I r M E T H O D E POUR £tud i ER L A GEOGRAPHIE; O ti Ton donne ime Defcriprion exać>e de TUnivers , formee fur les Obfervations de l'Ac.idćmie Royale des Sciences , 8c fur les Auteurs originaux. A V E C Vn Difcours preliminaire fur VEtude de cene Science 3& un Catalogue des Ca rte s } Rela-tions j Voyages & Defcriptions necejjaires pour la Geographic. Par M. 1'Abbe Lenolft du Fresnoy. QUATRIEME EDITION, Revue , corrigie & TOME VII. Chcz. N. M. T i l l i a r d , Librairfcs Augullins > a Saint Bcnoit M D C C. L X V I I I. AvtC Apprjbation 6* Priviiege du Roi. »j »il u 11 mi > ili« —ID TABLE D ES A RT I C LE S. VJHAPITR.f. XVIE La Turquie en Europe. i Art, I. La Turguie feptentrionale. y I. La petiti Tartarie. Ibid. Endroits de la Pref-qu'ifle qui appartien-ne.it 1 IV. La Morse. 6% Art. III. Les Ijles dt la Greee. 65 L If.es de la Mer Io- nienne. 6(> II. IJla de 1'Archipel. I/les de l'Archipel, ap-partenantes a LEu~ rope. 68 Ijles de V Archipel y voi-fines ds 1'Afie. 70 L'Ifle de Rhodes. 73 VASIE. 76 Chap. I. La Turqu;e en Afie. 88 Art. I La Natolie. 90 I. Les Sangiacats des cutes occidinta'csqui dćpcndent d u Capitan Bacha. 9: imyrne. 94 II. Le Gmivcnicncnt d'Anadoli , ou de a ij T A B Kutdiek. i o i III. De Sivas. i io IV. De Trebi/o :de. 11 J V. De Caramanie , ou de Konieh. 115" VI. De Marafch. 117 VII. D'Adana. na V HI. LcPaysd'Itckiii. 111 IX. (& Cftjpre. izz Art. II. L Vietd 011 Pays de Vcrjchoture. ibid. 2. Pays de Catherinirt'-bourg ou d'Ecaterin-bourg, 207 J. Pays de Turinsk. 4. Pays de Riumensk. Ibid. $. Pays d'Ifet. no 6. Pays de Tobolsk. 2 1 i 7. Pays de Surgutfk. 116 8. Payj J, Pelinsk. f Ibid. 9. Pđy.j Je Berezousk, II. Departcmcnt de Jeni fe i sk. 11 & i- Pavs de Magarca. Ibid. 1. Pays de Narymsk. 2 ro J. Pajsdc Tomslt, Ibid. 4. Pdy* Je Kutsnct^k. J. Pđyj Je Krafnojarsk. Ibrd, P^y.y Je Jcnifcisk. 114 III. Dćpartement dlr- ARTICLES- V 101 1. d'IHtnsk. 11 £ i. Pđyj- d'IrkutTpk. ■LIJ j. Pđyj Je Selingirisk , 2. ii 4. Payi Je Ncrtschinsk. 130. f. P<;y.f Je Iakut^k. Mi. 6. Intendanti d'O- kutrk. ckot^k. % 31 7. Intendante dcKamts- ckatka. 13 3 Chap. IV. Ej Tartarie. M4 Divifion. 14-i Art. I. Lđ Tartarie Rujfienne. 241 Art. II. Ea Circajfie. 141 i. Er Dagefian ou E>./- ghejlan. Ibid. 1. La Circajfie propre- mcnt dite. 244 3. Peuples librcs qui habitent lc MontCau- cafe. Art. III. Ee Pđyj Jej Ufhecs. 146 l. JLđ grande Bukharie. 148 1. Ee Kkarafm. 153 Art. IV. Ee Turkejlan. ići Art. V. Le Payj Jej Elutfis3Q\iCalmoucks, i„ L.V.L'Arabie. 117 Divrfon. 174 Art. I. L'Arabie Pć- tree. , 176 Art. II. L' Arabie De- ferte. 278 I. VEtat d'El'Kiuif, ou Je Rahrain. 187 a. L'Etat de L'Emir de Janama. 179 3. L,'Etat de t Emir de MijciLu. Ibid. 4. VEtat de l'Emir d'Oman , ou Je Vo-dana. *8o Art. III. L'Arabie hcu-rcufe. z8l 1. L'Temen. Ibid 2. L'Hij'i. 1Š8 chap.VI.^ctT^r/e. 190 t Vlrac dgirni. i>) y II. Le Ch\pfta1k. j 00 HI. Le E.'fjjian otl Viuie Perfe. lbid. I L E IV. Ee Kerman. 30* V. Le Sigifian ou Se- VI. Ee Zabliflan ou Sablcjlan. lbid. VII. Ee Candahar. ; c 3 VIII. le Khoraffan. Ibid. IX. VEfiarabath 011 Eftarabad. 30 + X. Ee 2Ci/i!č. J 25 XII. De J£ achemire. 314 XIII. De £J.W. 3 25 XIV. De Iđftđ ou J« Sinđ. XV. D'Aureng-Abad ou de B ddgite. 316 XVI. De Candish. 316 X VII. E^r^/e/^. Ibid, XVIII. De Bagualaoa le Decanpropre. Ibid. XIX. De Vdrada ou de Siba. 317 Art. II. La Prcfju'ijle oceidentale del'Inde3 ou en~decu du Gunge. 318 2. te Royaume de Vi-fapour. 3 i 9 II. Le Royaumc de Gol-conde. j 31 III. Le i?, Je Carnat-; ou Je Bifnagar. 3 3 z IV. La CJfe Je Cbro- W1 iridel, j ^ j V. La Coee Je Malabar. 3?« Art. III. Ld Prepju'ijJe orientaL de 1'Lide , o u au-del.i du Ganse. rartie fepcentrionale, , _ J J? I. Lej Royaumes d' A-jem & de Tipra. Ibid. II. Le i'Avi. 340 III. Le &. ue PcVa«. DES ARTTCLES. vif Ibid. II. Le R. de Camboge IV. H-' Le R, d'Aracun. i^rze Meridione Kocci-Tcheu* 379 L rt ćore. 380 Les IfJisde T A*e. 382 Art. I Le.; /7e* tv///-nei Je /./ T irtarie , & vers le Dttroit du nora. 383 Art. IT. Les Ijles du Japan, 338 vii) T A 1 I. L'Ifle de Niphon ou ■ Nipon. 3 <■) i II. L'Ijle de Ximo , Sayeoek ou Saikokf. 394 III. L'Ijle de Xicoco 3 Tokoejl o u Sikokfi Ibid. Art. III. Les Ifles de Lieou Kieou & l'Ifle Formo fe. 597 Art. IV. Les Ifles de s Larrons ou de Marie-Annc. 401 Art. V. Les Ifles Plii-lippines ou Mani/les. 403 Art. VI. Les Ifles Mo-luques. 409 I. Moluqucs occiden-lales. 41 o II. Moluques orien- L E* talcs. Ibid. Ifles de Ternate, de Ti-dor , de Motir, de Machian & de Ba-chian t ou les vraics Moluques. 412. Ifle de Cerum. 41 3 Ifle d'Amboine, Ibid. Ifles de Banda. 414 III. Moluques meridio- nales. 41 <; Art. VIL Les Ifles de la Sonde. 41 f I. L'Ifle Borneo. Ibid. II. L'ljhe de Sumatra. 417 III. L'Ifle de Java. 412. Art. VIII. L'Ifle de Ceylan o u Ccylon. 41« Art. IX. Les Ifles Mal-dives. 432, Fin dc In Table des Aniclcs. MUTHODE MET HO DE POUR ČTUDIER L A GEOGRAPHIE. C H A P 1 T R E XVII. L A T U R Q U I E en Europe. C a r t r s. Npus avons plufieurs Cartcs de V Empirt Ture. M. Guillaume Šanson a don ne' „ en 16 8 o j en deux feuilles 3 1'Empirc Ture en general ; elle fe vend che^ le Sieur Jaillot. Lc meme M. San-sos a donneauffi en deux feuilles 1'Em-pire du Ture en Europe t que le fieur Jaillot fn reparoitre en 1716. Enfin nous avons du mane Guillaume Šanson la partie feptentrionale de la Turauic en Europe en dcux feuilles , auj]i~hisn Tome JU. A Methode de Geographie. que la partle meridionale, pareillement en deux feuilles. M. D E Li SLE a aujjl dorme deux bonnes Cartes fur l'Empire Ture : la Hongrie & Turquie Europeenne feptcntrionale y en une feuille 1703 ; & la Grece j ou Turauic Europeenne meridionale , aujfi en une feuille j 1707. On les prej ere aux precedentes. 'EMPIRE dcsTurcs, *ui eft tres etendu , ne remonte qu'a lan 1500 , qu'Ottoman , leur premier Souverain, commen^a un regne qui Hura z 8 ans. Avant ce temps , les Turcs furent foumis aux Sara- ilont ils one fait le liege j mais la valeur des Chretiens le leur a fait lever toutes les deux fois. Depuis le dermer fiegc en 1683 » 0,1 a remarque que la puilfance Octomane eft extremement tomb.ee , de maniere que lesTurcsne fniroieiu foutenir deux guerres a la fois , avec les Chretiens &: avec les Petfes , dont ils font ćiialement fcnnemis. Le malheur de leurs progres eft venu de la difeorde & de la jaloufie de la plunart des Princes Chretiens. La Turquie eft done ainfi nommee, parce qu'elie appartient po ur la plus gtaft-de partie aux Turcs , ou leur eft tributaire. Cee Empire s'etend en Europe , en Afie & en Afrique : nous ne parlerans ici que de U T urquie d'Europe. Sesboines font au feptentripn 1'Efclavo-me , la Hongrie , la Tranfvlvanie , la Po-logne & U Ruflie j a 1'oiicnt , T Afie , dont elle eft feparee par le Dćtroit de A ij 4 Me [hode de Geograpkie. C alf a , par la Mer Noire > par le Dćtrcit de Contrantinople , par la Mer de Mar-mara , par le Derroit des Dardanelles j au midi la Mer Mćditerranče; a 1'occident la Mer Ionienne ou de Grece , le Golfe de Venife , čc 1'Aliemague. La Turquie d'Europe s'etend depuis le $4C jufqu'au 49c degre de latitude feptentrionale. Elle fe divile en feptentrionale & meridionale. La feptentrionale contient : i. La petite Tartarie. 6. La Dalmatie. i. La Beilarabie. 7. La Bofnie. 3. La Moldavie. " S. LaServie. 4. La Valaquie. y. La Bufgurie. 5. La Croatie. 10. La Romanie. La meridionale comprend la Grece , qui fe fubdivife en Tarc-ferme & en Ijles. Je commencerai par les quarre Princes va{Iaux ou fcudataires du Grand Seigneur. Je decrirai enfuite les pays qui font de £1 domination abfoiue. La Turauie a"Europe* 5 A R T 1 C L E PREMIER. LA TURQUJE SEPTENTRIONALE. I. La petite Tartarie. 0) E Pavseft ainfi nomme, pour le dif-tinguer de la grandeTartarie en Afie, 4'o" ione venus les pecitsTartares, peuples fort cruels, grands coureurs, & roujours oc-cupes au pillage. lis font allies , ou plutot vaflTaux &c feudataires du Grand Seigneur depuis l'an 1584 , & Mahometans de rc-ligion. Ils aiment la chair des jeunes che-vaux , tk la mangenr meme a demie-cuite. Quand le Grand Seigneur n'eft pas con-tem de la con dni te duKhan , ou Prince, il le depofTede , le met en pri fon ou le rait mourir , Oc^akow j fa capitale , fituee fur la Mer Noire , a fembouchure du Dnie-per. Le Grand Seigneur y tient des Gale-res, pour empecher lesCofaques de faire des courfes dans cette mer par 1'embou-chure du tfeuve. Les Rullcs i'attaquerent en i 737 , la bombarderenc & la ptirent d'affaut, mali're la vigoureufe reHitance de Ja gami Ion ,quietoit devingt mille Turcs, Sc qui tua dix-huic mille hommes aux Ru(lesdans cet aifaut. Les Turcs tenterent inutilement de la reprendre -y entin les Rulfesen firent fauter les fortifications en 1738 , &c fabandonnerent. Kiji-Kermen, nommee quelquefois Kirmin etoir une forterefTe lin. le Dnieper , quatre lieues au-deifus de fon embouchure ; mais les La Turauie d*Europe. * r Ruifes en ont rafe les fortirications' en 17J6-. 2. Bialogorod j capitale de la Beftara-bie , & du Sangiacat de ibn notri , eft il-tuee fur un golte de la Mer Noire , forme par Temboiichure du Niefter. OnVappelle auffi Akerman ou Akitmah , &c on la dir, batie des mineš de 1'ancienne Tyras. Les Grecs la nomment Moncafiro. Les Turcs la prirent en 1485 , fur le Prince-de Mol-davie , ainfi que la ville a aufti A vj 11 Mithode de Geographie. fervi quelque temps de retraite au mcme Roi de Siiede. Kofchan > fur le Niefter, fept ou huit lieues au-delfous de Bander , eft un bourg de 300 maifons > habitćes par des Valaques ou des Moldaves. III. La Moldavie. Cette Province , la plus feptentrionale de la Domination des Turcs en Europe , eft bornee par la riviere de Niefter , qui la fepare de la Položne. Le pays eft tres-fertile , &: a d'excellens vins , de mcme que de tres-bons chevaux. Les peuples y font Chretiens Grecs , &: gouvernćs par un Prinee ou Hofpodar , tributaire ou vaflTal du Ture , a qui il paye tous les ans pour hommage cinq cens chevaux Ć3ć trois cens faucons. lajjl, fur le Pruth, alTez "grande ville , defendue par une bonne ci-tadelle , & la relidence du Hofpodar en eft la capitale , quoique quelques-uns croieut que ce foit Soc%owa ou C\u-kaw fur le Sererh. Bradi j Choc^in ^ ou Kotnim fur le Niefter j bourg fameux par Ja vićtoire que Jean Sobieski , depuis Roi de Pologne , y remporta fur les Turcs en KJ75. Les RufTiens fe rendirent mai-tres ele cette place en 1739 , mais ils l'e-vacuerentpeu de temps apres, en vertu du Traite de paix conclu la mcme annee. Scovoufchane n1 eft pas loin de Choczin : les Rulliens y battirent les Turcs en 17351- La Tunjuie d*Europe* 13 C^e?-nowiec^ font deux autres villes remarquables de la Morlaquie. i. La Croatie Turque eft fituce en tre les rivi«res d 'Umu & de Pliva , qui fe jettent dans la Save , dont la premiere la fepare au couchant de la Croatie Autrichienne , & 1'autre la fepare de la Bofnie , au levant. Sa capitale eft VTihit^ ou Bi-hac^ , nommee aufli Pighiton , ville d'une affez bonne defenfe , firuće dans ure de rUnna, a. vingt lieues a Torient de Segni. On remarque eneore Kajlanavit^ > fortereife fituce aufli dans une lfle de TUn-na j vers fon embouchure dans la Save. vi. La Dalmatie. Ce pays, affez fertile en bled , en hnile en vin . fe divife en Dalmatie Veni-tienne y Ragufienne &c Turque. Selon Ha-zius j la Maifon d'Autriche y polfede un petit canton , dont on peut faire une qua-trieme partie , en la defignant fous le nom de Dalmatie Autrichienne. Nous en avons parle au Tome III, p. 198. Mais ce canton , felon d'aurres Geographes , eft la partie oecidentale de la-Morlaquie , ou Comte de Lica , dont nous venons de parler. 1.6 Methodc de Gćographic. i. La Dalmatie Venitienne fe fubdi-vife en Terre ferme 6c en Ifles. Dans la Terre ferme font, S pala to ou Spalatro j ville affez forte , avec un port 6c un Ar-cheveche , dont le fameux Mare Antoine de Dominis fuc Archevcque dans le XVIlc fiecle. Z ara , ville archiepifcopa-le , paflablement fone 5 &: en titre de Comte. Elle eft prefque ifolee de la mer, 6c fituće vis a-vis de l'Ifle d'Ugliano. No* na , ville forte 6c epifcopale. Sebcnico j ville & Eveche, de meme que Scardont 3 ville prefque ruinće. Cattaro j ville forte fur un Golfe de meme nom. Rifano & Caficl - Nuovo , villes alTez fortes 3 ont aufli des Eveches. Budo a 3 ville epifcc* pale. Ces quatre endroits font a l'eft de la Republique de Ragufe. Ciclut 3 darts une lile de la riviere de Narenta , un peu au-deffous de la ville de meme nom } eft tine forterefTe nouvelle , qui appartient aux Vćnitiens. Almijfa > ville & Evcchć. Trau j Salona , Clijja forterefTe. Les principales Ifles de la Dalmatie Venitienne , font Cherfo, avec une ville epifcopale de mcme nom. O/ero , ou Of-foro 3 qui touche a la precćdente par un pont , 6c qui a la petite ville d'Oftbro avec un Evcchć. Veglia , pres de la Mor-laqnic, avec fa ville epifcopale de mcme nom. Arbe 9 ou eft Arbe 3 ville & Eveche. Pago , oii eft Pago , ville epifcopale de meme nom. La Grojfa, la Cw\ola > la La Turquie d'Europe. t 7 Brajfa, la Coronata > la Liffa j & plil-fieurs autres, mais pen conliderables, 1. La Dalmatie Ragujlennc a. pour ca-pitale Ragufe 3 nommee aufli Drobonika y ville archiepifcopale , affez jolie , fort marchande , &: la capitale de la Republi-que de meme nom. Elle eft grande , fi on comprend fes fauxbourgs , 6c a un tres-bon por t, dćfendu par le chiteau cle S. Laurent. Ses autres torcifications font aflez bonnes 8c alTez bien gardees. Cette ville paye tribut aux Turcs quelle craint, aux Vćnitiens qu'elle hait, & a. la Mai-fon d'Autriche par confideration. Elle eft fujette aux tremblemens de terre j elle en fouffric de tres-fachemc vers 1'an 1634 & en 166 j. Son Gouvernement eft Arifto-cratique , mais fon Etat eft fort petit. Ou-tre Ragufe, il y a encore Raguji-Vecchio, Trebigna- Ombla 3 Stagno-Grande dans la prefqu'lflc de Sabioncello 3 ou eft aufli un endroit de mcme nom. Ceft-la ce qui fait la Terre ferme de cette Repu-bl ique , avec Grande &c Me Ioni ta. Les Ifles, qui en dependent , font Melćda ou Milita Agufia > Cu^a fk Ca^ola ; mais elles n'ont rien de remarquable. 3. La Dalmatie Turque 3 la moins con-fidćrable des trois Dalmaties , a Narenta j Mofiar , Clinovo & Trebigna } dans la Province de Herzegovine , autrefois Du-chć de Saba , qui comprend les contrćes i S Methodt de Geographie. ■ de Narenta j de GUubufca j de Nevefi-que , de Kiieuno j ou les Turcs fe tendenc en temps de guerre , & quelques aurres. Vil. La Bofnie. La Bofnie , fćparće de TEfclavonie par la Save , prend fon nom de ia riviere de Bofna j qui 1'arrofe du midi au nord , Sc fe jette dans la Save. Elle a ćtć aurrefois une des dćpendances du Royaume de Hongrie. Elle fur enfuite gouvernee par des Rois particuliers , depuis l'an 137c* jufqu'en 146$ , que Mahomet II, Empe-reur des Turcs , la fubjugua , apres avoir fait prifonnier Etiennc-, le cinquieme Sc le dernier de fes Rois, qu'il fir ecorcher tout vif. L'Empereur Charle VI conquit en 1717 une grande partie de cette Province , qui lui refta par la paix de PalTa-rowits j conclue 1'annee fuivante y mais elle a ete remife fous la puilTance du Grand Seigneur, par le traite de 1739. Le pays eft plein de montagnes j mais il eft fertile le long des rivieres qui 1'ar-' rofent : les principales font la Save , le Drin 8c la Bofna. On y trouve quelques mineš d'argent, de tres bons faucons, du gibier, &c. Le Grand Seigneur fait gouverner Ia Bofnie par un Bacha ou Beglierbei, qui a fous lui huit Sangiacs. La Province fe divife en hautc &c bajjc, La premiere, qui La Turguie d'Europe. *f un pays de montagnes» fe nommoic autcčfois l'Hercegovine 3 ou le Duchć de Saint-Saba , du nom d'une ville qui en eft L\ capicale. On comprend dans la haute Bofnie 3 qui eft divifee en cinq San-giacats, toure la partie de la Croatie ik de la Dalmatie qui eft foumife au Ture , & dont nous venons de parler. Les Francif-cains y ont quelques Couvens. Les Ca-tholiqucs y font en a (Te z grand nombre, & 1 eurs Cures ou Pafteurs dc^pendent des D.ocefes de Spal a tro , Trćbigno & Ma-Carfaka , dans la Dalmatie. La bajje Bofnie a aufli beaucoup de Ca-tholiques Romains , qui reconnoilfent Tautorite d'un Evtque Latin rćfidant \ Bofna-Seraio j &c font conduits par de* Freres Mineurs Obfrvanrins. Ceux-ci ont dans le pays dix-huit Couver.s , qui forment un^ des Provinces des Francif-cains. C'eft la plus riche & la plus rela-chee de leur Ordre. La bafte Bofnie fe divife en trois San-giacats ou Gouvernetnens parficuliers , qui font eeux de Bagnaluc 3 de Saraio Sc d'Orbach. I. Le premier porte le nom de Bagna-luc , fa capitale , qui eft une aflez grande & belle ville , avec une bonne forterelfe , qui fert de refidence au Sangiac. Les Au-trichiens Taftiegerent en 1737 \ mais une strmce de Turcs qui s'approchoit, les obli- 10 Methodc de Geographle. gea d'en lever le fićge. Saicfa eft une bonne fortereffe pres des frontieres de Croatie. Vamp eft connu par une a&ion qui fe donna en 1737 entre les Autri-cfoiens tk les Turcs. Tika Sč Verbo^ania font au nord-oueft. Tuffin &c Dobach t au nord , ainfi que Swinar &c Kowac% , fur la Save. Le fecond Sangiacat eft celui de Serajo ou Bofna-Sćrajo 3 qui prend aufli le nom de fa capitaie, fituce fur la Bofna, au fud-eft de Bagnaluc. Bofna-Scrajo eft grande 6c marchande : elle Kit incendice en 1697 par les Imperiaux. C'eft la refidence de 1 Eveque Latin de Bofnie. Ce fut le Pape Clement Vili, qui, fur la fin du XV1C fićclc , ćrigea cet Eveche pour les Catholi-ques du pays. L'Eveque eft nom me par 1'Empcreur , comme Roi de Hongrie , &c recoit de la Chambre du Domaine de Hongrie, une penfion de cent ducats. Les autres villes de ce Sangiacat, font Mogla! j Barek 3 fur la Save, 5c Komick j fur le Drin. Le troifieme Sangiacat eft celui d'Or-baeh. Sa capirale Orbach eft une affez bonne place. Zwomick ou Tsvsornick j ville bien fortifiće avec un chateau : les Imperiaux la prirent en 1717; mais la f>aix qui fe fit en 1718 a. Palfarov/itz, es empecha de prendre le chateau. La Turquie a"Europe. M VIII. La Servie. La Servie , que les Turcs appellent Serpilati 3 eft une grande Province , bor-nćc au levant par la Bulgarie , done elle eft feparće par le 1 imock ; au midi, par la Macćdoine & l'Albanie \ &c a.u cou-chanr par la Bofnie. Le Danube & la Save la bornem au nord , &c la ieparenc de la Hongrie &c de 1'Efclavonie. Les principales rivieres qui 1'arrofent, fonr : ia Morave, qui la traverfe du midi au nord , jufqu\\ fon embouchure dans le Danube j &c la Rafca 3 qui donne fon nenn a la Rajae ou pays des Rafciens : elle y prend fa fource dans la partie me-ridionate j & apres avoir coule du fud-eft: au nord-oueft, fe jette dans la Morave , a fa droite. Le pays n'eft pas peuple a proporrion de fon ćtenduc : le terrein en feroit fertile , s'il etoit mieux cultive. Dans le Xlc fićele , fous le regne de Michel Ducas , Empereur de Conftanti-nople , les Serviens , peuples originaires de la Sar mat ie A(iatique &c des environs du Don ou Tanais, vinrent s'etablir dans le pays que nous nommons aujour-d'hui Servie. Ils donnoient a leurs Chefs le nom de Defpote. Les Sultans ou Em-peseiusTurcs , Amurat I & Bajazet leur lirent la guerre , &: enfin versle milieu du XVC iićcle, Amurat II detrona Georges 11 Methode de Geographie* Balcowitz, dernier Defpore de Servie, te unit cette Province a fon Domaine. Lorfque les Serviens s'emparerent du pays qui porte leur nom , ils etoient Chre-tiens j & comme ils etoient independans, ils voulurent avoir un Eveque Autoce-phale , qui ne dependit point du Patriar-che de Conftantinople. Les fucceiTeurs de ce Prelat, qui prirent le titre de Patriar-che, ont recherche de temps en temps, foit par interet , foit par politique , la Communion de l'Eglife Romaine \ mais cette union n'a jamais ece de longue du-lee. Le Patriarche S. Sabbas , fils de Simeon - Etienne , Roi de Servie, apres avoir couronnć Roi de Servie , Etienne fon frere , inftitua douze Eveques dans divers Monaftčres dupaysau Xllle fecle. Les Patnarches fes fucceiTeurs en ont inf-titue depuis, plufieurs antresj en forte qu\ictuellement TEglife Rafcienne s'ćtend noivfeuk-ment dans la Servie ou Ralcie j mais eneore dans une partie de la Bofnie, de la Bulgarie , de TEfclavome tk de la Hongrie \ Sc qu'elle eft compofće d'un Patriarche , douze Metropolitains, cinc] Archevcques honoraires ik quatre Eve-ques, qui rćddent dans des Monaftčres , dont en mcme temps ils font Abbćs. Le P. le Qnien en donne Ia notice dans fon Oriens Chrijlianus. II' y a en Servie quel-ques Catholiques , repandus dans divers La Turquie a"Europe. villages, & partages en huit ParoilTes , done les Pretres font entretenus par la Congrćgation de la Propagande. Ils re-connoidenc rautorirć d'un Archeveque Latin , nomme par le Pape , qui refide a Scopia ou Ufcup. Les Turcs divifent la Servie en qua-tte Sangiacats , qui prennent le nom de leurs capitales : ce font Belgrađe, Semen-dria, Scopia & Cracovo. De ces quatre Sangiacats , ceux de Belgrade & de Sć-mendria, furent cćdes aux Imperialne par le traite de PaiTaworitz en 171 8 j mais ils furent rendus aux Turcs par ce-lui de 1739. Suivant ce dernier traite, la Save & le Danube doivent fervir a. l'a-venir, de litnites entre les deux Empires de ce cotć-la. I. Le Sangiacat de Belgrade a pour capitale Belgrade > qui Peft auili de toute la Servie , & la rćlidence d'un Bacha ou Beglierbei, dont le gouvemement s'e-tend fur toute cette Province & fur une partie des pays voifins. Cette ville , 1'une des plus importantes de lEurope , eft: fi-tuee fur la pente d'une eolline, fur la rive meridionale du Danube , a 1'endroit ou la Save fe jette dans ce fleuve. Les beaux jardins dont elle eft: environće , en font un fejour delicieux ; & le pavs eft abon-dant en toutes les chofes necelliiires a la 2.4 Methode de Geograpkie, vie. Belgrade eft batie a l'anrique j & fes murailles, qui one une double enceinte , font rlanquees d'un grand nombre de tours. Elle eft parragee en quatre quartiers principaux : ce font le chareau , qui eft la demeure du Bacha , & qui n'eft habite cpie par des Turcs t la Ville > la Ville-deau j & la ville des Rafciens. Ces quar-tiers ont de fort grand s fauxbourgs , fre-quentes par des Marchands Turcs , Grecs, Jiufs, Hongrois , Ragufiens & Efclavons j car la fituation avantageufe de Belgrade , la rend extremement commerc.ante. Les rues ou fe fait le commerce font couver-tes, & on 7 eft a 1'abri du foleil Če de la pluie, II y a deux grandes places dont les maifons font baties en pierres 3 &c deux autres baties en forme d'Eglifes } avec des boutiques remplies de toutes fortes de ir.archandifes. Cinq ans avant que Belgrade fut afiTure aux Turcs par la paix de 1739, lEmpe-reur Charles VI avoit fait eriger un Eve-che pour les Catholiques de cette ville , fous le titre d'Eveche de Belgrade & de Semendria ; mais l'£vcque oblige d'en fortir en 1739 , ne paroit point avoir eu des fucceffcurs. Ce font les Francif-cains qui defTervent 1'Eglife des Catho-liques a Belgrade. Grotzk« j aux environs de Belgrade, eft Ea Turquie d*Europe. i 5 un lieu cćlćbre par la bataille que les Impćriaux y perdirenc en 1739, contre les Turcs. i. Semendria j capitale da Sangiacat de fon nom, etoit la refidence dcs Def-potcs de Servie. Elle eft fitućc fur la rive mćridionale d u Danube , environ quinze lieues au delfous de Belgrade : fon nom fignifie vilic de S. Andrc. Elle eft: defen-due par une bonne citadelle. PaJJarowit%> luuć aux environs, efl: un lieu cćlćbre par le trake" de paix qui y fut conclu en 1718, entre les AUemands &: les Turcs, 3. Scopia ou Ufcup j qui donne le nora au troifieme Sangiacat, etoit autrefois capitale de la Dardanie. Elle eft fituee fur le Vardar , i 1' extrćtnite mćridiona le de la Servie \ aux frontieres de la Macćdoine. Cette ville eft grande, & a un pont de douze arches fur le Vardar. Elle a un Atchevcque Rafcien. L'Archevcque Latin y fait aulii fa refidence. 11 eft en mcme-tems Arclieveque d'Ochrida , dans la Macedoine. 4. Le Sangiacat de Cratovo , a fa capitale de meme nom , iiruee fur la riviere de Tuplizza. La ville de NiJJa ou 2\7i^a f eft dans fon reffort. Cette der-niere efl forte &c impoitante par fa litua-tion ftu- les frontieres de la Bulgarie, 6C fur la riviere de Nilfava , qui lui donne Tome Vil. B lćT Methode de GeoPfaphte'. fon nom. On y voit pluneurs Mofquees> des bains tk des fontaines. On remarque encore dans la Servie , Pechia , fur les frontieres de l'Albanie : c'eft la refidence du Patriarche des Raf-ciens \ Joni-Bafar ou Novi-Bafar j ville fort commerc.ante fur la Rafca. IX. La Bulgarie. La Bulgarie , qui a plus de cent cin-quante lieues de 1'oueft a l'eft , &c s'ćtend tout le long du Danube , jufqu'a fon em-bouchure dans la Mer Noire, appartient entierement aux Turcs. Elle fe partage en quatre Sangiacats , qui font ceux de \Priddin , de Sophie j de Nicopoli tk de Dijba ou Silijlria. i. Widdin ou Bydon > fur le Danube, au nord-oueft de cette grande Province, eft une affez bonne forterefle , dont les lmperiaux ont tentć , mais inutilement, de fe rendre maitres en 1737. Chiprova-[y au fud de Wi*ddin , eft le Siege d'un Ar-chevcque Grec. Giujlandil eft a l'eft de Chiprovaz. i. Sophie y voifine des ruines de Sar" dica , au fud de Widdin , eft non- feule-ment la capitale de toute la Bulgarie \ mais encore celle de la grande Province de Roumelie , comme l'appellcnt les Turcs, qui comprendla Bulgarie, la La Turquie d'Europe. *7 Romanie & la Griče , a l'exception de la Moree. Le Bacha ou Beglierbei, re-fide i Sophie , & a vingt-quatre Sangia-cars fous lui. Ceft une ville affez grande & bien peuplee ; mais ouvetre de tous cotćs. Ternovo j, autrefois bonne forte-relfe, eft aujourd'hui demolie. Paufaleay au fud de Sophie , vers le mont Argen-taro. Trajanac ou les Porte s de Trajan j a l'eft de Sophie, pour aller de cecce ville i Philippopoli, ville de la Romanie. 3. Nicopoli, grande ville fur le Danube, a vu donner en 15 c^eT , une ba-caille fatale aux Chtetiens , qui furent defaits par les iniidćles, 6c peu s*cn fallut que Sigifmond , aiors Roi de Hongrie , &c depuis Empereur, n'ait ete pris. OJJam eft au fud de Nicopoli , comme Sifio OU Suijlofo 5c Mcrlan font a l'eft. 4. Le Sangiacat, qui eft a l'eft de cette Province, & le plus etendu, eft cehu de . Silijlria 3 du nom de fa ville capitale nommee Dijlra par les Turcs. Cette ville qui eft pres du Danube, eft grande & bien torti lice \ elle fert de refidence a un Ar-chevcque Grec. Axiopoli Tomis y cćlćbre par Texil d'Ovide, & Rifow 3 font a 1'oueft de Siliftria \ mais a l'eft de cette capitale , en approehant de la Mer Noire, on trouve Mefembria , ville maritime. v Vamc , bourg , plus au midi , pres de la Mer Noire, eft fameux par la mal- B ij 2.8 Methode de Ge'ographle. heureufe bataille que les Turcs y gagne-retic en 1444, fur Ladiflas, Roi de Hon-grie , qui y rut ruć. Chiujlaige ou Projla-v/^a j eft encore une bonne ville , fort marchande , a rembouchure la plus me-ridionale du Danube. X. La Romanie. La Romanie ou Rumelie , ainfi nom-mće parce que ce fut le dernier pays que poffćderent les Romains dorient , eft: ce quon appelloit plus anciennemenc la Thrace. Ce fcroit un affez bon pays fi les Turcs avoient plus de foin de ic cul-river. L'air n'y eft pas forr fain , pri 11-cipalement vers la mer , ou il caufe alfez fouvent la pefte. Cette Province eft par-ragće en trois Sangiacats, qui dependent Comme ceux de Bulgarie , du Bacha de Sophie : ce font ceux de Kirkel 3 de Gal-lipoli 5c de Conjlantinople. Les deux pre-miers font moins confiderables que le troifieme. 1. Dans celui de Kirkel > on voit Phi-Itppopoli j nommee aufti Philiba fur la riviere de Mariza > qui en recoir plufieurs autres en cet endroit. La ville eft grande , bien peuplee , conftrućrion de ce batiment, fic grand tort aux fciences 8c a 1'education de fes fujets, parče qu'il y employa les appoin-temens que 1'on donnoit aux Profelleurs de toutes les villes de 1'Empire. Pour fa-tisfaire fa palTion de banr , il n'epargna pas meme la ftatue d'argent de Theo-dofe j qu'Arcadius avoit fait drelTer , &: qui pćfoit 7400 livres. Pour couvrir le dome , Juftinien employa les canaux de plomb qui fervoienc a conduire la plupart des eaux de la ville j & Mahomet ii trou-va fainte Sophie fi belle , qu'il la fit re-parer , &c depuis ce tcmps-la, les Turcs la confervent avec beaucoup de foin. En fortant de fainte Sophie , a 50 ou 40 pas de l'Eglife 3 on voit les Maufo-lees de quelques Princes Ottomans : ce font qtiatre petits batimens affez bas termines en domes } eouverts de plomb & foutenus par des colonnes, pofees fur un plan exa^one. On doit regarder les autres Mofquees royales de Conftantinople , comme des copies de fainte Sophie , tk qui approchent plus ou moins de eet original. Ce font des domes d'une fort belle apparence, ac-compagnćs de plufieurs autres domes plus perirs. Le batiment eft toujours lfole 3 &C enferme dans une grande cour plantće, dans laquelle on trouve des fontaines , des cabinets , & toutes les commoditćs 4« Methode de Geographie. nćceflaires pour l'exercice de la religion mahometane. Quant aux minarets, ceft-a-dire , ces aiguilles menues , ou un Chan-tre motite pour annoncer la priere , il n'eft point de Mofquee royale qui n'en ait au moins deux quelques-unes en ont qua-tre, & meme jufqua fix. De toutes les Mofquees de Conftanti-nople , il n'y en a aucune qui approche plus de fainte Sophie , par la beaute de fon dome, que la Solimanie , fondee parSo-liman II, le plus magnifique de tous les Sultans : on peut dire meme qu'elle fur-parte fainte Sophie par les dehors; car fes arcs-boutans lui fervent d'ornement. Ses fenctres font plus grandes 6c mieux dif-pofees } les galeries qui regnent d'un arc-boutant a fautre , plus regulieres & plus fuperbes : tout 1'edifice eft bati des plus bellesspierresque 1'on ait trouvees dans les ruines de Chalcedoine. L'indifpenfa-ble neceifite ou font les Mufulmans , de faire leurs ablutions , les oblige a conf-rruire de grands cloittes aupres des Mof-quces royales. La fontaine eft toujours placee au milieu, & les endroits pour fe laver, fontaux environs. Celle qui eft dans le cloitre de la Solimanie, fournir dau-tres petites fontaines, La cour , qui la ren-ferme , eft rrćs belle & plantee d'arbres. Le principal dome eft un peu moindre que celui de fainte Sophie j mais il eft La Turquk a"Europe. 4* dans les mčmes proporrions , auffi-bien que les douze petits domes, qui font au-cour. A l'ćgard des minarets , il y en i quatre ; les deux qui font a fentree da pćrilhle, font plus petits que les autres , & n'ont que deux galeries \ ceux qui font atcaches a la Moicjuee , en ont trois, 3c font plus elevćs. La Validee, qui porte le nom de la Sultane Valide fa fondatrice , femme d'I-brahim , & mere de M ihomet IV , eft en-core un bel editice , place fur le port au-pres du S.rrail. Au nord &c au couchanc , cette Mofquee eft bomee par les rruirs de la ville , & au m idi, par le Maufolće &c par le Bazar de la meme Sultane, Elle eft compofee d'un grand dome & de quatre demi-domes , difpofes en croix fur les co-tes. Les intervalles des demi-domes font remplis par quatre autres domes eneore lus petits. En-dedans elle eft revetue de elle faiance \ mais fa colonade eft de marbre avec des chapitaux a la turque. La plupart des eolonnes ont ćte apportćes des ruines de Troie. Les lampes, les luf-tres , les boules d'ivoire 3 les globes de cryftal , font un grand ornement dans le temps des illuminafions 3 qu'on y fait pen-dant la priere. Le peryftile , qui eft fur le devant de la Mofquee , eft couvert de domes , & embelli de eolonnes de marbre blanc , entrcmelees de quelques-unes de s\l Me'thode de Gcogra.ph.ie. marbre gris. Tout l'ouvrage paroir plus delie que celui des autres Mofquees , & n'a rien de gothique , quoiqu'il foit dans le gout ture. Les ceintres des portes &c des fenetres font d'une aiTez.bonne archi-tećbure. Ses deux minarets ont chacun trois galeries bien travaillees. II faut, pour 1'entretien de ces Mof-quees , des fommes fi confiderables , qu'elles confomment le tiers de ce que rapportent les terres de 1'Empire. Le Kis-lar-Aga, ou Chef des Eunuques Noirs , en a la fur-intendance. C'eft lui qui dif-pofe de toutes les charges ecclefiaftiques des Mofquees royales: les principales font a Conftantinople , a Andrinople , a Prufa. On affure que le revenu de fainte Sophie eft de 800 mille livres. Le Grand-Seigneur paye pour le fonds, fur lequel le Serrail efl bati , mille & un afpres par jour. Ces revenus font deftines pour 1'entretien des batimens, pour les gages des Officiers de la Mofquee, pour la nouriture des pau-vres, qui fe prefentent a la porte a cer-taines heures du jour , pour les H6pitaux des environs, pour les ecoliers que Ton ćleve , &c que Ton inftrutt dans la loi de Mahomet, pour foulager les artifans, qui font en neceflite, ik. pour les befoins des pauvres honteux j le refle efl mis dans le trefor de la Mofquće, pour fubvenir aux* accidens imprevus, tels cme font la chutc La Turquie i*Europe. 41 des batimens &c le dommage des incen-dies. Les autres Mofquees royales ne font pas Ci conliderables que les trois dont on vient de parler. On ne fauroit trop admirer le port de Conftantinople. Ceft un baflin de fept ou buit milles de circuit dn cote de la ville , & il en a bien autant du cote des faux-bourgs. Son entree, large d'environ 600 pas, commence a la pointe du Serrail, ou Cap de Saint-Dimitre, fitueau midi: ceft le Cap du Bofphore , ou etoit lancienne ville de Byfance : de-la , en tirant au cou-chant j le port s'ćtend en man'iere d'un de-mi-cercle. L'ouverture de ce Port eft: au levant & regarde Scutari; Galara &: Caf-iun-Pacha , font au ncrd ; eniin ee port fe termine au nord-oueft , par le cul-de-fac des eaux douces y o 11 fe jette le Lycus, compofe de deux ruifleaux. Sur le plus grand eft la papeterie. Le bruit extraordinaire que font les Matelots , penetre meme jufque dans le Serrail j car ce Palais eft a gauche a 1'en-tree du Port, čc occupe la place de Tan-cienne ville de Byfance , fur la pointe de la prefqu'I{le de Thrace, ou eft precife-ment le Bofphore. Le Serrail, qui eft 1'ouvrage de Mahomet II , a pres de trois milles de circuit j ceftuneefpece de triangle , dont le cote tenant a la ville , eft le plus grand y ceiui qui eft mouille par les 44 Me'thode de Ge'ograpkie. eaux du Bofphore, eft a 1'eft \ & rantre, qui forme l'entree du pore eft au nord. Les apparuemens fone fnr la hauteur de la colline, & les jardins fur le bas; iufqu'a la mer. Les murailles de la ville , flan-quees de leurs tours, fe joignant a la poin-te de S. Dimitre , font l'enceinte de ce Palais du cote de la mer. Quelque grande que foit cette enceinte , les dehors du Palais n'ont rien de rate , &c s li faut juger de la beaute des jardins par les cvpres , qu'on y decouvre, on conviendra qu'ils ne font pas mieux entendus que ceux des particuliers. On aftećte de planter dans Je Serrail, des arbres roujours verds, pour derober aux habitans de Galata, & des autres lieux voilins s la vue des Sultanes > qui s'y promenent. Les appartemens du Serrail ont ete faits cndirTćrens temps , & fuivant le caprice des Princes & des Sultanes j ain/i ce fa-meux Palais eft un allemblage de plufieurs corps de logis fans fymetrie 6c fms ordre. On ne doute pas que les appartemens ne foient fpacieux , commodes , & richement meubles. Leurs plus beaux ornemens ne confiftent , ni en^tableaux , ni en fta-rues : ce font des peintures a la turque , parquetcies d'or 6c d'azur, entremele^s de fleurs , de payfages , de culs de lampes, 6c de cartouches , chargees de Sentences arabes, comme dans les maifons des par- La Turquie d'Tlurope* 4 5 ticuliers de Conftantinople. Les baflins de marbre , les bains, les fonraines jaillif-fehtes, font les delices des orientaux , qui les placent aux premiers etages, fans crain-dre de trop charger letu s planchers. S'il y a quelques beaux morceaux dans le Serrail , ce (bnt des pieces que les Ambafta-deurs des Princes y ont fait apporter , eomme des glaces de France 8c de Ve-nife , des tapis de Perfe Se des vafes d'o-tient. L'entree principale du Serrail eft un gros pavillon , avec des croifees ouvertes au-delTus de la porte ; une grande qui eft fur la porte meme , quatre autres plus pe-tites a gauche , fur la meme ligne , &c au-tant de meme grandeur a droite. Cette Porte , dont l'Empire Ottoman a pris le nom , eft fort haute , fimple , ccintiee en demi cercle , avec une infcription arabe fous le ceimre , 6č dcux niches , une de cHaque c6te , creufees dans 1'epaUTeur du mur. EUe reffemble plutot a un corps de-garde qu'A Tentree du Palais d'un des plus grands Princes du monde. Ceft pourtant Mahomet II qui Ta fait batir j 6v pour naarquer que c'eft une maifon royale , le comble du pavillon eft releve de deux tourillons. Cinquante Capigis ou Porriers, font commandes pour la garde de cette Porre j mais Us n'ont ordinatiement pour armes, quune baguetcea.la main. On en- 4<* Methode de Geographie. tre dabord dans une grande Cour, beau-* coup plus longue que large; i droite font les infitmeries, a gauche , les logemens des Azancoglans , c'eft-a-dire , des per-fonnes deftinees aux charges les plus viles du Serrail. La cour des Azancoglans ren-ferme les chantiers pour le bois qui fe brule dans le Palais. On y en mer rous les ans quarante mille voies , & cliaque voie eft; une charetee que deux bufles ont peine a tirer. Tour le monde peut entrer dans la premiere cour du Serrail. Les domeftiques & les efclaves des Bachas 6c des Agas , qui ont affaire a la Cour , y reftent pour at-tendre leurs maitres , & prennent foin de leurs chevauxj mais on y entendroir pour ainfi dire> voler une mouche. Si quelqu'un y rompoit le filence par un ton de voix un peu trop ćlevć , ou qu'il paruc manquer de refpe6t pour la maifon du Prince , il feroit baftonne fur le champ, par les OrH-ciers qui font la ronde. De la premiere cour on paffe a la fe-conde ; fon entree eft aufli gardee par 5 o Capigis. Cetre cour eft quarree , d'envi-ron 300 pas de diametre j mais plus belle & plus agreable que la premiere. Les chemins en font pavćs, & les allćes bien entretenues; tout le refte eft un gazon fort propre , dont la verdure n'eft lnterrom-pue que par des fontaines qui en entre- La Turaulc d'Europe; 4j ttennent la fraicheur. Le trćfor du Grand-Seigneur & la petite ćcurie font a gauche , bn y montre une fontaine ou Ton fai-foit autrefois couper la tete aux Bachas condamnes a mort. Les offices & les cui-fines font a droite, embellies de leurs do-nies , mais fans cheminees. On y allume le feu dans le milieu, & la fumee pafle par des trous perces dans les domes. On apprere guere de gibier j mais outre les 40 mille bceufs que Ton y confomme tous les ans , frais ou fales , les pour-Voyeurs doivent fournir tous les jours 200 moutons , 100 agneaux ou chevreaux, fui-Vant les faifons , 10 veaux , 200 poules, 100 paires de poulets, 100 paires de pi-geons , 50 oifons j c'eft dequoi nourir bien du monde. Autour de la cour regne une galerie aflez balfe, couverte de plomb, & foutenue par des colonnes de marbre. M n'y a que le Grand-Seigneur , qui entre a cheval dans cette cour ^ c'eft pour cela Cjue la petite ecurie s'y trouve j mais il n'y a de place que pour environ 30 chevaux. Les jours que les Ambafladeurs fonc re^us a 1'audience, les JanilTaires, pro-prement vetus, fe rangent a droite, fous la galerie. La falle ou fe tient le Divan, c'eft-a-dire, ou Ton rend la juftice, eft a gauche , au fond de cette cour : i droite eft une porte qui donne entrće dans 1'inte-rieur du Serrail} le pafTage n'en eft permis 4 5 Methode de Ge'ographie. qu'aux perfonnes mandćes. Pour la falle du Confeil ou Divan , elle eft grande \ mais bafle , couverre de plomb , lambrif-fee &r doree aflez fimplement a la moref-que. On n'y voit qu un grand rapis etendu fur Teftrade , ou fe mertent les Ofliciers qui compofent le Confeil. Ceft-la que le Grand-Vifir , afiiile de fes Confeillers, juge fans appel touccs les caufes civiles 8c criminelles : le Caimacan rient fa place en fon abfence, &c Ton y donne a. man-ger aux Ambaffadeurs le jour de leur au~ dience. Voila tout ce qinl eft libre aux etfangetS de voir dans le Serrail : pour penetrer plus avanc, la curiofitć couteroic trop cher. Les dehors du cote du Pore, n'ont rien de remarquable que le Kiofc ou pavillon qui eft vis-a-vis de Galata. Ce pavillon eft foutenu par douze colonnes de mar-bre j il eft lambrilfe , peint a la perfienne ĆV richement meuble. Le Grand-Seigneur y vicnt quelquefois pour a voir le plailir de voir ce qui fe paflTe dans le Port, ou pour s'embarquer lorfqu'il veut fe pro-mener fur le canal. Le pavillon qui eft du cote du Bofpbore, eft plus ćleve que celui du Port , &z il eft bari fur trois areades , qui foutiennent trois falons termines par des domes dote s. Le Prince s'y vient di-vertir avec fes femmes & fes muets. Tous ces quais font couverts d'arcillerie , mais La Turquk a"Europe. 49 kns affuts. La plupart des canons fontbra-ques a fieur-d'eau. Le plus gros , qui eft. celui qui obligea , dit-on , Babvlone a fe fendre au Sultan Amurath , eft par diftinc-tion dans une loge particuliere. Cette ar-tillerie fait grand plailir aux M.ihometans j car on la tire pour avertir quc le carcme eft fini, &: qu'il ne faur plus jeuner. On. « decharge aufii les jours de rejouillance pour les conquetes des Sultans j ou pour celles de leurs Gćnerau::. Quand on eft dans le port , on voit Avvaferai, qui iignifie le Serrail des mi-roirs. Son enceinte n'eft pas gratide, &c la place ou les Turcs s'exercent a tirer de 1'arc, fe trouve derriere fes murailles. 11 y a pres de-la une efpece de tribune , ou les Turcs viennent comme en proceffion , la veille des grandes batailles, prier pour le falut de larmee. On y vient auili quel-quefois pour fupplier le Seigneur de faire celfer la pefte; mais c'eft lorfcm'Jle fait des ravages extraordinaires; c'eft-a dire , lorfqu'il meurt dans la vide, inille ou douze cens perfonnes par jour. £n faifant le tour du cul-de-fac des eaux douces, a la vue de Valide-Serai, & enfuite rangeant la cote de Calfun-Bacha , on trouve d'abord Ayna Serai" ou le Serrail des Coignaftiers , qui eft pres de rArfenal de la marine. Mahomet II fic creufer le port de cet endroit-la , Sc y ba-Tomc Vil. C 5 o Methode de Geographle. rit farfenal & les remifes des galeres: ofl y conftruit aujourdhui les batimens du Grand Seigneur. 11 y a 110 remifes vou-tćes, ou les batimens font a couvert. Les magafins &c les atteliers du Grand-Sei-gneur font bien fournis & bien entrete-nus : tout eft fournis au Capitan Bacha dans ce quartier-la. Les principaux Ofn-ciers de marine y logent, & l'on y voit peu de Chrćriens} ft ce n'eft les forcats &c les efclaves qui font dans le Bagno ; c'eft-a-dire , dans une des plus affreufes prifons, iituee entre Ayna Serai & 1'Arfenal. 11 y a trois cliapelles dans cette prifon , une pour les Chrćriens du Rit Grec , &: deux pour ceux du Rit Latin, L'une de celles-ci ap-partient au Roi de France -y 1'autre efl: a 1'ufage des Venitiens , des Italiens , des Allemands & des Polonois. Les Miflio-naires y confertent, difent la Meffe , ad-miniftrent les Sacremens, font les exhor-tations en pleine libertć , en donnant ce-pendant quelque petite gratification au Commandant du Bagno. C'eft le Capitan Bacha ou Grand-Amiral, qui le nomme : car il eft comme fouverain dans fon de-partement, Sc ne rc-nd compre de fa con-duite qu'au fJrand-Seigneur j ce qui rend fa charge une des plus belles de 1'Empire, Le fauxbourg de Galata eft bati au dela, du port, vis-a-vis le Serrail , dans un quartier qui portoit le nom des figuiers , La Turquie d'Europe. C t ^vte Ton y cultivoit en abondancc. Jufti-nien repara ce fauxbourg , &c lui donna le no m de Juftiniane. On ne fair pas d'oii lui vient le nom de Galata , qu'il prit quelque temps apres la mort de cet En> pereur. Galata forme l'entrće du port du cote du nord, Sc c'eft-la que Ton tendoit la chaine qui le fermoic. Cette chaine pre-noit de ta pointe du Serrail au chateau de Galata , qui fans doure etoit bati fur le Cap oppofe. Ce fauxbourg eft defendu par des murailles alTez bonnes, flanqućes de vieilles tours. Galata eft partage en trois quartiers, depuis CaiTiin-Bacha jufqtia Topana. Les tnuraitles &z les tours qui feparerit ces quartiers fubfiftent encore \ mais Ton a bati des maifons concrc la muraille qui defcend depuis la Tour de Galata a la marine , jufqii'a la Douane } ou il y a une?' Tour ronde. Les Dominicatns ont a Galata une Eglife dediče a S. Pierre \ ils en. font en polfeflion depuis plus de 300 ans. . Les Capucins Francois y ont depuis envi-ron 100 ans , une Eglife fous le nom de S. George j elle appartient aux Genois. Les Grecs ont trois Eglifes dans le quar-tier de Caracui , Še les Armeniens y en ont une , qui s'appelle S. Grćgoire. Les Latins y pofTedent celle de S. Benoit , qui ćtoit aux Bćnedićtins du temps des Cij $ % Methode de GeographU. Genois, mais elie fur donnće aux JefinteS par la Communaute de Pćra. Les Reco-lers ou Zocolanri avoient depuis plus de 200 ans une Eglife dediee a Sainte Marie, avec droic de ParoifTe ; ils fe tiennent a. prefent a Pera , pres de 1'Hofpice des Peres de la Terre-Sainte \ ceux-ci ne rec,oi-venc perfonne dans leur Chapelle , n'etant a Conftantinople que pour les afFaires des fainrs Iieux. On gouce a Galara une efpece de liber-te , qui ne fe trouve gueres ailleurs dans 1'Empire Ottoman. Galata eft comme une ville chretienne au milieu de laTurquie, ou les cabarets font permis , & ou les Turcs meme viennent boire du vin. II y a des auberges pour les Francs, Sc Ton y fait alfez bonne chere. On monte de Galata a Pera j qui en eft comme le fauxbourg , & que Ton a con-fondu autrefois fous le meme nom j mais on diftingue aujourd'hui Pera de Galata, &z Pera n'eft preci fe men t que le faux-bourg fituć au-dela de la porte de cette ville. La fituation de Pćra eft tout-a-fait charmante. On decouvre dela toute la cote d'Afie &c le Serrail du GrandSei-gnenr. Les AmbaiTadeurs de France , d'Angletcrre , de Venife & de Hollande ont leurs Palais dans Pera. Celui du Roi de Hongrie j car 1'Empereur ne lenvoie La Tttrquie d'Europe. J $ proprement que fous ce titre , & ceux de Pologne &: de Ragufe , logent dans Conftantinople. Le Palais de France eft la m a i fon de Conftantinople la plus logeable & la mieux entendue pour des perfonnes elevees en Europe. 11 fut bati par ordre d'Henri IV , dans le temps que M. de Flreves ćtoit Ambaffadeur ; mais on y a fait de beaux appartemens fous M. de Nointel. La Cha-pelle de ce Palais eft deflervie par les Ca-pucins Francois , qui font les Cures de la nation. lis font auffi les maitres des en-fans de langue : c eft ainfi qu'on appelle quelques jeunes gens que le Roi fait ele-ver a Conftantinople, pour y etre inftruits par ces Peres dans les langues Turque , Arabe &č Grecque , afin que dans la fuite ils puiftent fervir d'interpretes aux Con-fuls Franc;ois dans les Echelles du Levant. On defeend de Pćra a Top-hana 3 ou Topana 3 qui eft eneore un autre faux-bourg fur le bord de la mer , au delTus de Peta & de Galata , a 1'entree du canal de la Mer Noire , ou Ton fe rend ordinaire-ment pour s'embarquer , lorfquon veut fe promener fur l'eau. On voit , a 100 Pas de la mer , 1'Arfenal ou 1'on fond l'artillerie \ c'eft une maifon couvene de deux domes , &C qui a donne le nom a tout le quartier. Les Turcs fondent de C iij 54 Me'thodc de Ge'ographie. fore bons canons ; ils emploienr de bonne matiere , & gardenr d'affez juftcs propotrions; mais leur artillerie eft iim-ple & fans ornemens. Le Marelic aux efelaves de 1'un ik de l'autre fexe n'eft pas ioin de la rue d'An-drinople. Ces mnlheureux y font alTisdans une pofture affez eriite. Avant que de les marchander , on les confidere de tous co-tes , on les examine , on leur fait faire l'exercice de toue ce qu'ils ont appris j &c bien fouvent tour ceia fe fait plufieurs fois dans la journće fans conclurc le mar-che. Les hommes &c les femmes aufquel-les la nature a refufe des charmes, font deftines pour les fervices les plus vils j mais les iilles qui ont de la beautć ćV de la jeunclfe , ne font mallieureufes qu'en ce qu'on les oblige ordinairement a fuivre la religion du payc. Le chateau des Sept Tours , fitue au bout de la ville du cote de la Terre-Fer-me 5c de la Mer de Marmara , a pr's fon nom de pareil nombre de Tours que Ion y voit couverres de plomb. C'eft une efpece de chateau , 011 fon met en prifon les perfonnes de diftinćtion j mais on en refufe 1'enrree aux etrangers , depuis quc le Chevalier de Beaujeu , qui y etoir pri-fonnier , trouva le fecret d'en fortir. 11 avoit fait des prifes ii confiderables fur les La Turquie d'Europe. 5 ? Turcs , que le Grand-Seigneur, pour fe vanger de fon ćvafion, fit conper la čete Gouverneur du cluiteau. Autres Vdlcs de la Romanie. Andrinople , nommee Endrene par les Turcs, efl an nord-oueft de Conflantino-ple, fur la riviere de Mariza : elle tire fon no m de l'Empereur Adrien fon fon-dateur. C'eft une ville fort agreable , 011 les Empereurs Turcs font fouvent le ur fejour, d caufe de la bonte de fon air , beaucoup plus pur que celui de Conftan-tinople. Eski-Baba > au fud-eft d'Andri-nople. Morata > Seraio > Copri\a & Ca-purdemo , font au nord de la ville d'An-drinople. Stravično, Sifopoli} Salmydis 3 Stagnara &c Malathia $ fonc fur la Mer Noire. Selybria j Heraclee j avec de bons ports, & Rodofto j fur la Mer de Mar-mara. Stevano > Vajigli > Kircklijfe > Ba-fargk j Cayall y Popiha & Hermanli 3 font au couchant d'Andrinople , comme Abfa , Bil^ier & Chiourli > font a. fon le-vanr. c iv 5 € Methode de Geographie. A R T I C L E II. LA TURQUIE MERIDLONALE, OU l a G r e c e. C A R t e s. Pour cette partle 3 il faut fe fervir de la Carte de Grece de M. delisle j en une feuille. La Grece , autrefois fT fameufe & fi floriflante , pour avoir ćte la patrie de tant d'Iiomraes illuftres, de mane que le centre des Arts , des Sciences & d un puifTant Empire qui s'etendoit jufque fort avant dans TAiie , eft aujourd'hui fi fort dechue &c fi pen čorifiderable, que loin de maitrifer les autres Nations , elle fe voit affervie & captive fous une domina-tion etrangere, fans aucun efpoir de fe reiever. Le pays eft mal peuple , prefque inculce , pauvre , & rampant fous la main des Turcs , aufquels il nppartient, a quel-ques Ifles pres , que les Venitiens y pof-fedenr. Les parries qui la divifent, font i. la Macedoine ou Comenolitari j z. VAlbanie 3. la Llvadle j 6c 4. la Moreč* On peut y La T ur aule a" Europe. 5 7 joindre les Ifles \ mais ncms en parlerons dans un arcicle a pare, qui fera le troific-me de ce Chapitre. i. La Macedolne 011 Comenolitari. C etoit autrefois le plus puilTant &c le plus etendu des Etats de la Grece. 11 eft aujourd'hui divife en trois grandes par-ties , XTomboli> a lorienr, la Veria j a 1'occident, & la Jarma> au midi. 1. Les principales villes du lamboli font, Salonichi j nommee autrefois Thej-faloaioue j fur le Golfe de meme nom , avec un port afTez bon tk afTez frequente. Cette ville eft fort peuplće , la plus mar-chande de toute la Grece , & connue par deux Epltres que S. Paul lui eerivit. Elle a eneore un Archevcque CathoIique. Les Juifs y font en trćs-grand nombre, Sc y font prefque tout le commerce. Les au-tres villes remarquables , font, au nord de Salonichi , Marmara j Ceres j a fon midi, Trkala j & a lorient de cette der-niere ville, Eilippoj autrefois Philippij que quelquesuns mettent dans la RomanJe ou Thrace des anciens } il ne refte plus que des ruines de cette ville , autrefois alfez confidćrable , & qui porte le nom de Philippe , Roi de Macedoine , fon fondateur. Saint Paul en convertit les habitans , & leut eerivit quelques annees apres une Epitre. Elle vit donner fous fes, C v 5 S Methode de Geographie. murailles la bataille ou Brutus čk Caflius furenc dćfaits par Auguite & Mnrc-An-roine. Sur le Golfe de Conceire , on ren-contre la Cavalle ; Contcffe 3 a. \"cm-bouchure de la riviere de Mar mara , &C de 1'autrc c6te de la me me riviere , les raioes &*Btnboli ou Chrvf&polis* Une Prefcju'ifle , qui borne au i ud-e It le Golte de Contelfe, effc cerminee par le M on t Athos j ou Montć Santo 3 nommć aufli Agios Oros. Cetre montažne eft celebre par plufieurs Monafteres , de 1'Ordre de S. Balile. Les Religieux qui y demenrent font au nombre d'environ fix mille. C'tft par mi eux que fe prennent-tous les Evc-ques du Patriarchat de Conftantinople. * Au milieu de la monragne cft une ville nommće K are is 3 ou tous les Samedis il fe tient un marchć. L'entree de cette vitle efl dćTendue aux femmes t il ne leur eft pas meme permis , dit-on , d'appro-cher de la fainte monragne. l.ihanova ou S te lLir 3 aurrefois Stagjre y lieu de la nai(Tance d'Ariltote. Cajjandra 3 a fettre"-mite d une petite Prefqu'ifk, &£ Aioman\ay au nord , fur un Golfe auquel elle don-ne fon nom. 2. Les principales villes de la Veria y font Vardar 3 a lorient &c fuf le Golfe de vSalonichi. Jeni^ar ou Zmhfia y a fon fud-eft : ft l'anaenne Pella 3 refidence des Rois de Maeedoine. Cara-Veria j au La Turauze d'Europe. 59 fud-oueft de Jcnizzar , dc Eclijfo 3 a ton nord - oueft. Daniš la partie orientale , •°rtt j du fud au nord , Xenoxua j Nkee , Cajliria ou Cajioro 3 & Giujlandil 3 ou Ocrida 3 nommee aufli Bokori. Dans la partie fepcencrionale , on trouve en allant doccident en orient, Pajtagnij Jacovi^a3 JcJbvOj Cotnonava 3 Kaplanlih ou la vilic de s 7 igres Kapndih j ou la vilic du P one , Stobi &c Toli j font du nord au fud , au milieu du pays. 3. La Janna 3 qui repond a 1'ancienne ThcJJirfie j eft feparee du Comćnolitari, par une chaine de montagnes , nommee aujourd hui les Monrs Dragonja. Les Monts Oiympe 3 Oj]a &C Pelion avec la vallće de Tetrtpei , fi fameufe dans les Poetes , font partie de ces montagnes. Les villes les plus remarquables de cetre Province font, d'orient en oecident, La-TWa* Ternovo , Trkala 3 & Janna ou Jan-niftd j aurrefois Cajjiope. Farja 3 au midi de Larifte , eft 1'ancienne Pliarfale , ou Jule-Cefar dćfit Pompće. Demetriade & Volo j font fur le Golfe de Volo. Bocca di Lupo j aurrefois les Thtrmopiles eft un palfage de foixante pas de farge , en-tre les montagnes qui fenarenr la Janna de la Livadie. Ceft dans ce paftage que trois cens Lacedćmoniens foutinrent feuls tous les elForrs de Parme« de Xerxes. Cvj 4T© Mćthode de Gćographie. II. V Albanie. Cette Province , que les Turcs nom-rnenc Arnaut, eft fituće le long du Golfe de Venife , dans une etendue de plus de cent licues du nord au fud. Sa largeur n'eft guere que de trente lieues. On la divi fe en ha u te Sc baffe. 1. Les principales villes de la haute Albanie 3 font S čutari j capirale , fur le Lac Zenra y au nord de la Province. Pod-gorica j les Cocci 3 les CUmcnti j Sabiaca^ Cajlrati j tous endroits fitues au nord de Scutari, 8c de la riviere de Drin. Dura^-%o j ville fort marchande, bien peuplće , Sc le grand palfage de Grece en Iralie. Antivari 8c Alejio j fur la mer. La Va-lona j forte place , avec un port. Albano-poli j a vingt lieues de la mer. Croia j que le vaillant Scanderbeg dćfendit fi bien conrre les Turcs , qu'il les obligca de lever le iiiege , eft: aujourd'hui ruinee. JDolcigno j avec un port entre Ale/to 8c Antivari: fes habitans font le mćtier de Corfaires, SpaJJi j Petrella y Elbafano 8c Spatania. 2. La btfjfc Albanie repond a l'ancien Royaume d'Epire. Ses principales villes font Larta ou VA rta j capitale , au nord du Golfe de meme nom : elle s'eft acerue des ruines de l'ancienne Ambracia. Chi-mera j fur la mer, au fud des montagnes La Turquie d'Europe, C i cjui portent le meme nom. Butrinto , vis-a-vis 1'Ifle de Corfou , eft aux Vc"-nitiens , ainfi que la Previja , vilic aflfez forte , fur le detroit du GoUe de Larta. Figalo j autrefois Aclium y fur le meme Detroit, a l'oppolite de la Previ-za j ne montre plus que des ruines: ce fuc prčs de cette ville , qu'0cr,ave Augufte defit Mare-Antoine fon compćtiteur, dans une bataille navale* iii. La Livadie. Cette Province , bornee au nord par la Janna , & au midi fćparee de la Moree , par llfthme de Corinthe, a dans fa partie feptentrionale le fameux Mont Par-nafjc. Ses principales villes font, At'ines ou Setines , anciennement Athcnes : fon territoire abonde en huile & en vin. Quoi-que detruite & defolee , cette ville autrefois (i cćlebre , ne laiffe pas de conferver encore beaucoup de monumens d'antiqui-tes, comme on le voit par Spon, Wheler > &c les autres Vovageurs. Livadia, au centre de la Province , eft une arTez grande ville 4 habitee par des Chretiens , des Juifs &: des Turcs. Le Port de Piree eft a quelque diftance d'Athenes. Megare eft a loueft d'Athenes, fur le Golfe d'Engia. Salone eft a l'extremite , &c peu eloignee de la partie feptentrionale du Golfe de Le-pante. Mais Marathon A aujourd'hui Ma- €i Methode dc Geographie. rafou , eft l'endroit ou Milriade battit Par-mće de DarillS , qm n'avoir pas moins de cent mille hommes j cet endroit eft au nord-eft d'Athenes. Stives, autrefois The-bes j la patrie de Pindare 5c d'Epaminon-das , deux grands hommes chacun dans fon genre : cette ville eft aujourd'hui pref-que ruinee. Caftri* qui eft 1'ancienne Del-pheš j fi fameufe par les Oracles d'Apol-lon , n'eft plus qu un mechant bourg. Le-pante j appellee par les Turcs Enebecl y ville forte , fur un Golfe de mirne no m , eft fameufe par la belle vićloire que D. Juditi d'Autriche remporta dans fon voi-ttnage , fur la flot te des Turcs en 1571. Les Vcnitiens ,.qui s'en etoient emparć , 1'ont rendue en 1699 , par la paix de Car-lowirz , de me me que le Chateau des Pe~ tites Dardanelles y fur le Detroit du menic Golfe. I V. La Moree. C A R T E S. Le Pere coronelliy GeographeItatien3 qui a donneune Defcription de la. Moree en apublie aujji une Carte qui ejl ejlimee. Si on ne peut la trouver , on doic eneore fe fervir pour ce pays de la Carte de la Grece de M. DeZISLZ. La Moree, autrefois nommee le Pelo* La Turquk d1 Europe. 