sec en été, coulant de PO. à l'E. Au N. de la cité ne se trouvent que de petites collines déboisées, mais au S. O. s'élève le haut Péristéri ou Soagora avec de puissans contreforts garnis de bois vers les cimes avec des villages et, des cultures dans le bas. Un grand torrent descend du S. du village de Koprina, à 3/4 de 1. de Monastir. A PO. la vallée remonte vers le col conduisant à Resna et ne présente, vue de la ville, que de petites montagnes. La ville de Monastir doit avoir une population de près de 40,000 âmes. Néanmoins en 1838 le Dr. Mùller n'y comptait que 35,170 habitans, savoir 17,000 Mahométans divisés en 8000 Albanais, 5800 Slaves et 2400 Turcs asiates, y compris la garnison et environ 5000 femmes, puis 12,500 Chrétiens grecs, dont 9000 étaient Slaves, 3500 Grecs et 700 Zinzares, 1200 Albanais catholiques, 1400 Juifs et plus de 2000 Zingares. Il élève à 76,000 le nombre des habitans de la ville et du district propre de Monastir, parmi lesquels il y aurait 35,000 Chrétiens. Les maisons de Monastir n'ont guère de jardins au centre de la ville. Le manque de place y a fait accumuler les habitations bien plus que dans les autres villes de la Turquie. Aussi n'y voit-on même aucune auberge avec de vastes cours et les gens riches ont leurs maisons de plaisance avec des jardins dans le faubourg de Bulbul-Déré (la vallée des rossignols) à l'O. de la ville. Surle côté opposé les deux faubourgs de Boukvik et Zaloun offrent des habitations avec des jardins ou 17 au moins des arbres fruitiers comme dans beaucoup de villes de l'Orient Les rues y sont mal pavées, sales et traversées ça et là sur le côté méridional par des petits ruisseaux provenant des montagnes et roulant des eaux très fraîches. Les rues au centre de la ville sont toutes trop étroites. Les bords du torrent de Dra-gor '), le Tscherna du Dr, Millier, le Péristéra de P>uquevillc, qui traverse la ville, étaient encore en 1836 encombrés de grands monceaux d'ordures, il y en avait môme, qui formaient des buttes et devant la principale entrée du Konak du Visir se trouvait un fumier avec une tête humaine sur une petite pointe de fer. Depuis lors toutes ces horreurs ont disparu, dit-on. Le bazar avec ses boutiques au nombre de plus de 2l50 occupe sur les deux rives du torrent un vaste espace réuni par un pont en bois et garni aussi de boutiques. Le bazar a une toiture de planches et beaucoup de ses ruelles servent en même temps de passage aux charriots et aux chevaux. Le marché se tient dans les parties les plus larges, mais ces jours-là, c'est un encombrement et une presse extraordinaire. L'odeur y est abominable et les ruelles couvertes de saletés. D'un autre part on y trouve tous les métiers réunis depuis le boucher, le restaurateur et le vendeur de glaces jusqu'à l'orfèvre et l'horloger. Mais les marchands de drap et d'étoffes ont un bazar particulier et convenable, car il est large, couvert et avait 86 boutiques en 1842. Il y a aussi des marchés pour le blé et la volaille en dehors du bazar. Les mosquées ne manquent pas non plus à Monastir ; on en compte onze, elles sont en partie ornées de quelques arbres, mais sans architecture particulière. Il y a aussi un couvent grec et un hôpital militaire. A tout prendre la ville de Monastir nous parut une des plus malpropres de la Turquie et les maisons, où sont entassés les Juifs, sont vraiment quelquefois des bicoques d'un étage ou des rez-de-chaussée dans un délabrement, effroyable. Les maisons y sont la plupart en bois et en pierrailles ou en argile et on n'y voit quelques bonnes constructions en pierre que dans le quartier turc sur la rive septentrionale du torrent et dans les quatre rues du quartier de Dimitri. Lors de notre passage en 1836 on rebâtisait les 2000 habitations brûlées l'année précédente, leur place ne paraissait former qu'une bien petite portion de cette grande ville. ') Si ce nom n'était pas le véritable, ce serait peut-être Dobritza. Le Konak du Rouméli-Vali-sy est situé sur la partie N. O. de la ville à côté du torrent. Il consiste en une grande cour qua-drangulaire avec deux entrées. D'un côté est le palais du Visir, qui a un étage et vis-â-vis la demeure de son Kiaya et son harem, tandis que sur un troisième côté est une petite caserne. Sous les escaliers du palais étaient de lourds fourgeons à quatre roues, (Voyez pour plus de détails l'ouvrage du Dr. Millier, pag. 87.) Nous fûmes d'abord chez le Kiaya, qui à l'apparence de son divan devait être lui-même un petit Pascha. De là nous montâmes chez le Visir, qui nous fit attendre sur sa galerie pendant une bonne demi-heure. Des marchands de coco, de glace et d'eau circulaient dans ce palais. Des jeunes officiers habillés en violet ou bleu et bien pinces à la Russe se promenaient au milieu de Kavas et de Turcs dans leur ancien costume. Des courriers arrivaient et partaient et la musique du Visir faisait un charivari. Enfin arriva le moment de l'audience de feu le Visir Mahmoud-Pascha, qui, enveloppé dans un manteau violet, se faisait chasser les mouches par un de ses officiers. Il montra plus de soupçons asiatiques que de politesse. Il nous empêcha sous de faux prétextes de visiter la cime du Souagora, ascension que Mr. Gri-sebach exécuta plus tard. (Voyez son voyage.) En particulier il nous fit passer en revue tous les peuples pour arriver à la conclusion que les Anglais étaient les gens les plus impolis et les plus difficiles à vivre. Après cette visite le Visir nous montra son talent au Djirit, jeu, où l'on cherche à s'atteindre à cheval, avec des javelots en bois ')• Il y avait à cette époque (en 1836) au S. O. de Monastir un camp de 5 à 6000 hommes de troupes régulières. Les tentes ') L'autorité turque nous avait logé un peu petitement chez de braves et serviables Bulgares, dont la maison était située dans un verger de pruniers. Nous nous en plaignîmes et nous tombâmes de Charybde en Scylla, car un Zinzare nous céda, il est vrai, presqu'en entier le premier étage de sa maison, mais il s'en fut à la campagne sans nous laisser âme qui vive pour nous orienter dans cette grande ville. Or notre Tartare, un Asiate, ne nous aida pas non plus pour une raison déjà détaillée (p. 206). Nous aurions été obligés de jeûner si nous n'avions pas été faire nous-mêmes nos emplettes au bazar et surtout mis à contribution les restaurateurs de ce lieu, malgré l'abondance de poivre d'Espagne dans leurs mets. Voilà un autre exemple des difficultés que. les étrangers peuvent éprouver dans les grandes villes et qui frappent d'autant plus que rien de pareil n'arrive dans les villages. y étaient bien alignées et leurs toiles blanches à raies bleues et rouges avec les faisceaux des fusils et les portes-queues de chevaux faisaient surtout de loin un joli effet ; mais en approchant la manière, dont la garde s'y faisait, était vraiment amusante; les sentinelles montaient sur les arbres , jouaient comme des en-fans ou se relevaient à la course. Ces troupes étaient la plupart des Albanais. Ils avaient déjà leur uniforme, mais ils étaient sans bas ni guêtres. Le camp de Monastir était pour effrayer les Albanais, où il y avait encore des mouvemens; en particulier les ha-bitans de Dibré avaient chassé leur Ayan, qui exigeait des recrues. Le lieu de ce camp était celui où en 1830 tant de Begs albanais furent massacrés par la troupe de ligne de la manière la plus traître d'après les ordres du Grand-Visir Reschid. La place pour un rassemblement de troupes était bien choisie , car depuis Monastir on peut séparer l'Albanie septentrionale de l'Epire et agir contre les deux pays des Guégues et des Toskes. Toli-Monastir est à la rencontre de plusieurs routes , en particulier de celle du Vardar à la mer adriatique, savoir àDou-ratzo ou Scoutari. De plus elle est sur la communication de 8a-lonique à Prizren parleSchar; aussi a-t-elle assez de commerce de transit. Mais sa plus grande importance est sans contredit comme étape principale sur la route, par laquelle il est le plus aisé d'arriver avec un corps d'armée muni de son artillerie depuis la Turquie centrale jusrues sur l'Adriatique. La route de Prizren à Scoutari est au contraire împracticable pour des charrois, tandis que celle le long dcl'ïndgé-Karasou et leDévol ne s'adapte qu'à la Turquie sur la mer Egée et celle par Metzovo ne conduit que dans l'Epire. Cette ville est le chef-lieu d'un Paschalik, qui est assez grand, mais qui est surtout important, parce que le Rouméli-Vali-sy commande à tous les Paschas de la Roumélie. La grandeur du Paschalik en lui-même a été très variable depuis une vingtaine d'années, car suivant les circonstances on lui a annexé ou ôté certains districts des Paschaliks voisins. Le Paschalik de Monastir peut avoir une population d'au moins 200 à 250,000 âmes; le plus haut chiffre serait 300,000. Elle consiste surtout en Bulgares chrétiens, en Albanais-Toskes dans la partie S. O., en une certaine quantité de Zinzares et môme de Grecs, surtout dans la portion méridionale. Il y a aussi un petit nombre de Serbes près de Monastir. Les Musulmans sont sur- tout refoulés dans les villes et les bourgs. Ce Paschalik comprend neuf villes, savoir: Bitoglia, Keuprili (?), Prilip, Kastoria, Schatista, Kojani (KoaîaHe), Bogaskoë, Goritza ; onze bourgs, savoir: Kritschovo, Kavadartzi, Demir-Kapi, Florina, Kailari, Bilischta, Sélitza, Lapschista, Presba, Ostrovo et Servia. Le district de Goritza et de Staria, en deçà du Grammes, y appartient à cause de l'importance militaire du défilé du Dé vol et de la route de Goritza dans la vallée du Vojoutza. Il y a des Ayans dans toutes ces villes et ces bourgs, à l'exception de Kavadartzi et de Kastoria, qui ont des Musselims. Parmi les villages il n'y en a qu'un certain nombre, qui aient principalement des habitans musulmans; ces derniers se trouvent surtout dans la partie méridionale, savoir dans le Tscharschambé. Il y a aussi des villages presque com-plettement composés de Zinzares vers le Pinde et au N, O. de Kastoria, tandis que les villages toskes sont principalement en deçà du Grammos et ceux habités par les Serbes dans la plaine septentrionale de Monastir. La route de Toli-Monastir à Ochri, une distance de 12 à 12 V2 h., remonte au N. O. la vallée du Dragor d'abord sur sa rive septentrionale. Sur son bord opposé est situé un peu au S. O. de la ville le monastère grec très visité de Boukovik (de Bouka, hêtre) avec ses beaux platanes d'Orient. Plus loin dans la vallée sont sur son côté septentrional plusieurs villages, entr'autres Pra-dindol, Srbtzi, Léra, Bolintza et dans la montagne vers les sources septentrionales du Dragor Maloritza. On laisse au S. les contreforts du Soua-Gora et les gorges, qui en descendent. Sur ce côté se trouvent Tournovo et Margarovo sur le chemin, qui monte à la cime du Soua-Gora et plus loin à l'O. le village de Zapar. On monte par une profonde gorge vers la pente rapide de la crête en partie boisée, qui sépare les eaux du Dragor ou Tscherna de celles du bassin de Presba. On met presque 4 h. pour atteindre ce col, où se trouve le liait de Derbend ainsi qu'un petit lac profond et à eau glaciale, La hauteur de cette crête dépasse 3000 p. et on en a une vue magnifique surtout sur la plaine de Bitoglia et les montagnes au S. O. Mr. le Dr. Millier attribue à tort ou avec raison le nom de Gandava à cette crête de montagnes remontant au N. En descendant dans le haut bassin de Resna ou de Presba appelé Ravna (plaine), on a l'occasion d'observer, que les mon- tagnes environnantes ne «ont pas si inhabitées, qu'on le croirait, car au milieu des petits bois on apperçoit des cultures, ce qui indique des villages de Bulgares. Le bassin de Resna, de Presba et de Drenovo (t. Ventrok) n'est qu'une large concavité d'environ 10 1. de long sur 2 à 3 1. de large courant du N. N. O. au S. S. E. entre la chaîne bordant la plaine de Monastir et celle, qui longe le côté oriental de la plaine de Pojani et du lac d'Ochrida. Au N. ce fond accroît en hauteur absolue et se termine par un cul de sac, tandis qu'au S. ce bassin aurait pour ouverture un étroit sillon, où coule un affluent principal du Dévol. De petites éminences ainsi que des gorges occupent une bonne partie de cette dépression et produisent même un partage des eaux entre celles du lac de Presba et du lac de Drénovo. Des plaines et des marécages se trouvent près de ces lacs et surtout près du plus grand celui de Presba, qui contient plusieurs îles. Ce lac sans écoulement reçoit principalement des cours d'eau du N. et décharge ses eaux par des canaux souterrains sous la chaîne calcaire, qui sépare cette cavité de celle plus basse du lac d'Ochrida. Elles ressortent de terre près du couvent de St.-Non. Resna et Prespa sont en grande partie habités par des Bulgares. Le lac, les pâturages, les cultures autour de Prespa et les hautes montagnes boisées à l'en tour forment un tableau pittoresque. Le col entre Resna et Ochri a presque la même élévation que celui à l'O. de Monastir, mais la montée est moins longue, parce que Resna est à un niveau supérieur à celui de Monastir. Par contre la descente sur Ochri est assez longue et a lieu par diverses gorges en partie boisées. Pour monter au col la poste passe ordinairement depuis Presba à Resna et près de Petrina l). Mais on peut aussi le gagner en laissant le bourg de Resna de côté et remontant un des torrens, affluens du lac de Prespa. La descente à Ochri offre un coup d'oeil enchanteur sur le grand lac d'Ochrida, dont les bords laissent appercevoir ça et là des villages, tandis que le reste de son encadrement sont des bois de chênes, surplombés par d'assez hautes montagnes peu pointues. Les pentes de ces dernières sont plus rapides du côté de l'O. que du côté de l'E. du lac. ') Ce Petrina montre que la dénomination de Maniana- (Planina?) Pétrin pour des montagnes au N. E. d'Ochrida n'était pas tout-à-fait erronée. Lorsqu'on est descendu de ces crêtes [calcaires, déboisées dans le bas, on débouche sur la ville d'Ochri par un petit vallon et on passe des terrains marécageux au-devant de cette dernière. Il y a deux routes, l'une pour les charriots et l'autre pour les cavaliers et les piétons. Sur la hauteur dans le district ou la commune de Sabava est le couvent de Svéta Petka (gr. Periskévi) et le village de Vélesta est plus bas. Les villages de Neschévista, Tré-bénitscha et Gorentzi se voyent à l'E. d'Ochri et de son lac. La route d'Ochri à Elbassan en Albanie est un peu plus longue que celle de Monastir à Ochri, on compte à l'ordinaire 18 h. On suit les bords du lac d'Ochrida pour passer à '/4 d'h. de la ville à une ferme située au pied de petites hauteurs à rochers calcaires escarpés. Depuis là on n'a plus qu'une plaine fertile à traverser jusqu'à Strouga ou Oustrouga (t. Usturdsche), à2'/2 h. d'Ochrida. Les rives vers le lac sont marécageuses et sont arrosées par le Sateska-Rieka qu'on passe sur un pont en pierre à 2y4 de 1. d'Ochrida. Le bourg de Strouga porte ce nom signifiant en slave déchirure, parce qu'il est placé à l'entrée de la profonde fente, qui forme le canal d'écoulement du lac ou le lit du Drim noir (si. Ïscherna-Drima). Cette rivière traverse la ville, fait mouvoir plusieurs moulins et offre un pont en bois de quatre-vingt-dix pieds de longueur; tout cela ajouté à la limpidité de l'eau rappelle un peu la Limât à Zurich. Il y a plusisurs mosquées et une rue à boutiques. La population, surtout slave mêlée d'Albanais mahométans ou latins, s'élève à environ 1300 âmes, dont l'occupation principale est encore, comme jadis , la pêche des poissons et leur désiccation à l'air. Cette opération à lieu dans cette localité plus que partout ailleurs, parce que les poissons se présentent en masse, principalement lors de certaines époques, à cette sortie des eaux du lac. Cette pêche est affermée par le Sultan et lui rend annuellement 100,000 piastres, tandis que ces poissons secs se débitent dans toute la Turquie centrale pendant les nombreux carêmes des Grecs. En outre la position de Strouga comme ville de passage entre la Macédoine et l'Albanie l'a fait choisir pour lieu de foire le 26 février et le 10 septembre. Le voisinage des prés marécageux y occasionne, comme dans la partie orientale d'Ochrida, des fièvres d'accès au printemps et en automne. Depuis Strouga on peut se rendre le long du Drim noir en 6 h. à la ville de Dibra (t. Débri, a. Dibbr), qui donne son nom à tout un petit district divisé en Dibrè sipré et Dibré post ou Dibré supérieur et inférieur. Cette dernière partie s'étend du bassin du Sateska au Drim noir et l'autre comprend une portion des montagnes à l'O. de cette rivière. Ces districts avaient passé longtemps pour essentiellement musulmans et catholiques, mais il n'en est ainsi que pour la partie occidentale, car dans l'autre existent beaucoup de villages bulgares, comme Raischitza, où il y a une carrière de gypse, ïtadolischta, Glavaschitza, Sélitza, Oscholnitza et Brdanj, qui sont tous sur le côté oriental du canal, où coule le Drim noir. Entourée de murs à l'O. et. au S. O. et, appliquée des autres côtés contre de hauts rochers calcaires, Dibra renferme surtout une population industrieuse d'Albanais mahométans , qui s'élèverait, au dire du Dr. Miiller, à 4200 âmes. Il y a une mosquée et un Karavanserail de 64 boutiques. Ses habitans figurent parmi les plus turbulents de la Turquie. Les raisons en sont données par la nature et la position de la vallée du Drim noir. Cette fente est bordée continuellement de montagnes à pentes rapides, en grande partie boisées en chênes dans le bas, en hêtres et pins dans le haut, tandis que leur moindre hauteur varie de 2800 à 3000 p. et s'élève à l'O. N. O. et au N. à 4 et 5000 p, De plus la largeur ordinaire de la vallée n'égale pas l'espace de chemin qu'on peut parcourir en un quart d'heure. Elle n'atteint cette étendue que ça et là dans des espèces de petits bassins au débouché de quelque torrent ou entre deux éperons ou étranglemens des montagnes. La rivière est même encaissée quelquefois entre des murailles verticales de rochers comme au S. de Schéitan-Keuprisi et au N, de Dibra. De cette manière la ville de Dibra ferme, pour ainsi dire, le passage de la vallée, d'où lui est venu probablement son nom, car dier signifie porte en albanais. De plus le Dibré sipré s'adosse au pays libre des Myrdites ou Myredites, qui occupent surtout le versant occidental des hautes montagnes, dont les pentes orientales forment le Dibré supérieur, tandis qu'à l'E, de la vallée du Drim noir est aussi un vaste amas de montagnes élevées et boisées, dans les vallées desquelles il y a une population surtout bulgare. Enfin les seules routes pour arriver à Dibra sont outre celle de Strouga trois autres, savoir les chemins venant de Tiran et du Schkoumb et le sentier de montagne, qui part de Kostovo dans le Té-tovo en Macédoine et va gagner au S. O. par les sources méridionales du Vardar le sommet de la muraille à l'E, du Drim noir pour en redescendre obliquement dans la même direction. C'est un trajet d'une douzaine d'heures. Le Dr. Millier place sur cette dernière route Podalischt, Boukovitch et Tschetschevo sans dire sur quel versant sont ces villages, or nous avons passé au Podalischta-Ka-raoul entre Kritschovo et Goustivar ou Kostovo. Ce village de Podalischt ne peut pas être fort loin dans la montagne au S. O. du Karaoul, le mot slave de Pod indiquant un lieu sous la hauteur. Si nous pouvons nous fier au Dr. Miiller la route de Goustivar ou Kostovo à Dibra remonterait à Podalischta et couperait de là les montagnes obliquement au S.O. D'un autre part comme j'ai vu à l'O. de Kostovo au moins deux vallées remonter dans les montagnes au S. O. et à l'O. et qu'on me les a données comme les sources du Vardar en y comprenant l'eau de Podalischta, il y a probablement encore quelques sentiers conduisant au Drim à travers les cols entre le Jalesch et le Korab comme entre celui-ci et le Télés de Mr. Kiepert, Mais l'élévation des crêtes à franchir doit être plus grande qu'au S, du Télés. R est possible qu'une de ces descentes ait lieu par la vallée de Phintschova ou Vint-schova, si du moins Mr. Kiepert ne l'a pas placée trop au N. Probablement il y a aussi des sentiers inconnus conduisant de Dibra aux sources du Mati et du grand Phandé. Quanta la route le long du Drim noir depuis Dibra àSehéitan-Keuprisi sur le chemin de caravane de Prizren à Scutari, on ne connaît personne qui l'ait fait entièrement et les Turcs ont dit à Mr. de Hahu comme à nous que c'était le plus grand pays des Haidoukes de la Turquie. Outre la difficulté de l'accès ces derniers y trouvent dans le poisson de la rivière une source continuelle d'aliment. Réunissant la dénomination de Schéitan-Keuprisi (pont du diable) à celui de Kolasin ou Kolaschin pour le district, il me paraît fort probable que cette désignation de Kolaschin dérive du mot grec Kolaûiç, en albanais Koïjasi, enfer. Plus au S. le village de Sertschi (les infernaux, dérivant de Séré, enfer), semblerait donner la même indication. Néanmoins ce que j'en ai vu me rend même douteux que le passage le long du Drim noir soit partout libre, parce que j'ai apperçu dans ce profond canal tout boisé plusieurs éperons de rochers, qui se terminaient à pic dans l'eau, donc ces points ne peuvent être évités que par des détours énormes. B est vrai que les géographes y font passer la route tantôt sur une rive, tantôt sur l'autre, mais ils oublient que, sans parler de la pro- fondeur de l'eau, rencaissement de la rivière ne permet pas ces traversées et il est très improbable, qu'il y ait des bacs ou des ponts. Il serait bien à désirer que ce canal naturel soit visité à pied ou en bateau par un Européen sans Turcs et qu'on vérifie l'existence des villages que Kiepert y indique d'après la carte de Weiss. J'y ai apperçu moi-même des maisons isolées dans les bois. Si le Città nuova des cartes s'est réduit à sa traduction turque de Jenikoï ou du Novosélo, village nouveau des Slaves, ce n'est qu'un lieu temporaire de marché ; le nom de Prisna signifie en albanais détruit. Le couvent St.