6$ ponnefć j tire fon no in moderne du grand ndnibre de fes miiriers. Ce beau pays avoit ćtć conquis par les Venitiens en 1686 & 1687, & il leur ćtoit refte par la paix de Carlowitz j mais ils l one perdu en 1715. Autrefois la Moree dependoit du Beglierbei de Roumelie , qui fait fa reh> dence a Sopliie j mais depuis long-temps elle faic partie du revenu de la Validc, ou Sultane Mere : elle y a un fermier qui re-coit fes droits, & qui lui en rend un comp-te exačt. Cette Prefqu'lfle fe divife en trois pai-ties : 1. le Belvedcre, a 1'occident; 2. la Satanfc'3 a 1'orient; & 3. le Bra^o dl Mdmđj muli. Ccft clans cette der-niere partie qu'eft le Cap Matapan 3 le plus meridional du coritinent de l'Eu~ rope. 1 .Le Bdvedere a pour villes princi-pales , en commencanc par le nord oueft, le Chateau Sainte-Mark une des Petites Dardanelles du Golfe de Lepante; Patrasy ville archiepifcopale , aifez forte , pres du Golfe de mirne nom : c'eft le lieu ou 1'on a (Ture que 1'Apotre S. Andre foufTric le martyre : elle eft aujourd'hui remplie de Juifs, Bdvedere 3 qui donne le nom a ce quartier , eft au fud-eft de Pa-ras. Chia-ren^a eft fur la mer , aufli bien opArcd-dia , qui donne fon nom a, un Golfe. Zon-chioj Nayarin> Modon > Coron &c Calc,- ^4 Methode de Geographie. mata , font fur la m crne c6te y ou quel- cjues-unes ont des porrs. i. La Sacanie eft a Feft du Bdvedere , ČV a pour endroits principaux , Bafdico t fur une elćvarion , autrerois Sycione3 ce-lebre dans l'ancienne Hiftoire Grecque ; Coranto ou Corinthe j dans l'Ifthme de meme nom, large d'environ deux lieues; mais il ne lui refte que peu de cliofe de fon ancienne fplendeur 5 qui larendoit une des principales & des puiflantes villes de la Grece. On fait que S. Paul a ecrit deux let-tres aux Fideles de cette ville. S.Clement, Pape , leur en ecrivit aufli une tres-belle, qui n'a ete retrouvee que depuis environ un liecle* Argo j autrefois Argos , a quelque diftance du Golfe de Napoli. Napoti diRomani a , ville grande 5c forte , fur un Golfe de meme nom, ou elle a un port tres-fpacieux , mais dont l'encree eft fore etroite. Leontari & Mundi } font a l'oueft de Napoli. 5. Le Bra-tfo di Maina eft au fud de la Sacanie. On y trouve , Napoli di Mal-vafia y nommee aufli Monembajia y pres des tuines d'JSpidaure j ville tres-forte , ifolee par la mer , & qu*un pont j'oint au conrinentj elle a un territoire renomme pour fes excellens vins. Mijitra pres & au nord de laquelle on croit qu'etoit la fameufe Sparte autrement Lacedemone y fait aujourd'hui une trifte figure. Maina.* La Tur aule d'Europe. 65 avec un petit pore, eft: dans le pays des Mainottes. Cajlro Rampano eft a loiieft de Monembafia. A R T I C L E III. LES ISLES DE LA GRECE. JL E s Ifles dependantes de la Grece font nrueeSj les unes a loccident de la Terre ferme, dans la Mer Ionienne ; les autres a Forient, entre la Grece & la Natolie , dans cette partie de la Mer Mediterranee , cjue nous nommons Archipel3 & que les anciens appelloient Mer Egee. De ces der» nieres , les unes appartiennent a 1'Europe , les aurres fe rapportent communćment a. VACie. Nous ne nous ecatterons poinr de cette divifion, adoptee par le plus grand nombre des Gćographes j mais nous par-lerons rout de fuire des unes & des autres dans cet article. Les dernieres , c]ui font pres des cotes de 1'Afie , ont un rapport plus marque a 1'Hiftoire &c aux affaires de 1'Europe , tk en particulier, de la Grece, qua celles de l'Aiie. D'ailleurs , toutes les Ifles de TArchipel, a l'exception d'une feule qui appartient aux Venitiens, font du Gouvernement du Capitan Bacha ou Grand-Amital des Turcs. Methode de Geographie, 1. IJIes de la Mer Ionienne. Les principales Ifies de la Grece } (i-tućes a 1'oueft, dans la Mer Ionienne , fone , du nord au fud : i. Corfou j no m m će anciennement, Corcyra. Elle eft aflTez fertile , paniculie-rement en huiles tres - cxcellentes , en cire , en citrons &c autres fruits. Elle ap-partient aux Venitiens , &c porte le nom de fa capitale , ville forte, affez belle, Ie fićge d'un Archeveque Latin , dont l'E-glife cathćdrale eft magnifique. II eft fon-mis au Patriarche de Venife. Les Grecs y ont une affez belle Eglife , ou ils pretendent avoir le corps de S. Spiridion. II. Sainte - Maure 3 au fud - oueft du Golfe de Larta , appartient auffi aux Venitiens : elle eft plus petite , mais prefque de meme temperature que Corfou. Sa ville capitale eft Sainte-Maure > palfable* ment fortifiće. III. A quelque diftance de cette Ifle eft Theaco} qu'on dit etre Itacha y fort petite , mais connue pour etre le pavs natal & la domination d'Ulylfe > cćlebre dans Homere. IV. Cefalonie > qui porte le nom de fa ville capitale, fituće fur une montagne, avec un port & un Eveche, eft aufli aux Venitiens , & a beaucoup d'huile, de yin , La Turquie a"Europe. Cj de laine , de cire ck de miel. Elle eft a roueft du Golfe de Patras. V. Zanat. Cetre ifle eft fujette a quel-ques tremblemens de rerre. Elle eft fertile en vin, en luiile , ck encore plus en excellens raifins. Sa capitale de meme nom , eft une ville grande ck affez forti-fiee. Son port eft frequentć , ck l'on y fait un tres-bon negoce de fes raifins , connus fous le nom de Corinrhe. Des deux Eve-ques de cette ifle , Pun eft Catholique čk; Pautre eft du Rit Grec. II y a encore fur cette cote occidentale de la Grece, diverfes petires iflesj mais de peti de confequence. 11. IJIes de V Ar ekip el. C a r t e s. M. de ToURNEFORT qui a examlni~ dans fon voyage ce qui regarde l'Ar-eni pel j nefl/me que deux Carte s ; fa-voircelle que M. Berthelot 3 Pro-fefjeur d'Hydrographie a Marfeille j a donnee de la Mer Med/terranee , & la Carte de la Grece de M. Deljsle. II ajfure que toutes les autres Cartes font tres-dijeclucufes. La Carte de M. Deliš le ejl ejfeclivement la feule alt* on pttijfe confulter avec furete : il faut y joindre celle des cdtes de Grece 6* Ar-chipel, que M. d'An ville a donnee en 1756 3 avec un Memoire in 4°, autrefois Cretc , qui a porte le titre de Rovaume. Elle a environ 70 lieues de Poueft a l'eft. L'air en efl: bon , & ne fouffre guere d'animaux venimeux, excepce la phalange, qui eft une efpece de tarantule. Le terroir a plus de montagnes que de plaines j mais il ne laifle pas d'e-tre fertile 5 principalement en huile ex-cellente , en vin de Malvoifie, en fucre , en fel, en mirche , en laurier n'eft remarquable que par fon aloe , dont elle faii un bon com-merce. VII. Lango y Stan-Coj ou Gos y eft; cćlćbre par la nailfance duMedecin Hip-pocrate, du Peintre Appelles, & de cette fille nommee Pamphile , qui inventa la maniere de fe fervirdes vers a foie. Cette Ifle etoit autrefois riche & fertile; mais aujourd'hui elle eft fort dechue &c n'a rien de confiderable, non plus que fa ville de meme nom. VIH. Scarpanto> abonde en vins, en fruits &: en perdrix , qui font fort deli-cates. Autrefois elle avoit quatre villes \ mais ajourd'hui elle n'en a qu"une , qui eft a demi ruinee , & qui porte fon nom. Les habitans de cette Ifle font Chretiens Grccs, comme la plupart des autres. Ta Turquk d'Europe. 7 $ ix. L'Ijle dc Rhodcs. Cette Ifle , plus conlidcrable que les precedences, eft a iix ou fept lieues de la Natolie; elle en a foixante de tour , 15 du fud au nord , čk environ 7 de Teft a l'oueft. L'air y efl: bon ck le ciel fi ferrni, qu'il ne fe pafle point de four que le io-leil n'y paroilfe. Ceft aufli la raifon pour laquelle les anciens la dedierent a cet aflre. 11 y a de fort belles prairies , ck fa terre y produit beaucoup de fiuits , de meme que quelques grains. La gloire la fit atraqucr par les Chevaliets de S. Jean de Jerufalem , čk la jaloidie la leur fit perdre en 1 509. lis en chaflcrent les Sa-rafins , qui 1'avoient enlevec aux Empc-reurs de Conftantinople , 6Ć dcux cens treize ans apres, ils en furent ch.dfcs par Soli man II , Empereur des Turcs, qui en vinr a bout par la trahifon d'Andre d'Amarat, Portugais, Cluncelier de 1'or-dre. Cette Ifle a pour capitale , Rhodcs 3 fituće fur la mer, qui y fait un bon port, defendu par deux groffes tours. Ces tours font baties fur deux rochers, cu fut autrefois dreife le f imcux Colofle de bronze, ui a paffe pour une des fept merveiltes u monde. Cette (norme ftatue du Soleil, haute de foixante dix coudees , čk dont peu de perfonnes pouvoient emhrafftr 1« pouce , avoit les picds po fes fur les poin-Tome VIL D 74 Methode de Ge'ographie, tes de ces deux rochers, en fone cjii'un navire paftbit avec fes voiles deployćes , entre les jambes du Colo/fe. Apres avoir demeure 56 ans debout, ce Cololfe fut renverfć par un tremblement de terre , 8c neuf cens cliameaux furent charges de fon cuivre , quand les Saraftns pri ten t Rhodes en 66 j , ou felon d'autres, 664. Rhodes eft forte & a ete atfiegee trois fois par les Turcs j la premiere par leur Sultan Orroman , en 13 1 o ; mais Amee V , Comtc de Savoie , qui y vint au fecours, la fauva; 8c pour eternifer cette vićtoire, au lieu des aigles , qui ćtoient les armes de fes prćdeceifeurs , il prit la croix d'ar-gent en champ de gueule de la religion de Rhodes , avec ces quatre lettres ini-tlales F. E. R. T. de ces quatre mots la-tins . Fonitudo ejus Rhodum tenuit. Ma-homet II la fit attaquer en 1480; mais le Grand-Mairrc Pierre d'Aubuffon la defendit fi courageufement pendant trois mois , que le Sultan fut contraint de fe retirer , apres avoir perdu la meilleure partie de fes troupes. Enfin Soliman y mic en 1511, le fiege, qu'il auroit leve } comme fes predćcelfeurs , fi dans le temps qu'il fongeoit a la retraite , les avis qu'il reciit ne lui eullent fait prendre d'autres mefures. Andrć d'Amarat, Chancelier de l'Ordre, tachć de ce que Philippe de Villiers de Mle-Adam lui avoit ćte prć- La Turqule d'Europe. 7 5 ferć dans la digni ti dc Grand-Maitre, rćfolut dc fe vangec dia pretendu tort qu'on. lui avoic fait. U ćtoicdu Confeil j il favoic le foible d-1 ta place & en donnoit avis a Soliman , alfez ii?ftruit d'aillcurs p,r un Medecin Juif qu'il tenoit a Rkodes. La trahifon d'Amarac fur a la verite decou-verte , &c il euc la tete coupće \ mais les Turcs s'etant obttines a battre la place , elle fut etifin rendue a Soliman , qui y enrra le jour di Nocl de la meme annće 1-511. C'efl: ainfi que les Chevaliers de 1'ordre de S. Jean de Jerufalem perdirent leur cinciuićme rćiidence , au lieu de la-quelle l 'Empereur Charle - Quint leur donna 1'Ifle de Malche , ou ils demeurenc encore aujourd'lmi. Rhodes clt le fiege d'un Sangiac Ture , qui releve du Capi-tan Pacha ou Beglietbei de la Mer, Cetce ville pafle aujourd'hui pour une place ini-prenable. Trois enceintes de murailles, entourees d'un double fofTe, čv foutemics par une bonne citadelle , en font la prin-cipale defenfe. Le porr eft tres bien de-fendu j mais les vailleaux n'y font pas tou-jours en furete. La ville efl; peuplee de Mahometans & de Juifs , &c les Chrć-ciens ne peuvent habiter que dans le faux-bourg. P A MET HO DE POUR ČTUDIER LA GEOGRAPHIE. L' A S I E. C A R T E S. Nous avons de M. D'ANViLLE 3 une belič Carte d'Afie en Jtx feuilles 3 pubii.ee en trois parties ; la premiere en 17 51 la feconde en 1752. , & la troifieme en 1755. C'ejl la plus detaillee & la plus exacte. On ne peut lui compa-rer que cclle de M. Deli s l e 3 rcctifiee par M. B u a c h E en une feuille. toutes celles qui ont precede , celles meme de MM. šanson ne peuvent fervir qua conflater les connoif fances quon avoit de leur temps fur TAfie j & elles etoient tres-bornees y principalemcnt pour les parties fepten- VAfie. 77 trionales & orkntales. A mefure que nous decrirons les pays nous indiauc-rons les meilleures Cartes partkulkres quon en a donnees. Cependant la Carte de M. n'ANVlLLE eft plus que fuffi-fante pour ietude j metne approjondk j de toute TAJIe. Mais on ne dok pas negliger la Carte de M. Delisle > rečtijiee. II ejl bon de voir les objets raj-fembles avec cxaclitude dans un inoindrc ejpace, X_i'A s i e , qui a etć la premiere habi-tee, a toujours pade pour une des plus confidćrables parries de TUnivers. C'eft elle qui a vu crecr Adam , n:;itre Jefus-Clirift, & operer les principaux myrteres „ de 1'anciehhe & de Ianotivcilc Loi. Ceft d'elle que font venues les religions , les Ioix j les fciences, les arts, & les colo-nies, qui ont peuple rout le refte de la terre. C'eft elle qui a etć le (lege des plus ancien-nes Monarchics, des Aifyriens , des Mć-des , des Babyloniens , des Perfes, & qui renferme eneore aujourd'hui la plus grande partie des Empires des Turcs & de la Ruf-fie, celui du Grand Mogol, & les Etars des Rois ou Empereurs de laChine , de la Perfe & du Japon. Celi elle enfin qni eft la plus grande , de mune que la plus riche partie de notre continent. D iij 7 S Mćthode de Geograpkie. Sicuatlon. Etendue. Bornes. L'Ane eft firuće entre le cinquieme de-gtć de fatitude mćridionale , vers l'extre-niitć de Tlfle de Java, & le foixante-trei-zieme degrć de latitude feptentrionale, ce qui fait cnviron 1550 lleues. Sa longicude, teleta les anciennes cartes, ecoit contenue entre les 5 5 & 1 95 degres \ mais felon les obfervations des Jefuites faites a Siam & a Pekin , elle eft pour les parties meridio-nales, entre les 47 & 160, aprendrede-pnis rextremite de la Natolie jufqu'a celle de la Chine, qui eft ainfi rapprcchee de nous d'environ cinq cens licues. Du cote dunord , les obfervations čk: les operations gćomćtriques des RufTes nous onr appris que l'A(ies'etendoit jufqu'au 206 degrć de longitudej par ou elle avoifine l'Annerique, dont elle fe rrouve feparee pat underroir. II y a une partie des Ifles de 1'Aiie au-dela. de la ligne , jufqu'au i 1 degre de latitude mćridionale ou environ. Les bornes de l'Afie font au feptefi* trion , la Mer Glaciale ou de Tartarie , qui la fepare des Terres arćliques j a forient l'Ocćan oriental, qui la fepare de l'A'meridue ; au midi la Mer des Indes j a loccident , la Mer Rouge če rifthme de Sues qui la feparent de l'Afrique , la Mer Mediterranee avec 1'Archipel, la continuite de la mirne Mer VAfu. 79 jurques au fond de la Mer d'Afof , ou Ton trouve le Don , autrefois Tanais j enfuite la Medvidica , la Sura , le Volga, la Vetluga , & les monragnes , qui joi-gnent a 1'orient les Kamenoi-Poyas, dont la fin aboutit au Dćtroit de Vaigats. Nous avons explique cela plus au long , en don-nant les bornes de TEurope , Tome II3 P*g- M4> *VV Qualhe. m L'air de 1'Afie eft diflferent, felon la diftcrente fituation des pays qifelle con-tienc • mais en general il eft fain &c tempere. La terre y produit du bled , du ris, du vin des fruits tres-excellens , des aro-mates , des plantes , des fimples , des drogues • 8c ce qui lui eft particulier , quantite d'ćpiceries , dont les autres rć-gions ne fauroient fe pafler. Son or , fon argent , fes perles , fes pierreries , fes porcelaines , fes vernis , fes rapis, fes ta-pifteries &ć fes etorTes de foye font les autres richeffes de fes habitans. La peche des perles fe fait principalement pres de 1'lfle de Baharen dans la Mer ou Golfe de Barfora, tk pres le Cap de Comorin , i la pointe de la Prefqu'ifle occidentale de 1'Inde. Ccs perles font fort eftimees, de Rieme que les diamans de Goleonde , dans 1'Inde , les rubis &c la Iaque de Pegu , les tapis de Turquie , les tapifteries de D iv S o Methode de Geographie. Perfe , les etoffes de Bengale , le poivre ćk le gingembte de Malabar , la canelle ćk les elephans de Ceilan , les cloux de girofte a Amboine, la mufeade de Banda, le fatvlal de Timor , le cedre d u Liban , le camphre de Bovn, tou-chanc la communication fouterreine que cette mer fembie avoir avec les aurres. Quelqucs-uns ont eru que la Mer Noire Ctant plus pres d'elle qu'aucune autre , pouroit bien profiter de fon voifmage , Sc recevoir les eaux que celle-ci lui fourni-foit -y mais outre que ce fentiment nefl foutenu d'aucune raifon folide , il y a bien de 1'apparence que la fagelfe de Dieu n a mu entre ces deux mers une longue chaine dc hautes monragnes, que pour les D v ti Mćthode dc Gćogruphie. fćparer entićrcment 1'une de Tantre. C'eft ainfi que raifonne le Pere Avril , fameux Mifiionaire Jćfuite , pour fe dćterrriner a croire que cette mer fe dćcharge plutot dans !e Golte de Perfe , quelque ćloignć qu'il en foit, que dans quelque autre mer que ce puilTe ćtre. Les raifons on conjec-tures de ce Pere font y i. Que dans le Golfe que la Mcr Cafpienne forme au fud-oueft , vis a-vis du Kilan , Province de Perfe , il y a deux gouffres dangereux, dont les vai(teaux perfans tachent de s'e-loigner le plus qu'ils peuvenr. Le bruit de l'eau qui s'y jetre avec une rapiditć fur-prenante , fe rail entendre de fi Ioin , mc-me en temps de calme , qu'il eft capable d'effrayer ceux qui en ignorenr la vćrita-ble caufe. i. Ce qui eft encore plus fort, ceux qui habitent le long du Golfe de Perfe y remarquent tous les ans une gran-de quantitć de feuilles de hule a la fin de l'automne. Or comme cette efpece d'arbre eft entićrement inconnue dans la partie meriiionale de la Perfe qui abou-rit a ce Golfe, & qu'au contraire 1-a par-tie feptentrionale qui touche a la Mer Cafpienne ou du Kilan , en a toutes fes cotes bordćes ; on peut, dit cet Auteur, afTurer avec alfez de vraifemblance , que ces feuilles n'onr ete porrees d'une exrre-mite de la Perfe a Tautre , que par les eaux qui les ont entrainees pai des con- L'AJie. 85 dnits fouterreins. Daufres Autcnrs, com-me Perry , ont cxpliquć le plićnomene , par les evaporations, tju'ils onr aftujćtus au calcul. Les autres Lacs d'Afie fonr motns con-fidćrables : plufieurs cependant mćritent d etre remarqućs, reis que le Lac Aral, a 1'orient de la Mer Cafpienne \ le Lac Baikatj plus au nord , dans la Sibćrie j la Mcr Morte , dans la Paleftine , au midi. Les principaux Meuves de l'Atie , fone VObi j le Jtrtifea & la Lena j qui coulent au nord , en rraverfant la Sibćrie , & fe dćehargent dans la Mer Glaciale ; \A-mur j qui coule vers l'orient, &c fe jetre dans le Golfe de Kamtfchatka j le Hoang> ou la Riviere Jaune , & le Kiang 3 ou la Riviere bleue , qui arrofent laChine , d'oc-cident en orient &: fe jettent dans l'Ocćan oriental: le Gange & l1 Inde 3 qui coulent dans l'lndoftan , du nord au midi j le Ty-gre &c VEuphrate y dont le cours eft aulli du nord au midi , arrofent les parties orientales des Etats du Ture en Afie , & fe jettent dans le Golfe P„ru*que. Nous parlerons plus en dćtail de tous ces ficu-Yes, en dćerivant les pays qu lls arrofent. Etats. Micurs. Religions. Lanaue. L'Afie eft fous la domination de plu-fieurs Princes , dont les plus coniidĆFa-bles font l'Empereur ou Roi de la Chine, D vj S4 Methodc dc GKographie. le Grand Mogol , le Sophi de Perfe „ 1'Empereur du Japon , le Grand Seigneur, ck 1'Empereur de Rullle : les deux der-rciers rendent en Europe. II y a aulli des pays, des Hles > des Villes ck des Forte-relfes , qui font polfedees par des Euro-peens , ćk principalement par les Hollan-dois, qui y font plus puiifans que toutes les autres Nations Europćennes enfemble, lefquelles y ont fait des etabliffemens pour le commerce ,*depuis environ 100 ans. Les Afiatiques , a I'exception des Tar-tares ck de quelques monragnards , ont toujours ere des gens de delices , erfemi-nes ck oififs. lis Tont pour la plupart ou Idolatres ou Mahometans. On y voit neanmoins un alfez bon nombre de Juils , quelques Grecs , des Pretendus Reformes dans les places qui apparriennent aux Hol-landois ou aux Anglois. II y a aufll des Catholiques dans la Cbine , de meme que dans les pays qui font fous la domi-nation des Europćens Catholiques. Les langues generales de l'Afie font, l'Arabe , la Tartare ck la Chinoife : les particulieres ou qui ont moins d'etendue » font la Japonoife , 1'Arm.enienne , fort en ufage pour le commerce dans la Perfe ck dans la Turquie , la Guzarate , la Mala-bare 6k la Malaye , la plus bclle des Indes Orientales. Div'tfion. L'Afie comprend plufieurs Etats Sou-rerains. Les plus connus font fur-tout: Quatre Empires entiers. Partie de deux autres Empires. XXVII Rovaumes principaux. Et fix Dominations etablies par les Eu-ropeens. Enfin outre ces Etats , il y a plufieurs peuples vagabonds. Les IV Empires entiers font: La Perfe , La C hine y Le Mogol > Le Japon. Les deux autres , qui n'y font compris cju'en partie , & dont les fouverains refv-dent en Europe , font cclui De Turquie. Et celui de Rujjie. Les XXVII Royaumcs principaux > dont il y en a XX en Terre ferme , font ceux : D'Temen & de Fartach dans fArabie. De Vifapour 3 de Golconde , de Bifna-gar ou C ama te 3 de Calicut 3 Sc de Cochin dans la Prefqu'ifle de l'Iride au-deca du Gange. XyAva ou Pegu j de Siam , de Cambo-je j de Cochinchine j de Laos & de Tun- fa capi-pitale \ de Sivas , qui rćpond a celui qu'on appelloit d'Amafie ; de Trebifonde j de Konieh ( Cogni ) ou de Caramanie ; de Marafch & cVAdena : ces deux derniers , qui font nouveaux , repondent a peu pres a ce qu'on nommoit ci-devant fi Methode de Geograph'te. PAladulie, a caufe d'un Prince qui en ćtoic maitre vers i 5 \ 6. Les parties des deux Gonvernemens qui fonr comprifes dans la Natolie , font j°. trois Sangiacats fur les cotes , a Toc-cident, qui dependent du Capitan Bacha , on Gouverneur de la Mer : 2°. au fud-eft , le Pays cVltchiil, encre la Caramanie & la Mer Medicerranee , ou. etoit autre-fois la Cilicie. Ce dernier pays eft du Gou-vememenr de 1'Ifle de Chypre , qui n en eft pas eloignee. I. Les Sangiacats des cotes occidcntales qui dependent du Capitan Bacha. Nous avons cru devoir commencer par ces Sangiacats , la defcription de la Nato-lie , parče qu'ils font voilins de l'Europe t &: fur les cotes de TAfie les plus prochus : c'eft ce qui a engage le Grand Seigneur a les mettre fous le Gouvernement du Bacha de la Mer, Ces Sangiacats font au nombre de trois. i. Celili de Kodgeah-ili , ou du Pays conquis par Kodgeah , 1'un des Capitaines d'OfmanouOttoman, fondateurde TEm-pire des Turcs : il eft pres du Dćcroit de Conftantinople , &£ c'eft par-la que Ton pafle en Afie. Is-Nikmid y qui eft fan-ciennne Nicomediš de Bithynie , en eft la capitale , & la rćfidence d'un Bei ou San-giac; c'eft une ville bien peuplće, &c qui La Natolie. 9 $ 4 un bon por t, fur un Golfe qui porte fon nom j c'eft ou eft mort 1'Empereur Conf-tantin. Les environs de cette ville font omes de beaux jardins. Karamufal a un petit port. Au midi font les montagnes de Samanlu > dou 1'on tire le bois pour cbaurTer une partie des bains de Conftan-tinople dans le voifmage eft une fontai-ne purgative. Is-Nik eft 1'ancienne Ni-cee , celebre par la tenue du premier Con-cile general en 315 , contre Arius > &C d'un autre en 787 , contre les Iconoclaf-tes. Elle etoit tres-forte du temps des Emf-pereurs Grecs , ćk tres-peuplee : aujour-d'hui fes murailles font entierement rui-nćes. On voit dans cette ville plufieurs batimens publics , comme Mofquees , Hopitaux , Bains , Sc des Manufaćtures de raiance. Le Lac qui en eft voifin, eft fort poi(foncux , & fe decliarge dans la Mer de Marmara. Sabandgeh eft un gros bourg , presd'un autre Lac. On trouve plus a Tocci-dent Ka%t-keui3 bourg vis-a-vis Conftanti-nople , ou etoit anciennement la ville de Chalcedon^ ou s'eft tenu le 4C Concile general , contre Eutvches, en 45 1. Dans fon voifinage, Uskudarou Sčutari, qui s'appel-loit autrefois Chryfopolis, n'eft pas pro-prement de ce Sangiacat, quoiqu'il v foit enclave \ mais c'eft un apanage impćrial, ou il y a plufieurs b.-lles Mofquees & d'autres ćdifices publics , avec le vienx Serrail j c'eft le pafTage d'Europe en Alie. $4 Me t ho Je de Ge'ographic. Nombre de Bourgs dece Sangiacat, dont les environs font charmans , y attirent bien du monde dans la belle faifon. Les bords du Canal de Conftantinople fonc bien cultives & ornćs de beaux Palais. i. Le Sangiacat de Biga 3 ancienne-ment la Troade , eft moins confiderable : il eft voifin du Canal de Gallipoli ou des Dardanelles , &c fepare du Sangiacat pre-cedent par le Kodavtndikiar* qui depend du Gouvernement d'Anadoli. La vilic de Biga eft peu confiderable , & paroit rćpondre a 1'ancienne Velia. Artaki eft dans la Prefqu'ifle de &\ik , aujourd'hui en rui-nes. Lamfaki j vis-a-vis Gallipoli , eft maintenant peu de chofe. Eski-Stamboul3 ou la vieille Ville , a 1'occident, &c Troia~ ki, font les ruines des difterentes villes de Trave , ou 1'on voit eneore des colon-nes Sc de beaux marbres , quoiqu'une grande partie de ce qui eft a Couftantino-ple en ce genre, en ait ete tire. 3. Le Sangiacat de Soglah eft au midi du precedent, & ne contient que le hord des cores. Ses principaux endroits font I-^mir a\\Smyme3 qui merite une deferip-tion particuliere \ Menmen au nord du Golfc de Smyrne j 8c Odah ou Vourla , au midi. Smyrne. Cette ville , qui etoit autrefois capitale LaNatolie. đe rionie , a un port tres-frequente fur l*Archipel, & palfe pour la plus marchan-de de toutes les Echelles du Levant. Son commerce eft principalement avec les An-glois &£ les Hollandois , & confifte en foye , en coton , en cafte , &c. Ceft la feconde des Eglifes d'Afie , aufquelles l'Evangelifte S. Jean ecnvit. Elle prerend aufti etre le lieu de la naiftance d'Homere , quoique Rhodes , Colophon , Salamis , los , Argos &c Athenes s'attribuent cet honneur. Ceft la plus belle porte par ou Ton puifle entrer dans le Levant j elle eft ba-tie au fond d'un Golfe, capable de con-tenir la plus grande armee navale du monde. Des fept Eglifes de l'Apocalypfe, c'eft la feule qui fubfifte avec honneur j on croit dans le pays , qu'elle doit cet avantage a S. Polycarpe , a qui S. Jean , qui 1'avoit forme dans Tćpiicopat , ecri-vit par ordre du Seigneur : &0.yc\ fidele jujqu'a la mor t & je v o u s donnerai la couronne de vie. Smyrne eft une des plus grandes &c des plus riches viiles du Levant , defcndue par un chateau 5c deux forts nouveliement batis. La bonte de fon port, li necelfaire pour le commerce j Ta con fer v ce & rait rebatir plufieurs fois 3 apres avoir ete rcnverfee par les tremblemens de terre. Ceft comme le tendez-vous des Marchands des quatre $(> Methode de Geographle* parties du Monde , & Tentrepot de toutes les marchandifes qu'elles produifent. On compte quinze mille Turcs dans cette ville , dix mille Grecs , dix-huit cens Juifs , deux cens Armeniens , 6c au-tanc de Francs. Les Turcs y ont dix neuf Mofquees , les Grecs deux Eglifes , les Juifs huit Synagogues , les Armeniens une Egiife , ik les Latins trois Gouvens de Religieux. L'Eveque Latin na que cent ecus romains de renre , celui des Grecs a quinze cens piaftres. Quoique celui des Armeniens ne fublifte que par les aumones de fa nation , il eft le mieux partage des autres Prćlats de cette ville. On ramafte ces aumones les Fctes'& les Dimanches, & on aflTure qu'elles mon-tent a fix ou fept bourfes par an \ c'eft-a-dire , neuf a dix mille livres. La fituation de Smyrne eft admirable. Elle s'ćtend le long de la mer , au pied d'une colline , qui domine le pore. Les rues y font mieux perećes, mieux pavees, & les maifons mieux baties, que dans les autres villes de terre ferme. La rue des Francs, qui eft le plus bel enduoit de Smirne , rćgne le long du pore. On peut dire que c'eft un des plus riehcs maganns du Monde , aufli la ville eft placee com-me au centre du Commerce du Levant, i huit journees de Conftantinoplc par terre, & a 400 milles par eau y a 25 journees d'Alep La Natollt. 97 cVAlep en Svrie par caiavanes ; a fijc journees de Konieh ou Cogni, a fept de Khioutave , &c i fix de Satalie. Le premier Officier qui foir a Smjrne, eft un Sardar , qui commande deux mille Jani ifai res , logćs dans la ville , ou aux environs. La Juftice y eft adminiftree par vin Cadi. La Narion Francoife ctoit com-pofee en 1701 , lorfque M. de Tourne-tort y alla , d environ trente Marchands bien ćtabiis t fans compcer plufieurs au-tres Francois , qui faifoient un commerce moins confiderable. La Narion Angloife y etoit nombreufe, &: leur negoce etoit floriiTant j mais la Nation Hollandoife ji ctoir compofće que de dix-huir ou vingt Marchands bien etablis, & fort eftimes. 11 n'y avoit que deux Genois, qui nego-cioient fous la baniere de France. II y re-fidoic eneore un Conful de Venife, quoi-qu'il n'y euc alors aucun Marchand de cette Nation. Les Caravanes de Perfe ne cefTentd'ar-river a Smyrne , depuis la Touffaint, juf-qu*aux mois de Mai & Juin. On y rranf-porce quelquefois jufqu a deux mille bal-les de foye par an , fans comprendre les drogues Šc les toiles. Les Francois y por-tent de la coehenille , de 1'indigo , de la falfepareille , du bois de BreTil &: de Cam-peche , du verd de gris , des amandes , du tartre , du poivre, de la canelle, du Tome VIL E 5) S Methode de Ge'ographie. girofle , du gingembre &: de la mufcade. Les draps d u Languedoc , les ferges de fieauvais , les cadis de Nifmes , les pin-chinats, les fatins de Florence, le papier, 1 ctain fin , le bon acier & les čmaux de Nevers , y font d'un alfez bon debit. Avant que ce commerce y fut bien eta-bli, les Marchands des autres Nations ap-pelloient les Franc,ois Mercanti di Barret-ti parce qu'i!s fourniflbient , de mcme qu,aujourd'hui , prefque tous les bonnets čk les calotres de laine, lis y portoient aufli de la fa'iance ; mais la plus grande quantite eft envoyee d'Ancone. On efti-me a Smyrnc les peaux de fouines de France , & fur-tout celles du Dauphine , dont on fe fert pour les fourrures. Une fourru-re de vefte s'y vend depuis 80 jufqifa 90 ecus. On me le les plus foncees en cou-leur avec le famour , qui eft la marte-zi-beline } ou la fouine de Mofcovie. On emploie beaucoup plus des peaux de fouines qui viennenc par la Sicile , que de celles de France j mais elles y fonr moins cheres, parce que celles de France paflent fur le pied des fouines d'Armenie čc de Georgie. Ourre les foyes de Pcrfe 5c le lil de chć-vre d'Angouri & de Beihazar , qui font les plus riches marchandifes du Levant, les Marchands Fran^ois ti rent de Smyrne le coton file, ou caragach , le coton en La Natolie. 99 tame , les laines fines , les laines batardes & celles de Metelin , les noix de gales, la čire , la fcamonee , la rhubarbe , Po-pium , Paloe , la cutie, le galbanum , la gomme arabique , la gomme adra-gante y la gomme ammoniaque , le ie-mencontra , Fencens , la zedoaria & des tapis grands &z communs. Tout le com-merce s'y fait par l'entremife des Juifs , & on ne fauroit rien vendre , ni nen ache-ter j qui ne paffe par leurs mains. On a beau les trairer de malheureux , rien ne fe meut que par leur organe. 11 faut leur rendre jultice ; ils ont plus d'habilete que les autres Marchands; ils vivcnt d'ailleurs a Smyrne d'une maniere aflez aifee, fk ils font une depenfe fort honorable j ce qui paroit tres extraordinaire parmi une Nation qui ne s'etudie qua 1 eeonomie. Les Marchands Etrangers vivent entr'eux avec beaucoup de politefle , &c ils ne manquent a aucune vifite de ceremonie , ou de bien-feance. Les Turcs paroiffenr rarement dans la rue des Francs, qui eft de toute la lon-gueur de la ville. II femble, quand on eft dans cette rue , que 1'on foit en pL-ine Chrćtiente5 on n'y parle q'i'ltalien , Fran-c,ois, Anglois, Hollandois Tout le mon-de fe decouvre en fe faluant: on y voit des Capucins, des Jćfuites, des Rćcolets. La Langue Provencale y bril le fur toutes E ij i ca Methode de Geographie. les autres, parce qu'il y a beaucoup plus de Provcnc,aux que d'autres Nations. On chante publiquement dans les Eglifes j on pfalmodie , on preche , on y fait le fer-vice divin fans aucun rrouble. Mais d'un autre c6re , on n'y garde pas a (Tez de me-fures avec les Mahometans j car les ca-barets y font ouverrs a toutes les heures du jour Sc de la nuit j on y joue , on y fait bonne chere , on y danfe a la franc,oife, a la grecque , a la turque. Ce Quartier feroit tres-beau , s ll y avoit un quai fur le port ; mais la mer vient battre jufques derriere les maifons } Sc les bateaux en-trent, pour ainfi dire } dans les magalins. Les cremblemens de terre aufquels cet-te ville eft; fort fujette , y ont caufe en differens temps plufieurs changemens. Vers lan 166Š , la pefte y enleva plus de dix mille perfonnes } Sc les maladies , qui la fuivirent , furent prefque aufti dange-reufes. On pretend, que quand la mer eft calme pendant quelques jours , c'eft un figne fur d'un tremblement de terre; mais on a fouvent eprouvć le contraire. 11 en arriva un (i terrible cn 1687 , que la ville fut entierement renverfce } Sc com-nie on erut que les maifons etoient trop pefantes, Sc qu'elles ne pretoient pas alfez aux fecouifes reiterees , qui trouvant de lbbftacle, les faifoient crouler, on a vou-lu remedier a cet inconvenient, en reba- La Natolie. i o i riiTIint la ville. Les maifons ne font de pierre , que depuis les fondemens jufqu\l la hauteur de dix ou quinze pieds : le ref-te eft: de pieces de bois entrelafices , don t les intervalies font remplis de terre cui-te , enduite de chaux. La precaution a etć bonne; car quoiqu'il foit furvenu depuis des tremblemens, meme plus violens ciie les precedens, il y a eu peu de maifons renverfees. Les Grecs en comptent fix principaux *, 8c c'eft une itadition pat m i eux , qu'un feptieme renverfera 8c detrui-ra entierement la ville , qui ne iera ja-mais rebatie. Com-me cette ville eft fujene a des ma-ladies ćpidemiques , i tiunve 4 Venife aucnn vailTeau venant de Smyrne , «.uie cerec fage Rćpublique ne lui faiTe faire une exaćte quarantaine. On ne prend pas nioins de precautions a Marfeille , fur-tout depuis la pefte rerrible qui a defole U Provence en 1710, 6c qui s'eft com-muniquee par quelques vaifleaux venus du Levant. II. Le Gouvernemenc a" Anadoli > ou de Kutdick* Ce Gouvernement, qui renferme l'A-natolie propre , appellce par les Turcs Anadoli 3 eft le plus confiderable de rotite la Prefqu'ifle, puifqu'il en renferme plus de la moitie, favoir la partie oecidentale : E iij loi Methode de Ge'ographie. ceft-la que TEmpire des Turcs a pris naif- fance. II fe divife en quatorze Sangiacats, que nous ne connoiflions pas avant le Gćogra-phe Ture: nous allons les expliquer en profit an t d'une tradućtion manuferite de la Geographie , qui eft a la Bibliotheque du Roi. i. Le Sangiacat de Kutaieh ou Chiou-taye j eft preicjue au inilieu , &c 1'un des plus etendus. II tire fon nom de fa capi-tale , qui eft la rćliden:e du Bacha de la Province. La ville de Kutaieh , fur le Purfak , qui fe jette dans le Sakari , eft confiderable , 6c a une forterelfe fur la montagne voifine : c'eft Tancienne Co-ty&um de Phrvgie \ fon territoire eft tres-abondant, & iouit d'un bon air. A trois heures de chemin , vers l'occident, font des eaux minerales, qui font rrčs-frequen-tćcs par les malades. Ceft , fans dou-te , pour ces deux raifons que les Anciens avoient nom mi cette partie de la Phry-gte , Phrygia Salutaris. II y a dans ce Sangiacat grand nonibre de bourgs aftez peuples , donr les principaux font Selenti y Kourei ■> Bana?. Mais il faut remarquer vers le midi , la ville de Degni^lu prčs de laquelle eft Eski-hijfar j ou font les ruines de 1'ancienne Laodicee de Phrygie, une des fept Eglifes mentionnees dans l'Apoclypfe. 2. Le Sangiacat de Karahifar ^ ou La Natolie. i o 3 Afiom-Karahlfar j au midi 6V: a iorient du prćcedent, tire fon nom de fa capi-tale, qui eft aifez belle , ćk a plufieurs monumens publics. Les autres endroits font peu confiderables. 3. Le Sangiacat du Pays d'Hamid > au midi, a pour capitale Jsbarteh ou Sparte, petite ville prefque ruinee Sc fans mu-railles , au pied du Mont Taurus. Dans fon fauxbourg , les Chretiens Grecs ont quatre Eglifes. Le terroir eft a u Hi fertile qu'agreable \ il s'y trouve un animal vo-race tres fingulier, done Paul Lucas a fait la defeription. Les principaux bourgs , oii 1'on fabrique des etoffes , ik 011 il y a beaucoup de Teinturiers , font Aglafun , Oufchar Sc Rkerder. 4. Le Sangiacat du Tekiehj dom la ca« pitale eft Anthaliah ou Sataiie j eft pres de la Mer Mediterranee. La ville eft i 1'embouchute du Duden , Sc a un aftez bon port, au fond d'un Golfe qui porte fon nom. II y a un chateau , ou font 400 Janilfaires en garnifon. Kupri-ha^ar ou Karalufar de Tekieh eft une petite ville a 1'orient, pres de laquelle on tire beaucoup d'acier \ on y fait aufti du jus de ci-tron , qui eft tres-eftime. Au midi eft le Cap Cherden ou Chelidoni, retraite ordi-naire des Corfaires qui infeftent ces cotes Sc les voifmes. 5. Le Sangiacat de Mentecheh , qui eft E iv 104 Mćthode de Geographie. a Poučit du precćdent , aidJi pres de Ia mer , repond aux pays qu'on appelloit au-trefois Lycie ćk Carie. Sa capitale eft Mog/ah j qui eft une aflez bonne ville. Mcntechch eft vers l'orient , a denx journees de Degnizlu , dit le Geographe Ture : cependant nous connoiffons un au-tre lieu de meme nom , a l'occident, fur l'Archipel. Macri eft au midi, avec un petit port, fur un Golfe qui porte le nom de Macri. EJJenide j AImali 3 ćk plus au midi Myra 3 autrefois celebre par S. Ni-colas fon Eveque. Boudroun eft a l'occi-dent , dans une petite Prefqu'ifle , fur l'Archipel : on croit que ce bourg eft fur les ruines de l'aneienne ville A'Halicar-najfe 3 ou Artemife , Reine de Carie , butit un monument pour fon mari Mau-fole j d'ou les Maulolees ont pris leur nom. Cette ville a donnć na i (Tance a deux fameux Hiftoriens , Herodote ćk Denys d'HalicarnaflTe. 6. Le Sangiacat de VAidm-ili, ou du Pays d'Aidin , eft au nord du precedent , fur l'Archipel : il tire fon nom d'un des fept Seigneurs Tures qui parrageoient l'Anatolie au commencement de la for-mation de la fouverainete des Ottomans. Sa capitale eft Tireh , ville aflez commer-c,ante , quoique dans les terres , au fud-oueft de Smyrne. Bainder, ville afTez peu-plee, eft entre deux. Au fud-oueft, eft La JVatofie. 105 Ephefe j qui ćtoit aurrefois tres-confiderable j &C n'eft aujourd'hui quun mi fera-ble village , que les Turcs appellent Ala-falouc. C'etoit la capitale de 1'Afie mi-neure fous les Romains : il y avoit un magnifique Temple de Diane , qu'Herof-trate brula , pour fe rendre fameux , &c qui fur rebati enfuite. S. Paul y precha , nous avons une Lettre de lui adreflee aux Ephefiens. L'Eglife d'Ephefe eft la premiere des fept Eglifes d'Alie, marcjuee dans l'Apocalypfe de S. Jean 1'Evangelif-te , qui y faifoit fa relidence. Enfm le troifićme Concile general , aftemble con-tre Neilorius , s'y elt tenu en 431. Sart fancienne Sardts} capitale de Crefus & des autres Rois de Lydie , eft egalement ruinee. Elle eft aufii du nombre des fept Eglifes mentionnees dans l'Apocalyple. AUhfchthcr 3 grande ville au nord-eft y pa-roit etre 1'ancienne Philadelphia j ou etoit eneore une des Eglifes dont par e 1'Apoca-lyple. GhutelhijLartRL aflez rorte , dans un terroir fertile fur le Meinder , qui eft le fameux Meandre des Anciens. Au fud-oueft eft Milct, aujourd'hui peu confiderable j mais autrefois la plus grande ville de Tlonie , celebre par les Colonies qu el-le envoya de tous cotes , par la naiftance de Thales , fameux Philofophe, & par les predicarions de S. Paul. 7. Le Sangiacat duSarufc'han > au nord., E v i o6 Methode de Ge'ographie. & toujours le long des cotes de 1'ArcIu-pel y a pour capitale Magnifa , qui eft fan-cienne Magnefia ad Sypilum > fur le Sara-bat ou Kedous, qui fe nommoit autrefois \Hyllus ou le Pnrygius Fluvius. Ceft une grande ville , ou il y a un ancien chateau : les premiers Princes Ottotnans y ont de-meure d'abord. Fohia a 1'ouelt, pres de la mer • il y en a deux : la nouvelle 8c lancienne. Cetoit autrefois Phocaa, ville grecque cćlebre , dont Marfeille eft une colonie , fondee dans les Gaules environ 600 ans avant l'Ere chrćrienne. Jkh/jjar, halah &C M ar mor a font de gros boury s dans les ter res. , a lorient. On voit a Ak-fiiilar les ruines de i'ancienneThyarire, ou ćtoit une des fept Eglifes de l'Apocalypfe, 8. Le Sangiacat du Karajt , eft voiiin de celui de Bi nommee anciennement Prufa j batie pres du Mont Olvmpe. C^'a etć au conimence-ment de la Monarchie Ottomane , la capitale de TEmpire, Sc elle eft encore re-gardee eomme liine des rrois Villes lm-periales : les deux autres font Andrinople Sc Conftantinople. Burfe eft fur la pente d'une montagne , Sc elle s'ćleve en am-pliitheatre jufqu'au Chateau , qui eft au haut, avec une gami fon. II y a dans cette ville de belles Mofquees , Sc nombre d'autres ćdifices publics ; plulieurs ruif-feaux la traverfenc , Sc l'eau eft diftribuće par toutes les maifons ; elle eft a deux milles de la riviere nommee Nilufer ou Ninujar. On y voit beaucoup de Manu-faćhires , principalement cn fova, donr le pays abonde. Le rerroir eft delicieux , les fruits excellens, Sc en plulieurs endroits il y a des vues charmantes : on y rrouve aufti des eaux minerales. Moudaniah , gros E vj i o8 Muhodc de Geograpkie. bourg, a fix heures de chemin vers le nord , eft le por t de Burfa. Mikalidi > Ou-lubad Sc Edrcaos 3 font de perites villes j & il y a beaucoup de bourgs affez con-lidćrables. Ce Pays Sc les autres voifins de la Mer de Marmara one atfez fouftert du dernier tremblement de 1'annee ij66. 10. Le Sangiacat de Sultan-Eughuj j qui eft a Tonem du prćcćdent } a pour capitale Eskishchtr } gros bourg , dans une belle plaine, fur le Purfak , au nord de Kutai'eh. A peu de diftance , vers 1'orienr, Sc pres du bourg Sid/ga^i ■> font plulieurs eaux minerales , avec des batimens pour les malades qui y viennent. Sughut , au nord-oueft , eft un bourg ou 1'on voit le rombeau d'Orrogrul , pere d'Ofman ou Ottoman , qui a ete le premier Sultan des Turcs d'aujourd'hui, nommćs d'apres lui Ofmanides ou Otromans, 11. Le Sangiacat de Boli 3 au nord du precćdent, Sc le long de la Mer Noire , tire fon nom de la ville de Boli j qui re-pond a 1'ancienne Adrianopoiis de Bithy-nie. Elle eft fituće dans une plaine , fans muraille , entouree de montagnes : il y a plulieurs Mofquees Sc autres edifices pu-blies. On trouve des eaux minćrales, au midi de cette ville. Viranshcher j a To-rient, eft une petite ville , dnns le tcrri-toire de laquelle on recueilie beaucoup de faffran , Sc du miel excedeut. Mou- La Natolie. IO3» dehti eft au midi : on y fait beaucoup daiguilles. Au nord, Sc pres de la Mer Noire , font Erakii Sc Amafreh j connues autrefois fous le nom d'Heracka Sc d'A-majhis j villes grecques. Les habitans de ce Sangiacat font les meilleurs Sc les plus humains des Turcs : c'eft le tćmoignage que leur rend la Geograpbie Turque, 12. Le Sangiacat c\ Ankarah ou An-gouri j a pour capitale cette ville , qui eft l'ancienne Ancyra 3 la principale de ce qu'on appelloit la Galatie } habitee par des Gaulois, a qui S. Paul a preche PE-vangile & a ecrit une Epitre. C'eft une aflez belle ville , qui a deux fortereftes. Le commerce du pays conliftc en poil de chevre Sc en camelots , qui y font plus beaux qu'ailleurs. Dans les environs d'An-gouri, il y ade tresbeaux jardins. Ceft pres de cette ville que Pompee dćfit le fameux Mithridate ,-Ro'i de Pont \ Sc Ta-merlan y gagna une grande bataille con-tre Bajazet, Sultan des Turcs , qui y fut fait prifonnier. 11 y a dans ce pays grand nombre de bourgs Sc de villages \ on y trouve en abondance des fruits, Sc on y diftingue entr'aurres trcnte fix fortes de poires. II y a d'exccllens chevaux , Sc des chameaux. 13. Le Sangiacat de K/a/rkiari ou Kiangari , prend fon nom de fa ville principale j que Pon appelloit autrefois t io Methode de Geographlc, Gangra. Elle eft: iicuće au pied d'une mon-tagne , bien peuplee , ćk a un fort chateau : le Bey denieure dans un ancien Pa-lais imperial. On fait dans ce Pays , qui a beaucoup de bourgs ćk de villages , un grand commerce de poil de chevre j de maroquins ćk de chevau*. 14. Le Sangiacat de Kajlhamouni 3 a pour capitale une ville de ce nom , au nord de la precedente , ćk qui a plufieurs Mofqućes ćk autres edifices publics. Dans fon voifinage eft une mine de cuivre , ou 1'on fabrique une grande quantitć de vafes &c d'uftenciles , qui fe tianfportent de tous cotes. Sinub eft au nord-eft, fur la mer Noire : c'eft 1'ancienne Sinopc , vilic grecque , patrie du philofophc Dio-gene, ćk le lieu de la rćfidence de Mithri-date , qui y confervoit fes trefors. Dans fon voifinage , on trouve d'excellentes poires, ćk il y a auffi une mine de cuivre \ ce qui eft une chofe rare en Afie. III. Le Gouvememcnt de Sivas. II prend fon nom de fa ville capitale , ćk il occupe la partie feptentrionale de la Natolie orientale , vers la Mer Noire -y c'eft-a-dire ce qu'on appelloit ancienne-ment le Pont , ćk la Cappadoce feptentrionale. Les Ecrivains Orientaux lui don-nent fouvent le nom de Roum parce que ce fut le premier pavs des Romains de La Natolie* i r' Conftantinople, avec fArmeiiie , que les Sarafins &c autres leur prirent. On le divife en fept Sangiacats. i. Le Sangiacat de Sivas j dont la ville eft batie fur les ruines de Pancienne Sebajle qui etoit capitale de la Cappa-doce. Elle eft vers les fources du Kizil-irmac , ou la Riviere lalee , qui eft le tameux Halys des anciens : elle a un petit chateau ; Sc le Bacha de la Province v rćiide depuis quelques annćes -t qu'il a abandonne la ville d'Amafieh. Le territoire de Sivas a peu d'arbres , &c le froid-v eft tres-rigoureux : on y recueillc cependant des grains & du coton. Amkabad qui a donne naif-fance a Strabon , fameux Gćographe Grec , &c a Selim lun des plus cćlcbres Empereurs des Turcs. Mer^ijourn eft une petite ville vers le nord , ou il y a encore quelques ćdifices faits du tcms que les chraiens etoient maitres de ce Pays. 11% Methode de. Ge'ographle'. 3. Le Sangiacat de Bou^ok eft aujour-d'hui fe-rt peu confiderable , une partie de fon diftrićt ayant ete annexee a laCarama-nie j & le pays de Kirfheher lui ayant ere donne en qualire de Sangiacat. Bou^ok eft le feul licu de quelque confideration : il y a dans les environs , des campagnes couvertes de fel. 4. Le Sangiacat de Tchiouroum prend fon nom d'une ville bien peuplee , če qui a plufieurs ćdifices publics \ on y voit un Palais , ou le Bacha de la Province vient quelquefois. Eskelib j a Poccident , eft un gros bourg y aufli bien c\\.iOfmandgik , au nord : pres de ce dernier eft un chateau. 5. Le Sangiacat du Dgianik-ili s'etend le long de la Mer Noire. Les principaux bourgs (car il n'y a point de villes) font Bajireh tk Samfoun 3 qui ont des ports , ou il fe fait quelque commerce. Ccil dans cette eontree, appellee anciennement le Pont, que Pon mettoit le Royaume des Amazones, qui a tant exerce les critiques, dont les uns ont nie Pexiftence &c les autres Pont foutenue. La etoit le fleuve Thermo-don j que l'on reconnoit aujourd'hui dans le Termech. 6. Le Sangiacat de Divriki eft peu confiderable : il tire fon nom d'un gros bourg, qui a un chateau &c de beaux jardins. Derindeh 3 fur le Frat ou PEuphrate , eft un autre bourg , qui a un chateau tres- La Natolie. \ i j fore au haut d'un roeher , fendu 6c au travers duqiiel pafte une petite riviere. 7. Le Sangiacat cVArabhir eft voifin , comme le prćcedent, de 1'Armenie, &c d'ailleurs aulu peu confidćrable. Arabhir n'cft qu'un bourg , qui a un chateau , & eft a deux ou trois milles de 1 Euphrate. Zileh j qui eft fur fa rive orientale , de-pend du me me Sangiacat. Ekin eft un au-tre bourg > dont le terrein produit des fruits excellens. IV- Le Gouvernement de Trebifonde. II a beaucoup de montagnes j mais la partie qui eft vers la Mer Noire , eft alTez fernle. LesTurcs le rapportent aflez fou-venc a 1'Armenie , dont il eft cependant feparć par de hautes montagnes. 11 con-tient trois Sangiacats. 1. Le Sangiacat de Trebifonde > ou Tc-rabefoun j comme le nomment les Turcs, renferme cette ville , autrefois connue pour avoir ece fondee par les Grecs 3 bc appellee Trapt^us. Elle a ete capitale d un Empire , fonde par une branehe des Com-nenes de Conftantinople , qui furent dć-pouillćs en 1461 par Mahomet II, Em-percur des Turcs. Cette ville eft eneore alfez belle , & a une double & forte mu-raille j on y voit de beaux edifices. Kera-foun ou Ghucrehfin 3 petite ville fur la Mer Noire , a foueft de Trebifonde ; 114 Mcthode ie Gćographie. c'eft r ancienne Cefarus j d'ou Lucullus apres la defaite de Mithridate , apporra les cerifes en occident. Ri^eh ville a l'orient, aufli fur la Mer Noire , avec un Chateau ; on y fair de belles toiles. a. Le Sangiacat de Ghonich ou Gunia ^ n'a de remarquable que cetre petite ville s qui eft fituee fur la Mer Noire , avec un chateau. Le pays eft fertile. 3. Le Sangiacat de Batoum eft encore moins confidćrable que le prćcćdent. La petite ville de Batoum eft fur le cote me-ridional de la riviere qui porte fon nom , ( anciennement Bathys 3 ) & qui fćpare la Province Turque de la Principaute de Gu-riel, la premiere que Ton trouve de ce cć>:ć en entrant dans la Geotgie Turque , ou le Grand Seigneur s'eft difpenfć d'ćta-blir des Gouvemeur \ mais les Princes chretiens qui y font, dćpendent de lui \ comme on le dira dans la fuite. Au midi &c a l'eft de la Province de Trćbifonde font des montagnes ou il y a des mines dor & de cuivre , connuesdes le temps des Romains , & me me beau-coup avant, fi les Chalybes ou forgerons , qui ćtoient dans ces cantons du temps de Xćnophon , y travailloient des-lors. On les nomme aujourd'hui les Mines de Gu-muchkhana. On a conjećture que celles-la ©u quelques autres voifines pouvoientbien avoir ete cette fameufe toifon d'or que les La Natolie. T t J Argonames alloient chercher en Cokhide > qui occupoit cette Georgie occidentale dont nous venons de parler , &c qu on ap-pelloit La^lque fous les Empereurs Grecs de Conftantinople. En (in Ton peut obfer-ver que les habitans de la Province de Trebifonde portent encore le nom de La%i. . v. Le Gouvernemcnt de Cammanie j ou de Konieh. II eft au milieu des terres de la Natolie, au midi &: a Poccident de celui de Sivas, 8c a 1'orient de PAnadoli. Cette Province Sc une partie du voifinage , etoient occu-pees par la famille de Caraman , qui etoit la plus puifTante des fept Princes Turcs, entre lefquels la Natolie fut partagee au commencement du XIV fićele; mais que les Ottomans fubjuguerent au bout de deux cens ans. Ce Gouvernement con-tient fept Sangiacats. i, Le Sangiacat de Konieh contient la ville que nous appellons ordinairement Cogni j & qui eft Pa ne i en ne J con i u m 3 capitale de la Lvcaonie. Cetoit la refi-dence des Princes Turcs Seljoucides de Roum , que nous avons connus du temps des croifades. Ceft encore une a(Tez bon-r»e ville , avec une forrereffe , ou demeure le Bacha de cette Province. 11 y a de tres-heaux jardins, & quantite de fources for- 116 Methode de Geogmphle. ment un Lac dans fon voifinage. Les habitans pretendenr que le divin Platon eft enterre dans la forterefte : ce ne peut etre tout au plus qu'un de fes difciples. Le territoire eft fertile en coron , en grains , en fruits & en vins. Ladikieh 3 a 1'occi-dent, eft un bourg , qui a plufieurs edi-iices publics : on y reconnoit Pancieune Laodicea eombujla. Au midi eft Laven-dth j dans un terroir fertile. Erekli ■, a. l'orient, repond a VArchelais des anciens j c:eft un gros bourg, divife en n quar-tiers , qui ont chacun leur Mofquee. 2. LeSangiacatd'^/^Ac^ertire fon nom d'un gros bourg , qui paroit avoir fucce-dć a 1'ancienne Antlochiaad Pijidiam. Les autres endroits les plus remarquables , fonr Ifaklu > Doganhifar^ & Ii/goun, bourg affez bien bati , pres duquel font des eaux minerales. 3. Le Sangiacat de Beisheri, bourg a. l'orient d'un Lac , avec un chateau , dans le pays qu'on nommoit aurrerois rifaurie. Kafaklu eft un autre bourg , egalement fur un Lac > aufli-bien que Sidisheheri. 4. Le Sangiacat de Nigdeh prend egalement fon nom d'un bourg, qui a une bon-ne forrerelfe j entourće de trois murailles , baties de pierres trčs-dures: il y a plufieurs Colleges & autres beaux edifices. Le terroir eft charmant Sc tres-fertile. Bour , gros village, ou il y a une grande manu- La Natolie. 117 faćture , avec 300 mortiers : on y fait la poudre pour les armees du Grand Sei-geur. Le falperre fe tire d'un grand &C ancien Chateau voifin j nom me Kelihijfar3 des pierres duquel a ete bati le chateau de la ville de Konieh , qui en eft a. quatre ou cinq journćes. Nousheher , au nord , eft 1'ancienne Ny£a dont etoit Evcque S. Gregoire de Nyife frere de S. Balile ; 8c au midi , etoit Na^ian^us 3 celebre par S. Gregoire de Nazianze s le plus elo-quent des Peres Grecs , &c lami de S. Bafile. 5. Le Sangiacat ččAkferai n'a de re-marquable qu'un gros bourg qui porte ce nom , & ou fe voit un chateau : il eft en-Vironne de jardins. Le terroir abonde en grains & en fruits. 6. Le Sangiacat de Kirskeher tire fon nom d'un bourg , qui a aufli un chateau. On trouve dans fon territoire beaucoupde fel. 7. Le Sangiacat de Kaifarich j ville fortifiee , au pied du mont Ardgeh avec une petite fortereife. Ceft 1'ancienne Ce-faree de Cappadoce , dont S. Bafile etoit Archeveque. On y fait un grand com-merce de maroquins jaunes. Plufieurs bourgs & villages en dependent. v i. Le Gouverncment de Marafch. U rćpond enpartie a ce qu'on nommoit 11S Methode de Gc'ographie. autrefois la petite Armenie , feparće de la grande par 1'Euphrate , efl: fituee dans une belle plaine , a 1'occident de 1'Euphrate. On y voit plufieurs Mofqućes & autres ćdifices, mais les murailles font ruinees. Elle eft environee de jardins , ou la plupart des habitans vont palfer 1'ere. C eft un grand palfage , de Conftantinople enPerfe. Le terroir produit fur-tout des pommes d'un gout exquis , par rapport auxquelles on fait une chofe finguliere. Quand elles font pres d etre mures, on applique deffus un papier dćcoupe d'une certaine fa^on : ce que ce papier couvre refte jaune , & ce cp'il Iaiife decouvert devient tres-rouge par 1'ardeur du foleil, & il femble enfuite qu on ait ecrit delTus en encre rouge quel-que fenrence. 11 y a dans ce pays plufieurs rorterefles , dont une des principales eft -Arakloudiah 3 fur 1'Euphrate : c'eft 1'an-cienne Claudias ou Claudiopolis. 4. Le Sangiacat de Semifat j petite ville fur 1'Euphrate, & 1'ancienne Samofate , capirale du petit Royaume de Comagene y fonde par une branche des Antiochus , Rois de Syrie. Cette ville a donne naif-fance a Lucien , litterateur Grec , & a Therefiarque Paul de Samofate. Ce Sangiacat n'arien autre chofe de remarquable. 5. Le Sangiacat d'Aintab , qui eft au tnidi du prćcedent , a ete tire du pays de 'tlo Methode de Ge'ographie. Sham ou de la Syrie. La ville \&Aintab eft aftez belle , a une forterelfe creufće dans le roc , ćk eft a trois journćes au nord d'Alep , aujourd'hui la plus confidćrable ville de Syrie. Le terroir eft fertile en fruits , ćk il y a des pommes qui pefent jufqu'a deux livres ćk demie. Ses bourgs ćk villages font aflez peuplćs. VII. Le Gouvernement d'Adana, Ce petit Gouvernement renferme une partie de ce qu'on appelloit autrefois la Olicie , ćk il eft a l'occident des deux Sangiacats dont on vient de parler. II n'en conticnt que deux , favoir ceux A'A dana ćk de TarJ'ou s3- car laCilicie occidentale eft renfermće le pays ftltchid, qui dćpend du Gouvernement de l'Ifle de Cypre. \. Le Sangiacat d'Adana a pour capitale la ville de ce nom , qui eft a quatre milles de la Mer Mediterranee. Comme l'air y eft tres mauvais , les habitans palFent une grande partie de 1'annee i la campagne. A'uv^erbeh ou Ana^arb ancienne ville h"cuće fur une montagne , avec un chateau. Tel-Hamdoun eft ceinte d'une mu-raille , avec une forrerefte. Mejfis ou Mafiffah j ville divifee par le Dgeihan, en deux parries , jointes par un pont: c'eft l'ancienne Alopfuejle. Le terroir de ces deux villes eft tres-ferrile. Aias y fort ćk pore frequente , fur la Medite rranee , au fond La Natolie. 111 fond d'un Golfe qui porte fon nom. Pala s j place forte avec un port , fur la route de Syrie , pres du paflage connu autrefois fous le nom de Pas d'Iffus. Ce fut dans le voilinage qu'Alexandre rem-porca une grande vi&oire fur les Perfes. i. Le Sangiacat de Tarfous 3 qui eft a 1'oueft du prčcedent, a pour capitale Tarfous 3 ancienne ville , qui n'a point chan-ge de nom , &c qui a encore une enceinte de deux murailles de pierre. Elle eft ce-lebre pour avoir donne naiffance a l'Ap6-lxe S. Paul. Les autres endroits n ont rien de remarquable. VIII. LePaysd'ItchiiL Ce Pays , qui eft a 1'oueft du Gouvernement precedenr, ĆV: aufli le long de la mer , depend du Gouvernement de 1'lfle de Chypre , qui eft vis a vis, environ a quinze lieues. Ceft ce quon appelloit autrefois la Cilicie trachee 3 afpre ou mon-tagneufe. Les Turcs 1'ont nommee Itchiil3 qui fignitie Payš interieur , paree qu'il formoit aurrefois la partie la plus avancee de la Caratnanie. 11 eft divife en deux Sangiacats, qui font 1'un & 1'autre pres de la mer. i. Le Sangiacat de 1'Itchiil propre ou de Selefkeh 3 tire fon dernier nom d'un gros bourg , bien peuplć , qui eft a cleux milles de la mer : ceft 1'ancienneSeteucia Tome VIL F j it Methode de Geographić. Trackta. On trouve Anemur 3 a. Pocci-dent , au bout d'une Prelepa ifle \ Erne* mak & Moud 3 au nord. Ce font aufli des bourgs confidćrables. Touc le pays eft hćriltc de montagnes , fut lefquelles il y a plulieurs forts. i. Le Sangiacat &Alan:ch eft a 1'occi-denr> &c pr js du Pays de Satalie , ou du Tekieh , qui eft du Gouvernement d'Ana-doli ou de la Natolie propre. La ville d'Aianieh eft pres de la mer , &c a une forte cicadelle. Avabeacari eft un gros bourg , a dix milles au nord-eft. II y a d'alTez beaui ćdilices, ćk le Sangiac de ce petit Pays y refide actuellement. IX. L'FJIe de ChyFre. Ceft une erande lile de la Mer Medi-terranće , dans la panie orienrale qu'on appelle la Mer du Levant, pres des cotes de Natolie ek de Svrie , dont elle eft eloi-gnće d'environ quinze Iieues. Sa Iongueur dorient en occident eft d'environ 70 Iieues; fa largeur , du fud au nord , n'en a que 15 , & fon circuit en conrient 150. Elle fut autrefois confacree a Venus, que les Poetes font nanre dans cecte Ifle. Dans les anciens temps elle formoit feule un Royaume , qui apres la dekadence de 1'Empire Romain pafta fous la domina-lion des Grecs; & enfuire dans la Mai-icn de Lufignan. Cette Maifon le pofleda La Natolie. 115 done les Ducs de Savoie font heritiers j čV: ceft pour cette raifon qu'ils> prennent eneore aujourd'hui la qualite de Rois de Chypre. Mais Jacques , batard Sz ufurpateur , fe maria avec Catherine , fille de Marc Cornaro, Venitien, qae le Senat de Venife adopta en lui conftituant une dot. Cathe-rine reftee veuve enceinte , aceoneha d'im fils , qui ne vecut que deux ans : ce qui la porta a remettre le Royaume aux Vcni-tiens , du vivant meme de Charlote , qui rćelama; mais inutilement. La Republi-que de Venife pofteda Chypre jufqu'en 1^71, qne les Turcs s'en rendirent entie-Tement les maitres fous Selim II. L'air de cette lile eft fort mahfain ; mais le terroir y eft tres fertile de lui-me-■me , &c produiroit en abondance toutes les chofes nćceffaires a la vie , s'il etoit un peu mieux cultive. Les vins y font ex-cellens , & les fruits tres delicieux. On y trouve aufti ejuamite de francolins , do mčme que d'autre gibier j & enfin il n'y manque qu'un peu plus d'eau douce 3 done il n'y a qu'une feule fource dans toute rifle. Cette fource eft fur le bord de la F ij j 2.4 Mćthodc de Geographie. mer j mais cette proximite ne 1'empcclic pas de conferver toute fa douceur. L'Ifle de Chypre fe divifoit aucrefois en quatre parties, qui portoient le nom des quatre rćgions du monde : aujour-d'hui les Turcs la divifent en fept San-giacats, dc les Gćographcs en onze terri-toires , dont il y en a fix vers le midi , &c cinq vers le feptentrion. Les premiers ion t ceux de Bajfo 3 $ Audimo , de Zi-mijjo j de Mafoto 3 de Saline & de Mefa-rea. Les autres font ceux de Crofoco 3 de Pendaia 3 de Ccrincs 3 de Carpajjb & del }rifcontado. La capitale eft Leucojia ou Nicojie , vers le centre de 1'Iile. Ceft une ville af-fez grande čk affez forre , la refidence du Bacha , & le fiege d'un Archevcque Grec. Les Turcs la prirent en i 57c apres un fiege de quarante-deux jours : ils la nom« rnenr Lcfcocha. L'ancienne Eglife , qu'ils ont convertie en Mofquće , eft tres-belle , &c on la compare a Sainte Sophie de Conf-tantinople. Famagoujle 3 au fud-eft , ou Mancojla j coni me les Turcs 1'appelient, palfe pour la feconde ville , čk 1'un des meilleurs ports de Chypre. Elle eft alfe z forte, &c fait prefque tout le commerce de T Me : cette ville a topo pas de circuit Les Genois la prirent environ 1'an 1571, $c la garderent pres de cent ans. Les ta Natolle. i 1 $ nitiens en furent depuis les mairres jui-ejii'en Parnice 1571, que Sćlim II, Em-pereur des Turcs , la prit par compoli-tion , malgi'e la refiftancc exrraordinaire des adićges pendant pllis de dix mois ; mais les Turcs ne s'en rendirenr maitres qu'apres avoir perdu 80000 hommes de-vant cetre place. Conjlanee } on U Porto di Coftan^a 3 autrefois Salamlne. done S. Epiphane fur Evčque , ne momre plus que des ruines. Ccrines j qui eft au no rd, pres la mer , eft une aiTez grande place. Lemcca , au midi, etoic autrefois conllde-rable , mais n'eft plus qu'un village a un auart de lieue de la mer. 11 y a cepen-dant des Negocians alTez riches ; & ceft un des endroits de Chypre ou il fe faic plus de commerce : il y a dans fon voifi-nage de bonnes falines. Bajj-o^ Tancienne Papkos j eft au couchant , pareillement pres de la mer. On trouve aux environs des grenars 6c d u eryftal de roehe , qu'ou appelle les diamans de Chypre. ii6 Methode de Geograpkle. A R T 1 C L E II. L A S TRIE , ou LE S HAM. 1" ,A Syrie, que les Orientaux appellent fouvent le Sham , eft eomine divifee en deux parties ; la plus feprentrionale con-ferve le nom de Syrie , šc la meridionale s'appelle la Paleftine , ou la Terie Sainte. Les Anciens mettoient entre deux , la Phenicie. C A R T E S. Pour la totalne j 11 faut encore faire ufagc de la fixieme Carte de T Europe de Mt jd'AnviLLE.En ijć^M.DelrJle^ i A/Z tronom e j a publie che% Lattre, une Carte poji hume de Guill. DELISLE j fon fre-re j fur une partie de la Syrie j qui eji tres-detaillee. La Syrie comprend tour ce qui eft depuis la Natolie au nord , PEuphrate & les Dćferrs d'Arabie a 1'onenr, la Mer Me-ditcrranee a 1'occident , jufqu'a PEgypte & PArabie Petrće , qui fonr au midi. Elle eft aujourd'hui divifee en lix Bachaliks ou Gouvernemens, qui font ceux &Alepy de Tripoli > de Sej de j de Damas j de La Syrk. 127 firufakm 3 & d'Adgloun ou Ageloun : ce detnier renferme le Pays a Forient dn Jourdain , fimeufe nviere qu'on appellc aujourd'hui Arden. Toute cette Region feroic, coni me autrefois, un beau & bon pays, s'il etoit mieux cultive , & moins infefte par les Arabes. L Le Couverncment d* A lep. Lorfque les Turcs s'emparercnt de la Syrie fur les Sulcans d'Egypre en 1517, ils ćrigerent dam le Gouvernement d'A-lep fepe Sangiacats, done deux qui ecoienc proprement dans la pareie voifine de Natolie , fone enfuite devenus des Gouver-nemens : ce fonc ceux de Marash ik d'A-dena. Quelquesuns des autres one ćtć ćri-ges en Sangiacats indćpendans , cels que Marrth ou Marra 3 au fud d'Alep , & EUBir ou Blredgik j fur la rive orientale de PEuphrate. D'autres enhn ont ete don-nćs en apanage , favoir Membig &č Kelis. Le Sangiacat d'Alep j qui refte fotimis au Bacha , renferme la plus grande partie de la Syrie feprentrionale , les autres Sangiacats etant fon peu etendus. La ville d'Alep eft au milieu des cerres fur la riviere de Kocic : ceft Pancienne Berrhaa. Elle eft belle , trćs commercan-te, & divifce en 74 Quarriers. Comme c'eft apres Conftantinople la plus grande ville de la Turquie d'Afie , elle merice F iv i 2 8 Methode de Geographle. bien une defeription particuliere : nous iS. dounerons apres avoir parle des autres villes de ce Gouvernement. La vilic d'Antakia eft Antioche , autrefois la capitale de la Syrie , fur 1'Afti , qu'on nommoit anciennement Orontes. Lile eft prefejue toute en ruines : la Cone Otromane y fait travailler depuis quel-queis annees pour la rćrablir. Son terri-toire eft allez ferrile , Sc il y a dans fon voifinage fept fources d'eaux minerales: Ceft dans cette ville que les Difciples da Seigneur ont commence a prendre le nom de Chreticns. Bagras eft un gros bourg , avec un fott chateau. Scanderona ou Ale-xandrette 3 eft le port d\4lep 3 quoiqu'il en foit eloigne de 30 lieues : il y aborde cpntinuellement des vaiiTeaux marchands d'Europe , & Ton fe fert des pigeons pour porter des lertres A Alep , &c avertir promptement de la qualitć & de la quan-tite des marchancHfes arrivees. Le bourg eft fi m al fain , qu'il eft peu habite : il y a cependant des Confuls des differens Etats de l Europe , tk des Commiflionnai-res d'Alep. Au nord d'Alep eft Ki/is , petite ville , avec un Sangiacar. Aintab , qui n'en eft pas eloignće , a ete foumife , comme nous 1'avons dit , au Gouvernement de Marafch .j en Natolie. Bom- Kala , ou le Chateau des Grecs t eft pres de 1'Euphra- La S vrle, 119 te , ainfi quEI-Bir ou Bcredgik 3 ou eft un Sangiacat, qui n'eft plus dependanc d'Alep , mais quia un Commandant parri-culier. Membts eft une pecite ville , aulli avec Sangiacat, qui avec celui de Rilis j eft un apanage de la Sultane Validć , ou l'lmpćratrice-mere. Akp. Cette Ville eft batie fur quatre collincs. Le Chateau eft fur la plus haute , qui fait le milieu d'Alep , &r qui , en quelqucs endroits, eft foutenue par des voutes pour empceher que la terre ne s'eboule. Ce Chateau peut avoir cinq ou fix cen s pas de rour j fes murailles &: fes tours , quoiquc de pierres de taille , font d'ađez peu dc defeiife. On ne peut y entrer que par une porte , qui eft du c6tć du midi > fans pont-levis, eV l'on s'y rend fur quelques ar-cades , qui traverfent le folfe , profond d'environ fix ou fept toifes. 11 n'y a guere que la moitić ou l'eau fe puilfe arreter , eneore eft-ee une cau cfoupie , qui ne coule point; le refte d u foile eft fec. On tient d'ordinaire une forte garnifon dans cette place , ou il vienc de l'eau par un canal , des fontaiiies de la Ville. 11 n'y palfe point de grande riviere : il n'y en a qu'une petite , qui coule au dehors , &C qu'on appelle le Koeik. Quoiqu'eile ne puille palfer que POUI un nulfcau , on ne F v I 30 Methode de Gcographie. lailTe pas den tirer de grandes utilites , parče qu'elle ferc a arrofer tous les jardins, ou il croit des fruits en abondance , Sc particulierement des piftaches plus grof-fes, &č d'un gout plus relevć que celles qui viennent de Calbin , en Perfe , & qui fonr renommees dans toute 1'Aiie. A u defaut d'une riviere , il y a dans Alep beaucoup de fontaines cV de refer-voirs d eaux , qu'on fait venir de deux lieues de la. Cette Ville a plus de trois milles de circuit , dont plus de la moitie eft fans folTe ; Sc ceux quon y voit ont a peine trois roifes de profondeur. Les mu-railles font alfez bonnes, & toutes de pier-resde talile, avecpluiieursrours quarrees, eloignees les unes des autres de foixante &C dix 011 quatre vingt pas, entre lefquelles il y en a de plus pentes : mais ces murail-Jes ne font pas egales par-tout , &c il y a des endroits ou leur hauteur n'excede pas quatre toifes. Les rues font toutes pavees, a Tcxceprion de celles des Bazars , qui font des rues ou les Marchands 8c les Artifans tiennent leurs boutiques. Les habitans , qui y font en plus grand nombre , font les ouvriers en foie , & ceux qui font le camelot de poil de chevre. On entre dans la Ville par dix portes , qui n'onr ni loffes , ni pont leviš. 11 y a fons l une de ces portes un lieu , que les Turcs ont en gtande veneration. lis y La $yrie. i ? I tienncnt des lampes aiiumees, & dilem que le Prophete Elifee y a demeure qnel~ que remns. Les Edilices , tanc publics , Oue particuliers , ne ione beaux que par-dedans. Leurs murailles ione revctues de marbre de diftćrenres coukurs , &. les lanjbris enrichis de feuillages & d'ćtriru-res en or. Les Fa«xbourgš d'Alep font grands tte peuplćs , •:: prefque tous les Cfcretiens y one leurs maifons &c leurs Eglifes. II y a dans cette Ville quatre fortes de ChretiensLev .itins , des Grecs , des Ar-meniens, des Jacobices ou Syriens , &c des Maronites. Les Grccs fonc environau nombre de quinze ou fcize mille : ils one lin Archevcque , & leur Eglife eft dćdiće a S. George. Les Armeniens , dontTEgli-fe eft dćdiće a la fainte Vierge , fone a peu pres douzemille , & oncun Lveque, qu lis appellenc Vertabie.c L'Egl i fe des Jacobices eft aufti dćdiće a la fainee Vierge > &c gou-vernće par un Eveque de leur communion. Us font cnviron dix mille. Les Maro-nires ne paiTent pas douze cens. Ceux-ci, done le Patriarche demeure dans le Gou-vernemen;de Tri poli, font um s au Pape, & leur Eglife eft fous le citre de S. Elie. Les Catholicjues Romains ont troi; Eglifes , fervies par les Capucins , les Jefui-tes, 6V les Carmes DechauiTes. Quant aux Mofqućes, il y en a environ F vj 132 Methodc de Ceographle. cent viflgt , rant dedans , que dehors la Ville ; on en voit lix on iept alTez fuper-bes , avec de beaux Domes , 8c trois cott-vertes de plomb. La principale , qui eft la plus grande de toutes , etoit nne Egliie de Chretiens, qu'on appelloit Alhha , c'eft-a-dire , Ouie : on croit qu'elle a ćte batie pat fainte Helene, mere de 1'Empereur Conftantin. II y en a une dans un fauxbourg, qui ćtoit autrefois une Eglife de Chretiens, & Ton y voit, dit-on , une chofe remar-quable. Ceft une pierre de deux a trois pieds en quarre , qui eft dans le mur , au c6te droit de la porte. Dans cette pierre eft une figure tres bien faite d'un Calice &c d'une Hoftie au-deffus, avec un croiffant, qui couvre 1'Hoftie, & done les deux poin-tes defeendent fur les bords du Calice. Plufieurs Confuls ont voulu l'acheter , 8C quelques-uns en ont orfert jufqu'a deux mille ecus j mais les Bachas d'Alep n'ont jamais voulu la vendre. On compte dans la Ville &: dans les fauxbourgs environ deux cens cinquante mille ames , quarante carvanferas 3 Sc cinauanre bains publics. II y a deux ou trois Colleges , mais, peu d'ecoliers , quoiqu on ait gage des gens de lettres pour y enfeigner la Grammaire , une efpece de Philoiophie , & les chofes qui concernent la Religion j qui font les fciences aux-queiles les Turcs s'appli^ucnt le plus. La La Sjric. i 3 3 vilic eft gouvernee par un Beglierbei * ou Bacha , qui commande toute la Province , depuis Alexandrette }u(qil'a PEuphra-re. Sa garde eft pour 1'ordinaire de trois cens hornmes. II y a aufli un Aga , qui a fous lui fepc cens Janiifaires. Ce dernier eft maitre des portes de la Ville , dont on lui apporte les clefs tous les loirs , St il ne releve point du Bacha. Le Chateau eft aulli fous un autre Com-mandantj qui eft envoye immediatement de Conftancinople , & qui a fous lui deux cens moufquetaires , &c rout le canon en fon pouvoir. II y en a vingt-cinq ou trente, dont huit grofles pieces ; les autres font fort petites. II y a encore un Aga ou Capi-taine de la Ville , qui commande trois cens Arquebuiiers, fans parlcr d'un fous-Bani , qui eft comme un Chevalier du Guet, qui fait la ronde la nuit avec fes OfHciers dans la Ville & dans les fauxbourgs: cTeit lui qui fait executer la Sentence du Bacha, quand il a condamne quelqu'un a morr. Quant au civil Sc a la police , il y a un Cadi , ou Prefidenc , fans Alfe (Te ur : il juge feul toutes les caufes civiles & crimi-nelles; il fait & il diflout tous les conrrats de m ari age : c'eft lui qui crće tous les Mai-tres Jures de chaque metier ; Sc tous les aćtes dachats &c de ventes fe paiTent en fa prefence. La recette des droits du Grand Seigneur eft fiite par un Tefterdar, ou i $ 4 Methode de Geographie. Trćforier general , qui a fous lui des Re-ceveurs p:\rticuliers en divers depano mens. La R. Iigion regarde le Moufci, qui eft le Chefj 6c i'Interprete dela Loi, tanc en ce Cjui concorne les cerčmonies , que les ca u fes civiles 5 qui pouroient y furve-nir. II y a encore entre les gens de Loi un Chielce , ou Dočteur ordonne pour inftruire Ls nouveaux convertis au Ma-homćufme , & leur en apprendre les ma-jtimes & les coutumes. Le trafic eft grand a Alep , en ctoffes de fo e & en camelots de poil de chevre j mais principalement en noix de galle &c en vanalede , qui eft la coque du gland , fans quoi les Curoyeurs ne peuvent bien prćparer leurs cuirs. 11 s'y fait aufli un grand commerce de favon , & de plufieurs aurres m archand i fes , parce qu'il s'y rend des Negocians de tous les endroits du monde. On voit toujours a Alep quantite de Francois, d'Italiens , d'Anglois & de Hollandois } 8c chaque Nation y a fon Co ful pour le foutien de fes interets $C de fes droits. Alep eft apres Conftantinople $c le Cai-re d*Egypte , la plus confidćrable Ville de tout l Empire des Turcs. On voit a une de ni liei s de-li une grotte , ou ils di-fent que Ha'i gendre de Mahomet a de-menre quelques jours. Elle eft fur un c6-uau fort agreable , qui eft la promenade La Syrie. 13$ des Francs. Proche d'Alep , du cotć du levant , eft une maifon de Dervifches , qui a etć autrefois un Couvent celćbre , de FOrdre de S. Balile. 11 eft encore en fort bon ćrat, & toutes les ialles , les chambres & les galeries , font revetucs de marbre. 11. Le Gouvernement de Tripoli. II comprenoit autrefois vingt 6c un can> tons, mais aujourdhui il eft moinseten-du : il vacependant depuis la Mer Me-diterranće , Julcjue pres de 1'Eunhrare , au inidi du Gouvernemenr d'Alep. La ville de Tripoli 3 que les Turcs appellenc Tarabolos 2 eft a une demi - lieue de la mer. Ellc eft ancienne ; mais elle a ćte plulieurs fois ruinee. Lors des croifades, les Francs s'en empaceient; mais le Sultan d'Egypte l'ayant prife fur eux en 1180 , la ruina entieremenr. II la lit rebarir en-fuite , telle qu'elle eft aujourd'hui, en-ceinte de murailles , avec un chateau. II y a plufieurs ćdiiices publics affez bcaux. Hors de la ville eft un cres-bel Aqueduc , qui procuve a Tripoli les eaux necelfaires: on 1'attribue dans le pays , a Godefroi de Bouillon. Le Bacha tient fon Gouvernement a ferme. Le terriroire de Tripoli eft: trčs-abondant en cannes de fucre , figues, olives, gre^ades , &c. On y fait auffidu favon trčs-eftime. l j 6 Mćthodc de Ge'ographie. Les autres viLles les plus remarquables font, Ladlkleh , au nord , ou Lataauie 3 anciennement Laodiccea : cette ville fe foutienc encore pat fon commcrce , ayanc un port , qui patfe pour le meilleur de la Syrie. Belnias ćk Torto/u font d'anciennes vi'lles ruinees. Gebail ou Dgebelc 3 pres de la mer , au midi de Tripoli , eft une petite ville , ou il y a un Sangiac. C'eft l'an-cienne Byblus. AkLireR. dans les terres, aufti bien que Kanobin 3 qui eft le lieu principal des Maronites 3 anciens chrć-riens qui poffedent un grand nombre de villages , dans le mont Liban. Enallantenfuite vers l'orient, ontrouve Hamah 3 fur TAdi: c'eft une vdie ancienne , qui eft aujourdhui un Sangiacat, ou une efpece de Principaure independante. Jf/ems j l'ancienne limefa 3 autrelois rres-peuplee , ćk aujourd'hui prefque toute ruinee. Il y a un beau Lac dans fon voifi-nage , ćk fon terrein eft fertile ćk fain ; les habitans font beaux , mais fort fimples. Salemiah eft une ville palfable , avec un Sangiacat : le Grand Seigncur l'a donne a un Prince Arabe. Tad/nor 3 vers L'Eu« phrate , eft un autre Sangiacat, dans un ter-rein fertile , au milieu de* deferts. C'eft l'ancienne Palmyra , ou l'on voit les rui-nes magnihques de grands ćditices ćk de Palais ancien.. Zenobiequicn etoitReine, a rendu cćlebre cette ville , qu'on ptecend La Syrle. 157 d'ailleurs avoir etć batie en premier par le Roi Salomon. iii. Le Gouvemement de Seydc. Ce n'ćtoit ci-devant qu'un Sangiacat, fous la dćpendance de Damas \ mais aujourd'hui il y a un Bacha qui a ce Gou-vernemenr a ferme , ćk auqucl on a en-ćore foumis les pays d''Aere & de Sajet. C'eft ce qui rćpond a peu prćs a ce qu'on nommoit autrcfois la Phcnicie. Seyde 3 anciennement confidćrable fous le nom de Sidon 3 a encore un alTcz bon pore, avec un cbateau. La ville eft alfez. peu de ehofe j il y refide cependanr plu-fietjrs Confuls des Narions Europćennes, ck on y faic un grand commerce de loie , de coton , de cendres pour fairc des cryf-taux , ćkc. Beirout ou Barut, eft au nord , prćs la n:er , ornee de plufienrs matchćs publics ćk de bainsj elle s'appelloit autrcfois Bcrytus : fes environs ont beaucoup de jardins ferciles en fruits. Sur 3 l'ancienne Tyr Ci cćlćbre autrcfois , eft au m idi de- Seyde , toute en ruines. Prćs de cette ville font les fameufes fontaines, dont oir attribue la conftrućtion a Salomon. A ere 3 qui eft a neuf lieues plus au midi, eft l'ancienne P to lemah que les Croifćs appel-lerent S. Jean d'Acre , ćk dont la prife leur fit perdre tout ce qu'ils polTćdoient encore dans le Terre Sainte : elle leur fut I $ 8 Methode de Ge'ographie* enleveeen Tanriee 1191. Sonport eft alfez bon , & il Te trouve a l'entree d'un petit Golte vis-a-vis l'extremite du Mont Car-mel , autrefois fameux par la demeure du Prophčte Elie. Safet eft une petite ville torte , fur une montagne , que plufieurs croient avoir ete l'ancienne Bethulie , fi celebre par la bravoure de Judith. Elle eft a 1'orient dans les terres , peu eloignee du Lac de Tabarieh j anciennement Tiberiade. Le territoire de Safet fait parrie du Pays de TErden ou du Jourdain , dont les por-tions feptcntrionale &c orientale font du Gouvernement de Damas. Na^ra 3 ou Na\areth 3 celebre par la demeure que Jefus-Chrifl y fit pendant trente ans , eft aujourd'liui un bourg peu conuderable. Dans le Gouvernement de Seyde , fe trouve enclavee une Principaute affez con-iiderable } qui eft vaflale du Grand Ser-gneur. C eft celle de la Kation des Dru-Jes j qui pretend etre defcendue , au moins en partic , de plufieurs Francois qui fe refugierent dans le Mont Liban ou elle habite , lorfque les Croifćs perdirent tout ce qu'ils avoient polTede dans la Ter-re Sainte. Leurcapirale, ourefide 1'Emir, ou Prince desDrufes 3 eft Deir-el Kamer* qui eft d fepr lieues de Seyde &: de Bei-rout. Les Drufes ne font ni Chreciens ni Mahometans j mais forment une Sećte La Syric. l particuliere , qui paroit avoir le Maho-mćtifme en horreur. Les Maronitcs j done on a parle ci-devant , font fons une efpe-ce de dependance des Drufes > parce que PErar de ces derniers s'etend aufli dans une parrie du Gouvernement de Tripoli. i v. Le Gouvernement de Damas. II etoit ci-devant bien plus confidćrable qu'il n'eft aujourd'hui j car celui de Seyde 6c lesautres qui fuivent, en dependoient. Damas 3 fur le Barradi , eft la plus belle ville de la Syrie , celebre des les plus an-ciens temps , &: fituee dans un terroir ll charmant , qu'on le compare au Paradis Terreftri. 11 y a nombre de beaux edili-ces publics; la principale Mofquee palfe pour la mieux rentee de toutes celles qui {om dans les pays Mahomćrans. On y conferve deux Alcorans , que Pon pre-tend avoir ćte ćerits, Pun par Ali. gendre de Mahomet, 8c Pautre par Othman 1'un de fes compagnons. 11 y a a Damas des chretiens grecs &c latins , de meme que beaucoup de Juifs, qui font prefque tout le commerce. Les vins, les fruits (prunes & raifins ,) les foies , les laines , les eaux de fenteur faires de rofe , Pacier &z les lames d'epćes qu'on y fabrique , contri-buent a rendre cette ville fort marchande. Le territoire de Damas fe nomme Goutah. A une heure de chemin de cette ville 3 14o Me t hode de GeOgraphle. eft Saliieh. Comme kurs jardins fe foi-gnenr , cette perice ville femble nen fairc qu'une avec Damas. A une journee vers 1'orient elt Kteijah ou Kathijeh > ou Ton trouve un Kan ou Caravanferai , le plus beau qu'il y ait : les voyageurs y font trai-tćs gratis 3 8C on leur fournit jufqu'a la clundelle. Sidonaia 3 qui n'en eft pas eloigne , eft un fanieux Monaftere de Grecs , fonde par 1'Empereur Juftinicn. Banlbek , a deux petites journees au nord-oueft de Damas , renferme de belles anriquites. Cette ville eft d.\ns la vallee de Bekah ou Bukah , qui s'etend beau-coup au midi, entre le Liban & TAntili-ban , montagnes alfez fertiles. Banias > bourg , pres des fources de 1'Erden ou Jourdain : il aura etć bati par les habicans de l'ancienne Pancas appellee enfuite Cetfarca Philippi 3 qui paroic avoir ete un pcu plus au midi , čk vers la jonćlion des deux fources du Jourdain. On adifpute fur ces fources, &c le favant M. Reland a prerendu qu'il n'y en avoit qu'une. Cependant voici ce que nous avons appris de M. Agemi , neveu & coadju-teur du Patriarche d'Antiocbe , qui avoit erć dans le pavs: on ne fefa pas fache de trouver ici cet eclairciifemcnt. Abel > au-trefois Dan , ćv Banias font fur le chemin de Safet a Damas , ćloignćs \\\u de l'an> tre de trois lieues. Pres d'Abel, fort un La Syrle. i4t tuiCTeau qui porte le me. me nom , 6v a un cours de lix lieues, ati fud-eft: il palfe pres de Kadet* j aucrefois Cydijjus. A trois lieues d'Abel , vers le nord-eft , eft Ba-nias , & d une lieue au midi de ce der-nier bourg , Tort un ruilfeau nommć Dor ou lor , qui avant coulć cinq lieues au midi , fe joint a l'Abel, Cv forme l'Hrden ou le Jourdain. A u midi de Damas eft Bofia villc ancienne , & capitale du pays d'Havr m , qui eft fertile en excellens bleds: les hom-mes y font d'une talile haute , &: les fem-mes renommees pour leur beaute. Adrcat ou A\ra eft un bourg celebre , avec un ehateau : on en tire des cendres dont on fait beaucoup de favon. On app elle le pays Bitinia : c'eft Paucicime Batanea ou pays de Bafan. 11 ćtoit ci-devant eu eu-rier fous la dependance de Damas , auftl bien que touc ce qui eft a fon midi , a Torient du Jourdain j mais aujourd'hui ces contrees font gouvernćes par un petit Badia qui rćlide a Agcloun , done nous parlerons ci-aprčs. V. Le Gouvemement de Jerufalem. 11 dćpendoit ci-devant de Damas; mais il y a aujourd'hui un Bacha , qui a fouslui deux Singiacs , dont l'un rćfide a Nabolos pu Naploufe , & l'autre a Ga-^a. Ce Gouvemement comprend aulli les parties mć- 141 Met hode de G eographle. ridionale & occidentale de la Terre Sain-te ou Palelrine , pays autrefois trćs-ce-lebre čk fertile , mais qui neft prefque plus qu'un Defert , expofe aux incur/ions čles Arabes. Jerufalem j autrefois iibelle, feroit peti connue aujourd'hui fans les lieux faints, principalement le Sepulcre de N. S. J. C. c]ue les Chrctiens vont vifiter de toutes parts. Les Turcs appellentcette ville Bei-tu-Mucades 3 la Maifon fanćtifiee , a cau-fe de 1'ancien Temple de Salomon , fur le rerrein duquel le Calife Omar fir batir en ,6 $6 un Mofquee , dont les chreriens ne peuvent approchcr. L'enceinte de Jerufalem eft affez petite , 6k fes murailles ne fervent qu'a la garantir contre les courfes des Arabes. Cette ville etoit anciennement batie fur une ou deux collines , ck fe trouvoit envi-ronee de montagnes. Le terroir ćk les environs de Jerufalem ćtoient aflez arro-fes , ayant les fontaincs de Geon ck de Si loe , čk le torrent de Cedron , au pied de fes murailles , ourre les eaux d'Erlian, Cjue Pilate avoit fait conduire dans la ville par des aqueducs. Jerufalem , qui avoit ete ruinee une premiere fois par Nabucho-donofor Roi de Babylone, ck rebatie apres la Captivite , fut une feconde foisentie-rement detruite par les Romains, 1'an 71. Lorfque 1'Empereur Adrien fit rebatir La PaUJTme. r4.fi lanouvelle ville , 1'an 157, leCalvairefuc enferme dans fenceinte , & la montagne de Sion , 011 la Cice de David , n'y fuc pas compnfe. Apres que la fainre Croix eut ete trouvee , Conftantin fic bacir une ma-gnifique Bafilique fur leCalvaire, &c Ton en fit la dedicace fous le nom &Anajlajis , mor grec, qui veuc dire llejurreclion. L'Eglife , qui occupe a prefent le Calvaire , porte le nom du S. Sepulcre. Ce lieu fervoic autrefois pour l'exćcution des criminels \ c'eft pourquoi il etoit hors de la ville , comme un lieu d'abomination. Mais depuis qu'il eft devenu 1'Autel fur lequel Jefus-Chrift s'elt offert en facrifice,il a ete purine, & rous les chrctiens en approchent avec refpećr & devotion. Les premiers fondateurs de 1'Eglife du S. Sepulcre furent obliges de reciuire la montagne a un res de-chauiTce , en applanilfant plulieurs parries du ro-cher , & en elevant d'autres. Cependant on a pris foin de ne rien changer ou dimi-nuer aux endroits de la montagne ou Ton croyoit que c'ćtoit palic l'aćte de la padion du Seigneur. Ceft pourquoi on a 1 a i (Te en fon entier 1'endroit du Calvaire, ou Ton etoit que Jefus-Chrift fut attache &c eleve fur la croix; de fortequ'il eft aujourd'hui eleve de dix-huit degres au-delTus du res-de-chaulTce de 1'Eglife. Le faint Sepulcre , qui etoit autrefois une voute taillee tdons le rochet fous terce , eft prefente- 144 - Methode de Geograplue. ment coni me une grotte fur terre *, le rocber ayant etć coupć aurom-. L'an $6$ , Julien l'Apoftat, pour don-ner un dementi a Jefus-Chrift , permit aux Juifs de rebatir le Temple de Jerufa-iem. lis en creufercnt les fondemens j mais ce qu'ils barilToienc pendant le jour tomboit de foi-meme en mine pendant la huir. 11 forcoit mcme de la terre des flam-mes qui confumoient les materiaux defti-nes pour le retablilTement de ce Temple : entin il ne put etre rebati. Sur cela Ton peut voir Ammien Marccllin j Ecrivain Paien , Liv. xxin , ch. I, & S. Ambrol-fc j Epift-ol. ad Theodofium. La ville de Jćrulalem fut prife & bru-lee 1'an 614 par les Perfes, & le Patriar-che Zacharie emmenć prifonnier avec beaucoup dautres. Elle tomba 1'an 636 fous la puiifance des Sarafins. Tout le monde fait que le but des Croifades etoit de rendre cette ville aux Chretiens , aufli-bien que le pays arrofć par le fang du Sauveur. On en etoit venu a bout, &c les Francois , avec d'autres Latins , y fonde-rent un nouveau Royaume 1'an 1099 ; mais il ne dura que 88 ans , fous neuf Rois. Les fuccelTeurs de Godefroi de Bouillon U brouillerent. Saladin , Sultan d'Egypte &z de Svrie , profitant de leurs divifions , fondit fur eux , & les chaffa , 1'an 1187 , de Jćrufalem, &c fes fuccef. feurs La Pakjline. 145 feurs leur enleverent le refte de la Terre Sainte , en 1291. Les Sulrans d'£gyprc gardetent ce pays jufcufa l\m 1517, quil tomba fous la domination des Turcs , qui le polTedenr eneore. Les principaux lieux qul font autour de Jer ufale m , &e qui ne dćpendent point des Sangiacats dont nous avons parić ,,.tont : Erika ou Jcric/io^au nord-eft j ion rcrroir 9 qui eft arrofe par des eaux de fources, eib. abondant en figues, en dates & en can-nes de fucre. Bethkhem 3 village a fix milles au midi de-Jerufalem , illuftre par la naiiTance de N. S. Jems-Chrili. LTglife qui a etć bane fur le lieu , eft vilitće par les Chretiens, Se entre les mains des Peres Cordeliers ćtablis dans la Terre Sainte , fur-tout a Jćrufalcm , fous la protec-tion du Roi de France. Hcbroun 3 plus au midi , &c a iix lieues de Jćrufalem , eit une petite ville iltuće entre les monra-gnes , avec un fort chateau de pierrcs, ou il y a garnifon. On y voit le fćpulcre d'Abraham , d'Ifaac & de Jacob , qui eit vihro ćgalemenr par les Chreiiens $c les Mahometahs. Ramla Se Jaffa 3 a 1'oueft de Jćrufalcm, & par ou on y vient de la mer , font du Sangiacat fuivant. Le Sargiacat de C\r^a 3 cphrient la cpte, meridionale de la Palcftine. Ga%a eft au-jourd'hui une ville tres mćdiocrc , a peu de diftance de la Mer Mćdicerranće ; fon ter-Tome VIL G 146 Methode de Geographie. ritoire eft orne de jardins , qui prodni-fenc des friijrs dćlicieux. Askalon eft une nncienne ville, fur une elevation , au bord de la merj mais elle eft aujourd'hui en mineš. Jajja y anciennemenc Joppe 3 a un petič porr , qui n'eft pas des meilleurs , miris ou abordenr cependant la plupart desEuropeens cjui vonta Jerufalem. Ram-la j qui eft fur la roure , eft une petite ville , a dix huit milles de Jćrufalem : on y fait un aflfez bon commcrce de coton , &: fon terriroire abonde en vignes , en oliviers & en abricots excellens. Lod 011 Ludd j eft un gros bourg , a une lieue de Ramla , ou Ion tient touces les femaines liti marehć. Ar fuj \ chateau ruine , etoit autrefois une ville fotte. Kaifarieh ou Cefaree y etoit anciennement une ville confiderable , qu'Hćrode avoit fait batir en 1'honneur de Cefar Augufte : elle fut rres-endommagec du temps des Croifa-des j ćv elle eft aujourd'hui en mineš. Le Sangiacat de N.itdos 3 cjue nous ap-pellons Naplouje j eft au nord de Jerufa-lem. Naploufe , qui eft 1'ancienne Si-chem j qu'Herode ayant fait rebatir , ap-pella Nea polis ou la nouvelle Ville , eft aujourd'hui en un alfez pauvre etat; mais cependant bien pcuplee : elle ne confifte qu'cn deux rues parallelcs , entre le Mont Garizim , au midi , čV: le Mont Hebal, au nord. C'cft la refidence du grand Sacrifi- La Palefline. 147 cateur des Samaritains, qui font en peric nombre dans cette ville de aux environs , toujotirs ennemis des Juifs , quoique leut religion foic pen difterente. Ils n'ont dau-rre Ecriture Sainte que les cinq Livres de Moyfe j en anciens cara&eres, que les Sa-vans croient etre 1'ancien hebreu. Sebaf-te > a* deux lieues au nord , eft 1'anciennc Šamane 3 qui etoit la capitale du Royau-me d'Ifrael ou des dix Tribus. Beifan t bourg prćs du Jourdain , rćpond a 1'ancien-ueBethJan. Au midi du MontCarmel, eft Ledgioun , petite ville , connue autre-fois fous le nom de Legio. V 1. JLe Goiivernement d'Ageloun. 11 comprend ln parcie mćridionale du P.iys a Porient du Jourdain & de la Mer Morte. Ce netoit ci-devant qu'un Sangiacat dependanc du Goiivernement de Da-mas } mais aii'ourd'hui il y a un Bacha envoye par le GrandSeigneur, II ićiide A Agcloim ou Adgloun j qui n'eft propre-ment qu'un chateau , a pen de diftance du Jourdain Se du Lac de Tebarieh 011 Tibćriade", vis-a-vis Baifan ; fon terri-toire ade beaux jard bas. Sdk ou Ajja/t, au midi , eft une petite >'ille avec un chateau. . Amman s qui eft a 1'orient , montre beaucoup de ruines d'anciens edihces: c'ć-toit la capitale des A mmonites. Hcston ou G ij 14$ Methode de Geographie. Husbarij eft une petite ville encore aftez renommće : on y reconnoit 1'aneienne Hefebon. Au midi 1'on trouve Maab ou JSlccb appellće aufli El-Raba 3 qui n'eft plus đu'ltn village : c'ćtoit autrefois la grande ville de Moab , capitale des Moa-bires. Korak eft une forterelfe fur un licu ćlevć, a peu de diftance de la Mer Mone, & a fon orient: on le nommoic Mont-Royal du tcmps des Croifades. En finiflant la defcription de la Pa-leftine , il eft a propos de dire quelque chofe d u cours du Jourdain , & de la Mer Morte. Nous avons deja parić ci-deifus des deux fources du Jourdain , appelle aujourd'hui Erden. Ce fleuve , li fameux , n'a cependant quenviron cinquante lieues de cours, fans avoir ćgard a les finuolltćs. 11 va du nord au fud , & on y rrouve rrois Lacs. Le premier 6c le plus fcptentrio-nal eft de peu de confćquence , n'ayant que trois lieues du nord au fud : on Tap-pelle aujourd'hui Bahr el Houlei ; c'ćtoit anciennement le Semeclion. Le fecond , connu autrefois fous le nom de Mer de Gćnefareth ou de Tiberiade ( aujourd'hui Tabarieh) a neuf ou dix lieues de long fur cinq dans fa plus grande largeur : c'eft fur &c aux environs de ce Lac que J. C. a općrć tant de miracles. La ville de Ca-pharnaum 3 ou notre Sauveur a demeure, La Patejline. 149 etoit nord de ce Lac ; mais on a peine a en reconnoitre les veftiges. Enfin , le plus extraordinaire des Lacs cjui ont rapport an Jourdain , & dans le-quel il fe jette , eft ce qu'on appelle la Mer Morte. On lui donne vingt-quatte lieues de long , fur fept ou huit de large. Ce Lac etoit, du temps d'Abraham , une plaine tres-fertile ; mais Dieu 1'abima , &c en fit un Lac ou furent englouties les ref-tes des cinq villes pćchereffes, dont Sodome etoit la principale , & fur laquelle Dieu avoit fait tomber une pluie de feu Sc de foufFre. Les environs de ce Lac 1 font une terre cxtremcmcnt fulphureufe & bitumineufe , remplie de cailloux noirs qui prennent feu a la fumće d'une chan-delle. Les eaux du Lac font tres-puan-tes, pleines de bitume , tk extraorainai-rement falees. 11 n'y a aucun poiffon , & ceux qu'on y porte y meurent a 1'inftant. Le pays qui eft a 1'entour eft aride , Sc ne prod uit ni arbres ni fruits , tels qu'ils puiffent etre. L'eau de cette mer ou lac , tel qu'on voudra Tappeller 3 n'a aucune iffiie apparente , 6c ne peut avoir fa de-charge dans la Mediterranee ou la Mer Rouge, que par des conduits fouterreins. i j o Methode de Geographie, ■ A R T 1 C L E III. LE DIARBEC ET PATS FOISINS. ^N*Ous renfermons fous ce titre , ce que les Anciens appelloient en general l'AlTy-rie ? qui fe diviibit en Mefopotamie , Ba-bvlonie & A(Tyrie propre. Cette derniere au-dela, du Tigre , rćpond a. ce qu'on ap-pelle aujourd'luii le KurdijlanTmc\ &c les deux autres fe nomment le Diarbec propre ou V Algebra 3 8c V trak. C A R t E s. // faut encore fe fcrvir pour ces Pays 3 de la mcme Carte de Ad. &'AnvilLE3 dont on a fait ufage pour la Natolie & la Syrie 3 en y joignant pour une parne dc rirac 3fa premier t Carte d'AJic. I. Le Diarbec propre 3 ou T Algebra. Ce Pays, a 1'orient de la Syrie , eft entre les Heuves de 1'Euphrare Sz du Tigre ; c'eft pour cela que les Grecs le nommeceni Mefopotamie. Les Orientaux 1'ont appelle Algebra 3 qui iignific l'!fle , n'y nyant que peu de terres entre le haur de ces deux fleuves. On y compte aujour- Le Diarbec. * 151 d'hui trois Gouvernemens , iavoir cevix de Diarbekir, d'Orfa & de Moful. 1. Le Gouvcrncment de Diarbekir. II occupe la partie feptentrionale , 5c eft divife en dix-neuf perits Sangiacats , dont huit font poffedćs herćdicairement, par des Beys Kurdes, de pere en fils. Les principales villes font Diarbekir , fur le Tigre, entourće de murailles, avec d'alfez beaux edifices publics ., tres-peuplee &: marchande; on y fait des toiles de co-ton 6c des maroquins. Meiajarekin etoit autrefois la capitale de cette contree. Hejh Kaifa eft une ville alfez confidera-ble , fur le Tigre. Merdin eft forte, 5c batie fur une montagne. Nijibin , fur l'Hermas } etoit anciennement en meil-leur ćtat qu'elle n'eft anjourd'hui. Sinj ar > fur la meme riviere, plus au midi, a un Palais & des Bains magnifiques, batis par les Princes qui y ont ci-devant regne. Son nom fait rerTbuvenir des plaines de Sen-naar ou Sinhur 3 dans lefquelles Moyfe dit que les hommes ćroient aflembles iorfqu'ils eurent la penfće de batir la Tour de Babel. %. Le Gouvernement d'Orja. II eft a. 1'orient & le long de 1'Euphrate- 151 Mćthodc de Geograph'ie. ftatca j qui eft fur cc Fleuve , en etoit ci-devant la capitale ; mais cette ville ayant ere ruinće par les guerres , c'eft Orfa 011 Roha , plus au nord , qui Ini a fuccedć pour cette dignite , tk qui eft la refidence du Bacha. Cette ville eft la meme , qui s'appelloit anciennement EdejJ'e , tk qui a eu des Rois connus fous le nom d'Abga-re : on y fair beaucoup de cuirs de roufli. Harran paroit etre la meme que Charran , lieu de la demeure de Tharć & d'Abra-ham y elle eft aufti renommee pour la de-faite ck la more de Craffus par les Par-thes. Ras-ain eft une petite ville , pres de Forigine de la riviere de Kabour , qui eft forcnee d'une grande quantite de fources. Au midi , 6c fur l'Euphrate , font Ker-k'ijieh &c Anah : pres de certe derniere ville on trouve de grandes forets de mu-riers , ou font des cabanes done les habi-tans s'occupent a faire de la foye. Qtioi-quon renferme ordinairement dans le Diarbec , Anah &C Hit,3 qui eft plus bas , 6c dans le voifinage de laquellc eft une fource abondante de naphte ou de bitu-nie y cependant il eft neceflaire d'obferver que le Grand-Seignenr les a foumis de-puis quelque temps au Bacha de Bagdad , qui eft dans TIrale. Anah eft dans une Ifle oe l'Euphrate : c'eft le feul endroitde ces cantons ou il y ait des oliviers. Les habi- Le Dinibec. i J J tans ont lc gout tres-delicat , & il y a beaucoup de Muficiens & de gens doćles , a la facon des Turcs. 5. Le Gouvernement de Moful. Il eft a loccident du precćdcnt, le long du Tigre. On y compte fix Sangiacats , cjui prennent le ur s noms des endroits qui fuivent. Moful 3 la relidence du Bacha Sc clu Patriarche des Neftoriens , a des mit-railles en parcie ruinćes; mais il y a de bonnes maifons. On y rrouve des Manu-factures de toiles decoron, &c de draps de fove &c d'or. V is-a-vis, de 1'aurre cote du Tigre , c'eft-a-dire , a lorient, etoit autrefois la fameufe ville de Njnive , capitale de l'Empire des Affyriens. On y remarcjue aujourd'hui un lieu appelle Tel-UjLiubeh j la montagne de la penitence : ce qui a rapport a la predication que le Prophece Jonas fit dans cette ville. Au nord, eft Beled ou E.ski-Moful3 c'eft-a-dire s 1'ancienne Moful. Hclver s encore plus au nord , eft euclavee dans le Kur-diftan , aufli-bien que Bana 3 prefque vis-a-vis Moful. Bagd-Vanlu 3 pres de Senn, au midi , eft aufli enclave dans le meme pays. Tckrit. eft la detniere ville du Gou-verlitmenr de Moful : il y avoic autrefois une fovterelfe quieft ruinee. On voit pres de-Ia une fburce dc naphte. G v 154 Methode de Geographie* II. VIrak-Arabi. Ce Pays , qu'on nommoit autrefois la Chaldće 8c la Babylonie, contient aujourd'hui. deux Gouverncmens , dont Pun qui eft au nord 8c le plus confidćrable , eft celui de Bagdad; & l'autre , au midi > eft celui de Bajrah ou Bajjbra. On appelle ce pays Irak-Arabi 3 parče qu'il eft cn grande partie habite par des Tribus ve-nues de PArabie , qui en eft voiftne , a Poccident 8c au midi i mais X Irak-A jami 3 qui eft a l'orient, prend |fon furnom des Perfans, qui la pouedent, 8c que les Ara-bes appellent Ajam ou Agem. i. Le Gouvernement de Bagdad. II eft trćs-important pour le Grand Sci-gneur , etant la fronrieie de la Perfe la plus facile a pćnćirer. Aufti le Bacha eft-il plus en forces, 8c Pun des plus confi-dćrćs de PEmpire Ture. Sa capitale eft Bagdad j ville coniidćrable fur le Tigre : on Pappelle affez fouvent Babylone^ mais il ne faut pas la contondre, comme one fait phifieurs Auteurs , avec l'ancienne Babylone, qui etoit plus au midi fur l'Euphrate. Bagdad eft bien fortiriee , ornće de barimens confiderables, 8c a une forte garnifbn de Janiftaires. Elle a etć batie en 765 , par Abougiafar, Empereur des L'Irak-Arali. I j j Sarafins, ou le fecond Khalife Abballkle, &c elle fut la rćfulence de fes fuccelfeurs , jufqua ce qu'Holagou , petit-lils de Gen-gifcan , Empereur des Mogols & Ta rta-res, la pric en 115 S. Elle fut enfuite unie i la Perfe; &z ce n'eft qu'en 1638 qu'A-murath IV , Empereur des Turcs , la prit pendant que les Perfes etoient occupcs a la guerre contre le Grand MogoK On fait dins cette ville un erand commerce de marchandifes des lndes , par le moyen de BafTora , ainli que de celles de Perfe , lorfque les Turcs ne font point en guerre avec le Soplii. Sur le Tigre , a dix heures de chemin au-deirus de Bagdad , eft une perite ville nommće Acbara a Sc entre deux le villa-ge de Kathrcbul 3 qui eft tout habite de chretiens, Sc ou il y a beaucoup d'Eglifes. Dans le pays au nord , qui s'eloigne alfez du Tigre , on rrouve les villes de Shere-ban , Menda//. & Holuan : celle-ci eft la derniere de l'Irac-Arabi, fur les fromićres de la Perfe , a cinq journees de Bagdad j les figues St les dates y font excellentes. Samira fur le Tigre a l'occident, ćtoit autrefois une ville conlldćrable} mais ce font aujourd'hui des ruines , avec la qua-Utć de bourg. II en eft de meme de Mo-dain y qui eft fur le Tigre , au deftbus de Bagdad : c'etoit autrefois une trćs Grande ville , rćfidence des Rois de Perfe connus G vj 15 6 Methode de Geographie. fous le noni d'Artaxcrcides Sc Cofročs : on croit qu'elle avoit ete formee par la reu-nion des anciennes villes de Seleucie Sc Cte-J:pkon, Plus au midi, fur le meme Fleuve, font Naamanieh qui a donnć nailfance a pluiieurs Poćtes illuftres parmi les Ara-bes } Sc Wajk, ainfi nommće d'un mot qui iignifie le milieu , parce qu'elle eft entre Bagdad Sc Bafrah , Cufa , Scc. Au-pres de Waiit, qui eft la relidence d'un Sangiac , il y a plufieurs Lacs formees par les inondations du Tigre , comme auprčs de Bafrah. Sur l'Euphrate font Anbar 3 petite ville ou Abul-Abbas, premier Khalife Abbaf-fide , rint le (lćge de fon Empire : Hellehj pres de laquelle font les ruines de Babil ou de l'ancienne Babvlone , dont les environs font remplis de bois Sc de forets. On y voit les reftes d'une Tour que les gens du pays appellent la Tour de Nembrod , Sc que le vulgaire croit etre les ruines de laTour de Babel , quoiqu'il n'y paroilfe rien qui alt du rapport a la defcription que Moyfe fait de cette derniere Tour dans la Gene-fe. Plus bas eit Romahie petite ville ou eft un Sangiac : elle eft toute environće de dati ere. Dans les terres , a l'occident 3 Ion trouve Mefglud- Ali 3 ou la Mofquee d'A-li , gendre de Mahomet. Comme il y eft enterre 3 Sc que fon tombeau eft vilice • V Irak-A rabi. J les autres des anciens Chaldćens. 11 s oceupent le p.iys a 1'orient d u Tigre , au nord de Bagdad i il s'en trouve meme dans les Provinces voifines, en Armenie &c en Algezira , outre ceux qui font en Perfe. Us font tiers Sc coura-geux } mais la plupart grands voleurs Sc cruels : les uns habitentles montagnes, &c les autres font eirans. lis ont des Cheicks oupetits Princes , qui font tojjj^urs en di-vifion les uns a 1'egard des autres } Se les Turcs entreriennent cette divifion , depuis qu'ils onr depouillć leurs principaux Princes de leurs Etats , Sc les ont obliges de fe refugier en Perfe , ou ils forment une efpece de Republique dont la capitale eft A'[)'en eha d j pres d' Hamadan. Le Bacha de cette Province rćfidoic ci-clevant a Shere^our 3 ou Cherefoulpetite ville batie entre deux montagnes , fur le Diala , riviere qui fc jetre dans le Tigre , un peu au delfous de Bagdad. Mais ia re- Le Kurdijlan Ture* 159 fidence de cet Oflicier eft aujourd'hui a Kcrkouk , aurre pecite ville a quinze lieues de la prćcćdente vers 1'occident, & 011 il y a une bonne forterefte fot un lieu eleve. Pludeurs Auteurs ont confondu ces dcux villes , comme erant la meme 6c ayant deux noms. A deux lieues de Sherezour eft une petite col line, fur laquelle lorfqu'on fait quelques trous , on en voit fortir des flammes , ou 1'on fait quelquefois cuire de la viande} & lorfqu'on a bouche le trou avec la terre , on ne voit plus de flammes. Dans le voilinage font des fources de naphte ou de bitume , & de poix. Au nord , eft Etbiij petite ville ancien-ne , la meme c\x\Arbela 3 dans les plaines de laquelle Alexandre gagna contre Da-rius , la rroifieme &c derniere bataille qui lui acquir le Royaume de Perfe. On comp-te dans le Gouvernement de Sberczour , ou de Kerkuk , car celle-ci pafle aujourd'hui pour la capirale , trente deux San-giacats • mais ils font prefque tous dans des bourgs ou villages , dont nous ne croyons pas devoir faire rćnumćrarion. 'i 60 Methode de Geographie, A R T I C L E IV. L A TU RCOMANIE, ou l'Armenie Turove, C a r t e s. Al, Šanson a donne une Carteparticu-dere de la Turcomanie & de la Georgie ; mais on ne peut guere s*en fervir au-jourd'hui ; il faut prendre encore cel-les dc M. d'anville j dont on vient de jaire ujage, X |A Turcomanie , au nord de Kurdiftan, čc au nord-eft de la Nacolie , eft la parrie oecidentale de rArmenie , qui eft aujour-d'hui partagee eritre les Tu res & les Per-fans. L'Armenie , conlidćrće dans fon en-tier , etoit autrefois un Royaume confidc-rable , qui a eu des Rois fameux , tels queTigrane , qui fut vaincu par Pompee. Ses fuccelft-urs ont ete la plupart vailaux des Romains , quoiquc les Parthes ik. les Artaxcrcides aient fait ce qu'ils ont pu pour alhijtrir ce pays a la Perfe : ils le partagerent enfin avec les Romains , i peu pres comme il eft aujourcrimi parrage catre iesPerfans & les Turcs. L'Armenie La Turcomanie. i6t Perfane , qui eft k 1'orient, fe nomme la Province d'Erivan fa capicale. Quant a rArmenie Tnrque , elle eft appellee Turcomanie , parce qu'elle eftprmcipalcment fiabiree par un peuple nomme les Turcomans j qui font venus en ce pays , dans le Xlc fiecle , du Turkelhn , Province de la grande Tarcarie. lis menent une vie de patres , 5c habitent fous des rentes: ce font d'ailleurs la plupart de grands voleurs , que les Bachas Turcs fonc atfez occupćs a reprimer , pour la furetć des voyageurs dont lis tirent une rćtribution. La Religion des Turcomans eft la Ma-hometarie } mais ils n'en pratiquent gue-re les devoirs. Ils ont eu au XVC fiecle deux Dvnafties de Princes puiflans , qui ćtoient maitres de la plus grande pareie de la Perfe : on appelloit les uns Turcomans du mouton noir , & les autres du mouron blanc , a caufe des ftgures qui etoient fur leurs drapeaux. Il y a eneore dans ce pays nombre d'an-ciens Armeniens , qui font chrćriens , de-puis long-temps fepares de 1'Eglifc grec-que , a caufe de leur attachementa l'Euty-chlanifme. Ils ont fait plufieurs rćunions avec 1'Eglife Romaine ; mais cela n'a eu de fuite que pour quelques-uns de cette Nation , qui a deux Patriarches. L'un eft dans l'Armenie orientale ou Perfane , a Eskmia^in ■ &c 1'aurre dans la Natolie , a. l6i Methode de Geographie. S is. Les'Armeniens s'etant bcaucoup ap~ pliqućs au commerce , fe font tres-repan-dus en Perle , Sc dans les diverfes Provin-ces de la Turquie : ils ont aufli fait des etabliflemens en Pologne , Sc il y en a meme jufqu'a Amftordam. Ils font labo-rieux , 8c Ton prćtend qu ils furpaiTent en habilete dans le nćgoce 3 les Hollandois Sc les Juifs. C'eft dans l'Armenie qae 1'Enphrate Sc le Tigre prenneut leurs fources : ces Fleu-ves lont beaucoup plus fameux que navi-gables. Le pays eft alfez fertile en bled , en iruits Sc en berail , mais peu en vin. On en tire beaucoup de foie , Sc c'eft de la encore que vient le bol furnomme d'Ar-mćnie. La Turcomanie , ou Armenie Tur-que , fe divife en trois Gouvernemens qui font ceux de Van , cVEr^erum ou Ar-yown3 Sc celui de Kars j fans compter celili de Erebifonde 3 que quelqucs orien-taux joignenr a l'Armenie, Sc dont nous avons parle dans la Natolie. L Le Gouvemement de Van. Ce Gouvemement qai contient la par-tie meridionale de la Turcomanie , ren-ferme nombre de Kurdes, Sc c'eft pour cela que quelques Geographes , comme M. d'Anville , enmcttentune partiedans le Kurdiftan j mais il doit fe rapporter La Turcomanle. \6$ en entier a fArmenie. La ville de Van eft tres-forte , & a une double muraille : les Turcs Tone prife fur les Perfans, en 15 3 3; & ils y encretiennent 1500 JaniiTaires en garnifon. Elle eft fituee a. l'orient d'un grand Lac qui porte communement fon nom , mais auquel on donne quelquefois celui d'Argish 3 qui n'eft plus qu'un bourg 3 au nord de ce Lac , dont 1'eau eft un peu amere & falee. Dans une lile de ce Lac eft une forterefte , nommee Achtemar. A l'occident eft Ahlat, qui a ćte autrefois confiderable , Sc la rćfidence de quelques Rois d'Armćnie j mais elle a ete ruinee par les tremblemens de terre če par les guerres: Soliman , Empereur des Turcs, y a ta it batir une nouvelle fortereffe. Les principaux lieux au nord , font , Moufch j dont les habitans font tous chre-tiens i Diadin 3 ancienne ville j Baia^id, qui a un bon chateau 3 Ka^cgan ou Kian 3 pres duquel eft la plaine de Tchalderan y ou 1'Empereur Selim remporta en 1514, une grande vićtoire fur le Sophi lfmacl, qui pretendoic, comme Ini , a la Monar-chie univerfelle de 1'Afie oecidentale. Au midi du Lac de Van , eft Gumakrlc ou Dgoumalarek , qui eft la refidence du Prince d'Hakiari 3 de la nation des Kurdes. Kafkah eft aufli une Principaute de la me-me nation. A l'occident eft la ville de Rid-iU ou Bitlis j place torte , dont les orien- ■ I ć>4 Methode de Geographle. taux attribuentla fondacion a Alexandre: ils pretendent metne que ce Prince l'aftić-gea enftiire inutilement \ mais que le Gouverncur la Ini remit , apres l'avoir defendue , Ini protivan C par la qu'il l'avoit rendue imprenable. Mckcs 3 qui nen eft pas eloignee \ eft une ville aftez conilde-rable. 11. Lc Gouvernement a" Ar^roum. Il eft au nord du precedent, &ć il avoi-fine le Gurgiftan ou la Georgie. La ville d'Ar^roum ou lir^erum 3 fa capitale, eft; pres d'une desfources de I'Euphrate j elle eft entourće de bonnes murailles, &c a plulieurs beaux edifices publics. Le pays eft aftez froid , mais il abonde en grains: il n'y a ni fruirs , ni bois , qu'on y apporte de deux fournees j c'eft pour cela quc la plupart des habitans y brulent de la bouze de vaches. On trouve au nord Balbourdi^ Ifpira j & Ardanoudji. III. Lc Gouvernement de Kars. La ville de Kars t qui eft a l'orient, eft aflez confiderable, mais moins qu'Arz-roLim , fous la dćpendance de Iaquellc elle eft quelquefois , comme l'a trouve au commencement de ce fiecle , M. de Tournefort , favant Botanifte &c Mede-cin j lorfqu'il alla par ordre du Roi pour La Turcomanle. chercher des plantes dans 1'orietit. Ellc eft: batie entre deux monragnes , prčs d'une riviere qui va tomber dans 1'Aras, & auquel le nouveau Geographe Ture tlonne ce nom , parce qu'apparemment il la regarde comme une de fes fources ou branehes. 11 nous apprend que Kars a ćte pris par lesTurcs fur les Perfans en i 5 So naais que comme elle ćtoit ruinee on I'a rebatie , !k ornće de divers ćdifices 3 en [in que fon Gouvemeur ou Bacha a fous lui fept Sangiacs. Mais comme les lieux ou ils reiident font peu connus & ne fe trouvent pas fur les Cartcs , nous nous difpenferons de ks nommer. Celui qui paroit le plus confiderable , eft Erde-kan j ville a cinq journees nord-eft d'Arz-Foum , entouree de murailles , avec une petite forterefTe. Au refte ce Gouvernement eft mis par le Geographe Ture dans la Georgie ou le Gurgiftan , appa-remment parce que les Georgiens en ont ćte les mairres en certains temps : il con-vient cependant mieux de le rapportcr a rArmćnie , comme Font fait MM. De-lifle & d'Anville. Ce demier y renferme meme le Gouvernement Ture tiAkalfikć3 qui eft au voifinage , mais qui appartient rćellement a la Gćorgie. 166 Me'thodc dc Geographie. C H A P I T R E II. L A G E O R G I E, O U G U RG J S T AN. Car t e s. M. Deliš le TAJlronome a publie en lj66 j a Pariš 3 che% Lattre , ime Car-te dc la Georgie & de TArmenie , qui a ete dreffee d Petersbourg en ij^S , fur les Memoires ĆV obfervations des gens dupays 3 & depuis traduite en francois 3 par le $ecrctaire du Roi de Georgie. Cette Carte renferme d'dfjtz grahds details 3 & merite d'etre confultee par ceux qui auroient a. travaillerjur cespays. Mais nayant point ćte afujetie aux der-nieres obfervations ajlronomiques 3 comme on le reconnoit a la pofition de plu-fieurs lieux 3 dont les obfervations ont invariablement fixe la fituation 3 on ne peut en confeiller Tufage pourCetude ordi-naire. II faut dont s'en ttnir a la Carte des environs de la Mer Cafpienne, par Guillaume Delisse. L A Georgie, quelesT!ircs nomment Gurgijlan * eft borne'e au uord par une La Georgie. \6y branche de montagnes nommees autre-fois Caucafe Se aujourd'hui Elbours y qui la fćparenc de la Circaflie ; au couchant par la Mer Noire \ au midi par 1'Armenie, Sc au levant pat* les pays de Dagheftan Sc de Schirvan qui font des Provinces appar-tenantes a la Perfe. Dans fa plus grande ćtenduc du midi au nord , la Georgie a environ cent lieues communes de France ; Se elle en a a peu pres autant d'occi-dent en orient. Sa latitude eft comprife entre le 40 degre 30 minutes , Sc 44c 30 minutes. Sa longitude entre le } & le Gouvernement Ture ŠAkalfike. I. La Mingrelie. La Mingrelie , qui eft fur la Mer Noire, faifoic partie de 1'ancienne Colchide , pavs celebre par les amours de Jafon ec de Medće, &c par 1'abord des Argonautes pour la conquete de la toifon d'or. Les monts Elbours , qui font 1'ancien Caucafe , en oceupent une partie. Cette fameufe mon-tagne , qui eronne les voyageurs par la hauteur de fes rochers , Sc par fes prćci-pices , eft une continuation du Mont Tau-rus , qui traverfe la Natolie tk la Turco-manie. Son fommet eft prefque toujours couvert de neige , de forte qu'il eft de-fert {k. inhabite dans l'efpace de plus de haiit lieues. Le refte de la monragne eft cultive , fertile & abondant en bled, en Tome VIL H fjo Me t hode de Geographie. vins} en paturages, & en miel. Les ha-bitans de ces montagnes fone la plupart Chreciens du rit Georgien. On y rrouve aufli pluiieurs peuples iauvages, tels que les Alans ou Alains , les 2 tques ? &c. La Mingrelie eft foumife a un Prince qui prend la qualite de DcdLin 3 mot qui en perfan fignifie Chef de la Jujlice, II eft triburaire du Grand Seigneur, auquel il fonrnit tous les ans, pour fon rribut, ftx mille braifes de toile de lin faite dans le pays. Ifgaour ou Iskuriah , que les meilleu-res Cartes plaeenr dans la partie fepren-trionale , Sc fur la Mer Noire , eft la ca-pitale du pays. On remarque eneore Rucs ou Ruki, fur la riviere d'Egourij douze ou quinze lieues au-deffus de fon embonehu-re ; Anerguie 3 avec un port fur la Mer Noire. Kodćchc ecoit en 1730, la rćfiden-ce du Souverain. 1, L'Imirete ou I meriti. Ce Pays j qui eft dans les terres, eft ^ouverne par un Meppe ou Roi , qui prend le titre de Roi des Rois. II fe dit, ainfi que le Prince de Mingrelie , iffu du Roi Piophete David, &; de la bran-che ainee des anciens Rois de Georgie. L'Abaflie , la Mingrelie Sc le Guriel , ont ćte autrefois fous fa domination ; mais ces Pravinces s'en feparerent au XVLC La Georgie, 171 tfiecle. Le Roi dlmirete paye tous les ans au GrandSeigneur , un rribut de quatre-vinge filles ou garcons de dix a vingt ans. L'Imirete eft un pays de bois Sc de montagnes > comme la Mingrelie \ mais il eft plus agrcable Sc plus fertile , & on y rencontre de belles plaines Sc de belles vallees-, ce qui fait qu'on y trouve plus facilement du pain , de la viande Sc des lćgumes. Le pays eft plus peuple , Sc il y a nombre de bourgs Sc de villages. La riviere de liione } qu'on croit etre le Phafe des anciens , traverfe ce pays dabord du nord-eft au fud-oueft , Sc enfuite du levant au couchanr. Le Roi d'lmirete a fur cette riviere deux bonnes forterefles, l'une nommee Radja y Sc 1'au-tre Seorgia qui toutes deux font de trčs-difficile acces. U en a une troilićme nommee Scander, ou il fait fa reftdence. Celle de Cotacis ou Kutati 3 iitu.ee fur une col-line au bord de la Rione , a ouinze lieues de fon embouchure dans la Mer Noire , eft aujourd'hui au Grand Seigneur , qui y eneretient une garnifon. La ville de Cota-tis j capitale du pays, eft fituee de Pautre c6te de la riviere s au bas d'une eolline , & ne confiftc qu'en deux cens maifons. 3. Lc Gurief o u Guria, Ce Pays eft pres de la Mer Noire , entre le Gouvernement de Trebi fonde Sc la H ij 17 i Methode dc Geographre. Mingrelie, au fud-oueft de Umirete. It appartient a un Prince tributaireduGrand-Seigneur , auquel il fournir tous les ans quarante-fix enfans, garcons ou fdles. vSa refidence eft a Ujlurgeti ou Ofourgeti j qut eft le lieu le plus confiderable. 4. Lc Gouvernement Ture d'Akalfike. II eft a Porient du Curiel, au midi de Hmirere , Sc au nord de PArmenie , a laquelle M. d'Anville Pa joint, apparem-ment pour faire un tout des polfeflions turqu.es de ce coce. Akalfike ou Akhas-kah j comme les Turcs Pappellent, neft proprement qu'une forterelle jointe a un bourg. Il y a un Bacha qui a le Gouvernement du pays aux environs , que les Turcs fe font affujeci a la hn du feizieme fiecle. Il etoit alors gotiverne par un Prince Georgien qui fe foumic aux Turcs Sc fe fit Mahometan , en 15 80. Mais les Per-fans s etant enfuite empare de ce pays, les Turcs le reprirent vers 1630 , Sc y etabli-rent un Bacha s qui eft hćrćditaire. Le bourg d1 Akalfike eft compofe de quatre cens maifons , prefque routes baties de bois , & habitees par des Turcs, des Ar-meniens qui y ont deux Eglifcs , des Georgiens , des Grecs Sc des Juifs: ces derniers y ont une Synagogue. La Georgie. 173 A R T I C L E II. LA GEORGIE ORlENTALE > o u Georgie P ers ane. T iA Georgie orientafre,foumife aux Per-ians, depuis le XVle fićcle , eft partagće en detix Principautćs, le Cardhuel Sc le Kaket. Le Roi de Perfe les fait gouver-ner par des Vicerois herediraires , de la race des anciens Rois de Georgie, qu'il oblige, lorfqu'il les 11 o m me , de faire pro-feflion cxterieure du Mahomćtifme, quoi-qu'ils foient de famille chretienne. 1. Le Cardhuel ou Carchuct. Cette Principaute , qui renferme la Georgie moyenne Sc la bafTe , eft bornee au nord par le Mont Caucafe , qui la fć-pare de la Circaftie j au levant par le Ka-kec \ au midi par la Province d'Erivan , Sc ati couchant par le Guriel Sc 1'lmirete , dont elle eft fcparee par une chaine de montagnes. Le pays a environ 80 lieues du midi au nord , Sc cinquante dans fa plus grande largeur , du levant au couchanc. 