-Alexandre n'existe plus et la dénomination turque d'Altin-Ili n'est que le village d'Ibali. Est-ce que le Drim aurait des rapides comme semble croire Mr. le Dr. Muller? Je n'en ai jamais entendu parler, mais les plus grands escarpemens sont à la séparation de l'Ibaléa et du Jalesch sur le Drim noir et à la rencontre du Kiapha-Mala et des montagnes de Schalia sur le Drim réuni. La route de Dibra à la vallée du Schkoumb passe à travers le pays des Guégues (dgeghi) mahométans et catholiques par Ou-rati placé à la pointe septentrionale de la petite plaine ronde du Dobra-Voda et par la vallée ou plate-forme élevée du Domouzo-polie, dont Mr. Kiepert fait mal-à-propos une grande chaîne, tandis que Mr. Muller l'appelle positivement une vallée de l2/3 h. de longueur sur l/2 h. de large. Nous le savons aussi par une communication verbale de feu Mr. Vasoevitch et par la voyage de Mr. Spencer. Ce chemin va gagner de là les quatre H an s de Kjoukes (si. Koukousa) ') pour rentrer dans la route ordinaire d'Ochri à Elbassan. Néanmoins il est fort possible que d'autres sentiers conduisent du Domouzopolie (t. Domouzova) (plaine des cochons) par les montagnes au N. du Schkoumb à la vallée de Palava, où paraît couler du N. E. au S. O. au pied des monts Sibbr (?) et à quelques lieues à l'E. d'Elbassan un des plus grands affluens du Schkoumb. C'est sur cette route que M. Muller place le défilé de Skroska et le Prnos-Han sur le côté S. O. de la vallée du Domouzopolie et ainsi que les villages de Skroska, Brest et. Peskatsch. Ainsi donc la ville de Dibra serait dans un véritable cul de sac, très aisé à défendre et ayant, sous sa main de nombreux mé-contens armés. C'est pourquoi on voit figurer souvent ces environs i) Cette dénomination fient peut-être du mot albanais Koké, tête. dans la guerre de 31) ans des Turcs contre Scander-Beg. Il existe encore sur les rochers calcaires un peu au N. E. de Dibra une ruine nommée Sveti-Grad (Sfeîi-Grad des cartes) ou la sainte forteresse. Il est même possible que le nom slave de Starova (ancienne) pour un village voisin ait rapport à ces ruines. Il serait environ à la place de celui de Touria cité parle Dr. Mùller comme un village de 200 Albanais mahométans. Ce n'est peut-être que le synonyme albanais de Starova, car Tourrê signifie en albanais un amas de pierre. Sveti-Grad est placé au-dessus d'un rocher calcaire élevé sur la rive orientale du Drim, tandis que le hameau de Modritsch est sur le bord opposé à la place de l'ancien château de Modris, dont Barleti parle dans la vie de Scander-Beg. Dibra, à 8 h. d'Ochri, 6 h. de Strouga et 13 h. de Tirana, est le siège d'un Ayan, qui a eu même quelquefois le titre de Pascha et dont l'autorité s'étend nominativement du moins sur toute la vallée du Drim noir jusques vers le Schar. Il dépend du Bouméli-Vali-sy. En 1836 le district de Dibra était en révolte com-plette, parce qu'on avait voulu remplacer l'Ayan de leur choix, un vieillard par un jeune homme, qui voulait y plier les habitans aux réformes du Sultan. En 1837 et 38 ils avaient fini par se soumettre, mais l'Ayan n'avait aucune autorité hors de sa résidence. Le chemin de Strouga à Elbassan remonte le lac sur sa rive occidentale dans le district de Mokra et on suit environ pendant une heure une chaussée ça et là pavée. Dans ces environs est le village slave de Kalischte avec 4 à 500 habitans. De là on tourne au S. O. pour remonter le mont Bagora par une gorge creusée par un torrent, qui coule dans le lac d'Ochrida. Après une montée fatigante au milieu de ces pentes d'abord nues, puis en partie faiblement boisées, on tourne à 10. pour passer une plate-forme ou col, où se trouve un petit marécage. Sa hauteur peut être d'environ 8 à 900 p. sur le lac ou d'environ 2700 à 2800 p. de h. abs. Cette route offre jusques là beaucoup de beaux points de vue. On distingue en particulier les hautes montagnes au-dessus de Bitoglia en deçà du rideau de crêtes plus basses sur le côté oriental du lac d'Ochri, tandis qu'au S. S. O. s'élève la pyramide du Tomor, l'objet le plus proéminent au S. de la moyenne Albanie. Depuis le Domouzopoïié, où se trouve à 5 h. de Strouga le village de Bernies, on descend par une gorge ou vallée, où coule un torrent dans le Schkoumb , et on débouche à 2 1. de là sur ce dernier aux quatre Hans de Koukousa (eu albanais Kjoukes). Un village de ce nom paraît exister sur les pentes voisines. On passe le Schkoumb ') sur un pont en pierre d'une seule arche, c'est pour cela que ce passage prend aussi le nom de Keupri (pont). On abandonne le Schkoumb, pour traverser de l'E. à l'O. des hauteurs et atteindre à 1 h. de Koukousa le Han de Dschoura et à 2 h. plus loin celui de Dardé ou Darda (poire ou poirier) 2) avec ses cinq belles sources sourdant du calcaire. On a encore 2 h. pour arriver au Han Babja et S h. pour passer le second pont sur le Schkoumb, qui porte le nom deHadgi-Békjari. C'est le nom, dont le Dr. Millier a fait son Hadzbedzarmost, le mot de Most signifiant en slave pont. Il le place à l'entrée du plateau d'Izbat, mot dérivé peut-être à?Izbatziti, rejeter, en rapport probable avec les sources d'eau de ces lieux. On est alors à 3 h. d'Elbassan, tandis que le village de Polisi en est à 4 h. Le pont en pierre est de trois arches, car le Schkoumb y est déjà plus large, parce qu'au-dessous de Koukousa il reçoit plusieurs affluens surtout du N. E. Sur la rive septentrionale sont à peu de distance un Han fortifié, le village mahométan de Stremba avec 26 familles et un petit torrent. La vallée présente de nouveau des cultures surtout sur le côté opposé du Schkoumb, mais bientôt à une demi-lieue de là toute la vallée de cette rivière se change en une plaine couverte de prés et de champs avec des plantations d'oliviers, de figuiers et de grenadiers vers les pentes des montagnes. Toute cette contrée est pleine de villages, qui s'étendent à l'E. vers Polisi et. au N. d'Elbassan vers Molajesch ; elle porte le nom de Tscher-ménika. À l'E. d'Elbassan s'élèvent la hauteur assez isolée du Malji-Kraschtésé (mont des crèches), à droite le Malji-Schouschitza et derrière sont le Malji-Polizit et le Malji-Mbelischtésé, tandis qu'à gauche est le mont Malji-Gibaléschit et derrière lui le Tscherméni-késé. Au N. la hauteur s'appelle Tépé et est couverte de vignobles. Avant Elbassan on passe laTzaranika sur un pont en pierre. Naturellement si on ne veut pas aller tout droit, on peut laisser le pont deHadgi-Békjari à droite et longer le Schkoumb jusqu'au grand pont de Kourd-Pascha au S. d'Elbassan. C'est ce qu'a fait, il paraît, Mr. Spencer. ') J'écris Schkoumb, parce qu'en albanais Schkoumbi signifie le Schkoumb. 3) Si le nom de Dardani devrait avoir la même dérivation, il serait assez caractéristique d'un peuple de la Mocsie supérieure a cause de la quantité de poiriers sauvage? dans ce pays. Le reste de la route d'Elbassan à Kavaja (de Kavê, air). Douratzo et Scoutari a été décrite suffisamment par Pouqucville. (Voyez son Voyage, Vol. 1, pag. 393.) On peut joindre Kavaja par la montagne de Gabar et la vallée du Spirnatza ou en albanais Dartsch. On peut aussi longer le Schkoumb jusqu'à Tseherni et Petschiin ou Pékin à 7 h. d'Elbassan et 5 h. de la mer et aller de là à Kavaja. C'est une ville de 3000 âmes comprenant 940 Albanais mahométans. Le Leschnika coule de l'E. à l'O. au S. de cette ville. A l'O. et S. O. est le district de Baschtova (alb. Mbasch-tova) avec des salines et un fort avec quatre tours, nommé Sourtsch, à y2h. du débouché du Schkoumb, tandis qu'au S. de Petsehim est le district de Grabova. Depuis la route de Kavaja à Petsehim Mr. de Ilahn a découvert à environ 3 h. de distance au S. un lac de Ter-bouph, qui est différent de la lagune de Karavasta à l'O. de ce dernier. A 15 h. d'Elbassan est le port de mer de Douratzo (alb. Douratsch, si. Dratsch, épine), l'ancien Dyrraehium et la résidence ancienne d'un prince chrétien, on n'y compte plus qu'environ 382 maisons. D'après Mr. le Dr. Millier il n'y avait en 1836 que 1626 habitans, savoir 700 Albanais mahométans, 550 Albanais catholiques, 120 Turcs, 256 Slaves de la religion grecque et quelques étrangers surtout des bords de l'Adriatique. Mr. de Hahn réduit même la population actuelle à 1000 âmes avec 200 maisons. Il y a deux mosquées jadis des églises catholiques et on y voit quelques ruines des anciennes murailles de cette ville. Malgré l'état misérable de ce port, c'est pourtant encore la voie la plus usitée pour l'exportation et l'importation de la Roumélie et de la moyenne Albanie. La sûreté du port y exigerait l'établissement d'un mole plus parfait. Il y a un consul d'Autriche. D'un autre part Douratzo a pour les Turcs de l'importance en ce que cette ville est sur la voie unique, qui permet de se rendre en charrettes ou voitures d'Elbassan à Scoutari, le mont Gabar n'étant franchissable que pour des cavaliers. Le petit gouvernement de l'Ayan de Kavaja comprend suivant le Dr, Miiller 28,000 âmes, parmi lesquels il y aurait 17,500 Chrétiens en grande partie catholiques et en moindre nombre grecs. La population est éminemment guégue et n'est mélangée que dans certains points de Serbes et de Bulgares avec quelques Zingares etZinzares. Ces derniers composent même 10 villages. II n'y a que deux villes, savoir Kavaja et Douratzo et le bourg de Pékin. XV. ï s a & i s a a s 3 de M 0 N À S T I K À SA L O N I Q U E PAR FLORIN A, KASTORIA, KAILARI et VODENA. N ous longeâmes le pied des montagnes, qui s'étendent de Monastir à Florina en traversant un pays tout cultivé en maïs, en blé et vignes. Si on ne passe pas de villages, on en voit de. loin surtout à l'E. et on remarque que les habitans dirigent soigneusement les moindres eaux des montagnes dans leurs champs et les arrosent ainsi méthodiquement sillon par sillon. Ce soin particulier est nécessaire à cause de la rareté des pluies pendant les 3 ou 4 mois d'été, où les vapeurs attirés par les hautes montagnes n'arrivent guère à produire des orages tels qu'ils puissent atteindre les plaines, mais les Bulgares ont bien tort de détériorer les routes en les faisant servir de canaux pour la conduite des eaux. A 3/4 h. de Bitoglia on voit à % h. à droite dans une petite vallée le village de Boukova et à l/3 h. plus loin les trois villages de Slokoutiani, Bistritza et Kravari sur le ruisseau du Bistritza. A xJi d'h. de ces lieux Olévéné reste à droite, on passe à y2 h. de là entre Bareschan à droite et Jabani à gauche. A % h. nlus loin on laisse à droite Kan et à gauche le village de Porodin, dont le Han est sur la route. A 5/4 d'h. en deçà de cette auberge Vélouschina est à droite et Lajetz à gauche. A % h.de ce lieu Gradeschnitza est à l'E. et à % d'h. plus loin on arrive à Dragosch dans une vallée, qui est dominée à l'E. par lesesearpemens de la cime neigeuse de POprina. Dans une autre vallée à '/4 d'h. de là est situé Lénatz au pied du Tschetsehévo, autre sommité couverte de neige, faisant suite au mont Oprina. Après avoir niarché encore un quart d'heure on voit à l/2 1. à gauche Klesch-tina-Dolna et à droite Bitousch sur un ruisseau. Kleschtina-Gorna est à droite sur le gros ruisseau d'Isvor (source) à % d'h. de la route On a encore \l/2 h. jusqu'à Florina, qui est à Sy2 h. deMonastir. Florina ou Philourina, à 1526 p. d'altitude absolue, est placée comme Monastir dans une vallée et sur un torrent débouchant dans la plaine du Tscherna, C'est un gros bourg extrêmement long et étroit, parce qu'il est resserré entre la montagne et une colline couverte de tombeaux. B y a une rue de boutiques et la population peut dépasser quelques milles âmes. Mr. Pouqueville l'estimait à 700 familles. Ce sont en bonne partie des Bulgares chrétiens et des Musulmans. Après ce lieu nous quittâmes la plaine de Tscherna, qui s'étend encore un peu au S. O. et y est arrosée par plusieurs affluens de cette rivière, entr'autres par le Malska-Rieka, le Prout (Bruto des cartes), le Kouschéra etc. Nous franchîmes une petite colline pour gagner à l/2 h. de Florina la vallée cultivée du Malska-Rieka, qui reçoit à 20 minutes de ce bourg le ruisseau deKotori. Sur ce dernier sont situés dans une gorge les deux hameaux de Kotori inférieur et supérieur (K. Dolna et K. Gorna), tandis que dans la vallée du Malska-Rieka on atteint, à 1 h. de Florina au confluent de deux ruisseaux le village de Mala ou Mahala (Machala des cartes). Cette dénomination est dérivée peut-être du mot albanais Mal, montagne, car depuis là on n'a plus qu'un quart d'heure pour arriver au pied du Florina ou Néretschka-Planina. L'ascension de cette montagne a lieu sur un contrefort dirigé de l'O. à l'E., dont la croupe conduit au col du Néretschka et dont les ruisseaux des deux versants forment les parties principales des sources du Malska-Rieka (rivière de la montagne plutôt que petite rivière). La montée a lieu à travers de petits bois et des pâturages et dure 2 V2 h. Ces sentiers tournans ne sont prac-ticables que pour des cavaliers et si on veut aller en voiture de Monastir à Kastoria il faut passer par Ochri. Aux deux tiers de la hauteur nous fûmes arrêtés par deux ou trois gendarmes turcs, postés dans une cabane sur une pelouse, qui dominait la route et où on ne pouvait éviter de passer. Ils firent lire notre firman par un Turc, qui était par hazard sur la route et un petit pourboire les contenta. Si notre Tartare avait su parler, cela n'aurait pas eu lieu. Le col d'une altitude absolue de 4922 p. est précédé et. occupé par une forêt de hêtres, au milieu de laquelle il était agréable de voyager à l'ombre. Au N. et S. deux cimes dépassaient la hauteur du col de S à 600 p. Depuis ce point élevé nous jouîmes d'une vue de montagnes très étendue. Au N. E. nous distinguions en apparence assez près de nous, plusieurs cimes bombées avec des plaques de neige en juillet, c'étaient le Soagora ou au moins ses dépendances. On me donna pour l'une le nom de Vitzi ou cm albanais Bor ou neige. A l'O. S. O. et S. O. se montrait à nos yeux étonnés toute la chaîne du Grammos et du Pinde, tandis qu'au S. on voyait celle qui relie cette dernière à Metzovo avec l'Olympe de Thessalie, celui-ci restant au S. E. Un grand vuide couvert de vapeur indiquait la place du lac de Kastoria. En nous tournant à l'E. S. E. et E. nous n'avions au contraire devant nous que les montagnes comparativement basses entre Florina et le golfe de Salonique. Nous observâmes aussi que les cultures et même les vignobles montaient bien plus haut sur le versant S. O. du Né-retschka-Planina que sur son côté N. E., car nous sortions à peine des forêts et avions à peu de hauteur sous nous au N. des vignes et des champs de maïs dans une position, où les montagnes au N. formaient pour ces cultures un véritable écran relativement aux Cour ran s froids du septentrion et de la Bussie. La descente de ce col est fort courte et rapide. Elle prend plus d'une demi-heure et a lieu par des sentiers tournant dans un bois et au bas nous trouvâmes un petit vallon et un torrent descendant du N. E. au S.O., qui nous amena à l/2 h. de là à Babschiol (le Papso des cartes). Ce Han isolé du village de même nom et couvert en dalles de pierre est placé sur une pente assez inclinée à !/2 h. du fond de la vallée, dont le torrent forme une des sources supérieures du Dé vol. Depuis là on cotoye sur la gauche de ce cours d'eau de basses sommités, qui ne se relèvent que vers le mont Vitzi (?) au N. O. de Kastoria. Elles sont couvertes de petits bois de chênes et on en plonge au N. et N. O. dans plusieurs vallées boisées, qui appartiennent aussi au bassin supérieur et très montagneux du Dé-vol. Les autres limites de ce dernier sont les crêtes au N.E. de la partie tout-à-fait supérieure de la vallée de l'Indgé-Karasou, le groupe du Soagora et l'arête bordant au S.E. le bassin de Mo-nastir. Quelques villages bulgares y sont cachés. Nous continuâmes à descendre au S.O. en entrevoyant toujours plus ou moins la place de l'entonnoir de Kastoria. Nous débouchâmes enfin par un col bas et peu échancré dans la grande vallée déboisée et rocailleuse du Vlaka-Rieka courant du N. E. au S. O, et tournant plus bas un peu plus au S. Ses eaux se rendent dans le lac de Kastoria par un étroit défilé derrière Vlako ou Leko (Longa et Lanka des cartes). Au bas col cité nous remarquâmes plusieurs villages dans la vallée du Vlaka-Rieka, en particulier à nos pieds celui de Vijéné (Vizani des cartes). Nous traversâmes cette étroite vallée en biais et guéâmes son torrent presqu'à sec. Puis nous montâmes sur le côté opposé, parce que l'eau est bordé de précipices. On est à y2 h. environ de Vijéné et ce chemin ancien établi en corniche au milieu des rochers permet de voir les grands éboulis noires, qui forment le côté nord du défilé. Après un bon quart d'heure on redescend dans le torrent et on débouche dans le bassin de Kastoria par le village de Vlako. On est alors descendu habitans. Derrière Rilo ou àl'E. du village, le torrent sort d'une fente si étroite qu'on ne s'imaginerait pas d'abord qu'on puisse pénétrer par là dans ces montagnes. D'énormes rochers de poudingue, comme ceux du Rîgi en Suisse, forment les gardiens de cette porte du Rilo-Dagh. Le défilé se franchit par un chemin pierreux et assez élevé au-dessus de l'eau, puis on entre dans des forêts de chênes, qui couvrent le fond de cette vallée étroite comme toutes les pentes des montagnes. Ce sillon court de l'E. à l'O. sans beaucoup d'ondulations. On passe deux fois le torrent sur des ponts en bois en longeant d'abord la rive méridionale, puis le bord opposé du torrent. A environ 13/+ h. du village de Rilo, on passe au-dessous de quelques chétives cabanes de paysans nommées Pastra. Une femme y avait été puiser de l'eau dans le torrent. Dès qu'elle fut apperçue par nos Kavas, ils lui commandèrent d'aller chercher une cruche pour leur apporter à boire et chacun s'en abreuva à la ronde. A l/4 h. plus loin le Rilska-Rieka reçoit du N. le torrent de la vallée resserrée du Vélika. A 2lb h. du village de Rilo nous atteignîmes une grande ferme appartenant au couvent et entourée de murs, avec une vaste cour, des dépendances et un bâtiment principal. Nous n'étions plus qu'à 3 1. du monastère. Le torrent de Rilo se divise plus loin en deux, savoir le Jambeska-Rieka venant du S. E. et le Kalenska-Rieka de l'E. N. E. Le premier torrent coule entre l'Arisvanitza et le Déinir-Kapou-Tépési et sa vallée est la voie pour gagner par un col élevé entre ces deux montagnes le torrent de Bélitza, Razlog ou Banïschko. Laissant, ce sillon à droite nous remontâmes le Kalenska-Rieka et nous le traversâmes sur un pont de bois près duquel on faisait du charbon pour le couvent. La végétation forestière avait changée et nous nous étions graduellement élevés jusqu'à la région des hêtres, auxquels succédèrent bientôt les sapins et les mélèzes. Depuis la bifurcation des vallées la route était devenu spacieuse et propre aux voitures, et on voyait avec plaisir que les moines en soignaient l'entretien; en un mot, l'approche du monastère rappelait, tout-à-fait, celle des cou ven s célèbres en Europe. Nous trouvâmes sur la route une fontaine et un lieu de repos et de prière , où les moines viennent probablement promener. Enfin nous apperçûmes les murs du couvent, qui barrait, pour ainsi dire, toute l'étroite vallée au milieu d'un forêt de sa- pins et entre de hautes montagnes à cimes gazonnées ou rocailleuses. Nous avions parcouru depuis le village de Rilo une pente, dont la hauteur s'élevait à près de 2200 p. Nos Kavas annoncèrent notre heureuse arrivée par une décharge de leurs fusils et bientôt nous entendîmes sonner les cloches du couvent et l'archimandrite avec les principaux moines vinrent à notre rencontre dans leur grand costume, la tête couverte de leur cilice noire. Le vaste portail du couvent dépassé nous fûmes tout ébahis de nous voir dans une cour très vaste, entourée d'un énorme édifice en pierres à trois étages, vraiment superbe pour le pays et tel qu'on n'en voit point dans toute la Turquie, hors peut-être dans le mont Athos. Ce passage si subit d'un pays évidemment sous la civilisation de l'Europe à celui d'une résidence, nous reportant chez nous, nous paraissait une féerie et nous faisait réfléchir sur les avantages réels que les couvens ont dû avoir jadis en Europe pour l'avancement des arts, des sciences et de la civilisation en général. En entrant dans les détails de cette habitation de 150 moines et de leurs domestiques, nous continuâmes à remarquer mainte chose, qui n'existe pas ou est même inconnue dans le pays environnant. Ainsi nous vîmes une scierie de planches, une tuilerie et un sculpteur grec en bois et en même temps doreur. Nous trouvâmes les chambres de réception ornées de peintures grotesques, il est vrai, mais qui indiquaient aussi bien que les ornemens en couleur des voûtes du bâtiment, que les moines avaient un goût plus fin ou plus de liberté que les gens riches des villes voisines. Nous vîmes aussi au couvent quelques vieilles moustaches , qui sont là pour le défendre contre les brigands et qui pourraient bien aux yeux des Turcs passer quelquefois pour des Haidoukes. Comme nous avons décrit ailleurs le monastère (Voyez ma Turquie, vol.. 3, p. 462) nous passons toute de suite à notre réception. Nous fûmes distribués dans trois chambres fort propres et garnies de tapis et fûmes servis par des jeunes gens faisant leur apprentissage de moines. Nos Kavas se choisirent eux-mêmes une pièce au-dessous de nous, et non contents d'être traités fort bien, ils offensèrent les moines et cassèrent les fenêtres par pure envie pour ce luxe, dont ils étaient privés chez eux, de manière qu'au bout de 24 heures nous crûmes prudent de les congédier pour prévenir plus de désordre. Nous en avions toute fois conféré avec l'Archimandrite, qui nous recommanda bien d'expliquer leur renvoi à leur maître afin qu'on ne pût pas le lui imputer par malveillance et en faire pâtir le couvent. Telle était encore alors l'im-politique conduite des ageris subalternes des Paschas vis-à-vis des moines qu'ils auraient eu tant de raisons de ménager. Il nous fût évident que le Voivode avait été bien aise de se débarrasser quelques jours de la peine de solder quelques Kavas pour faire tomber cette charge sur nous. Nous fîmes aux moines le plaisir d'assister à un office, dans lequel on pria pour le prince Milosch et sa famille, parce que nous avions avec nous un docteur de ce prince et qu'il avait fait présent récemment de deux cloches au couvent. Les moines semblaient fort contens de voir des Européens d'Occident déployer sous les yeux des Turcs leur respect pour l'église d'Orient. L'Archimandrite du couvent nous parut un homme jusqu'à un certain point instruit, c'est-à-dire, s'il n'était pas ce qu'on appelle chez nous lettré, il semblait connaître le monde et avait surtout une connaissance profonde de ses intérêts, de ceux de sa communauté et des Bulgares eu général. Lui-même était de cette dernière nation et non pas Grec comme cela a lieu dans d'autres couvens. Il nous apprit que le monastère avait déjà brûlé trois fois, par accident ou par suite de méchanceté de la part des Turcs. Chaque fois on avait trouvé les sommes considérables et nécessaires pour la réedification de l'édifice. Brûlé, je crois, en 1834 il était rebâti en 1836 et on avait même remplacé l'église ancienne par un monument digne de figurer dans une ville et orné de 12 grosses colonnes en marbre blanc ou amphibolite noire. Tous les Chrétiens de la Macédoine et de la Roumélic avaient contribué pour cela, mais les collectes hors de Turquie, et surtout en Russie, avaient aidé puissamment pour donner à ce couvent une splendeur, qui offusquait les autorités turques. A vue d'ceilon ne pouvait guère estimer à moins de 800,000 francs l'argent nécessaire pour élever un si grand nombre de bâtisses; du reste il faut dire que la main d'œuvre y est très bon marché, et qu'on y a à côté de soi le bois, la pierre, le marbre et l'argile à tuile. Devant la porte orientale du couvent un torrent descend des montagnes au N. Une estrade y est établie pour servir de lieu de repos aux moines et près de là sont quelques maisons habitées par des ouvriers ainsi que des dépendances. Plus loin à l'E., à % h. du couvent, on trouve un autre torrent ayant la môme direction que l'autre. Des prairies subalpines forment le bord du cours d'eau principal. En remontant la vallée plus haut on entre dans des forêts de sapins, dominés au N. et au S. par de grands escarpe-mens de rochers entassés. A s/4 h. du couvent des carrières de marbre se trouvent au pied de la montagne au N. et on n'est plus qu'à Y2 1. du col, qui conduit dans la vallée débouchant dans celle de l'Isker à Samokov. Si, au contraire, on s'élève depuis le couvent au