11 eft arrofc par la riviere de Kour, qui le traverfe d'abord du fud-oueft au H iij 174 Me t hode de Geographk. noid eft , jufqu'a Tiflis , Sc enfuire du midi au nord. On y rccueille beaucoup de foye. Tiflis j firuće fur lc Kour , en eft la ca-pirale. Ceft la vdle la plus coniidcrable de tourc la Georeie. Elle eft entouiee de muraUles , cV derendue par une bonne ci-tadelle , habuće par les feuls Pcrfans na-turels , qui y one deux Mofquees. On compte a Tiflis vingt mille habitans » la plupart Chrčticns , Georgiens ou Arme-niens. H y a aufti des Mahometans Sc des Juifs. Les Georgiens y ont (ix Eglifes , dont la principale eft la cathedrale de Sive , batimenr fott ancien , conftruit de pierres de taille , Sc compofć de quatre nefs, au milieu defquelles eft un dome* L'Eveque Georgien a fon palais tout aupres y & le Catholique ou Paniarche des Georgiens a le lien aupres d une aurre Eglife. Les Armeniens , de leur cotć , ont huit Eglifes dans la ville. La princi- fale eft aupres d'un Monaftere , ou rćlide Eveque Armenien de Tiflis. Toutes les Eglifes chrćtiennes ont des cloches. Les Mahometans n'ont point de Mofquee$ dans la ville. On y compte cinq cens Armeniens Catholiques , Sc les Capucins Italiens y ont un Hofpice. L j Prince ou Viceroi de Cardhuel , Sc cel u i dc C.iket , one tliacun un beau palais a Tirlis. La ville a de beaiut Uazars La Georgie* 17.? &: de beaux Caravanferais. Ses environs ont d'alfez belles maifons, avec des jar-dins , ou les grains vienncnt fort bien -y mais les fruits n'y reufliflent pas egale-ment. On en remarque une entr'autres * qui appartient au Prince de Cardhuel. On y trouve aurTi plufieurs fources d'eau* remperees , qui font fort eftimćes , &T dont quelques-unes fonc accompagnees de batimens. Le principal commerce de Tiflis con> fifte en fourures , en foyes , ik en une račine qu'on appelle Boia 3 qui fert pour la teinture des toiles. A dix-huit lieues au-delTus de Tiflis , & aufli fur le Kour , eft la ville de Goriy iituee au bas d'une ćmincnce , fur laquel-le eft une fonereffe que les Perfans ont conftruite vers 1'an 1630 : ils y ont une garnifon. La ville eft petite \ mais les ha-bitans , qui font tous Marchands , vivent avec aifance. Saram ■, a dix lieues de Gori, eft une aurre petite ville, accompa-gnee aufti d'une citadelle , dans laquelle le Roi de Perfe entretient une garnifon. 2. Le Cake t ou Kahet. Cette Principaute , qui renferme une partie de Vlberie des Anciens, occupe la partie orientale de la Georgie. Son eten-due eft d'environ foixante lieues du fud au nord > & de trente du levant au cou- 11 iv 176 Methode de Geographle. chant. La riviere de Iori, qui apres avoir recu celle de Canat , fe jette dans le Kour, rraverfe le Caket dans toute fa lon-gueur. La pluparr des habitans denaeu-rent fous des tentes , dc vivent a. la tar-tare. Le pays eft peu cultivć j mais on y rrouve beaucoup de muriers , aufli la foie eft la priricipale richelfe des habitans. Baclriani ehateau fituć dans la partie feptentfionale du Caket, eft la feule placs qu'on connoilTe dans ce pays. CHAPITRE II L LA RUSSIE ASIATIQUE. C a r t e s. S/ on ne peut fe proeurer /'Atlas Ruftien, dont nous avons donne la Notice dans le Catalogue des Cartes , Tom. 1 a pag. 4Z i , iljuut conjulter la Carte generale de 1'Empire des Rufles , dreffee par M. Robert. On peut y joindre celle qut M. HAS1US a inthulet Imperii Ruf-fici dc Tatari a; Tabula , & quil a ac-compagnet d'une Table fynoptique. jfSlous avons dccrit au troifieme volu-nie de cet ouvrage , la partie de 1'Europe La Rujfič A(iatlqut. 177 fcjui eft fous la domination de 1'Empire de Rullie : il nous refte j pour achever ce qui concerne cer Empire , a decrire la parcie de l'Alie qui eft foumife a fes loix , &c quon nomtne RuJJle Ajiatique. Elle eft beaucoup plus etendue que la premiere j mais moins fertile , moins habitee , pref-que deferte me me en beaucoup den-droits. On la partage en quarre Gouver-nemens ; ce font ceux d'' A JI r uhan 3 d'O-renboura 'j de Kajak Sc de Tolosk ou de Sibćrie. Les trois premiers font litues du fud au nord, en Temontant de la Mer Cafpienne. Celui de Siberie occupe tout le nord de 1'Alie. A R T I C L E I. GOUVERNEMENT D'AS TRAK AN. E Gouvernement eft borne au nord par la Province de Cafan , au levant par la riviere de Jaick , qui le fepare du Pays des Calmoucks, au midi par la Mer Cafpienne , Sc au couchant par le Don , qui le fepare de la Ruftie dEurope, Sc enfuite de la Circaftie. Les Huns , les Avares, Sc d'autres Barbares , qui ravagerenc 1'Eu-rope au 1VC & au VT fićele , fortoient H v 17 S Mtthode de Geographk* de ce pays. 11 a ece la pnncipale Provinci du grand Empire connu des Hiftoriens Arabes fous le nom; de Capchac ou Ki-pfchach , fonde par un des hls de Gengis-kan. Tamerlan en fir la conquete a la fin du XIVC (iecle 8t l'on y voit eneore les ruines de plufieurs villes qu'il fubjugua, 5c qu'il detruifit. Le Czar Jean Bazilovritz sen empara en 1554 » fur les Tartares. Nogais , qui y demeurenr eneore. Le Volga , qui traverfe ce pays dans fa partie oecidentale, du nord au midi, quel-ques autres rivieres qui arrofent le pays , Sc la Mer Cafpienne , y fourniifent du poilfon en abondance , fur-touc beaucoup d'efturgeons. Le terrein feroir fcrrile s'il pleuvoit plus fouvent dans le pay$. Le Volga , en fe debordant comme le Nil , fertilife fes bords dans la diftance de dix a douze milles , qui prodnifent beaucoup de fourage. Les fruics de ce pays font admirabies, fnr-tout une efpece de gros melons que les Tarrares appellent Karpus 3. &c que les Perfans nomment Jlinduanes , parce que la premiere graine eft venue des Indes. Ceft un excellent fruir. . II a l'ćcorce d'un beau verd , la cliair d'un nacarat pale, & la graine noire; II y a de fort belles vignes, done les Dtiemiers plants furenr apporrćs par. des ^'Luciiands de Pcrfe j.en 1.61 o. Pierre le ta RuJJie Afiatlque. ffp Grand les a beaucoup aiigmentees , par diflerens plants tirćs des environs du Rhin & de ta Mofelle. La viUed'Ajlnika/2, qui donne fon nom a rouc le Gouvernement, eft fituee dans 1'ifle de Dolgoi, formee par le Volga » douze ou rreize lieues au-deiTus de fon embouchure dans la Mer Cafpienne. Elle eit le fiege d'un Archeveque RiuTe , qui y fut etabli en 1554, par le Czar Jean Ba-filovvirz, lorfqu'il s'en fut rendu makre. De loin , la ville d'Aftracan paroit fort belle, a caufe d'un grand nombre de tours fk de clochers qui en rendcnt 1'afpećt. agreable; mais le dedans ne repond pas a cetre apparence car les maifons ne font que de bois , & affez mal-baries. Au refte la place eft forrifiee d ime double enceinte de murailles rlanquees de tours , pourvue d'une bonne arrillerie , tk d'une forte gar-nifon. Comme elle eft fituee fur les firoii-tieres de TAlie &z de PEurops , les Arme-niens , les Indiens , les Perfms , les Tar-tnres Mahometans , les Calmoucks , les Gaorgiens Si les RulTes s'y rendenr, ik j fonrun commerce confiderable. Le climat y eft (i chaud , qu'aux mois de feptembre & d OcLobre , Ls chaleurs*-font aulfi grandes qu'en France au plus fort de 1'ete -y mais le vent du fud rafraichit un peu 1'air. Lin. ver ne dure guere quc: dcujc mois j mais il eft-exrrcm?ment rude,, i 8o Mtthode dc Geographk. & le froid fi violent que la riviere gćle Cv porre des traineaux. L'Ifle de Dolgol Dolgoi-Oflrojf \ c'eft-a-direl'IJlc longue 3 a des marais qui puo-duifenr du fel en fi grande abondance , qu'on en emporte tant que Ton veuc , en payant feulement fix deniers de droirs pour chaque poude. Le poude eft en Ruflie , IVO poids de quarante livres du pays , &c qui revient a environ trente deux livres de Botre poids de marc. Ce fel fe forme de lui-meme a 1'ardeur du foleil , qui ic tryftalife de rćpaifteur d'un doigc ik le fut furnager. 11 eft t res-bon} & les Ruffes en font un grand trafie. Une branche des Calmoucks, nommće Torgauts j ou Tartarcs d'Ajuka j s'eft ćtablie, au commencement de ce fićcle , dans les Landes d'Aftrakan entre le Jaick font, Kraj}wyar 3 tk Tschcrnoyar fur le Volga j Ld RuJJie Afiatujue'. 181 'Gurjeiv j dans une petite lile que forme le Jaick a fon emboucliure dans la Mer Caf-pienne j Jait^koi-Gorodoc , fur la Mer Cafpienne , a 1'emboucliure da Jaick. La pecne y eft tres-abondante \ 6c on y fait une tres-grande quanrite de Caviar, qui elt un compofe d cenfs de poilfon confirs. Vers la cote oecidentale de la Mer Cafpienne , font eneore quelques forts dont le plus conliderable eft Kisljarshaia 3 fur la riviere nommee Tcrek. Pierre le Grand & enfuite l'Impćratrice Anne , avoient etendu leurs conquetes fort avant au midi , le long de la Mer Cafpienne j tk par la paix conclue a Rats* cha , en 1752 , les Perfans avoient cede pour toujours a la Ruflie les Provinces de Dageftan &z de SchirWan. Mais les trou-pes Rulfes ne pouvant s'habituer a 1'air du climat, & les revenus de ces provinces ne fuffifanc point a Tentretien des troupes neceffaires pour les garder , les Ruffes ont abandonnć ces nouvelles conquetes , en fe rć fer van t le commerce libte dans les Etats de la Perfe. Ainfi la riviere deTerek, peut aitjolircPhui etre confideree comme la borne qui fepare les Etats de 1'Empire de Ruflie , de ceux de 1'Empire de Perfe. 18 i Methode de Geographic. A R T I C L E II. COU VERNE ME NT D'ORENBO URG. LEGouvernemeut d'Orenbourg} qui n'a ete forme qu'en 1738 , rtnterme les Provinces habitees par les Tartares aVUfa ou Ujimski. II prend fon nom de la ville & Orenbourg 3 que 1'lmperatrice Anne fit batir & forcifier , dans 1'endroi: ou la riviere dOr rombe dans le Jaick. Cer ćta-bliftement fe fit en 1738. Mais la fnua-tion s'en rrouvant incommode , on le derruifir en 1740 , & on le tranfporta plus bas 3 mais roujours fur le mem.e Fleuve. Cetre ville eft devenue le reruge des P^rfans &c de leurs formnes , dtpuis leurs guerres civiles , & s'eft accrue de leurs calamitćs. Les Indiens , les peuples de la grande Bucharie , (parrie de la Tar-. tarie) y viennent trafiquer. Orenbourg eft ainfi devenu un des entrepots de 1'Afie. Les aut res villes font, Ufa j ville forti-fiee fur la riviere de meme nom , dont les environs font fiabites par les Ta rt >res Raj-ki rs & UJimskt ; Samar s k fur le Samara , 6c Kungus j pres de laquelle on voit une caveme , qvu attire la curiofire des etran-gers. Cette caveme eft furt fpacieufe. On Za BuJJie Afiat'ique. X 8'J: dir quc grand nombre de Ruffes y demeu-rerent long-temps cachćs , pour echapar a une irruption de Cofaques, &: que pour en conferver le fouvenir , ils y eleverenc une croix de bois , qui s'y voit encore. Le pays d'Orenbourg eft hćriuc desbranches du Mont Caucafe. Des fortereffes elevees de diftance en diftance , defendent les paf-fages des montagnes & des rivieres qui en defcendent. Ellcs portent prefque toutes le nom des rivieres fur lefquelles elles font ficuees. A R T I C L E III. GOUVERNEMENT DE CAS AN. (^>E Gouvernement eft d'une tres-grande ćtendue , & renferme ce qu'on appelloit ci-devant la grande Permie. Sa parne me-lidionale formoir un Royaume qu'on appelloit le Royaume de Cafan qui obeif-foir a un Kan des Tartares d'Ufa ou Ufimski, fur lefquels les Riilfes 1 ont con-quis en 1551. Plus anciennement il etoit renf.rmć d a ns l' Eni pire de Capchac , fonde par un des fils de Gengis-Kan. Les RuMes parcagent ce Gouvernement en dix-huic Viezdš, ou Provinces patv ticulkres. i ž 4 Me z hode de Ceographk. i* La Province de Cafan } prend fbfi nom de fa principale ville , la capitale de tout ce Gouvernement. II eft fercile en fruits > en lćgumes , Sc en bleds qn'on tranfporte jufqu'a Pćterfbourg. On en tire aufli des pelleteries fk des bois de conf-trućtion. La ville de Cafan eft fituee fur la riviere de Cafanka , qui uri milic au-delTous fe jette dans le Volga. Ceft une grande ville , riche & bien peuplee : mais fujete aux incendies , parce que los maifons ne (ont baties que de bois. Kile en a ćprouve un tres confidćrable en 17 5 i, $c un autre en j 764 ou 1765. llyabeau-coup dEglifes , & une forre citadelle , dont l'enrrće eft abfolument defendue aux Tartares } & fous peine de la vie. Les babitans de Cafan font riches \ ils fontun grand commerce avec lesTurcs du c6te dela Mer Noire. Laifeheu eft une petite ville fur la Kama. Les bateaux de fel qui vien-nent de Solkamskoi, s'y rendent tous les ans, & y prennent des mariniers qni les menent au Vblga , vers Niznei Novogrod. Environ a foixante-dix milles de Cafan , pres de la Kama , fe voient les ruines de 1'ancienne ville de Bulgar capitale de fancienne Bulgarie , doti 1'on croit que font venus les Bulgarcs, qui, vers la hn du VIP iiecle, s'erablirent fur les cotes de la Mer Noire , dans le navs qui encore aujou)rd'liui porte leur noro. Le Czar La Rujfic AJiatlaue* i:8 j Plerre le Grand allant en 1712 , faire la guerre aux Perfans , examina ces ruines , &č ordonna qu'on traduifit en langue ruf-fe beaucoup d'ćpitaplies qui eroienc les unes en langue turque & les aucres en langue armenienne. Le Czar joint i fes titres celui de Duc de Bulgarie. Mal-myfch , petite ville fur la Wb.tka. 2. La Province de Simblrsk a pour capitale Slmbirsk j a(Tez grande ville , fur le Volga : fa fituation entre Cafan & Af-tracan la rend alTez confiderable. On re-marque encore dans ce diftrićt, BieIoyery & Saratoiv fur le Volga 3 Petrovvsk j fur la Medwediza j Sursk „ fur la Sura. 3. La Province de Penfa habitee , paE des Morduas 011 Mordvvins, peuple idola-tre , a pour capitale Penfa j fur la Sura. On y trouve encore Ramfaik> Mokschaisk, Te mar &C Saransk. Les autres Provinces, qui, comme les precedentes, prennent toutes le nom de leur capitale , font, : 4. Alatyr. 5. Swiask. 6. Zywilsk. 7. Tfchebakfar y afTez grande ville fur le Volga. 8. Kusmodemiansk, petke ville fur le Volga. On y remarque encore Waftligo-rod j autre petite ville fur une montagne. i 8 6 Me t hode de Geographic* 9. Kokfckaisk , petice vilie fur la riviere de Kokfchaga. 1 o. Careivo-Kokschaisk fur la meme riviere. 11. Santfchursk. 1 z. Jarensk. 1 5. Ur/um j fur une riviere de meme nom , qui fe jetce dans la Viatka. 14. Le Province de G lino w 3 repond a la Province nommee autrefois Viatka dont les habitans etoient connus fous le ri^im de Votiakes : fa capitale eft Giinow ou Chlinofj Eveche fur la riviere de Viat' ka. On y fait un grand commerce de miel, de cire &c de beurre. On y remarque encore Orlow ou Orel j &c Scheitakpw j aufli fur la Viatka. 15. La Province de Kaigorod } dont les habitans vivent du produit de leurs terres* & principalement de la peclie , qui eft tres-abondance chez eux. Sa capitale de meme nom, eft une petite ville fur la Kama. 16. La Province de Tscherdyn renfer-me une partie de 1'ancienne Permie. Sa capitale eft Tfcherdyn 3 ville Epifcopale , fur la Koi\va. II y a une ecole allemande. 17. La Province de Solkamsk renfer-me une autre partie de 1'ancienne Permie. Sa capitale eft Solkamskoi j ville confide-lable fur rUlfolka. On y compte fix cens La RuJJie Afiatiauc. i S 7 maifons de bois , & plufieurs EgliTes &C Monafteres batis en pierres. Cette ville eft ceiebte en Rullie pour fes falines , qui font tres-abondantes , & dont le fel y eft eftime le meillcur de toute la Permie. Ces falines font au nombre de quarante huit : elles appartiennent a difFerens par-ticuliers , &c par cette raifon ne font pas egalemenr mi fes en valeur. Sur le bord de la riviere de Pyfchkorica, laquelle rombe dans la Kama , eft Pyfchkorica y ou on travaille beaucoup de cuivre. Ce cui-vre y eft apporte des montagnes des en-virons , ou il eft tres abondant. Le mo-naftere qui eft aupres eft proprietaire de vingt-fix falines , aux environs du village de Dijaduchina. il en poftede quatre au-tres , fept verftes plus bas. 18. La Barome de Stroganovs j eft un grand pays fort peuplć , ou on compte plu-licurs petites villes 8c villages. Les Ba-rons font proprićtaires d'un grand nombre de falines. lis en ont vingt deux au village de Jenwa , &c quarante aux environs de celui qu'on appelle Nowo-Uj[jbtie* i 8 S Methode de Geographic. A R T I C L E IV. GOUVERNEMENT DE TOBO.LSKi O U DE S I B E R J E. T i E Gouvernement de Sibćrie eft le plus ćcendu de tous ceux qui compofent 1'Erri* pire Ruflien. 11 comprend tour le nord de l'Afie. A 1'occident il tient aux Provinces de cet Empire. II n'a d'autres bomes aii nord , que la Mer Glaciale ; a Torient que 1'Ocean oriental, &: au midi, que la Tartarie. Le nom de Sibćrie , qu*on donne a cou-te certe grande contree , femble venir d'une ancienne ville de Sibir > b'irie fur la droite de l'lrtifch, a dix-huit v/erftes de 1'endroic ou eft aujourd'hui Tobolsk , de qui a ece la rćfidence des Rois Tarcares de Sibćrie. Une perice riviere de ces cantons, qui fe jetce dans l'Ircifch , fe nomme en-core aujourd'hui Sibirka. On y trouve meme quelques reftes d'une enceinte for-tifiee j mais rien de plus. Lair eft exrremement froid en Sibćrie. On s eft meme alfure j par des experien-ces bien conftarćes , que le froid y eft plus apre quen aucun pays du monde. Les rivieres y fonc couvertes de glace la La Sibćrie. i S 9 plus grande partie de 1'annee. Quelque tois la neige commence a tomber des le mois de Septembre 3 &c forc ibuvent on en voit encore au mois de Mai. Si les grains ne fe trouvent pas murs au mois d'Aout, il n'y a plus a. efperer de rćcolte, & il arrive fouvent-, dans la Province de Jenifeisk, que les moiflons fe trouvent couvertes de neige , avant qu'on ait pu penfer a en faire la recolte. La terre ne degele jamais plus bas que cjuatre pieds , čcdans plulieurs endroits , elle reftegelee au-delfous d'un pied. Mais les habitans ont diffćrens moyens de fe garantir du froid. Independamment du bois & des pelleteries dont le pays eft abondamment pourvu , ceux de la Province de Jacutzk emploient les glac,ons meme pour fe dć-fendre de la rigueur du climat, lis tail-lent de grands morceaux de glace , de la grandenr des fenerres de leurs maifons , &: les y placent en dehors : 1'eau dont ils les arrofent enfuite, fe gele promptement, 8z les attache fortemenr a la muraille. Par cc moyen ils fe trouvent a couvert du ^rand froid, fans etre prives de la lumie-re. Ceux qui ont des chaflis de vtrre , les placent en dedans , lailfant un intervalle entre le glacon , qui au moyen de cela n'eft point endommage par la chaleur de k chambre } mais les gens du commun negligent cette attention. Depuis le com- 19 o Me t hode de Ge'ographie*' mencement d'Oćtobre jufqu a la fin de Decembre , on appercctic, dans les pays tfitues vers femboucliure du Jenifea, beau-coup d'Aurores boreales , qui font quel-quefois fort arTrayantes 3 cV M. Gmelin , favant Medecin qui a voyage dans ce pays par ordre de la Cour de Rullie , penfe que les Aurores boreales viennenr toutesde ces contrees. Autant 1'luver eft rigoureux , autant l'ete eft ajnreable. II eft mcme (i chaud en quelques endroits, que les Tun-goufes de la Province de Jakutzk vont H plupart du tems tout nuds. 11 n'y a pref-que point de nuit; & vers la Mer Glacia-le, le foleil refte long-temps fur 1 horifon , fans fe coucher. Les produćtions de la terre prennenc alors dcs accroiflcmens fenftbles. A mefure qifon approche de cette mer , le bruit du tonnerre fe fait moins entendre j de forte qu'il eft extre-mement foible fur la mer ; mais Teclair ' apperc,oit tresbien. Au contraire , il y a beaucoup d orages , dans les contrees meridionales de la Siberie. Toute la partie feptentrionale ne pro-duit ni arbres ni grains , de forte qu'au-dela du 60 degre de latitude, le pays eft abfolument inculte. On ne peut en ex-cepter , que la Province de Jakutzk , oii lorge murit dans quelques annees plus favotables. Les habitans ne vivent que de chafle čc de peche. Les Rulfes qui y ont des • La Siberie. 191 erabliffemens, recoivent desgrains des par-ries plus meridionales. Ces derniercs font, d'une fertilite finguliere , principalement celles qui fonr aux environs du Lac Bai-kal , & a 1'orient vers la riviere Argun. Mais la nćgligence des habitans 3 qui la plupart ne connoilfent point 1'agriculture, rend cet avantage inutile. On n'y rrouve done que des paturages , qui nourilfent beaucoup de chevaux , de betes a cornes , &c. done les Tartares font prefque toute leur nouriture. Mais on y renconere aufli quelques deferts qui ne produifent rien. Les Afperges , en differens endroits de la Siberie , croiifent d'une grandeur con-fiderable , Sc rout en eft bon a manger. Le defout d'aurres produćtions bonnes i manger , eft repare par 1'abondance des animaux , & fur tout des poilfons, dont la chair eft tres-delicate. Vers la Mer Glaciale & en quelques autres endroits , la terre ne produit que des bruyeres. Le bois qu'on y trouve eft apporre par les ri-vieres , 011 rejette par la mer ; mais dans tout le refte de la Siberie , il y a desgran-des forets , garnies d'arbres de toute efpe-ce. Le Cedre de Siberie eft une efpece de Pin , qui croit fort haut, & dont les amandes font tres bonnes a manger. On en fait grand ufage. On en tire meme une fort bonne huile , dont les RulTes fe fer-vent , au lieu de beiiiie , dans le temps eki Carerne. i 9 i Mechode de, Geographic. Les fort-ts ion t remplies d'une in rinite" d'oifeaux &z d'animaux, dont plufieurs font particuliers a. la Siberie. Geux dont les peaux font les plus recherchees , font les renards noirs , les martes zibelines , les gloutons , les hermines j les ecureuils , les caftors. Lorfque les peaux de renards font d'un beau noir, on les eftime plus que celles des martes zibelines. On rencontre des renards blancs $c des gris , vers la Mer Glaciale. Les plus belles martes zibelines viennent des Provinces de Nertfchinsk & de Jakutzk : on les prend principalement dans les montagnes de Stanovi - Chrebet. Les habitans fe mettent dix ou dou-ze enfemble pour cette chalfe, Sc con-viennent dobeir en tout a celui d'entre-eux qu'ils ont choifi pour leur comman-der, Ce qu'ils prennent de martes fe par-tage egalement. lis ne manquent jamais, avant de partir, de faire vceu de donner a la divinite une certaine quantite de ce qu'ils auront pris. Les Tartares font tres-adroits a. prendre les martes , & ils y emploient toute forte de moyens , juf-que-la , que fi 1'animal excede , ne pou-vant plus fe defendre , monte fur un ar-bre , ils y mettent le feu. Le marte forcć de defcendre, fe prend dans un rets tendu aux environs , & on le tue. AulTi s'apper-^oit-on que 1'efpece en diminue confidera- blcmenr La Siberie. 19 > blement: ce qui porte un grand prejudice aux revenus de la couronne , fur-tout de-puis epe 1'avidite des RuflTes en a detruic une grande quantite. Dans les commen-cemens lesNations tributaires ne payoient leur tribut quen feules peaux de marres. Aujourd'hui, on re$oit des peaux d ecureuils , d'ours, de bufles , de loutres, &c. On regoit me me de 1'argent au lieu de peaire : 5c cela fe pratique non feulement dans les environs de la Lena j mais eneorc dans les Provinces d'Ilinsk , d'lrkutzk , de Selinginsk &: de Nertfchinsk. Autrefois les Tartares payoient leur tribut en peaux de martes , qu'ils livroient celles qu'ds les avoient priles. De forte que des peaux d'une tres-grande valeur fe trouvoient me-Ićes avec d'autres fort communes. Si quel-qu'un leur propofoit a acheter une mar-mite de fer , ils reinplifloienc de peaux de martes , qu'ils donnoient bonne-ment pour payer la marmite. Mais aujourd'hui ils en connoiifent ii bien la valeur , qu'ils les vendent le plus qu>ils peu-vent, en contrebande 3 a des Marćhands qui leur en donnent un prix raifonnable, & ils payent au trćfor impćrial un rou-ble pour chaque peau qu'ils auroient du fournir. lis difent pour excufe que le marte eft plus rare que dans les anciens temps; &c cela eft vrai, 1'efpece en etant confide-Tome Vil. \ 194 Mćthode de Geographie. rablcment diminuće , comme nous Tavoriš rematouć plus haut. Les ecureuils de Siberie fourniffent les peaux qu'on appelle Petit gris. 11 y en a de dirfćrentes efpeces. On en trouve de tres-noirs , mais fort perits , dans les moritagnes de Stannosv-Chrebet. Ceux de Berczow font plus grands, mais de cou-leur cendree. On recherche en Siberie ceux qui ont une couleur argentee , &; on les prife beaucoup plus que les noirs. Les ecureuils qu'on appelle volaus , n'ont de , commun avec les autres, que leur lćge-rete i courir fur les arbres. Ils relfemblent plutot aux rats de la grande efpece. Ce qui les diftingue , eft une pe.au aftez forte qui rient leurs pattes de devant a celles de derriere : cette peau a un doigt de lar-geur , &c 1'animal peut 1'etendre ou la relTerrer. Elle lui ferc ćtendue a faurer d un arbre a 1'aurre , lorfque 1'efpace qui les fepare neft pas confiderable. Leur queue n'eft pas fi longue ni fi fournie que celle des ecureuils ordinaires, tk elle elt plutot fauve que noire. Les caftors font des animaux tres-in* duftrieux & tres-paifibles. L'cfpece en eft confidćrablement diminuće. Lesenvirons du Jenifea, &£ ceux de l'Obi, font les endroits ou on en trouve le plus aujour-d'huL Les caftors du Kamtfchatka, font La Siberie. i p 5 remarquablcs , pour leur grofTeur. La Siberie a grand nombre de mines de fer Si de ciuvre ; nous lerons men-tioti des principales. Elle en a meme plu-fieurs d'argenc , dans quclques-unes def-quelles 1'or fe trouve en alTez grando quantice. Ele en a aufli de pierres prć-cieufes. Les topafes de Siberie font ii belles , qu'il faut etre grand connoilTeut pour les diflinguer des orientales. On trouve de petits agathes aux environs d'Argun : ils font rćpandus dans des cam-pagnes fablonneufes , Sc fur le bord des rivieres & des lacs. Nous parlerons du jalpe verd qu'on y trouve auflij mais c'efl le Defert de Kobi ( en Tartarie ) qui four-nit la plus grande partie de ce qui s'en voit en Ruflie. La Siberie a auili un tres-grand nombre de carrieres d'une pierre tranfpa-rente , qu'on fepare en lames , čk dont on fe fert au licu de verre. II y en a de dirferer.tes teintes. On elfcime beaucoup celles qui ont la clartć de 1'eau } mais on ne fait aucun cas de celles qui font vertes. Dans toute la Siberie on en garnit les fe-netres, Sc on en fait les lanterne? : il n'y a point de vetre aufli tranfparent. On Tcmplcie meme dans toute la Ruflie, ex-cepte dans les grandes villes. Enfin on ne fe fert point d'auire chofe pour les fene-tres des vatfleaux , parce que cette pierre 1<)6 Methodc de Geographie. eft bien moins fragile que le verre , & ne fouffre aucun dom m age de la fecounč qu'occafionne la decharge des grofles pie-ces d'artillerie. Lacs. Le Lac Baikal & l'Attin , font les Lacs les plus confidćrables de la Siberie. II y en a une infinite d'aurres , les uns d'eau douce , les autres d'eau falće. Ce qu'il y a de remarquable, c'eft que ceux d'eau douce deviennent quelquerois fales j & que ceux d'eau falće perdent encieremcnt leur falure. Si quelques-uns fe deflechent, il s'en forme d autres dans des lieux ou on ti'en avoit jamais vus. Le Jamufcha , dans la Province de Tobolsk, eft le plus confi-dćrablc entre les Lacs d'eau falće. Son fel, qui eft tres-blanc , fe cryftallife en cu-bes. On trouve encore dans la Siberie des fources d'eau falćes 5 8c meme des montagnes de fel. Le Lac Ba/kal j que les Nations qui habitent fur fes bords appellent la Mer Samce j s'ćtend du nord au midi pres de cinq mil le werftes. II n'en a que vingt a. trente en largeur , d'orienr en oecident j en quelques endroirs meme il n'en a que quinze. De tous cotćs il eft environne de ■haures montagnes. Il commence a fe geler a la fin de Dćcembre, & ne dćgele que vers le commencement de Mai. II La Siberie. 197 eft rare qu*aucun batiment perifle fur ce Lac , depuis Mai jufquen Septembre. Mais en ce dernier mois, il s'ćlevc des vents furieux qui y caufent bien des nau-frages, dont les habitans croient fe garan-tir en lui donnant le nem de Mer. Aux environs de la riviere Bargulin , le Lac re-jette en grande abondance une forte de bitume appellee malthe , qui fe brule dans les lampes. L'eau en eft tres-douce , Sc limpide. On y peche beaucoup deftur-geons tk d'autres poiffons. V/ilcin a environ dix-huit milles de longueur , fur douze de largeur. Les Ruf-fes 1'appellent Teleskoi-Ofero , a caufe d«S Lelefes , nation Tartare qui habite fur fi»s bords. Les Tartares le nofnment Altin-mouks Altin-nor. La j^r-tie feptentrionale de ce Lac fe gele quel-quefois de facon qu'oJi peut marcher def-fus. Mais la partie meridianale n'eft point fujete a cet inconvenient. Son eau eft fta-gnante , ainli que celle des rivieres qui s'y dechargenr , lefquelles 11'ont de pente confiderable, que lorfqu'elles font groilies par les neiges des montagnes que le fo-leil a fait fondre. Rivieres. Les principales Rivieres qui arrofem la Siberie , fonr, V Obi 3 le Jenifia 3 la Lena 3 qui coulent du fud au nord , & fe jettent I nj 19 S Mc'thode de Geographie. dans la Mer Glaciale j 8c \Amur> qui a fon cours vers 1'orient 8c tombe dans 1'Ocean oriental. UObi fort-du lac Alrin , fous le nom de Bi j 8c prend , Iorfquil a recu la riviere de Catuna 3 le nom cVObi , c'eft-a-dire , grand Fleuvc. Les Tarrares & les Calmouks l'appellenr U mar. 11 merite le nom de grand, par la largeur de fon lit, qui eft roujours coniiderable*, de forte qn'il eft navignble jufcfll'au lac ou il prend fon origine. vSon cours eft foK rr:mquille. II eft par-tom tres-poi(Ibneux. Vers la ville de Berefow, il forme plufieurs llles. Aprćs un conrs tres cor.lidtrable , il fe jette fous le 6jc dćgre de lar,t;.de, & le 86e de lon-gitude, dansun golfe de la Mer Glaciale, qui s'avance dans les terres , plus de qua-tre-vingt milles , 8c ne rinit qu'au 7 ie de-gre de latitude , 8c au 9ocde longitiule. L'Obi recoit une infinite de rivieres a droiie & a gauche. Les plus confidćrables font, le Tom , qui eft navigable jufqu'a la ville de Kutfnezk. Il prend fa fource pres celles de XAbacan>h. \ 3 degres dc latitude, recoit a Kutfnck le Condoma 3 & fe jette au jSc de longitude , dans 1'Obi , qui de-puis cette jonćtion eft d'une largueur plus coniidćrable. UlrtifH vient du pays des Calmouks , ou il craverfe le Lac Saiftan , 8c apres avoir parcouru un tres grand pays, il fe La Siberie. 19 9 joint a 1'Obi , au fixićme degre de latitude. II a un tres-grand nombre d Ifles , peu ćlcvćes , qu'on n'appcjrcoit que lorf-que les eaux font baffes. II arrive queL quefois quc quelques-unes de ce.s nI s dif-paroilTent , & qu'il sen forme d'autres autre part. _ Le Jenifea ne le cede guere a 1'Obi. Les Tarrares & les Mogols le nomment Keen : les Oftiakes 1'appellent Guck ou Che-fes c'eft-A-dire , le grand Fkuve. II fe forme de deux pctites riviercs, V U luke n &c le Bri-kem 3 qui fe joigncnr au 51' degrć 30 minutes de latitude , & au 111{ degre de kmgirude. Il coule droir au nord, de forme a fon embouchure dans la Mer Glaciale un grand golfe , qui renferme plufieurs Ifles. Son lit eft picrreux. Ses ri vages, principalementa la droite, font fer-mes par des montacmes dc des rochers. Les poilfons qu'on y peche ont un gout tres delicat. Son cours eft fort rapide ; mais il fe ralentit a mefure qu'il s'appro-che de fon embouchure , de forte qu'en-fin il eft prefcju infeniible. Le fleuve eft navigable depuis fon embouchure juf-qu'a Abakan , & meme au-delTu*. En-tre differentes rivieres qu11 rccoit a droite &c a gauche , on en remarque trois qui portent le nom de Tungufca 3 & qui s'y joigneot enfemble. Celle a qui le nom de Tungufca eft particulierement aftećke*, I IV 200 Methodc dc Gcographie. ne le prend cjue lorfcju'eile a recu celle tVl/icn. Plus haut elle s'appelle VJtngara, Sc fort du Lac fiaikal. Son fond eft pier-reux j il a mcme quelques rochers qui forment des cataraćtes : cependanc la riviere eft navigablc , meme en ete. La Lena eft un autre grand fleuve , qui arrofe les conrrees orientales de la Sibd-rie. 11 prend fa fource aux environs du Lac Baikal, Sc apres un tres-long cours , ils fe parrage en cinq branches, qui vont fe fetter dans laMerGlaciale :trois prennent leur cours vers 1'occidenr j les deux aurres vonr a Forient. Le cours de I a Lena eft forc pailible. Son lit eft de fable, Sc on n'y rencontre point de rochers j mais fes bords font aflez garnis de montagnes. Les prin-cipales rivieres qui fe joignent X la Lena , font la W'ttint VOIecrna j VAldan Sc le JVilnL L'Aldan recoit a droice VUtfchun Sc la Maja : celle-ci recoit le Judoma. On remonte de la Lena Sc de 1'Aldan dans la Maja Sc le Judoma , prefque juf-qu'aux fources de cette demiere. En fai-fant enfuite un chemin de vingt milles, on arrive a VUrack 3 qui coule a Forient , Sc tombe dans la Mer de Kamtfchatka. ISAmur fe jette dans FOcean oriental, apres un cours d'environ 400 milles. On le nommoit autvcfoisjCharan-muran. Les Chinois Sc les Manrcheous 1'appellent au-jourd'hui Sagalien. On lui donne encore La Siberie. 101 les noras de Jamur 3 d'Onon de Helong-Kuing čk de Schilka. Ce rleuve prenđ fon origine au Lac Kulon on Dalai-nor. 11 eft tres-poifloneux &c navigable jufqu'au Lac. Montagnes. Les montagnes qui feparent la Siberie de la RulTie , font d'abord les Kamenol-Poias j qui depuis le Dettoic de Waigatz , vont du nord au fud \ enfuite les Monts t/rac> qui commencent dans le pays de Verfchoture , defcendent au midi juf-qu'aux environs d'Orenbourg , puis tournent .i l'occident. Une autre chaine de montagnes fćpare au midi , la Siberie du pays des Calmouks & de čelni des Mongales. Celles qui rćgnent entre 1'Obi & 1'Irtis fe nomment Monts Ahai j & celles qui font entre le Lac Baikal & le Jenifea , fe nomment Saiansk. Toute la Fartie de Siberie qui regarde le nord 6V: orient, eft remplie de montagnes. On y remarque fur-tout une grande chaine ,qui regne entre les riviercs qui vont a la Mer Glaciale , & celles qui vont a la Mer Orientale. Peuples qui hahitmt la Siberie. On peut rapporter a trois claffes bien diftinćtes les difterentes Nations qui ha-bitenc la Siberie. Ce font les nature!s 1 v 101 Me t hode de Ge'ographie* du pays , les Tartares bc les Rufles. Les naturels , premiers habirans de la Siberie , font partagćs en plufieurs peu-ples, plus ou nioins barb.ires, qui one la plupart peu d'idee de religion , ou qui nont que quelqu.es pratiques fuperilitieu-fes, eitrememenc grollieres, comme de rendre leurs hommages a une peau de marte ou autre , qu'ils ont fufpendue dans un coin de leur cabane. lis menent pref-que tous une vie fort miferable. La plupart pavent tribut aux Rulfes , qui les laiflent vivre a leur maniere. lis font ce-pendant parvenus a en baptifer & meme a en inftruire quelques-uns. Ces peuples font, les W\ogu/k^esj qui habitent la Province de Tobolsk. Les Samojedes j qui habitent les bords de la Mer Glaciale , depuis Archangei , jufqu'aux embouchu-res de la Lena. Les Jurakes qui en font une branehe , oceupent les bords de cette mer , entre 1'Obi & le Jenifea. Les OJliacks j nation nombreufe repandue dans les Pays de Narimsk , de Jenifeisk , d'Obi , de Surgutsk & d'Irtich. Les Ba-rahinsk oceupent les deux cotes de 1'lr-tifeh. Les uns payent tribut a 1'Empereur de Ruflie , les autres au Contaifch ou Khan des Calmouks. Les Tungoufcs ou Tingifes 3 font une tres grande narion qui habite les Pays de Jeniseisk Sc d'Irkutzk. Us fe nartage,nt en plufieurs branehes, qui La Siberie* 10 3 fe diftinguent par un furnom. Les Bura-ees ne differcnt des Tungoufes que par le langage. Ils.habitoienr autrefois les par-ries meridionales du Lac Baikal \ mais fur la fin du dernier fiicle , its fe font eta-blis plus au nord , vers le pays d'Irkursk. Les Jakutes 8c les Jukagtes > font vers les bords de la Mer Glaciale. Les Tfchukfchi. čV les Olutorski. habitent le nord-eft de la Siberie. Ce fonr des peuples tres-feroces , que les RulTes n'ont eneore pu foumettre. Les Schclates , les Olutorski > les Koreiki j demeurent plus au midi, dans ces con-trees 3 mais on les connoit peu. Les Kamtf-chadalcs habitent la prefqu'ifle de Kamt-fc h atk a. Les Tartares etoient autrefois les rhai-tres de la psrtie oecidentale de la Siberie, Celi fur eux que les Rufles ont coni men-ce a en faire la conauete ; & il en eit rede beaucoup dans le pays. lis font gćnerale-ment aflez paifibles , pavant exactemenr les tributs 3 mais au refte ils ont leurs Kam particulieis , &c vivent £ leur maniere. 11 y en a d'idolatres &c de maho-metans. Quant aux Rufles, qui font aujottrd'hui les maitres de toutes ces vaftes contrees , ils y ont forme une infinite d'etablilTe-mens, a mefure qu'ils nntTait des progres dans le pays. lis y ont bati des villes, des forts, etabli des Eveches , des Mo- I vj 204 Metk ode de Geographie. nafteres. Celt le detail des principaux de ces etabliflemens , que nous nous propo-fons de donner dans la Defcription qui va fuivre. Le peu que nous avons dit des produc-tions particulieres a la Siberie j des ani-maux &c des oifcaux qu'elle nourrit, n'eft qu'une foible efqui(re de ce qu'il y auroit a dire fur ce fujet. Les mceurs, les coutumes, la religion ou plutot les fuperftirions des dirrer#enspeuplesqui 1'habirent, ne feroient pas nioins intereflantes a faire connoitre. Mais on n*a eu }Ufqu'i prefent rien d'aflez prćcis fur ces matieres j 8c le peu qu'ori en fait nous meneroit beaucoup plus loin que la nature de notre ouvrage ne le per-met. On rrouvera de quoi fe fatisfaire fur cous ces dirferens objets dans la Rela-tion du voyage en Siberie , fait par M. tAbbe Chape de rAcademie des fcien-ces. Cec ouvrage , qui s'imprime ac-tuellement } doit former trois volurnes /«•4°. accompagnes des planches ĆV car-res gćographiques neceifaires. Le Sr. De-bure , pere , n'epargne nr foins ni dćpen-fes , pour le rendre digne de la curionti des favans & des amatcurs. Divijion. Les RuflTes divifent la Siberie en trois grands departemens, qui font d'occident ej? orient, ceux de 1 obolsk 3 de Ienifeisk La Siberie. 105 &: d'Irkutsk. Chacun de ces grands departemens fe divife en plufieurs diftriers , que les Rulfes nomment Vie\ds ou pays particuliets. I. departement de tobolsk. Ce departement a ete long-temps fous la domination desTartares , qui y avoient etabli un aflez grand nombre de colonies. Sa partie meridionale renferme la Siberie proprement dite , nommee plus ancien-nement Pays de Tura. On le divife pre-fentement en neufs Viezds , ou pays particuliers , qui tous prennent le no m de leur capitale. i.. riesed ou pays de Verfchoture. Ce pavs confine au Gouvernement de Cafan. Vcrjchoture 3 fa capitale , eft la premiere ville de Siberie , qu'on rericon-tre en venant de Solkamsk , route ordi-naire pour pafter de la Ruflie d'Europe en Siberie. Ceft aufti la premiere ville que les Rufles ont bacie dans cetre con-trće. La forrerefle , qui eft en pierres, renferme TEglife principale , les Tribu-naux de Juftice , la maifon du Gouver-neur , & d'autres editices. Vis-a-vis eft le marčne* , & un autre batiment ou les Marchands demeurent ordinairement. La ville a environ deux cens cinquante mai- zo6 Methode de Geographie* fons , un monaftere d'hommcs, un autre de filles, quatre eglifes 8c quelques cha-pelles. C'eft a Verfchoture , que fe faic la vilice de rout ce qui vicnr de Ruflie pour palfer en Siberie, 8c de touc ce qui eft apporte de Siberie , pour paffer en Rullie. La ville eft dans une fituation agićable ; mais fon terroir ne peuc rien produire , a caufe des veutš froids. Elle tire fa fub-fiftance des pays voilins , qui font plus fer-tiles. Les environs de Verfchoture ont un grand nombre de mines de cuivre &c de fer , qui font tres-abondantes. On trouve me me de Tor dans quelques-unes. Les principales font a Zial'mskoi 3 fur le Ziala \ a Kufchv/inskoi > fur le Kufch\va j a Wuiskoi; a Nifchn-Tag'dskoi3 qui donne le meilleur fer , 8c qui forme une habita-tion de plus de (ix cens maifons ; a Nei-iviansk j fur la Neiwa, ville confiderable , ou on compte pres de huit cenj maifons, fans le fort, dont la plupart des habitans font des Staroverji > qui forment en Ruflie une Sećte particuliere 8c que l'on y re-garde comme des heretiques \ a Bynkow-koi j aufti fur la Neiwa; i Wrerchno-Ta-gilsk 8c a Schunilcnsk> l'un 8c l'autre fur le Tagil. A l'orient de la riviere de Tagil eft le Monr Asbejl^ ou l'on trouve de la Dierre d'afbefte ou d'amianthe, en grande abondance , 8c d'une fi bonne quaiite , la Siberie. 107 «jue lorfqu'il eft bien travaille , le ril en eft femblable a la plus belic foie. 2. Pays de Catherinenbourg ou d'Ecaterinbourg. Cette Province eft confiderable par fes mineš de fer & de cuivre : elle rournit aufti beaucoup de belles pelleteries. La capitale, Ecaterinbourg, eft une ville barie regulierement, fur la riviere d'Ifer, qui la traverfe. Pierre le Grand commenca a la faire conftruire en 1725. L/impera-trice Catherine , fa veuve , la finit en 1726 , &c lui donna fon nom. Elle eft bien fortifiće , dćfendue par deux compa-gnies de troupes reglees , &: munie d'ar-rillerie pour conrenir les Baskirs de la Province de Cafan , qui font difpoles X la rćvoke. Tous les batimens ont ete conf-truits aux depens de 1 Empereur 3 aufti font ils occupes par fes OfHciers , 8c par ceux qui ont 1'intendance fur les mineš. Les fauxbourgs font occupes en grande partie , par ceux que la Cour de Ruflie envoie en exil. Les Commis de la Doua-ne ont beaucoup d'occupation a 1'arrivee des marchandifcs , qui viennent des foi-res d'Irbitsk j ils en font une vifite tres-cxa 5. A quelques. licues de ce fleuve eft une montagne qui s'ćtend du nord au midi dans 1'efpace de trois v/erf-tes, & done la partie oecidentale eft cou-pee en plufieurs valit es , dans la plus pro-fonde defquelles on trouve de tres gran-des pierres d'aiman. 5. Pays de Turinsk. H n'a de remarquable que la ville de memenom , fituee fur la Turu. Les gens du pays la nomment Jcpantschin. Outre l'Eglife principale, il y en a fix autres qui font paroiftiales, & trois cens cinquante maifons. Les vivres y font abondans &c a tres-grand marche. 4. Pays de Tiumcnsk. Au midi de la Province du Turinsk , eft cel le de Tiumensk j qui a fa capitale de meme nom , appellee du temps des Tartares On-Zhidin. Elle eft fituee pres It1 ri • a lura , & traverlee par une petite riviere no mm će Tiumensk , qui en fortant fe precipite dans U Tura. La ville eft 2.1 o Methode de Geographie. confiderable. On y compte plus de c'mq cens maifons ; une Eglife principale , batie en pierres, bc fix aurres , avec un Monaftere. Elle a deux fauxbourgs , tres-peuples : celui qui eft fur la rive fepren-trionale de la Tura , eft habicć par des Ruftes , des Tartares Mahomćrans & des Buchares. Les premiers y ont une Eglife, Se les autres une Mofquee. On trouve eneore dans ce pays , Krafnos 3 fur la Niza , donr le territoire produit en abon-dance des afperges beaucoup plus longues que les notres , & dont tout eft bon a manger i Irbitsk j fur la riviere de me-me nom , 6c Bicla Kovskoi j fur la Pyf-chna. Irbitsk eft confiderable par fes foi-res , qui s'y tiennent tous les ans au mois de Janvier. Les Marchands de prefque tou-res les villes de Ruffie & des pays voifins y aftluent. A l'exception de 1'or &c de 1'ar-genc, qui ne payent aucun droit , toutes marchandifes qui fe rendenr a ces foires payent le dixieme de leur valeur j 8c cet impot monte a une fomme confiderable. 5. Pays d'IJet. Ce diftriet , forme en 1757 , n'a de remarquable , que le fort cVlfet 3 fur la riviere de meme nom , 6v le Monaftere de Dalmato\v j fitue dans une belle plaine. La Siberic. lil đ. Pays de Tobolsk. II eft plus conftderable que les prece-dens , & il renferme plufieurs villes im-portantes. La principale eft Tobolsk la plus grande de toute la Sibćrie. Elle eft ficuc;e au 58 degre 11 minures de la-titude , fur la rive orientale de llrtifctj, a 1'endroit ou il recoit lanviere de Tobofsk. Elle eft diviiec en haute & bafte ville : la liauce fituee fur le rivage elevć , la balle fur la plaine entre ce rivage ik. le Heuve nieme* La citadelle bane en pierres , eft dans la vdle haure , & renferme les bu-rcaux , la maifon du Gouverneur , le pa-lais archiepifcopal , le marchć , plu-iieurs Eglifcs , & un Monaftere nomme li< chdercwensH* La bafle vitle a un marelic particulier , ou fe vendent tous les vi-Vtes qui fe confument dans la ville. Elle a deux Eglifes , & un Monaftere nomme Snamensk. Plufieurs pc-tites rivieres la traverfent , potre fe rendre dans 1'lrtifch. Amfi elle ne manque point d'eau ; mais elle a fouvent a. fe defendre des inon-dations. La ville haute ne eraint rien de pareil \ mais elle ne recoit que de la bafte , l'eau cfont elle a befoin. Elle eft d ailleurs fujete a un inconvćnient qui en rend le fejour peu agreable. Fort fouvent de grandes parties de terre fe detachent de la hauteur fur laquelle elle eft fituee , % 11 Me t hode de GeographU. Sc s eboulent du c6re du fleuvc. De forfe qu'otl eft oblige d'abandonner les maifons voifines de ces eboulemens , 5c daller s*etablir ailleurs. Tobolsk a beaucoup d'habirans , done la quatrićme partie fonc les relles des Tartares qui y ćroient lorf-quc les Ruffes ont conquis la Sibćrie , on des Buchares venus de Tartarie , qui s'y fortc ćtablis. Ces gens fonc fort tranquil-les , vivenc uniquement de lcur com-merce > negligeanr les arts mechaniques , & ne fonc point fujecs a. 1'ivrognerie. Les autres fonc des Ruffes, exilčs , on defcen-dans d'exiles. On vit a Tobolsk a tres-grand niarche , aufli Tinduftrie y eft fans aetion ; &c quoiqu,il y aic grand nombre d'artifans en etat de rravaiiler , on ne peut rien obtenir d eux. Les Bucbares &t~ les Kalmoucs font en cette ville un tres-grand commerce , des marchandifes qu'ils y apportenc des Indes, Se qui enfuite fe repandent dans toute la Sibćrie Se dans une grande partie de la Ruflie. Toutes les caravanes qui vont a la Clune & qui en reviennenc , doivent paffer a Tobolsk. Cette ville eft aufli l'entrepot de toutes les fourures qu'on tire de Sibćrie s Sc qu'on tranfporte enfuite a Mofcou Se a Peterfbourg. Les Officiers Suedois faits prifonniers a la bataille de Pulravi , Se relegućs a Tobolsk , y avoient erabli en 171?, une eeole ou ils enfeignoient les Langues Sue- La Sibćrie. *1 5 doife , Rufle , Kofaque &: Tartare , Al-iemande , Latine &c Francoife , la Gco-graphie , les Marhcmatiques , le Dellein , 6\:c. Cette ecole devint tres fameufe : on y envoyoit des enfans de fort loin , &" la vic tezuliere des Inftitureurs leur donna beaucoup de fucces. Elle tomba apres la paix de Nyztad en 1721 , lorf-qne les Orriciers Suedois furent retournes chez eux. Mais pen apres la Cour de Ruflie lui fubftitua ime ecole Allemande , qu'elle prit fous la protečtion. A vingt vverftes de Tobolsk , eft la petite ville aVAbalac j celebre par ime Image de la Ste. Vierge , a laquelle le peuple a une tres grandc dćvotion. On y vient en pelerinage dans tous les temps de Pannee; Une fois 1'an , le Clerge la porte procef-nonellement a Tobolsk , 011 elle refte pendant quatorze jours. Korkina eft la principale ville d'un petit pays particulier nommć Ijlhinsk 3 dpnt le Gouverneur eft fonmis immćdiatement a celui de Tobolsk. On y remarque enco-re , Ifchinsk & Aba^k y fur 1'lfcliinsk , & 1 rov s k j fur Plr , qui tombe dans Ifchinsk, Sur le Tobol, on a bati , en 16 5 9 , le fort de Ja/utorousk j dans un territoire ou le feigle vient prefque toujours a niaruritć. Les habitans nourilfent beaucoup de che-vaiu. Taru eft une petite ville fur PIrtifch , 214 Methode de Geogniphie. qui prend fon nom de la riviere de Tara ^ fur laquelle elle avoit ete batie 3 &C qui a 5 2 werftes au-dela fe jette dans 1'Irriich. L'endroir eft alfez confidćrable , & la re-fidence d'un Gouverneur. Tout y eft-fort cher , excepte les vivres qui fonr a grand marchć. II n'y a prefque point de com-merce , parče que les gens riches s'empa-renrde toutes les marchandifes , a mefure qu'elles arrivenr. La plupart des habitans ione de la feete des Straroverft. On leur donne aufli le fobriquet de Rohwitfchi y a caufe que plufieurs furenc empalćs en 1723 , parec qu'ils refuferent de preteč le fermenc pour la fucceflion a 1'Empire Ruflien. Bergamaska , fur la Tura 3 Omsk , fur VOm j qui pen apres fe jette dans lTrtifch • Schelejinsk , fur la rive orientale de Tlr-tifeh , dont le territoire inculte nourit beaucoup de grands fangliers , qui ne vi-vent que d'herbes & de racines, n'y ayant point de chenes. A fept werftes a 1 orient de Jamufchevja 3 fort bati fur 1'Irtifch en 1715 , ruinć la meine annee par les Cal-mouks , &c rebati en 17 17 , eft le Lac de Jamufcha y celebre par la quantite de tres« bon fel qu'il fournit. II a neuf werftes de circait- Son eau eft extrcmement falee. Le fel , qui fe forme en cryftaux de forme cubique , eft en fi grande abondance, qu'on en peut prendre tout autant qu'on La Sibćrie. 215 veut. Cinq ou fix jours apres , on en trouve de roiit forme , & en aufli grande quantirć. La Couronne s'eft: rćfervee le commerce de ce fel , qui fe confume dans les De par te me ns de Tobolsk &; de Jenifeisk. Le fort de Sempalat > bati en 1718 fur rirtifch & qu'on elt fouvent obli-ge de rebarir plus loin , a caufe des ćboulemens de terre , qui portent la riviere de ce cote-la , prend fon notn d'une ville que les Calmouks avoient batie dans ces .cantons , & qu'ils' ont aban-donnee. On voit encore les ruines de plulieurs batimens conftruits en pierres. Les premicrs Rufles qui arriverent dans le pays , fouillant ces ruines , rrouverent plufieurs rouleaux ecrits dans une langue &c avec des caraćteres qui leur etoient inconnus. Ces rouleaux envoyes a 1'Aca-demie des Inferiptions a Pariš , y furent examines , tk Ton deVida qu'ils conte-noient dirTerentes chofes relatives a la religiondes Calmouks. On a mcme licu de croire que les ruines ou ils furent trouves , etoient celles d'un temple. Les Calmouks fe fonc un point de re lig ion d'abandonner pour toujours les lieux con-facrćs au culte divin, qui ont ćtć profanćs par les horreurs de la euerre. Aux environs du tort ft Urt-Kamena-, Gorska entre l'Ircifch & i'Ob, font des* tli Methodc de Geographie. iiiontagnes ou 1'on trouve beaucoup de cuivre. Dans plufieurs mineš , fargent &c meme l'or s'y trouvent mcles avec le cuivre en ajez grand« quantite pour payer avec ufure les frais du depart. Au nord-eft de Tobolsk , on trouve , fur une monragne , pres 1'lrtifch , la ville de Damiansk 3 habiree principalement par des gens qui font fur le fleuve les tranfports en tnontant & en defcendant; Samarowsk j au confluent de Tlrtifcli & de 1'Ob , qui tire fa fubfiftance de Tobolsk , le terroir des environs etant inculte \ Ka-limkarsk 8c Altimsk , fur 1'Ob. 7. Pays de Surgutsk. 11 prend fon nom de la ville de Surgutsk, fituće fur 1'Obi , dont le Gouverneur tire un tribut annuel des Ostiakes qui en oc« cupent les environs. On y trouve beaucoup de bellc-s martes, & des renards noirs , blancs & roux. La peche y eft tres-abondante. Les habitans ont prefque tous le regard louche j ce qui fait qu'on leur donne le furnom de Gri\yije. S. Pays de Pelimsk. Quoique fort etendu , il n'a de remar-quable que Pelimsk j fa capitale , fituće ■ fur la riviere de meme nom. On y trouve plufieurs Lacs, dont quelques uns fonc La Sibe'rle. z 17 tort grands. Ceft a Pelimsk que le fa-meux general Comte de Munnich a ete exile. 9. Pays de Bere\ousk. Ce diftrićt , foumis a la RulTie long-temps avant lerefte de la Sibćrie , fut con-quis cifi 550, par le Czar Gabriel. U eft habite par des Oftiakes &c des Samojedes. Au nord , il eft bomć par le detroit de Waigatz ; tk a lorient , par un grand Golfe de la Mer Glaciale , qui s'ćtend fort loin au midi _> &c vers le 66c degre fe parrage en deux aurres gol fes j celui d'O/v , ik celui de Ta% y qui prennent le nom des rivieres qui s'y dechargent. Les lieux remarquables de ce pays , font , Ziaplnskoi ; Bere\ow , fur l Obi , ville fam?ufe par l exil du Prince Menfchikof, qui y eft mort en 1731. On donne aux babitans le nom de BielkojeJt j parce qu'ils fe nouriifent de la ehair des ecu-reuils. Kuiskoi y fur la riviere de meme nom. Obdorskoi y nres rcmbouchure de robi, eft le lieu ou les Samojedes vien-nent payer leur tribur. Nađvmskoi y fur rcmbouchure du Nadym , dans le Golfe de 1'Obi. Aupres de certe habitation eft "ne grande & profonde caverne , dans la-quelle les Oftiakes de ce canton font leur habitation. lis y defeendent par des ćchel-Jes , & en remontent de mune. Tome VIL 1 K 118 Methode de Geographie: II. Departement de Jeniseisk. Les Tungufes , les Oftiakes, & quel-ques autres peuples d origine tartare , ha-bitent ce departement. On le partage en plulieurs pays : ce font les fuivans. I. Pays de Manga^ea* II eft fiuie le long de la Mer Glaciale, &c arrofe par plufieurs rivieres qui y ont leur einbouchure. La principale eft le Je-mfea. Anciennement ce pays dependoit du Departement de Tobolsk. Pendant quelque remps, il a fait partie du pays de Tomsk. Ce n'eft que depuis 1711 , qu'il a ćte joint au Departement de Je-nifeisk. Quoique le froid foit extreme dans cette contree , elle eft cependant tres-peuplee de RiuTes , a caufe de la chafte , qui y eft abondante & tres proiitable. Les renards blancs & roux , les loups blancs, les ouls blancs , qu'on y chafle en hiver , font plus grands &c plus forts que ceux qu'on chafte dans les pays arrofes par 1'Obi & la Lena. Lćurs peaux , plus bel-les , &c garnies de foies plus fbrtes & plus longues, font aufli plus recherchees & pluscheres. Aufli les habitations que les Rufles y ont formees , font en grand nom-bre. Elles s'ćtendent principalement fur le Jćnifea 3 depuis Mangana , jufqu a la La Sibćrie* 119 mer; puis, le long du rivage, jufqu'a Pia* Jiga 3 &c de-li jufqu'a Chantangam 3 ou Chatanskoi3 fur la riviere de meme nom, & fous le /oe dćgtć &c demi de latitude. II eft bon de remarquer quil y a un ature lieu nommc Chatanskoi 3 fur le Jćnifea. Quant a la ville de Mangana, qui donne le nom au pays, elle eft (ituće fous le 66c dćgrć , dans une lile du Jćnifea 3 a 1'endroit ou il recoit le Turuchan. On en attribue lorigine a une colonie venuc d'Ar-changel,qui, long-temps avantque la Sibćrie fuc fous la domination de laRuilie, vinc s'ćtablir fur le Taz , en un licu quon nom me prefentement Vancicnnc Man-ga\ca , & eft babico par les Samojedes appelles Mangafes. CetetablifTemont ćcanc dćpćri, on en forma un nouveau en 1600 , fur 1'embouehure du Turuchan , &: on y rranfporra cous les habitans du premier. On lui a conferve le nom de Manga^ea ; mais le peuple le defigne ordinairement par celui de Turuchansk. La Cour de Ruftie y entretient une garnifon pour con-tenir les Tungufes dc les Samojedes des environs. On donne aux habitans le nom de PajJowiki j parce qu'au lieu de pain, ils mangent des poiilons deffćchćs. La plus grande„ partie de la ville, eft oecu-pće par le fort , qui eft la rciidence du Gouverneur. 11 n'y a gucre que cent mai-fons, affez eloignćes les une s des autres. K ij no Methode de Geographie. Cependant il y a une grande Eglife, & deux paroifliales. On y fait un grand commerce de pelleteries. L'ćte y amene en quantite diffćrentes efpeces d'oies, de canards, & autres oifeaux de riviere. Pen-dant cette faifon, le foleil demeure tou-jours au-deflTus de l'horizon. 2. Pays de Narymsk. La ville de Narymsk eit dans une Ifle de l'Obi , &c c'eft le lejour de ceux qui percoivent les tributs des Oftiacks qui de-meurent aux environs. On trouve encore dans ce pays, Ketskoij fur le Ket, par le-quel on va par eau de Tobolsk a Jeni-ieisk , en faifanr feulement un petit por-tage pres cette derniere ville. 3. Pays de Tomsk. 11 tire fon nom de la ville de Tomsk, fur la riviere de meme nom , A Tendroit ou elle recoit l'Ufchaika. Cette ville doit fa fondation a un fort bati dans les pre-miers temps de l'entree des Ruffes en Sibćrie. La plupart des nations du voifinage ayant ćte fubjugućes , ou s'ćtant foumifes volontairement, Tomsk devint une ville confidćrable. Elle renferme aujourd'hui plus de deux mille maifons dans fon cn-ceinte. On l'a long-temps regardee com-me la feconde capicale de la Sibćrie. Sur une hauteur voifine, efl un fort, muni de ( La Siberie. 211 quatorze canons , & qui renferme une grande Eglife , la maifon du Gouverneur, le Magazin , 1'Arfenal, plufieurs maifons particulieres , 8c une Eglife paroifliale. La riviere dTJfchaika parrage en deux la partie inlćrieure de la ville. Celle qui eft fur la gauche a deux Monafteres, Lun d'hommes , ik 1'autre de fiiles, une Eglife , & une habitation de Tartares, Celle qui eft fur la droire , a trois Eglifes pa-roifliales , &c renferme la maifon desMar-chands. Tomsk fair un alfez grand com-merce. Ourre qu'elle eft fituće avanta-geufement, elle eft rraverfee par le che-min royal qui de Jenifeisk conduit A rou-res les villes de Sibćrie plus eloignees , vers le nord ćk l'orient De forte que les Caravannes qui viennenr du pays des Cal-moucks, &z celles qui vonc a la Chine &c qui en reviennent, font obligees de paffer par cette ville. Elle eft affez bien fournie d'ouvriers de tous mćtiers j mais ils font extremement pareffeux £>c ivrognes. Les vivres y font a grand marche. Le terroir eft cultivć &c produit du feigle. Les autres endroits remarquables de ce D i lirici font, Bogorodsk ■> fur l'Obi renommee dans le pays par une image de la Viei-ge , qu'on nomme Odej'urla. Tous les ans , i 2.: Mai, on la porte proceflio-neilement a Tobolsk. II y a d ans cer en-droit une mine de fer. Tschansk > fur la K iij 12 2 Me'thode de Geographie. riviere de meme no m , aete bari en 1713, pour arrcrer les incurfions des Tartares de la Cafatchia Horda , qui ont enfin laiife*ce canron tranquille. II eft bien fourni de rout ce qui eft neceftaire a la vie , & la plnpart des habirans font aifes. Dans le Defert de Barabu fone les forrs ticUBihsk Sc de Kainsk , fur 1'Uba ; Sc Tanask, fur 1'Om, dans un terroir fertile. 4. Pays de Kutsnet\k. Cc Diftrićt, qui eft fitue au midi de celui de Tomsk , etoit autrefois habite par les Tartares Kirgifesđ,croi a mefure que les Ruffes s'y font etablis , fe font re-tires vers le pays des Calmoucks. La ca-pirale , nommee Kutsnet^k j Sc fituee fur le Tom, fut barie, il y a plus de cent ans, par des colonies tirćes des pays de Tomsk, de Verfchoture Sc de Novogrod-Veliki. En 1589 elle fut deceree du titre de ville, La Horde de Kirgifes qui y habitoit au-paravant, tiroit fa fubiiftance des mineš de fer, qu'elle faifoit valoir aux environs j Sc c'eft de la qu'eft venu a ce lieu le nom de Kutsnet^k} qui en langue rulfe, figni-fie Forgeron. Du cote des Kalmoucks font les forts de Bielojarsk Sc de Bikatunsh 5. Pays de Krafnojarsk. La vilie de Krafnojarsk , fa capitale eft fituee fur le Jenifea , a 1'endroit ou il recoit le Katfcha, Elle doit fes commea- La Siberie. 11 j cemens a un fort qui y fut bati en 1628 , pour contenir les nations voifines. La couleur rouge fonce des terres qui bor-dent le Katfcha , lui a fait donner le nom qu'elle porte. La forterefle occupe la par-tie feptentrionale de la ville, & renferme 1'Eglife principale , la Maifon du ioouverneur , 1'Arfenal, &c. Le terroir eft bien cultive , & la terre fi fertile , qu'elle n'a befoin d'etre amandee que tous les cinq ou fix ans. Les habitansnourilfent beaucoup de chevaux & de troupeaux. Le chemin qui conduit de Tobolsk a h\ kutzk, pafle par Krafnojarsk. Les autres lieux remarquables font, Abakansk y fur la riviere de meme nom j Sajansk, fur le Jenifea , ou font des mineš de cuivre. Aux environs de ces deux forts fe voient les ruines de grand nombre de tombeaux des anciens Tartates, conquerans de 1'Afie fous Gengis-Khan. On les a fouvent fouil-les , &c on y a trouve beaucoup d'or Sc d'argent : encore aujourd'hui on en tire quantite de cuivre. Sur la riviere de Kan eft le fort de Kansk 3 ou les Marchands qui vont a la Chine , ne manquent pas de faire quelque fcjour , pour fe pourvoir de peaux de martes. 11 s'y en faic un grand commerce ; car les Tartares des environs ont une adrelfe finguliere a attraper ces animaux. Aufti le Gouverneur de Krafnojarsk tire mi grand revenu de Kansk , K iv i 14 Metko Je de Ge'ographle. & celui qui eft prepofe pour recevoir le tribut, donne beaucoup d'argent pour ob-tenir cet empioi. 6. Pays de Jenifeisk. Jenifeisk fa capkale 3 eft une ville confiderable , qui s etend en longueur fur le Jćnifea, lequel commence en cet endroit a avoir beaucoup de largeur. Elle a environ fix \verftes de circuit, c'eft-a-dire, une lieue Se demie. Ce nćtoit au commencement qu'un fort dependant d'abord du pays de Tobolsk , enfu.ire de celui de Tomsk. Dans la fuice on lui a donne le rang de ville j Sc enlin en 1719 , elle a ete erigee en capitale de Province. L'Eglife principale, la Maifon du Gouverneur , l'Arfenal, &c. font renfermes dans Tancien Fort. Le Magalm des Pou-dres , Se celui des municions de bouche , fonr dans l'enceinue d'un fort particulier. Le refte de la ville eft compofe de fept cena maifons de particuliers, avec trois Eglifes paroiftiales , Se deux Monafteres , l'un d'hommes & l'autre de filles. L'Ar-chimandrire qui demeure dans le premier , eft Superieur des Monafteres de Troit^k Se de Manga^eisk > Se de rout le Clerge de la Province de Jenifeisk. La fituarion avantageufe de la ville , lui prodire un grand commerce , pendant lete fur-tout. Le terroir produit du feigle : la La Siberie. 22$ volaille & meme la grofle viande n'y man-que point. Les habitans de Jenifeisk fonc pour le inoins aulii dćbauchćs , que ccux. d'aucune- des villes de Siberie. lis one la rćpurarion d'etre fins & rufes ; Sz on leur donne le furnom dcSkofnikij qui dans la langue rullienne lignirie des hommes d'un efpric penetranr. On peut eneore remarquer dans ce pays Makowskoi j fort fur le Ket j Markovo > altež grande ville fur le Jćnifea; Ure 'funeuskoi , iept werltes plus bas , X Temboucliure de la Tungufca 3 )elanjio\v; TaJ(cwskoij fort fur 1'UiIblka , rebati en J73 3 , dont les h.ibitans n'ont prefqu'au-cun commsrce avec leurs volfins , &c ■vi-vent tout-a-faic a la libćrienne , c'eft aV-dire , dans la plus honteufe dćbauche 3 Udinsk j petit fort bati en 1644 lur 1'Uda, qui rapporte beaucoup au Gouverneur de la Province de Jenifeisk , parče que c'eft a ce fort que les Buraces j qui habitent ces conrrees , viennenc paver en pelleteries , le tribut auquel ils font foumis. III. DePART emekt 1>'IrKUTZK. Ce Dćpaitetnent , le plus grand des trois qui partagent la Siberie , eft gouver-ne par un Waivode , qui a fous lui ceux d'Ilimsk , de Selinginsk, de Nertfchinsk, de Jakutsk, &c les Incendans d'Ochotsk &.de Kamifchatka. Cependanr lui-metne K v llcT Methode de Geogmpkle. eft fubordonne au Gouvcrneur de To-bolsk j mais fon revenu eft plus confide-rable , parče qu'outre fes appoinremens , il peut tirer chaque annee des Burates, des Iakutsks, & aurres Nations qui ha-bitent ce pays, pres de trente mille rou-bles au-dela de ce qu'lis doivent payer fui-vant les traitćs. i. Pays d'IUmsk. La capitale eft Ilimsk j ville fituee fur rilim , entre de hautes montagnes. Elle a nn fort, Sc quatre-vingt maifons tout au plus. Cependant elle eft la refidence du Waivode. On prend de tres-belles mar-tes dans fes environs. Le fort de Bratsk eft fur l'Angara. A cinq werftes de ce fort, eft un Monaftere d'hommes nom-me Spaskoi ; Sc quatre werftes au-dela , eft une habirarion ou fe fait de Teau-de-vie. UrtkutskoL > fur la Lena , eft remar-quable par les falines qui font aupres , Sc qui fourniffent le fel a tout le pays. Le fort de Kirensk j fur la Lena , bati en 1655 , eft aujourd'hui en fort rrinuvaiš etat. Les campagnes voifines font tres fer-tiles. On ne peut regarder fans admi-tation ces campagnes , qui 3 quoiqu'afTez voifines du pole , font couvertes d'herbes «|ui croiffent a une grande hauteur. Les efturgeons qu'on peche dans ce pays, font La Siberie,- ttf renommes en Siberie pour le gout delieat de leur chair. Pres 1'embouchure du Ki-reng dans la Lena , eft un Monaftere qui occupe beaucoup de terrein , &z qui a des revenus confiderables. Spoiofchensk t fur la Lena , eft remarquable par la ferrilite des campagnes qui 1'environenr. 2. Pays d'Irkutik. Ce Diftrićt, fitue entre le preećdent, &c le Lac Baikal , qui le fepare du pays de Sćlinginsk , a pour capicale la ville ALrkiu^k. Elle eft dans une alfez belle plaine, fur l'Angnra,qui qnelcjues lieuesau-del.i fe decharge dans le Lac Baikal. Cette ville prend fon nom de la riviere d'Irkutzk qui vis a-vis rombe dans PAngara. C'eft une des plus confiderables de la Siberie , &c la refidence d'un Intendant par-ticulier. On y compte pres de mille mai-fons , ćk plufieurs Eglifes. L'Eveque a toute la Province fous fa jurifdićtion. Ses environs ne produifent point de grains : on en apporte des Provinces voifines. Mais la chalie & la peche v font abondantes. U y a toujours a Irkutzk une aftluence de marchands , qui echangent leurs mar-chandifes avec celles qui viennent de la Chine. Tout y eft a aufli bon marche & en aufli grande abondance , qu a Moskov & a Peteribourg. A quelque diftanee- K vj 118 Metk ode de Geographie. d'Irkutzk fone nois laboratoires , ou Ion diftille une trčs grande quanticć d'eau de-vie. Ces eaux de-vie fe font pour le compte du Czar , & elles fe confument dans les diftriĆb d'Irkutzk 3 d'lhmsk & de Selin-ginsk. Nikohk j a 1'embouchure de TAngara dans le Lac Baikal , eft le lieu ou fe per-coivenr les droits qui fe levent fur les mar-chandifes venant des frontieres de la Chi-ne. Le Receveur a un emploi confidćra-ble , čk peut s'enrichir en moins d'une alinee. On rrouve beaucoup de canards fauvages dans les environs. Urik Olonki &c Balagansk j font les autres lieux re-marquables. 3. Pays de Selinginsk. Ce Diftrićt, fitue a 1'orient tk au midi du Lac Baikal , a pour principale ville , Selinginsk , dont la fondation ne remonte qua 1'annee j 666. Elle eft bacie le long de la riviere de Selinga , & confilte en un fort 6c cent cinquante maifons baties au rour. Les environs de la vilic font un de-fert aride & montueux; mais quinze wer-ftes pius bas la terre eft cultivee. La rhu-barbe y croit en tres grande abondance. Tout ce que les Ruftes vendent de cette račine aux evrangers , vient de la Province de Selinginsk. Striclki 3 qu'on no m me ctifli Saine Picrre & S. Paul j fort place fur une La Siberie. 11$ pointe entre les rivieres de Tschik & de Selinga , dok avoir pour garmfon un Regiment enticr. Troi^kaia-IC refojl, eft un fort fur la frontiere , ou les Marchands qui vont a la Chine & qui en reviennenr, doivent s'arreter pour payer les droits de leurs marchandiles. La riviere de Bura eroit autrefois , de ce c6:e-la , la fćparation enrre les terres appartcnanres a la Ruflie , & celles appar-tenames a la Chine. Mais depuis 1727 » les limitcs ont ete rcculees plus au nord , & font marquees par des bornes qui ont ete placees de diftance en diftance. La Rullieaperdu par cetarrangement, les mineš de fer dont font remplics les monra-gnes qui s'etendenr jufqu'a la Bura. On n en a point trouve dautres dans le refte de la Province. On conllruifit, en 1727 > fur le bord de la Kiachtd'} deux forts , 1'un au nord pour les Ruflicns \ 1'autre au midi pour les Chinois : lis fonr pen eloi-gnćs 1'un de lautre. On y fait une garde exacT:e , de part & d'autre , pour empe-cher que les limites ne foient changćes. Vers le Lac Baikal , on trouve encore quelques endroits conHderables. Ce font, Udinsk , petite ville fur 1'Uda , qui peu apres fe joint a la Selinga. Le terroir en eft fort bon • ce qui fait que les vivres y fonr abondans. Le chemin qui conduit aux frontieres de la Chine a lorient & au 250 Methode de Gćogmphie. midi , patfe par cette villc. Troisk , Monaftere ancien , riche & bien bari : Kabansk fur le Kabana , qui peu aprćs fe jetce dans l'embouchure de la Selinga ; Po/o/sh , Monaftere , fur le bord meri-dional du lac Baikal j Bargu^jnsk > gros village a l'orient de cc Lac. 4. Pays de Ncrtfchinsk. La Ville de Nenfihinsk , qui eft com-me Selinginsk fur les frontieres de la Chine , femble avoir recu fon nom des petites rivieres de Nerrocha 6V de Schinke, au conHuenr defcjuelles elle eft fituee. An-ciennemenc elle fe rrouvoit fur le chemin des caravanes qui venoienr de la Chine : encore aujourd hui, elle eft le lieu ou arri-vent les AmbalTadeurs de Chine qui vien-nent en Ruflie , & les AmbalTadeurs de Rullie qui vonc en Chine. On y conclut en 1689 la paix enrre les deux Empires. Les environs font montagneux , mais ont de bons parurages. Le fort SArgunsk au fud-eft:, fut d'abord baci en 1681 , fur le bord orienral de la riviere d'Argun , pour y recevoir le tribut que payent les Ton-goufes de ces quartiers. On le transfera en 1689 , fur le bord meridional de la metne riviere, ou il eft aujourd'hui , 6c on y mit une forte garnifon , parče que de ce cote il touche aux terres des Tartares Chinois. On y fait un grand commerce La Siberie. 2. j i avec eux. Le pays aux environs eft fertile , 8c i'air ttes-fain. Cependant le froid y eft; tres-violent , 6c la terre n'y dćgele , en ete , qu'a la profondeur de deux ou trois pieds. Les tremblemens de terre s'y font fentir ordinairement au commencement du ptintems , Sc quelquefois a l'entrće de l'hiver. II y a dans les environs d'Ar-gunsk une mine d'argent , qui ptoduit beaucoup, Sc meme de l'or tres-pur Sc d'une belle couleur. Plus loin eft une montagne de beau Jafpe verd ; mais il eft rare d'en tirer des pierres un pen forres. Enfin , vers les frontieres , font plufieurs Lacs d'eau falee , dont un eft aflez grand. Le fel, qui eft fort bon , fe forme en pellicule , fur la fur face de 1'eau. 5. Pays de Iakut^k. La Ville de Iakut^k , qui donne fon nom a ce diftrićt, eft fituee fur la Lena > Sc ne confifte qu'en cinq a fix cens me-chantes maifons , avec un fort. Le pays des environs pouroit etre cultive j mais les habitans ne s'occupent que de la challe & de la pecbe. Olecminsk 3 Sc Wuim.sk > fur la Lena , font les plus aneiens fotts que les RuiTes aient batis fur cette riviere. Le terroir de ces deux forts eft aflez bon pour fournir le nćcefTaire a un aflez grand nombre d'habitans. On rcmarque meme que quoique le fecond foit au 5 9 degre dc 2*1 Mćthodc de Ge'ogr-aphic. latitude , la moiflon ne fe fair jamais plus tard que le milieu d u mois d'Aoiit , lorf-que l'annee eft favorable. Plus haur j eft: la riviere de Karanlach 3 qui fe'jette dans la Mer Glaciale. Le Lieutenanr Lalfenius ypa(fa , avec un derachement, l'hiver de 1735 ^ J75^« 11 a raconre que depuis le 6 Novembre jufqu'au 18 Janvier , le fo-leil n'avoit point paru fur l'horifon.. 6. Intendance d'Ochot^k. Cerre contrće , bornec a l'orienc par la Mer de Kamrschatkj , a dans fa dćpen-dance , les villes de Tavisk 3 Ud s k Sc Anadlrsk , avec leurs rerriroires. Elle prend fon nom du forr d'Ochoc^k , fuue fur la riviere d'Ochota. C'eft au pore d'Ochotzk , a rrois \verftes du forr, que les Ruffes s'embarquent pour fe rendre a la prefćju'ifle de Kamtschatka. La rerre ne produit rien dans ce pays , de forte que les habirans tirenr leurs fubiiftances du pays de Iakuczk , eneore n'eft-ce qu'a-vec bien de la peine. Le tranfporc par mer eft long & tres dangereux. Celui par terre eft plus fur j mais eneore bien difTi-cile. Il faut franebir des montagnes , & traverfer des forets marecageufes , dans l'efpace de 919 werftes , de forre qu'on emploie ftx femaines pour un rranfporr. On fe iert de chevaux Sc de rennes qui font fournis par les Tongoufes. La Siberie. L'extremitć de la Siberie au nord-eft , eft eneore peu connue. La pointe la plus feptentrionale eft une montagne nommee Schalaginskoi. L'Ifle S. Diomide eft a la poinre du nord-eft : plusa l'orient eft 1'lfle S. Laurent. 7. Intendance de Kamtfchatka. Le Kamtfchatka eft une grande Prek qu'ifle , qui fe detache du nord-eft de l'Afie, & s'avance dans la mer jufqu'au 51c degre de latitude. Les Kamtschadalcs qui Phabitent en plus grande parrie, s'habil-lenr de peaux de chiens : ce fonr les feuls animaux domeftiques qu'on voie dans le pays. La partie meridionale eft habitee par d'autres peuples nommes Kurili lis n'ont rien de commun avec les Kamtfcba-dales, &z paroiftent etre une Colonie des Japonois. Les Rufles , qui depuis qua-rante ans onr forme pluiieurs erablifte-mens dans cette Prefqu'irte , fe louent beaucoup de fa fertilite. On y trouve des caftors d'une grandeur extraordinaire , des mineš fort riches , des eaux minerales excellentes. Mais le pays eft fujet a de frequens tremblemens de terre. On y a appercu deux volcans. Kamtschatka y eft: un Port vers le milieu de la Prefqu'ifle. Avatcha ou S. Pierre & S. Paul en eft un autre , plus au midi. C'eft a. ce dernier que les Rulies s'embarquerent en 1741, pour 13 jl Methode de Geographle. aller decotivrir les cerres de rAmćrique au nord de la Californie. A 1'occident eft un autre pore appelle Bol-{aia-Rekkpi. CHAPITRE IV. L A TARTARIE. C a r t e s. jVous ne pouvons indiauer fur la Tartarie en general} aucune Carce particulie-re j qui foit fufffante. Ainfl il j aut s'en tenir d la Carte d'Afe de M. D1 A n-VILLE. Pour les parties orienta-les y on peut confulter les Cartes rela-tives d la Tartarie , inferees dans la defeription de la Chine du P. du Halde> qui ont ete copiees a. Nuremberg 3 & que V on trouve a Pariš che% le fieur Julien. T j A Tartarie eft une grande contree qui oceupe le milieu de 1'Afie , dans tou-te fon etendue de l'occident a 1'orient. Au nord , elle eft feparee de la Siberie par de grandes chaines de montagnes : 1'Ocean oriental la borne a J'orient 3 les Etats de Ruffie la terminent a l'occident: au midi elle touche , la Georgie , la Perfe , 1'ln-doftan & la Chine. La Tartarie, l$% Depuis cinq ou fix cens ans , nous nous* fommes accoutumes a defigner tous les peuples qui Phabitent par le nom general de Tartares. Les Anciens les appelloienc Scyth.es 3 i caufe de leur adrefle a tirer de Tare. Mais ceux d'entre eux qui font alfez polices pour avoir des hiftoires , fe difent defcendus de Turh 3 fils aine de Japhet, &c pretendent que le nom general de la nation eft celui de Turcs , &c qu'aucune autre nation n'a droit de le porter. Aufli ils ne donnent au grand Sei-gneur que le ti tre de Sultan de Roum 3 ou Prince du pays des Romains Grecs. ErTec-tivement , lorfque ces peuples ravage-rent l'Europe 3 fous le nom de lluns * d'Avares 3 de Hongrois 3 čVc. les Grecs de Conftantinople , qui etoient a portee de les connoitre , ne les defignoient eneore que par le nom general de Turcs. Celui de Tartares ou Tatas , felon la prononciation des Orientaux , n'etoic originairement que le nom d'une de leurs anciennes Tribus ou Hordes. Cette tribu etoit tres puiftante , dans la partie meri-dioJiale de ce pays, au Xle fiecle 3 lcrf-que des Mifiionaires Neftoriens y allerent precher le Chriftianifme. Vraifemblable-ment, ce fut d'apres leurs relations que les Europeens donnerent le nom de Tartares a tous les peuples du nord de 1'Afie. Qn fe conriima de plus en plus dans cet 13 6 Methode de Geographie. ttfage , lorfque deux fiecles apres , on en-rendit parler de Gengis-Kan , qui envahit les parries meridionales de 1'Afie , & porta la terreur de fes armes jufqu'en Europe. Quand on fut que ce Prince , chef des Mogols , etoit aufli le Souverain des Tartares , on ne douta plus que tous les peuples de ces Regions ne fufTent des Tartares. Ces peuples font prefentement parragćs en quatre Nations differenres , favoir 3 les Tartares propremenr dirs , qui habitent vers la Mer Cafpienne, par laquelle il tenoit ces Tartares en bride 7 mais les Ruftiens 1'ont aban- L ij 244 Methode de Geographle. donnee en 1759, ^e ^OTZQ qu'ils font au> jc-urd'hui rout-a-fait libres. 2. La ChcaJJieproprcment dite. La Circaffie , que les Turcs appellent pays de Ladda y eft habitee par les petits Nogais j les Roubans y les Cabardiniens j les Pctigoriens 3 Sc autres peuples Tartares. La riviere de Kouban 3 qui donne fon noni au peuple qui demeure fur fes bords, parcourt tout le pays vers le nord, du levant au couchant , jufqua fon em-bouchure daus la Mer Noire. La partie occidentale de la Circaffie eft foumife au Khan de Krimee. Les Rulliens s'etoient empares de la partie oricntale; mais ils Ion t abandonneeen 1739 , en faifant la paix avec les Turcs. Cette partie eft fte-rile j Sc pleine de marais formes par les debordemens du Wolga Sc de la Mer Cafpienne. Le refte du pays a daflfez bons paturages, oii les CircaiTes demeu-rent pendant l'ece, a la maniere des autres Tartares , s'appliquant d'ailleurs a l'agriculture. Ils font un grand commerce de chevaux, qui ne font pas beaux , a la verite , mais rres-eftimes a caufe de leur vigueur Sc de leur agilite extraordinaire. II y a dans ce pays des mineš d'argent 3 mais on ne les fait point valoir. La Reli-gion fcfiifmatique grecque y a fait quel-que progres dans ces derniers temps. I a Ta ft ari e. 24? Mais en general les Circaffes fonc maho-ihetahi! ; lis one cepenaant bien des prati-ques qui tiennent beaucoup de 1'klolarrie. Tcrki > pres de la Mer Cafpienne , eft la capitale du paVS , tk la rcfidence du Prince le plus puiifant. Cabarda ou Ca-bana 3 au nord-oueft, ćtoit regardće com-me la capitale , lorfque les Ruffes etoient maitres de la Circaflie. Bejini 3 au milieu du pays , eft nommee quelquerois Peti-gor , parce que les Perigoriens habitent dans fes environs. Les Turcs y mettent un Bei, lorfqu'ils font en guerre avec la Ruflie. Ils ne manquent pas de fe rendre maitres alors de Taman, fur le Detroit de Caffa , Sc de Ladda 3 fur la Mer d'A-fof , qui dependenr ordinairement du Khan des petits Tartares. 3. Pcuples libres qui habitent le Mont Caucafe. Ces Pcuples font, d'occident en orient, les Lefgis voifins du Dagheftan , les Taules3 les A\vares 3 les Circajjes noirs 011 montagnards, les A lane s 3 les Abcaffescn Abafas> & les Ziaues. La plupart ont quel-ques refles du Chriflianifme , qu'ils ont pratique autrefois. Les derniers fur tout font de grands voleurs> qui fournilTent les Turcs defelaves. Methode de Geographie. A R T I C L e III. LE PAYS DES USBECS. Ce Pays eft a 1'orient de la Mer Caf-pienne , les Tartares ayant ere coupćs par les conquetes des Ruftes au nord de cette Mer , dans le Kiprach , ou eft le Pays d'Aftrakan. Le .nom d'Usbec j cjui fignifie Seigneur mdependant y a ete adopte par les Tartares qui habitent la grande Bucharie &c le Charafm , par atta-chement pour Usbek-Khan , 1'un de leurs Souverains. Ce Prince avoit fuccedć a fon pere Tochtagu , Khan de Kipfach. Ce fut lui qui introdnifit le culte mahome-tan dans tous fes etars. II regna avec beaucoup de fagefTe , &c fe concilia tellsment l'afrećtion de fes fujets 5 que pour lui en donner une marque publique , ils prirent tous le nom cVUsbecs. Les Uhbecs font partages en quatre Tri-bus , gouvernees par divers chefs. On les regarde comme les plus civilifes de tous les Tartares. Le Khan peut mettre en campagne deux cens mil le chevaux qui comprennent tous fes fujets males , capa-bles de porter les armes. Les femmes, qui fe piquent auili d etre braves} (a Lv La Tartarie. 247 facon des anciennes Amazones , qui ve-rioient, li elles ont exifte des environs de Ja Mer Cafpienne,) vont fouvent a la guerre avec leurs maris. Ceux qui le nou-riirent de leurs beftiaux , habitent dans des hutes, & changent de demeure , fui-vant la commodite des paturages : cenx qui s'appliquem a la culture des terres, demeurent dans des villages & des ha-meaux. Les anciens naturels du pays one leur fejour dans les villes. Ce fonr les Sarts ik les Bukharts. Les Usbecs les ap-pellenr Tajiks , c'eft-a-dire , marchands & hommes du commun. Ils donnenc le me-me fobriquet aux Perfans. Le pays oceupe par les Ulbecs fe par-rage en deux grandes parties , la grandc Bukharie j au levant, & le Kharafm 3X 1'occident vers la Mer Cafpienne. II eft arrofe par deux grandes rivieres : le Sir ou S ikon, &z le Gihon. La premiere , qui eft: le Jaxartc des anciens , apres avoir pris fa fource a la monragne de Terek> depan , dans la grande Bukharie , coule du fud-eft au nord oucft , dans 1'efpacc de plus de 150 lieues , jufqu'a fon embou-chure dans le lac Arall. Le Gihon 3 quc les Perfans nommenn Amu 3 !k qui efr YOxus des anciens, prend la fource au Mont Alrai , fur les frontieres de 1'In-doftan. II fe dechargeoit autrefois dans la Mer Cafpienne ; mais les Ulbecs , in- L iv 14 S Methode de Gc'ographic. commodes par les Pirates de cette mer, one ferme ion embouchure 3 tk ont par-ragć fes eaux en plufieurs canaux qiii arro-fent leurs terres , tk donr une partie s'e-coule dans le Lac Arall 3 qui en confć-quence groflic de jour en jour. i. La grande Bukharie. Elle fe parrago en trois pays affez con-jfiderables , & qui prenncnt le nora de leurs capitales. 1. Samarcand 3 ville fort ancienne 3 fituee enrre TA mu & le Sir. Eile a ere autrefois tres-grande , 6c k capitale de l'Empire de Tamerlan , fondateur du fe-cond Empire des Tartares ou Mogois , environ deux cens ans apres Genghiskan. Encore aujourd'hui eette ville eft eonfide-rablc, 6z fort peuplee. H y a une Acade-mie des Sciences, ou on vient ćtudier de tous cotes j parče que c'eft une des plus fameufes qu'aient les Mahometans. C'eft dans cette ville qne fe fait le plus beau papier de foie de rout l'Orient. Son ter-roir produit des poires , des pommes , des raifins ,• ćk: fur-tout des melons ex-quis , en ii grande quanntć , qu'on en envoie dans les Etacs du Mogol 6c en Perfe. 2. Balck j au midi de Samarcand , pres du Gihon. C'eft une ancienne ville , qui s'appelloit autrelois Bačlra. Genghif. La Tanane. 249 kan Ia prit en 1211 , la pilla, & abattit fes murailles &c fon chćiceau. Elle s'eft re-tablie depuis , & c'eft aujourd'hui une grande ville , belle , rres-marchande 6č bien peuplee. La plupart de fes maifons font de pierres ou de briques. Le charean du Khan eft prefqne touc de marbre : il y en a des carrieres dans le voifinage. Le pays eft rres-fercile, tk bien cultive. On v recueille beaucoup de foie , dont on fait de petites etoffes fort jolies. 3. Bokara , au nord-ouelt de Balck , eV pres du Gibon , qroit aurrefois une ville de grand comnierce ; mais les avanies ex-traordinaires aufquelles les Marchands ćtrangers fe fontvus expofes , les ont de-tournes de venir en cette ville. Le terroir fournit des fruits excellens, quon fait fe-cher Sc qu'on porte en Perfe & au Mo-gol. Les Sciences &c les Arts ont fleuri a Bokara dans les anciens temps. Le fa-meux Avicenne , qui des 1'age de feize ans avoit acquis des connoilTances profon- parce que le camp du Souverain , qui en ere eft prefc que roujours fur les bords de l'Amu , s'ap-pelle Chiva. Sar les bords de la Mer Cafpienne , a Ioccident, demeurent les Turckmans ou Turcomans Orientaux , pour les drftin-guer des Turcomans d'Armenie. Les pre-miers dependent du Khan de Karaftru Ces Turckmans s'y font ćtr.blis long-temps avant les Tartares. Vers [e Xle fie-cle , ils fe feparerent desTllanlis , avec lefquels ils occupoient le Turkeftan , Sc fe partagerent en deux corps , dont lun palta au nord de la Mer Cafpienne , &c fur s'etablir dans la parcie occidencale de 1'Armenie., qui porte aujourd'hui le nom La Tartarie: f^t Je Turcomanie. L'autre branche ,dont it eft ici que£rion , s'erablir vers les bords: de I'A mu čk de la Mer Cafpionne , qu'ils habitent aujourd'hui. Ils fe font mome repaiulus en Petfe dans la Province d'Af-terabat, &c. ou ils occupenr un gtand nombre de villes ck de villages. A R T I C L E IV. L M T U R K E S T A N. (j E pays a retenu le nom des Turcs , qu' 1 'habitoient aurrefois, ek qui onr ćte letne cemps les majtres dune rres-grande p;r:;etl;' laTarrarie. On fait par les hiftoi-res de Conftanrincple , Sc de la Chine , qu'au Vic (ićcle les Turcs formoient un Empire qui s erendoit depuis la M^r Noi-re fufqu'a la Chine. Mais les divilions qui s'eleverent entre les paxtj£s de ce grand Empire , le detruilirenr. An temps de Gengiskan , qui le foumit , au Xllle liecle , il eroit reduit au pays que nous nommons aujourd'hui Turkeftan , & $ la petite Eukharie. Le Turk.-ftan elt borne au nord par la riviere de Jeinba , qui le fepare duGou-vernement d'Altracan , & par les monta-gncs des Aigles: au levanr: par les Etats L vj l$l Metkode de Geograplue. du Grand Khan des Calmouks ; au tnidl par le pays des Ufbecks , & au couchant par la Mer Cafpienne. Ce pays , qui eft encore peu connu , ell pa rtaeć erure deux Khans de Tarrares Mahomerans, celui de la Cafatchia-Horda j &c celui des Mankats ou Kara-Kalpacs. Le premier en occupe la parrie orientale , čv 1'autre 1'occidenrale. Ils peu-vent armer enfemble environ cinquante mille cavaliers. Ces deux Hordes font fort liees, &z fe reuniftent ordinairement pour faire leurs courfes. Les Tarrares du Turkeftan ne culrivent les terres qu'au-rant qu'il en faut pour leur fubfiftance ; & leur principal merier eft le brigandage. Ils font Mahomerans; mais ils n'ont ni Alcoran , ni Moulhas ou Pretres , ni Mofquees j & leur culte fe rćduit a peu de ch o fes. Le Khan de la Cafatchia-Horda relide ordinairement en hiver , dans la ville de Tafchkant ou Tashkunt 3 fituee fur la droite de la riviere de Sir. Cette ville eft ancienne. Les frequentes guerres qu*il y a eu dans le pays , on: ete caufe qu'elle a ete derruire & rebatie plufieurs fois \ elle eft au;ourd'hui peu confiderable. Otrar> plu.s au nord , fur la meme riviere , etoit au-trefois la capitale du Turkeftan. Tamer-lan y mourut en 1401, dans le temps qn'il rnćditoit la conquete de la Chine. La Tanane. i J * Le Khan des Kara-Kalpacs fait pen-dant l'hiver fa refidence a Tunkat ou Tiourhoujlan , ville firuee vers 1'embou-chure de la pečice riviere d'llac dans le Sir, environ quinze lienes au-deflus de Tafchkanr. Cecte ville eft dans une fitua-tion agreable ; mais e]uoique barie de briques , &č repuree la capicale du pays , c'eft crćs peu de chofe. A R T I C L E V. LE PATS DES ELUTHS , * o u Calmoucks. IjEs Eluths fontoriginairement desMon-gales ou Mogols, qui depuis environ un fiecle fe font alTiijetis plufieurs pays a 1'occident 8c au midi. On peut regarder leur Etat, comme le refte de 1'Empire de Genghiskan. Leur Khan defcend de -ce conquerant , aufli prend-il le nom de Contaljch j qui fignifie Grand-Khan, On les appelle ordinairemeiv Calmouks: ce fonr les Rulliens & les Ufbecks qui leur onr impofe ce nom. Les Erars des Eluths s'ćtendent du nord-ousft au fud-eft , dans une etendue de fix cens lieues de long fur quatre cens de lar- • 2 J 4 Methode de Geographie. ge. Ils font bornćs au nord pat la Siberie y a 1'occident pat les Ufbecks , au midi pat 1'Jndoftan ik la Chine , & a 1'orient par les Mongous £k les Kalkas, dont ils font feparćs par le grand deTert de Chamo ou Gobi > tk par cette longue cluine de mon-tagnes que les anciens ont connues fous le nom d'lmaiis , čk qu'on appelle aujour-d'hui Monts Aitai. 11 y a des villes dans cette contree \ mais les Calmouks de-meurent fous des tentes \ 6k ils negli-gent 1'agriculture , quoique leur climat foir beau , čk le pays tres fertile. Ils font idolarres ; tk le chef de leur religion eft un K v taktu ou Vicaire d u grand Lama du Tibcr. On pretend que depuis quelques annees cette Nation a recii de grands echecs de la part des Chinois leurs ennemis, qui en ont detruit la plus gran-de partie. Les Torgauts j qui etoient la branche la moins eon/iderable des Calmouks , habirent aujourdhui les Landes entre le Wolga & le Jaick , dans le Gouver-nement Ruife d'Aftracan. Leur chef nom-me Ajuka , les. fit tćvclter , fous prć-texte qu*il avoit a craindre pour fa vie a la Cout d u Conraifch j tk ayant paffe le Jaick , il vint fe mettre fous la prorećtion de la Ruffie. On nomme quelquefois ces fugitifs , lunare s d'Ajuka : ils fervent. La Tartarie. 255 flans les armees Rufliennes , & Ton en a vu venir jufque fur fe Rhin , dans la guerre de 1733. Les Etars du Conraifch ou Grand Khan des Eluths , fe divifent en quatre parties : la Calmaauie > au nord \ la petite Bukha-rie j a ioueft \ les pays de Turfan & a'IIami ou Camul'.j a Porient y le Ti^j au midi. 1. La Calmaquie. La Calmaauie j qui eft Pancien paysdes Eluths , s'appeiloit eneore Gete au XV* iiecle , du remps de Tamerlan : c'eft le pays des anciens Majfagetes. 11 a de bel-les plaines, au milieu des montagnes dont il eft alfez rempli. On y remarque deux Lacs , entr'autres \ le Lac Saijjan , au nord eft, que traverfe la riviere cVlrtifch y dont nous avons parle en decrivant la Siberie ; & le Lac Palkati j a lbccidenr, qui recoit entf autres rivieres , Vili, la-quelle prend fa fource vers Cialis. Le Kutuktu j ou Pontife des Eluths , demeu-re aux environs du Lac Saijjan, Cialis eft une ville alfez marehande , lituee dans un pays fertile , qui faifoit ci-devant un Etat particulier. Ilarcasou Lfrga.^ fur Pili 8 au milieu de fon cours , peut crre regar-dee comme la capitale des Etats du Con-taifch : ce n'eft cependant quun tres grand J. <; S Methode de Geographte. camp , ou il fait, ordinairement fa rć(w dence. 2. Le petite Bukharie 3 ou Royaume de Cafchgar. Le Royaume de Cafchgar, qu'on ap-pelle a prefent \z petite Bukharie eft ml pays alfez fertile Šc alfez peuple j mais a caufe de la grande elevation de fon fofj &£ des hautes montagnes trni le bordent en plufieurs endroirs , fur-tout du cote du midi , il eft plus froid qu'il ne devroit Petre naturellement , relativement »a la latitude & a la fituation avantageufe dont il jonit. 11 eft fort riche en mineš dor & d'argent j mais on ne les rravaille point. Seulemenc , les Tartares tk les Bukhares ramaftent tous les ans, au printems, dans les coulćes, les grains d'or que lailfent par tour les tottens qui combent de tous cotes des montagnes, lorfque la neige com-mence a fe fondre. Ceft de-la que vient cet or en poudre que les Bukhares portent aux Indes , a la Clune , tk me me a To-bolsk en Siberie. On rrouve aufli beau-coup de mufc dans la perire Bukharie , tk plufieurs (ortes de pierres precieufes , me-me des diamans. Mais les habitans n'ont pas Padrefte de les railler , ni de les po-lir : ils les emploient brutes dans le com-merce. La Tartarle. 157 Les Bukhares , qui font les naturels du pays#> ne reffemblent en rien aux Calmouks leurs maitres. Ils habitent toutes les villes Sc les villages, SC culcivent leurs terres. Ils paient tous fes ans un tribut au Contaifch , moyennant quoi ils jouif-fent de fa proteetion , Sc n'ont rien a eraindre des Calmouks. Leur religion eft la mahometane , felon la tradition des Turcs , a quelques cerćmonies pres. La plupart fubliftent des metiers qu'ils exer-cent 7 mais principalement ducommerce qu ils font, aux Indes , en Petfe & en Siberie : ce commerce eft confiderable Sc tres-lucratif. La capitale de la petite Bukharie , eft aujourd'hui Yarken , ville firuee fur la riviere de meme nom , qui a 1'orient fe jeete dans le lac Lop 3 pres du grand de-fert de Chamo. II y a un chateau ou le Contaifch vienr de temps en temps paffer quelques mois , fur-tout lorfque les arfai-res demandenr fa prefence de ce cote-la. Yarken eft une ville affez grande Sc af-fez bien batie , a la ra£oA des Orien-raux : la plupart des maifons font conf-rruites de briques cuites au foleil. Elle eft lcnrrepot du commerce des Indes avec le nord de TAfie , du Tangut avec la Sibćrie, Sc de la grande Bukharie avec la Chine ; ce qni la rend ćga-lement riche Sc peuplće. Ses environs 2 5S Methode de Geooraphie. font fertiles , & produifent touces fortes de fruits & de legumes. Cafehgar ou Ha-ficary au nord-oueft d'Yarken , etoit au-rrefois une ville confiderable tk qui don-noit fon nom au pays. On 1'aaufli appellee Ourdoukent 3 c'eft-d-dire la Ville Royale. Elle eft aujourd'hui extremement dechue de fapremieregrandeur. Choteno\xCotan3 au midi , etoit ci-devant la capitale d'un petit Royaume parriculier. Elle eftencore a prefent dans un etat alfez florilfant, i caufe du grand commerce qui s'y fait en-tre les Bukhares, les Calmouks, les In-diens tk les Tibetans. 3. Les Pays de Turfan j & d'Hami ou Camul. Ces Pays, fitues vers lorient, au nord du Lac Lop j avoient ete conquis en 1715 > par les Chinois y mais le Contaifch les a recouvres en 172Ć. Le pays de Turfan a plufieurs villes , tk un grand nombre de villages. Sa capiiale , Turfan eft une ville aflez conuderable , & frequentće par les Marchands qui vont a la Chine , ou qui en reviennenr. Ilami ou Camuly eft la feule ville du pays auquel elledonne fon nom. On la rencontre fur la route de la Chine , pres du grand Deferr. Elle eft habitee , depuis plufieurs fiecles , par les Mahomerans, que les Chinois appel-lent fVeyhus. La Tartarie* 4. Le Tibet. Ceft un Pays confiderable y (ime vers le midi , & prefque tout entier au-dela du defert de Chamo ou de Gobi. II avoic autrefois fon Prince particulier , qui etoic fouverain & indćpendant. Mais le Dalai-Lama , ou fouverain Pontife des Tarta-res paiens , pour quelques mecontente-mens , iit foulever contre-lui les Moun-gales & les Kalkas. Le Prince fut depouil-le de fes ćcats : on les donna au Dalai-Lama , qui etablit pour les gouverner un Tipa 7 car , comme nous le dirons plus bas, le Dalai-Lama, ni aucun de fes pretres , ne fe mele d'affaires temporelles. Le Contaifch s'empara de ce pays en 1711>. Quatre ans apres les Chinois en lirent la conquete y mais les Eluths y ont fait de nouveau reconnoitrc leur aurorite , vers 1'annee 171«. Ce peut bien etre la caufe de ces.grandes guerres , dont nous igno-rons le detail, ck qui viennent, du-on, de caufer la ruine des Calmouks. Les Indiens donnenr au Tibet le nom de Boutan. Les Chinois l'appellent Tfanli s i caufe de la grande riviere de Tfanpou , qui le traverfe d occident en orient. Cette riviere paroit prendre fa fource auprčs de celle du Gange \ Sc Ton croit qu'elle coule enluite vers le midi, a travers le Royau- 16o Mćthodede Gćoghiphie* me cTAva, ou elle s;*ppefleMendfikiouj 8c fe dćcharge dans le Golfe de Bengaie. Le Kiang, Pune des grandes rivieres de la Chi-ne,prend a u Ili la fource ati nord eft du Tibet, qui a beaucoup de rivieres , dans le fa-ble defquelles on tiouve des pailletes d'or. C'eft au Tibet que nait parciculiere-ment l'animal qui produic le mule. 11 relfemble alfez a nos bichcs; 8c on !e ehafte dans les forets. On y trouvc aufli qunntitć de civettes : 8c la rhubaibe qui y croit , eft tres-eftimee. Les Tibćtans vivent de la culture de leurs terres 3 qui font alfez fertiles. Ils habitent dans des villages ou de petites villes. Le Tibet fe divife en quatre partics • 3. le petit Tibet ou Baltijian j a l'oueft , dont Eskerdou ou Tibet eft la capitale; 2. Le grand Tibet j ou le Boutan j au mi-lieu, dont Latak ou Ladac eft la ptincipale ville. Elle eft fituee fur la branehe fep-tentrionale du Gange , vers fa fource , Sc eft gouvernee par un Prince nornme le Chiampo. Chaparangue 3 autre ville du Bontan , a l'eft, fur le Tsanpou, eft fort marehande , & la plus con/iderable de ces contrćes. Le Lojjd ou Barantola , au midi, a pour capitale Tonker ou Latja* 4. Le Sijan ou Tuj'an. Pičs la ville de Lafta eft le Mont Pou-tala, fur le fommet duquel eft la reit- La Tartarie. 2.61 dence du Dalai-Lama , ou Grand Lama. On le dic fouvetain du Barantola &: du Sifan , qui formenr fon patrimoine. 11 vir retire du monde , fans prendre aucun foin du remporel de fes Erars. II les faic gouverner par deux Khans des Calmouks, epi lui doivenc fournir de rcmps en temps ce dont il peut avoir befoin pour 1'entre-rien de fa maifon ; &z le Concaifch, qui en qualirć de Grand Khan des Calmouks conferve toujours une efpece de fuperio-rite fur ce pays , veille fur 1'adminilira-tion de ces Princes, arin qn'ils n'abufent pas de leur pouvoir. Les Tartares paiens regardent le Dalai-Lama comme une Divinite , .& le croient immortel. II n'eft point de fu-percherie que les Lamaš n'emploient pour: entrerenu: les peuples dans certe opinion. Lorfqu'il meurt , on choifir entre les Lamaš , celui qui lui rellemble le plus , &c on le met a fa place. U ne faut pas s'imaginej qu'il n'y ait que Je memi peuple qui fe laiife abufer la-defliis , les Princes Tartares1, non-feulement lui envoient des prefens pour avoir ion agrement, avant de monter fur le trone ; ils entreprennent mcme affez fouvent des pelerinages pom aller lui rendre leurs hommages , comme au Dieu veritable. Alors il fe fait voir dans un lieu fecret de fon palais , ćclairć de plufieurs lampes. II dr tout couvert t€l Me'thćde de Geographie. d'or & de pierreries, ćleve fur une eftra-de ornee de plufieurs tapis , & aflis fut un coufCm , ayant les jambes croifees» a la maniere des Tartares. On va fe profterner devant lui , la face contre ter-re y mais il neft pas permis d'approcher de fa perfonne , meme pour lui baifer les pieds. Les Lamaš fonc habilles de longues ro-bes jaunes a grandes manches, arretees fur leurs reins avec une ceinture de la meme couleur. Ils ont les cheveux & la barbe rafes de fort pres, & portent des chapeaux jaunes. Ils ont toujours dans les mains de grands chapelets de co-rail ou d'ambre jaune , & les tournent fans cefle entre les doigts , en recitant leurs prieres. Ces Lam as font voeu de chaftete. II y a aulli des efpeces de Reli-gieufes, qui font le meme vceu, & qui font babillees de meme , excepre qu'aU lieu de chapeaux , elles portent des bon-nets bordes de fourures. mm La Tartarle. ARTICLE VI. LE PJVS DES MOUNGALES et mantcheous, O U L A TARTARIE CHINOISE. (^Ette partie de la Tartarie eft bornee au nord par la Siberie , au levanr par le Golfe de Kamtfchatka , par le Dćtroit de TefTbi & l'Ocean oriental j au midi par la Chine ; & a l'occident par le pays des Elurhs ou Calmouks. Ellc eft occupee par deux Nations tres- belliqueufes appellees les Moungales , Mongous ou Mogols y & les Mantcheous. La premiere , com-mandće par Gengis-Kan , vers Pari 1200 , conquit toute la Tartarie, une partie de la Perfe & entama la Chine , dont fon petit-fils acheva la conquete. Les Moungales en refterent les mafltres pendantcent ans; 6V: en 1368 , ils en furent chaftes par les Chinois, qui fe fouleverent. Ces Tartares etablis a la Chine fe retirerent au nord , vers les fourccs des fleuves Ieni-fea & Selinga , oii fon croit qu'ils for-merent la Nation connue aujourd'hui fous le nom de Kalhas 3 qui eft feparee par le grand dćfert des autres Moungales ou Mon- 2.^4 Mćthode de Gćographle. gous j qui ecoient reftćs dans leur pay3 pres de la Chine. Quelques Auteurs one avancć qu'une parrie fe retira vers la Mer Orienrale , ou fonr les Mantcheous j mais cela n'a pas de fondement dans les monu-mens Chinois , 8c ces deux Nations , les Mongous 8c les Mantcheous ou Tarcares orientaux , difTerent extrcmement , tant pour le langage que pour la religion , les coutumes 5 čk les manieres. De-la nait une divifion naturelle de la Tartarie Chi-noife en Pays des Mantcheous j 8c Pays des Moungales ou Mongous, i. Pays des Mantcheous. Les Mantcheous , quc les Chinois nom-moient autrefois Kiutches , 8c que les Ruffes appellent Bogdois > etoient con-nus au XII1C fiecle, du temps de Gengis-Kan, fous le no m de Kins 8c polTedoient alors la partie feptentrionale de la Chine, qu'on appelloir Kithai ou Catkai. Ce font ces Mantcheous , qui au railieu du XVI1C iieele, font rentres dans la Chine , ck Pont conquife toute entiere. Ainfi PEmpereur regnant a la Chine , & toute fa cour , font Tartares. Mais ils ont en me me temps conferve leur pays originaire , 8c y ont fait conftruire des villes ćk des for-tereflfes. Les Mantcheous font pai'ens. Ils n'ont cependant ni temples ni idoles: ils ado- rent La Tartarie. 2^5 rent le ciel, ou , corame ils difent, 1'Em-pereur du ciel, lui offrant des faerifices. Ils rendent aulli a leurs ancettes un culce mele de fuperftitions. Leur pays eft aflTez fertile dans fa partie meridionale. On peche des petles , vers le nord , dans 1'Amur , &c dans quelques rivieres qui fe jettent a 1'eft , dans' 1 Ocean vis-avis le Jeflb. Les EmpereuTs de Ia Clune 1'ont par-tage en trois grands Gouvernemens , qui prennent le nom de leurs viiles capitales. 1. Le Gouvernement de Chinyano 3 qui comptend l'ancien Leaoton 3 Sc ror-moit cidevant une Province de la Chine. Son terroir eft fertile en ris, en bled & en fruits. On y recueille le genfeng, dont la racme eft fort recherchee , parce que dans le pays on la regarde comme un re-mede univerfel. Chinyang 3 que les Tar-tares nomment Mugden } en eft la capi-tale. C'eft aujourd'hui une ville confide-rable. On y voit le magnifique Maufolee de Xunchi , conquerant de la Chine. 2. Le Gouvernement de Kirin-Oula 3 eft fore ćtendu au nord-oueft. Sa capitale eft Kirin j fur le Songari ou Singal 3 qui fe jette dans 1'Amur. On trouve dans cette Province beaucoupde plantes mćdicinales. Sa partie orientale eft nabitee par les Tar-rares Tupi 3 ainfi nommes parce qu'ils fe nourilTent de poiftbn. Ils n ont que des villages; & reflemblenc aux fauvages du Tome VIL M 166 Methode de Geographle. Ganada. La partie mćridionale eft le lieu particulier ou demeuroit anciennement la Tribu des Mantcheous. 3. Le G011 vernement du Trircicar , a Poueft du precćdent , n'elt gučre peuple qu'au midi. Sa capiralc , de mcme nom , /ituce Tur le Normo/l 3 qui fe jette dans le Songari 3 eft une ville nouvellement ba-tie , ou on entrerient une forte garnifon impćriale , commandee par un general Chinois. On trouve dans la partie fep-tenrrionale de cette Province , des fou-rures , qui palteut pour les plus belles du monde. Les Rulles , aux etabliflemens de qui elle confine , 1'appellent la Daou-rie j peut etre a caufe des Tartares Ta-gouri , qui en occupent une grande partie. On y en trouve encore d'une autre efpece , nommćs Solons 3 qui defcendent des Kins , lefquels furent chalTes de la Chine , par les Moungales. C'eft dans la Province de Ttitcicar qu'on exile les cri-minels Chinois , qui ne meritent pas la mort. Les rivieres &Argun &c de Kerbct-ehi j qui fe jettent dans 1'Amur prefqne vis-a-vis 1'une de l'autre , font, de ce co-te-U , les bornes entre 1'Emoire de la Chine &c celui de Rullie. 2. Le Pays de Moungales ou Mongous. Les Moungales ou Mongous 9 font par-tagćs en deux grandes nations, les Moun- La Tartarie. 167 gales no/rs 3 Sc les Moungales jaunes ou iialkas. Elles font fćparees par le grand defert, nomme Chamo pat les Chinois, & Cobi par les Tattares &c les Rurfes. Ce defert a plus de trois cens lieues de long , & fe joint a quclques autres qui s'ć-tendent jufqu a l'Indoltan. Ceft une plai-ne remplie d'un fable mouvant en quel-ques endroits & fetme en d'autres, aride Šc fans eau en general, excepte quelques endroits ou on ttouve des fources &c des mares. Les environs de ces lieux humides ont quelques paturages , ou les Tartares des environs vont camper avec leurs trou-peaux. La plaine eft interrompue par des collines , qui produifent des ;irbriffeaux j mais point de grands arbres. On trouve du gibier de diflcrentes efpeces dans certe plaine , qui eft tres-elevee fur 1'horifon, ĆV ou le froid eft tres-piquant & ttes-long. II n'y a qu'a creufer quelques pieds, pour trouver de la glace prefqu'cn tout temps; & cela efl: comniun a beaucoup d'endroits de la Tartarie. 1. Les Moungales noirs habitent un pays de trois cens lieues de long fur envi-ron cent de large. Ils demeurent fous des tentes faites de peaux : ceit pourquoi les Chinois les appellent Tfao~Tatfes 3 c'eft-a-dire , les puants Tartares. 11 y a dans cette contree , au nord de Pekin , de vaf-tes forecs. L'Empereur de la Chine y a M ij 1(j8 Me'chode de Gc'ographie. fait bacir plufieurs maifons de plaifance ,* ou il fait quelque fćjour lorfqu'il y vient chafTer. On y rrouve quelques mineš d'e-tain. Le chef de la religion des Moun-gales noirs , cft un Kutukcu du grand Lama du Tibet. II demeure dans le pays dCOrtous , an nord-eft du Chenfi. Cetce nation a eu long-temps un grand Khan , qui defcendoit de Gengiskan. II commandoit aux aurres Moungales au-dela du dćfert. Celui qui 1 eroir au com-mencemenr du XVI1C fiecle , fe condui-fant fort mal, fes fujets fe revolterenr, &c les Moungales noirs fe foumirenc aux Mantcheous, qui devenus plus forts par cette jonćtjon, firent enfuite Ja conquete de la Chine. De forte que c'eft aujour-d'hui 1'Empereur de la Chine qui eft leur grand rChan. Ils lont diviles en quarante neuf ćten-dards , partagćs felon les quatre portes de la grande muraille de la Chine , qui communiquent a. leur pays. Leurs Princes , qu'on dir erre au nombre de vingt-deux , fonc obliges de fe rendre a Pekin , lorfqu'ils y fonc mandes; & on y appelle de leurs fentences. On voic dans leur pays les ruines de plufieurs villes , que leurs ancerres avoient bacies au temps de Gen-gjiiskan & de fes premiers fuccefTeurs. Le Pays de Tangutj ficue au nord de celui d'Orrous , & qui, dans plufieurs La Tartarie* 169 Gartes j eft deligne comme faifant partie des Moungales, n'a rapport qu a fancien-ne hiftoire de ce pays. Autrefois les Chi-nois appelloient Tanyu les PrincesJTarta-res qui etoient a 1'occiclent; & les Hifto-riens Perfans qui one fait lhiftoire de Genghiskan , defignent fous le nom de Tangut 1'Einpire &Hya3 qui, felon les Chinois , etoit dans ce pays avant les con-quetes de ce Prince. II faut joindre au Pays des Moungales noirs , celui des Tarrares de Kokonor , qui eft: a. 1'oueft du Chenfi, Province oc-cidentale de la Chine. Ces Tarrares pren-nent leur nom d'un grand lac aurour du-quel ils demeurent. Ils dependent de la Chine depuis 1710 : auparavant ils obeif-foient au grand Lama du Thibet, lis ont huit Khans, a qui les Empereurs de la Chine ont donne des titres.honorifiques. Leur principal revenu conlifte dans une poudre d'or qu'on ramaife parmi le fable d une petite riviere. Aux environs demeurent les Sifahs y dont une pattie obeit a 1'Empereur de la Chine , &c 1'autre au Khan des Calmouks, Les Sifans ont etć tres-puilTans j 6c on peut regarder leurs Khans comme les pre-miers Rois ou Empereurs du Tangut , aufquels ceux d'Hya on fuccedć vers le commencement du Xc nccle. t. Les Moungales jaunes ou Kalkas , M iij 170 Methode de Geographie. d on t la nation e£t bcaucoup plus nombreti-ie que celic des Moungales noirs ,occupent auili une ćrendue de pays d'environ trois cens liftues de long fur cent cinquante de large. T^e pays elt rempli de monragnes. Le nom de Kalkas leur vient d'une perice riviere , pres de laquelle leurs Khans avoient fixe leur habiracion. Elle fe jette dans le Lac Couton ou Kulun 3 & Daldi y d'oii fort, d\in autre cote, la riviere d'Ar-gun. Les Kalkas habirent fous des tentes ou dans des chariots couverts, & nourif-fent de grands troupeaux de chevaux j de chameaux , de vaches &z de brebis. Ces clernieres ont, dit-on , une cjueue fi Ion-gue ćv fi grofic , qu'elle pefe environ dou-ze livres. Les Kalkas onr un Lama , qui a la fin du fiecle dernier , s'eft rendu in-dependant du Dalai Lama , dont il n'etoit anciennement que Kutukcu ou Vicaire. Ce Lama demeure pres des fources du Se-linga , riviere qui fe jecce au nord , dans le Lac Baikal, fur les terres des Rufies. Les Kalkas , predeš par le Contaifch , ou grand Khan des Calmoucks , avec qui ils etoienr en guerre , fe font foumis a la Chine en 1691. Cependant ils ne paient point de tribut, & leut Khan eft fort con-fidere a. la Cour de la Chine , qui craint qu'il ne s'unifte aux autres Tartares occi-dentaux. Urga y fur le Ker/on y riviere qui coule dorient en occident dans le Lac La Tartarie. 271 Coulon 3 eft regardće comme la capitale d 11 pays. Ceft cependant moins une ville qu'un grand camp , ou le Prince des Kal-kas habite pendant lete* 7 1'hiver il fe re-tire au nord , pres des monragnes, pour etre a 1'abri des vencs. Ceft dans le Pays des Kalkas que font les fources de l'Amur , qui coule a 1'eft , & celles d u Jenifea & de 1'Obi , qui coulent au nord } eh traverfant la Sibe-rie toute entiere. Au fud-oueft , dc pres du grand Defert, eft un Lac nomrne* Cou* rahan-Oulen , pres duquel on ctoit qu'e-toit fituee Karacum ou Karacoran j capi-tale des Erats de Genghiskan. A qnelque diftance eft une longue chaine de monragnes, nommee Ulagala , qui fepare les Kalkas des Calmoucks ou Eluths. Ceft dans ces momagnes qu'etoit ancienne-ment la fepulrure des Khans des Mogols. On les enterroit avec ce qu'ils avoient de plus prćcieux. Methode de Geographle. C H A P I T R E V. L* A R A B I E. C a r t e s. M. Šanson a donne en une feuitte une Car te de V Arabie j mais nous croyons quon do i t etudier ce grand Pays fur les plus nouveaux Memoires. 11 faut done prendre icl les deux premieres feuilles de TAJie de M. d'anville. V Arabie sJy trouve coupee par le Trdpiaue du Cancer. L'Arabie eft une grande Prefqu'ii1e i bornee au feprentrion par la Syrie &c le Điarbeck , a 1'orient par le Golfe de Perle , au midi par la Mer des Indes , &č a Poccidenr par la Mer Rouge &c 1'ifthme de Suez. Elle peut avoir environ 700 lieues du nord au fud-eft , & environ 400 dans fa plus grande largeur. Sa fituation entre les ri & 34 degres de latitude feptentrionale , faic que 1'air y eft fort chaud , & le terroir fore fec. Ou y trouve beaucoup de fables , de deferts de de montagnes j mais peu de rivieres > qui ne font pas metne navigables \ & VArabit. 17 i jcomme il y pleut rarement, le pays eft fterile en la ptupart des endroits. II n'y a guere que le long des cotes ou il foit un peu meilleur. Son plus grand revenu con-fifte en dates , en encens, en aromates, en drogues , en fimples , en perles, en co-rail. &c en caffe , le plus excellent qu'il y air au monde. Les Arabes font de moyenne raille , forr bafanes, & la pluparc voleurs, prin-cipalemenr ceux qu,on appelle Bedouins, qui habitenc les campagnes čV: les deferts. Ces Arabes vagabonds fe vantent d'etre les plus nobles du monde 'y c'eft pourquoi ils ne s'allient point avec dautres nations que la leur. lis font divifes par Tribus , Čc chaque Tribu eft fubdivifee en famil-les , qui ont chacune un Cheique particu-lier , fous le Cheique de la Tribu. Les Arabes qui demeurentdans les villes, s'a-donnent au commerce , de mcme qu'aux Sciences > dans lefquelles ils reuiliffent fort bien , principalemenr dans la Mede-cine čV: dans 1'Aftronomie. Les uns &c les autres font Mahometans de relio;ion, ĆV ont une langue qui eft aufli etendue que le Mahometifme , puifqu'il eft defendu de lire 1'Alcoran en d'autre langue que rArabefque, dans laquelle il a ete ectit. Ce Livre , comme Ton fait , renferme les dogmes & les precepteJs de la Reli-gion que Mahom« , qui etoit Arabe , 274 Methode de Geographie. commenca a prc-cher dans fon pays ver$ l'annće 6zx. L'Arabie eft poflfedee par plufieurs Sou-verains, dont les principaux font le Grand Seigneur, le Sherif de la Mecque , tk le-Roi dTemen. Le Sherif de la Mecque eft fort refpećtć de tous les Princes Ma-homćtans , qui lui envoient des prefens confidćrables , tant a caufe qu'il eft de la race de leur Prophete Mahomet , que pour empecher les Arabes de detroufter les caravanes des Pelerins 3 qui vont a la Mecque , capitale de fes Etats. Dlvljlon. La divifion ordinaire de 1'Arabie , eft: en Arabie Petree 3 Arabie Deferte^ & Arabie Heureufe : c'etoit la divifion des An-ciens, que nos Geographes onr fuivie , comme methodique. Mais les Orientaux ne la connoiffent point, & ils s'accordent peu entr'eux fur le nombre des parties de 1'Arabie } encore en parlent-ils avcc pen d'ordre &c de methode. De-la vient la variete de nos Ecrivains fur ce grand Pavs, que nous connoiftbns peu , faute de bons Memoires. Nous commencerons par donner la divifion a laquelle le nouveau Geographe Ture j'arrete , tk nous rangerons les Pays dans Pordre geographique,en commencant par le nord , 8c obfervant qu'il ne fait "polnt mention en cet endroit, de la plus grande parcie de l'Arabie Perree , qui de-pend du Gouvernement Ture de l'Egypre. 11 divile l'Arabie en douze Pays, qui lbnr, I. le Batiieh > qui elt le Defcrt voifin de la Syrie; 2. le Bldgia-{ ou Heja^3 qu'il fait commencer a Ailah 3 &c ou fone les rer-ritoires de Medine Se de la Mecque : 3. le Neged ( ou Pays eleve ) du Hidgia% ' 4. i'Aroudh ou X Arcd , autre pays de montagnes, voifin du precedent: 5. \Te-mamch ou le damama : 6. VHedger ou le Bahrain , fur le Golfe de Perfe : 7. l'O-man 3 a l'enrree de ce Golfe & fur la Mei des Indes : 8. X Ahkaf 3 grand defert au milieu de l'Arabie , que l'on dit erre rem-pli de collines & de plaines de fable , pendant 350 lieues, enrre la Mecque & Oman : 9. le Chihr ou Seger: to. le Te-men : 11. le Neged-ul-Temen 3 ou fon pays eleve , dans Tinterieur des terres : 12. le Tehameh ou fa partie balfe , qui fe trouve a la droite de 1'enrree de la Mer Rouge. On voir par ces pays hauts &c bas a qu'on peut diminuer le nombre de ces parties , pour une divifion generale. Mais il y a un de ces pays , qui, en fuivanc notre divifion ordinaire , a donne lieu a plufieurs varieres : c'eft VHeja^ , ou fe rrouvent les fameufes villes de la Mecque & de Medine. Les uns l'onc mls. dans l'Arabie Petrće qui, felon les An- M vj 2-76 Methode de Ge'ographie. ciens, ne s etendoit pas tant au midi; les aurres , comme M. Delifte , le rnettenc dans l'Arabie Deferte , parce que les ter-ritoires de ces villes font dans des lieinc deferts &c arides ; enfin d'autres , comme M. d'Anville, les rapportent a l'Arabie Heureufe , fans doute parce que leurs cotes & quelques autres endroits font af-fez fertiles, & fe joignent fans interrup-tion a l'Arabie Heureufe propremem dite ou l'Yemen. Nous nous conformerons a ce dernier fentiment , qui eft celui de plulieurs Orientaux j &c nous etendrons d'ailleurs avec M. d'Anville , l'Arabie Đeferte dans la partie feptentrionale & orientale , comme il l'a marque dans 1'un de fes Hemifpheres 3 publie en dernier lieu. A R T I C L E I. V A R A B l E P Ž T R E E* Ce Pays, qui eft au nord-oueft entre la Terre Sainte, TEgypte & la Mer Rou-ge , eft polfede par les Turcs , & depend du Gouvernement d'Egvpte. Oeroit ou demeuroient autrefois les Idumeens & les Amalecires. Les Ifraelites le parcou-rurcnt pendant 40 ans apres leur fortie V Arabie. 177 «J*Egypte. II eft rempli de beaucoup de montagnes dont les principales fonr, VHoreb j & le Sinai, appelle aujourd'bui le Mont Sainte Cathenne , oii Dieu a donne fa loi a Moyfe. Le Mont Horeb n'eft point au levant du Sinai', comme on le reprćfente fur quelque cartes \ mais il eft a fon nord-oueft. II y a au pied du Mont Sinai un Couvent alTez conll-derable de Moines Grecs. Cette partie de l'Arabie , qui eft la moins confiderable , a tire fon nom de Petre'e d'une ancienne ville qu'on appel-loit Petra y k l'extremite du Golfe oriental de la Mer Rouge , etoit autrefois une ville ou il y avoit un port. On en remarquoit un autre dans le voifi-nage qu'on appelloir AJiongaber qui pouvoit etre a. 1'endroit nomme aujour-d'hui Kalaat-al-Acaba. Ces deux ports etoient fameux du temps de David & de Salomon , pour les riches marchandifes qu'on y apportoit de l'Afrique orientale , čk peut-etre des Indes. Quelques Auteurs mettent encore dans l'Arabie Pćtrće , plu-fieurs autres lieux, tels que Maab > Bofra^ Methode de Geographie, &cc. que nous avons mis dans la Syrie, comme il convient* A R T I C L E II. V ARABIE DESERTE. C^>E P^ys, qui eft plus grand que les deux autres parties de l'Arabie , tire Ton nom de fes vaftes &c brulantes folitudes, qui en rendent la plus grande partie fte-rde. II n'y a que quelques contrees vers 1'orient, tk pres du Golfe de Perfe , qui puiffent etre bien habitćes &c qui foient fertiles. On y remarque les Etats fui-vans , dont le premier eft aux Turcs > cjui fe font aufli empares de plufieurs vil-les voifmes de 1'Euphrate , qu'on rappor-toit ci-devant a l'Arabie Deferte , & dont nous avons parle dans le Gouvernemenc du Diarbeclč. i. L'Etat d'El-Katif 3 ou de Bahrain. \\ eft vers le milieu du Golfe de Perfe ou de Bafra , fur la c6te occidentale : il porte le nom d'Heger &z de Bahrain. Sa capitale eft El-Katif^ qui a d'aflez bonnes murailles tk des fofTes , avec un port, ou Ion fait quelque commerce : il y re-fide un Bacha Ture. Le territoire eft affez VArahie. 17? fertile en dates , & il y a aufll des vi-gnobles. Dans le voifinage font les lile* de Bahrain j pres defquelles on peche des perles qui fonr grolfes & rort rondes y mais moins belles que celles qui fe trou-vent pres du cap de Comorin dans les Indes. Ahfa ou Lehfa , fur la riviere d'Aftan , eft encore une ville du pays d'Heger ou de Bahrain , dont elle palfoit ci-devant pour la capitale. Ga/ar eft fon pott. z. LEtat de T Emir de Jemama. Ce pays eft dans les terres, aux envi-rons de la riviere d'Aftan : il prend foro nom de fa capitale , Jemama 3 qui eft peu connue , & qui eft environnee d'un affez. grand nombre de villages ) ce qui prouve la fertilite du pays. liajar ou Hogr palfe pour une ville aflez confiderable. 