N. E. on gravit des pentes rapides pendant près de 3/4 h., puis on n'a plus que des séries de prairies inclinées et émaillées de fleurs pour atteindre les sommités rocailleuses et bosselées du Rilo-Dagh. Elles conservent des plaques de neige en juillet et ont une élévation d'environ 7000—7800 p. ou de 3200 p. sur le couvent. Depuis ces cimes la vue embrasse une partie du S. E. de la Moesie, le mont Vitosch, le Haut Balkan et une portion du Rho-dope occidental, tandis qu'on prétend pouvoir appercevoir même la cavité de Philippopoli. Mr. Visquesnel a donné l'idée d'une de ces vues immédiatement au-dessus du couvent. (Mém. soc. géol. de Fr. 1844, vol. 1, pag. 224.) De retour à Doubnitza nous prîmes la route de Kostendil, qui longe la rive méridionale du torrent, en grande partie à sec en été et va le passer à une petite heure de la ville. Cette route est assez bourbeuse lorsqu'il a plu , parce qu'on n'y soigne pas l'écoulement des eaux des montagnes. On franchit ensuite de basses collines couvertes de vignobles et on trouve en deçà le Han de Binek-Taschi (l'auberge de la pierre pour monter à cheval). Dans ce lieu la route se divise, l'une allant au N. à Radomir par Po-bovdol et l'autre au N. O. à Kostendil. Après avoir traversé quelques champs on passe le lit desséché en été du cours d'eau, qv.i descend de la vallée de Pobovdol et on continue à voyager dans une plaine d'environ 1 1, de largeur et entourée de coteaux de tous les côtés. A l'E. de cette cavité un peu plus élevée que Doubnitza, la crête basse s'étendant de Doubnitza à Pobovdol est totalement déboisée et rocailleuse. Au N, s'élève une grosse proéminence de rochers calcaires, tandis qu'au N. O. vers Ver- bovnitz des collines à pentes douces séparent seules la plaine mentionnée de la cavité de Kostendil. Pour atteindre cette cité ou plutôt le Han isolé de Kozni-tza, on peut suivre deux routes; la plus facile est celle des char-riots, qui va gagner par une pente insensible Verbovnitz, d'où on gravit par un court talus sur une vaste plate-forme déboisée à environ 2200 p. d'élévation ou à 475 p. sur Doubnitza et 125 p, sur Kostendil. Une descente rapide plus que double de la montée amène le voyageur depuis cette hauteur à Koznitza-Han, qui est environ à 1 '/2 1. de Verbovnitz. Si au contraire on passe par la butte calcaire au N. E. de ce dernier village, on remonte par des prairies jusqu'à ce qu'on atteigne un petit ravin, sur les bords duquel tourne un sentier, fait uniquement pour des cavaliers. Arrivé au haut de la butte à 2425 p. on y a une vue étendue sur tous les environs et en particulier sur la longue crête surbaissée du mont Koniavo séparant la cavité de Kadomir de celles de Kostendil et de Doubnitza. L'horizon y est bordé majestueusement à l'E. par la haute montagne du Vitosch au-dessus de Sophie, au S. par la chaîne neigeuse du Périn-Dagh et au S. E. par la longue et massive crête du Rilo-Dagh. Une gorge ou crevasse, descendant à travers les escarpemens de ce dernier au S. de Doubnitza, produit surtout un bel effet comparé à la zone de vignobles au pied de ces montagnes. D'un autre part ce tableau acquiert une magnificence extraordinaire par la cessation si brusque de la muraille du Rilo-Dagh vis-à-vis du confluent de la Tzarina et du Strymon, ainsi que par le Périn-Dagh apparaissant sur un second plan dans l'éloignement et en deçà d'une masse verdoyante de montagnes. Depuis cette butte on descend dans le vallon du Koznitza occupé par des prairies ; on s'y tient longtemps sur son bord méridional et rocailleux. Un petit torrent ayant sa source au N. et N. E., y court de l'E. àl'O et passe au Koznitza-Han. Cette dernière hôtellerie n'est qu'une cabane, au-devant de laquelle est à la place d'un salon un pavillon de branches d'arbres et de feuillages sous un beau saule. Une natte sert à s'y accroupir et reposer un instant. Depuis ce lieu on monte sur de petites éminences au N. du vallon et se dirigeant à PO. on vient bientôt en vue du Strymon, qui au sortir de la plaine de Kostendil tourne au S. et se jette à % 1. à l'O. de Koznitza-Han dans des gorges, pourIran- chir les basses hauteurs, qui séparent les bassins de Kostendil et de Djoumaa. Le Strymon se passe sur un ancien pont de pierre d'une assez lourde construction et passablement bombé. En deçà se trouve le hameau de Schétirtza, d'où on n'a plus que deux lieues de plaine en partie cultivée, pour atteindre Kostendil. On rencontre Ter-novlak et à 1 1. avant cette ville on passe au village de Bagren (le Bagrentz des cartes), où il y a un ruisseau, qui coule dans le Strymon. La route d'abord au N. O. tourne ensuite à l'O. Non loin de la ville nous rencontrâmes des dames turques à cheval, dont l'une avait le visage découvert et d'une grande blancheur. Elle était suivie d'un domestique à pied et allait probablement inspecter ses champs. D'autres dames étaient à donner des ordres dans les enclos voisins. Kostendil, pron. aussi Ghioustendil, à 6 V4 d'h. de Doubnitza est une ville populeuse de 5 à 6000 habitans bulgares et musulmans. On y remarque assez de mosquées, une tour à horloge et bon nombre de boutiques. Les armuriers et les forgerons y paraissent surtout abonder. 11 y a plusieurs bains d'eau thermale hydrosulfureuse, dont les sept sources ont une température de 48 à58V2° de R. Cette ville entourée de cimetières à l'O. et à l'E. est placée au pied septentrional immédiat d'une crête dénudée ou d'un contrefort des montagnes boisées plus au S., or à en juger d'après des débris de constructions dans les vergers sur la hauteur d'environ 300 p. il paraît probable que la Justiniana secunda était placée, au moins en grande partie, au S. au-dessus de la ville actuelle, qui ne se serait formée que plus tard par les habitations élevées successivement autour de ses sources thermales. Le Strymon est à un quart de lieue de la ville et en deçà s'élève le mont escarpé de Koniavo (pron. Kogniavo), dont le sommet est applati et faiblement boisé. On voit depuis Kostendil la vaste échancrure, par laquelle le Strymon descend de la plaine verdoyante de Ba-domir dans la cavité plus profonde de Kostendil. Les montagnes, qui paraissent border cette sinuosité, ne se présentent que comme de basses hauteurs. Au pied du Koniavo se trouve au N. E. de Kostendil le village de Servegnano. La vue étendue depuis la cime du Koniavo a été décrite par Mr. Viquesnel, (Mém. Soc. géol. de Fr. 1844. N. S. Vol. 1, pag. 218.) La plaine du Strymon en grande partie cultivée peut avoir 1 à 1 1. de largeur sur 3 1. de long, elle est totalement déboisée et a une forme ovale et coudée dans sa partie S. E., tandis qu'à l'O. de Kostendil, elle se continue en talus insensible vers le bas col, qui conduit de cette ville dans le bassin de la Bistritza. Nous fûmes logés à Kostendil chez un obligeant Bulgare, qui nous céda sa maison. Une grande chambre avec un tapis, une galerie spacieuse et propre, une cour avec un mûrier, un hangard avec de grandes cuves pour la vendange, tout nous était abandonné à notre grande commodité. L'Àyan du lieu, le vieux Liman-Bey, parent du Pascha d'Ouskoub, nous reçut avec beaucoup d'amabilité, une fois dans son divan et une autre fois sans cérémonie sur une estrade mesquine de bois dans sa galerie. Notre présence ne le gêna point, pour décider en peu de mots un litige entre un Bulgare et un Turc. Ce bon vieillard paraissait avoir un goût décidé pour la musique, car il avait une collection de montres, d'horloges à sonneries et de boîtes à musique. Il faisait exercer des recrues albanaises et turques dans sa cour et se faisait battre le rappel jusques sur sa galerie. Depuis notre visite en 1830 Kostendil a été détaché du Paschalik d'Ouskoub, pour former un appendice de celui de Nisch. Kostendil n'est qu'à l'entrecroissement de deux routes, savoir celle que nous décrivons et celle de Radomir. Cette dernière traverse à gué le Strymon à Koniavo et longe l'eau en passant parla grande ouverture entre le mont Koniavo et les montagnes boisées en chênes vers la Bistritza. D'un autre part en montant au S. de Kostendil sur les hauteurs déboisées il devient évident qu'il n'y a dans cette direction qu'une série de montagnes en grande partie boisées et inconnues, dont la moindre hauteur dépasse 2000 p. et dont les plus grandes ont plus de 3 à 4000 p. Elles occupent tout cet énorme blanc de la carte de Mr. Kiepert entre le Dovanitza et le Plaschkavitza et contiennent les sources-mères d'au moins neuf grands cours d'eau entr'autres du Brégalnitza, de la Bistritza, du Souschitza etc. La direction de ces crêtes est celle du Rhodope et du Plaschkavitza; le Dovanitza devrait avoir cette direction dans la carte de Mr. Kiepert. Il y a là un petit monde de villages bulgares à découvrir. Dans tous les cas le terrain est très montagneux ou inhabité, ou il y a des Haidoukes, car sans cela les Ottomans, comme la poste, ne feraient pas depuis Doubnitza le détour énorme de Kostendil et d'Egri-Palanka, pour gagner Karatova. On met une petite heure pour passer depuis Kostendil le col, qui mène dans la vallée de la Bistritza. Cette pente inculte est couverte de morceaux de rochers et un petit torrent descend du col, auquel on parvient par une route, où peuvent passer des charriots. La véritable ascension ne dure qu'un quart d'heure et on franchit un col sous un poste de gendarmes. Les bois du col ne sont que des bouquets d'arbres clairsemés. On est alors à une hauteur de 2480 p. ou à 030 p. au-dessus de Kostendil. Une descente courte et fort douce conduit de ce passage au torrent de la Bistritza, qui roule du S. ou S. S. O, au N. ou N. N. E. ses eaux dans un lit rempli de blocs de roches granitiques. On la passe sur un mauvais pont en bois, près duquel il y a un Ilan isolé, nommé Gerléna d'après Mr. Viquesnel, et on ne revoit plus la Bistritza, dont les sources n'ont point été relevées exactement. Elles se trouvent au S. dans un amas de montagnes boisées, dont les cimes se présentent sous la forme de pitons coniques élevés et très rapprochés l'un de l'autre. Ils sont composés quelquefois de roches granitiques. Une partie de ces eaux doit aussi provenir du versant oriental du Dovanitza. D'un autre part la Bistritza se grossitauN.des torrens sortant des montagnes duKourbetska-Planina et elle arrive au Strymon par un grand coude à travers des gorges dirigées de l'O. à l'E. et au N. du col entre Kostendil et la plaine, dont nous nous occupons. La cavité ouverte de la Bistritza est à 2280 p. de h. abs. et a environ 2 1. de longueur sur plus d'une lieue de largeur. Dans les prairies de ce petit bassin sans villages nous passâmes près de deux H ans abandonnés et rencontrâmes un Juif habillé à l'européenne, qui se rendait à pied de Scoutari en Albanie à Bucharest. La traversée de la crête entre cette dépression et la vallée de l'Egridéré-Sou ou en slave du Kriva Rieka (rivière serpentante) est un passage totalement impracticable pour des charriots et le côté occidental l'est encore plus que le versant opposé. Si entre Kostendil et la Bistritza on n'a qu'une hauteur d'un peu plus de 000 p. à passer, ce col de Dvelaberdan (?) (peut-être Bielobrdo) est à plus de 800 p. sur la Bistritza et 1302 p. sur Egri-Palanka. Cette petite plate-forme est dominée par des cimes boisées de près de 100 p. d'élévation. Elle n'offre que des pentes rapides et des sentiers tournans, qui sur le côté occidental sont profondement ex-cavés et très en pente. De plus, ce chemin, plein de poussière en été, vu la friabilité (les roches schisteuses, devient très boueux en hiver. On met environ % de 1. pour atteindre le sommet de l'arête, où se trouvent quelques prairies et on en descend par des bois de chênes. Les montagnes plus élevées au S. et S.O. aux sources de l'Egridéré sont toutes couvertes de bois touffus, tandis qu'au N. la vue est gênée par la crête la plus voisine, L'Egridéré est un profond et étroit sillon , dont le torrent vient du S. E. du pied du mont Dovanitza d'au moins 4000 p. de hauteur. Mr. Viquesnel. dit y avoir vu des taches de neige le 28 juin. On y voyage tantôt sur une rive du torrent, tantôt sur l'autre, en se dirigeant àl'O. S.O. La route est désormais de nouveau prac-ticable pour des charrettes jusqu'à Kalkandel. Plusieurs petits ruisseaux débouchent du S. dans ce vallon et l'un d'eux à 1 1. avant Egri-Palanka nous frappa par la couleur jaune de ses eaux, qui servent au lavage des rochers ferrifères. Au milieu de ces bois de chênes et de hêtres et de cette nature si sauvage la richesse minérale des montagnes y a donné lieu à l'établissement de quelques petits hameaux cachés dans de hautes gorges. Une usine de fer s'y trouve même dans un vallon à plus d'une lieue au S. E. de l'Egridéré, Ce gîte de minerai est en rapport probable avec le voisinage des granités ou des roches povphyriques. (Voyez ma Turquie. Vol. 3, pag, 01.) Ail. avant Egri-Palanka est un Han. Egri-Palanka, à 1700 p. de h. abs. et à 7 h. de Kostendil, est une grosse bourgade de 2 à 3000 âmes, qui occupe un espace assez long et est traversé par le torrent de la vallée, qui coule dans ces lieux du N. N. E. au S. S.O. La rue principale présente surtout des boutiques d'armuriers, des fabricants de fers pour les chevaux et partout on voit des barres de fer. 11 y a plusieurs fontaines, des cafés et certaines maisons sont ornées sur le devant de ceps de vignes. Nous y fûmes fort bien logés chez de bons Bulgares, qui firent tout ce qu'ils purent pour nous contenter. Mourtasan Beg, l'Ayan du lieu, vieillard à barbe blanche, nous reçut à l'entrée du portail de sa cour assis sur une estrade ombragée par des ceps de vignobles. Il était habillé complètement à la turque et ne portait pas le Fess. Egri-Palanka est un lieu abondamment fourni d'excellentes eaux vives et les habitans y ont conduit artificiellement des filets d'eau depuis la montagne de Martinitza au S. Les pentes inférieures de cette dernière sont fort rapides, comme cela a lieu dans la plupart des vallées étroites, qui ne sont au fait que des crevasses, mais une fois cette partie dépassée on n'a plus qu'une succession de terrasses inclinées couvertes de bois et de pâturages pour arriver au sommet des crêtes. Nous remarquâmes sur ces hauteurs bon nombre de troupeaux et quelques habitations isolées dans une gorge au S. d'Egri-Palanka. La vue depuis ces hauteurs est fort agréable. Vis-à-vis de soi au N. les montagnes d'au moins 2700 p. de h. abs. forment un véritable amphithéâtre, sur lequel on remarqué surtout plusieurs petites buttes coniques probablement trachytiques et au milieu des bois, des hameaux, des champs et des pâturages. A l'E. l'horizon est bordé par les crêtes, qui forment le prolongement de celles, où on se trouve et qui sont un peu moins hautes que celles au N. , tandis qu'au N.N. E. s'élève à 2 ou 3 1. de distance en ligne directe, un grand massif de montagnes, qui est occupé par des pâturages recouvrant plusieurs plate-formes inclinées et séparées par des escarpemens de rochers. Cette sommité obtuse est le roi des montagnes de ces environs et offrait encore au commencement du juillet deux taches de neige. Elle porte le nom général de Kour-betska-Planina et atteint une hauteur de 4003 p. La cime la plus élevée serait le Spatz. Mr. Kiepert a tort de figurer encore sur la carte un Egrisou-Dagh, qui n'existe pas non plus comme sommité. Il se trompe aussi en prolongeant son Tschnja et un de ses affluens si loin au N. E. entre son Spash et son Egrisou-Dagh. Le Spatz devrait être un peu plus à l'E. Il n'y a qu'une crête entre la vallée de l'Egridéré et celle de la Morava, mais la Bistritza reçoit plusieurs petits affluens du N. et N. O. La route d'Egri-Palanka àKoumanovo, unedistance de 10h., descend pendant près de deux heures la vallée à l'O. S.O. A sa sortie un rocher la barre à un tel point qu'il faut le franchir par une montée et une descente courte et rapide de 50 à 00 p. d'élévation. En deçà de ce petit défilé est le Han isolé deTasch-Han (auberge de la pierre, prononcé aussi Tschatsch-Han) et on commence à traverser la plaine triangulaire de Stratzin, qui est en partie cultivée en blé et maïs et a plus de 3% 1. de long de l'E. à l'O. sur 1 à 1 l/a 1. de large. Outre l'Egridéré elle est arrosée vers son milieu par le Rankovtza, qui coule dans le torrent précédent. Au N. sont des montagnes boisées d'environ 2600 à 2700 p. ou de 1000 à 1100 p. au-dessus de la vallée, leurs sommets rabattus et trachytiqu.es contrastent avec les pointes des crêtes schisteuses sur le bord de l'Egridéré. A 5'/2 1. d'Egri-Palanka est sur le bord d'un ruisseau tributaire du Rankovtza le Han isolé de Stratzin (Stradscha), qui n'est qu'une misérable maison, où l'ombrage chétif de quelques arbres était le seul endroit propre pour une couchée. Une bande nombreuse de jeunes femmes bulgares voyageant avec quelques hommes vinrent à passer et nous amusèrent quelques instans par leurs danses nationales exécutées en chantant. Les hommes ne prenaient pas part à cette récréation et se contentaient du plaisir de regarder ces robustes campagnardes, qui quoiqu'ayant marché tout le jour étaient toutes disposées à danser, lors même que nous ne leur aurions pas donné quelques litres de vin *). Depuis cette auberge on commence immédiatement à monter pendant une petite demi-heure par une ancienne route pavée. Au haut se trouve une ferme avec un grand mur de clôture, quelques maisons ainsi que les ruines d'un bâtiment peut-être turc. La vue de la plaine de Stratzin est champêtre et au N. O. du Han, nous remarquâmes une butte isolée dans la vallée. A 2 h. du Stratzin-Han le village de Jélo est situé à gauche de la route au pied d'une de ces sommités trachytiques. Du reste, en général depuis la ferme jusqu'à la vallée de Schinié, la route continue à se tenir dans le haut des montagnes, environ au même niveau de 2500 p. Au N. régnent des cimes de montagnes applaties boisées et basses, au S. la continuation de leurs pentes et les ravins, qui en descendent, ce qui oblige assez souvent à de petites descentes et des montées. Parmi ces dernières celles de la protubérance avec la ruine sont les plus fortes. La plupart de ces vallons sont cultivés et ombragés de beaux arbres, sans qu'on puisse voir les villages, qui sont plus bas. Le torrent de Schinié ou Tschigna précédé d'une descente est bordé de cimes applaties et déboisées , qui se prolongent du S. au N. en n'offrant que des rochers. Il coule dans un vallon peu cultivé, se passe à gué et se décharge dans le Kriva-Eieka. De- ') L'aubergiste fut obligé de nous procurer un repas complet et même une pita ou tourte, aussi son compte fut-il assez enflé le lendemain, ce qui lui valut u» petit sonrlet de la part de notre Tartare à l'indignation de Serbes, qui nous «ceompagnaient et qui pensaient en eux-mêmes: quand finiront une fois ces humiliations des Chrétiens ? puis là on remonte sur une plate-forme plus basse que la précédente et où est placé le hameau de Vinitza. Plus loin en deçà de petites buttes doléritiques à cimes rabbattues et à escarpemens se trouve le village de Nagoritsch. Pour atteindre ce dernier, on passe entre deux buttes, dont celle duN. offre sous les rochers noirâtres la ruine d'un petite église chrétienne ou d'un couvent. Depuis ces hauteurs, comme depuis toute cette route en corniche dans les montagnes, on jouit de vues plus ou moins étendues sur l'immense plaine très peu accidentée de Moustapha entre Ouskoub et Istib, sur les montagnes à l'O. du Vardar et celles de Kara-tova. On voit aussi le Schar depuis Nagoritsch, qui n'est qu'à 1 '/g 1. de Komanovo. Entre ces deux endroits règne un plateau aride et sec, où on ne voit guère que des bergers, lorsque le soleil n'y a pas détruit toute végétation, Komanovo ou Koumanova (t. Gégligova) à 10]/2 h. d'Egri-Palanka et à 653 p. d'altitude absolue est placé sur la rive occidentale d'un assez grand torrent, le Vélika-Rieka, qui prend sa source vers le col boisé conduisant à Vranja et afflue dans le Kriva-Rieka. Ce bourg de 3000 habitans bulgares est entouré dejardins potagers très bien entretenus et artistement arrosés. Les rues ne sont pas pavées et pleines de poussière en été et les murs de clôture en boue et paille. Depuis la vallée très évasée de Komanovo on monte insensiblement, pour atteindre la plate-forme sèche et aride , qui est placée en avant de la crête allongée et boisée en chênes du Kara-Dagh (mont noir). Ce dernier atteint 2000 à 2600 p., tandis que le plateau ne paraît avoir que 800 p. de h. abs. ou 227 p. sur Komanovo et 300 p. sur Ouskoub. Cette terrasse a un terrain rouge argileux plein de cailloux et n'offre en fait de villages que ceux de Bara et de Mojantzi à distance de la route au pied de la montagne et à environ 4 1. de Komanovo. Depuis cette hauteur on domine aussi au midi la plaine de Moustapha. Au-delà de cette dernière on ap-perçoit la grande chaîne au S. du Brégalnitza, où on voyait encore le 4 juillet des taches de neige. D'un autre côté on apperçoittrès distinctement les montagnes en deçà du Vardar, le Schar et les basses montagnes du Mlad-Planina entre cette dernière chaîne et le Kara-Dagh. Avant de descendre dans la vallée du Vardar, on passe près d'une fontaine d'excellente eau et bientôt on revoit des champs de céréales. A l'/a L avant Ouskoub on traverse le village d'Ara- tschina et à 1 h. plus loin on laisse à droite celui d'Hassam-Beg-Keui. Plusieurs autres villages s'apperçoivent de loin au N. G. sur le pied de collines à vignobles. La route de voiture d'Ouskoub à Kalkandel ou Kalkandelen, le Tétovo dos Slaves , longe le Vardar sur sa rive orientale eu se portant d'abord au N. et N. O. On guée avec quelque peine le Lépénatz à Zlotchisch-Han et on passe à 1 l/2 h. d'Ouskoub le Vardar sur un pont à Sarai, où le Pascha a une maison de campagne entourée de murs assez élevés pour son Harem en été. On se dirige alors à l'O. dans la vallée du Vlaïnitza, confluant avec celle du Vardar et courant parallèlement au Schar de l'O. S. O. à l'E. N. E. On est obligé à ce détour, parce que le Vardar ne sort de son bassin supérieur au pied du Schar que par un coude dirigé du N. O. au S. E. et par des petits défilés , où est placé une ruine du nom d'Oraskalé ou en slave Ledjen. Cette dernière serait pourtant une indication d'une route ancienne le long du Vardar. Mr. Jouritehich nous apprend que cet ancien château est composé surtout d'une tour et de quelques murailles. Il pense que c'est un ouvrage byzantin. En avançant dans la vallée du Vlaïnitza, on observe que l'eau coule environ de l'O. à E. et on guée ce torrent. Il est formé par la réunion de deux cours d'eau, dont l'un, la Dreska, vient des montagnes au S. O. et débouche à 1 s/4 h. d'Ouskoub par une crevasse étroite au milieu de montagnes composées de rochers dolomitiques pittoresques. A la sortie de ce défilé est placé Tschischtova (l'Ischitschi des cartes). En remontant cette cavité on peut arriver dans le haut de celle du Zayas ou à Kritsehovo. D'après ce que nous en avons pu voir de loin, les montagnes le long de cette vallée ne sont pas fort élevées, mais assez boisées. L'autre torrent est celui qui coule de l'O. à l'E. et qu'on remonte pour aller à Kalkandel. Le Schar, le Ljoubéten et le Kara-Dagh forment l'horizon au N,, mais en avançant on les perd de vue. La vallée qu'on suit n'a pas un quart de lieue de largeur et n'est que ça et là cultivée. Les montagnes , qui la bordent, sont