5. L'Etat de l'Emir de Mafcalat. ,Tout ce qu'on en fait , c'eft qu'il eft au fud-eft d El-Katif, ćk que la ville qui lui donne^bn nom , eft a dix ou douze lieues de la mer ou du golfe de Perfe. La cote eft toute de fable čk inhabitee , en foite que pour aller d'El-Katif a Oman , que Ion trouve enfuite a 1'entree du golfe de Perfe y il fant prendre fa route par mer. l S o Methoie de Geographie, 4. VEtat de V Emir d'O man 3 ou de Ce Pays eft plus confiderable que le precedent, fur-tout du cote de la mer des Indeš : il eft tres-peuple &c fertile en fruits & en grains. La ville d'Oman j pres la mer , tte ibn chateau nommć Sohar j font aujourd'hui en ruines \ & 1'Emir ou Prince de cette contree demeure a Vodana> petite ville dans les terres. Mafcate eft pres la mer des Indes, & alTez marchan-de : les Portugais s'en etoient empares. Julfar eft un autre port , fur la Mer Rouge. Plufieurs Auteurs renferment le pays d'Oman, & meme les autres qui prece-dent dans l'Arabie Heureufe \ mais il fem-ble qu'ils ne doivent pas y etre compris, y ayant un tres-grand dćlert entre eux &c i'Yemen . qui rait la principale partie de l'Arabie Heureufe. Le pays d'Oman finit a un cap fameux nomme Rofalgate , qui eft le plus oriental de l'Arabie. Vodana. L'Arabit. i8i ARTICLE III. VJRABIE HEUREUSE. Cette partie eft ainfi nornrnće , parče qu'elle eft plus fertile que la Petrće & la Deferre , quoique 1'indolence des peuples qui l'liabitenr l'empeche de produire rou-res les chofes qui leiir feroient necelTaires ou utiles. Ceft-la qu'on rrouve d'excel-lent encens , & le meilleur cafle qu'il y ait au monde. Des grains de caffe qu'on en a tranfportes , & qu'on a pris foin de faire frućtifier avec beaucoup de peine , font venues les autres plantations, qui font aujourd'hui dans l'Ifle de Java en Afie, dans celles de Bourbon en Afrique , dans celles de S. Domingue & de la Mar-tinique , en Amerique , aulTi bien qu a Surinam ćV: a Cayenne. Nous renfermons dans fArabie Heureufe , deux grands pays j favoir V Temen & le Hija% ; le premier au midi, ćV: le fecond vers le nord. i. L'Temen. Ce Pays, qui eft proprement l'Arabie Heureufe , fe divife en trois parries; ce fone d'oricnt en oceident , le Secrcr ou Chihr j l'Hadramauc j & i'Temen propre. 18 2 Methodc de Ge'ographie. 1. Le Seger fe reflenc de la fecherefte des deferrs qui i'avoifinent au nord tk. a 1'orienr : il eft habite par le peuple de Maarah, dont le langage eft un dialećte par-ticulier^. La principale richelfe de ce pavs confifte' dans l'encens qu'on y recueille en quantite : il produit aufti les plus excel-lens charneaux. L'Emir ou Prince , refi-de prefcntement a Fartach ou Fartash 3 perite ville pres de la mer , donr il prend fon nom : il demeuroit ci-devanr d Ktfem ou Carefem , un peu plus a 1'oc-cidenr. Sur la mcme core , vers le nord ,. on rrouve U u far , aftez bon pore, Mer-bat &c Hafec. L'Iile Socotora 3 qui eft: plus pres de l'Afrique , ou nous en par-lerons , depend du Prince de Fartach. 2. Le pays cVHadramaut faifoit autre-fois la principale partie du Rovaume des Homerites, qui ont ete celebres dans les Anciens. Mareb ou Saba 3 qui eft dans les terres , en a toujours ete la capitale : c'eft une ville bien peuplee , 8c fon ter-roir eft fertile ek rres-fain. On ecale dans 1'Alcoran fes avanrages , que Mahomet fait monter au nombre de douze j car il vouloit gagner ce peuple alors puiflanr, en Paccablant de ftateries. Ce pays eft aujourd'hui fous la dependance du Prince de l'Yemen propremenr dit, dont nous allons parler. On peut remarquer eneore dans 1'Hadramauc, Shibam, ancienne vil- VArable. iSj le , avec un chateau , pres d'une monta-gne tres-peuplee \ 8c Sahar 3 pore de mer. 3. U Temen propre eft beaucoup plus conliderable que les deux pays precedens : il secend non-feulement fnr les cotes des deux mers , la Mer des Indes & la Mer Rouge , mais eneore fort avanr dans les terres, aux environs d'une grande chaine de montagnes , que Ion nomme Servat. Dans cette derniere contree 1'air eft tres-fain & tempere ; au lieu que vers les cStes on y reftent les plus grandes chaleurs. On connoilToit ci-devant ce pays fous le nom de Royaume d'Aden j a caufe d'une ville maritime tres-commercante : les Tnrcs en one ete les maitres pendant quelque temps , & ils y avoienr erabli vers 1530, deux Beglierbeis ou Bachas , l'un a Sanaa & l'autre a Zeb'id. II eft au-jourd'hui gouverne par un Prince de la race de Mahomet , &: qui en confequen-ce prend le titre d'Iman & de Calife , ou de chef de la Religion comme de 1'Etat. Celui qui vivoit au commencement- de ce fiecle avoit fait batir la ville de Mouab ou il faifoit fa refidence. La capitale de ITemen eft une ancienne ville nommee Sanaa } dans les terres , comme Mouab } dont elle eft ćloic,nće , vers le nord , de deux ou trois joumees. Sanaa eft une des plus grandes villes de 1'Arabie, peuplee & tres-marchande : iS4 Mahodc deCeographić. elle relTemble a Damas, par la quantitc' de fes eaux , Sc par fes beaux jardins. II y a plufieurs manufaćhires , & fes ma-roquins font meilleurs que par-rout ail-leurs. Son territoire eft fertile en fruits de toute efpčce , mais fur-tout en caffe. Damareft une ville alTez confiderable, a un quart de lieue de la nouvelle ville de Mouab: toutes deux fe trouvent} auili bien que Da/ar j dans une plaine tres-agreable , & dans le voilinage d u pays d'Hadramaut j lequel appartient aufli au Roi ou Prince d'Yemen , comme nous 1'avons dit. Sur la cote meridionale eft Aden 3 bel-le j grande forte ville , avec un port alfez frequente. Ceroit la meilleute pour le commerce de route 1'Arabie , avant cjue les Europeens fe fuffent avifes d'aller a Moka, parce que cette autre ville eft plus pre'j des territoires qui produifenr le meilleur cafle. II fe tient a Aden de tres-belles foires j mais ce n'eft que la nuit, pour ćviter les grandes chaleurs. On y a fait depuis quelques annees un bel aque-duc , pout fiire venir de l'eau douce. La ville de Moka a un tres-bon port , a l'entree de la Mer Rouge , a quinze lieues du Detroit de Bal-el-Mandeb , que nous appellons pat cotruption Babelman-del. Cette ville n'eft pas fi confiderable que celle d'Aden 3 mais depuis le com- VArabie. . z 8? mencement de ce fiecle , elle eft devenue plus marchande. Elle contient environ dix mille habitans , prefque tous Maho-metans , avec quelques Armeniens Sc beaucoup de pauvres Juifs , dans un quar-tier fepare , ou une efpece de fauxbourg hors de la ville ; tous gens bafanes, alTez bien faits Sc extremement civils. Le com-merce qui fe fait a Moka, confifte dans le corail rouge qui fe peche fur fes cotes, &c dans fon cafte , qui a plus de rćputa-tion que tous les aucres. La ville eft en-touree de murs a l'antique , moitie de terre battue avec de la paille. 11 y a qua-tre portes Sc plufieurs tours , avec du canon fur quelques-unes j mais il n'y a point de foffćs. Les rours cjui flanquent les murs de la ville, font lubitees par des foldats, qui font des patrouilles pendant la nuit, &C qui durant le jour fe tiennent fur le port (5č dans le Bazar pour empecher les de-fordres & les friponeries ; car a Moka Ion eft fort jaloux de la tranquillite publi-que , Sc de la bonne police. On amene les coupables devant le Gouverneur , qui fur le rapport d'un vieil oflicier , qui com-inande fes gardes, les fait punir tres-feve-rement. Tous ces foldats , au nombre de cinq ou fix cens , s'alTemblent tous les jours depuis midi jufqu'a deux heures dans la grande place , pur conduire le a 8 6 Methode de Gćographie* Gouverneur k la Mofquce , ou il fe rend avec beaucoup de fafte Sc d'appareil, ac-compagne de fes fils & de tout ce qu'il y a de gens conlidćrables fuperbement monces j Sc faifant porrer les drapeaux du Roi, Sc ceux de Mahomet Sc d'Ali, au fon des timbales. Lorfque le Gouverneur fort de la Mofquee , toure cette In-fmterie fait une decharge Sc coujours a balle. Les femmes , excepte un petit nombre de cclles du commun j ne paroiflenc ja-mais de jour dans les rues de Moka : le foir elles ont un peu plus de liberte , qui conliftea s'entrevifiter. S'il arrive quequel-ques Dames rencontrent des hommes en leur chemin , elles fe rangent avec leurs femmes toutes du meme cote de la rue auptes des maifons ^ elles laifTent palfer les hommes, gardam un profond lilence 6V: une grande modeftie , aprčs quoi elles continuent leur route. Elles font a peu pres vetues comme le font en general toutes les femmes de 1'Orient, dont les habits font decrits par tant de voyageurs. Elles ont entr'autres chofes un grand voile d'une toile fine de couleur qui leur cache le vifage , fans les empecher de voir a travers. Elles portent aufli de petites bot-tines de maroquin. Le port de la ville de Moka elt forme par deux langues de- terre qui fe recour- VArabic. 1S7 bent en maniere d'arc , Sc reprefentent une demi - lune parfaite. Sur les deux poinces font fitues deux forts qui defen-dent fentree j & cette entrće , qui eft d'en-viron une lieue de large d'un forr a faune , fait une-maniere de rade ou les guands vailTeaux font obliges de mouil-ler. Le relte du port n'eft pas afTez pro-fond , Sc ne fert que pour de mediores batimens. Le pays des environs de Moka eft en general fort fec , & il n'y a que de mau-vaifes eaux nitreufes Sc prefque falees. Tout le pays qui borde la Mer Rouge peut paller pour fec j mais le territoire de Moka eft le pire de tous. 11 y fait une chaleur exceflive, Sc il n'y tombe prefque jamais de pluie. II fait ordinairement aulllchaud au mois de Janvier a Moka , qu'il fait communement a Pariš au mois de Juillet. Cependant les gens du pays accoutumes encore a de plus grandes cha-leurs en Juin Sc Juillet, lorfque le vent du fud fe fait fentir 9 croient quelque> fois avoir froid en Janvier , Sc les plus aifćs prennent alors la vefte de drap , qu'ils ne quittent dordinaire qu'au mois de Mars. 11 eft vrai que vers les neuf a dix heures du marin il vienr de la mer un vent de bife , qui rafraichit beaucoup , fans cjuoi 1'on ne pouroit refilter a la chaleur. Au nord de Moka , a quatre ou cinq iS8 Methodt de Geographic. journćes , Ion trouve Zebid , ancienne ville , grande Sc aftez marchande , dont les habicans one en abondance toutes for-tes de fruits. C'eft la capitale du Tehama> ou de la partie baffe du Yemen. C etoit, dit-on , la principale ville de 1'ancien Rovaume de Saba , dont la Reine fut rendre vifite a Salomon , pour etre temoin de fa fagelTe \ d'autres la font venir de Mareb y dont nous avons parić pag. 182. Betelfague ou Bck-ul-Fakih > eft eneore une ville confiderable au nord de la prćee-dente : c'eft dans fon territoir que vient le caffe le plus eftime. 2. Vllija^. Ce Pays , qui eft tres-renommeparmi les Mahometans , a caufe des pćlerinagcs qu'ils font tous obliges de faire a la Mec-que au moins une fois en leur vie j eft au nord-eft du Yemen , & au midi de 1'Arabie Petree. 11 eft aflez fertile en plufieurs endroits , Sc bien habite. Ceft un She-rif, defeendant de Mahomet par Phati-ma fa fille , qui gouverne ce pays , fous la protećlion du Crand-Seigneur. On y diftingue deux territoires ceux de la Mecque Sc de Medine y qui en font les principales villes. La Mecque eft a deux journees de la Mer Rouge : c'eft une grande ville bien barie , cćlćbre pour avoir donne naiflance a VArabie. l S <-) a M.ihomet en 1'annee 5 70 , Sc auffi parce qti'elle contrent , dans une magnitique Mofquee , un pent batimenr mre ancien que les Arabes pretendent avoir ete conf-truit par Abraham Sc Ifmael leur pere. Mahomet a preferit a tous fes Sećtatenrs d'y faire un pelerinage au moins une fois en leur vie , & c'eft ce qui attire toujours beaucoup de monde a la Mecque. Gid-dah j lur la Mer Rouge , eft le port de cette ville : il y a deux Commandans ou Gouverneurs , 1'un de la part du Grand-Seigneur, Sc 1'aurre pour le Scherif de la Mecque 7 chacun d'eux regoit la moitie des douancs qua les Marchands y payent. Medine j au nord de la Mecque , eft moins confiderable. Elle fe nommoit an-ciennement Yatrib ; mais Mahomet s'y etant rćfugić en 611 3 apres s'eire enfui de la Mecque ou 1'on ne vouioit pas re-connoitre fa pretendue vocation divine , Yattib fut nommee Medina-al-Nubi , la ville du ptophcte , Sc enfui te iunplement Medine. On y voit le tombeau de Mahomet , qui y mourut en 637. Les pele-rins de la Mecque ne manquenc pas de 1'aller viliter avec devotion. Yambo Sc Algiar j fur la Mer Rouge , font les deux ports de Medine. Tome VIL N 29° Methode de Geographle. C H A P I T R E VI. L A P E R S E. C A R T E S. * M. ŠANSON a donne en une feuilte , une Car te de la Perfe ; & le favant M. Re-LAND en a publie une j qui a ete gra-vee par les foinsdu Jleur Schenck d'Amf-tcrdam. Mais celle de Guillaume De-LisjLE efi bien fuperieure & c'efi celle dont 11 faut faire ufage. T iA Perfe , une des plus confiderables Rćgions de l'Afie , eft ficuee enrre les 61 & 93 degves de longicude, & entre les 15 & 45 de latitude feprenrrionale j de force que dans fa plus grande etendue elle peut avoir 5 00 lieues d'occident en orienr, 8c 570 du fud au nord. Ses bornes font au feptentrion , la Mer Cafpienne 8c la Tarrarie } a l'orient, l'lndoftan ou Em-plre du Mogol j au midi, l'Ocean orien-tal ou indien , 8c le Golfe de Baflb-raou de Perfe ; au couchant, la Turquie Afiatique 8c la Georgie. La Perfe. 191 Qualite. L'air de Perfe eft a(Tez fain , quoique forc chaud fur tout vers le midi. La terre y produir toutes fortes de grains , excepte le feigle &c lavoine qu'on n'y fćme poinr. Elle rapporte aufli beaucoup de ris , de fruits , de coton & de foie , & enfin elle nouric quantite de chameaux , de che-vaux &z de gibier. Le pays eft mediocre-menc peuple , rempli de montagnes tk de dćferrs fabloneux. On n'y trouve poinc de forets, ni de rivieres navigables, de forte qne prefque tout le commerce fe fait au dehors. Če commerce confifte principa-lenient en foiescrues če travaillees , en beaux tapis , en toiles de coton & en perles qu'on peche pres de 1'Ille de Bah-rein , dans le Golre de BaiTora ou de Perfe. Gouverncment. La Perfe fut autrefois poffedee par les A(Tyriens &: par les Medes j mais 560 ans avant la naidance de Jefus Chrift , Cyrus ayant fuccćde a Aftiages Roi des Medes fon aieul maternel, jetta les fondemens du Royaume des Perfes , qui devint tres-puilfant , & beaucoup plus ćtendu cju'il n'eft aujourd'bui. Ce Rovaume dura 12.8 ans , fous treize Rois , dont le demier fut Darius Codoman , qui fut vaincu par Nii 191 Mćthode de Geographic. Afexandre le Grand , Roi de Macedoine, lan 5 51 avaiit 1'Ere Chretienne. LesGrecs, les Romains & les Parches le polfederent enfuite les uns aprčs les autres, jufqu'en 1'an de J. C. 227 , qu'Artaxerxes , Per-fan , fe revolta contre Arcaban Roi des Pardies , & commenca la fcconde Mo-narcliie des Pcrfes } laquelle dura jufqu'en 63 7 , qu'lldegerd 111 ayant ttć vaincu , les Sarralins sen emparurent fous Omar , leur fecond Khalife , ou Succefteur de Mahomer. Ils conferverent la Perfe juf-qu'en 1056, que les Turcs Seljoucides, elpece de Tartares, s'en renditent mai-tres. H y eut plulieurs fortes de Souverains jufqu'a Sophi Ifmačl , qui rćgnoit au conv mencement du XVIC lićcle , & qui eft celui depuis lequel on marque 1'Empire des Sophis. Cet empire a ete , jufqua notre fiecle , hereditaite , non-feulement aux fils legitimes; mais meme aux na-turels j qu'on preferoic quslquefois aux autres parens. II eft monarchique &c rel-lement defpotique , que la feule volontć du Prince y tient lieu de loi , & que ce Monarque difpofe abfolument de la vie 6c des biens de fes fujets. La minorite du Prince legitime a donne lieu dans ce iiecle a plulieurs ufurpateurs de fe rendre maitres de 1'autorite fouve-raine. Apres la more de Schah-Uflein, en 1712, Mireweis fe faifit d'Hifpahanj La Perfe. 19] mais fon autorite ne dura que trois ans. L'ufurpateur Afzraf parut done en 1715 ; mais fon ufurpation prit fin en 172S. Thamas remonta alors fur le trone de fes peres } mais il fut depofe en 175z. Mirza-Abbas , jeune Prince , trouva dans Thamas-Kouli-Kan , un protecteur appa-rent dans un ufurpateur fecret. Ce der-nier ne protegea Mirza 5 que le temps qui lui etoit neceifaire pour etablir fa propre autorite. Des qu'il en fut venu a bout, il fit niourir fon Souverain en 1756 , & commenca des-lors a regner de fa propre autorite s ce qui dura jufqu'en 1747. Dans ces onze annees il eut des fucces heureux contre le Grand-Seigneur Sc con-rre l'Empereur duMogol \ mais fon terme vint a fon ronr, & il fur tue en 1747, pres de Kirman , & Ali-Shah, fon neveu, monta fur le trone. Depuis ce temps, ce n'elt que troubles , meurtres & aflaffinats dans ce Rovaumc qui a ete livre , non pas a un feul , mais en meme temps a plu-fieurs tyrans. Moeurs. Langue. Religion. Les Perfes ont la taille mediocre, le corps alTez bien pris , & le vifage un pen bafane. Ils fe font rafer les cheveu* 6V: la barbe , excepte la mouftache qu'i1s one fort grande. Ils font aufli fon proprjs , fpirituels, prudens , braves, honnetes , N iij 19 4 Methodc de Geographie. civils airx ćtrangers j mais grands faifeurs de complimens 8c un peu menteurs. Ce-pendant ils font bons amis , 8c fi rideles dans leur amitie } qu'ils la preferenc au fang & a la naifTance. Ils aiment les arts , les fciences 8c la guerre , dans laquelle leur cavalerie eft plus eftimee que leur infanterie j au conrraire de celle des Turcs. Ils encendent peu la navigation , quoiqu'ils foient proche de rrois merš 7 6c c'eft pour cela quils fe fervirent des vailTeaux anglois pour chalfer les Portu -gais d'Ormus. Ils ne font guere plus adon-nes au commerce de terrej puifqu'ils le lailfent prefque tour faire aux Armeniens. Leurs plus grands ennemis fone le Ture , le Grand Mogol , 8c les Tartares Uf-becs. Leur langue approche fore de l'A-rabe , 8c leur Religion eft la mahome-tane de la fećte d'Ali > gendre de Maho-mec. Le Roi ou Sophi de Perfe fait fa rezidence ordinaire a Ifpahan , capitale de fes Erats. Divi/ion. Les Gćographes ne font pas d'accord , rouchant le nombre des Provinces de Perfe. Les uns lui en donnent plus , les au-eres moins. Ceux qui les reduifenc a dou-• ze paroiflent les mieux fondćs. Les noms cju'ils leur donnent font: i. L'Irak Agemi. i. Le Chufiftan. La Perfe. _'*>J - 5. Le Farfiftan ou 8. Le Khorafan. Fars. 9. L'Eftarabath. 4. Le Kerman. \ o. Le Kilan. 5. Le Sigiftan. 11. L'Aderbigian. 6. LeZabliftan. iz. Llran ou Pro- 7. Le Candahar. vince d'Erivan. L. L'Irak A gani. Cette Province eft la plus grande du Rovaume. Sa longueur eft de 100 lieues, &z fa largeur de 150. Elle eft toute du domairte du Roi , & n'a point de Gou-vemeur conime les autres Provinces. L'air y eft fec & fain, la terre en general peu fertile , par le manque d'eau, &: les mon-ragnes qui y font en grand nonlbre > tou-res couvertes de chardons. Sa capitale eft Ifpahan } qui 1'eft aufti de tout le Royaume, de meme que la re-fidence du Sophi. Cette ville , dont le nom , en perfan , eft Sephaon j eft fituće fur le Zenderoud , au 31 degre 30 mi-nutes de latitude : elle eft pour la longitude de jodegrćs 30 minutes plusorientale que TObfervatoire de Pariš. Si on y comprend fes vaftes fauxbourgs , Ifpahan a plus de dix lieues de cirćuit, mais il y a quantite de jardins &c de placcs publiques. Celle du Meidan , ou ion rient le grand marche 5 eft la plus belle de toute la Perfe, & n'a point de femblable en Europe. Les maifons d'If-pahan font aflTez bafles3 & nont que deux N iv 2 O 6 Mćthodc de Geographle. ou trois etages. Ellcs ont prefque toutes leurs toits en cerrafle-, ou Ton fe p roni ene. L'on y couche meme en ćce, pour y jouir de la fraichecir de i'air. Le commerce qui fe fait en cette vil le eft fort cor.fiderable. II confifte principalemcnc en ibies crues, en erofFes dor, de foics ik de coron les plus belles de toute 1'Afie , de meme qu'en tapis les mieux travailles qu'il y ait au monde. Ce comnv.rce fe fait non-feu-iement avec les Indiens, les Arme'niens, les Gćorgiens &c les Juifs ; mais aulli avec les Fran501 s , les Anglois , les Hollandois & les Italiens. Les Catholigues ont a Ifpahan rrc^s Couvens de Religieux , dont rim eft d'Auguftins efpagnols , Tantre de Carmes italiens, & le troifieme de Capu-cins frangois. Le plus beau fauxbourg de cette ville eft celui de J ulj a j Zulfa ou T^ulfđj 011 il v a plus de 3000 maifons, toures a (Tez bien baties. 'Plulieurs Auteurs font monter le nom-bre de fes habitans a onze cens mille ames. Ceux qui y en mettenc le moins , afturenr qu'il y en a lix cens mille. Le rombre des ćdifkes eft prodigieux. On en compte vingt neuf mille quatre cens foixante-neuf dans fenceinte de la ville, &-huit mille fept cens quatre - vingt au dehors , tout compris , les Palais , les Mofquees, les Bains, les Bazars, les Ca- La Perfe. 297 ravan ferais & les Bouncmes 7 car les Bou-tiques , fut tout les grandes ik les mieux fournies , font au cceur de la ville , fepa-rees des maifons ou Ion demeure. On trouve toujours une telle foule dans les Bazars , que les gens qui vont a cheval, fonz marcher devant eux des valets a pied pour fendre la preiTe tk fe faire palTage , parce quon y eft continueliement emba-raife. 11 eft vrai que c'eft le feul endroit ou il fe trouve une ft grande affluence de peuple , tk l'on va forr a 1'aife dans les autres qmrtiers de la ville. Cependant li Ton fait reflexion que les remmes en Perfe , hors celles des pauvres , font enter-mees tk ne fortent que pour alfa i res, on trouvera que cette vilic doit etre extteme-ment peuplee. Ifpahan eft batie le Iong de la riviere de Zenderoud , fur laquelle il y a trois beaux ponts j fun qui repond au mi licu de la ville, &c les deux autres aux deux extremitćs , a droite & a gauche. Quoi-que 1'eau en foit forc legere & fort douce par-tout, on ne fe donne pas la peine a. Ifpahan den aller chercher , parce quc l'eau des puits eft ćgalement douce (k legere. Les murs de cette ville ont environ vingt milles de tour. lis font de terre , af-fez mal eutretenus , ik CeUement cuuverrs par les maifons & par les jardins, emi v N v ipS Mithode dc Gćographie. touchent tant au dedans qu'au dehors \' qu'il faur en plufieurs endroits les chercher pour les appercevoir. II en eft de meme dans les autres villes du Royau-me j c'eft ce qui a trompć quelques voya-geurs , qui one rapporte que les villes de Perfe n'ont point de murailles j tout au contraire , il y en a peu qui n'en aient. Ifpahan a de plus un ehateau 6c un foife. La beaute de cette ville conlifte particu-lierement dans un grand nombre de Pa-lais magnifiques , de maifons gaies & riantes , de Caravanferais fpacieux , de fort beaux Bazars, des canaux 6c de rues dont les cotes font couverrs de fort grands arbres j mais les autres rues font ecroites, mal unies 6c tormes , de maniere que bien loin de voir d'un bout a I'autre, on ne fauroit du milieu voir deux cens pas devant foi. Ces rues font aufti entrecou-pees par des Bazars ou Marchćs couverts. Le pis eft qu'elles ne font point pavćes , non plus que les rues des autres villes de Perfe. Mais comme d'un cote l'air y eft fort fec , 6c que de I'autre ehacun arrofe devant fa maifon matin 6c foir , il n'y a ni autant de crote , ni autant de pouftiere qu'ailleurs} maisil ya trois autres inepm-modites aftez conliderables. L'une que les rues etant voutees 6c creufes, a cau.e des canaux foirerreins qui paflent pir to'us les endroits de h vi le , il y arhve quel- LaPerfe. 299 quefois des ecroulemens , ou les gens de cheval conrent rifque de fe tuer. L'aurre , qu'il y a dans les rues des pui'ts a lleur de rerre , o« Ton court le metne danger , (1 l'on ne regarde bien devant foi. La rroi-fieme incommodicć, qui eft fore defagrea-ble , eft que les egouts des maifons font rous dans les raes fous le mur de l'edifice dans de grands t rous , ou l'on jette toutes les immondices du lo«is. La conftrućrion d'lfpahan eft fort lrre-guliere. De qnelque cote qu'on la regarde , elle paroi't comme un bois On l'on ne peut difeerner que quelques domes avec des tourelies fort hautes , qui y fone atta-chees , 6c qui fervenr de clochers aux Ma-hometans. Cette ville , la plus grande 5c la plus belle de tout l'Orient, renferme des habitans de toutes Religions ,-Chre-tiens , Juifs , Mahomćtans , Gen ti! s , Adorateurs du feu , 6c l'on y voit des Ne-gocians de jtoute la rerre. C'eft aulli li plus doćle ville de tout l'Orient , 6c d'cu la fcience fe repand parriculieremenr dans les Indes. Les Memoires de Chardin por-tent qu'il y a dans l'enceinre de fes mu-railles , 162. Mofquees 'y 4$ Colleges j 1S02 Caravanferais; 2.75 Bains ; 11 Ci-metieres. Sur quoi il raut remarqu;r qu'en Perfe les Cimetieres font pour la nlupart hors de la ville. Cashin ou Ca/wn-3 ville rort mais elie a eu au- 30 2 Mćthade de Geographie. trefois des Rois parriculiers ČV une ville de meme nom , qui palToit pour une des plus marchandcs & des plus riches de roure l'Afie. Les Portugais , commandes par le Duc d'Albuqucrque , la prirent en 1507, & y batirent une forre citadelle \ mais elle nit reprife en 1622 , avee le fe-cours des Anglois , qui etoieut jaloux des Portugais , la forterefle rafee , &c fon comtnerce rranfportć a Gomron ou Beri' der Abajji. L'Ifle d'Ormus manque d'eau douce , tk ne dofine que d u fel. 2. Le Mekran a pour capirale Me~ kran 3 aftez grande ville fur le Bafur. Almanfura 3 Guadel 3 & Debil font des ports de mer. Jafqucs en eft un autre , & la capirale d'une Principauce tributaire du Roi de Perfe. Ker j Fihr čc Rdfec font dans les rerres. V. Le Sigi/lan ou Segejlan. II eft au nord du Mekran \ mais fort rempli de montagnes. II a pour capirale Sigiftan ou Segtjlan J & les pecites villes d'A raba & de Mafnick. V L Le Zablijlan ou Sablejlan. Ce pays , qui ft entre 'e Sigiftan & le Candahar , eft d. meme temperatur,- que le precedenf« II a pour capitale nuj? ou Boji, ville avec un chateau , qui p alte La Perfe. 305 pour un des plus forts de toute la Perfe. Strenza j Becjabach^ S ar van. VII. Le Candahar. Cette Province a ece long-temps un thearre de guerre entre les Rois de Perfe, & les Empereurs du Mogol ; mais enfin elle eft reftee aux premiers, qui y one un Gouvemeur. Sa capirale eft Candahar y ville alfez marchande , le grand palfage de rinde en Perfe , & la plus forte ville du Royaume. Ceft de cette ville & de ce pays que font venus les Aghvans , fous Ja conduite de Mireweis & d'Afzraf, ufurpateurs du rrone en &z 1725*. VIII. LcKhorajfan. Ceft un pays aftez fertile, & d'ou vient la meilleure ibie de route la Perfe. II eft fituć au fud-eft de la Mer Cafpienne. II a pour capirale Herat j aftez bonne ville , qu'on appelle aurrement Sargultrar j ou ville des ro/es qui y fonr en plus grande quancirć qu'en rout autre lieu d u Rovau-rne. Mefchct ou Mexat 3 nommee aufti Thous j plus grande , plus beJfc , & meilleure , a le tombcau nugniftque du Pro-pbete 1 man-Riza , que les Tu res aufti-bien que les Perfes, y vont vilirer par devotion. Nifabur fait un grand com- J 04 Methode de Ge'ographie. merce de fes fabres , les plus eftime$ cju'il y ait au monde. IX. L*EJlarabath ou EJlarabad. Ce pays eft au fud-eft de la Mer Cafpienne , fa capitale , a deux lieues de la Mer Cafpienne , ou la paix entre la Ruflie tk la Perfe fut conclue en 1734. AJlara , Sengucrhafara 3 KeJ-ker y & Lenkera fur la Mer Cafpienne. 1. Le Ma-^anderan ou Talr/Jlan dont quelques-uns font une Province particu-liere, eft firue au fud de la Mer Cafpienne. On y remarque les villes de Eerhal\:tlz tk d'EJcreJ j dont la premiere ftrnee fur le bord de cette M.r , eft mediocrement grande , aftez belle , tk ia capitale de ce La Perfe. _ 305 pars. Czemme fur la Mer Cafpienne. Scmnam j Deflan 3 6c Bijar y font dans les terres. XI. L'Aderbiglan. Cette Province qui eft entre Tiran , le Kilan , &c 1'Irak - Agemi , fe divife au(fi en deux parties, qui font 1'Aderbi-gian propre , & le Schirvan. 1. UAderbigian propre a pour capitale , Tauris 3 la feconde ville de Perfe en rang , en grandeur , en beautć , en richelfe , en commerce , & en nombre d'habitans. Eile eft fituee au pied d'une montagne &c au bout d'une plaine , fans fortiricauons , & meme fans murailles. Un ruiffeau appelle Spintcha palTe au travers, &: il en coule un autre pres de la ville, lequel fe nomme^i, c'eft-a-dire , Sale, parce que fix mois durant 1'eau en eft fa-lee par des torrens qui s'y jettent apres avoir paffe fur des rerres couvertes de fel. Cette ville eft ttes-marehande , & l'on y travaille fort en foie , en coton j en or, en peaux de chagrin , de meme quen tur-bans les plus beaux de P^rie. Son commerce s'etend non-feulemenr dans tout le Royaume \ mais aulli dans la Turquie> la Georgie , la Ruftie & la Tartarie. Elle a ć'tć le theatre d'une longue guerre entre les Perfes & les Turcs , qui 1'ont prife Sc feprife plufieurs fois j mais entin les pre- 3 o6 Methode de Geographle. miers 1'ont toujours gardee depuis 1'an i (Jo 3 , que Cha-Abas la reprit fur les Turcs. Sa grande place eft: la plus vafte qui foir au monde , & les Turcs y one nlufieurs fois range 30000 hommes en baraille. Les Turcs prirenr cette ville en iji6 j mais ils furent obliges de la ren-dre aux Perfans en 1736. Tauris pafle communement , quoique avec peu de certitude-, pour etre 1'ancienne l'cbarane 3 ou les Rois de Medie faffoierit leur fć-jour , ou le General Parmenion fut tue , &c ou Epheftion , favori d'Alexandre , fut enterre avec une ma^nificence rovale. II y a plus d'apparence que 1'ancienne Ecbatane etoit a Hamadan , dans 1'Irak--Agemi, comme nous 1'avons obferve. Ar-devll eft aufti une a(Tez grande & bonne ville , ou Ton voit plufieurs tombeaux des Rois de Perfe. Marant ou Amarant eft prefque de meme grandeur , mais moins peuplee & moins marchande. Sa ficuation eft dans une plaine aufli agreable que fer-tile. Nifcowa eft une nffez bonne ville fur la Mer Cafpienne. Salmas Unma y hc Oromi font fur le lac Kanudhan. Mc-ragne en eft plus ćloignee. 2. Le Sekir van eft fttue a 1'oueft de la Mer Cafpienne. Sa capitale eft Schamaki ville autrefois plus grande &c plus peuplee qu'elle n'eft aujourd'hui. Derbenc x forte place avec un port fur la Mer Cafpienne > La Perfe. 307 eft le grand paffage de la Perfe dans la Circaflie & dans la RulTie. Les Ruf-fiens s'en rendirent mairres en 1722. Baku , a(fez bonne pecite ville j donne quel-miefois fon nom a la Mer Cafpienne , fur laquelle eile eft lituee. Les Rufliens la prirent en 1723. XII. L'Iran ou Province d'Erhan. Cette Province a pour capitale Erivan y ville alfez grande , mais fale s pleine de jardins & de vignes , &c fans aucun beati batiment, que celui du Gouverneur , qui eft dans la fortereffe. Cette forterefle, quoique irrćguliere Sc batie a l'ancique, eft extrcmement forre par fa fituation entre des precipices & des montagnes qui la rendent prelepe inacceflible. Elle eft de figure ovale , & pouroit palfer pour une petite ville , puifqu'elle a 4000 pas de toiir & contientpres de 800 maifons. lln'y demeure que des Perfans naturels , 6c les Armeniens , qui y ont des boutiques, ou ils travaillent & trafiquent de jour , font obligćs de les fermer le foir , 6V de s'en reroumer dans leurs maifons. Karas-bag eft une ville mediocrement grande , &c alfez bonne. Nackfivan &c Julfa ou Zulfa j ne montrent prefque plus que des ruines de deux grandes villes qu'elles ont ete. La premiere , fi Ion en croit les Armeniens , doit etre la plus ancienne 308 Mćthode de Ge'ographle. ville du monde, puifque , felon eux, Noć y habita avec toute fa famille , &c avant le dćluge , & apres qu'il fut defcendu de la montagne d'Ararar, ou i'arche s'etoit arretee : mais tout cela eft fott incerrajn , & avance par des gens aufli ignorans que fuperbes. Ickmiarin ou Trois-Eglifes , eft un gros bourg , le fanćhiaire des Armeniens , &c la refidence ordinaire de leur Patriarche. CHAPITRE VIL L> I N D E. On n'a d'abord donne le nom dVnde3 qu'a cette pnrtie de l'Alie arrofee par l'Indus j grande riviere dont nous decri-rons le cours dans un moment. Dans la fuite on Ta donne par extenfion a route la partie de l'Afie meridionale , bornee au nord par la Tartarie , a l'orient pat la Cliine , a J'occident par la Perfe y &c baignee par la mer, dans laquelle deux grandes Prefqu'i(les s'avancent forr loin au m idi. Cette vafte Region a plus de iix cens lieues du midi au nord , & prefqu'autant du levant au couchant, dans fa plus grande etendue. On la divife en irois grandes V Inde. 100 parties : \Indojian ou Empire du Mogol 9 qui en occupe toute la parcie feptentrio-nale \ la Prej'quijie occidcntalc ou en-decd du Gange čk la Prefquijle orientaie y ou a u~ de Id du Gange. L'air eft different dans l'Inde , a caufe de fonetendue, maisgenćralement chaud. La terre y eft fertile en ris, en millet & en toute forte de fruits. On y cultive cfuantite de cannes de fucre. On y recueil-le beaucoup de coton , dont on fait les mouftelines , & autres toiles blanches &c peintes \ & quantite de foie , dont on fait de tres-belles etofes. L'lndc a aufli beaucoup de mineš d'or , d'argent & de dia-mans j on peche de fort belles perles le long de fes cotes. Les Indiens different a 1'egard de la couleur. Vers le nord, ils ne font que bafanes \ vers le midi, ils font entiere-ment noirs. La plupart font idolatres ; mais il y a beaucoup de Mahometans. On y rencontre aufti des Juifs en alfez grand nombre , &c des Chretiens. Ceux qui portent le nom de Chretiens de S. Thomas > font des Indiens originaires, qui pretendent que 1'Apotre S. Thomas a plante la foi dans leur pays. Les Indiens Idolatres font partages en quatre Sedeš principales , qm fe haiftent tellement, que ceux d'une SećLe n'ont au- 5 i o Methode de Ge'ograpkie. curi commerce avcc ceux d'une autre : ils ne voudroient pas mcme manger enfem-ble. Ces quatre Sećtes font, les Brach-manes j dont la fećte eft fort ancienne & la plus favante j les Rasbutes j qui fer-vent dans la cavalerie de 1'Empereur du Mogol, dont ils font les meilleures trou-pes j les Banians , qui s'occupent du negoce dans les Indes , comme les Juifs en Europe. Ils croient la Metempfichofe , ne mangent point de chair , & ne tuent pour cette raifon aucune bete j non pas nieme les infećtes qui les incommodent. La quatrieme fećte eft celle des Soudras , qui compofent 1'lnfanterie de 1'Empereur du MogoL On voit dans les Indes un grand nom-bre de Fakirs , efpece de Religieux ou de Derviches, qui courent le pays en demandant l'aumone. 11 y en a de Ma-hometans cc de Paiens. VIndojlan. 51* A R T I C L E PREMIER. V IN DO STAN O U VE MP TRE d u M o g o l. C a R t e s. VEmpire du M o gol a ere donne en une feuille par Frederic de WlTT 3 Geo-graphe Hollandois. M. S an s on Ta aujji publie en une feuille. On a T Inde , avec la Chine 3 par Guill. Delisle, dont on peut commencer d faire ici ufage. T t Indostan ou Empire du Mogol, comprend la parcie feptentrionale Se la plus confidćrable de l'Inde. II eft fitue entre les 18- Se $6 degres de laticude feptentrionale. Son etendue eft de plus de cinq cens lieues de l'ouefl: a 1'eft , Se de plus de trois cens du nprd au m idi. La Perfe le borne a loccident; la Tartarie, au nord Se a l'orienr } les deux Prefqu'ifles Se le Golfe de Bengale le bornent au midi. L'air en general y eft affez fain , le pays fort peuple Se le tcrroir tres-fertile , exceptć en quelques Provinces, qui vers le nord conhnent a la Tartarie. Les principales 3 11 Methode de Geographie. • produ&ions du payj font le ris, le millet Popitim, lescirrons, iesgrenades, les iigues, les oranges , la foie , ie coron. 11 y a au(Ii beaucoup de bćtail & d'Elephans, des rhi-noceros , des chameaux , des dromadai-res, des burles, des elans , des lions, des tigre.s , des leopards , des panthe-res , &: quantite de finges. Ces derniers defolenr fouvent les habitans, meme ceux des villes. Mais les torcues , qui fonc en grand nombie , font plus utiles. On y trouve enfin des mineš d'or , d'argenr, de diamans, & de pierreries, qui fonc la principale richelTe de cet Etat. Les principales rivieres de 1'Indoftan , font l'Inde &c le Gangc , qui Tarrofent du nord au midi. UInde eft appelle Sinde par les In-diens, ce qui fignilie proprement, Fleuve ou Rivkre par excellence. II prend fa fource a des montagnes qui font au nord vers la Bukarie , Sc qu on appelle dans le pays Hendou-Kesh _> c'efLa-dire Montagnes de l'Inde. II arrofe du nord au midi la partie oecidentale de Tlnde. Son cours eft de plus de deux cens cinquante lieues , dc il fe jette dans la mer, par plufieurs embouchures ^ mais il n'y en a que deux qui foient confiderables. Les Indiens font dans 1'opinion que les eaux du Gange fortent dans la Province de Siba , la premiere de 1'Indoftan que ce V Indojlan. 3 1 3 ce fleuve traverfe , d'un rocher figure comme la tete d'une vache , que Ton faic etre un animal faere parmi eux. Mais cerre prćtendue fource du Gange , (dit M. d'Anville , dans fes Eciaircijjemens furla Carte de. T Inde j ) n eft que fon ifliie des montagnes , qui derobent aux Indiens la connoilfance du Tibet. Des gens inf-truits dans les marhemariques ayant, par les otdres de Can-hi , Empereut de la Cliine , penette jufqu'aux fources de ce fleuve , le pays & la roure qui les y avoient conduirs ont ece decrirs. Par ce moyen nous avons appris , qu'au pied des Monts? Kencaijje 9 le Gange , forme de plufienrs fources j rraverfe fucceflivement deux grands Lacs , &c prend fon cours vers le coucbant, ou la rencontre d'une chaine de montagnes le fait tourner vers le fud , & fe replier meme enrre le levant & le fud , jufqu'a ce que dirige dćterminement vers ce dernier cote , il entre dans l'Inde, par le detroit de Kupele j qui eft un lieit ferre entre les montagnes qui feparent l'Inde d'avec le Tibet. Le Gange coule enfuite du nord au midi, & fe jette dans la mer au čolfe de Bengale , qui fait la fćpatation des deux Prefqu'illes de l'Inde, 1'une en-dega & 1'autre au-dela du Gange. Des deux principaux bras par lefquels le Gange fe decharge , celui de la gau-che eft appelle le grand Gange , & celui Tome VIL Q 314 Methode de Ge'ographie. de la droite , le petit Gange. Le premier eft moins connu que celui de la droite fur lecjucl les Europeens ont fait leuts ctabliiiemens , čk qui eft le canal ordi-naire dont ils fe fervent pour entrer dans le pays. L efpace renferrnć entre ces deux bras, eft coupe d'un grand nombre de bras particuliers, dćrives des principaux. Le terrein qui borde la mer dans cet intervalle , eft couvert d'une foret epaifte cV continue , qui n'eft coupee que par ces diffcrens canaux, entre lefquels la nature a prarique des Communications dans ce terrein prefqu'aufli bas que le niveau de la mer. Les Indiens ont une fi grande venera-tion pour le Gange , qu'ils y font repan-dre leurs cendres, perfuadćs que c'eft le chemin du falut. Us y jettent leur or ČV: leur argent. Une de leurs grandes devo-tions confifte a s'y baigner. Son eau eft la plus faine & la plus legere qu'il y ait cn A/Je. L'Empire du Mogol a etć fonde dans le XIVe uecle 3 c eft-a-dire depuis 1'an 1370 jufque vers 1'an 1400, par le fameux Timur-Bec , ou Tamerlan , le plus grand conquerant des Tartares , &c qui avoit foumis une grande partie de 1'Afie. Ce-pendant il n'eft refte a fes defeendans que le fejil Empire du Mogol. I/Empereur eft un des plus riches Prin- Vlndojtan^ 31 $ ces du monde , fur-tour en diamans & en pierreries. Son revenu annuel monte a plus de 580 millions de fixe de fon Do-maine , & du moins auranc des paifies ca-fuelles. Ce Prince eft Mahometan le la Sede d'Omar , & entretient une bom-coirrefpondance avec le Tnrc , pour en avoir du fecours contre les Perfans , fes plus grands ennemis. Ourre l'lndoftan y cet Empereur poflede encore le Decan pro-pre , & a pour tributaire le Roi de Gol-conde dans la Prefqu'ifle occidentale de l'Inde. Les habitans du Mogol fonc d'af-fez belle taille , mais bazanes , quoiqu'ils ne foienc pas fi noirs que ceux des deux Prefqu'iiles de l'Inde , en comparaifon def-quels on les appelle blancs. Ils ne man-cjuent pas delprit &c fonc aftez affables aux etrangers j mais ils font fore interef-fes, faineans, & d'une inclinacion plus amourcufe que guerriere. Divifion* L'lndoftan fe divifoit autrefois en 57 Rovaumes , dont voici les noms. 1. Agra. 8. Berar. 2. Actock. 9. Buchor. 3. Bacar. 10. Cabul. 4- Bankaifch. n. Candish. 5. Balagate. 12. Cachemire. 6. Bando. 15. Chitor. 7. BengaJe. i4, £)elly. O ij J16 Mettode de GeograpJiie. 15. Gor. 16. Me vat. j6. Gualeor. 27. Multan. 17. Guzurace ou 28. Narvar. Cambaye. 19. Naugracut. 18. Hayacan. 30. Patna. Jamba. Ji. Pengab. Jenupar. 32. Pitan. Jeilelmere. 33. Sambal. Jefuat. 34. Siba. 23. Kakares. 35. Soret. 24. Kanduana. 36. Tatta. 25. Malvav. 37. UdeeflT. Aaijourd hui TEmpire du Mogol fe di- vife en dix-neuf Gouvernemens , quon appelle Soubah. Leurs noms, fuivant 1'or-dre qu'ils tiennent entr'eux , font: 1. DellyouJe- 10. Multan. 19. 20. 21. 22^ han-Abad. Agra. Lahor. Afmere. Guzurate. Malova. Patna. ElabafTou Ho-labaC 9. Haoud. 2. I« 4- 5- 6. 7-8. 11. 11. 1I-»4-15- 17. 18. 1$. Jagannat 011 Bengale. Kachemire. Cabul. Tatta. Aureng-Abad. Candifch. Talengad. Baganala. Varada. Ćes dix-neuf Gouvernemens generau* fe fubdivifent en Serkars ou Gouvernemens particuliers, & contiennent de plus les Etats de quelques Rayas , ou Princes tributaires du Grand Mogol. L'IndoJlan. 317 I. Gouvernement dc Delly. Ce Gouvernement, qui eft au milieu de cet Empire, contient les anciens Royau-mes de Jenupar, de Jamba 8c quelques pays de Rayas. 11 porte le nom de Delly3 fon ancienne capitale, qui n'eft plus au-jourdhui qu'un fauxbourg d'une nouvelle ville 5 appellee Cha-Jehan-Abad 3 8c par abreviation Jehan - Abad 3 parče qu'elle fut batie par ces Empereurs en 1615. Cet-te nouvelle ville , aujourd'hui la refiden-ce du Mogol, 8c regardee pour cela com-me la capitale de fon Empire , eft firuee fur le bord de la riviere de Gemna. Elle eft grande , belle 3 defendue par une for-terelTe affez vafte, 8c entouree de murail-les de briques, li ce n'eft du c6tć du vieux Delly, le plus grand de fes deux faux-bourgs. La Cour du Mogol eft fort fu-perbe j le Palais imperial a une demi-lieue de tour ; c'eft la qu'on voit ce fa-meux trone , le plus riche 8c le plus ma-pnifique de l'Univets , bati par Cha-Je-nan , 8c eftime plus de foixanre millions. Delly ou Jeban-Abad eft eloigne d'Agra d'environ 37 lieues , au nord. C'eft dans la meme iituation qu'eft Jenupar3 autre-rois Rovaume. Jamba autrefois Royau-me, eft fort a l'eft en allant vers le Gange , aufli-bien que Serenega/ 3 qui eft fur ce grand fleuve , 8c qui fen de rćfidence O iij 3 18 Mćthode de Geographie. a un Rava. On fait que c'eft a Jehan-Ahad cju'eft arrivće a l Empereur du Mogol cet- ' re trifle & cruelle aventure , ou apres avoir cte fait prifonnier en 1759 , par Thanias Kouli-Chan , polTeffeur du rr6-ne desPerfes, ce demier enleva tous les rches-trefors du Mogol , qui etoient dans huit fouterreins de fon Palais, dont qua-tre fe trouvoient remplis d'argent en bar-res, deux pleins de lingots d'or, un de pierres prćcieufes , &r undiuitieme de ri-ches prefens. Toutes ces richefTes furent tranfportćes a lfpahan , &c on les eftima plus de quatre milliars de valeur rćelle. Les foldats & les officiers du Perfan n'en eurent pas moins pour leur part. Mais le Perfan fit un aćte de generofite a 1'egard de fon prifonnier : il le condiiifit lui- meme a Jeh'an-Abad , le rćtablit fur fon tro-ne, &c lui fit les plus fanglans reproches fur fa lachete Sc fa mollefie, indignes d'un Prince. II. Gouvernement d'Agra. Ce Gouvernement eft au fud de celui de Delly. Sa capitale eft Agra j qui peut palfer pour celle de tout l'Empire. C'eft une ville tres-peuplee , bien batie , la plus grande des Indes , autrefois le fejour des Empereurs du Mogol. Elle a pres de 24 lieues de circonference \ &c pouroit armer feule 200 mille hommes. Sa fituation Vlndofian. $"1 «> dans un terrein fabloneus , fur le bord du Gemna , faic que l'air y eft estrcme-1 ment chaud &c incommode. Ses rues , quoique fore larges, font aufli tres-mal pavees; mais cela n'empeche pas qu'il n'y ait une grande aftluence de monde , 8c qu'il ne s'y falTe un grand commerce. Agra eft ceinte d'une muraille de pierres de taille rouges, & d'un fofTe de plus de 30 toifes de large. L'ancien Palais des Empereurs, a , dit-on, 25 milles , c'eft-a-dire , douze lieues de circuit 7 c'eft le plus magnifique de toute l'Afie , 8c 1 on y voit deux pavillons fur lefquels il y a des pla-ques d'or. Gualeor eft une ville affez grande j mais mal peuplee. Secandra s Mogol, Doulpore 3 Amedipore 8c Itay 3 fonr du meme Gouvernement. III. Gouvernement de Lahor ou Pengab. 11 eft au nord-oueft de celui de Delly, 8c contient les anciens Royaumes de Lahor , de Pengab , de Bankish , d'Attock , 8c le pavs de Hendowns. Sa capitale eft Lahor j a un quart de lieue de la riviere de Ravey. Cette ville eft grande , belle , 8c ornee d'un Palais affez bien bari, ou les Empereurs du Mogol ont fait autrefois leur rćfidence. Feupore. Atteck ville confiderable , a la jonetion de l'Inde & du Tshenav , 8c autrefois capitale du Royau-me de meme nom 3 fut prife 8c piliće , O iv 3 2 o Methode de Geographie. par les Pcrfans en 1739. Bmenbadfur la riviere de Ravi> fut auili prife par les Perfans , & rendue peu aprčs. Hendovvne 3 capitale du pays des Hendowns. IV. Gouvernement d'Afmere ou Bando. II eft a 1'oueft de celui d'Agra , & com-prend les anciens Royaumes de JeJJe/mere & de Bando , avec leurs viiles de mcme nom. A/mere eft la capirale , & la meil-leure ville du Gouvernement, qui porte fon nom. Jejjelmere ou Giemere , eft auui une alTez bonne ville > a loueft d'Afmere & de Bando. V. Gouvernement de G ugurate ou de Cambaye. On le trouvc au fud-oueft , fur la cote occidentale de la Prefqu'ii1e de 1'lnde , entre les 21 & 24 degres de latitude. 11 avoic autrefois le titre de Royaume. II renferme aujourd'hui les Erats des-Rayas de Rana, de Mirfa & de Bargant. Sa capirale eft Cambaye , aflez grande ville \ mais beaucoup moins peuplee & moins mar-chande qu'elle n'ćtoit autrefois. Elle eft fituee dans 1'enfoncement du Golfe qui porte fon nom , ou elle a un tres-bon port; mais qui dans les balfes marees eft quel-quefois a fec. Surate 3 ville mediocre-ment grande 3 alTez belle, bien peuplee > Uln&ofian. $lt & Ia plus marchande j non feulement du Mogol j mais aufli de toute 1'Afie. Elle eft fituee fur la riviere de Tapta , qui a quarre lieues au-deiTous fe perd dans le Golfe de Cambave. Cette riviere peuc a peine porter des barcjues de 70 a, 80 ton-neaux, dc Ion eft oblige dedćcharger les marchandifes a Soha/i 3 qui eft pres de fon embouchure. Le principal commerce de Surate, confifte en ćtorTes de foie , de coron & dor j en drogues, en epiceries , en perles & en diamans. Les Anglois 8c les Francois y onr le forc de leur negoce. Amadabath 3 ville grande, riche & bien peuplee , avec un bon chateau. Daman y ati m idi de Surate,i bon pore, & forterefle aux Portugais de meme que Diu 3 petke ville tres-forte , dans une Ide de meme nom , prčs du Golfe de Cambaye. Baro-che j entre Cambaye & Surate , a une mine d'agathe, 6c Ton y fabrique de belles etoffes. Goga eft un bourg fur le Golfe ; mais tres commercant. Bifantagan j au centre de Guzurate, a de trčs-bonnes fa-briques. V*L Gouvcrncmcnt df Malova. II eft a left du Guzurate , & renferme les anciens Royaumes de Malvay & de Chitor. Ses principales villes font Ranti-pore j capitale , Ougd Sc Chitor. On dif que cette derniere ville fervoit de refidence O v 321 Methode de Geographle. au Roi Porus, qui fut vaincu par AIexaiv dre le Grand. VII. Gouvcrncment de Parna. II eft au nord-eft du Gouvernement de Delly , & comprend les anciens Royau-mes de Parna, de Bakor , de Jefuar &C d'UdefTa , avec quelques pays de Rayas. II a les villes de Patna 3 capitale, au nord-eft , vers les monragnes , Širino y Jenu-par j Sambal Bikaner & Bacar. VIII. Gouvernement d'ElabaJf ou d'HolabaJf. Ce Gouvernement eft au fud-eft d'A-gra, & renferme les anciens Royaumes de Narvar &c de Mevat. II a les villes d'ElabaJf j capitale, fur le Gange, de Ge-hud & de Narvar > dans le Mevat. IX. Gouvernement de Haoud ou Bankifch* U eft au nord-eft des Erats du Mogol, & comptend les anciens Royaumes de Nau-gracut & :le Kakares. Ses villes principa-les font Beishir Naugracut, Cdllamai-ka j Purhola Sc Dankaler. Les deiix der-nieres font dans le Kakares. X. Gouvernement de Multan. Ce Gouvernement eft a 1'occident, fur VIndoJfan. 3 i J le fleuve de l'Inde. 11 renferme les anciens Rovaumes de Mu'ran 8c de Haya-can , avec les villes de Multan 8c de Sere-pore dans le premier, 8c de Chutzan 8c Huche dans le fecond. XI. Gouvernement de Jagannat ou Benoale. o II eft a iorient, arrcne par Ia parcie in-ferieure du Gange } c'eft l'ancien Royau-me de Bcngale , grand 8c cres-fertile en fucre, en ris , en betail , en foie , en fruirs, en falpcrre , en lacque , en ere , en mufe 8jC en opium. On y fait anffi.de bel les ćtoffes , qui font fort recherchees des Anglois & des riollandois. BengaU eft le nom d'un pavs , 8c non pas d'une ville , qui, dir on , ne fur jamais , quoi-que marquee dans la plupart des Cartes , nieme Hollandoifes. La capitale eft, a ce qu'on croic, Ougelv j nommće aufli Hou-gli, ville fore marehande , 8c ou les Ilol-landois ont un Bureau , le plus confidera-ble des Indes , apres celui de Bacavia. D'autres cependanr croienr que Daća en eft la capirale. C'eft une efpece de ville forr erendue le long du Gange. Ses mai-fons en grande parrie , ne font que des cabanes, qu'en quelques heures de retnps on conftruit de quelques pieax (iches en terre , 8c de claies qui en fone ids murail- O vj 314 Mćthode de Giographle. les &" le toit. Son commerce , Sc Ia facilite de communiqiier de tous co-tes par les rivieres, en font un lieu con-lidtrable. Patna eft a 1 oueft , & fur le Gange , aulll bi en que Gouro &c Ban-nara j villes ou les Bramines, c'eft-a-dire , les Doćteurs paiens du Mogol , enfei-gnent la Religion & les Lettres aux peu-ples qui veulenc en etre inftruits. Chatl-gan Sc Satignan j font deux belles villes fur le Golfe de Bengale , au fud eft des bouches du Gange. Šoume/pour 3 fur la riviere de Coucl, dans laquelle plus de huit mille perfonnes font occupees, a pecher des cailloux de diamans. Kazembazart ville qui fait un tres-grand commerce de foie. Hedenda eft dans le pays de Maran-ga , qui depend de ce Gouvernemenr. Jagannat j qui donne le nom a la Province , eftentre Daca& Chatigan. Monghertft fur le Gange. Le Pays d'Orixa depend aufli du mane Gouvernement: il n'eft guere connu que le long des cotes. XII- Gouvernement de Kachemire. II eft au nord-eft, pres du petit Tibet. Oeft un des plus petits Gotivernemens; mais des plus beaux & des plus fertiles pays du Mogob II a pouc capitale Ka-chemire. L'IndoJlan. XIII. Gouvernement de Cabul. A l'occident de Kachemire , fur les frontieres de Perfe. II s'v trouve beaucoup de Chretiens qui fe difent defcendus de ceux que l'Apotre S. Thomas a conver-tis. Sa capitale eft Cabul, ville grande 6c aiTez forte , 6c ou Ton fait un trafic con-fidćrable de chevaux 6c de moutons. C'eft aufli le grand palfage de l'Indoftan clans la Tarrarie 6c dans la Perfe Les Perfans qui 1'ont prife dans la guerre de 1739 , l'avoient confervee avec quclques autres par le traite de paixj mais lesder-niers troubles de Perfe one donne lieu au Mogol de les reprendre. XIV. Gouvernement de Tatta ou de Sind. II efl: au fud-oueft fur les frontieres de la Perfe , & pres les bouclies de l'lnde. II renferme les anciens Rovaumes de Tatta , de Sorer 6c de Bakor ou Bukor. Bans le premier font Tatta , capitale fur la branehe oceidentale de l'lnde , 6c Lou-rebander 3 ville fort marehande , un peu plus pres de la Mer. Janagar dans le Rovaume de Soret , fe trouve plus dans les tetres , 6c Pacho j eft dans une petite lile. Dans le troifieme Rovaume e(t Bukor j la feule ville remarquable. $i6 Methode de Geographie. X V. Gouvemement d'Aureng-Abad j ou de Balagate. C'eft une petite Province au fud-oueft 6c pres de Guzuratte : elle fe nom-me aufli Balagate , c'eft-a-di te Au-dela. des montagnes. Ses principales villes font Aureng-Abadt capitale, &c Dultabat. XVI. Gouvemement de Candish. II eft au nord du prćcćdent, entre le Guzurate & le Bengale : ll comprend les anciens Royaumes de Candish & de Be-rar. Brampour 3 affez grande ville , mais , mal peuplee , en eft la capitale. On y fait quantite de toiles &c de belles etorTes de coton & d'or. Shapour eft la ville principale du Berar. XVII. Gouvemement de Talenga. II eft au midi de la Province de Balagate , au milieu des terres , & il na de confiderable que la ville de Beder. XVIII. Gouvemement de Bagnala 3 ou le Decan propre. C'eft une petite Province que 1'on con-fond fouvent avec le Balagate še qui faifoir ci-devant partie du Royaume .. D 'can , ou de Vifapour , dans la Prefqu'iile oeci- VIndoftan. $17 dentale de l'Inde \ les Mogols l'ont con-quife. Elle a pour capitale Andaganer, ou Amanager. Mouler eft une autre ville de la meme Province , qtii eft au fud de celle de Guzurate. Quelques Auteurs y renferment encore les villes* maritimes de Daman , Bacaim & Chaul 3 qui fone aux Portugais , & que Ton met ordinai-rement dans le Vifapour. XIX. Gouvernemcnt de Varada 3 ou Siba. II eft au nord-eft du Mogol, &c com-prend les anciens Royaumes de Pitan , de Gor , de Siba, de Kanduana , & quel-ques pays de Rayas. II a les villes de Pitan , de Gor, de Harduari dans le Siba, ćV de Kanduana. Le Grand Mogol outre ces Gouverne-mens de flndoftan , s'eft alfujeti a la fin du fiecle dernier, plufieurs Etats dans la Prefqu'ifle dont nous allons parler. Pref-que tous fes Princes lui doivent un tri-btttj mais ils le payent alfez mal a caufede Pćloignement de la Cour Impćriale, &c fous divers pretextes. 3i 8 Methode de Gdograph'ie. A R T I C L E II. L A PRESQU'ISJLE OCCIDENTALE jDe l'Inde j ou en dec;a d U G a n g e. C a r t e S. Frederh de W i t a donne une Carte des Grandes Indes j qui eft ejiimee ; Vis-cher & Allart , autres Geographes Hollandois , en ont aujji donne chacun une. Nous avons eu depuis j la carte du Malabary &c. de M. Delisle , en une feuillcj & celle de M. d'Anville , en trois fcullles : ellcs font bien fuperkures aux premieres. O^Ette Prefqu'ifle eft enrouree de 10-cean oriental , ou Mer des Indes , a l'exception du coce du nord , oii elle rou-che aux Ecats du Mogol. On lui donne ordinairemenc 280 lieues d'ćtendue du nord au fud , 5c 230 ou 240 de l'oueft a l'eft ; mais fa largeur n'eft pas egale par tout. Sa fic.uation encre les fepc Sc vingt-deux degres de lacicude fepcentrionale , fait que l'air y eft fort chaud , & les peu-plesp!usnoirsque dans l'Indoftan. Laccrre Prefjuijle occid. de P Inde. $1$ j eft aftez fertile , particulierement en ris ; mais la richelTe principale du pays confifte dans les mineš de diamans , qu'on y rrouve , Sc dans les perles , qu'on peche a fon extremite meridionale. Les Portu-gais , les Hollandois Sc les Anglois y ont des places & des forterelfes proche de la mer, pour s'affurer da commerce , qui confifte principalemcnt en epiceries, pier-reries , perles , diamans & toiles de coton. Les Francois y ont Ponticheri 3 fur la cote de Coromandel; Sc les Danois Tranquebar. L a Maifon d'Aurriche y a poffede le fort Coblon j nomme dans le pays Sadrafpa-tan j qui fervoit de retraite a. la Compa-gnie d'Oftende. La Prefqu'ifle occidentale de 1'Inde fe divife en cinq parties, qui font les Royau-mes de Vifapour, de Golconde 3 de C^r-nate ou de Bifnagar aujourd'hui au Mogol j Sc les cotes de Coromandel Sc de Malabar. I. Le Royaume de Vifapour. Ce Royaume qui eft au nordoueft fai-foit partie de 1'ancien Royaume de Decan. II eft aftez fertile , Sc a beaucoup de foie & de coton , de meme que quelques mineš de diamans. Sa capitale nommee Vifapour, fituee fur le Mandoua , eft grande , bien peuplee , Sc ceinte d'une double muraille , ou il y a beaucoup de '53° Methode de Geographić. canon. Le Palais des anciens Rois eft au milieu de la ville , & entoure d'un dou-ble folfe , ou il y a des crocodiles. La ville a cinq grands fauxbourgs , ou de-meurent les principaux marchands , & particulierement dans celui de Champour , ou Ione la plupart des jouailliers. Šola-pur ou Soliapur j čc Paranda y font les autres meilleures villes de ce Royaume. Les Portugais en polfedent quelques-unes le long des cotes. Gua elt la plus confiderable de toutes. Cette ville eft lituee dans une lile , que les rivieres de Mandoua & de Zuari forment a deux lieues de leur embouchure dans la Mer des Indes. Les montagnes la refferrent extremement du c6te de la rerre, ce qui fait qu'elle neft pas fort peuplee , & que le fejour n'en eft pas fain , parce quc ces montagnes empechent que les vents ne rafraichilfent 1'air , qui eft fort chaud. Alphonfe d'Albukerque la prit en 1510, pour le Roi de Portugal; & ce Prince y envoie un Viceroi , &c y tient un Con-feil pour fes polfeflions des Indes orien-tales. II y a aufti un Archeveche, & une Inqui(ition extraordinairemenr fćvere , de laquelle M. Dellon a donne une Relation fort curieufe. Goa eft alfez bi en batie : on y voit un des plus beaux H6pitaux de 1'Univers , & un fuperbe Palais, ou le Viceroi fait fa demeure. Son port eft aufli Prefqu 'ijle occid. de V Inde. H1 le plus beau de PAfie \ mais il n'eft plus £ rrequentć qu'il etok autrefois. LesHol-landois &c le voifinage de Surate , ont fort diminue le commerce des Portugais. Daman j Bacaim Sc Chaul > font aulli d'autres villes fur la mer , qui appartien-neut au Roi de Portugal. Bombam eft aux Anglois. Dabul eft une autre ville affez conliderable. Les Francois ont un comptoir a Rajapour j & les Hollandois font makres de Vingrela. Dans les terres il fant rcmarquer Raolconde , 011 eft une mine de diamans , les plus fins & les plus eftimes de 1'Alie. Cette ville eft dans la partie d u Carnate , que le Roi de Vi-fapour parragea avec celili de Golconde y lorfquil detruifit, en 1650, le Royau-me de Catnate ou de Biinagar , dont le Roi de Golconde eur une gr.inde partie ; &c c'eft ce qui fait que pluiieurs Auteurs ont cru que Raolconde etok dans la partie qui conferve aujourdhui le nom de Carnate. II. Le Royaume de Golconde. II eft fertile en millet, en ris, 8c en betail. Ceft aufli le plus riche pays du monde en pierreries. 