peu élevées au N. , mais au S. le Vlaïnitza-Planina forme un assez bel amphithéâtre orné de bois et lié au mont Kartschiaka à l'O. d'Ouskoub. Au-devant de lui sont des collines en partie cultivées et supportant des villages. De tous les côtés sourdent 20 des eaux abondantes et fraîches. La route dans la vallée est agréable, étant ça et là ombragée d'arbres (aunes, peupliers, etc.), tandis qu'en avant de son entrée on remarque des ponts enlevés, d'énormes mares d'eau, bref une négligence totale des réparations nécessaires. A 3 1. d'Ouskoub est un cimetière isolé et plus loin quelques maisons et une auberge avec des champs de maïs et des prés. A 1 1. plus loin la route passe par un défilé de rochers de marbre et est en partie établie dans le torrent. A l'entrée de ce passage est une garde et le vallon de Laskartscbik y débouche du N. O. Nous y rencontrâmes deux charrettes couvertes et à quatre roues, elle recelaient des dames turques, cachées derrière les rideaux des ouvertures. Un homme armé était à cheval sur un côté de chacun de ces équipages cahotans et traînés par des bœufs. Ces voitures n'auront guère pu passer l'eau profonde du Lépénatz sans que ces dames n'aient pas été mouillées. Nous arrivâmes enfin à Groubschin ou Droupschin et plus loin à Dobrotan ou Dobrtza. Si on continue à remonter la vallée au S. O. on atteint bientôt un col assez bas, qui forme le partage des eaux entre le Vlaïnitza et l'eau du Tzrvinova, un affluent supérieur du Vardar. On y abandonne la vallée, qui se prolonge à l'O. et on tourne au N. pour passer le bas col de la montagne du Dervenska-Planina, qui a 1966 ou 2000 p. de h. abs. ou 1200 p. sur Ouskoub. Nous y trouvâmes une compagnie de Kiradgis faisant leur somme du milieu de la journée. Ce passage, totalement dénudé de bois, est rocailleux. Le Schar se présente au N. dans toute sa splendeur. A son pied méridional est la verdoyante vallée du Vardar, et presque vis-à-vis de son milieu crevassé est Kalkandel avec le Konak d'été du Pascha, couronnant une butte de vignobles, ce qui forme une position très pittoresque. Les Slaves donnent le nom de Tétovo à tout ce district. Depuis le col on a bientôt gagné le Vardar, qu'on passe sur un pont en bois, mais entre ce point et Kalkandel on a encore 1 '/2 1. de pâturages si humides à parcourir que, malgré les bouts de pavés, il faut faire des détours pour éviter les fondrières. Un torrent sort du Schar derrière la ville et roule avec vitesse du N. au S. ses eaux grises et glaciales dans le Vardar. Kalkandel ou Kalkandelen, le Tétovo des Slaves, à 6V2 h. d'Ouskoub et à 1300 ou 1400 p. d. h. abs., est une ville habitée par des Bulgares, des Musulmans et des Albanais; le quartier haut paraît être turc et le bas plutôt slave. B peut y avoir 4 à liOOO âmes, dont la moitié' sont Serbes et Chrétiens grecs. L'intérieur de cette ville répond passablement à son extérieur, car, grâce au torrent, les rues n'y sont pas sales. Les habitations y ont chacune un verger de mûriers, de manière que, vu de loin, cette ville a l'air enfouie dans un bosquet, d'où ressortent quelques minarets. B y a deux Tscharschiou ou rues à boutiques, celle d'en haut paraît surtout musulmane et contient un Café-Ilan délabré d'un étage, qui est en même temps la poste. L'autre Tscharschiou est bulgare et offre une belle auberge. Il s'y trouve autour d'une grande cour propre plusieurs chambres pour des voyageurs; les unes sont des rez-de-chaussée, les autres sont à un premier au fond de la cour. Un petit ruisseau d'eau vive entretient la fraîcheur dans la cour. Sous la porte-cochère est le local de l'aubergiste. En été on ne peut rien désirer de mieux en Turquie. Quatre grands Konak existent dans la basse ville, l'un n'est qu'une énorme bâtisse avec de vastes galeries ouvertes en bois et ressemblant un peu à une maison bernoise. C'est une propriété du Pascha d'Ouskoub. Un autre est le véritable château entouré d'une haute muraille carrée avec des parties avancées en forme de tours et des meurtrières. Dans la cour sont une caserne, des écuries et un grand Konak en pierre avec une large galerie en bois. Un troisième Konak, bâtiment carré, blanchi et orné de peintures en fleurs, est le Harem du Pascha et un quatrième Konak, vis-à-vis de ce dernier, est l'ancien palais et est occupé maintenant par les officiers du Pascha. Il est situé vis-à-vis du nouveau palais. Nous fûmes toute de suite faire visite au Pascha nommé Abdourraham et frère du Pascha d'Ouskoub. Dans sa cour un officier turc exerçait des recrues albanaises encore dans leur costume nationale. Son beau divan était orné du chiffre du Sultan sur un fond bleu de ciel. Un bel habit d'honneur, couleur écar-late, était étendu sur le divan vis-à-vis de lui et était un présent du Sultan. Le Pascha engagea deux de nous à aller encore le même soir avec lui pour voir sa favorite, qui était malade dans son Harem d'été. Néanmoins l'étiquette turque ne lui permettait de nommer cette personne publiquement que sous le titre d un ami. 20 * Nous montâmes depuis Kalkandel au pic du KobiJitza ou Kobélitza (le Sternum des oiseaux), une des hautes sommités du Schar. On y arrive par une route établie avec art sur le côté escarpé et oriental de la grande gorge au N. de la ville, d'où sort son torrent. On passe ainsi sous le Harem d'été du Pascha pour gagner au-delà deux villages albanais placés sur la pente des montagnes et entourés de vergers et de champs. Le premier s'appelle Seltza et est presque vis-à-vis de Schipkovitza, qui est placé sur le flanc occidental de la gorge. Des bergers faisaient paître leurs troupeaux au bord du torrent, qui est à plusieurs centaines de pieds plus bas. Arrivé à l'endroit, où cette gorge se divise en deux, on suit le bord très élevé du torrent, qui vient du N. E. et on se rend au village guégue de Veitza, à 3216 p. d'élévation abs. et à environ de 37a h. de Kalkandel. Depuis là il faut encore environ 3 h. pour monter à la cime du pic, qui forme une proéminence isolée au milieu de la chaîne dans une pairie, où elle est traversée par les doubles crevasses débouchant à Kalkandel et par celles se terminant à Prizren. La première heure de la montée a lieu sur des pentes en bonne partie boisées en hêtres, où des bergers ont des huttes. Plus loin toute végétation forestière cesse et on s'élève au milieu des blocs grani-toïdes jusqu'à la crête , d'où on met encore une petite heure à gravir à l'O. le pain de sucre gazonné et fort incliné, qui forme le mince sommet du pic. Cela me rappelait en petit l'ascension du cône gazonné du Mole en Savoie. Les rochers, ressortant ça et là de l'herbe , étaient ornés surtout do touffes de la belle Saxifrage moyenne {S. Média deGouan). On peut aussi y monter directement depuis le côté sud, mais cette ascension est double plus longue et fort rude. En juillet nous trouvâmes encore de fort grandes plaques de neige sur le versant méridional au pied du sommet. Au N. et N. E. régnent d'énormes escarpe-mens, qui empêchent toute accumulation de neige. Le panorama depuis ce pic de 7389 p. de h. abs. est un des plus beaux qu'on puisse voir, car si la vue est bornée à l'E. et à l'O. par les cimes du Schar, qui s'élèvent de 7800 à 8100 p., au S. S. E* on apperçoit le Soagora près de Bitoglia en deçà d'un grand rideau de montagnes et même on entrevoit la place du lac d'Ochrida, tandis qu'au N. et N. E. on a sous soi toute la Métochie ainsi que la plaine de Kosovo et pour horizon les mon- tagnes du Scordus ou d'Ipek et celles du Kopaonik en Servie. Au S. E. les montagnes paraissaient infiniment plus basses et on distinguait ainsi la vallée du Vardar. Depuis cette montagne on pouvait aussi suivre une grande partie de la route de Kalkandel à Prizren au moins depuis le col, car on ne pouvait pas voir ni Prizren ni la vallée, où est Vésehal. Nos guides albanais du Pascha ayant cru qu'un de nous s'était égaré sur la montagne, un d'eux y passa la nuit, tant les personnes craignent d'être punies pour avoir négligé la garde de ceux qui leur sont confiés. Après cette belle excursion, nous passâmes un jour fort agréable chez le Pascha dans son Harem d'été, où il nous fit servir avec tout le luxe d'un grand Seigneur. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, p. 302 et 446.) Le Paschalik de Kalkandel est un très petit gouvernement, qui ne comprend que le district de Tétovo, le revers septentrional du Schar, les vallées des sources-mères du Vardar, ainsi (pue peut-être la vallée de Vlaïnitza, Le fond de la population est bulgare et serbe et de la religion grecque, seulement un dixième peut être musulman et albanais. Le chiffre des habitans peut aller à 30 ou 40,000, parce qu'il y a un grand nombre de villages, dont plusieurs comptent beaucoup de familles, mais il n'y a qu'une ville et un gros bourg, savoir Kostovo (alb. Goustivar). Sur le coté non loin du Vardar est à 2 h. à l'E. S. E. de Kalkandel le couvent de Leschok, qui est placé sous le mont Plotseha. Un autre avait été fondé un peu plus à l'E. en l'honneur de St.-Athanase d'Alexandrie par le Knes serbe Lazar, mais il a été détruit de fond en comble par une inondation à la suite d'un terrible ouragan dans le Schar. On n'y voit plus que des restes de l'église et les moines se sont dispersés. Un peu au-dessous du couvent vient le défilé et la ruine de Lédjen (cuvette en lavoir en cuivre) indiqué déjà sur le Vardar. Les gens du pays lui attribuent une origine hellénique, mais le fait que le Tzar-Dou-schan y a cherché sa fiancée et le dit-on du pays qu'il appartenait à un prince latin, c'est-à-dire, de la race romane, ne serait pas tout-à-fait sans fondemens. Cette résidence de hauts personnages dans le pays de Tétovo peut aussi avoir donné lieu à la dénomination de Polog pour son entourage, la contrée autour de Lédjen formant le Dolni-Polog ou campement inférieur et le Gorni- sio Polog ou campement supérieur, étant aux sources du Vardar. Il y a aussi un Polog en Bosnie. Avant d'aller plus loin, décrivons brièvement le Schar ou Schara-Planina. C'est une chaîne courant du N. E. au S. O. entre deux cavités ayant la même direction. Elle a une longueur de 13 à 14 lieues et une hauteur moyenne de 6000 p. Sa largeur est environ 8 à 9 1. si on ne parle pas de largeur en ligne droite. Elle est en partie assez nue, ses bois de chênes et de hêtres ne s'étant conservés surtout que vers son extrémité S. O. et S. E. Il y a en outre quelques petites forêts de pins au-dessous des hauts sommets. Géologiquement cette formation de montagnes assez récente se continue fort au-delà des deux extrémités de cette arête géographique, où le soulèvement a été seulement le plus considérable. C'est elle qui a donné lieu à l'idée des anciens géographes que la Turquie d'Europe était traversée de l'O. à l'E. par une chaîne centrale très élevée, dont le Schar et le Balkan n'étaient que des portions. Ses pentes sont rapides sur les deux versans, néanmoins elles le sont davantage sur le côté méridional que sur le côté opposé, parce qu'il y a des contreforts au N., tandis qu'au S. il n'y en a que vers l'extrémité orientale. Sa crête ressemble en petit aux Pyrénées par ses pitons, tandis que ses crevasses transversales sont d'autres points de ressemblance. Elle se termine d'une manière très abrupte au N. E. par le mont Ljou-béten. (Voyez l'ascension de ce pic par Mr. Grisebach.) Cette pyramide aurait 7900 p. de h. abs„ tandis que le prolongement oriental du Schar, savoir le Mlad-Planina et le Kara-Dagh, n'ont le premier qu'environ 2000 p. et le second 2000 à 2000 p. A l'extrémité opposée s'élève à l'O. S. O. la montagne du Jalesch, nommé ainsi du mot slave Jalija, rive, à moins qu'on puisse dériver cette dénomination du Chah albanais , la force. Cette montagne n'est dans le l'ait qu'une portion de celle qui existait une fois, car l'Ibaléa en a été séparé par l'énorme crevasse, où coule le Drini noir. Le nom de cette dernière viendrait peut-être de balje, vague, à cause du voisinage des eaux agitées du Drim. De plus ces deux masses atteignant maintenant plus de 6000 p. étaient réunies aux montagnes du Schalé-Schoss et des Hass, qui sont au N. et en sont séparées à présent par la dépression dite de Verbnitza, dont nous parlerons plus bas. Si la grosse tête du Jalesch surplombe d'énormes escarpemens au N. O. et à l'O., le corps de la montagne est moins en pente sur le côté S. E. et se lie par les sommités du Korab et du Tôles à la chaîne d'au-delà de 3000 p. à l'E. de Dibra. Les autres parties du Schar, jusqu'ici connues, sont d'abord le long dos arrondi du Tzarabaschina, qui borde au N. 0. la cavité de Tétovo et est séparé du reste de la montagne au N. O. par une grande vallée longitudinale, savoir celle du grand torrent de Véschal et à l'E. par un sillon transversal ou le torrent de Kalkandel. Aux sources du premier torrent se trouve au N. la sommité du Babaschanitza et plus loin à l'O. celles du haut Kri-vosia (t. Egribosoun). Entre ces sommets de plus de 8000 p. et le Jalesch trône au haut de la crevasse de Louma le Koridnik (le Koropnik du Dr. Miiller?), qui dépasse au moins 7000 p. Les noms des cimes entre le Kobilitza et le Lioubéten sont restés jusqu'ici inconnus. La montagne y formerait un. seule masse sans vallée longitudinale, du moins du côté méridional, car au N. le haut de la vallée de la Maritza de-Prizren prend presque cette forme. La route de Kalkandel à Prizren passe par un des cols les plus élevés de la Turquie, au moins parmi ceux fort usités comme voies de communication. C'est un passage fatiguant, pour lequel la poste ne compte que 8 à 10 h., tandis qu'au pas ordinaire on met de 10 à 12 h. suivant qu'on s'y engage depuis Kalkandel ou depuis Prizren, parce que la montée au col du Schar depuis la dernière ville se fait en 4% d'h., tandis que celle depuis Kalkandel prend 6*4 d'h, Arrive-t-on de Prizren au contraire, la descente sur Kalkandel peut se faire en 4 ou S heures au trot du courier. En hiver les neiges du col peuvent fermer quelquefois cette route. A l'extrémité septentrionale de Kalkandel est sur le torrent un moulin ou Stoupa, où on foule du tabac à priser. Une fois passé cet établissement du gouvernement, on entre dans une fente transversale du Schar courant du N. O. au S. E, Comme des escarpemen8 bordent les eaux blanchâtres du torrent, il faut s'élever sur sa gauche à travers les vignobles et on ne cesse de gravir péniblement que lorsqu'on est arrivé presqu'à la hauteur du Ko-nak d'été du Pascha, qui est situé sur une butte à l'E. du torrent. A 1 h. de Kalkandel on passe à Scbibkovitza et à côté du Téké d'un Derviche mort en odeur de sainteté. Des châtaigniers se rencontrent près de là, tandis que le village de Seltzé (de Séio, village) se présente de l'autre côté de la gorge. Son fond est occupé par un grand rocher de schistes argilo-talcoides , qui semble avoir formé une fois un îlot dans le torrent, mais son lit s'étant approfondi d'un côté , cet isolement de la terre ferme a cessé. Quelques petits pâturages, propres pour des moutons, bordent l'eau non loin de là. La route continue à monter faiblement en corniche sur le torrent jusqu'au point, où ce dernier se divise, une branche venant du N. E. ou des environs du village de Veitza et l'autre du N. O., le pic du Kobélitza et surfout son contrefort méridional formant, la langue triangulaire de terrain ou l'éperon entre ces deux cours d'eau. On est alors à 2 1. de Kalkandel presqu'à la limite supérieure des noyers et du maïs, car on se trouve déjà à 2789 p. d'élévat. abs. Une fontaine, placée au bord de la route, invite à y reprendre de nouvelles forces. On commence ensuite à se diriger vers le lit du torrent du N. O. en sn tenant entre des prés et la ponte de la montagne, qui est tantôt rocailleuse, tantôt couverte de bocages. On descend un peu pour arriver à l'eau. À 200 p. sous le hameau albanais de Kodetz, sur la rive gauche du torrent et à 2l/2 h. de Kalkandel, on passe ce dernier sur un petit pont en bois. Les habitans de cet endroit, célébrant une noce, saluèrent notre passage par des décharges de fusil et une musique de cornemuse et de grosse caisse turque. Vis-à-vis de ces maisons appliquées contre la pente escarpée de la montagne, cette dernière n'a pas encore perdu ces anciens bois comme c'est le cas près de Kalkandel. Des hêtres (Fagus sylvaticà) y forment une forêt qui contraste avec les pentes dénudées, sur lesquelles passe la route. Il faut recommencer à monter en se tenant fort au-dessus du torrent bordé d'éboulis schisteux et après avoir tourné quelques pentes on débouche en face de Véschal, dont on est séparé par un profond torrent venant du N. O. On est obligé à cause des éboulis de descendre obliquement dans son lit au N. pour remonter de même au 8. à ce hameau guége, qui est à 4 h. de Kalkandel. On y trouve un Han, le seul sur cette longue traversée. Le grand torrent prend ses sources à une ou deux lieues à l'O. dans les sommités du Krivosia, où on n'apperçoit que des rochers, quelques places gazonnées et des points de neige même à la fin d'août. Il reçoit outre le cours d'eau de Véschal un autre venant du 8. O., qui y débouche au S. E. de ce village. Un troisième des afrluens du grand torrent de l'O. est un petit cours d'eau, qui descend du N. O. ou à l'O. de Véschal et forme au-dessus de ce hameau une petite cascade. C'est le vallon de ce dernier torrent qu'on remonte pour passer le Schar. Par une ascension rapide on dépasse les rochers, qui donnent lieu à la petite cascade et on longe à distance de l'eau sa rive occidentale. Le vallon se rétrécit un peu et va se terminer entre des cimes à plaques de neige en une espèce de vaste cirque de rochers et de verdure, où les bergers conduisent paître leurs moutons dans le gros de l'été, Quelques hêtres rabougris sur la montagne à l'E. indiquent que leurs limites supérieures sur le versant méridional du Schar se trouvent à 4199 p. de h. abs. Après qu'on a passé le torrent toujours en vue au bas du cirque élevé, on monte au col à 2V4 d'h de Véschal par un sentier décrivant trois grands contours sur une petite rocailleuse. Le col étroit à 0380 p. n'est dominé qu'à distance par des sommités à l'O. et à l'E. De ce dernier côté le pie du Kobilitza et des cimes voisines ont l'air d'avoir encore 1000 p. d'élévation de plus que le col, tandis qu'à l'O. les cimes moins pointues du Babascha-nitza sont encore environ 500 à 000 p. plus hautes. Si la vue depuis le col est limitée surtout au N. O. par les sommités environnantes, on distingue cependant au S. et au S, O. les montagnes entre la Macédoine et l'Albanie près de Monastir et on a devant soi au N. la chaîne des montagnes de Gouzinié, de Plava et d'Ipek, tandis qu'au N. E. s'élève à l'horizon le Kopa-onik serbe en deçà des hauteurs de Prischtina. Plus près de soi on distingue les montagnes, qui séparent la plaine de Prizren de celle de Djakova et au N. O. on apperçoit deux ou trois profondes vallées et une montagne plus élevée que les autres, qui est le Schalé-Schoss ou Hass. Entre ce dernier et le mont Jalesch passe la route de Prizren à Scutari. La descente du col au N. est en zigzag sur une pente faiblement inclinée à l'exception du voisinage d'un petit ruisseau au bas de la première descente immédiatement sous le col. Un cours l'eau descend du S.'O. et coule au N. E. pour se réunir au précédent en avant du pied du pic de Kobélitza. Entre ces deux principaux torrens il y en a deux plus petits, qui se rendent dans le premier. Tous ces torrens réunis forment la Maritza ou Ma-ratsch, qui sort des montagnes sous le château de Prizren et tra- verse la ville pour se rendre dans le Drim en coulant d'abord au N.O., puis au N. N, 0. La route suit le haut des pentes au N. du premier torrent, en changeant insensiblement de niveau et passant d'une zone froide à une zone tempérée. Le sol est rocailleux et couvert ça et là de buissons de genièvre. A 2 h. on atteint un endroit, où le sentier est resserré entre des rochers sur lesquels est placé à gauche un Karaoul. Il est assez probable que quelque petit fortin a occupé jadis cette place. Au-dessous se trouve une fontaine et une écurie, où il n'y avait personne à notre passage. On apperçoit au loin à FO. un village dans la vallée et on atteint bientôt par une série de terrasses inclinées et couvertes de bruyères un petit bois de hêtres, qu'on traverse par un joli chemin. En hiver un petit ruisseau paraît couler le long de ce sentier digne d'un parc anglais. En deçà de ce bois et en continuant à se tenir sur le côté oriental de la crête, on tourne de l'E. à FO, autour du fond d'un grand cul de sac, au-dessus duquel croissent sur la hauteur quelques hêtres. Un village est placé à droite dans le fond du vallon. Enfin en tournant la montagne on atteint une énorme cavité, qui n'est qu'une sinuosité entre cette partie de la montagne et celle qui s'étend jusques sous le château et le haut de la ville de Prizren. Un affluent assez grand de la Maritza coule sur le côté septentrional de cette cavité en y recevant de petits ruisseaux du côté sud, de manière que pour atteindre le grand torrent il faut longer à FO. les pentes au-dessus de l'origine des ruisseaux, ce qui occasionne un détour d'au moins une heure. La dernière descente est seule rapide et exige de descendre de cheval: On franchit le torrent sur un pont et remonte tout de suite pour gagner au N. E. la crête pelée de la montagne, d'où on descend rapidement sur le château de Prizren et le long des sommets, qui bordent à l'O.la vallée du Maratsch l). ') Il était nuit lorsque nous atteignîmes le cimetière serbe-bulgare au-dessus de Prizren et ses premières maisons. Descendus par les rues fort en pente dans la basse ville, nous ne savions comment y trouver l'unique auberge de cette ville, car personne ne se montrait dans les rues et il n'est pas trop d'usage d'aller taper après YÂkscham à une porte de maison avant de savoir, qui en est le propriétaire. Heureusement nous savions que le H an était situé dans le bazar, mais pour traverser ces rues couvertes et tout-a-fait sombres, il fallut descendre de cheval, risque à aller donner du nez contre les boutiques. A force de tourner les rues Prizren, le Prizrendi des Albanais et le Pérsérin des Turcs, est bâti à 1149 p. d'élévation absolue sur les deux bords delaMa-ritza (alb. Maratsch), ainsique sur le pied du Schar, de manière qu'une partie de la ville forme un véritable amphithéâtre, au-dessus duquel trône sur un haut rocher l'ancien château fort, la résidence de certains rois serbes. Entouré de murailles crénelées et bien entretenues, ce dernier occupe un assez grand espace quadrangulaire à l'angle occidental du débouché de la Maritza dans la plaine de Prizren. Du côté du vallon étroit de ce dernier torrent le roc calcaire forme sous le château un précipice à pic de près de 200 p. de hauteur. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, pag. 343.) Comme les environs sont plats, en partie cultivés et ornés de villages, la ville de Prizren est vraiment dans une position magnifique. Pour la bien apprécier, il ne faut pas la considérer depuis les derniers échelons du Schar, parce que la ville disparaît prcsqu'à côté du vaste et riche bassin de la Métochiia, mais il faut arriver de Djakova ou d'Ipek. On voit alors tout de suite qu'on a devant soi une des plus belles et riches villes de la Turquie et on ait surtout saisi d'admiration par le contraste entre la nudité ou la sauvagerie de la chaîne du Schar à côté de cette vigoureuse végétation et population de la plaine. On comprend en môme temps toute l'importance de cette ville, qui de tous temps a servi à tenir en respect le mélange des nationalités des plaines et des montagnes environnantes, tandis que diverses industries et son commerce de transit entre la Turquie et l'Albanie maritime ont contribué à grossir le nombre de ses ha-bitans. du bazar une lueur ii travers une porte nous indiqua enfin immanquablement le lieu que nous cherchions. La vie qui y régnait dénotait le passage d'une grande voie de commerce et contrastait singulièrement avec les rues désertes, que nous venions de parcourir. Une énorme cour était entourée de tous les côtés de bâti-mens d'un étage avec des galeries et un nombre considérable de chambres. Plusieurs escaliers conduisaient do la cour aux galeries, où étaient entassés comme dans la première des ballots et des caisses des marchandises. La vaste écurie était pleine de chevaux et il y avait un va et vient continuel de Kîradgis, de voyageurs et de garçons d'auberge. Néanmoins comme VAkscham avait commencé, malgré la grandeur de la ville, nous ne pûmes nous procurer pour le souper que des œufs, du pain et du vin. Les garçons nous avaient bien promis que nous aurions tout ce que nous voudrions, mais ils avaient oublié d'ajouter que nos désirs ne seraient satisfaits que le lendemain. A chaque demande si telle ou telle chose était à avoir, un fatal ska (il n'y a pas) schkipe nous faisait entrevoir l'issue de notre enquête, et la viande, leur Misch, n'arriva en effet que le lendemain a dîner. Prizren est à 13 h. postales d'Ouskoub, 3 V2 h. de Djakova, 9 h. d'Ipek, 11 à 11% h. de Prischtina et 28h. ou plutôt de 30 h. de Scutari. Sa population doit surpasser 26,000 âmes, car en 1838 Mr. Mûller y comptait déjà 25,550 âmes dans 6000 maisons, savoir 18,800 Slaves surtout Serbes de la religion grecque, y compris environ 2000 Zinzares, 2150 Albanais catholiques, 4000 Albanais mahométans avec très peu de véritables Turcs et 000 Zin-gares. La garnison turque n'est pas comprise dans cette statistique et elle varie de 700 a 3000 hommes suivant l'état plus ou moins tranquille du pays. Elle possédait en 1838 une bonne bande de musiciens. Si Mr. Millier ne disait pas positivement que les nombres donnés reposaient sur les registres de l'impôt du Haratsch, nous aurions cru qu'il avait exagéré le nombre des Slaves, ce qui n'est pourtant pas son faible ordinaire. Cette ville se divise en trois quartiers; le premier se trouve au S. de la Maritza et occupe en partie la pente, qui monte à la citadelle, de manière qu'une partie des rues est inclinée. C'est là que se trouve le Konak du Pascha entouré de hautes murailles et formé surtout, par quatre bâtimens en bois d'un étage autour d'une cour carrée et avec un jardin. A l'O. sont des cimetières turques et au pied immédiat du château des habitations de Zingares surtout forgerons. Au N. O. de ce quartier, nommé Souleimit, est celui d'Eminit, où se concentre presque toute l'industrie et le commerce. Le bazar couvert se prolonge dans plusieurs longues rues ouvertes, dont chacune est occupée par un métier. Celles des armuriers et des selliers nous frappèrent principalement. Le quartier d'Ahmit surtout au N. de la Maritza est habité en bonne partie par les Chrétiens. On y remarque outre une ruine d'église la grande mosquée d'Aohmed, qui n'est que l'ancienne cathédrale royale de Sveta-t'etka sous l'empire serbe. On y observe encore de belles grandes fenêtres et sur le côté septentrional on trouve écrit au moyen de briques les mots de Sabla srbski, Sabba le Serbe. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, pag 579.) L'église ancienne serbe de l'Assomption de Notre Dame a été aussi convertie en mosquée du St. Vendredi. Non loin de là est la poste aux chevaux, le Menzilhané, qui est un vaste édifice d'un étage avec beaucoup de chambres pour des voyageurs et une écurie avec plus de 80 .chevaux. Maintenant cet hôtel est très délabré. Les autres édifices du Prizren sont une dizaine de grandes mosquées. Mr. Millier voudrait, élever leur nombre total à 42. Il y a de plus une tour à horloge, une petite église catholique romaine cachée à la vue et une église grecque. Prizren est la résidence d'un évêque grec pour l'Albanie septentrionale et d'un prêtre catholique. Cette ville n'est pas si sale que beaucoup d'autres de la Turquie, parce qu'une partie de ses rues sont inclinées et qu'elle est traversée par des cours d'eau vive et limpide. Ils proviennent surtout de la Maritza (petite Marie) et portent les noms slaves de Velika, Mala, et Sredna-Rieka, c'est-à-dire de rivière grande, petite et moyenne. L'eau potable y est exquise, les rochers calcaires voisins en sont pleins et on voit couler des sources de tous les côtés. Comme les plus grandes villes de la Turquie, celle-ci a aussi ses lieux de délassement, qui consistent surtout en des cafés sur le bord de la Maritza. Les uns sont placés dans le quartier d'Ach-med sur la rive septentrionale de la Maritza non loin d'un pont en bois et de la cathédrale serbe. De hauts peupliers, des aunes et des platanes y produisent un ombrage impénétrable aux rayons du soleil, de manière qu'on peut aussi s'y promener sur un terrain uni et sablonneux. L'autre lieu de cafés est à la sortie de la gorge du Schar, par laquelle s'échappe la Maritza. Quelques platanes d'Orient y protègent d'autant plus agréablement du soleil que l'eau très courante y rafraîchit l'air par ses vapeurs et qu'on jouit de la vue des escarpemens sous le château. En remontant la gorge tortueuse de la Maritza, on rencontre à environ 1 h. de Prizren les ruines d'un petit couvent, où jadis les Serbes ou Slaves allaient en pèlerinage. Serait-ce le couvent de l'Archange Michel, où le Tzar Douschan fut enterré ? D'après le moine Jourischitch il y aurait dans ces environs dans la montagne à V2 h. de Prizren, dit-il, trois églises grecques, savoir celles de l'Ascension, du martyre St. George et de l'Archange (Aran-djel), Au-dessus sur un haut rocher sont les ruines d'un château. Si on s'avance plus loin, on monte insensiblement sur les plateformes calcaires, qui servent de route pour gagner la pente élevée du Ljoubéten, d'où on descend sur Katschanik. On y domine surtout la plaine de Kosovo et une bonne partie de la Moesie supérieure avec ses chaînes limitrophes au N. et au S. Lorsqu'en 1837 nous étions sur cette route ou plutôt ce sentier, il était fort animé par le retour dans leurs villages d'une foule de joyeux Albanais, que le Pascha venait d'armer et d'habiller à l'européenne. C'était une espèce de garde nationale ou le Rédif, qui devait venir faire l'exercice de temps à autre à Prizren. C'étaient en général des jeunes gens et ils me laissèrent examiner avec plaisir leurs armes. Ces hauteurs sont habitées par une population robuste et mixte d'Albanais et de Serbes, les hameaux y sont cachés en général dans des gorges. Si on veut sans tant de peines atteindre de beaux panoramas, on n'a qu'à monter sur les hauteurs derrière le château, où se déployé à la vue une étendue de plus de 10 lieues carrés d'un pays de plaine ou peu accidenté avec une foule de villages apparaissant parmi les champs, les prés et les bocages, tandis qu'à l'entour à l'O. au N. et N. O. s'élèvent de hautes murailles de sauvages montagnes depuis le Drim blanc près de Prizren jusqu'en Servie. On est frappé alors de la différence du caractère des montagnes alpines à l'O. et au N. du bassin de la M°tochiia ou entre Prizren, Ipek et Tzerkoles d'avec celui des montagnes plutôt subalpines au N. du bassin de Kosovo. Ici de véritables murs calcaires à grosses têtes nues, là des séries de hauts gradins boisés, de roches schisteuses, en comparaison desquelles s'effacent presqu'à la vue les petites hauteurs entre la Metochiia et la plaine du Sit-nitza. Une série de monts à contours assez doux forme seul le lointain vaporeux au N.E. dans la direction du Toplitza, Quant au bassin même de la Metochiia ou entre Prizren, Djakova et Ipek, depuis ces hauteurs on voit parfaitement, comment des collines séparent la plaine de Prizren de la vallée du Soua-Rieka au N. E. comme de celle de l'Otscha à l'O., tandis que la plus grande portion de cette cavité reste au N. et N. E. des hauteurs de Djakova. (Voyez ma Turquie. Vol. 1, pag. 77.) Cette portion septentrionale est surtout arrosée par la Drima, la Bistritza d'Ipek, celle de Detschiani (Detsclianka-Bistritza) et par le torrent au S. de Tzerkoles, en même temps qu'entre ce dernier et la Soua-Rieka il y a encore trois cours d'eau venant de l'E. et N.E., dont celui le plus au N. porte le nom de Mirouscha et conflue au-dessous du débouché du torrent de Detschani. Le Paschalik de Prizren comprend surtout la partie méridionale du bassin de Metochiia avec le district de Hass. S'il ne contient pas de bourgs, il compte beaucoup de villages, de ma- nière que le Dr. Mûller peut avoir raison d'élever sa population au chiffre considérable de 78,000 âmes, parmi lesquels il y aurait 29,000 Chrétiens. Le nombre des Catholiques et des religionnaires grecs ne doit pas différer beaucoup. Cette population comprend surtout des Serbes et beaucoup d'Albanais guégues, qui vivent dans les montagnes comme dans la plaine. Parmi ces derniers il est évident qu'il y a des Serbes, qui se sont transformés avec le temps en Albanais mahométans. Dans ce cas seraient une partie de l'ancienne tribu serbe des Hass. Il y a aussi un certain nombre de Zingares, qui n'ont qu'en partie des habitations fixes à Prizren sous le château. Comme les Hans albanais entre Prizren et Scoutari ne tiennent pas de vin et qu'on ne trouve môme de l'eau-de-vie et des poulets que dans quelques-uns, c'est l'usage de se pourvoir de ces objets ainsi que de riz et de pain pour ce trajet de 30 à 32 1. de route. Le chemin de Scoutari passe sur de petites collines au pied du Sehar et se dirige contre une haute crête, le mont Schalé-Schoss ou des Hassi, qui est séparé de cette chaîne par la vaste échancrure du Verbnitza. Après avoir reçu le Maratsch, le Drim blanc traverse la partie septentrionale de cette montagne, pour couler ensuite du N.E. au S.O. dans une fente profonde à son pied oriental. Cette montagne, nous le répétons, n'est qu'une portion détachée du Schar et du Jalesch par quelque grande convulsion naturelle et elle se prolonge au N.jusqu'à3 1. au N.N. E. de Spass. Des hauteurs dioritiques et serpentineuses sont placées à l'O. de Djakova entr'elle et l'extrémité des chaînes élevées au S. O. de Detschiani. La route de Scoutari passe sur un sol graveleux, inculte et ça et là couvert de petits bocages de chênes. On franchit deux torrens, qui descendent du Schar. Le second s'appelle l'Otscha, est à une lieue de Prizren et coule dans un vaste sillon transversal à la chaîne. Le Schar présente dans ce lieu des pentes de 2 à 3000 p. d'élévation et sur son pied est un petit col de 5 à 600 p. de hauteur, qui le lie avec la crête avancée du Hass, dont nous venons de parler. En deçà de cette hauteur on arrive dans la vallée de Verbnitza. Comme à Prizren, de belles sources sortent dans ce lieu des rochers du Schar et il y en a surtout deux très abondantes, dont une produit un torrent, qui fait aller un moulin. On est alors à 3 L de Prizren et on apperçoit deux hameaux slaves, un de chaque côté à distance de la route, savoir Vlasno au N. et Soulki au S., tandis qu'en deçà du Drim un bâtiment en forme de Karaoul ressort du milieu des bocages sur la pente assez roide de la montagne. Il y a là un pont sur le Drim blanc, qui conduit aussi, à ce qu'il paraît, au Han Kcuprisi par le hameau de Brout et Rougova. Si ce côté de la montagne est trop escarpé pour receler des hameaux, il n'en est pas ainsi vers le pied de son versant occidental et surtout sur le côté oriental. C'est donc là, plutôt que dans la vallée de Verbnitza, que se trouveront les villages de Kroumé, de Poschtista et d'Itzem indiqués par le Dr. Mûller, parce que dans sa carte fort mal faite on a placé le Drim trop au Nord. Plus loin, en continuant à voyager et monter insensiblement sur le bord élevé de cette cavité, on cherche en vain à suivre le cours du Drim, parce qu'il est encaissé dans un étroit canal. On traverse des prés et même quelques champs de blé, mais on n'ap-perçoit des hameaux que hors de la grande route, en particulier Grasdanika. L'un d'eux, nommé Louraa, est placé assez pittores-quement au sortir d'une grande gorge du Schar, qui laissait ap-percevoir au mois d'août dans le Koridnik des sommets gazonnés et couverts encore de plaques de neige. Un petit torrent en descend dans le Drim blanc. Depuis ce point à environ 4 1. de Prizren on a encore à franchir un autre petit col sauvage de 2600 p. d'altitude absolue et occupée par de la Serpentine, d'où on descend directement par des pentes boisées en petites chênes dans la vallée du Drim noir. Il y a tant de sentiers dans ces buissons qu'on peut aisément s'égarer ; la route postale est celle à droite, qui descend en tournoyant vers les rives du Drim blanc et longe cette rivière jusqu'au pont en pierre sur le Drim noir, le Schivan Keuprisi des Turcs, Y'Qura-Scheit des Myrédites. Avant de descendre, on a une vue belle, mais sauvage sur une partie de la vallée de cette dernière rivière, à l'entiée de laquelle sont placés majestueusement comme des sentinelles les grandes et massives montagnes du Ja-lesch à l'E. et de l'Ibalea à l'O. Ce dernier est un peu moins haut que le Jalesch, qui, quoique sans aucune trace de neige en août, s'élève à plus de 6000 p. ; mais les crêtes, qui suivent ces montagnes au S., n'ont pas leur élévation. On ne voit point de mon- tagnes avec des plaques de neige dans la direction du S.O., tandis qu'il y en a dans celle du S.E., mais on ne peut les voir depuis ce col, parce qu'elles sont cachées par le Jalesch. Si on veut, on peut aussi se rendre depuis ce col dans la vallée du Drim noir à % ]. au-dessus du pont en pierre. Sur cette route on rencontre à une centaine de pieds au-dessus de la rivière dans les bois de chênes un très petit hameau albanais, qui serait peut-être le Kolé (vache) du Dr. Mûller. Une fois descendu dans la vallée, on voyage dans une espèce de petit bassin non cultivé, où le Drim occupe le fond d'un véritable canal naturel et garni de murailles calcaires. Le long de ses bords règne entre les bois et le canal une étroite terrasse. A 3/4 d'h. au-dessus du pont cette dernière cesse sur le côté oriental et n'existe plus que sur la rive opposée, parce que des rochers coupés à pic sur plusieurs centaines de pieds de hauteur barrent le passage. En deçà commencent de purs défilés boisés, qui s'étendent vers le village ïbali sur la gauche de la rive; nous vîmes de loin de nouveaux étrangle-mens rocailleux. Le village de Gourasenda (des mots albanais Gour, pierre, et Send, chose, c'est-à-dire pierreux) serait caractéristique de la localité, si on était sûr de son existence, ce qui est douteux. Mr. Kiepert place un hameau du même nom au milieu du My-rédita. Il en serait à peu près de même du village de Stitza, car Stitzati signifie en slave rapprocher. En deçà du pont en pierre sur le Drim noir est une espèce de petit château fort, servant de Karaoul; c'est l'avant-dernier poste militaire qu'on trouve sur cette route, les Myrédites n'en souffrant pas sur leur territoire libre. Un Derviche et un Kavas albanais étaient à la porte de cet édifice au moment que nous y passions, le Derviche pria le Tartare d'exhiber son Firman pour montrer l'importance de sa personne. La route côtoyé le Drim noir, qui peu au-dessous du pont reçoit le Drim blanc et continue à couler dans un défilé escarpé et bordé des deux côtés de plate-formes calcaires, situées à 70 à 80 p. au-dessus du niveau de la rivière. A une demi-lieue du Karaoul le Drim coulant du S. E. au N. O. tourne à l'O. et se jette davantage sur le côté méridional que sur la rive septentrionale, ce qui a engagé à construire un second pont sur le Drim, le Terzi Keuprisi, et à porter la route sur ce dernier côté. Néanmoins avec quelques travaux on aurait pu rendre 21 practfcàble la berge méridionale depuis le second peut jusqu'au Han -Keuprisi, où la route repasse par un troisième pont sur la rive méridionale. Nous avons déjà dit ailleurs (voyez ma Turquie, vol. 2, pag. 385) que ces trois ponts en pierre paraissaient anciens et étaient remarquables par l'extrême hauteur et l'inégalité de leur arches. A chaque pont la plupart des cavaliers descendent de cheval, car outre la vue de l'eau très courante, le parapet de grosses pierres est très bas et le pavé très glissant. Après le second pont on voyage sur une espèce de basse terrasse, qui borde le Drim et dont une partie est occupée par de beaux prés. Du pied des rochers calcaires sourdent dans un point d'abondantes eaux très fraîches et plus loin à 11. du second pont on passe à 200 p. au-dessous d'un hameau albanais appelé kougova. Il est perché sur la pente rapide de la montagne au N. comme certains villages malfamés dans les Abruzzes. On y distingue surtout une ligne de maisonnettes. En deçà du troisième pont est l'auberge isolée du Han-Keuprisi ou l'auberge du pont. La partie de ce bâtiment, qui se trouve tout-à-lait vis-à-vis de ce dernier, a servi de Karaoul. On pouvait du premier tirer aisément sur ceux, qui voudraient essayer de franchir le pont, tandis que sur le bord de la rivière une petite muraille crénelée est destinée à d'autres tirailleurs. A côté de cette faible fortification albanaise on ne peut s'empêcher d'être frappé des moyens naturels de défense, qu'offre la nature depuis le confluent des deux Drims jusqu'à Spass. Quelques petites fortifications bien entendues derrière une rivière aussi large et aussi rapide que le Drim fermeraient hermétiquement la route de Prizren à Scoutari. C'est aussi un des remparts de sûreté du pays libre des Myrédites '). ') Nous trouvâmes assez de monde à l'auberge du Pont, de manière que nous ne pûmes nous établir sous le Tsehardak au-devant dela salle-cuisine. Nous fîmes nettoyer le sol plus loin et nous nous couchâmes à côté du petit mur crénelé en ayant soin d'avoir nos effets et nos armes près de nous, car l'aubergiste, un fin Albanais, ne cessait de nous dépeindre les environs comme pleins de Iîai-doukes. U était déjà onze heures qu'il se promenait encore en tenant dans la main un morceau de bois résineux allumé pour fane croire aux brigands, qu'ils trouveraient assez de monde pour leur tenir tête. Frappés de cette persistante mo-nomanie de voir des voleurs. nous résolûmes de veiller chacun à notre tour jusqu'à ce qu'il recommencerait à faire jour, ce qui nous fit passer une mauvaise nuit. Le compère avait gagné sa cause, car il voulait tout simplement effrayer les La route de cette auberge jusqu'à Spass longe toujours le courant fort et grisâtre du Drim. Tout près de l'auberge on passe un torrent venant de l'O. Un second torrent courant parallèlement à celui-ci, se trouve plus loin et près d'un Han isolé. Le chemin commence déjà à devenir très mauvais et pierreux à cause Turcs et les confirmer dans l'idée que le pays de Myrédita est un terrain impénétrable et plein de brigands. La même comédie se renouvella plusieurs fois en Albanie, mais les aubergistes changèrent bientôt de ton et se mirent eux-mêmes à rire (a. Kesch), quand nous les mystifiâmes en amplifiant encore les dangers imaginaires de leur pays. Néanmoins ces idées préconçues sont tellement répandues que lors de notre départ de Prizren un officier turc se joint à notre caravane pour faire le voyage de Scoutari et qu'un négociant grec, qui avait a aller porter de l'argent à Scoutari, en aurait fait autant, si nous avions pu l'attendre. La vérité sur la sûreté des routes en Albanie nous paraît être qu'il ne faut pas s'y aventurer seul et surtout chargé d'argent et sans savoir l'albanais, mais qu'une caravane, même petite, y est en pleine sûreté, surtout s'il y a quelques Albanais comme guides (Kalaous). Quand ou voir, l'état sauvage dans lequel se trouvent les districts montagneux de l'Albanie, et qu'on voit des gens réduits au plus stricte nécessaire, enveloppés sans chemises dans de grossiers vêtemens de laine blanche et armés tous de pistolets et de fusils à longue portée, on doit vraiment s'étonner qu'il n'y arrive pas plus de brigandages. Cependant nous pensons que dans l'Albanie septentrionale il n'y a guère de bandes de brigands; s'il se commet des méfaits, c'est plutôt l'effet des tentations momentanées, auxquelles succombent, ces pauvres gens. C'est pour cela qu'il faut en Albanie plus que partout ailleurs éviter de les induire au crime, pour ainsi dire malgré eux. Loin de les croire médians par naturel, nous ne voyons en eux que l'homme vigoureux, à peine échappé a la vie sauvage des forêts, et tant qu'existera entr'eux la loi du sang, et qu'ils seront sous un joug haï, ils resteront armés et seront enclins à devenir aisément rebelles et brigands. Mr. de Hahn nous confirme ceci en nous apprenant que la loi du sang disparaît dans l'Epire depuis le désarmement de cette partie de l'Albanie. D'un autre part en remontant dans les temps anciens on voit que les montagnes d'Albanie ont été constamment le refuge de leur population , lorsqu'elle était obligée de subir un joug étranger dans ses plaines maritimes. Ainsi paraît s'être comporté lors de la domination romaine ce beau peuple, un des plus anciens de l'Europe et telle a été la conduite de la nation que commandait Skanderbeg. La côte maritime et les plaines se sont dépeuplées, ou les Albanais y ont été remplacés par d'autres habitans, tandis que, pour rester plus ou moins libres, ils ont renoncé aux avantages de la civilisation qu'ils avaient déjà pour aller se cacher dans les montagnes et y redevenir demi-sauvages. Avant de partir du Han Kcu-prisi nous eûmes une occasion de vérifier la bonté de caractère des Albanais ; un voyageur Arnaoute avait pris avec lui quelques oranges, nie voyant indisposé, sans m'avoir dit autre chose que Ayné smound? (êtes-vous malade ?), il s'empressa de me l'aire présent de quelques-unes. des diorites et ça et là ce n'est même qu'un sentier de rochers entaillés. A % de 1. du Han-Keuprisi on passe un troisième torrent venant de l'O. et à % 1. plus loin un quatrième. A 21/4 1. du Han-Keuprisi est une auberge isolée dans un vallon, où il y a quelques champs de maïs et un grand torrent venant de l'O. et roulant beaucoup de cailloux noirs dioritiques. Ce dernier s'appelle Kolini et se passe à 1/i de 1. de l'auberge. A cette dernière nous trouvâmes quelques Albanais, dont l'un d'eux était un marchand de Belgrade. B nous offrit deux beaux melons d'eau avec cette grâce naturelle à tous les habitans de la Turquie, qui semble dire : Je ne vous demande nullement de remercîment, car ce que je fais est tout simple, quand on a, on donne à son semblable et en Turquie il est bien peu de campagnards, qui soient assez dénués pour ne pouvoir pas rafraîchir gratis (a. Bedschava) un passant. Entre ce point et le poste de Spass on a une assez forte montée et une descente. Une partie du bâtiment du poste est une auberge, au-devant de laquelle étaient établis une douzaine d'Albanais, se disant Mahométans, parmi lesquels il y avait une femme. Ils étaient des environs de Djakova, ils voyagaient