11 s'y fait quantite de fel, de meme que de ttes-belles toiles peintes. Eiderabad j appelle autrefois Ba* gnagar j en eft la capitale : c'eft une ville ues-grande, entouree d'une bonne mu- J 31 Methode de Geographlc. raille , fur la riviere de Nerva. A 1'egard de Golconde , que pltiiicurs Auteurs one dit etre capitale du pays , c'eft une forte-relfe rres-vafte , eloignee d'environ deux lieues , 011 les anciens Rois de Golconde faifoienc leur fejour: elle n'aplus aujour-d'hui qu'un grand nom , & tout tombe en ruines. Mafulipatan > a fobcante lieues de Golconde , tk a Pembouchure du Na-gund dans le Golfe de Bengale , eft une bon ne ville , avec un port affez commode & bien frequente, par les Fran^ois , les Anglois & les Danois , qui y achetent des diamans , &c autres marchandifes precieu-fes. Narjingapatan ; Condapoli 3 forte-reffe 7 Condavera ; Coulour , qui a une mine de diamans fort gros. Dans les montagnes au nord du Vifa-pour , habite un ancien peuple , qui, de-puis vingt ans, seft rendu fameux par les ravages qu'il a faits dans le midi de la Prefqu,ifle. Ce font les Marattes. Leur capirale fe nomme- Satara. On en ignore la fituation precife. III. Le Royaume de Carnate cu de Bifnagar. Ce Royaume appartenoit ci-devant au Roi de Golconde ; mais plus ancienne-ment 5 c'croitun Etat tres-etendu , connu fous le nom de Bijnagar &c de Narfingue, On y trouve des faphirs, des amethyftes, Prefauifle occid. de l*Inde. 3 3 J des diamans & autres pierres precieufes. Bifnagar ou Chandegri > ville aflez gran-de , muce fur le penchant d'une monta-gnc , au haut de laquelle on a bati une fortereiTe , eft la capitale du pays. Mais Arcate } ville nouvelle & fortifiee eft la relidence du Nabab , ou fous-Gouver-neur, dependant du Gouvernement Mo-gol de Decan, qui depuis environ 40 ans , comprend les anciens Royaumes de Vifa-pour, de Golconde & de Carnate. Cette ville eft a 3 o lieues de la cote, grande \ mais fort mal propre. Sur la cbte on trouve du nord au fud , Pttapoli y Nelour Pa-liacaee qui appartient aux Hollandois , dont le fort ie nomme Geldria : ils y entretiennent un Confeil pour leur com-merce en ces quartiers. Meliapur ou S, Thome j appartenoit autrefois aux Por-tugais; mais un Roi de Golconde leur a repris cette ville , en leur permettant ce-pendant d'en occuper un quartier. Pr£s de la eft Madras ou le Fort S. George 3 qni eft la place la plus importante des Anglois. Sadrafpatan appartenoit a la Maifon d'Autriche , & fervoit de retraite a la Compagnie d'Oftende, qui na pas eu de fuite : les Indiens voyant le fort Ptef-que abandonne, s'en font rendus maitres^ 1 V« La Cote de CoromandeL Cette cote eft ainfi nommee du tis 3 34 Methode de Ge'ographie. cju'elle produir en abondance : il y vient aufli aftez de mdlet , Sc 1'on peche pres aux Hollandois. Ramanaburan eft la ca/utale de la petite Principaute de Marava. Ceft ou com-mence la Cote de la Pecherie , qui s etend jufqu'au Cap Comorin. Cette cote celebre eft au iud de la cote de Coromandel, &c a la pointe meridio-nale de la Prefqu'iile. Ce font propre-ment les Hollandois qui y font raire la peche des perjes. Chaque plongeur fe bouche les oreilles avec du coton ^ & le nez avec une pjnce : une eponge imbibee d'huile j qu'il sartache au bras , & qu'il rrte a la bouche, lui donne la facilite de refpiration. II prend des feuilles qui font contraires aux poiflbns carnafiiers. Le plongeur charge d'une grolfe pierre defcend au fond de la mer, &c lorfqu'il a detache fulfifamment de coquilles a per-les , il £e fait remonter au lignal quil donne. Ces coquilles font expofćes fur le '$ 3 £ Methode de Ge'ographie. fable , s'y corrompent & souvrent: alors on en retire les perleš \ les petites fonc vendues au poids & les autres a la piece. Madure done le Nai'que , ou Prince , tire un grand revenu de la peche des per> les , eft la capicale du Royaume auquel elle donne fon nonu Cette ville eft af-fez conliderable : cependanc fes Princes avoient choifi pour leur refidence celle de Trichipali > qui eft plus au nord. Mais les plus nouvelles relatibns nous appren-nent que les Princes Mogols du Carnate s'en font empare. La Cote de la Pecherie a 40 lieues d'etendue , Sc appar-tient, parrie au Prince de Madure , & partie au Souverain de Marava> qui seft rendu independant du Prince ou Roi de Madure. Tutucurin eft une ville mariti-me, ou fe fait un grand commerce de perles j les Hollandois 1'ont enlevee aux Portugais en 1698. V. La Cote de Malahar. Ceft un pays fertile en bon poivre, en gingembre, en aromates , en rhubar-be , en fucre , en coton , & en cocos ou noix d'Inde. Ses habitans fuivent pour la plupart la religion mahometane, aiment peu le travail , & font fort adonnes au larcin. II y a aufli nombre de Chreriens furnommes de S. Thomas , qui font Ne£ toriens* Prefquifie occld, de T Inde. 5 5 7 roriens. Enrre les Rovaumcs de cette cote 011 remarque principalemen(^ceux de G?- nara ; du Samorin de Calicut, qui etoit autrefois plus conlidćrable qu'd n'eft au-jourd'hui } & de Travancor. Les autres Royaum.es n'ont guere otie les en-virons de leur ville , tels qvLUrior 3 Ba-ticala , ckc. Bednour eft la capirale de celui de Canara , dont queiques Geogra-phes font une partie feparee du M dabar proprement dit, tk quelques»uns meme 1'uniftent au Carnate , parce qu'il en de-pendoit autrefois. Les Hollandois font fur toute la cote de Malabar le meilleur commerce , & ils y bccuperit les villes de Cananor , grande ville 3 de Cochin 3 & de Coulan. Cochin 3 dont ils chalferent les Portugais en 1 cTeT 3 , fait , de meme que Tanor j tinbon commerce de noivre , le meilleur deš Indes orientales. Calicut> bonne tk grande ville , avec un pbrt alfez frequente eft la capirale du plus puiffmt Rovaume du Malabar , qui eft celui du Samorin. Cranganor , forrifiee par les Hollandois en \ 6Gi. Calicoulan , Anna-male 3 Caanganara , Mdngdte & Travanr cor /Com les autres villes principales de cette cote ; ou les Francois pofTćdent le Fort de Mahe enrre Cananor ck Calicut. La Prefquifte oecidentale de 1'Inde a eneore plufieurs Illes vers la cote de Tome VIT p S Meihode de Geographie. Malabar ; mais elles ne font nullemenr confiderables* & nieritent d etre mi-fes que dans les Cartes. A R T I C L E III. IA PRESQU'ISLE ORIENTALE DE L'lNDE > ou AU-DELA d u G a n g E, Cartes. Dans les Cartes de Vander-Aa, on en trouv.c une de T Inde au-deia du Gan-ge j & nous avons les bouches du Gange par Jean Baptifte Nolin j maispour l'u-fage de cet article A U j aut fe fervir de ta car te de V Inde de Guill. Veli s le s deja citee. T .A Prefqu'ine orientale de 1'Inde eft njtnee entre le premier Se le x 5 degre de latitude feptentrionale ; elle a plus d'eten-due que la Prefqu'ifle oecidentale. L'air, la qualire du pays , Se les mceurs des ha-bitans , font a peu pres les memes dans lune Se dans 1'autre , excepte que dans eelle que nous expliquons , il y a moins la Tartane j a 1'orient, la Chine & 1'Orean lndien j au trudi & a loccident le me me Ocean ou la. Mer des Indes. Vivifion. A l'ćgard de fa divifion ; elle fe faiten partie feptentrionalc en parite miridio-nale cv en parile orientate. La premiere comprend le Royaume d1 Alem , celui d'Ava , & les autres Etats qui lui font tributaires \ la feconde con-tient le Royaume de Siam avec fes depen-dances \ la troiiieme renferme les Rovau-mes de Tunquin , de Laos , de la Co-cbintliine , & de Ciatnpa. Partie feptetitrionalc de la Pref-quiijlc orientale de iLidc. L Les Royaumes d'AJem & de Tipra. Le Royaume d'Afem, qui a 1'oueft a 1'In-doftan pour bornes &z 1* Tibet a font deux Ifles au fud de Pegou, ty de la meme domination. P iij 342. Mkhode de Geographie. I V. Le iiojaume d*Aracan. Cartes. Cn trouve dans le Recueil de VakTjEP-A a j Llbraire Hollandois j une Lart-e partkuliere de ce P' ys. Le Rovaume d'Asacan eft arfti tribu-- taire du Roi d'Ava. Sa < . Ara-can'j aftez bonne ville , fur le CL.beris , qui a fix lienes au-dcllous, fe perd dans le golfe de Bengale. 11 y a un aftez bon chateau &c un palais royal affez bien bati. On y trouve encorc Sandar., Netingan 9 & Coromoria. Les peuples ne fe fervent pour monnoye que d'une efpece de co-quillage. Le Roi ne fe montre, dit-on, que tous les cir.q ans. Partie mertdionale de la Prefau'ijlt c dentale de V Inde. I. Le Roycume de Siam. Cartes Je Sieur lT0LJN a donne en une feurUe la Caru du dume de Siam • cLe ejl tds-bi hne\ le P. PLACIDE , Augujilnt cn a dohnJpareiiitmcnt une j cuz cj. Jort ef ■n. ■ Le Ro; au tr.. de Siam, dont c Jui de Cara* Prefquifle occid. de l'Inde. W boge, fkue a fon orient, eft tributaire , pro-duit beaucoup de ris , & toptes foft&s de frtiits. On y trouve aufti qudoues rmnes de plomb, d'ćtain , d'argen:, & ffibftb clor j mais il eft de bas aiiui. 11 y a uri grand nombrc d elephans , qui fourniftent qu:m-titć d'ivoite. Les aiures chofes que 1'on tire de ce pavs, font, de la gomme , de la laque pour la čire , du lin , des eto:Ls de foie , des oorcelaines, du bois de la Chine , du mufc , de Tor & de 1'argent en bnrre , tontes fortes d ouvra^es d'oivć-vrerie, des perles & des pierres precieufe?. Les Francois, les Anglois ik les Hoilan-dois y ont chacun un comptoir j mais les derniets y font le plus de comnierce > &z poffedent metne la ville de Malac^a. Les Portugais , qui font en grand nombre dans le Siam , y font aufti un negoce afiez confiderable. Ce Royaume , qui eft dtr-venu fameux par les Ambaffadeurs qu'il a envove en France dans le fkcle dernier , comprend airftj !a Prefqu'i{le de Malacca , &c a 450 lieues de circuit. II fe divile en onze Provinces , done voici les noms : I. Siam j 1. Mattavany 3. Siaram^ 4. Ta-nafferim , 5. K eda , 6. Pera y 7. Ihor > 8. Juncaieon , 9. Paam 10. Parana y fk ii. Ti gor j qui portent preftpie toutes le nom de leurs capitales. Ces Provinces ne font point diftinguees dans les Cartes ; c'eft pourquoi nous nous conrenterons P iv 5 44 Mćthodc de Gćographie. d'expliquer les principales villcs qu'on y trouve. Siam > nom m će aufii Juthia ou Otdia y capi taje Ju Rovaume , & la relidence de ion Roi, eft (iruće dans une Ide que forme la riviere de Mi nm. Cette riviere dčborde tous les ans, & inonde tous les environs'de la ville : l'eau en eft fort fai-ne j mais il y a beaucoup de crocoddes d'une'grandeur ćnorme , qui devorent les Jiommes quand ils les crouvcnt feuls & faivs armes. Siam eft de figure ronde , & a environ deux lieues de circuit. Les fauxbourgs qui font des deux cotćs de la riviere , font aufti grands & aufti bien ba-tis que la ville , qui eft fortiflće de mu-railles de brique , &. peuplće de ćoogo perfonnes. Les rues de Siam font pour la piupart afTez belles , Sc fes canaux font ti-.res ft regulierement. qu'il n'y a prefque point de maifons ou l'on ne puilfe aboreer en bareau. II y a aufti plufieurs beaux ba-timens & de magnifiques Temples , qui ont tous des clochers & des pyramides dorees. Le Palai.s du Roi eft une grande foit.r (Te nr fque imprenable. Il eft fur le b r ! de la riviere , & a une fi vafte ćeendue , qu'on le prendroit pout ime v'ile. Toutes fes.rours &; fes pyramides fonr aufti doiees , & les appartemens du - Roi & ■■' I t^eine renfcrment des rcbef-ies muuenfes. Le commerce eft aflez |c£ PrtfcjUiJltoccld. de V Inde. $.45*. TiiTant.ilkSiatt) , 8c a attire plulieurs na-tioris qiii s'y ione etablies j mais clles ne demeurent pas eoures dans la ville. Les Francois & les Anglois , les Porcugais , les Holiandois, les Chinois & les Maho-mecans , ont feuls ce privilege : les autres-nations ione logees aux environs par camps , ceft-a-dire , chaque nation en-femble. Les anrres villes de Siam font Tanajfe-rhn j avec un port alTez frequente : on dit qu'elle a eu autrefois le ritre de Royaume.: Liani;. &c Patana one des Princes de me-me nom , mpuraires du.Roi.de Siam. Pakan > jovcalaon > Bordelong Louvo ,■ au-deifus de Siam , (k Banko* 3 au-def-fous , pjf&s de rembouchure du Mćnan , dans la Mer ou Golfe de Siam , qui y lak., un port. Suigora & Queda , viile &-Prin-cipaute trUuiraire du Roi de .Siam. Malacca viile principale de la PreP. qifille de:meme nom , autrefois la Cher-. ipneie dor , eft une des plus marebandes de toute 1'Afie , quoique ion port foit peu profond , &c qu'on ne puifte y abjivLr avec la balfe marće. Eile" eft firuće fur le derroir qui fepare la terre ferme d'avecfc 1'liie de Sumatra, cV': app.lrtenoit autre-, £>is au Roi d7//,.r j fur lequel les Portu-gajs la pinr;u en 151 1. C. ux ci la gar-derent jufcjues en 1641 , qu,il&.en furent chaifes par les Holiandois, qui y batitent P v 3 \G MJthode de Ge(\graph\e. ime bonne forterclfe , & ui one fait une place d'un tres grand commcree. Les ha-bitans de cette Prefqu'ifle ont un langage particulier , no m me le Malais. 11 eft fort aife a apprendre , &: eft fort commun par-mi les Marchands des Ifles des lndes; les peuples qui le parloient originairement , s'y etant fort repandus pour le commerce. Le Roi de Siam eft puifTant , felon quelques Auteurs, tk peut mettre en cam-pagne }ufqu'a 150000 fantaflins , Sc 100000 cavaliers : felon d'aurres , il en faut beancoup rabattre} mais comme il eft defpotique , il peut tout faire de fes fujets , quoique plufieurs Ecrivains pretendent que fon Royaume eft pauvre , & qu'il eft tributaire de 1'Empereur de la Ćhine. U eft idolarre , aufli-bien que fes fujetsj cependant le fen Roi Louis XIV, ayant recu en 1684 , un AmbafTadcur de Siam , y envoya en 1685 des AmbafTa-deurs & des Miflionaires ; mais les re-Tolutions arrivecs dans ce Royaume , y ont empeche les progres duChriftianifrne. Depuis ce temps , MM. des Miflions Etrangeres de Pariš y ont toujours une Maifon, Sc y emreciennent un Seminaire, oii Ton ćleve de feunes Orienraux conver-- tis , pour en faire enfnite des Miflionaires ou Catechiftes dans les differens Royau-mes voiiins. Prefq u 'rfte otcid. de V Inde, 5 47 11. Le Royaume de Camboge ou Cambodia. Ce Pays, rres-fertile, 8c dont le Roi eft tributaire de celui de Siam , a pour ca-pitale Camboge ou Cambodia > appellee aufli Levček. Cetre viite eft fituee fur le Mecon, & fait un aflez bon commerce avec les Japonois, les Cochinchinois , les Malais 6c les Portugais. Les principales chofes qu'on en tranfporte , font des peaux , des pietreries, du ris, de la lac-que &c du benjoin. Les aiures villcs con-/iderablts de ce Royaume, font Taurana* Caxol & Llam. Pulo Condor eft une lile remarquablc fur la cote , ou les Anglois ont eu pendant quelque temps un etablif-fement. Les habitans de Camboge font plus expjtimenres dans la Marine , qu'au--Cun autre peuple de 1'Afie. Partie orientale de la Prefaififle. de P Inde au-dela du Gange. I. Le Royaume de Tunculn.. Ce Rovaumc, aurrcfois folunis a PEm-pire de la Chine , en eft fćparć depuis tres-long-temps \ mais il en eft eneore rributaire. 11 eft fitue entre la Chine , l'0:ćan orienral , la Cochinchine & le Pćgou. L'airy eft tort bon , & le terroic P vj 3 48 Msthode de Gc'ographle. rertile en ris, en oranges, en fucre &z en foie> On y trouve auili beaucoup de che-vaux , de rhinoceros , d elephans & de rorcues. I,e pays eft enrrecoupć de bois, de rivieres (k de plaines; mais il eft fu-jet a des ouragans, qui y font beaucoup de dćfdrdres. II eft fore peuplć , &c fon Roi alfez puiffanc, quoique fon Etat nait pas rant d'etendue que les autres Royau-mes , qui lui fonc concigus. Ce Prince eft idolatre , de meme que fes fujets. Son Royaume , qui eft divile en fepc Provin-ces , a pour villes principales Kecho ou Checho j capitale , alfez grande 4 &: fituee fur une riviere de meme nom , qui va fe perdre dans le Golfe de la Cochinchine & de Tunquin : Cua[ay Cuadag & Bo-dego. II. Le Royaume de Laos. A Ton eft d u Royaume de Tunquin , eft un autre Etat, autrefois foumis pareiUe-ment aux Empereurs de la Chine } mais qui s'en eft fouftrait, & s'eft donne le citre de Royaume; c'eft celui de Laos. II eft fort eloigne de la mer. On lui donne no lieues du nord au Tud , & cinquante de l'oueft a Peft. II a des mineš d'ćrain fort confiderables. Oeft ce qui diftingue le plus ce RoyaCime , qui n'a de ville principale bien connue , que Leng ou Larigi0n€ j du eft le Palais du fouveraim Prefquijle oca d. deT Inde. 349 M. Delifle , dans fa Carte d'Ahe , met au nord de Laos quelques petits Royau-mes de peu dimportance , & qui n'ont rien de remarquable par rapporc h nous : comme M. Robert en met aufti quelques autres a le (t de Laos , qui font encore moins confiderables. III. Le Royaume de la Cochinchinc. Ce Royaume a au feprentrion le Tun-qnin ik le Laos; a 1'orient ck au midi j il a le Golfe de Tunquin , & au conchant il eft borne par le Royaume de Camboge. Le pays eft tres-fertile , fur-rout en ris & en fruirs de toutes fortes. On y trouve aufti de la foie , du poivre , de la canelle , des mineš d'or & d'argent, des rhinoceros , & des elephans d'une grandeur ex-traordinaire. II eft fort peiinle' , tk a cela de particulier , que fes nvieres, quoique peu confiderables , fe debordenr & 1'inon-denr tous les ans. Ces inondations nrrir vent dans les mois de Septembre , Oćto« bre & Novembre , de quinze en quinze iours , & en durent trois a chaque reprife. La terre en eft merveilleufement engraif-fee > tk devient fi fernle , qu'on y peut fe-mer & faire la modfon deux ou trois fois Lannee. Le commcree de la Cochinchine confifte parriculićremenr en or , en ar-gent, en bois de Calamba , en foie , en bois d'aigle, en ris čv en porcelaine. Le '3 5 © Methode de Geograpkic* Roi de cet Etat eft fort puilTant Tur mer, aufli-bien que fur terre 3 &z entrctient en, tout remps 200 galeres bien eqnipee$c Nos Mifiionaires ont penćtre dans ce Royaume, &c y ont fait des Chretiens , qui font perfecutes depuis quelques an-nees. La Cochinchine fe divife en Cochinchi-ne propre & en Champa ou Cyampaa , autrefois Royanme indćpendant , mais rendu vaflal de la Cochinchine. La Cochinchine propre fe fubdivife en lix Provinces , qu'on nomme Ciam > Quambin Quamghia 9 Quinhin 3 Runran & Thonaoa. Sa capitale eft Kehue ou Ke-houe > a(Tez grande vilic , avec un port tres-frequence par les Chinois 8c les Ja-ponois. Elle eft fituee fur le Golfe de la Cochinchine , vis-a vis de 1'Ille de Hai-nan , & le Roi y fait fa refidence. Faifč ou Haifo j avec un bon port & une forte-relfe. Banda &c Runran. Le Chiampa , ou fe trouve le verirable bois de Calamba , eft d'une ćtendue alTez mediocre, & a pour capitale Feneri ou Chiampa j qui eft dans Tinteneur du p.1ys, que fon connoit peu. Les etrangers font mal recus fur les cbtes de ce petit pays , comme il paroit par ce qui eft arrivć en 1711 , a un vaiiteau frangois, dont M. Dipres a donne une Relation dans fofl Neptune Oriental. La Chine. *jx Le Roi de la Cochinchine & fes fujets fonc idolatres. C-H A P I T R E VII L L A CHINE. C a a. t i s. Le P. DU HALDE dela Compagnie de Je-fus y a donne dans fa defcripcion de la Chine , les plus helles cartes que Von ait encore vues de ce vajle Empire, & meme de la Tartarie. Ce corps entier drejje par M. D'AhiVlLLE > compofe quatre Cartes generales , & trente fept Cartesparticulieres. Elles ont ete levees par ordre de CEmpereur de la Chine y avecun foin&une depenje extraordinaire. Ces Cartes ont ete gravees en Hollande y & formcnt fous le titre (/'Atlas Sinicus , un recueilJepare de la Defcription duP. du H-ilde. Les deuxprincipales 3favo'ur la Chine & la Tartare Chinoife one ete gravees d Nuremberg y par les he-ritiers df Homan. On en trouve des exemr plairc a Pariš y che^ lejieur JULIEN. La Chine , le plus beau &c le plus puiflant Ecat de 1'Afic , eft fituee en- 351 Methodc de Ge'o'graphle. tre les 10 & 4.5 dćgrćs.de l.inuidc fep-tentrionale , felon les obfervations des Jefuices. Sa figure eft prefque ronde , ou meme quarree , li on y comprend les Ifles , & la Prefqu'ifle de Corće , donr le Roi eft tributaire de rEnuxreur de la Chine. On peut dire que la Chine a cinq cens lietres du nord au fud , 8c environ trois cens cinquante de roueft a l'eft. Ses born'es font, au feptentrion & au couchanr , la grande Tartarie : au midi I a Prefou'ifle otientale de l'lnde 6c l'Ocean ^ au couchanr, lc RoyaumCfd,Aya 8c les Tarrares Moungales'. La grande erendue de cetre region , fait que l'ait y eft fore dirferent. Vcrs le feptentrion , il eft alfez fioid , a caufe des montagnes , qui y font en c;rand nombrc , & prefque ton'jars couv^rtes de neige ; cependant il ne lailfe pis d?y etre- fort pur , &■ les habitans y font r.n'-tnent malades. Ce qu'il y a de plus facheiix , eft que les trjinblemens de terre y font frequens , 8c ranverfent quelqirefois des villes en-tieres. Vers le midi l'air eft fort tempere & rres-fain. A 1 egird du piys , on peut dire qifil n'y en a pas au monde qui foir jfi psu'^le. Les dernieres relaitions font monter le nombte des hommes , on feuls males , a cinquante - neuf millions fept cens quatre-vingt-huit .mille trois cens foixante 6c quatre. Et (i Fon peut fe-fier' La Chine. 35$ au caleul des Auteurs , qui fe difent bien informćs , il n'y a point d Empire ni d'Etat aufli peuple , en gardant meme touces les proportions, puifqu'on y comp-te , dit-on , entre foixante-quinze ou ^natre-vingt millions d'atnes , diftnbuees dans plus de fix millions de familles. Cette fupputation neft pas fort difiicile a faire. Chaque pere de famille eft obli-ge , fous de gro (fes peines , de mettre un ecrireau a. la grande porte de fa maifon , qui contient le nombre Sc la qualitć de ccux qui demeurent cbez lui. Et il y a des Dixainiers nommes Tifangs , qui ont foin de renir le role de dix familles. On compte qu'il y a dans la Chine 155 .grandes villes & 1311 Citćs , fans y comprendre un grand nombre de villes de guerre , de forts , de bourgs & de gros villagcs tres-peuples. La cuffercnce qu'il ya enrre les villes & les Cites n'cft f>as fort confiderable, (i on regr.rde ftu-ement la grandeur, puifqu'il y a des Cites «]ui font aufli grandes ou plus que des villes. Ce qui les diftingue , eft le pouvoir de leurs Gouverneurs. Ceux des villes font ordinairement foumis aux Vi-ce-Rois des Provincec, Se ont fous eux des Cites j quoiqu'il y ait des Cites ca-pitales de certains territoires , qui ont eneore d'autres Cites dans le ur reflbrt. Cliaque grande ville appeilće lou a plu- 354 Methode de Geographie. heurs Cites qui en relevent , Sc avec Iffc quelles elle forme une pecite Provinca, Entre ces Cites les plus confiderables ion* appellćes Tcheu Sc les aurres Hkri. La Chine neft pas moins fertile que peuplće. Tous les grains Sc tous les fraits, que nous avons en Europe y viennenc en abondance , & ils ont beaucoup d'autres fruits que nous n*avons point. Toures ces chofes y font d'une bonte extraordi-naire , particulierement les melons Sc les oranges , qui n'ont point de pareilles au monde pour la delicateffe \ mais les olives he rendent point d'huile. On y trouve aufli beaucoup de betail , de gi-bier Sc de poiflbn , aufli bien que da futfć , du fcl, du camfre , dugingembre Sc d u mufc , qui feroit le meilleur du monde (i les Chinois ne le falfifioient point. Outre toutes ces commodites, la Chine a des mineš d'or & d'argent, le meilleur the , les plus beaux vernis & la plus fine porcelaine qu'il y ait au monde. Elle a enfin une prodigieufe quantite de foie &e de coton , dont on Fait des etof-fes , qui palfent de beaucoup cel les de 1'Europe. Les Chinois ont la taille me-diocre , le vifage large , le nez un pen court j le teint olivatre , la demarche droite Sc fiere. Ils font fpirituels , in-duftrieux , poliricjues , civils , magniti, ^ues en leurs habits Sc en leurs manieres ^ La Chine. 355 mais ils font extremcment orgueilleux , avares, jaloux , mal propres en kur man-ger , lents a fe rćfoudre & grands forma-iiftes. La Chine , dit fort bien le P. le Comce , eft un pays de forsnalkes , ou les Francois plus que toute autre r.ation , ont befoin de phlegme , Sc ou tous les etrangers trouvent maticre de pa t i ene . Les Chinois aiment les Arts & ies Sciences j fe vantent d'avoir eu avant nous 1'invention de i'imprimerie , du ca-non , des cloches Sc des poftes , Sc d'etre en un mot les plus eclaires de 1 Univers. C'eft ce qui leur a fait dire , qu a leur egard tous les hommes etoient aveugles , hormis les Europeens 3 a qui ils accordenr par grace un ceil pour fe conduire. 11 faut avouer que les Chinois excellent en beau-coup de chofes , fur tout dans la Poli-tique , dans la Medecine Sc dans la mani-re de faire les feux d'artifice j mais il eft cerrain que leur aftronomie , leur peinture , leur fculprure &: leur naviga* tion , n'approchent pas de celle des Eu~ ropeens , Sc qu'enfin leur milice eft tres-mauvaife. Leur eerirure eft conduke de haut en bas , Sc a ppur le moins 80000 figu res ou caraćteres , quoiqu'elle n'ait pas plus de 400 mots ou fons , qui font prefque tous monofv llabes. Ces mors (i 2 ni« fient fouvent quinze ou vingt chofes dif* i 5 C> Methodc de Geographie. fćrentes 3 fuivant la maniere dont on les prononce , & les tons de voix qu on leur donne. Les Chinois font Pai'ens ; mais fi 1'on en croit les dernieres relations , il y en a plus de 110000 qui ont ete conv.nis a la foi chrerienne \ &c le Pape y envoie quelquefois des Legats :telsont ete dans ce fiecle le Cardinal de Tournon > ik M. Mezzababa : le premier mouruc en 1710. II y a aufli des Mahomćtans , des Jiufs, čc quelques Proteftans Hollandois.j mais ces derniers n'ont plus d'acces a la Chine depuis quelques annćes. L'Empire de 13 Chine eft le plus an-cien que nous connoillions j de s'ilfaut ajourer roi a ceux du pays , il commen-ca 2951 ans avant Jefus-Chrift fous Fohi > depuis lequel jufqua prefent il y a eu 137 Roi«; ou Empereurs. Cer Empire a ete de temps en temps fujeca beaucoup de guerres civiles tk a des revolutions , dont la derniere lui a fait ebangci de maitre. Les Chinois font au-jourd'hui foumis a u:i Prince defe^ndu des Tartares de Nuichc ou des Mant-cheous, qui renvaburent en 1644. Le GouvetnemMjt en efrrlefpotique. L Empe-reur eft le rrtaitre abfolu de la vie tk des biens de tous fes fuiers , queiqu'il ne puif-fe pas difpofer de fon revenu fans le con- La Chine. 3 57* fentement du Sur-Inrendant des Finances & des Trćforiers , qui fonc les depofl-taires du Trefor public. On compte , dit-on , a la Chine i 471 rivieres ou fontaines \ mais les principales fonc le Iloang ou riviere jaune } tk le Kiang ou riviere hleue. La premiere eft plus grande j mais la feconde eft plus belle , plus large , plus profonde 6c plus navigable. Celle-ci prend fa fource dans le Royau-m2 : celle-la a la lienne dans la Tarrarie mćridionale \ 1'une tk 1'autre vonc fe per-dre dans le Golfe de Nan - King. Oucre ces rit'ieres , il y a plulieurs canaux done le plus remarquable eft celui qu'on appelle le Canal royal. Je ne parle point de la grande muraille de la Chine , longue de pres de 400 lieues ,' 3c qui fepare ce Fvovaume daveč la Tarrarie. Cei.te muraille eft un ouvrage , qui a eu pius de icpucarion que d'ucilirć 9 puifqa'elie n'a pas empeche les Tarrares de Niuche d'entrer plulieurs foi^ a la Chine , &; en* /in de s'en rendre les maitres.. JDiviJion. Le fleuve I>gang divife la Chine en deux grandes panies \ 1'une feprenrrionale , qu'on nommoir 'aucininement le Cathai ou Kiiai ; l'aurre mćridionale , qui s'ap-pelloit Mangu ou Manghui. Au;ourd'hui >a Chine eft parcagee en quinze grandes j 51 Methode de Geograpkie. Provinces, qui toutcs fe divifertt en plu_ fieurs cantoirs , fous certaines Metropo« ]es. Ces Provinces font celles de i. Pe tche-li. «;. Chan fi. i. Kiang nan. 10. Chendi. 3. Kiang fi. n. Se-Tchuen. 4. Fokien. 1 z. Kuang tung. 5. Tche Kiang. 13. Kuang fi. 6. Hou-Kuang. 14. Yun-nan. 7. Ho-nan. 15. Koi-tcheou. 8. Chan tung. Telle eft la divifion donnee par le P. du Halde , 6v ccft celie que nous avons cru devoir adopter. Nous y joindrons le Royaume de Corće , fitue au nord-eft de la Chine , &c qui en dcpend. Quant a cette partie de la Tartarie qui eft fous la domination ou fous la protec-tion de TEmpereur de la Chine , 5c qu'on appelle par cette raifon Tartarie Chinoife 3 nous en avons donne la defcrip-rion au dernier article du chapitre IV , qui ttaite de la Grande Tartarie , ci • devanc page z6 j. I. Province de Peking ou le Pe-tche-li 3 ou Li-pafou^ Ce Pays eft montagneux , froid , peu fertile , & contigu vers le feptentrion a la grande muraille de la Chine. I i con-tieiic neuf Cantons avec leurs villes me-tropolitaines ou principales , qui font, La Chine. 3 5 9 1. . Chun-tien , ou 5. Chnn-te. Pekin. 6. Quang-ping. a. Pingxan. 7. Tai-ming. 3. Ho kien. 8. Yun-ping. 4. Tcbin-ting. 9. Suen-hoa. La ville de Peking ou Chun ticn-fou y c'eft-a-dire , la Cour du nord, eft la ca-pirale de ceete Province , tk meme de tout 1'Empire , depuis lan 1404, que le iiege imperial y fut transfere de Nan-king , pour etre plus a portee de s'oppo-fer aux irruptions prefque continuelles des Tartares. Elle eft fituee dans une platne , a 40 degres de latitude feptentrio-nale , i 30 lieues ou environ de la fameu-ie muraille de la Chine. Sa figure etoir aurtefois quarree , & contenoit quatre grandes lieues de tour j mais les Tartares en s'y placant , obligerent les Chinois de fe loger hors des murailles , ou ils bati-rent en peu de temps une nouvelle Gite p plus longue que large , & qui fait avec Ja ville une figure fort irreguliere. Cesdeux parties de Peking fonr auifi grandes 1'une que 1'autre , & ont enfemble pres de fept lieues de tour. Toute la ville eft fortifree a l'antique , av.ee des murailles fort ćle-vees , & flanquees de vingt en vinge toi-fes de petires tours quarrees , avec un folTe fec , mais large tk bien creufć. A l'egard des maifons, on peut dire que j.tfo Mćthode de Gćcvmphie. les Chinois aiment ;i etre exrrcmement pređeš dans leurs habitations. Vingt per-lonnes &c plus fe placenr, ou les Euro-peens pouroient a peine en mettre dix ; Sc il faut que cela foie ainfi , puifque la mulcirude des gens qui paroiflent conci-nuellement dans les rues eft fi grande , qu'on en eft efFraye. 11 eft meme necef-faire en plufieurs cndroics, que les per-fonnes de qualite foient precedćes d'un cavalier qui ecarte la foule , fans quoi ils feroienc tres-fouvent cbliees de s'arre- o ter. Prefque par-rour , & jufque dans les plus grandes rues, il y a de l'embaras. A voir les chevatrx , les mulets , les cha-meaux , les chariots , les chaifes , les pelotons de ioo Sc de 200 perfonnes qui s'affemblenr d'efpace en efpace , pour ecouter les difenrs de bonne avanture, on croiroit que toute la Province eft ve-nue fondre a Peking pour quelque fpec-tacle exrraordinaire. Les villes d'Europe ne font en comparaifon que des folitudes , lur-tout fi Ton confidere que le nombre des femmes furpaffe de beaucoup celui des hommes ] neanmoins dans cette mul* titude qui paroit au dehors , on n'en ren-contre prefcjue jamais aucune. Mais ce qui cauieprincipalement cette grande foule , eft que de tous les lieux voilins , il fe *end tous les jours a Peking un tres-grand nombre La Chine. $c?r nombre de payfans , qui apportent une infinitć de denrees pour Pufage ordinaire de la vie. Comme il n'y a point de riviere dans la ville , tous ces rranfporrs mulciplient les voirures , les ch.uiors , les chameaux , & les autres bctes de char-ge. Ainfi tous les matins , lorfqu'on ou-vre les portes de la ville , & les foirs quel-que temps avant qu'on les ferme, il y a une Ci grande foule d etrangers , qui en-trent ou qui fortent, qu'on eft fouvent obligć d attendre long-tcmps fans pouvoir paller. D'ailleurs la plupart des ouvriers travaillent dans les maifons des parricu-liers. lis courent continucllement pour chercher de 1'oecupation 7 & meme juf-qu'aux forgerons qui portent avec eux leurs inflrumens , leur enclume &c leur four-neau pour les ouvrages communs ; a quoi Ton peut ajouter que toutes les perfon-nes , metne celles qui font d'une condi-tion aHez mediocre, fortent ordinairement d cheval ou en chaife , fuivies de plufieurs domeltiques , & que quand un Mandarin marche , rotit fon tribunal le fuit en ct-reinonie ; ainfi il paroit que ceft une efpece de proceflion. Les Princes du fang ik les Seigncurs de la Cour paroiiFenc aufli accompagnćs d'un gros de cavalerie j & parče qu'ils font obUgcs de fe rendre prcfque tous les jours au Palais , leur Tome FII. Q $ 61 Methode de Geographie. train eft capable de caufer de grands em- baras. Les rues de Peking font prefque toutes tirćes au cordeau. Les plus grandes font iarges d'environ fix vingt pieds , & lon-gues d'une bonne lieue , bordees prefque toutes par des maifons de Marchands , dont les boutiques ornees d'etoffes de foie, de porcelaines & de vernis, font une agrea-ble perfpećtive. Les Chinois ont une cou-turne qui contribue encore a 1'embellif-fement de leurs boutiques : chaque Mar-chand place devant fa porte fur un petit piedeftal, une planche baute de fept a huit coudees , peintc , vernie , & fouvent doree , fut laquelle il ecrit les chofes dont il trafique. Ces efpeces de pilaftres ranges des deux cotes des maifons , & prefque dans une ćgale diftance , font une colonade , qui a quelque chofe de iingu-lier. C'eft ce qui eft commun i prefque toutes les villes de la Chine. Deux chofes neanmoins diminuent la beaute de ces rues. La premiere eft le peu de proportion qu'e'les ont avec les maifons , qui ne font ni bien baties , ni alTez elevees la deu-xićme vienc de la boue ou de la poulliere qu on y trouve. La Chine , fi policec en tonte autre chofe , ne fc reconnoit pas en celle-ci. L'hiver & lete font egalement incomiTKxles pour ceux qui fortent, & La Chine. $6$ c'efl: en partie pour cela qu*on eft oblige d'aller a* cheval ou en chaife. La boue gate les bottes de foie done on fe fert, &c la poufliere sattache aux etoftes j fur rouc aux fatins qu'on prćpare a 1'huile pour leur donner plus de luftre. Cette poufliere en-velope continuellement la ville d'un gros nuage , qui penetre dans les maifons, & ?[ui s'infinue dans les cabiners les mieux ermes} &c malgre rouce la precaudon qu'on peut prendre pour s'en defendre , les tabies Sc les meubles en fonr roujours couverrs. On rache de diminuer cette in-commodite par 1'eau qu'on jette continuellement dans les rues ; mais on ne laif-fe pas d'en fourTrir beaucoup pour la pro-prete & pour la fante. Les petites rues cou-rent toutes de 1'eft a 1 oucft , & pnrtagent en des Ifles egales 6c proportionćes, touc 1'efpace qui eft eutre les grandes rues. La plus belle qui eft appellće Cham* ganhiai j c'eft-a dire , la ruc du reposper-petuel j va de 1'eft a 1'oueft : elle eft bor-dee du cotć du nord par les murs^hi Pa-Iais de 1'Emperenr , & du cotć du fud par divers Tribunaux & Palais de grands lei-gneurs. Cetter rue , qui a plus de trente toifes de large , efi li fameufe , que les Sl-vans 1'emploient dans leurs Ecrits , potit deli^ner route la ville. De tous les batimens qui comnofent cette capicale , le feul qui merite prodre- Q ij 3 64 Mithode deGedgraphic. ment d'etre con lidere , eft le Palais Irrrpe-rial. II eft lirue au milieu de la ville des. Tartares , & regarde le midi, fuivanc la coucume de cet Empire , ou Ton voit rare-menr une ville , un Palais , ou la maifon d'une perfonne confidćrable , qui ne fok tournee d u c6te du midi. 11 eft entourć d'une double enceinte de murailles, l'une dans l'autre, en forme dequarrelong. L'eu-ceinte extćrieure eft une muraille d'une hauteur &: d'une ćpaifteur excraordinaire • enduire dedans debors d'un ciment de chaux rouge , & couverte d'un comble ou petič roic de briques verniftees d'une cou-leur jaune doree. Sa longeur depuis la porte du fud jufqu'a celle du nord , eft: de deux milles d'Icalie ; fa largeur d'un^ & fon circuit de fix. Cetce enceince a quatre porces; une au milieu de chaque coce , & cliacune eft compofee de trois portes , donr celle du milieu ne s'ouyre que pour TEmpereur feul : les autres fer-vent a ceux qui entrent au Palais ou qui en fortent , & font ouverres depuis la pointe du jour jufqu'a ce quon fonne la retrake. 11 faut pourtant en excepter les portes mćridionales , qui ne font qu'entr'-ouvertes , a moins que 1'Empereur ne for-te ou ne renrre. Du temps des Rois Chi-nois , la garde de cliaque portail etoit de trente foldats avec leur capitaine & dix eunuques j mais a prefent il n'y a quq * i: 9 La Chine. ffi vingt Tartares avec leur officier. La Garde eft: en tout de trois mille hommes , oui font diftribues par compagnies Sc par bri-gades : car outre les portes qui viennent d'etre marcjuees, il v en a plufieurs aurres aufli-bien quc diveiTes tours , qui envi-ronent la muraille intetieure. Cette mu-raille done qui entoure immćdiatement le Palais , eft extremement haute &c ćpaif-fe, batie de grandes briques toutes egales, &c embellie de crencaux bien ordonnes-. Elle a du nord au fud un mille & demi d'Iralie , pres d'un demi en l'autre fens, &c cinq milles moins un quart de circonfe-rence. Elle a quatre portes avec de grandes voutes & areades. Celles du fud tk du nord font triples , comme les portes de la premiere enceinte , &z celles des cotes font fimples. Sur ces portes, & far les quarre angles de la muraille , s'ćleven: huit lours \ ou plutot huit falles d'une grandeur cx-traordinaire , & d'une rres-belle architec-ture j elles font verniifćes au dedans d'un beau rouge femede rleurs dor j &c la cou-verturj eft de tuiles verniflćes de jaur.c. Sous les Rois Chinois , vingt ennuques fati-foient la garde a chacunc de ces portesl; d prefent les Tartares y ont mis visigt fol-dats $c deux ofticiers. L'entree eft permife a tous les Mandarins des Tribunaux , qui font au-dedans du Palais , & a tous les Ofliciers de la Maifon du Roi -y mais elle Q lij 3 66 Methode de Geographie. eft dcTendue rigoureufemcnt a tous les aw» tres , s'ils ne montrenr une petite table de bois ou d'ivoire j dans laquellc leur noin &c le lieu ou ils doivent fervir foicnt mar-ques, avec le cachet du Mandarin de qui ils dependenr, Cette feconde muraille eft environee d'un profond & large foffe, revetu de pierres de raille & plem d'excel-lens poifTons. Chaque porte a un ponrdevis pour traverfer le fofte , a la referve de celle du fud , qui l'a plus au-dedans. Dans le grand efpace par lequel les deux murail-Jes font feparees , il y a plufieurs Palais, les uns ronds , les autres quarres. lis ont tous des noms conformes aux ufages & aux divertiffemens aufquels ils font defti-nes. On y remarque entr'autres , 1'obfer-varoire Imperial , que les Chinois van*-tent fort; mais qui au fond n'ćgale pas celui de Pariš. Dans le meme efpace , du cote de 1'orient, & joignant la premiere muraille , coule une riviere qu'on traver-fe fur plufieurs ponts , tous forr bcaux , & faits entierement de marbre , a la referve de 1'arcade du milieu , qui eft ua pont-levis de bois. La groffe cloche de Peking eft a remar-quer : elle a plus de treize pieds de hau-teur , douze de diamettre , 44 de circon-ference exterieure , un d'epaifleur , &: pe-fe 120000 livres. TJchang-Thungven > a deux lieues de La Chine. fOf^f'^ Peking eft une maifon de plaifance de 1'Empereur. Paoting eft la reiidence or-dinaire du Vice-Roi du Pe-tche-lL Tfun-hoa eft une grande ville , done les rues font lafges , Sc pres de laquelle on trouve du marbre , d u eriftal & du porphvre. Tung-ping eft a 1'eft de Peking , comme Chiunting & Xunta font au fud. II. Province de Nanking ou Kuing-nan, Elle eft mife pour la feconde Province de la Chine. C'eft une des plus fertiles dc des plus riches : elle abonde en bled , en foie &c en coton. Elle eft fituee fur le Golfe de Cang, Sc a la coni mod ite des ri-vieres de Hoang Sč de Kiang qui la tra-verfent. Le pays eft fort peuple , &c fe di-vife en deux parties , 1'une orientale , čV: l'autre oecidentale. La partie orientale contient fept Metropoles ou villes princi-pales; favoir : . 1. Nan King, nommće aufli Kiangning. 2. Sou Tcheou. 5. Tchin Kiarg. 3. Song Kiang. 6. Hoai Ngan. 4. TchangTcheou. 7. Yang Tcheou. La partie oecidentale contient ftx villes principales, qui font: 1. Ngan King. 4. Tchi Tcheou. 2. Hoe Tcheou. 5. Tai Ping. 3. Ning Koue. . 6. Fong Yang. Nanking 1 avec un pore fur le Kiang , eft la plus grande ville , non-feulemenr Q iv <3 68 Metkode de Geographle. de la Chine tk de 1'Afie; mais auflT de 1'Univers : elle avoit aurrefois trois en-ceintes de murailles , dont la derniere paffoit feizc lieues de tour. On en voit encore quelques veftiges , & il femble que ce foient plutot les bornes d'une Province que, celles d'une ville. Le nombre de fes habitans repondoit a la grandeur de fon circuit, & le fejour des Empereurs 1'avoit rendue tres-peupiee j aujourd'hui que ces Monarcjues n'y font plus leur de-.meure, elle eft fort dcchue de fon premier etat. II y a beaucoup de jardins, de coliines, de vuides Sc de terres laboura-bles. On y trouve neanmoins , dans ce qui eft habite , encore prefqu'autant de monde qu'a Peking , qu'elle furpafTe en commerce de mcme qu'en grandeur. Les rues y font mediocrement larges , mais bien pavees, les maifons bafles & pro-pres , les boutiques riches , &c garnies de toutes fortes de belles marchandifes. Nanking, en un mot, eft comme le centre de la Chine ; &c il n'y auroit aucune autre ville plus digne d'etre le fićge or-dinaire des Empereurs , fi leur prćfence n'etoit pas necelfaire fur les frontieres , pour etre plus a portće d'empecher les ir-ruptions des Tartares occidentaux. Hors £c pres de la ville de Nanking , eft la fa-meufe tour de porcelaine , qui palic pour une des merveilies de la Chine. La'Ckine. «ć grande ville , eft batie fur la riviere de Kiang. Siang Yang eft au nord de la Province. Kang Tcheou eft La Chine. ' 373 'aufli fur la riviere de Kiang , a l'oueft de la Province. VII. La Province d'llonan. Cette Province qu'on appelle !e Jardin de la Chine , a caufe de ks excellea$ fruirs , eft la plus tempćree 6v la plus fer-tile du Caray ou Chine leptentrionale. ♦* Elle cohrient huic Metropoles j favoir: 1. Cai Fong. 5. Hoai-King. 2. Koue-Te. 6. Ho Nan. 3. Tchang-Te. 7. Nan-Yang. 4. Oue Kiun. 8. lu Nhing. Cai Fong qui en eft la capirale , &c une aflcz grande ville , fur iubmergee en 1CT42 , par les eaux du Hoang , qui for-merent im grand lac. Honan eft a l'oueft de Cai Fong. Nan-Yang pres de laquel-le on trouve quancite de ierpens. lu-Ning eft pres de la riviere d'Iu. VIII. La Province de Chan Tung. Sur Je Golfe de Cangou de Nan^-King, eft fertile en grains , en fruits, en berail, en loie , & a ilonnć nailfance au fameiv* Conlucius , le Socra'e des Chinois. Elle ne contient que lix Metropoles ; iavoir y 1. Tfi-Nnn. 4. Tfing Tcheou. 2. Y'.n-Tcheou. 5. i en?, Tcheou.. 3. Tong-Tchang. 6. La i Tcheou. $74 Methode de Geographie. Avec les petites Ifles de Cinan 3 ou eft une alTez belle ville de meme nom qui en eft la capicale \ de Xamuen 3 &c de Ten-cheoiu IX, La. Province de Chan-Si. Elle eft bornee au nord par la grande muraille, & au fud par la riviere d'Hoang. On y rrouve beaucoup de vignobles., & elle fournir a tout le Royaume quantitć de raiilns fecs. Ses principales villes ou Metropoles , au nombre de cinq , font ; 1. Tai Yven. 4. Fuen Tcheou. 2. Ping-Yang. c. Tai Tong. 3. Lon Yang. Tai-Yven , grande ville , qui a pres de deux lieues de circuir, fervoir de refidence aux Princes du fang. 11 y a des fabriques de belles etoftes. Tai-Tong 3 eft proehe la grande muraille. Fuen-Tcheou eft au (ud de Tai-Yven. X. La Province de Chen-Sb. Grande Province lituee a. l'oueft de celle deChan-fi. C'eft par ou viennenr les Cara-vanes d oecid-ent j le pays eft fec , mais aflez fertile en bled & en betail. II pro-duit aufti du mule , & de la rhubarbe , Sz roule du fible dor en quelques-unes de fes rivieres. Cette Province fe divife en par- La Chine. yjf tieoricntale , & en partie occidentale , qui contiennent chacune quatre Metropoles y favoir dans la premiere ; i. Si-Ngan. 3. Fong-Tchiang. z. Yen Ngan. 4. Han-Tchang. Et dans la partie occidentale. 1. Ping Leang. 3. Ling-Tao. i. Kong-Tchang. 4. Hing-Hiang. Quelques-uns y ajoutent Sochcu ott Soczi j que d'autres mettent dans le pays des Tartares Chinois. Si-Ngan-Tighan-F u eft une grande ville de trois heues de tour. X L Le Province de Se Tchuen. Cetce Province, au fud de celle de Chen> fi , fut prefque ruinee par les Tartares dans les dernieres guerres} mais elle s'eft alTez bien remife , & produit encore a fes habitans du bled , des fruits , de la foie &c de la rhubarbe. Elle contient dix villes principales ou metropoles , favoir : 1. Tchin-Ton. 6. Quei-Tcheou. z. Pao Ning. 7. Ma-Hou. 3. Chun-King. ■ 8. Long Ngan. 4. Su-Tcheou. 9. Tfun-Y. 5. Tchong-King. 10. TongTchien. Tchin-Ton ou Chington eft prefque au milieu de la Province , Sc environee de grandes rivieres. Chun-King fur le Kiang-Su-Tcheou 5c Quei-Tcheou3 font fur la mejne riviere. 3 7 <> Meth o de de Geographie. XII. La Province de Kuantung ou Ca n ton. Cette Province , qui s'etend forr de l'oueft a 1'eft, fe crouve fur la mer. Elle eft ferrite en bled , en ris , en fruits , en foie , en fucre & en falpecre, S;s villes metropoles , au nombre de dix , font: I. Quang-Tcheou. 6. Tcheo-King. z. Chao Tcheou. 7. Cao-Tchcou. 3. Kang Hiung. w 8. Lieu-Tcheou. 4. Hoei Tcheou. 9. Loui Tcheou. 5. Teh.10 Tcheou. 10. Kiun-Tcheou. j La premiere qui eft Quaag-Tcheou 3 nommće aufti Čđnibn 3 eft une grande ville y bie.i peuplee 3 riche &c marchande , a caufe de Con port , ou bs gros vanTeaux peuvent remonrer la riviere de Ta , fur laquelle elle eftlicuće. Ckao-Tcheou 3Hocl-Tcheou & Cao-Tcheou. j> font fur de petitOf irivieres & pres de la mer. De la Province de Canton depetidenl plufieurs Iftes , lltuees au m idi. La princi-pale eft celle dtMaynan , qui a enviroiv 60 lieoes de circuit. Sa ville eapitale , nom-mee Kiun-Tcheou apparrient a 1'Empe-reur de la Chine , de mc-me que %ai j 8c Cangan ou Cangoa. Le dedans du pavs eft oceupe par des fauvages libres & ir.de-pendans , mais qui tous font commerce avec les Chmois, de qui iis tirent princi-palemenc du fel & des nabiti. Quoiqne La Chine. 377 remplie de montagnes Sc de forets , cetre Ifle ne laifTe pas-d'erre affez fercile s Sc de produire a fes habitans du ris , des fruirs Sc les commodites de la vie. 11 y a quelques mineš d'or Sc d'argent ; mais les Sauvages fe contentenr d'amalfer les grains d'or qu'ils trouvent dans le faHfe des rivieres. On peche beaucoup de per-les vers la cote feptenrrionale de llile. La petite lile de Macao , eft aufti juae dependance de cette Province } elle eft firuee a 1'entree du Golfe de Quang-Tcheou , Sc a une ville de meme nom , fameufc par le grand commerce qu'y fai-foient autrcfois les Portut^ais, avant que les Hollandois les eulfent chalfes de la meilleure partie des Indes. lis y ont en-core une bonne forterefte j mais la garni-fon , qu'ils y tiennent, eft peu confidera-ble , parce qu'ils ne font plus en ćtat d'y entretenir benucoup de troupes , Sc que dailleurs ils favent bien que le meilleur moyen de conferver cette place eft de fe mcnđger avec les Chinois par beaucoup de (biimi/Ilbii Sc de defvivnce j ce qu'ils ont lait auez exaćtement. Macao a peu de maifons Sc point de muraillcs : fon port eft alfez petit , mais fur commode. Tous les droits d'entrćes en appartiennent aux Chinois ; & quoique les Porrugais aient entr'eux une forme de Gouverne-ment, ils obciftent neanmoins aux Man- $yt Methode de Ge'ographie* darins, dans les afTaires , ou les Chin&U onr quelqu'interet. On faic beaucoup de fel dans l'Ille de Macao, & l'Empereur de la Chine en tire tous les ans plus de quinze cens milic livres pour le drbit de tranfport. %Ptes de cette Ifle il y en a une autre aufli petite , appellee Sanchian 3 nommee aufli Chang-Tchuen ou mourut faint Francpis Xavier en 1552. XIII. La Province de Kuang Si. o Province de la partie meridionale , aux €onfins du Royaume de Tunquin , qui en occupe meme une portion. Elle eft au nord-oueft de Quantung. Ses principales villes ou metropoles , au nombre de dou-ze, font j 1. Ouei-Ling. 7. Tfin-Tcheou. 1. Leou-Tcheou. 8. Nan-Ning. 3. KingYven. 9. Tai-Ping. 4. Si-Nguen. 10. Se-Ming. 5. Ping-Lo. 11. Tchin Ngan. 6. Ou-Tcheou. 12. Se-Tching. Quei-Ling y qui eft au nord > en eft la principale ville. Nan-Ning , TJin-Tcheou. & Ou-Tcheou font vers les frontieres. XIV. La Province d3Yun Nan. Pays riche tk fertile , ou Ton trouve de la poudre d'or , quelques pierres precieu-ies, du mufc &c alfez. de foie: c'eft la plus La Chine. 17? fcccidentaie des Provinces de la Cliine. On y tronve 19 metropoles ou villes principa les , favoir j, 1. Ynn-Nan. 11. Yao-Ngan. 2. Tali-Fou. iz. Ko King. 3. Ling Ngan. 13. On-Ting. 4. Tcueou Hiung. 14. Li-Kiang. 5. Tchin Kiang. 15. Yven-Kiang. (j. King-Ten. 16. Mong-Hoa. 7. Quang Nan. 17. Yung-Tchang- 8. QuandSi. 18. Yung-Pe. A R T I C L E I. LES 1SLES VOLSINES DE L A TARTARIE j ET VERS LE DETR01T D U NORD. N Ou s ramitfbns enfemble toures ces liles fkiiees dans la Mer du Sud , au nord du Japon , & a l'entree du Golfe d'Amur ou de Kamcfcriatka. On en compte cinq principales , qui font: l'Ifle de Sagha-lien ou d'Amur • le Jejo 7 Vlfle des Etats\; la Terre de la Compagniey &c la Terre de Gama. Nous ne parlons point des Ifles qui font au fud du Kamtschatka , au nombre de trente-quatre , felon les Rufles. On ne les connoit pas bien encore -y & elles ne paroiflent avoir rien de remarquable. i. L'Ifle de Saghalien ou d'Amur y fltuee vers 1'embouchure de PAmur , efl: une grande lile couverte de bois , ou Ton prend quantite de mart res zibelines. Cet-te Ifle a ete un fujet de conteftation entre les Rufles &c les Chinois. Les premiers y ayant etabli une peche de perles , en 1718 , les Chinois la revendiquerent t comme appartenante a. la Tartarie Chi- $3-4 Mćchode de Gćographie. noife \ mais les RufTes en font demeurćs les maitres. 2. La Tene de Jefo 3 ou YeJfo y cju'on nomme aufli Efo ou Jodfo j eft fituće au nord-eft du Japon , a l orient de l'Afie , & a l'occident de l'Amćrique. Ce Pays eft en-cote pour la plupart inconnu; 6c ce que nous en favons , nous vient par les Hollan-dois , qui y aborderent en 1645. Ce qu'ils en dćcouvrirent s'ćtend depuis le 4 3 juf-qu'au 4S' degre &c demi de latitude fep-tentrionale. Les principales tcrres qu'ils y appercurent font le Cap de Paticnce , la Terre de la Compagnle pres du detroit d'Uries \ la Terre des Etats , proehe le canal de Piecko ; le Plc dCAntoine ; les villages ou cabanes de Slvarca $c de 7a-čapji; le Cap d'Euroen3 pres du dćtroitde Sungat, qui eft enere le Japon & la Terre de Ye(foi le village de Matjimey j Matru* may , ou Matomey 3 la principale place du pays ; le hameau &Acqueis au fond d'un golfe , & le Cap dCAniva. Les ha-birans de la Terre de Yeffo font d'une affez petice taille , fort velus & tres-af-freux , a caufe de leur grande barbe , qui leur couvrc prefque tont le vifage. Us IahTent aoitre leurs cheveux, & ont les ieux noirs , le fronr plar & le teint jaune. Les femmes 'ne font pas fi bafa-nees que les homine$. Quelques-unes fe cbupent les cbeveux autoui de la tete d'autres Les If.es de Vstfic. 5 3 5 d'autres les laiffenr croitre , & les relevenc en haut. Les unes t< les autres fe peignenc de bleu les levres & les fourcils : Se les hommes , de meme que les femmes, one les orcilles percees avec des anneaux d'ar-gent; les femmes en one aulli aux doigts, &c quelques-unes porrenc de petits ta-bliers d une toile de foie foie legere. La religion de ces peuples nous cft incon-nue ; mais on ne doute point qu ils ne foient idolaeres. II n'y a enrr'eux ni police , ni gouvernement. lis forit naturel-lement parcfleux , & ont chacun deux femmes , done ils fone forr jaloux. Leur nourirure ordinaire eft le Inrd 6*: Minile de baleine , le poifTon Sc tcutes fortes d'herbages. Ils erafiquent beaucoup avec les Japonois , a qui ils donnent du lard , de 1'huile & des langues de baleine fu-mees, des fourures Šc des plumes d oi-feaux. Les Japonois , qui y viennent une fois tous les ans , leur portent du tis , du fucre , des robes de foie , de« pipes de cuivre , des tabatieres , de petits vailfeaux vernis , des pendans d'oteilles , des ha-ches &c des couteaux. Ce commerce 6c certe proximite de la Terre de YefIo avec le Japon , qui n'en e(l feparć que par le detroit deSungar , a fait pluiieurs fois naicre Penvie aux Erapereurs du Japon de connoirre le dedans du pays. Ils ont meme envoyć dts guis pourvus de Tome VIL R 3 S f> Methodc dc Gcographie. ce qui ćtoit nćceflaire pour vivre; mais ils n'ont trouvć que des montagnards fort grolliers , qui nont pu les fatisfaire fur ce qu'ils dcmandoient. On a cru long-temps que le Jefo fai-ibit tine partie de la grande Tarrarie : en quoi on eroit fonde fur la maniere de s exprimer des Japonois , qui appellent Ofcu-Jt/b _> c'eft-a-dire haut jefo la parne feptencrionale de la Tarrarie qui joint le Kamtfchatka \ &c ils le diftinguent de llfle de Jefo, qu'ils nomment Jcfo-Ga-jiCette derniere n'eft feparće de la Tarrarie que par le decroir de Telfoi , qui cd fi reirerrć en quelqnes endroirs, qa'on enrend d'un rivage a 1'autre le cri des betes fauves. Sa parrie meridionale s'approche bcaucoup du Japon , & n'en eft leparee que par le dćcroit de Sungar. Quelqaes Carces reprćfentent le Jefo attache a la Prefqu'iile de Kamtfchatka , auquel, par cerre raifon , elles donnent une erendue confiderable vers le fud-eft ; mais les dernieres navigarions des Rulfes onr fait connoirre , que le Jefo ne rienc point au Kamtfchatka , &c qu il en eft fepare par une fuite de plufieurs Ifles. Les Ruf-fes meme pretendent que le Jefo n'eft pas ime terre continue , on une feule Ifle mais un compofć de plufieurs, qui font partie des trente-quatre Iftes dont nous avons parić ci-d les I/les de T Afie. 3S7 Matfumai > qu'on croyoit autrefois etre tine ville de la Terre de Jčfo , eft une Ifle particuliere , qui prend le nom de fa ca-pitale. EUe eft liruee dans le Detroit de Sungar , pres du Japon , a qui elle appar-rient. Les Ruftes 1'appellent Matmansha. Le Gouverneur de Matfumai eft oblige tous les ans , de palTer au Japon , &z de prćiencer a l'Empereur fon tribur, en fou-nires, en plumcs d'oifeaux rares Sc en ar- gCIU' 5. L' Ifič dcs Etats j a 1'orienc eft fepa-ree par le Detroic du Pic , de 1'lfle de Jejo j cv par celui d'Urie% y de la Terre de la Compagnie. Des vaifteau* Hollandois, envoycs a la decouverte de ces Mers , par la Compagnie des Indes orientales , la dćcouvrirent en 1645 , & lui impoferent le nom qu'elle porte. 4. La Terre de la Compagnie, plus a 1'orient , fut decouverre par les rnemes Navigateurs , qui lui donnerent ce nom , pour la rendre propre a leur Compagnie des Indes orientales. Mais ils n'en recon-nurent qu'une partie : ce font les Ruftes , qui nous ont fair connoirre que c'etoit une lile , ou itn compofe de plulieurs llles. 5. Encore plus a 1'eft , fe rencontre-la Terre de Gama. Un Capiraine Efpagnol l'apper9uc en allant de la Chine au Mexi-que, & lui donna fon nom. R ij 3S8 Methode de Geographie. A R T I C L E II. LES ISLES DU JAPON. C a r t e s. Le /kvant M. R E L A N D a donne une Gane du Japon y qui a ete gravee en Hollande en une feuille. KEMPFER. en a donne une meillcure dans fon Hiftoire du Japon , imprimce infolio & in-12 j 6' le P. Charlevoix l'a adoptee pour /'Hiftoire du Japon , quil a aujji com-pofce. Mah AL le Comte de Maurepas en a fait drejjcr une meillcure 3 par le Sieur BELL iN lorfqu'il etoit Secretai-re. d'Etat pour la Marine. IjEs Ifles du Japon font a 1'orient de la Chine , en tre les 153 Se 175 degres de longirude , Se entre les 31 &c 42 de lati-tude feptentrionale. l'air y eft fain, mais ordinairement froid , &: fujet a la neige y le terroir fort montagneux , Se en general peu fertile , li ce n'eft en ris Se en the , quoiqu'en quelqucs endroirs il y vienne du froment Sc de 1'orge. 11 y a aufli de riches mineš dor , dargent, & de tres-bel etain, des elephans, des chameau* , des bceufs \ enfin on y peche des perles, Zes IJles du Japon. 589 rouges pour la plupart j mais qui ne ione pas moins eitimees que les blanches. Les Japonois font de moyenne caille , un pen bafanćs, magniriques dans leurs liabits , alfez fpirituels , rideles, adroits > patiens dans les trayaux , aimant les armes (k les fciences j mais fort orgueilleux , mefiaus & dillimules. Us font idolatres, tk liaif-fenc toutes les Nations, qui fort d'une au-treRehgion, excepte les Hollandoisj oii'ils croient n'en point avoir, & qu'ils ne fouf-frent qu'a caufe du commerce. Leurs courumes Ik leurs manieres font fort op-pofćes aux notres , lk meme a celles des Chinois , dont ils tirent leur origine , & qui les-relćguerent dans les lfles qu'ils habitent aujourd'hui. II y a apparence qu'ils en ufent ainli pour mieux couvrir iopprobrc de leur exil; & celt peut-ctre pour cela que les honunes ik les femmes marchent la tete nue j que le noir leur eit une couleur de rcjouilTance , & le blanc une couleur de deuil. Cette affectation paroit en plufieurs auttes chofes y čv ce neit pas fans raifon quun Auteur de ce temp? les appelle nos ancipodes morau>:. Us ne font pas moins particulicrs dans le commerce , que les Hollandois viennent faire fur leurs cotes. Les vai(Ttaux de ces dcrniets n'y font pas plutbt arrives, que les Japonois font mettre pied a terre a tour lequipage, & enlevent tout ce qu'il R iij 39° Methode de Geographie. y a dans les vaiflTeaux, jufqu'aux voiles J canons 6c munitions j puis, quand il leur plait, ils rechargent les memes batimens de telles marchandifes qu'ils veulent, en ćchange de cel les qu'on leur a apportees, & remettent les navires dans Tekat qu'ils font arrives , le tout neanmoins avec alfez de bonne foi. L'Empire du Japon a deux Chefs , ou deux Souverains : 1'un eft: le Dairi 3 ou Empereur Ecclefiaftiqiie , qui refide a Meaco j fk 1'aurre eft le Kubo j ou Empereur fcculier , qui fut etabli au milieu du Xlle fiecle : il demeure a Iedo. Le Dairi avoit aurrefois un tt^s-grand pouvoir, &c il etoit regarde comme une efpece de di-vinite ; & c'etoit un aufli grand erime de lui refifter que de refifter a Dieu meme. Mais aujourd'hui fon pouvoir eft extre-mement borne. Comme les Japonois font tresrfenfuels , on lui a conferve , non-feu-lement un tres-grand revenu, mais enco-re les plaifirs , qu'il peut prendre avec fes douze femmes epoufees , 8c fes coneubi-nes. Le Kubo j ou Empereur feculier , eft: dene aujourd'hui le feul en qui relide I'autorite fouveraine. II a un pouvoir fans bornes fur tous fes fujets, fans diftinćtion de naiffance ni de rang. Ce Prince eft ttčs-riche & tres puifTant. Le Japon eft fort fujet a des tremblemens de terre li vio- Les I/les du Japon. 