à cheval et allaient en pèlerinage à la Mecque par la voie de Scoutari. En 1836 et 37 ces sortes de voyages servaient quelquefois à déguiser l'embarquement de recrues albanaises pour le Pascha d'Egypte. A Spass on quitte le Drim, qui continue à couler dans une profonde fente au milieu d'escarpemens de rochers, qui sont, dit-on, les plus hauts vers la rencontre de la crête du Kiapha-Mala avec celles sur les côtés de la vallée de Schalia. Il n'est pas douteux néanmoins que des sentiers difficiles, il est vrai, longent le Drim, mais cela a lieu au moyen de grands détours ou même avec des interruptions complettes. Il y a dans les gorges sur les bords de cette rivière divers villages, qui ne sont pas séquestrés du reste du monde et j'ai vu moi-même de leurs habitans se rendant ainsi chez eux. Si cette rivière n'était pas navigable pour des bateaux à la remonte, au moins on pourrait y faire descendre sur des rats d'eau, des bois et des produits agricoles. Contrairement à l'idée de Mr. de Hahn que la nature a dépourvu la partie septentrionale du Myrédita de moyens de communication, l'impossibilité de longer commodément le Drim y est remplacée par deux longues vallées, qui descendent en sens contraire du mont Kiapha-Mala et ouvrent ainsi une voie assez aisée entre le Drim noir et la plaine de Scoutari ou de Lesch. La difficulté de ce chemin ne vient que des habitans, qui n'ont pas voulu qu'une bonne route traverse leur pays, ou de l'indolence des Turcs, car il serait assez facile d'y établir une chaussée pour des voitures et même les pierres dures (jaspe et diorite) des environs formeraient d'excellens matériaux de routes, au lieu d'embarrasser un sentier de cavaliers et d'obliger très souvent d'aller au pas. Après Spass on se dirige à l'O. le long des hauteurs et on voyage sur une espèce de corniche très peu élevée jusqu'à ce qu'on atteigne à h. de là le grand torrent de Jost, qui coule du S. au N. dans le Drim. Cette rivière elle-même près de Spass se dirige de l'E. à l'O. La carte de Mr. Kiepert donne à la montagne à l'O. le nom de Skan, qui peut être le véritable et expliquerait le nom de Skanje pour la tribu albanaise de la vallée du Saphouscharé. En deçà du torrent, sur le bord duquel il y a quelques petits enclos de maïs, on commence à monter sur les plateaux du Myrédita ou pays des Myrédites ou Myrdites. On met environ 1 '/a h. pour arriver au haut des premières terrasses au moyen de sentiers tortueux et profondement en caves dans un sol graveleux ou sableux et lavé par les eaux pluviales. Des bois de chênes et de hêtres couvrent ces pentes sauvages. Vers le haut on a bientôt des vues très belles sur les cimes en partie neigeuses au S. et N. O. de Toli-Monastir. On peut suivre même leur prolongement jusqu'à l'Ibaléa et au Jalesch, qui forment un objet principal du paysage. L'auberge isolée de Soukat ou Sakat est à 2 grandes lieues de Spass. Ce n'est, comme la plupart des Han s de ces montagnes, qu'une vaste écurie en bois avec un petit compartiment pour l'aubergiste, quelquefois même cette portion n'est séparée de l'écurie que par un treillage de bois. A notre arrivée nous y surprîmes la femme et les enfans de l'aubergiste, qui se prétendait Musulman, peut-être tout simplement pour attirer chez lui les voyageurs turcs. En un instant toute la famille avait disparue dans la campagne et l'aubergiste restait seul avec son jeune garçon, néanmoins il nous procura des poulets et même du lait, ce qui semblerait indiquer un hameau caché (huis les montagnes près de là. En effet, Mr. le Dr. MûUer place Kouloumri avec 30 ha-bitans à 8/4 h. à l'O. de Sakat et assigne même à ce dernier lieu 4 maisons et 13 habitans. Les géographes regretteront probablement que nous n'ayons pas des renseignemens plus positifs, mais il ne faut pas oublier que les Myrédites, comme tous les Albanais indépendans, ne sont nullement disposés à donner des renseignemens sur la position de leurs villages surtout en présence des Turcs 1). On continue à voyager à l'O. sur cette espèce de plateau élevé en y tournant ou franchissant de petites éminences et des petits ruisseaux , qui paraissent se rendre au S. dans le grand torrent près de Spass ou contribuer à former du moins un de ses principaux af'fluens. C'est depuis ces hauteurs en partie couvertes de bocages ou de petits bois de chênes qu'on a une vue magnifique sur les hautes crêtes entre Ipek et le Monténégro. On entrevoit très distinctement au pied S. E. du Proklétia la profonde et large excavation de Schalia entre les plateaux calcaires, rugcux et à plaques de neige des montagnes Malsores s'étendant de Detschiani à Schalia et Klementi, tandis qu'à l'O. sont les montagnes un peu moins élevées et sans neige du Monténégro. Derrière l'entonnoir de Schalia s'élevait une longue crête de cimes calcaires très déchiquetées et nues, dans les crevasses grises desquelles on observait de la neige même à la fin d'août. En regardant les cartes on a peine à se figurer la réalité de cette vue, parce que les pentes des montagnes au N. et au S. du Drim y occupent trop de place et que les distances ne sont pas si grandes qu'on le croirait d'après les cartes et surtout d'après celle de Mr. Kiepert. Sans cela comment serait-il possible d'appercevoir depuis la dite route les pentes conduisant au Drim. Près d'un Haïr isolé, où il y a quelques noyers et qui est probablement le Zandj du Dr. Mùller, nous rencontrâmes un Albanais mieux habillé que les autres, c'est-à-dire en costume national avec son gilet et sa jaquette rouge écarlate, sa jupe de toile et ') Nous avions beau demander comment s'appelle ce village? (Silikaton oscht katoun ou kcu ?), cette vallée (Proua ou Poscht), ce torrent (Sour), où en est le chemin ? (koii eschtoudaf ou kou escJa ousrda?), est-ce loin ou près? (phschati oscht Ijark n oscht ghjati). de quel côté? (moutsch kraï ?), à droite (mdgiast) on à gauche (me-schemok ou solak), il taisaient semblant de ne pas nous comprendre ou répondaient exprès d'une manière aussi vague qu'un diplomate, qui ne veut pas se compromettre- m sa petite calotte rouge. Il était Catholique romain et. parut voir avec plaisir des Chrétiens non grecs. Arrêtant notre cheval par la bride, comme le ferait un voleur, il nous frappa sur l'épaule en signe d'amitié et parut fier de nous montrer à une dixaine de Myrédites, qui tous étaient sans chemises et sans bas et simplement en culottes et redingottes sales de drap blanchâtre. Je suis ton frère, je suis de ta nation (am via, ou giom laou joui) s'écriait cet homme, qui nous dit être un aubergiste à quelques lieues de là et se nommer George. Vraiment, on ne pouvait pas trouver extraordinaire la frayeur du Tartare de nous voir entourés de cette troupe, qui, transportée hors d'Albanie, n'aurait pas mal ressemblée à un ramas de bandits armés, mais il y entrait aussi un peu de crainte pour sa propre personne, lui, Musulman, isolé au milieu de ces Ilaidoukes. Les Bulgares ne sont pour les Ottomans que des Ghjaours, mais les Albanais ne leur paraissent que des brigands, par-ce qu'ils ne veulent pas payer d'impôts et que de leur nature déjà peu polis, ils sont trop souvent grossiers avec les Turcs. N'est-il pas tout naturel d'après cela qu'un Ottoman accompagnant des Européens est aussi choqué de voir ces mêmes Albanais fraterniser avec ces derniers. Nous ayant suffisamment amusé en secret du dépit de notre guide, auquel George disait froidement d'attendre {prid), nous quittâmes à regret nos Guégues en leur serrant affectueusement la main; mais le temps pressait et les lieues sont terriblement longues par de si mauvais chemins. On descend après cela petit-à-petit dans le lit d'un grand torrent, qui coule de l'O. à l'E. et on le remonte pendant une heure jusques près de Vlet ou Phliet, hameau composé de 19 maisons éparses avec 16 familles catholiques et 9 mahométanes A '/4 d'h. avant ce lieu on quitte le torrent pour suivre le cours d'un de ces affiuens, qui descend du N. 0. du mont Kiapha-Mala (en albanais Mont du col), tandis que le grand torrent prend sa source encore plus à l'O. dans le prolongement méridional ou plutôt S. O. de la même crête. A Phliet, à 2066 p. de h., il y a deux auberges et deux ou trois autres maisons visibles dans le vallon, qui est occupé par des prairies, tandis que les pentes du Kiapha-Mala, à l'O. et celle '_) La dénomination de Vlet ou Phliet peut venir du mot slave Pletsch, dos de mont, à moins qu'on puisse le dériver du mot allumais Phlés dormir, ou même de Phleta, feuille.. des montagnes au S. du grand torrent sont garnies de sapins et de pins. La ruine d'un petit château y paraît aussi exister, si je ne me trompe pas. Nous nous établîmes dans l'auberge inférieure, qui est la meilleure et qui offre à côté d'une grande écurie un Tschar-dak très propre avec un grand fauteuil en bois, le Phron des Albanais. (Voyez ma Turquie, vol. 2, p. 274.) C'était la première fois que nous vîmes ce meuble, qui se retrouve dans bien des auberges catholiques d'Albanie et qui paraît destiné au curé dans ces tournées ou aux Giobare l) et Pîiake ou anciens des villages, Les pèlerins turcs nous avaient devancés et avaient occupé le Tschardak, où ils nous édifièrent plusieurs fois de leurs chants et de leurs prières. Il fallut donc nous contenter d'une grande estrade trouée en bois et sans toit, mais établie sous un beau noyer. Du reste, il manqua ni de poulets ni d'œufs, mais le vin et le pain apportés n'étaient pas de trop, car il n'y avait môme pas d'eau-de-vie et le pain était de maïs. Mr. Kiepert figure dans la montagne au S. de Phlet un hameau du nom de Phou-scharsit (de la plaine) et appelle Monilia l'arête, qui sépare à l'O. de l'Ibaléa les eaux de Phlet de celles du Phandi. Ces ren-seignemens n'offrent rien d'impossible. Il en est de même des noms de Bitza et de Schintit, qu'il donne à des sommités au S. de l'Ibaléa. On met une heure et demie pour monter par un grand contour et des pentes roides au col du mont Kiapha-Mala, qui a 2038 p. de h. et est dominé au N. par des cimes de 800 p. La route est toujours dans les bois de conifères et la descente à l'O. a lieu dans la partie supérieure du lit d'un torrent, qui coule de l'E. à l'O. C'est une partie très fatiguante de la route, parce qu'on ne cesse de tournoyer au milieu de cailloux mobiles, et arrivé en bas, on marche complètement dans le lit du torrent en le traversant plusieurs fois. Si la route jusques là est mauvaise, celle depuis ce point jusques au-delà de Doukan-Han est exécrable à cause des pierres à angles aigus et des escaliers de rochers ou des sentiers tortueux et excavés au milieu des éboulis. En général, de Spass à Doukan-Han ce n'est que ça et là qu'un cavalier peut aller au trot, la plus grande partie de la route ne se fait qu'au pas et les couriers même sont obligés de se soumettre à cette ') Voyez: Albanesische Stuclien de Mr. de Hahn . page 175. dure nécessité. C'est un véritable supplice, surtout en été, car outre qu'on sent, pour ainsi dire, chaque pierre, contre laquelle le prudent cheval se tient en garde, chaque fois qu'il lève ses pieds, on est exposé à un soleil brûlant sur un terrain déboisé ou nullement ombragé par de petits chênes. Toute la route de Priz-ren à Scoutari est malheureusement, établi sur le côté N. de deux vallées bordées de rochers dioritiques ou serpentineux, noirâtres ou rouges et absorbant extraordinairement la chaleur des rayons solaires. Au milieu de cette nature désolée, de ces hideux rochers et de ces éboulis est un moulin (a. moulini) isolé avec un champ de maïs. Nous y rencontrâmes une vieille femme albanaise, qui avait l'air de la misère personnifiée, quoiqu'elle ne demanda pas l'aumône. C'est dans ces lieux qu'on remarque les premières masses considérables de jaspe rouge, qui donnent lieu à des escar-pemens rouges totalement dénués de végétation comme en Italie. Plus loin il y a quelques petits champs de maïs auprès d'une auberge peu fréquentée et qui était fermée ; c'est dans ces lieux que nous aurions dû appercevoir, d'après le Dr. Millier, un groupe de 13 maisons avec 80 habitans mahométans sur le côté N. O. du Kiapha-Mala. Le hameau de Brdet (de Brdo, mont) du Dr. Millier doit être aussi dans ces environs. Le torrent du Kiapha-Mala tombe à 4 1. de Phlet dans un plus grand, qui coule du N. au S. et qui conserve de l'eau dans les plus grandes chaleurs. En deçà de son large lit, rempli de cailloux, est à 1549 p. d'élévation l'auberge isolée du Latin-Han, où nous fûmes obligés de nous arrêter par suite d'indisposition et malgré l'avis du Tar-tare. L'aubergiste et les Albanais catholiques présents parurent bien disposés en faveur des Européens et surtout des Allemands, confondant sous ce nom toutes les peuplades germaniques comme leurs correligionnaires. Ils nous indiquaient par des signes de croix leur confraternité et nous donnaient en même temps à entendre, qu'accoutumés dès leur enfance au maniement des armes, ils savaient faire respecter des Turcs l'indépendance de leur chère patrie le Myrédita, qui s'étendait au loin et avait son chef. D'une autre part l'aubergiste, au moins malgré ses signes de croix, voulait se faire passer auprès du Tartare pour un Musulman, nommé Hassan. Si celui-ci avait su s'appatrier très bien avec les Bulgares, ignorant l'albanais, il ne pouvait pas se mettre de même dans les bonnes grâces des Myrédites et eut recours au vin pour entretenir au moins l'aubergiste en bonne humeur. Néanmoins à la nuit tombante, ayant été au bord du ruisseau pour se laver, nous surprîmes un Albanais, qui tirait et armait son pistolet dans l'intention très suspecte de vouloir tuer à l'improviste notre courier. Nous nous hâtâmes d'approcher et d'avertir notre Tartare du danger qu'il avait couru. Nos Guégues de leur côté trouvaient tout naturel ce désir d'expédier un Turc et voulaient nous engager à y prêter la main. Les Albanais, surtout catholiques, ont eu tant à souffrir de leurs vainqueurs, les Turcs, que ces derniers ne leur apparaissent toujours que comme des ennemis, pour qui cessent les droits de l'humanité et auxquels s'applique la loi du sang. Le lendemain l'aubergiste nous fît encore toutes les politesses qu'il pouvait, il nous fit apporter le grand fauteuil pour y déjeuner à notre aise, mais il tâchait toujours de nous parler hors de la présence du Tartare. Après le Latin-Han la route se tient sur une terrasse assez élevée au-dessus du grand torrent, qui venant du N. tourne ensuite de l'E. à PO. Le nom de ces lieux est Phousch-Ars, c'est-à-dire , le plateau cultivé de Phousché, plaine, et arré, champ. Entre le Latin-Han et le Skala-Phouscharé on passe surtout un torrent venant du N. et on rencontre à environ 2 1. du Latin-Han deux autres auberges isolées, dont les propriétaires étaient aussi absens. La Skala-Phouscharé (l'escalier de Phousckaré) est une crête rocailleuse, qui barre la route avant d'atteindre le torrent de Rapé, où il y a, dit-on, trois maisons isolées. On n'en peut faire la tour, parce qu'elle se termine au S. et au, bord du grand torrent le Saphouscharé (eau du Phouscharé) par des précipices. Il faut donc la franchir, ce qui a lieu par un sentier tournant si profondement excavé qu'il faut bien faire attention de ne pas s'y engager avant de savoir, si on n'y rencontrera pas quelqu'un. En descendant un troupeau de bétail nous aurait mis dans un grand embarras, si ce côté n'avait présenté, comme l'autre, qu'un sentier. Le torrent de Rapé est un cours d'eau considérable, quand il pleut, il vient aussi du N. et coule dans la vallée du Saphouscharé, qui continue son cours à l'O. jusques vers Doukan-Han. Après avoir traversé les gros cailloux diallagiques du torrent de Rapé, on remonte sur une terrasse élevée par un sentier ondulé au milieu m de rochers et d'éboidis. Un cheval de bât y gisait immobile, le chemin s'étant trouvé trop étroit pour sa charge, il s'y était à la lettre enchevêtré et attendait tranquillement qu'on vînt le dégager. Il faut savoir que les Kirardgis albanais, conduisant de nombreux caravanes de chevaux les laissent souvent marcher seuls à de grandes distances devant ou derrière eux. Après cela on continue à longer la pente des hauteurs en décrivant des contours nombreux à cause des petits torrens et en montant insensiblement toujours plus haut. L'auberge isolée de Kervet-Han (probablement du mot albanais Kervé, baquet pour les chevaux) est à environ 1 lieue de Rapé. Depuis ce point la vue est bordée au S. par une grande sommité allongée de l'O. à l'E. et boisée ou en pâturage. Ce serait environ là, où Mr. Kiepert a mal placé le Vélilesch, qui est plus à l'O. Au N. il y a des vallées profondes. La première serait environ, où les cartes indiquent le mont et le district de Kéroubi ou Kérouba, dénomination dérivée probablement du mot albanais de Kérouarè, signifiant pur ou chaste. En deçà de cette auberge la route décrit de nouveau des contours, descend et monte par des sentiers étroits et très mauvais. Dans ces lieux nous vîmes un cheval chargé glisser et rouler dans le précipice. Il fit deux tours sur lui-même et descendit à une vingtaine de pieds, et malgré cela il se releva et revint de lui-même sur la route, lorsque nous croyions tous qu'il était fracassé. Dans un point on trouve un bout de pavé, dans un autre on voit à distance une église catholique romaine dans le fond de la vallée du Saphouscharé. On passe plus loin sur des pentes, qui sont souvent couvertes de chênes peu élevés. C'est sur une de ces petites plateformes qu'est situé une auberge isolée et même quelques maisons, le seul petit hameau myrédite qu'on rencontre ou plutôt qu'on ap-perçoive sur cette route. Il m'est impossible de décider si c'est le village que Mr. Mùller appelle Pouka ou si c'est celui de Schoret. Sur le plateau le plus élevé est le Han de Poucha-Han (de Boukéy pain) à 3 1. de Doukan-Han et à peu près autant de Kervet-Han. Prévoyant le cas possible qu'il n'y aurait à l'auberge de la couchée ni poulets, ni œufs, nous nous mîmes à crier : Ilanghi schiadet ! Akéni sog ! Akêni vè ! Akéni tom ! Akéni bouk ! Akéni élip ou êlp! Sortez aubergiste! Y a-t-il des poulets, des œufs, du laii, du pain, de forge? A ces exclamations l'aubergiste myrédite SS2 sortit de sa case et nous répondit que oui (Ka, il y en a) sans nous dire bon jour, comme le font ordinairement les Turcs, les Slaves et les Grecs. Puis il ferma la porte de l'écurie et la petite porte de la partie, où il se tenait et on commença en règle la chasse aux poulets. Malheureusement il y avait des trous dans les planches du toit, de manière que le second poulet ne fut obtenu qu'en le traquant en règle dans les environs et en lui cassant une patte avec un bâton. Le Poucha-IIan est sur un pâturage sec et immédiatement sur la pente du petit sommet boisé voisin du mont Poucha ou Pouka à 2201 p. d'élévation abs. Ce dernier est au N. O. et s'avance en forme de promontoire entre deux vallées, savoir au S. celle de Saphouscharé courant à l'O. N. O., et au N. un vallon étroit boisé courant à l'O. S. O. (le Zemfil du Dr. Muller? ), où nous crûmes appercevoir quelques maisonnettes. En deçà du Saphouscharé la vue est bornée encore par la même grosse montagne verte, sur le pied de laquelle sont plusieurs vallons courant du S. au N. et de l'O. à l'E. Au N. on ne peut pas voir au-delà des crêtes du vallon étroit, mais à l'O. par contre on distingue plusieurs des cimes calcaires pointues près d'Alessio, de Scoutari et d'Antivari. Ces dernières paraissent alignées du N. O. au S. E. Parmi elles ressortent surtout les cônes dolomitiques de Mosoura au N. d'Olsoun ou Dulcigno, de Lé-sinja vers Antivari (s. Bar) et du mont Véljelesch près de Kalméti (300 h.), Valiesch et Mévadiès dans la plaine du Zadrima au S. du Drim. Il faut moins d'une demi-heure pour atteindre la petite forêt de chênes au sommet du mont Poucha, d'où on descend pendant près d'une heure par des sentiers à longs contournemens au milieu des bocages. Pour y monter, on aurait mis presque le double de temps. Une énorme quantité de crânes de chevaux et de pierres y garnissent les branches des arbres par suite d'une superstition des Kiradgis. Serait-ce là le Skalé-di-Jérai du Dr. Muller ou serait-elle un peu plus bas dans les roches dioritiques? Depuis là la vallée du Saphouscharé se présente mieux que vue de plus haut, car on entrevoit dans son fond des bois, des prés et même la petite église catholique romaine de St. Nikol, édifice fort propre. Depuis le pied de cette montagne on continue à longer le Saphouscharé en tournant au milieu des rochers dioritiques et en passant surtout deux petites crêtes, où le sentier n'est qu'un mauvais escalier taillé dans le roc. Le torrent est creusé lui-même dans Un canal de rochers noirs. Enfin lorsque la vallée a tourné du Si au N., on atteint à 538 p. d'altitude sur la mer le Doukan ou Dou-kian-Han (auberge de la boutique)]), la meilleure hôtellerie de la route, puisqu'on y trouve de l'eau-de-vic et en été quelquefois des fruits, tels que des melons d'eau ou des pêches. Pour obtenir tout ce qu'on peut désirer, il faut seulement promettre à l'albanaise de doubler le prix. (Voyez ma Turquie. Vol. 2, pag. 295.) Devant la maison divisée en écurie, salle-cuisine et petite boutique, il y a une treille de vigne, sous laquelle les voyageurs ont coutume de dormir en été, à côté passe un filet d'eau dérobé artistement au torrent et servant à tous les usages domestiques. Cette conduite des eaux au moyen de petits canaux pour arroser les champs de maïs et se procurer de l'eau est la seule industrie qu'on voie pratiquer dans ces montagnes. On retrouve de ces canaux artificiels au pied occidental du Kiapha-Mala, au Latin-Han et ailleurs, mais dans les temps de pluie la violence des torrens est si grande que les petites écluses ne peuvent résister et l'ouvrage de plusieurs jours est détruit en peu d'heures. Depuis Doukan-IIan on continue à longer la rive orientale du torrent, qui courant du S. au N. va se jeter environ à 2 1. de là dans le Drim. Les montagnes sont toujours couvertes de bocages et semblent receler un hameau à l'O. de Doukan-Han. Au-dessous de cette auberge les durs cailloux du lit du torrent occupent presque toute la largeur de la vallée, tandis que ses eaux sont peu considérables et coulent sur le côté occidental. On met près d'une demi-heure, pour couper obliquement ce dédale de frag-mens mobiles, en deçà duquel il y a un moulin et un espace considérable occupé par des buissons de Tamarix. C'est là qu'on se félicite communément d'être sortis des mauvaises routes et qu'on recommence à trotter. Les montagnes noires ont cessé et on n'a plus devant soi que des cimes peu élevées et composées de rochers calcaires, nuds et grisâtres. En quittant le torrent, on monte à l'O. par une petite pente très peu sensible à une fort basse échancrure de ces montagnes et on en descend de même dans une vaste plaine en grande partie inculte, qui s'étend au Drim, C'est depuis là qu'on peut bien voir les singuliers pics calcaires près d'Aléssio et les deux pains de ') Esr-ee le Tomjon on le Gojan du Dr. Muller? sucre dolomîtiques d'Antivari. A % de 1. du col est une auberge isolée sur le Drim au point, où cette rivière sort de profonds défilés calcaires. C'est un second Doukan-Han, mal indiqué comme Dougbon-Han. Un peu avant le ITan de Skéla (bac) ou de Mjed la ruine d'une église serbe indique que ces lieux n'ont pas toujours été si agrestes et que, s'il y a encore quelques champs de blé, il y en a eu bien plus jadis. A 3/4 d'h. au 8. de ce bac est le village de Tenget (25 h. mahométans et 86 h. catholiques) avec la ruine d'une église gothique. Le passage du Drim a lieu dans un bac fort dangereux composé de deux étroits canots attachés l'un à l'autre par des traverses, ce qui est d'autant plus étonnant que de grandes barques à mats et bien faites remontent en vue de ce bac. Lorsque l'eau n'est pas très haute, il faut aller prendre ce canot sur un petit banc de sable au pied des escarpemens calcaires à une trentaine de pas du rivage, de manière qu'on ne peut y parvenir qu'en se mettant dans la rivière. Depuis là on tâche de remonter obliquement contre le courant, qui ensuite vous porte dans un instant sur l'autre rive bordée d'une grande grève de cailloux. Le Drim peut avoir dans ce lieu 60 à 80 toises, mais il est sujet à varier et charrie assez de sable. De grosses barques pourraient probablement remonter encore bien plus haut, mais les petits bâtiniens de 40 à 50 tonneaux ne peuvent arriver qu'à 3 heures au-dessus d'Alessio. En deçà de cette rivière très courante, la route est établie sur une corniche de rochers pendant plus d'un quart de lieue. Ce n'est que sorti de ces murs dénudés et brûlans en été qu'on entre vraiment dans la plaine de Scoutari, qui, vu son niveau bas, servait probablement une fois à réunir les eaux du Drim à celles du lac et de la Bojana. Une grande îlt existait alors dans un immense delta. Nous trouvâmes là près d'une centaine d'Albanais, occupés à creuser la place d'un moulin, nous dit-on, pour lePascha, Tous étaient en costume national; cela aurait été un groupe à dessiner, la dif'ficulié aurait été de rendre fidèlement la vivacité de tous ces beaux hommes. Entre le Drim et la ville règne un chemin pavé assez étroit et souvent démantelé, de manière qu'on préfère se jeter dans les prés à côté ou môme aller au pas dans des fossés pleins d'eau, La route passe par des pâturages ou des champs de maïs et est bordée de noyers ou de grandes baies, où on reconnaît le grenadier portant des fruits et d'autres arbustes méditerranéens. A l'E. la plaine est limitée par des montagnes calcaires à rochers dénudés, mais à leur pied il y a ça et là des villages au milieu de vignobles et de vergers tels que Gliouban non loin du bac. Sur le Drim leur pente rocailleuse n'est point si escarpée partout qu'elle y empêche l'établissement de tout sentier, mais ces derniers doivent être obligés de se tenir surtout dans les hauteurs. Le château de Scoutari fait de loin un assez joli effet sur le fond des montagnes du Monténégro, mais la ville elle-même reste cachée à cause d'un rideau de basses crêtes calcaires au S. et S. E. de cette dernière. On est frappé, ça et là, par la vue de petites tourelles, qui ne sont rien autre chose que des réservoirs intermédiaires, pour accélérer l'arrivée des eaux potables à Scoutari par des conduits depuis la montagne à l'E., comme c'est l'usage à Constan-tinople et en général en Turquie. On passe sur cette route près du riche village mahométan de Gavoz , ainsi que près de ceux de Danjol et de Vakatan (30 maisons) au milieu de champs de maïs et de tabac. Ail. environ avant Scutari (proprement Scoutari) on longe l'enclos de quelques fermes et même, je crois, d'un Han et avant d'entrer en ville, il faut franchir à gué le grand torrent du Kiri ou Drinassi, dont le lit a 600 p. de largeur. Néanmoins il y a sur ce torrent un pont léger en pierre. Ce cours d'eau provenant des hautes montagnes à l'O. de la vallée de Schalia charrie énorme-ment de sable et de cailloux, de manière que son lit s'exhausse toujours plus et menace d'inonder un jour la partie S. E. de Scoutari. Dans le haut de cette vallée du Kiri il y a outre des villages la ruine d'un château, qui figure sur les cartes sous le nom de Drivasto et où les habit an 8 croient enfouis des trésors. Un poste de soldats réguliers est à l'entrée de la rue principale, qui est sous le rocher de la forteresse. A mesure qu'on avance dans ce faubourg de Tabaki, le cœur saigne de ne se voir entouré que de ruines, datant de 1835, parmi lesquelles quelques mosquées une caserne et l'hôpital sont restés debout. On passe enfin la crête calcaire, qui descendant à l'E. du château forme, pour ainsi dire, le rempart de la plus grande partie de la ville du côté du S. La rue principale du Drotschin-Kalé est pavée et assez en pente. Derrière ses maisons à l'O. le canon de la forteresse a aussi causé assez de dégâts. On arrive après cola à la poste et au marché ou bazar. Comme on y vend beaucoup de poissons et que c'est l'usage en Turquie, de les offrir morts, le quartier de la poste est infecte en été. De plus, la poste n'a qu'un local sale pour les étrangers. Ne connaissant pas la ville, nous étions établis au premier à la poste, qui a 60 chevaux, quand tout-à-coup nous fûmes visités par un Italien, qui paraissait être de la classe de ces gens, qui sont toujours aux affûts de toutes les nouvelles dans les grandes villes maritimes de la Turquie. Ces espèces d'espions en sous-ordre, puisqu'il faut les appeler par leur nom, paraissent surtout être des Italiens, des Dalmates, des Grecs ou de3 Juifs. Il y a des voyageurs, qui reconnaissant leur homme tout de suite s'en débarrassent même brusquement; nous ne sommes pas toujours de cet avis et nous eûmes surtout occasion de nous en féliciter à Scoutari. En effet, en récompense d'avoir appris à notre Italien, que nous venions de Prizren par un chemin épouvantable, il nous enseigna l'hôtel délia Pezina, où nous serions parfaitement bien, l'eau et l'air y étant bons. A peine débarqués, nous voilà donc réchargeant nos effets, mais le malheur voulait que nous étions déjà dispersés. Je me confiai tout seul à un Kiradgi albanais, me proposant de faire préparer les logemens. Mais le chemin qu'il prit, m'étonna terriblement. Nous sortîmes complètement de ce qu'en Europe on est censé appeler la ville et nous eûmes à marcher pendant une demi-heure sur une mauvaise route pavée, bordée de jardins entourés de grandes murailles. Nous passâmes même deux places avec des mosquées et des cimetières, enfin j'étais d'autant plus stupéfait que mon Albanais me prenait, je ne sais pourquoi, pour un Monténégrin ou un Russe, tandis qu'un autre Albanais me criait avec mépris en passant que j'allai probablement voir l'évêque du Monténégro ou l'évêque catholique. Enfin nous atteignîmes la rue, où est l'hôtel en question. A force de taper, une grande porte cochère s'ouvrit et je me trouvai dans une cour, au fond de laquelle était une maison d'un étage avec une galerie couverte sur le devant. L'auberge était tenue par Mad. Pezini, une Dalmate, et son fils. L'italien était la langue la plus parlée dans cette maison, où logeaient tous les capitaines et supercarges des bâtimens de Trieste et de Venise; néanmoins le fils parlait aussi le français, le grec, le turc, l'albanais et le serbe et était un jeune homme, qui avait vu du pays, car il connaissait toute l'Albanie, il avait servi en Grèce et visité l'Egypte et l'Arabie. Il était engagé récemment dans le commerce des sangsues. L'auberge contenait au premier quatre chambres à fenêtres vitrées et une cuisine meublée à l'européenne. Une de ces pièces, habitée par les gens de l'aubergiste, avait un sopha et de grands lits. Une grande salle contenait cinq lits, c'est là où nous établîmes tout en espérant bien ne pas voir les autres lits vuides, ce qui eut lieu en effet. Or, comme en été les fiévreux paraissent abonder sur les rivages albanais, on peut penser que notre séjour dans cette auberge consomma plus de notre provision de Quinine que tout le reste du voyage. A part la cherté du gîte, Madame et son fils firent tout ce qu'ils purent pour nous obliger. Lorsqu'on n'a pas vu de lit ni de tables d'après plusieurs mois, on ne peut pas se figurer le plaisir de ce renouvellement de connaissance avec ces vieux amis de sa vie habituelle; nous ne pouvons comparer cette jouissance qu'à celle du malade convalescent, dont l'appétit revient. En voyant ces lits, nous oubliâmes et leur dureté et l'odeur infecte, qui entrait par la fenêtre, pour ne penser qu'au plaisir de nous y mettre le soir. HAUTE M0ES i G XVII. i "ï s W t i i 2 si i de CONSTANTINOPLE À PRI ZRE N PAR DOUBNITZA, RADOMIR, TRN, VRANJA, GUJLAN et PRISCHTINA. Nous avons déjà donné les détails sur cette route jusqu'à Doubnitza dans notre Itinéraire N°. 1 et N°. 16. La poste de Doubnitza est sur la rive septentrionale du Tza-rina et offre une galerie et des chambres propres de voyageurs. Nous avions l'intention d'aller à Vranja par Kostendil, mais on nous dit qu'il n'y avait pas de route postale entre ces deux villes et qu'il faudrait gagner Vranja par Egri-Palanka et Stratzin ou même par Komanova. Aussi pour voir du nouveau nous préférâmes passer par Trn et Klisoura. La route postale de 7 h. depuis Doubnitza à Radomir remonte sur le côté oriental de la petite crête, qui forme l'étranglement de la Tzarina à l'E. de cette ville. On y voyage dans un vallon, contenant des jardins potagers, un moulin et quelques maisons, qui portent le nom de Dja-kovo. Mais bientôt toute culture cesse et on arrive graduellement à un col ou plateau aride et déboisé, d'où on a une belle vue tant sur le Rhodope que sur le Vitosch. Les cimes grises et rocailleuses de ce dernier s'élèvent à plus de 2000 p. au-dessus du point où on est et qui est à 2410 p. de hauteur absolue. Une petite gorge conduit par un chemin de voiture bien tracé à un Han isolé. On laisse à droite le village mahométan tPAbekj dont on apperçok la mosquée et on commence à traverser la plaine au S. de Radomir. A I 1. du Han il Faut passer à gué un petit marécage, et à 2 Y, 1. on laisse à g mehe ,1e village bulgare de Rakovatz et l/2 1. plus loin celui de Prêvalénitza. On tourne autour d'une petite butte, qui s'avance dans la plaine sous la forme d'un promontoire et on quitte cette dernière pour franchir une longue et basse plate-forme en partie cultivée, qui sépare ce lieu du petit cul de sac de Radomir. A i 1. de ce bourg (à 2073 p.) on passe le Strymon à gué avant Batanovtza. A l/2 1. plus loin on tourne à l'E., ce que fait aussi le Strymon, et on passe un de ses affluens venant duN. O. A '/2 h. de là est le village de Provanitza. A 2 ]/2 1. de Radomir on se trouve près d'un moulin et à 3 t. on laisse à droite un hameau et on quitte la route de Grlo, pour se diriger au N. E. sur Bresnik, dont on atteint bientôt le torrent. On arrive peu après l'avoir traversé aux granges ou Kotschari de Bresnik, situées au pied d une émi-nence, dans laquelle les rochers pyroxéniques noirs, blancs et ronges-bruns, paraissent au jour dans un ravin. On met. mie dï-xainc de minutes pour monter de là à ce village bulgare, qui est à 1945 p. de h. abs. et à 3V2 h. de Radomir. On se détourne sur Bresnik, parce que c'est le lieu de la poste. Nous y rencontrâmes cette fois à l'auberge un Turc, qui avait habité longtemps en Servie et qui parlait avec éloge du prince Milosch et de sa. famille, ce qui ne paraissait guère plaire aux autres Musulmans, Nous allâmes de Bresnik à Trn par la vallée du Sohiker-nitza où le Tartare, revoyant le Pope indiscret, l'aborda en lui disant des injures, ce qui parut inconvenant aux Turcs présens à cette scène. (Voyez p. 86.) Depuis Trn, à 1542 p. d'élévation et à 4 h. de Bresnik, on remonte la vallée de Néboititza sur la rive septentrionale du torrent. Au N. il y a des montagnes de 500 à 2000 p. et au S. seulement des crêtes , dont les plus hautes ont 800 p. sur la vallée. A 1 1. de là on passe près du village de Jovanovtzi et plus loin on voit de loin au N. Séléni-grad. A 2 1. de Trn la pente des montagnes schisteuses au N cesse d'être abrupte, comme c'est le cas au-dessus de Sélénigrad et de Miloslavtzi. Ail. plus loin est le village de Klisovtza. ') Le mot do Trn, épine, est la racine des dénominations slaves fréquentes île Trnavu et Trnovo. La vallée tourne du N. 2°. E. à S. 2°. O. et court plus loin du N. O. au S. E, On est étonné d'y appercevoir des restes d'une ancienne, chaussée pavée ainsi qu'un Tumulus, tandis qu'un autre est près de Sélénigrad, On voyage au pied d'un contrefort méridional du Snegpol, les montagnes au S, sont boisées et ne paraissent avoir que 1500 p. au-dessus de la vallée. Dans deux points elle subit un étranglement. Elle se divise ensuite, le torrent principal remonte du N. au S. dans les montagnes au N. E. du Kourtbetska-Planina, il a au moins deux branches-mères, tandis que le torrent duKlisourska-Bieka coule de l'O. à l'E. C'est, ce dernier qu'on remonte par un de ces vallons, dont les prés et les bois rappellent l'Erzgebirge en Saxe. Les chênes y sont remplacés par les hêtres à 3/4 1. avant Kli-soura. Ce sillon ne court pas toujours de l'O. à l'E., mais il dévie aussi quelques insfans du S. au N. et du S. O. au N. E. Le hameau de Klisoura est situé à 4 h. de Trn à un point, où le torrent en reçoit un descendant directement du S. au N., ce dernier est formé dans sa partie supérieure par la réunion de trois petits cours d'eau coulant l'un du S. E., l'autre du S. O. et celui du milieu du S. au N. Le cours du Klisourska-Rieka continue à être O. et E., mais il prend sa source dans la montagne au S. O, et reçoit un torrent, qui vient de l'O. Les 20 ou 30 maisons de Klisoura étaient couvertes en planches. Sur la galerie du premier étage d'un Karaoul étaient accroupis deux gendarmes albanais, dont l'un jouait de la mandoline. Les deux auberges étaient fermées, leurs propriétaires étant occupés à faire les foins dans la montagne. Le postillon mit les chevaux à l'écurie de l'aubergiste, avec lequel son maître avait un contrat pour leur stationnement, mais comme l'extérieur du Han ne paraissait guère promettre un gîte agréable, nous nous plaçâmes dans l'autre auberge à deux cent pas de là. La nuit approchant et désespérant de voir arriver les aubergistes, nous nous mîmes à escalader le premier étage de la bonne auberge, nous y montâmes nos malles avec des cordes et nous nous établîmes fort bien sur une galerie ouverte, où il y avait déjà un lit de foin. Dans l'intervalle arrivèrent deux Bulgares, qui apportaient du fromage à l'aubergiste et prétendaient que quelqu'un devait venir, si le maître ne venait pas ; en effet à la nuit tombante un jeune homme arriva et ajouta ce qu'il pût à notre soupe de poulet. Le postillon bulgare nous voulait faire croire (pie cet aubergiste avait quelqu'nrgent et que, craignant pour cela les voleurs, il allait coucher dans la montagne. Je ne cite ceci que comme exemple des idées singulières en Turquie, qui paraissent basées sur ce qui se pratiquait jadis, lorsque la population était sous une véritable administration de voleurs. Du temps des Janissaires ou des brigands patentés les Bulgares cachés dans les montagnes ou au milieu des leurs étaient plus en sûreté qu'isolés dans un petit hameau à côté d'un poste turc. A côté de Klisoura (défilé) est une fonderie de fer, qui paraît occuper une dixaine de Bulgares. Le minerai est un sable de fer oxidulé très fin qu'on extrait dans un grand nombre de lieux des montagnes à l'O. de ce hameau. Depuis Klisoura on remonte le torrent, qui vient de l'O. et du S. pour gravir ensuite la pente rapide, qui borde ce vallon à l'O. Au bout d'une heure on voyage sur une espèce de plateau de 2830 p. d'élévation, où il y a des patinages et quelques bouquets de hêtres. Nous y rencontrâmes un homme jouant de la cornemuse. Un vallon étroit, où coule la partie tout-à-fait supérieure du Klisourska-Rieka, sépare cette plate-forme d'une autre encore plus étendue. On a une centaine de pieds à descendre et à remonter. Le plateau suivant (de 3305 p. de h. abs.) offrait quelques champs de seigle, d'avoine et d'orge établis sur un sol de talc-schiste très décomposé et plein de particules de fer. Au N. il était dominé par des éminences de 0 à 700 p. et on apperce-vait dans cette direction les maisons et les granges de Lasina. Pour atteindre le partage des eaux, qui coulent dans la Morava à l'O. et dans la Nischava à l'E., il faut franchir deux petites crêtes, dont la première est précédée par un petit marécage. Depuis ce col de 3203 p. de h. la vue est bornée à l'O. par les montagnes assez pointues et peu élevées , qui se trouvent entre le vallon du Vrtska-Rieka et la Morava. Une descente assez rapide d'une demi-heure conduit dans un vallon fort étroit et boisé, le torrent en coule du S. E. au N. O. et tombe dans celui du vallon du Vrtska-Rieka (rivière à contournemens), qui court du S. au N. pour tourner plus bas à l'O. et tomber dans la Morava. La route était embarrassée de charriots attelés de bœufs, qui conduisaient péniblement du minerai aux fonderies établies en deux points du Vrtska-Rieka. Au-dessous de ces usines est une au- berge bulgare, le Vrtska-Han, et quelques maisonnettes. L'auberge consiste en une grande écurie ayant comme ailleurs pour plafond le toit couvert en échandoles ou tuiles de bois J à côté de l'entrée était une pièce pour la famille du propriétaire. Des haricots verts et des choux formaient les végétaux principaux du petit jardin potager adjacent. La descente de ce vallon a lieu d'une manière agréable au milieu de bois de chênes, de frênes, de noisetiers (Corylus Co-lurna), de cornouillers, de poiriers sauvages et de saules. Ail, du Han le torrent bordé ça et là de rochers tourne au N. O. et ensuite à l'O. et à l3/4 1. du lian on trouve près de son débouché dans la Morava le village de Sourdébitza. La vallée de la Morava, courant du S. O. au N, E., est fort large et a l'air d'un bassin fermé au N., tant est étroite la gorge, qui conduit de Dolni-Mazouritza (Mazouritza inférieur) dans la plaine de Lesko-vatz ou sur la partie de la Morava, qui porte le surnom de Bintscha, L'entrée de ce défilé est à environ 1 1. au N. N. O. du point de l'observateur. Pour joindre la grande route de voiture de Leskovatz à Vranja, on passe un torrent, qui coule de l'E. à l'O. dans la Morava et qui sort de montagnes boisées. Le village de Gorni-Mazouritza (t. Jokariki - Mazouritza) (Haut Mazouritza) est à 6 1. de Vranja. Plus loin on arrive au village de Jéleschinitza ou Jéleschnitza, dont le torrent coule aussi de l'E. à l'O. Depuis ce point, où on n'est qu'à 50 p. au-dessus de la Morava, la route tourne à l'O. et la Morava coule du S. au N. Après des bocages de chênes on arrive à 20 minutes de déleschnitza sur la grande route de Vranja, qui est encore à plus de 4 1. de là. Les montagnes, qui bordent cette partie de la vallée, peuvent avoir de 500 à 2000 p. de h. Le village et l'auberge de Verbovo est à 4 1. de Vranja, d'où la route se dirige de l'E. à l'O. A 1% de 1. plus loin est le hameau de Kourdélitza sur le torrent de même nom, qui vient du S. et du pied du sommet élevé du Kourbetska-Planina, la plus haute montagne de la Moesie supérieure. Pour visiter cette dernière, qui est à 2'/2 à 3 1. de Kourdélitza, on peut coucher à Verbovo ou bien à Banja-Han, qui est à V2 1. à l'E. de Kourdélitza. On remonte le cours contourné du torrent de ce village, qui coule environ du S. au N. et enfin de l'E. à l'O. La vallée et les pentes basses de la montagne sont boisées en chênes, au- dessus vient la zone des hêtres et la cime est couverte de pâturages , qui s'étendent beaucoup moins bas sur son versant septentrional que sur son côté opposé. Des escarpemcns de rochers existent au milieu de ces prés subalpins sur la pente méridionale, d'où on a la vue sur les montagnes au S. d'Egri-Palanka, tandis qu'au N. on voit surtout les montagnes de la vallée supérieure de la Morava et une partie de celles sur son cours en-deça de Leskovatz, ainsi que certaines arêtes élevées de la Servie méridionale, mais on ne peut plonger ni dans le bassin de Bistritza, ni dans ceux de Kostendil et de Radomir, parce qu'il y a encore d'assez hautes arêtes ou contreforts entre ces derniers et notre grande montagne ; néanmoins on en voit la place et leurs crêtes environnantes. Il y a là entre ces bassins, celui de la Morava, le village de Klisoura et le bourg d'Egri-Palanka, un grand espace triangulaire de montagnes presqu'inhabitées. La hauteur du Kour-betzka-Planina peut aller à environ 3700 p. sur la vallée supérieure de la Morava ou à 4700 ou 4000 p. de h. abs. En deçà de Kourdélitza la vallée de la Morava est cultivée en maïs. Les hauteurs voisines au S. ne sont que des collines de 2 à 300 p., tandis qu'au N. elles ont de 300 à 1000 et 1S00 p. Plusieurs torrens coulent dans la Morava et descendent des premières montagnes, qui ne sont que les derniers contreforts d'une assez longue pente d'arête, parce que la chaîne des montagnes entre la Morava et l'Egridéré a une pente très douce au N. et si roide au S. que ses plus hautes cimes sont presque immédiatement au-dessus de l'Egridéré. Le Banja-Han, à 2 1. de Vranja, est sur la grande route à un quart de lieue du bain d'eau thermale hydrosulphureuse, qu'on apperçoit au S. La vallée de la Morava, remontant au S.O., continue à être fort large, mais près de Vranja elle s'évase encore davantage et à plus d'une lieue en largeur. Du reste les montagnes y descendent toutes en pentes fort douces, de manière que cette partie de la vallée a l'aspect d'un véritable bassin de 2 à 31. de large sur 4 de long, tandis que les hauteurs environnantes n'ont que 2 à 400 p. de h. La haute Pyramide du Lioubéten y forme à l'O. le seul objet visuel remarquable. A 1 1. de Banja-llan est le village deToplatz placé près de petites éminences. Pour aller de là à Vranja (de Vrana, corneille) il faut passer la Morava sur un pont de bois, avant lequel il y a un lian. Vranja (s. Vivarina) à 10 h. de Trn et à plus de 000 p le h. abs. est situé à l/4 de 1. au N. de la Morava au pied de montagnes déboisées et à petits escarpemens de rochers; une petite gorge et le torrent de Vranjaen débouchent derrière la ville, tandis que sur ses côtés sont des vignobles. La ville a 0 ou 8 minarets et compte de 6 à 8000 âmes. C'est une population bulgare mélangée de Musulmans albanais. Le Paschalik de Vranja est un des plus petits de la Turquie, car il ne comprend que le bassin supérieur de la Morava environ jusqu'au défilé à trois lieues au S. de Leskovatz. Ses seuls Ayans sont ceux de Ghilan et de Novo-Brdo. Il commande à une population bulgare, serbe et albanaise. Le nombre de cette dernière ne doit guère arriver au chiffre de 18 à 20,000 âmes. Comme le Paschalik de Vranja est le plus petit de ceux de la Haute Moesie, l'observation n'est pas de trop que les Ottomans, sentant toute l'importance militaire de ce petit plateau central, l'ont divisé en cinq ou six Paschaliks, afin d'empêcher qu'il ne leur échappe, ce qui aurait pu arriver, si cola n'avait formé qu'un Paschalik et que les Serbes avaient pu en gagner le chef. Depuis Vranja on peut pénétrer aisément en Macédoine par des gorges évasées et de petites montagnes, la descente étant toujours plus grande que la montée. D'abord une vallée, débouchant du S. E. et S. dans la Morava au-dessus du pont près de Vranja, conduit par Olaschina et Drista à la vallée du Tschinja ou aux montagnes au-dessus de Stratzin. Au S. O. de Tavisda la vallée assez large de la Moravitza ("petite Morava) coulant du S. O. au N. E. permet de remonter par Bilatseha (t. Délibasch-Koï) à un bas col d'environ 13 à 1400 p. de h. abs., d'où on arrive à la source du Golema-Rieka, coulant à Komanova. D'un autre part on peut se rendre à Katschanik par une autre vallée, nommée Psinja, qui est dirigée environ de l'O.S.O. à l'E.N.E. et aboutit à un col un peu plus élevé du Mlad-Planina. MM. Viquesnel et Kiepert n'ont pas bien placé ce dernier sillon. Enfin le cours, tout-à-fait supérieur de la Morava, ouvre une voie assez facile pour pénétrer du S. E. au N. O. dans le bassin de Ghilan, qui n'est séparé de celui de Prischtina que par une arête très peu élevée et même praticable pour les charriots. On voit donc que Vranja est un point d'autant plus important que, placé sur les montagnes au N., on se trouve à la source des rivières principa- les de la partie occidentale de la Mocsie supérieure. Sous ce rapport aussi l'emplacement élevé du château fort de Novo-Brdo n'était pas mal choisi par les Serbes du moyen âge. A V2 1. du pont sur la Morava près de Vranja est le village de Ribinitzé (de Riba, poisson) et à % 1. plus loin est Na-radovschan, où il y a un petit torrent, qui vient du N. et coule dans la Morava. Après cela on quitte le bassin de Vranja et après avoir franchi une éminence, qui y forme un éperon, on arrive dans le vallon de Katoun (en alb. chalet), où est situé le village bulgare du même nom. On y cultive surtout du maïs et du chanvre. A '/2 1. plus loin est le village de Ratogosch dans une partie de la vallée, qui court du N. E. au S. O., qui est entourée de petites éminences de gneiss et de granite. On laisse ensuite au S. à % 1. de la route un village et on arrive près de Japar-nitza à 3 h. de Vranja et à 1144 p. de h. abs. La Morava sort près de là de gorges de montagnes, qui ont une direction du N. O. au S. E. Elle coule entre des hauteurs de 2 à 300 p. de h. et avant de s'enfoncer dans ces défilés on apperçoit bien au S.O. la grande échancrure de montagnes, en deçà de laquelle paraissent les montagnes à l'O. d'Ouskoub. A 31/2 1. du pont de la Morava près de Vranja on passe au village bulgare de Ternovtza, où il y a un torrent coulant du N. au S. et quelques vignes. Ail. plus loin au milieu des gorges parcourues par la Morava est le village arnaoute de Loutschani (du mot albanais Ljoutze, boue ou de Loutsch, en slave bois résineux). Des champs de maïs, de blé, de chanvre et de tabac occupent les parties, où ces défilés laissent de la place pour la culture, tandis que les hauteurs sont couvertes de petits bois de chênes et ont 2 à 300 p. La Morava, coulant du N. au S., décrit un grand contour de l'E. à l'O. et puis en sens contraire entre ce village et celui de Kontschioul (Unt-schul des cartes). Ce dernier est aussi habité par des Arnaoutes, mais les restes d'un église serbe ancienne atteste qu'ils ont envahi un pays occupé jadis par des Slaves. Comme la Morava, décrivant un contour à l'O. est encaissée plus loin entre des parois de rochers , la route est obligée de franchir une crête étroite au haut de laquelle était perché un Albanais avec son fusil. Il surveillait depuis là un troupeau de brebis, qui paisait dans le vallon sous la conduite d'un jeune pâtre. A 2 1. avant Ropotov (Rapata des cartes) un torrent venant de l'O. se jette dans la Morava et à 6'/2 à 7 1. de Vranja on sort des gorges de montagnes, dans lesquelles la Morava décrit six contours. Dans ce point la vallée est large et n'est bordée au N. que par des éminences à pentes très douces, les hauteurs au S. ont au contraire une pente rapide. La Morava va prendre sa source encore assez loin de là îdans le bassin de Ghilan, où elle ne pénètre qu'à travers d'autres petites montagnes, mais avant d'entrer dans les gorges, dont nous venons de parler, elle reçoit un cours d'eau, qui vient du N. E, Au S. de la Morava est situé le village de Smorik et en remontant obliquement au N. O. sur les éminences au N. on arrive au hameau serbe et albanais de Ropotov. Dans cet endroit les Serbes portent déjà la jupe albanaise comme dans toute l'ancienne Ratzie. Un berceau de feuillages secs nous servit de chambre à coucher devant une petite auberge, où il ne nous manqua rien des comforts de la Turquie. La route de Ghilan monte tout de suite à coté d'une ancienne église serbe en ruines et après une petite heure de marche on est au haut d'un plateau de 1799 p. d'élévation absolue, d'où on a la vue complette du bassin oval de Ghilan, qui est à 350 p. plus bas et peut avoir une lieue de long sur y2 1. de large. Il est bien cultivé surtout en maïs par une population serbe et albanaise et présente dans son extrémité S. E. une ferme entourée de beaux vergers et de jardins potagers. On n'a presque pas besoin de dire que c'est une propriété de l'Ayan de Ghilan, les Rayas n'osant pas avoir des possessions offrant, d'après les idées turques, tant de luxe. La route de voiture passe par Ghilan ou Ghilani, qui est une bourgade d'environ 1500 à 2000 habitans en bonne partie arnaoutes. Leur désobéissance aux ordres du Sultan Mahmoud a été punie par l'exil temporaire de beaucoup d'entr'eux en Thrace et en Asie. Depuis là le chemin va gagner à travers une crête basse et boisée le bassin de Prischtina, où on voyage en plaine. Nous choisîmes une voie plus courte, mais qui n'est practicable que pour des cavaliers; cela me paraît celle qu'on a voulu indiquer sur les cartes. On quitte la plaine de Ghilan et on se porte vers les hauteurs à l'E. et vers Pousti (désert), qui est à l/2 1. de Ghilan et à 25 p. environ au-dessus du fond du bassin. De là on remonte un torrent, qui vient du NE. et coule dans la Morava, puis on traverse au N. de ce cours d'eau la pente orientale assez élevée de montagnes inhabitées. Au plus haut point on est à 2348 p. d'élévation. Nous y rencontrâmes un charriot serbe, qui conduisait un mort à sa dernière demeure, probablement à quelque cimetière éloigné. La route va au N. O. ou au N., petit à petit les éminences cessent et on arrive dans une vallée élevée, où il y a quelques habitations et des bergers albanais. Au N, N. E. il y a des cimes de 500 p. Ce serait le Vaschounja de Mr. Kieperf. On échange bientôt les pâturages de cette vallée déboisée pour un pays mon-tueux et graveleux, qui est tout couvert de petits bois de chênes. Au milieu de cette solitude la rencontre de trois Albanais donna quelques momens d'inquiétude à notre Tartare. C'est depuis ces éminences qu'on apperçoit environ à 3 1. de Ghilan et à 2 1. an N. E. de la route la petite ville arnaoute de Novo-Brdo (Novo-Berda, le nouveau mont). Elle est perchée dans une petite éehan-erure au haut d'une crête, qui peut avoir 500 p. sur le pont d'observation ou au moins mille pieds sur la plaine de Prischtina. Il y a une centaine de maisons, 3 ou 4 mosquées et un château fort, datant du temps des Serbes, auxquels se sont substitués les Albanais. Sous le manoir il y a un escarpement de rochers du côté de l'O. Un Ayan gouverne cet endroit peu visité et entouré de montagnes sauvages contenant très peu de villages et couvertes de pâturages ou de petits bois de chênes, Entre Novo-Brdo et la route de Prischtina il y a une assez profonde vallée courant du N. O. au S. E., de manière qu'on compte plus de 3 heures pour y aller. Nous n'y avons pas rencontré le village de Labjan que Mr. Kiepert indique au S. de Novo-Brdo. S'il avait raison, il y aurait deux Labjan, bien voisin l'un de l'autre, le second étant dans le bassin de la Sitnitza entre Lapousélo et Babosch. Cela ne veut pas pourtant dire qu'il ait tort, ce seraient probablement des villages fondés par des personnes ayant demeuré sur le Lab '), rivière au Nord de Prischtina. Voyageant toujours sur un sol ondulé, on traverse une vallée courant du N. au S., puis une autre courant de l'E. à l'O. Enfin ') Ce mot de Lab, n'ayant pas de racine slave;, rappelle singulièrement celui de Idap, qui est le nom de la tribu albanaise des monts Acroccraunicns, tandis qu'une branche de ces derniers, les Liap*6houlap , vivent encore autour du bassin de Sitnitza. on descend dans une plus grande vallée, qui s'étend au N. et N. O., puis à l'O. C'est celle qui porte le nom de Graschanitza dans la carte de Vienne. Des scories de fonderies y indiquent le voisinage de minerais de fer et d'anciennes usines abandonnées. Dans son prolongement occidental cette vallée inhabitée se rétrécit en une gorge boisée, d'où on débouche enfin sur un endroit, où il y a un cimetière chrétien et quelques maisonnettes de paysans. C'est le village de Janjevo, endroit probablement une fois plus considérable et nommé ainsi de Janj, peuplier '). Dans ce lieu, à 2 1. de Prischtina, on abandonne la vallée, dont l'eau continue à l'O., pour atteindre le bassin de Prischtina. On pourrait aussi aller à Prischtina par là, mais on abrège en montant obliquement au N. O. sur une crête couverte de bocages de chênes, qui serait peut-être la Janjina-Planina des chansons serbes. On en redescend dans un autre vallon débouchant aussi sur la plaine de Kosovo et offrant une fontaine. Depuis là on continue à marcher dans la même direction et on coupe encore plusieurs éminences s'étendant aussi de l'E. à l'O. et couvertes de bois de chênes, dont la plus haute a 1500 p. sur la plaine, enfin on arrive à la cime de la pente, au pied de laquelle est bâti Prischtina. Depuis ces hauteurs la vue est rendue fort belle par l'opposition de l'arête élevée du Schar et de son pic oriental, le Ljoubéten avec le massif et haut Kopaonik en Servie. Devant les montagnes de ce dernier pays disparaissent presque les hauteurs de cette partie de la Moesie supérieure et celles, qui séparent les bassins de Prischtina et d'Ipek. Ce n'est que dans la direction de cette dernière ville et de Novibazar que l'horizon est bordé de sommités, qui paraissent à l'œil aussi élevées que le Kopaonik. A 1 1. au S. O. de Prischtina est une ferme et plus loin est la petite rivière de Graschanitza, qui coule lentement au milieu d'un sol noir, dépôt de l'ancien lac, qui a occupé une fois cette cavité. On passe plus loin à gué la Sitnitza ou Schitnitza, qui n'est qu'un cours d'eau coulant aussi assez tranquillement. On ne comprend guère à sa vue, comment le Sultan Amnrath a pu mettre avant la ') Cet arbre, indiquant un endroit un peu humide, adonné assez souvent son nom à des lieux habités par des Slaves, comme le (nouvenl le bourg de Jania en Bosnie, les villages de Janitza, de Janova près Donlmitaa et de Janiari en K pire et même peut-être Janina, on il y a aussi des peupliers. :J4!> bataille de Kosovo toute une journée, pour franchir une si petite masse d'eau. Il faut supposer que la Sitnitza était très enflée ou (pie les historiens ont confondu avec cette rivière les marécages de Sazlia plus au S. A 2 1. de Prischtina est le villnge bulgare de Skoula ou Skou-lan '). Nous y logeâmes chez une brave famille, qui possédait dans un enclos 0 à 7 maisonnettes, y compris les granges. Ces maisons étaient en bois ou branches d'arbres tressées et 12 personnes y habitaient. Depuis Skoulan on a encore une bonne demi-lieue jusqu'au village arnaoute et mahométan de Ribar au pied des montagnes boisées, dont on laisse la plus haute, le Goliesch, auN. O. On traverse ces crêtes de 2219 p. del'O. à l'E. par une route étroite et graveleuse au milieu d'un bois de chênes très touffu et favorablement disposé pour des brigands. Au milieu de la forêt nous rencontrâmes quelques bûcherons. Nous descendîmes enfin au S. O. par un mauvais sentier tournant sur le bord d'un petit ravin dans une vallée assez ouverte, où il y a (à 1725 p. de h. abs.) un moulin et quelques maisons. Nous allions même nous disposer à y dîner, quand arrivèrent plusieurs Kiradgis, qui firent peur à notre Tartare. Cette vallée du Tzernolieva-Rieka (par erreur Tséroléra de Mr. de llahn) court du N. O. au S. E. et aussi ça et là du N. au S. Ses eaux se rendent donc dans leLèpénatz et non dans la Si-nitza en tournant tout-à-fait au S. E. Au moulin elle est dominée au S. par un escarpement et en la remontant un peu au N. O., elle renferme le hameau albanais de Kirmaleva ou Tzernolieva avec quelques champs de maïs. Le reste de sa partie supérieure remontant à l'O. est étroit, tout-à-fait sauvage et entouré de bois de chênes. Malgré cela des Kiradgis passaient de temps à autre indiquant que cette route était fréquentée. On continue à monter très insensiblement jusqu'au col de 2408 p. de hauteur, où le Tzernolieva-Rieka prend sa source et où est le partage de ses eaux et de celles du Soua-Rieka (ou pron. Soha-Rieka, rivière sèche). Le Tzernolieva-Rieka reçoit à 2 1. avant ce col un affluent venant du S. et à 1 1. du col un autre cours d'eau coulant du N. Un peu au S. du col est. le hameau arnaoute de ') Ce nom de Skoulan rapproché de celui de Skouluni, hnmeau albanais du Mokra-Planina au N. E. de Pkwa et du Skouléni sur le Prout (Moldavie), rappelle le verbe albanais de Schkovlf, j'arrache. Poulie composé d'une vingtaine de maisons éparscs, couvertes de planches et sans cheminées. l) Depuis ce col on a encore 1% h. de descente jusqu'à la petite plaine de Soua-Rieka, ce qui a lieu sur le sol graveleux et la longue pente de coteaux boisés en petits chênes, parmi lesquels le Quercus Cerris forme ça et là de plus grands arbres que le chêne commun (Q. Robur). C'est un chemin de voiture. On met encore l/2 h. à parcourir la plaine avant le village. Le torrent de Soua-Rieka traverse à 1100 p. de h. abs. le village de même nom et tourne au S. E., pour aller prendre sa source vers le pied ou les contreforts du Lioubéten, qui se relient avec les hauteurs du col de Doulié. Cet endroit n'est presque habité que par des Arnaoutes, dont les maisons sont surtout sur le bord septentrional du torrent. A quelque distance de là étaient stationnés plusieurs charriots couverts et habités par des Zingares, leurs buffles paisaient à l'entour et leurs chiens n'attendaient que le passage de quelqu'un pour sortir de leur repos. L'auberge de Soua-Kieka est fort misérable. Ce n'est au fond qu'une vaste grange, dont la plus grande partie était occupée par ') Arrivé dans ces lieux, je fus tellement tourmenté par un accès de fièvre que je ne pus continuer et m'étendis dans ma couverture sons un arbre malgré le mauvais temps. Nous avions déjà passé ainsi plus d'une heure et avions fait du café quand s'approchèrent de nous un Albanais et son fils. Nous liâmes conversation, nous leur donnâmes du café et prévoyant ne pouvoir atteindre ce jour-là Prizren, nous leur demandâmes s'ils voulaient nous recevoir chez eux. Ils ne firent guère de façons et nous conduisirent à leur cabane non loin delà. LeTartarc leur ayant voulu laisser le temps d'éloigner leurs femmes et leurs filles, le père s'écria qu'ils n'étaient pas turcs et que, quoique musulmans , ils ne croyaient pas devoir cacher les femmes. Nous fûmes donc installés dans une cabane de chaume, ou nous trouvâmes sans voile la femme et les filles de notre hôte, nommé Haser de la tribu d'Elschtin. Pendant les deux jours que nous passâmes chez ces braves gens, nous n'eûmes qu'à nous en louer, ce qui n'empêchait pas notre guide turc de tenir quelquefois aux femmes des propos inconvenans , mais celles-ci savaient y répondre par des signes du plus profond mépris. Le paysan Haser appartenait au village de Doulié, Il était père de dix enfants et vivait, d'un petit bien qu'il avait acheté pour 400 piastres (100 francs). Il y cultivait du maïs, des haricots et des choux et il en retirait 1500 oches de blé de Turquie, de manière que pour subvenir nux besoins do sa famille, il était obligé d'en acheter encore 500 oches. Il payait ces derniers par le surplus de ses autres récoltes et le travail manuel de ses enlVms. Quand il voulait avoir de la viande, il vendait du maïs. Il nous dit qu'il ne payait alors aucun impôt, parce que le Paschaavait adopté le système de ne rançonner que les riches, pour soulager les pauvres; aussi ce même Pascha du Nisam n'était-il guère en bonne odeur à Prizren, et il en fut rappelé quelques jours après notre passage, en laissant 500 bourses de dettes contractées sur le fond municipal. d'énormes cuves, pour faire le vin. Ces ustensiles appartiennent à la commune et restent déposés chez l'aubergiste, où on fait la vendange en commun, pour s'en partager ensuite le produit suivant la grandeur des vignes ou la quantité des baquets de raisins apportés par chaque habitant. Le reste de ce local n'offrait guère que la place pour un foyer et pour celle de quelques personnes couchées. En outre il n'y avait pas d'écurie, de manière que les chevaux restèrent dans la cour sous un hangar ') Le pourtour du foyer de cette auberge était occupé par un tas d'Arna-outes musulmans, qui s'embarrassaient fort peu des voyageurs, ou s'ils le faisaient, c'était pour nous toiser d'un air de mépris. Notre Tartare n'était guère à son aise et tâchait de conserver son autorité en liant conversation avec un Albanais , qui était une espèce de petit receveur en tournée. Pendant ce temps, nos effets nichés entre les cuves et étendus sur la terre, nous pensions à nouer connaissance avec nos paysans albanais et nous allions offrir du café au moins aux plus âgés, quand le Tartare nous taxa sans détour de fou, de vouloir traiter ainsi de telle canaille. Un pareil compliment, probablement compris par les Arnaoutes, mit fin à toute conversation entr'enx et nous. Ceci peut servir d'exemple combien en Albanie la présence d'un Turc peut gêner l'Européen, car, peut-être, sans lui nous aurions fort bien apprivoisé ces rustres, mais nous ne le pouvions pas sans avoir l'assentiment de notre Turc , et si nous l'avions fait contre son gré, nous nous serions rabaissé à ses yeux, son respect pour nous aurait diminué en proportion de notre familiarité avec les Albanais. Bientôt l'aubergiste bulgare s'en fut chez lui, parce qu'il avait la fièvre et ne nous laissa que son domestique, qui fit de sou mieux pour nous fournir au moins la poule au pot. h'Akscham arrivé , nous fûmes enfin délivrés do nos sournois Albanais, mais nous restâmes en tête-à-tête avec notre receveur. Nous avions déjà sonpé, quand cet homme reçut de la commune un dîner complet, dont il fit part fort obligamment à nos gens. Il invita le Tartare à le partager et se mit ensuite à le griser eomplettcment avec de l'eau-dc-vie. Cela fait, il se mit à le tirer par la moustache, à lui dire les injures les plus grossières, à se moquer de lui, de son firman et de son Sultan. ,,Si j'aime boire beaucoup, nous disait-il en dansant, c'est que je sais ce que je fais et ce que je peux supporter, mais ce misérable n'est qu'une véritable brute." Puis se tournant vers le Tartare: „Tu me parles de tes montres, pour lesquelles tu demandes assez d'argent, il ne tiendrait qu'à moi de les avoir, je n'aurais qu'à sortir et appeler trois ou quatre Albanais, et c'est toi qui serait obligé de me payer pour que je les acceptasse. Pesevenk, ton firman n'est qu'un chiffon de papier et ton Sultan n'est qu'un misérable Chjaour.u Heureusement l'ivresse du Tartare le rendait tout-à-fait incapable de juger ce qu'on disait, car sans cela, n'eût-il été qu'à moitié ivre, il y aurait eu du sang versé. Cette comédie, toute curieuse qu'elle était, finissait par nous ennuyer d'autant plus, que le garçon d'auberge nous soufflait à l'oreille qu'il ne fallait pas trop parler avec cet homme, qui était capable de tout. Néanmoins nous pouvons dire à son honneur qu'il ne nous dit rien de désobligeant. Sortant de la grange pour coucher en dehors, il se contenta seulement de spécifier à haute voix la différence du gîte qu'il occupait avec le nôtre. Aussitôt qu'il fut sorti, le garçon d'auberge ferma la porte avec la barre de bois, comme c'est d'usage, et le reste de la nuit fut tranquille. La route do Soua-Rieka à Prizren forme une distance de 3'/2 h- Il faut d'abord franchir un petit plateau très bas, où se trouvent quelques bocages. Puis on passe un cours d'eau coulant du S. E. au N. O. et se rendant clans le Soua-Rieka. On remonte toute de suite sur un plateau un peu plus haut et plus large, mais du même genre. Depuis cette lande élevée on observe à près de 3 h. de Prizren à droite un village albanais avec quelques champs de maïs. Ces lieux forment un bon observatoire, pour bien comprendre la structure du bassin de Prizren au pied N. O. du Schar. Le Drim y pénètre au S. de Djakova à travers une ouverture assez large entre des collines de 6 à 800 p. d'élévation sur la vallée. Ayant reçu le Soua-Rieka et la Maritza de Prizren , il se jette dans une vallée ou gorge placée entre les montagnes au S. de Djakova et la montagne élevée de Hass ou Schalé-Schoss, qui est coupée plus àl'O. par une énorme fente courant N.E.-S.O. C'est cette crevasse, qui permet au Drim blanc d'aller joindre le Drim noir. A 11. de Prizren on apperçoit au pied escarpé du Schar et à % 1. de la route de voiture le village albanais d'Oritsché, où il y a un petit torrent venant du S.et allant affluer dans le Soua-Rieka. Il est. possible que ce soit le Srebnitza (de Srebro, argent) de Mr. le Dr. Millier, qui cite clans cette plaine (auN. E. de Prizren d'après lui) plusieurs villages serbes. On voyage alors en rase campagne et à '/2 h. plus loin on laisse à droite le village deGloubitza ou Loubitza et le torrent du même nom, qui après avoir coulé du S. au N. se déverse dans le Drim. Enfin une plaine en partie cultivée amène le voyageur à Prizren. En comparant notre itinéraire de la route de Prischtina à Prizren avec celui donné par le Dr. Mùller, on voit évidemment qu'il y a une autre route plus au N. par Stoudénatz (de Stoudèni, froid) (100 h. slaves), Vrestovo sur le Vélika-Rieka (170 h.), Ora-vatz (58 m. et 310 h. avec une chapelle grecque), Mirousch, Pré-jévo sur le penchant de collines, à la sortie desquelles est Pod-gradiska (Gradiska inférieur) avec 8 gendarmes albanais, Kopilika (en albanais Valet) et Joschavitza restent à gauche de la route, puis vient le Han Zdrélo séparé par un torrent du village albanais musulman de Krajmirové déjà dans le Paschalik de Prischtina. (Voyez pag, 84.) Quant à l'indication des villages de Zoitz, de Mahmouscha, de Srbitza, de Mrtvitza et d'Optorousch, ils doivent être sur le côté méridional de la route de Prizren à Soua-Rieka ou même en partie dans la montagne sur celle de Prizren à Katschanik. E R R A T A. Au lieu de: Lisez : 'age i, ligne 15 est la limite est près de la limite. ■r>, )) 15 caratéristique caractéristique „ 6, i> 14 porte portes y, 1 l, i« 28 cornm dan t commandant ,, 14, ;t 10 jolis jolies 23, 11 23 rédoutes redoutes il 25, »» 19 Vidbaottt Vidbis 31, 1) 13 embrassante embarrassante 38, 1* 21 significant signifiant 39, n 12 des de 30, ,, 14 couvert couverts „ 71. „ 26 une saule un saule 11 73. „ 12 Point Pont 87, 11 19 Sikernitza Schikemitza 127. 1» 38 cormiers cornouillers 5? 128. »1 37 sae sac M 130, )) 1 K i rk lissé aussi Kirk-Kilisé 144, n 13 en jour au jour 1j 14.r), d 24 un une 11 162, »i 39 e se 1> 170, il 29 particulier du Knes particulier celui du Knes 184, n 32 occidentale orientale 11 ]9(>, ii 13 pentes fentes )f 199, 13 et 35 du de la 11 199, 18 Jouroschitch Jourischitcb 11 203, >i 20 dito dito 11 205, ji 31 occidentale orientale 5' 209, ii 1 O.S.O.-E.S.Ë, S.O.-N.E. 11 230 22 eus. j'eus „ 245, 30 près et près 11 254, >i 20 a î à 800 a 7 ou 800 11 256, „16 et li ' Télés, Tôles 11 305, 17 Jouritchich Jourischitch )1 307, » 33 nationale national 11 308, ii 27 Média Media 11 309, ,, 30 en ou. f