391 lens, qae les montagnes &c les villes en font abimees , &z ne lailfent plus voir que des lacs ou des gourfres tres-dangereux par leur mauvaife odeur. 11 en arriva fur-tout un terrible en 1703 , qui abima pref-quentierement la ville d'Yedo , & qui s'ćtant joint a. un incendie , y fit pćnr deux cens mille habirans. La mer des en-virons eft tres orageufe , ce qui vraifem-blablement vient des memes caufes que les rremblemens. Les Illes du Japon fe reduifent ordinai-rement a trois principales, dont les autres dependent. La premiere de ces trois eft celle de Niphon > la plus grande & la plus confidćrable ; la feconde Ximo ou Sai-cock j & la troilieme Xicoco ou T&kceJ:. L L'JJle de Niphon ou Nipon. Cette lile, dont le nom veut dire Scur-ce de lumiere j eft a 34 lieues a 1'eft de la Ptefquifle de Corće , &c a 10 ou davan-tage du Jefo , dont elle eft feparće par le Detroit de Sangar ou Sungaar. L'Ifle de Niphon a pres de t>oo lieues de tour, 150 lieues de longueur du fud-oueft au nord-eft , dc no lieues dans fa plus grande largeur du fud au nord. Elle contenoit aurrefois 54 petits Royaumes ; mais aujourd'hui elle fe divife en cinq parries ou Provinces imperiales, qui foiu en allant d'occident en orient. R iv 3p i Methode de Geographie. i. Jamajliro ou Sansju. z. Jamatto ou Wos ju. 3. Kawat/ii ou Kajiu. 4. Idfumi ou Sensju. 5. o'iqa ou Tfinokuni &z SIsju. II y a encore d autres divifions particn« lieres; inais qui entrent dans un trop grand dćtail pour un Pays aufli peu frćtmentć par les Nations Europeennes. 1. La Province de Jamajliro a pour villes principaies, Aman&uci , avec un alfez bon pore fur la c6te oecidentale j Nanga-to j Bingo j Aqui, Foqui &c Ximonafc-quL z. La Province de Jamatto a Meaco > ancienne capitale , Sacay 3 Farlma &e C^aca. Meaco 3 pres du Golfe qu i porte fon nom, eft une tres-grande ville, belle, riche, bien peuplee &c fort marchande. Elle etoit autrefois plus confiderable , avancque les Emperenrs du Japon euftent transfere leur lićge a Vedo 3 qui eft ainfi devenue la capirale de cet Empire. Meaco eft divifee en haute &c balTe ville. L'an-cien Palais des Empereurs fe trouve dans la premiere , & le port avec la forterefte de Fuxlma dans la feconde. On dit que la ville de Meaco a ere abimee en 1730, par un (remblement de rerre , & qu'il y eft piri un million de perfonnes. OJacka eft environ a 180 lieues au couchant d'Ye-do , iicuće entre des montagnes j mais Les IJles du Japon. 3 9 J fans aucune fon;lication , fi ce n'eft ai| Chateau de l'Empereur. Sacay a un bon port de mer , & pade pour. la rroiiićme ville de Niphon. 3. Le Kawatfii a les villes de Finda 3 capi tale , Se de /iicAd pres de laquelle il y a un volcan. 4. Vhriimi a les villes de S uran ga 3 ou Sunutga 3 lieu ou. Ton eieve le pre> fomptif heritier de la Couronne ; de ou X'mano 3 & de Mhcatva ou 5. La Province de £icra contient IV-cfo Ava &z Dcvano. Tedo ou Tendo , aujourd'hui la capitale du Japon , & la relt-dence de 1'Empereur , efi iituće fur la riviere de Tonkavv , qui fe peni un peu au-deiTous dans la mer. Cette ville eft belle, riche, bien peuplee, longue de trois lieues Si large de deux. II v a de tres-beaux Pa-lais , Si entr'autres telui de Ihmpereur, dont les appartemens font tout-a-fait m.i-giiihques, Sz oii 1'or & les pierreries bril-lent de rous cores. Mais il s'en faur bien que les maifons ordinaires participent a cette magnificence. Le Palais eft propre. ment une forrerelfe au milieu de la ville. L on en faic des defcriptions qui peut etre fontplus vraies que vraifemblablcs. Cetre ville eut le malheur en 1703 , d'eire prel-que ruinće par un tremblement de terre , qui fe joigme a un furieux incendie > & R v 3 94 Mćthode de Geogravluc. cjiri fic pćnr deux cens mille ames. II. L'Ifle XimOj Saycock ou Saikokf. L'Ifle Ximo, dont le nom de Saicock veut dirc Pays de l'ouejl s qui Ini vient de fa fimation a l'egard de Nmhon , eft aufli appellee Kiujiu ; c eft-a-dire, le pays des neuf j de neuf Royaunies qu'elle conte-noit autrefois. Elle n'eft qu'a 60 lieues de la Chine. Sa longueur eft de 60000 pas ou environ vingt lieues , fa lavgeur de 30000, 8c fa circonfćrence de 150000. Nangafaki, capicale , Bungo 8c Satcuma , ione les meilleures villes qu'on y trou-ve. Nangafaki 3 avec un port fur la cote orienrale, eft mediocremenr grande j mais bien peuplee , 8c riche par le commerce qu'elle fait, principalement avec les Chi-nois 8c les Hollandois. Ces derniers qui iont les feuls des Europćens qui puiflent aborder au Japon, y one une habitation dans une petite Ifle qui eft dans le pore; & ce port n'eft jamais fans une cinquan-raine de vaifleaux marehands. IIT. L'Ifle de Xicoco _, Tokoefy ou Sikokf. Les noms de Tokoefy 8c de Sikokf y flgnifient quatre Royaumes. Cetre Ifle etoit erTe&ivemenr partagee autrefois en quatre Etats. Elle eft fituee a lorient de celle de Ximo. On lui donne ordinai-tement 45 lieues de longueur, 15 de Les Ifles du Japon. $95 large , Sc 120 de circonference. Tofa. ou Ton/a j Awa Hyo & Samuaui en font les villes 011 bourgs les plus remar-quables. Les autres Ifles du Japon , qui dćpen-dent de quelqu'une des trois principales que nous venons d'expliquer , font fort petites &c de peu de confćquence , a fex-ception de Firando 3 qui eft aflez bonne , aufli-bien c^iAmacufa y Tacuxima &C Fatfifio. J'ajouterai feulemefit ici que les Portu-gais ont ete les premiers des Europeens, qui ont reconnu les Ifles du Japon. Ils y aborderent en 1541 -y & S. Francois Xa-vier y ayant paftc avec eux en 1549,y precha 1'Evangile avec beaucoup de fuc-ces. Aujourd'hui tout le monde fait que depuis le malfacre des Portugais vers le milieu du dernier fiecle , on n'y fouffre plus de Chrćtiens que les Hollandois : en-core font-ils enfermes dans leur habita-tion , jufqu'a ce que leurs marchandifes foient echangćes, & leurs vaifleaux ap-pareilles par les Japonnois. La Religion chretienne fubfifta avec beaucoup d'eclat jufqu'en 1630 ou envi-ron , que la jaloufte du commerce la rit malheureufetnentabolir. Tavernier, Pro-teftant, & apres lui le Doćteur Antoine Atnauld , atttibuent cette fatale revolu-tion aux Hollandois. Voici done de quel- R vj 3 o et l'Isle Eo rmose. L Les Ifles de Lieou K'tćou fitiiees au nudi de celles du Japon , ne font con-nues exactement que depuis quelques an-nces. Kempfer , qui les nomme Lequeyo j eft le premier qui en ait parić y mais ce qu'il en dit, n'en donne qu'une idće afler confufe. Deux cartes manufcrites drefTces par le P. Gaubil a Millionaire Jefuite a la Cliine , & envoyees de Peking en 1751- , en donnent des notions plus dćtaillćes. MM. d'Anviile & Bua-che ont ćgalemenr fu tirer parti de ces cartes , qni ont ćtć dćpofćes a la Biblio-thćque du Roi , avec les notes qui les ac-compagnoient. Voici ce que dit fur ces Ifles j M. Buache dans fes Confldcrations J 9$ Methode Ae Geographic* Geographiques j tke. page 131. Les Ifles de Lieou Kieou forment depuis Xinio j la plus meridionalc des Ifles du Japon , une efpece de chaine qui s'e« rend jufqu a 1'Ifle Formofe , voifine de la Chine. Les fept qui font plus voifines de Ximo dćpendent de 1'Empire du Japon* Elles font petites. La plus grande fe nom-me Tana.vuna. On trouve enfuite huit Ifles , qui fonr nommees Oufou-Ghima 3 (les Ifles d'Ou-fou.) Elles font fertiles tk pcuplćcs, a i'exception de celle de Kikiai } qui n'eft remarquable que par fes grands cćdres. Sa plus confiderable s'appelle Oufou. Les Chinois la nomment Tatao j c'elt-a-dire , grande Ifle. Elle a aufli beaucoup de grands cedres. La grande Ifle de Lieou-Kieou eft au fud-oueft des precedentes. A fon occi-dent fe rencontrent dix petites Ifles, bien peuplees & fertiles, a l'exception de celle de Lung-hoang- chan , ou 1'Ifle du foufre. Un peu plus au fud , eft une fuite d'ilots qui va jufqu'a la pointe feptentrionale de 1'Ifle Formofe. Les Chinois fuivent ces Ifles , lorfqu'ils vont de Kilong-chang a Kien-tching , capitale de Lieou-Kieou. Enfin , plus au fud , font encore dix-fept perites Ifles , dont les principales font Tay- Pinchan , Ik Pat-chong-chan. Elles font trčs-fertile Sc rres-peuplćes. La grande Ifle de Lieou-Kieou , qni fe VIfle Formofe. nomme aufll Lequeyo j etoit partagće , il y a quatre cens ans , en trois Etats ou perirs Royaumes : de-li vient, que fur quelques Cartes , elle eft nommee \Iflc des trois Rois. Aujourd'hui elle n'a qu'un Roi, dont la domination s'etend fur tou-tes les Ifles dont nous venons de parler; mais il eft tributaire de la Chine. Cette grande Ifle eft tres-peuplće 8c tres-fertile. Elle a beaucoup de villes , de bourgs &c de villages. Sa capitale, nommee Kien~ tching , eft fituće dans fa partie meri-dionale. Le Roi y fait fa refidence ; 8c fon palais fe nomme Cheuli. Les habitans de Lieou- Kieou font aifes &: fort polis. Us ont des livres de religion , de morale 8c de fciences, ćcrits en ca;aćteres chinois. Cependant l'ufage ordinaire eft d'e-crire en caraćteres japonois. Leur langue , quoique differente de celle des Chinois &c des Japonois, a cependant adoptć beaucoup de termes en ufage chez les uns 8c les autres. Leurs Bonzes viennent pref-que tous du Japon , ou vont y faire leurs e*tudes. 11. L'Ifle Formofe a etć ainfi nommće de la beaute 8c de la fertilitć de fon ter-roir. On lui donne 260000 pas deten-due du fud au nord; mais elle n'en a pas 6000 du couchant au levant. Elle eft i forient cle la Province de Fokien , done 40» Methode de Ge'ographic. elle eft: fepnrće par un crajcc de mer d'en- viron trente quatre lieues. Cetre Ule eft fort fujete anx rremblc-mens de terre &c aux tempctes. Le terrein y eft alfez inegal j mele de bois , de plaines &c de montagnes ; mais en general le pays eft affez bon , Sc produit du ris. Une chaine de montagnes , qni traverfe ITile du fud au nord , la partage en deux parties. Celle qui eft du cote de 1'orient, eft habitee par les naturels du pays , qui font encore fiuvages. Sa partie occidin-tale eft aujourd'hui habitee par pres de trente mil le Chinois , qui la cuitivent bien , & qui font du commerce. La principale ville de ilile eft Tkaio-yan j batie. dans une petite lile , longue d'environ deux lieues , & eloignee de celle de Formofe d'environ mille pas vers l'occident. Le Fon nomme ci-devant de Zelande j & que les Hollandois avoient fait batir , eft un peu plus eleve que la ville , 6c a fix baftions , avec le logis du Gouverneur & les magafins. La ville eft a une portee de mouiquet de cette for-rerefte , & peuplee de riches Marchands Chinois qui y portent des etoftes de foie & des porcelaines , en ćchange defquel-les ils recoiveor des Sauvages des epice-ries & des toiles de coton. Les Portugais font les premiers Euro- Les IJles Mariannc. 401 peens qui aienc eu dcs etabliifemens dans i'Mle Formofe. Us y avoient bati les forts de Farbrou } de Quilam & de Tam-fuy ; Sc i!s les ont pofledes jufqu'en 16) $, que les Hollando.s les chalTerentde touce 1'llle. Ces derniers eurent grand foin de faire valoir leurs etablillemens dans cette lile , qui leur founniToit des cuirs , des cornes de cerf, que les Japonois emploient dans leurs ouvrages. lis y firent meme travailler a une mine dor , qu'on avoit decouverte. Mais ils n'en profiterent pas long temps. Coxinga 5 fameux pirate Chi-nois , leur enleva , en 1661 , Thciovan & le fort de Zelande, & il les chafTa i leur tour de toute Pllle Formofe. lis firent, en 17I1 j une tentative , pout y rentrer , en faifant foulever le peuple j mais cette demarche n'eut aucun fucces. A R T I C L E IV. LES ISLES DES LARRONS > o u J>£ Mar ie-Anne. C^jEs Ifles, fituees dans l'Archipel S. Lazare , au fud efl du Japon , enrre les 1 z &z 20 degies de latitude feprentrionale , furenr decouvertes en 1520, par le fV metuc Magellan > dans le temps qu'il al- 40 i. Methode de Geographie. loit «mx Philippincs. II les nomma les JJlcs des Larrons j parce que les Infu-laires lui volerent quelques outils de fer. Philippe II , Roi d'Efpagne j fe les ap* propria , faris y faire d etablilfemens ; enfin , Marie-Anne d'Autriche , mere de Charle II , y envoya des Miffionaires Jćfuites en 1665 : ce qui leur a fait don-ner le nom de Marie-Anne. Ces Ifles ne font bien connues , que depuis que le P. Moralcs , Jefuite Efpagnol & Miflionai-re , en a donne le nom , la grandeur 6c Ia diftance. On en compte ordinaire-ment 14 > dont les noms , en allant du feptentrion au midi, font, Urac Maug, Tunas 011 les trois Rochcrs 3 Songfon au-trefois Y AJJomption j ou il y a un vblcan j Agrigan ou Arigan ; Pagan ou Pagon autrement S. Ignace j ou il y a pluhaurs volcans ; Amalagan ou la Conception ; Ouguan ou 6'. Philippe ; Sarigan ou S. Charles ; Anathaban ou S. Joachim ; Saipan ou S. Jofeph ; Tiniam ou Mari-Anna ; Bona vijla ; Aguignan ou S. Ange ; Rota; Sarpana ou Sainte-Anne, & Guaham ou S. Jean 3 qui produit de tres-bon cacao. Toutes ces Ifles font fort peti-tes , Sc ne valent pas gtand'chofe , non plus que les autres de 1'Archipel de S. Lazare , done on peut voir les noms fur le« Cartes. Les LJles Philippines, 4° j A R T I C L E V. LES LSLES PHILIPPINES> o u M a n i l e s. T iEs Orientaux les appeiient Ifles de Lu-con j du nom de la plus grande , qui porte aufli celui de Maniile; mais les Elpagnols les nomment Philippines , en conlidera-tion du Roi Philippe II , fous lequel ils en firent la conquete en 1564. Ferdinand Magellan, Portugaisde Nation , qui avoit quitte le fervice de fon Prince , fut le premier qui les decouvrit en 1520, fous les aufpices de 1'Empereur Charles - Quint , vers lequel il s'etoit retire , parce que le Roi de Portugal n'avoit pas voulu lui aug-menter fa paye d'un demi ducat par mois. Rui Lopez de Villalobos les reconnut en-fuite en 1541 ; mais ce fut pour le meme Empereur , &c non pour Philippe II, Roi d'Efpagne , comme l'a cru 1'Abbe Bau* drand , puifque ce Prince ne commenca a regner quen 1555. L'Abbe Baudrand ne fe trompe pas moins , quand il ajoute que Michel Lopez de Legafpe etablit les Efpagnols dans ces Ifles en 1546 : car il eft certain , qu'il n'y arriva qu'en 1^4, aprcs que ce Capitaine y eur ete envoyć 4©4 Mčthode de Gćographie. par Louis de Velafco , Viceroi du Mexi-qUe, qui vouloit s'afliirer de ces Ifles, afin de faciliter le commerce de la nouvelle Efpagne avec la Chine & le Japon. Les Philippines, que les Portugais appeiient ManilUs ^ du nom de celle qui en eft la principale , font au midi de la Chine & au nord des Moluoues , entre les 5 & 20 degres de latitude fepten-trionale. L'air y eft fort chaud , &c l'on y fent peu la ditference des faifons. Les pluyes y commencent a la fin de Mai, &C durent fans interruption , trois ou quatre mois j mais a cela pres il y pleut rare-ment. A l'ćgard du terroir , fi Ton en croit Thevenotj il sen faut bien qu'il foit aufli fercile que plufieurs Auteurs fe le font imagine. II n'y a ni bled , ni vin , ni olives , ni meme aucuns fruits de 1'Eu-rope j (i ce n'eft des oranges. On n'y trou-ve point non plus de mineš d'argent, & le pen que Ton y voit de ce metal, y a ete* apporrć du Mexique. Celles d'or fe trou-vent dans 1 lile de Manille ; mais elles ne fonr pas en grand nombre , & ne rendent pas beaucoup , non plus que le fable d'or de la riviere de Butuan dans llfle de Min-danao. La plus grande richelfe du pays conflfte dans les palmiers, qui y font en gtand nombre : il y a aufli du coton & beaucoup de cire , de miel & de fucre , cjui y eft a li boa marchć depuis que les Les LJIes Philippines. 40 f Efpagnols one bati des moulins pour en faire , que 1'on en a 15 livtes pour 20 fols. Cependant en 17 3 z , il fe forma t a Cadix une compagnie autorifee par le Roi Philippe V, cjui lm aceorda le privilege de commercer dans ces Ifles. Les Philippines fonr fort fujetes aux ouragans , & ont quantite de couleuvres d'une prodigieufe grandeur , de meme que beaucoup de betes feroces , qui obli-gent en plufieurs endroits les peuples de la campagne de demeurer fur des arbres. Les Infulaires font aflez fpitituels, bien faits , & meme alfez bianes pour leur climat: ils font aufli alfez traitables, &c aiment.plus le repos que la guerre. Le nombre des Ifles Philippines eft forrgrand. Quelques-uns le font monter a 1 100, &c dan t res a plus de 1200 j mais il y en a plufieurs fort petites, & quelques-unes meme inhabitees. Les plus conliderables font Lucon ou Manille ; Mindanao j Tan-daye ou Philippine ; P a rago ou Para-goya l Puloam ou Cala.mia.nes j Mindora t Panay j S. Jean ou Joura ; Capul j Lima' han ou Linhahan ; Masbat • Jl.14.yo : JVe-gros ou Negoas ; Cehu ou les Pintados ; MacarOj & Layta. Toutes ces Ifles etoient aurrefois aux Efpagnols j mais aujourd'hui Mindanao & S. Jean ont des Rois parti-culiers. I. L'Ifle de Lucon , ou de Manille , la« 40 G Mćthodc de Geographie. plus grande &c la principale de toutes , eft nommee par les Efpagnols nouvelle Caf-zille. Elle a quelques mineš dor , & eft iicuće vers le nord , a 100 lieues de la Chine. Son cireuic eft de 450 lieues j fa longueur du fud-eft au nord-oueft de 130, & fa largeur de l'oueft a 1'eft de 67. On la divife ordinairement en trois parties , ou audiences , qui font celles de Mani/le, de Pampanga &c de Reilocos. La ville de Ma-ridk j a rembouchure de 1'Araud dans le golfe de Cavite qui porte aufli le nom de Golfe de Manille, en eft la capitale. Elle eft nnediocrement gtande , mais bien batie , fort peuplee , & defendue par une bonne citadelle : fon port eft affez grand & fort frequente , quoique 1'entree en foit difficile a caufe des ifles tk roches de Mirabelles j qui font a 1'ouverture de fon golfe. Manille a ete batie par les Efpagnols , qui y onr un Viceroi, un Arche-veque Sc un Confeil Souverain pour les Ifles Philippines , qui font tout ce qu'ils poffedent en Afie. Cavite 3 un peu au-deflbus de Manille, a un bon port. Cagaion . ou nouveile Segovie j avec un port & un Evcche fufFragant de Manille , vers le nord. Ca cere s ou Caceres de Camarinha 3 Ville & Eveche vers le fud-eft , & Porto Mandato 3 ou Mantado qui en eft proche, font d'autres places de cette Ifle. Quel-ques-uns y ajoutent une ville de Lucon fur Les Ijies Philippines. 407 la cocc occidentale vers le nord ; mais la plupart des Auteurs inodernes , fondes far les dernieres lelations , qui nen par-lent point, la croient fuppofee , quoi-qu'elle fe trouve en plufieurs Carces. IL L'Ifle de Mindanao j la plus meri-dionale , 8c la feconde en grandeur des Philippines , eft fort peuplee j & a du fable d'or dans la riviere de Butuan. Ses habitans font aujourd'hui tous idolatres , de meme que ceux de 1'Ifle de S. Jean , qui n'obeiflent plus aux Efpagnols. Ses principales villes font Mindanao ou Ta-bouc capitale , & la tefidence du Roi ou Sultan \ Sarogo j Caldero Dapito. Les Alfoures , ou Montagnards de 1'lfle de Mindanao , font independans du Sultan de ce nom , qui eft Mahometan. III. Tandaye y ou la Philippine propre 3 eft ainfi nommee , parce qu'elle fut de-couverte la premiere. EUe eft a 11 lieues de Manille vers le fud-eft, čc palfe pour la plus belle de toutes les Philippines. I V. Paragoya , qui eft pres de Borneo , a environ cent lieues du fud-oueft au nord-eft. „ V. Mindora , eft feparee de Tlfte de Manille par un dćtroit de 10 lieues de large , vers le fud-oueft. V I. Panay ou Panayotton 9 eft au fud-eft de Mindora , & la plus occidentale des Philippines. 40 8 Mechode de Ge'ographie. VII. L'IJle deS.J.can , a 1'eit de Min-danao, a le palTage de S. Clair entrelle & Tandaye. Elle n'a que trespcu d'habicans \ & n'eft- plus foumife aux Efpagnols. VIII. Capidj eft entre Mindora & Paragova. IX. Masbat j entre Paragova & Ten-dave. . X. Abuyo j au midi de la Philip-pine. XI. Neg fos j a Panay an nord-ouelr. XII. Cebu j nommee par les Efpagnols Los Pintados , a caufe que fes habitans avoient le vifage peint > quand ils la de-couvrirent , a Nombre de Jefus j ou Vlile-Jefus j ville Epifcopale , avec une for-terelfe & un pore aulli bon que frequenre. Son Eveque elt fuffragant de Manille. XIII. Macan j au fud-efl: d'Abuyo , a vu mourir le fameux Magellan , qui y fut tue en 15 io , 6c non en 1'Ifle de Cebu 1'an 1511 , comme M. Baudrand fe 1'eft imagine. Je n'alfure neanmoins que Magellan fur tue dans 1'Ifle de Maran , que ielon le fentiment le plus commun : car il y a des auteurs , qui pretendent qu'il mourut dans 1'llle de Lucon , dime flćche empoifohee > que lui rirerenr les Infulai-res , contre qui il combattoit. XIV. Leyta ou Layca j entre Cebu Sc Matan. Les Efpagnols polTedent eneore les Ifles les L/les Moluques. 40 y Baton t Bohol j & la Vsrde ; mais elles lbnt fi petices , Sc fi peu confiderables , quelles ne meritcnt pas la peine qu'oii en parle. Les nouvelles Philippines j qui fonr au fud-eft ne laififent pas cTetre aflez confidćrables , quoiqu'elles le foienr moins qne les Philippines. On ne les connoir. que par la relarion de quelques habicans , qui ont echoue dans les Ifles Efpagnoles. A R T I C L E VI. LES 1SLES MOLUQUES. C A R T E S. Nous en avons des Cartes donnees par Pierre Vander-Aa > aujji-bien que de touces les IJles quijuivent. T iE nom de Moluques ne fe donne pas feulemenc aux liles de Pernate, deTldor3 de Motir j de Machiani, & de Bachian ^ qu'on appelle Moluques propres \ mais aiiili a toutes les aucres , qui fonr entre celles de la Sonde , les Philippines, la Terre des Papous , Sc la Nouvelle Hol-lande. La ficuation de ces Ifles aux etrvi-rons de l'Eqmteur , fait que 1'air v eft ex-tremement chaud , les peuples fort noirs, Tome VIL S 41o Methode de Geographie. ik le cerroir peu fertile , fi ce n'eft cn ćpi-ceries & en ris. Les Moluques furent de-couvertes par Magellan en 15 zo , &c fou-mifes aux Efpagnols j qui les donnerent en engagement aux Portugais. Aujour-d'hui elles appartiennent prefque toutes aux Hollandois , qui en onr chafle ces der-niers, 6c qui y font tout le commerce. Ils vendent, mcme aux habirans du pays, les epiceries dont ils ont befoin , font maitres des fortereffes & des ports, & ont des Rois fous leur dependance. Ces Ifles font en trćs-grand nombre , &c fe peuvenc diftinguer en occidentales , en orientales & en meridionales. 1. MOLUOUES OCCIDENTALES. La plus grande & la plus confiderable de ces Ifles, eft celle de Celebes ou Macaf-far j qui a pres de 200 lieues du fud au nord, & 68 de loueft i l'eft. L'air y efl bon , le pays forc peuple , & la terre aflez fertile en ris , de meme qu'en cocos. Elle avoit, il n'y a pas long-tefnps, fix Royau-mes j mais aujourd'hui elle n'en conrient plus que deux : celai de Celebes vers le feptencrion , 6c celui de Macaflar vers le midi. Le Royaume de Celebes n'a rien de remarquab\e. Celui de Macafjar efl: beau-conp plus etendu , &: plus confiderable. Sa capitale, nommee aufii Macaffar, fituee. Les l/les MoIuques. 411 fur le detroit de meme nom, eft une ville mal bacie j mais force, fk avec un bon port. EUe appartient aujourd'hui aux Hol-landois, qui font rendue forc marchande., 8c qui ont le Roi de cec Etat ious leur de-pendance. Ce Roi eft encore aflez puif-fant, & fuit la Religion mahometane, de meme que fes fujets. Les autres villes font Bantachia , Cion Tabuco ; &c Iom-piindam j qui avec fa forterelfe appartient aux Hollandois. Les Ifles SaIayo ou Salayer, Cabona , &c Bouton ou Bacon > font au midi du Royaume de Macalfar ; mais elles font forc petices , & n ont rien de con/iderable. II. MOLUOUES ORJENTALES. LJle de Gilolo. Cette Ifle eft fituće fous l'Equateur & dans un air mal fain. La terre y produit aflTez de ris, & nourit des rortues d'une gtof-feur extraordinaire. Gilolo a 250 lieues de tour , & appartient, pour la plus gran-de partie, a un Roi de meme nom , qui eft tributaire des Hollandois. Le refte eft habite par des Sauvages , principalement vers le nord. Les villes de cette lile font Gilolo , capitale & rćfidence du Roi} Čutna j Maro &c Tolo. s ij 4H Methode de Geographie. IJles de Ternate de Tidor > de Motir , de Machian 3 & de Bachian j ou les vraies Moluaues. Ces Ifles j qu*on appelle les vraies Moluaues , font fort petites j mais elles rap-portent quantite d'ćpiceries aux Hollandois , qui en font aujourd'hui les maures t & ont oblige le Roi de Ternate de leur ceder fon lile pour une penfion de izop ecus. Ternatt, la principale des vraies Mg-luques , a les villes & forterelfes de Gani-malamme Sc de Malayo. H y avoit dans cette Ifle quantite de girofliers , que les Hollandois ont arraches , pour mieux vendre le girofle qu'ils recueillent a Am-boine. Tidor, qui avoit un Roi particulier; appartient aujourd'hui aux Hollandois , qui y ont fait batir la forteretfe de Ma~ rieco. Motir & Machian font au Roi de Ternate , fous la dependance neanmoins des Hollandois , qui polfedent entierement Bachian y la cinquieme Ifle des vraies Moluques. Motir , ou perit Timor , eft commandee par la forrerefle de Na£aw , que les Hollandois y. ont fait batir , de meme que celles de Taflafo & de Tabil-l(?la dans Machian. Les IJles Moluques. 41$ Bachian a une petite ville de meme nom. IJle de Ceram. C'eft la plus grande des Moluques orien-tales apres Gilolo. Elle a aufli beaucoup d epiceries , dont les Hollandois font tout le commtrce. Le Roi de cette lile eft leur tributaire, Se ils y ont quelques for-teteifes. Cumbeilo eft la principale ville de Ceram. Le Roi d u pays y fait fa reiiden-ce y mais les Hollandois occupent la forte-refte , qui commande la ville Se le port. , IJle d'Amhoine. An fud-oueft de la precedente , dont' elle n'eft feparee que par un petit trajet, a environ 14 lieues de tour, Se abonde en clous de girofles , dont les Hollandois , qui en font les mairres , tirent des fommes immenfes. Cette lile fut decou-verte en 1 5 15 , par Antonio Abro , Por-tugais , qui y fic eriger une colonne , pour marquer qu'il en prenoit pofleftion au nom du Roi de Portugal. Les Portugais la garderent jufqu'en 1603 , qu'ils en fu-renr chalfcs par Etienne Verhagen , Ami. ral Hollandois. Les Efpagnols nćanmoins la reprirent en 1610 , Se les Hollandois , a qui elle appartient aujourd'hui, ne s'y rctabiirent qu'en 16^6. Dcpuis ce temps-ia ils y ont fait batir les forts de Hicen Se S iij /j\4 Mćthode de Geographie. de LoWj&c ameliorer celili de la Viclo'ire 3 qui dćfendoic Amboina y la capitale de cette Ifle , & qui eft le mieux fortiiie des trois. Ce dernier eft toujouts muni de 60 pieces de canon , ĆV d'une garnifon de 600 hommes y de forte que ceft le meil-leur etabliflement que les Hollandois aient dans les Indes apres Batavia , dans 1'Ifle de Java. IJles de Banda. Ces Ifles, qu'on nom me Banda Nera3 Gunapi t Lantor 3 PaIoway , Pulorin 6c BaJJlngen , font fort proches les unes des autres , de meme que de celle de Ceram , qtfelles ont an feptentrion. EUes appar-riennent aux Hollandois , &c font fi rem-plies de mufcadiers , qu'a la referve d'un volcan de 1'Ifle de Gunapi ou Gumanapi, il n'y a pas un arpent de terre qui n'en foit couvert. Banda , la plus grande &c la plus confidćrable de toutes, n'eft qu'en-viron a vingt lieues de Ceram , & elle a trois lieues de long fur une de large. Les Hollandois en tirent une prodigieufe quan-tite de noix mufcades , aufli-bien que de macis, qui eft la line ecorce de ces noix. Us y ont fait batir quelques forts, de mame que dans 1'Ifle de Nera & dans celle de PaIoway. Les TJles de la Sonde. 41 -5 III. MOLUOVES MERJDIONALES. Les plus grandes font Timor, Ende ou "Flores , Terralta Sc Aru ; mais elles n'ont rien de remarquable. Les Hollandois ont une forterelfe dans Timor , qui eft la principale de ces lfles. A R T I C L E VIL tES ISLES DE LA SONDE. E s lfles tirent leur nom du fameux detroit, qui eft enrre 1'Ifle de Java Sc cel-le de Sumatra j comme ce derroit tire le /ien du Port de Bantam , qui y eft fitue, & qu'on appelle le Port de la ionde. Elles font fitućes aux environs de l'Eq.ua-teur, entre le 6e degrć de latitude fep-tentrionale , & le ioc degre de latitude meridionale. Elles font en aflez grand nombre j mais on en confidere principale-ment trois j favoir, Borneo , Sumatra Sc Java. I. VL/le de Borneo. Borneo , au feptentrion de Java , a lo-rient de Sumatra , au couchant des Mo-Iuques , Sc au fud-oueft des Philippines, paffe pour la plus grande Ifle de 1'Afie. S iv 4T 6 Me'thode de Geographie. Sa figure eft prefque ronde , čV 1'on dit eju'elle a fix cens lieues de tour j mais quelques Aureurs ne lui en donnenr cme quatre cens tour au plus. Sa fituarion fous ]'Equateur , faic que l'air y eft extteme-ment chaud, 6V que les peuples y font fort noirs. Le terroir y produit quantite de poivre , de myrobolans , Sc le meilleut camphre des Indes. II y a des mineš d os, de mcme que de diamans. L'on trouve aufli des diamans dans les tivreres de Lava Sc de Succadena, qui arrofent la par-tie meridionale de cetre lile. Borneo renferme plufieurs Royaumes , dont le plus connu, Sc que Ton croir le plus puiftant, eft celui qui porte le nom de Borneo. Les Hollandois y ont quelques places fur les cores, Sc font prefque tout le commerce de cette grande lfle , dont on ne connoit guere que les cotes oeci-denrales Sc meridionales. Ses principales vil les font Borneo , Benjarmajfen 3 Hor-mata 3 Lava , Landa 3 Succadano J Sam-bas j Marubo Sc Caburo. La ville de Borneo , au fond d'un petit golfe , Sc capitale du Royaume de meme jiom , eft une alTez grande ville , batie comme Venife dans un matais Sc fur pi-lotis. Son port eft vafte, commode , Sc alTez frequente. Les Hollandois y font ptefque tout le negoce , Sc y porrent du mercure, du verre, du cinabre , des toi- Les Jjles de ta Sonde. 4*7 les , des etorfes de laine , &c du fer-, qui y eft fort eftime; au lien de quoi ils recoi-vent beaucoup de camphre Sc de poivre. Le Roi de Borneo , Sc prefque tous les peuples qui font fur les cotes fuivent la Religion mahometane j mais ceux qui de-meurent dans Tinterieur du pays , font pai'ens Sc idolatres. Landa Sc Sambas ont dans leur voifinage des mineš de dia-mans. 11. Vljle de Sumatra. Cette Ide , la plus oecidentale de celles de la Sonde , en eft aufti la plus giande aprčs celle de Borneo , Sc l'une des plus confiderables de TAlle. Le detroir deMa-laca la fepare de la Prefqu'ifle orientale de 1'Inde vers le feptentrion j comme čelni de la Sonde la lepare de 1'lfle de Java vers le midi ou fud-eft. L'Equateur la coupe prefque par le milicu; ce qui fait que les ehaleurs y font fort grandes. L'air y eft aufli tres-mal fain pour les etran-gers , a caufe des lacs qm y font en afTez grand nombre. II y pleut depuis le com-mencement de Juin jufqu a la fin d'OćLo-bre, Sc pendant ce tems la les vents d'oueft y excitent des tourbillons Sc des orages, aufquels fuccedent tout-a-coup des cal-mes , durant lefquels le foleil aerire des vapeurs puantes qui caufent de grandes maladies. Le terroir de Sumatra eft tres* S v 41S Methode de Gdographle. fertile , & pouroic , s'il ćroit cultive ^ rapporter bcaucoup de grains \ mais on n'y feme que du ris & du millet. II y a quantice de bufles , de cerfs , de fangliers, de rigres, de rhinoceros , d elephans fau-vages, de chevaux , de porcs-epics , de eivetces & de finges. II y a aufli des mineš d'or j d'argent, d'etain , de fer & de cui-vre. Enfin on y trouve du miel, de la cire , du coron , des pierres precieufes, 6c quantitć d'epiceries , principalement du poivre , le plus eftime des Indes , apres-celui de Cochin fur la cote de Malabar. 11 y a dans le milieu de 1'Ifle une monta-gne 5 qui jetre des flames par intervale, & une fontaine , d'ou , a ce que Ton dit , coule incelfamment du baume. On y trouve aufti un arbre , qui a quel-que chofe de merveilleux : les Malais 1'ap-pellent Sigali 3 &c les Portugais Arbole trifte de dia ; c'eft-a-dire , 1'Arbre trifte du jour. Cet arbre poufle plulieurs bou-rons , dou il fort des bouquets compofes de cinq fleurs blanches comme la neige , & un peu plus grofles que la fleur d'oran-ge. Ces boutons s'ouvrent des que le fo-leil eft couche, čc les fleurs fe montrent route la nuit, jufqu'a ce que le retour du foleil les falfe tomber. Le foir cet arbre recommence a. ouvrir fes boutons, qui repandent une odeur fl forte & 11 agreable , que tout 1'air des environs en eft parfume. les lfles de la Sonde. 419 Sumatra n'eft pas feulement coniiderable par fa fertilire & fes richeffes , mais aufli par fa grandeur : elle s'etend principale-ment du fud eft au nord-oueft, du iixieme degre de latitude feptentrionale , jufquau foieme de latitude meridionale , &c a environ 300 lieues de long fur 70 de lar-ge , qui font enfemble un circuir denvi-ron 600 lieues. Les Hollandois y tien-nent quatre ou cinq forrercfles , & ont plus de pouvoir que les Rois du pays t qui nofent vendre leur poivre &z leur or a d'autres qu'a ces Republicains. Cette Ifle a , le long de fa cote , fix Royaumes , qui font Achem Andragiri 3 Jambi 3 Palim-bam Manincabo & Andrapoura. I. Le Royaume d1 Achem 3 le plus fep-tentrional de tous, en eft aufli le plus con-/iderable , puifqu'il comprend la moitie de 1'lfle. 11 etoit autrefois fujet de celut de Pedir ; mais aujourd'hui Pedir de meme que Pacem , dependent de lui. Achcm j fa capitale , avec un bon port fort frequente , principalement par les Hollandois , n'a proprement qu'une rue , mais qui eft fort longue. Les maifons y font baties fur pilotis, &z couvertes de feuilles de cocos. Le PalaisduRoi, qui eft au midi de la ville , a un bon fofle* Sz des remparts bien munis de canons. Ce Prince eft fort puiflant. En 1616 , il mit fur mer 60000 hommes fur 200 na- S v; 410 Methode de Geographie. vires & 60 galeres, pour faire la guerre aux Portugais , qui tenoient alors Mala-ca , & il les a chufTes du fort qu'ils te-noient a Pacem. Les autres villes du Royaume d'Achem font Pedir , Pacem 6c Deli vers 1'orient: Daya , Labo , Cin-tjuel j Barros y Bataham , Pajfiman , Ti' cou j Priaman 3c Padang vets 1'occident. Cette derniere eft aux Hollandois , qui y one lin fort. II. Le Royaume & Andragiri , a l'o-rient, eft fott petit , abonde en poivre fort menu , & a pour capitale Andragiri, ou l'or eft a meilleur marche qu'en aucun autre endroit de 1'lfle. Les Hollandois font les maitres de cette ville , & y ont un fort. III. Le Royaume de Jambi, plus ri-che que les cinq autres royaumes , fait un bon trafic de poivre & d'or, & a aufli fa capitale de meme nom. Cette ville eft aflez marchande , 6c les Hollandois y ont un comptoir. IV. Le Royaume de Palimbam , fltue au fud-eft de 1'lfle , a pour capitale Palim* bam j ville , avec un port tres-frćquente, ou les Hollandois ont aufli un comptoir. V- Le Royaume de Manincabo ou Me* nancabo > fait un bon commerce en or , & a fa capitale de meme nom fur la cote oecidentale. VL Le Royaume d'Andrapoura ou In- Les Ijles de la Sonde. ^Xt 'dapoura , porte le nom de fa capitale. Le refte de la cote de Sumatra jufqu'au detroit de la Sonde, eft inhabite j & il n'y a que des bois & des montagnes. La cote , qui eft fur ce detroit , obeifloit autrefois airRoide Bantan dans 1'lfle de Java j mais aujourd'hui elle dćpend des Hollandois. Tous les peuples de la cote de Sumatra font Malais , & parlent le meme langage que ceux de la Prefqu'ifle de Malaca; mais le dedans de 1'lfle eft habite par les naturels du pays, qui parlent une Iangue fort diffćrente. Ces derniers font gouver-nes par plufieurs petirs Rois , qui fe font fouvent la guerre les uns aux aurres. Celili qui habite entre Ticou & Manincabo, eft le plus puilfant & le plus riche j il a fous fa dependance la plus grande partie des lieux ou fe rencontre lor de cette Ifle, duquel les habitans fonr commerce avec ceux de Manincabo pour du ris , des ar-mes dc des toiles de coton 8c avec ceux de Priaman pour du poivre , du fel, de 1'acier , des toiles de Surate. Ces peuples ne traitent point avec les etrangers } & s'ils en peuvent attraper , ils les mafta-crent & les mangent. lis paroiftenr n'a-voir aucune religion ; feulement ils ob-fervent quelque police entr'eux touchant le mariage , la juftice & le devoir envers leur Roi. *4i i Methode de Geographie'. II y a aux environs de Sumatra pta-fieurs lfles, dont la plus grande Sc la feu-le confiderable , eft celle de Banca > vers lorienc. On trouve une ville de meme nom j qui eft aflez marchande , Sc les Hollandois y ont un comptoir. 111. VIJU de Java. C a r T E S. Adrien RelAND a donne une tres-bcltc Carte de 1'IJle de Java } en deux feuil-les j gravee par Gerard Van-Keu-LEN. Pierre Vander-Aa en a publie une autre avec la rade de Batavia 3 & le Plan de cette ville. L'Ifle de Java eft la moins grande , & la plus meridionale des trois principales lfles de la Sonde. On lui donne cepen-dant pres de 110 lieues du couchant an levant j 40 du fud au nord , & 460 de circuit. L'air y eft fort chaud, a caufe de fa lituation entre le 6e &c le 9* degre de latitude meridionale, & les etrangers le trouvent fort mal fain. Le terroir y eft affez fertile en ris, en fucre , en betail, Sc en poivre , qu'on eftime fort. On y ttouve aufli des bois , des rivieres, des fontaines, des mineš d'or, d'argent Sc de cuivre , des diamans , des rubis & de tres-belles emeraudes. Les buitres qu'on Les JJles de Id Sonde* y trouve iont d'une gtofleur prodigieufe \ on en a vu qui pefoient jufqua 300 li-vres. Ce quil y a d'incommode dans 1'lfle de Java } ourre le mauvais air, font les ferpens & les moucherons ou coufins j le pays en eft rempli, & ces infećbes n'y font pas moins grands que venimeux. Cette lile etoit autrefois partagee entre divers fouverains • mais aujourd'hui elle n'en a que deux , les Hollandois 8c i'Em-pereur de Mataran ou Materan. Les pre-miers y font les plus puiflans, &z polfe-dent deux des meilleurcs places de ce Prince, qu'ils tiennent par ce moyen dans leur dependance. Ce font Japara Sc Chc-riban ou Cheribon , que cet Empereur leur remit il y a quelqnes annees , a canfe qu'ils lui avoie^t donne du fecours con-tre fes deux frefes , qui lui difputoient 1'empire. Les Hollandois fe font rendus maitres en quelque forte de la ville & d« Royaume de Bantam ; ce qui a extreme-ment augmentć leur commerce & leur puiflance dans 1'lfle de Java. Leur principal etabliflement dans cette Ifle eft Batavia , autrefois Jacatra , a 1 5 ou 10 lieues de Bantam , qu'elle a au cou-chant. Cette ville eft mediocrement grande ; mais belle , proprc , riche , bien peu-plee , batie a 1'Europeenne , & le centre du commerce de la Compagnie Hollan-dpife des Indes Orientales. Elle eft aufli. ^ i 4 Me t h ode de G iographit* bien forrtfiee, & dćfendue par une bonnfi citadelle a quatre baftions , aufquels les Hollandois ont donnć des noms de pier-res precieufes , du diamant, du rubis , da faph r & de la perle , en memoire des marchandifes avec lefquelles ils y avoient auparavanr bati un fort, on plutoc un re-rranchement. Pour bien entendre ceci , il fant favoir que les Hollandois avoient, depuis 1'an 1617 , un magafin a Jacatra, &c qu'ils y faifoient un commerce fi con-fidćrabie , que les Infulaires en eurent quelque lorte de jalouiie. Les Anglois fe fervant de cette conjoncmre , perfuade-rent a ceux-ci de faire la guerre aux pre-miers , tk ils leurs donnerent meme du fecours. Les Hollandois furent attaques fur la fin de 1 cT i S j &c comme ils etoient fort a decouvert, ils fe firent un retran-chement avec des balocs de marchandifes j par le moycn defquels ils fe defendi-rent jufqu'au mois de Mars fuivant, que leur General Koen, qui revenoit des Mo-luques , non-feulement les degagea , mais prit & ruina Jacatra, dont Batavia a ptis la place. - Cette ville eft peuplee de plulieurs for-tes de nations , de Malais & de Maures, 1 de Chinois , & aurres , qni payent un tri-but par tete pour y trafiquer librement. Mais en 1741 les Chinois y excitetent pn foulevement contre les Hollandois , Les IJles de la Sonde. '42.5 que 1'on eut beaucoup de peine a calmefy Son port eft bon 8c le plus frequenre de toute Tlfle, depuis que les Hollandois y ont transfere prefque tom le commerce de Bantam , dont ils fe font rendus mai-tres. La Compagnie des Indes y envoie de Hollande tous les ans dix ou douze vaiiTeaux charges de marchandifes de PEurope propres pour les lndiens , 5c il en revient un pareil nombre avec de 1'or, de 1'argent, des diamans, des perles, de l'ivoire , du cuivre rouge , du thć s des porcelaines , du poivte , de la mufcade > de la canelle, du gingembre , du girofle, des foies , du coton , des etorfes de routes fortes , & quantite d'auttes marchandifes & de denrees de tous les endroits de V A fie , & fur lefquelles la Compagnie eft afluree de faire un gain confiderable. Cette Compagnie a dans les Indes fix Gouvernemens genćraux , qui dependent du Confeil fouverain qui eft a Baravia , capitale de tous les Pays qu'elle y poftede. Ces Gouvernemens font ceux de la cote deCoromandel, d'Amboine,de Banda, de Ternate , de Ceylan &c de Malaca. Outre ces iixGouvernemensgeneraux, les Hollandois en ont enccre de particuliers , dont les Gouverneurs s'appellent Commandeurs : comme ceux du Cap de Bonne Efpćrance, a la pointe mćridionale de l'Afrique; de Macalfar dans l'Ifle Cćlebes j de Padan 4*■ 6 Methode de Geograph le. dans 1'Ifle de Sumatra; de Motir, Pun«-des pctites Moluques j d'Andragiri dans Tlfle de Sumatra, de Cochin &c de plu-ileurs lieux fur la cote de Malabar. Ils ont aufli des comptoirs en divers endroirs, comme a Ifpaham , & a Gomron ou Ben-der Abafli, en Perfe; a Surate , a Agra > a Amadabat, & a Ougli dans 1'Etat du Grand Mogol j a Palimbam Sc a Jambi dans Tlfle de Sumatra j a Siam & a Li-gor, dans le Rovaume de Siam j au Tun-quin &c au Japon. Tous ces Gouvernemens & tous ces Comptoirs relTortilTent au Confeil fouve-rain de Batavia , & rien ne fe fait quc par fes ordres. Ce Confeil eft compofe du General , qui ne fait qu'ordonner , & ne rend point de compte j du I?irećteur general , qui fait executer les ordres du General , mais qui rend compte; de fix Con-feillers ordinaires , & de quelques Con-feillers extraordinaires, dont le nombre depend de la Compagnie , qui refide tou-jotrrs en Europe. Ses principaux Gouver-neurs demeurent en Hollande, & recoi-vent avec foumillion les ordres des Etats Generaux des Provinces-Unies, pendant qu'ils exercent une Souverainete abfolue dans les Indes , & y comptent plufieurs Rois au nombre de leurs valTaux & de leurs tributaires. Bantam j autrefois la principale ville Les IJlcs de la Sonde. 4*7 de Java, & la capitale d'un Royaume de meme nom , eft fituee fur le detroit de la Sonde, & a un tres-bon pore j mais qui neft plus li frequente , depuis que les Hollandois s'en fone rendus les mairres 9 & en ont transfere prefque tout le com-merce a Batavia. La revolte du fils du Roi de Bantam contte fon pere , donna lieu a cette conquete. Les Anglois foute-noient ce dernier, mais les Hollandois , qui appuyoient le fils , defirenr le pere , & le mirent en prifon 1'an 1680. Le gain de la bataille ne futpas fi avantageux aufils qu a ces derniers , qui font reftes comme les mairres de ce Royaume 3 & ils one pres de Bantam une forterefle confidera* ble. Japara Sc Cheribon , ou Cheribam 3 ont he cedees aux Hollandois par 1'Empereur de Mataran. Ce Prince eft alfez puilTant, &c polfede la plus grande partie de Java. Sa capitale eft Mataran ou Materan af-fez bohne ville , avec un port alTez fre-quente fur la cote meridionale de flfle. Tuban j Jortan & Palambuan ou Bo-iambuam, fur un detroit qui porte fon nom, fone aufli trois bons ports appartenans i ce Prince. '4 i S Methode de Geographič. A R T I C L £ VIII. VISLE DE CEYLAN ou CETLON. C a h. t e s. M. delisle a donne en unc fcuille une jort bonne Carte de 1'IJle de Ceylan. Mais it faut aujji confulter la Carte de T Inde de M. d'Ahville. JLj'Isle de Ceylan ou Ceylon , eft /ituee au fud-fud eft de laPrefqu'lfle occidenrale de 1'Inde. Elle eft inconteftablement laTa* probane des anciens : quelques-uns memc pretendent qu'elle eft TOphir done parle Salomon. Son air, le plus pur & le plusfain de toutes les Indes , fa beaute &c fa fer-tilite , 1'ont fait appeller Tenarefin , qui en langue du pays veuc dire Terre de delices. Sa canelle eft la meilleure du monde : fes fruics , fes fleurs & fes plantes ont une odeur tres-agreable j ennn on y trouve toutes fortesde drogues , avecdeTor, des pierres precieufes, qui font les rubis, les faphirs & les topafes. Ses elephans font tres-dociles, & les plus eftimes des Indes , quoique les moins gros. Les naturels de Ceylan font noirs &c *nal faks j mais fort difpos, & les meiU L'IJle de Ceylan. 41 J Jeurs Salrimbanqu.es de toure l'Afie. On les nomme Singalas ou Chingulals. La Partie feptenrrionale de 1'Ifle , qui eft plate & moins habitee , eft occupee par une nation iflue des Malabares du conrinent voifin. Une montagne tres remarquable dans TIfle de Ccylan 3, & qu'on regarde comme la plus haute de toutes celles des Indes , eft le Pic d'Adam. Les gens du pays la nomment ainli, a caufe d'une tra-dirion trčs-ancienne , qui porte qu'Adam fut cree fur cette montagne , & qu'il y fut enfeveli, ou que de-la il fut enleve au ciel. Ils pretendent meme faire vok 1'emprefnte de fon pied » marquee fur le fommet de la montagne. L'lfle de Ceylan a 95 lieues du fud au nord ; 50 de l'oueft a. l'eft , & environ x 50 de circuit. On n'ignore point que les Hollandois ont enleve aux Portugais , Jes etablilfemens qu'ils y avoient formes les premiers. Pont fe conferver , exclu-fivemenr a route autre nation de TEn-rope , les richefles particulieres a cette Ifle, &c fur touc le commerce de la car nelle , ils. ont occupe par difFerentes places, ou par des forrs ou lieux retran-ches , les endroits de la eote 011 ils pou-yoienr apprćhender qu'on vin; aborder &c setablir. Cette Ifle etoit autrefois partagee en neuf Royauines. Celui de Cotta etoit 4$ o Methode dc Gćographie. confidćrable , en ce qu'il renfermoit le canton du fud-oueft , ou font les canel-liers, 6c qtie les Hollandois appellent, pour cette raifon , Canel-land. Quelques veftiges de la capitale nom-mee aufli Cona , fubliftent a une petite, diftance de Colombo > la principale des places de la cote. Aujourd'hui on ne con-noit en Ceylan , qu'un Royaume , lequel confifte principalement dans ce qu'on ap-pelle Candi-uda 3 ou le hautpays , qui eft au milieu de l'lfle. Ce Roi de Candi en-ferme par les Hollandois, forma il y a quelques annees le deflein de les chafler de l'lfle de Ceylan 9 &c il etoit pres d'y reuflir. Mais en 1766 les Hollandeois ont enfin force le Roi de Candi d'abandonner la fouverainete de l'lfle aux Etats , & de foufcrire aux conditions qui lui ont ete prefcrites. Les principales villes du dedans du pays , font : Candi , Digligi-Neur, Nel-Umbi-Ncur , &c Allont-Ncur. Les places maritimes les plus conflde-rables qui appartiennent aux Hollandois, font, fur la cote occidentale : Colombo j bonne forterefle ou demeure le Gouver-neur pour la Compagnie des Indes Hol-landoifes. Les Etats Generaux l'enleverent aux Portugais en 1606. Negombo , petite ville, avec un port & une bonne forterefle. Chilao j qui donne fon nom a un VIJlc de Ceylan. 4$ i detroit , eft une forterefle. Porto-Gallo , pore &c bonne forterefle. Les Places de la cote orientale de Cey-lan pofledees par les Hollandois, font , Trinauilimale 4 ville aflez confidćrable , d'ou Ton apporte la meilleure canelle : Bantacalo, mal nommće par quelques-uns Baticola- Mature, qui a un affez bon port. Enfin les Hollandois poffedent a la pointe feptentrionale de l'lfle 3 Jafanapa-tan j bonne forterefle. Pres de 1'Ifle de Ceylan eft celic de Manar j, qui n'en eft feparće que par un petit detroit qui porte fon nom : elle n'eft renommee que par la peche des perles , qui fe fait aux environs. A 1'orient de 1'Ifle de Ceylan, vers les cotes de la Prefqu'ifle orientale de 1'Inde, font les Iiles de Nicobar & des Anda-mans j qui n'ont rien de remarquable. 11 fufrit de les avoir nommees. *f* 4» 43 i Methode de Geographie. A R T I C L E IX. LES ISLES MALDLFES. Ces Ifles font fitućes au fudoueft de la Prefqu'ifle occidentale de 1'Inde , entre le quatrieme degre de latitude mćridionale, & le huiticme de latitude feptentrionale. Leut nom eft compofe des deux mots y Male Sc Dive j le premier eft le nom que porte la principale Ifle : le mot Dive s iignifie IJle. Les Portugais qui les decou-vrirent 1'an 1507, pretendent qu'il y en a 11000 \ d'autres en font montet le nomhre jufqu'a 11000 : je ne voudrois garantir ni l'un ni Pautre. Ce qu'il y a de plus certain, eft que cet Archipel eft un amas d'Ifles ii confus , qu on prend fou-vent un roc ou un bane de fable pour une Ifla. La fituation de ces Ifles fait ime ef-pece de ligne droite du fud-eft au nord-oueft , laquelle n'a pas tout-a-fait vingt lieues de largeur > & meme la principale Ifle de ce corps nommee Male } eft i! petite qu'elle n'a pas une lieue de tour. Ces Ifles font toutes entrecoupees de banes de fables , & environees de rochers , qui en rendent Tabord fort difricile : mais la Providence y a fait quatre ports , ou Les IJles Maldives. 4 J 3 plur6tquatre ouvertures, vis-a-vis lesunes des autres , aux ifliies de chaque Atollon ou quarticr de ces Ifles , afin que les ha-birans puffent avoir communication les uns avec les autres. Sans cela les vaifTeamc feroient emportes par les courans de la mer a plus de fept a huit cens lieues dela. Ces courans vont fix mois vers 1'eft &c autant vers l'oueft j que!quefois plus , quelquefois moins. L'air des Maldives eft fort mal-fain , principalement pour les etrangers , a caufe des fievres mali-gnes qui y regnent, & qui les empor-tenc en rres-peu de temps. Pour ce qui eft de la qualite du rerroir , ces Ifles ne rapportent ni bled, ni ris j mais feule-ment du miel, desgrenades, des citrons, des oranges &z des cocos. Ce dernier fruit eft d'un grand fecours aux Infulaires. Voici les proprietćs de l'arbre $c de fon fruit, telles qu'on les rap-porte. i. La noix de cocos toute fraiche donne uh fuc qui fert de boiffon. i. Quand on laiffe murir les noix , il sy forme une amande , dont on fait du pain. 3. Cetre amande donne une forte de lait dans lequel on cuit toutes fortes de vian-des. 4. On tire de cette mcme amande une huile , quifert a divers ufages. 5. Le fuc ou la feve de l'arbre , fournit une liqueur excellente qu'on nomme Sura, 6. Avec ce fura on fait du vin , de l'eau-de-vie , Tome VIL T 4 J 4 Mćthode de Geographie. & mcmedu vinaigte. 7. La coque intć-rieure de lajnoix , lorfqu'elle eft mure , fert a faire de petits vafes , &z autres pe-tits ouvrages. 8. L ecorce exterieure de de la noix fert a faire des cordages &c de groffes toiles. 9. Onfe fert aufti de cette ecorce au lieu d etoupes pour calfater les vaifTeaux. 10. Le bois de l'arbre eft ex-cellent pour la batifte des maifons & des vailTeaux. 11. Avec les'feuilles de cet ar-bre on fait aufti des voiles pour les vaif-feaux. 11. On fe fert de ces memes feuil-les pour couvrir les maifons. 13. La petite ecorce interieure de l'arbre fe file aulli delicatement que du lin. 14. La močile de 1'atbre fert aux habitans pour en faire du papier. On voit par-la que cet arbre fournit roures les neceflites de la vie ; &: la Providence qui n'a pas accorde au terrein de ces llles la faculte de produire du bled, du ris ou du millet, y a fup-pleć par cet arbre merveilleux. U j a aufti dans ces Ifles des coquilles blanches, que la nature a Ci bien formćes , qu'elles paifent pour monnoie en plufieurs endroits de la terre ferme de 1'Inde. On ytrouve enfin du corail noir , de 1'ambre gris , & des tortues qui fourniftent les plus belles ecailles des Indes. On dit qu'il y en a de fi grandes , qu'elles pou-roient contenir dix ou douze perfonnes afTifes j mais elles ne font pas fi eftimees Les LJIes Maldives. 43 y cjue celles qui n'ont que trois ou quatre pieds de diamectre , &c qui tirenc far le noir & fur le rouge; ces dernieres font fort ćclatantes , & li bien faconnees qu'el-les font recherchćes de tous les grandj Seigneuts des Indes. On n'en trouve que dans ces Ifles & dans les PMlippines. Les Maldives dependent d'un Roi , qui vient par fucceffion a la courcmne ; bc le droitd'y fucceder appartient aux ma-lesa Tesclufiondes filles. Ce Prince prend la qualite de Sultan Roi de treize Provin-ces , & de 12000 Ifles ; mais fon reve-nu ne repond pas a. ce titre , puifqu'il ne confifte que dans la cinquieme partie des fruits de £bn Royaume , &c dans la confifcarion des vaifTeaux , qui font nau-frage fur les cores. Ainfi on peat dire que pour un Roi de 12000 Ifles, il neft ni fort puiflant, ni fore riche. II eft Ma-hometan , de meme que fes fujets. v Les Ifles Maldives fe diftinguent en treize parties principales , quon appelle Atollons : douze grands detroits divifent un Atollon daveč 1'autre ; &c les Ifles font feparćes par des petits canaux , ou la mer eft fort bafTe. Les detroits font fi remplis de crocodiles , qu'il n'y a pas de furete a s'y baigner ; & pour ce qui eft des ca-naux , il font fort dangereux , excepte ceux de Malos-Madou , d'Adott &c de T ij 4 3 6 Methode de Geograpkie. Souadou , qui font un peu plus naviga-bles , &c furtout ce dernier qui eft latge de vingt lieues. Les noms des Atollons des Maldives font, en allant du nord-oueft au fud-eft , i. Tilladou-Matis ou Matos : 2. Milladoue-Madoue; 3. Padipo-la ; 4. Malos- Madou • 5. Ari-Atollon ; 6. Male- Atollon ou elt Male , capitale des Maldives &€ la reiidence du Roi*, 7. Poulifdou : Moluque ; 8. Nilla-doux \ 9. Collomadoux : 10. Adoumatis ; 11. Souadou j 12. Addou , &c 1 3. Poue-Molu-que> qui ne font tous deux qu'un Atollon, Les Illes qui font autout des Maldives font fore petites , & n'ont rien de confi-derable. TABLE ALPHABETIQUE Des Villes, Provinces, IJles, Lacs , Rivieres 3 &c. dont il eft fait men-tion dans ce K?lume. A Agcloun, 141,147 AAghvans, 30 3 Bacan j fc/v. 1^8 Agi, riv. 305- Abakansk , 113 AgiosOros,v. Athos. Abalac , 213 Aglafun, 103 Abafas, v. Abcaffes. Agra, 318 Abazk , 21} Agrigan, Ijlc , 401 Abcaffcs, 14J Aguigau .i/.7*, 401 Abel, 140 Agiifta, //?<-, 17 Abfa , I/le , Ahavcas, v. Ehavas. Abuyo , 408 Ahkaf, 27; Acbara, 155 Aias , 110 Acliem , 419 Aiafaloue , iof Achmerzeri , 7 Aidin-ili , 104 Achtcmar, 163 Ailah , 177 Acqueis, 384 Ainrab, 115, no, 118 Acre , 137 Ainzcrbch, 120 Aćtium , <5i Aiomama, y8 Adam, 110 Ajuka, 254 Afleu , 283 , 284 Akallikć , i«j , 171 Addon , 436 Akcrman, 11 Adcrbigian , 30; Akhas Kali , v. Adgloun , v. Agcloun. Akalfikć. Adoumans , 436 Akhiilar, 106 Adrcat , 141 Akkar , ijtf pihana., . 24^ Aklat, 16$ Tiij 4<8 T A B Akfcrai , "7 Akshcher, n6 Alahfcheher , icj Alains , 170 Alanes, 14; Alanich,,, 122 Alatyr, 185 Alauta , 1 3 Albanie , 60 Albanopofi , 60 Aldan, rtv, 200 Aicp, 127,1 tj? &yi«'v. Akfio, 60 Alcxandrcttc , v. Scan- dcrona. Algezira, 150 Algiar , 289 Allonr-Neur, 430 Almali , 104 Almanfura, 301 Almilfa ., 16 Alcai, Mont. 101, 2j4 Altimsk , 216 Akin, Lac, 197 Amacufa Jfie. 3 9 5 Amadabath , • jzi Amalagan, 402 Amanager , v. Anda- nasrcr. o Amanguci , 392 Amarant, v. Marant. Amafieh., lil Amasrch, 109 Amboine , I/le, 41 3 Amcdipore, 319 Amman , *47 Amu , v. Giaou. Amul, 304 Amur , r/v# 10» L E Anadirsk, j^j, Anadoli, i0-Anah, rji Anathaban, Ile, 401 Anazarb, v. Ainzerbch. 15* Aubar , -^^ idamans, Ijles > 43 r idaeancr. 11-7 Aru... Anda Angara , riv. 200 Angouri , v. An karah. Anian ( Dćtroic d* ) 80 Aniva , Ankarah , Antakia 3l7 420 420 *45 S5 69 I 22 I 70 3 37 200 iali , AmhaK„ Antivari, Aqui , A raba, Arabat, Arabkir , Arabie , 272 tree x 276. ferte t 278. reufi, Aracan * Arakkmdiah Aral, Lac , Arbe, Iflc, Arcadia , Arcatc , Aichipel, io 384 i0<» 1 2,8 ioj 60 M* 302 7 nj -Pe- ■Heu-28« 341 83,148 16 *5 333 ALPHABETIQUE. 439 Ardanoudji, 164 Ava, 340 Ardevil , J06 Ava,Royaume, 39? Ared, v. Aroudh. Avabazari, 1 x% Argifch , 13 Avarcha , 135 Argish , v. Va.nyLac. Avra, • 395 Argo, 64 Awares, 247 Argun,r/'v. 26Ć Axiopoli , 27 Argunsk , 230 Azo , 340 Ari-Atollon, 43 6 Azra , v. Adrcat. Arigan , v. Agrigan. Armenie Turquc , v. B Turcomanie. -r\ Arnaut, v. Albanie. JD aaibik , 140 Aroudh, 27 f Bab-cl-Mandcb , Detr. Arfuf, 146 80 Arta , v. Lana. Rabil, 1 $6 Arraki , 94 Ba^aim , 331 Artikabad, m Bacar, 322 Aru j Ijle, 41 y Baccafarai, 7 Arzroum , 164 Bachian , l/le , 412, Asbcft , M, 106 413 Afem , 339 Bacićfarai, v. Baccafa- Afie , 76 rai. Afiom-Karahifar , 103 Baćtriani , 176 Askalon, 146 BaiFo, 114,12; Afrncre, 320 Bagd-Vanlu, ijj Afperofa , 29 Bagdat, 174 Aflalt, v. Salc. Bagnagar , jji A/fenebad, ij8 Bagnala, 31* AfTomption ,(!')//*, Bagnaluc , 19 v. Songfon. Bagras, 128 Aftara, 304 Bahr-cl-Houlei, 148 Aftrabad, v.Eftarabath. Bahrain , 278, lftes % Aftrakan, 177, 179 *79 Athos , M. 58 Baiazid , 1*3 Atincs, v. Sctiues. Baibourdi , 164 Attcck , 319 Baikal, Lac , 83, 19Ć Audimo, 124 Baindcr , 104 Aareng-Abad, 31; Baku, 307 Tiv 44o TABLE Balagansk, 118 Batavia , Balagatc , 326 Baticala, ^7 Balambuan , v. Palaui- Bacicola , v. Banta- Imuh. calo. Balck , 148 Batiich, 2.7 c Baiikesri, 106 Baton, I/le t ^09 Ebltiftan, %6o Batoum , u4 Baluclava, 8 Bccfabath , 303 Bana, Ifj Beder , Jl6 Banaz , 102 Bednour , jj7 Banca , J/fe, 411 Beirout , ij^ Banda, 350 Bcifan , j47 Banda, //te, 414 Bcishar , ,12, Bander-Congo, v. Con- Beisheri, 116 gue. Bcit-uI-Fakih , 188 Bandcr-Rick, 300 Beiui-Mucades, v. Je- Bando, 310 rufalcm. Banias, 140 Bclcd , 133 Bankifch, 321 Bclgrade , 2.3 Bankok , 347 Belnias, 13$ Bannara, 324 Belvcdcrc, g> Bantacalo, 431 Bendcmier, 301 Bantachia , 411 Bendcr, ri Eanram , 413 Bender-Abaffi, v. Gom- Barabinsk, 201 rora. Barabu , Defert j 222 Bengale , *i% Baranrola * 160 Benjarmaflen, 416 Bare k , 20 Berar , 32.6 Bargufinsk, 130 Bcrcdgik, v. El-Bir. Baroche, 321 Berczousk , 2.17 Barros , 420 Bcrgamah , 1Q£ Bafargic , Bcrgamaska, z 14 Bafilico, 64 Bermafir, 20I Bafireh , 112 Beroutfali , 107 Baskirs , 182 Belini , 2.4^ Basrah , IJ7 BefTarabie, g Baflingen, Ijle, 414 Beltan , 30^ Bailbra, v. Basrah. Becclfague, 288 Bacahani, 420 Bethlchem, a^ ALPHAB ETiQi/Ž\ 44* Betlis, v. Bidlis. Bradi, it, Bialogorod, 11 Brampour, $z6 Bidlis, 163 Brafla, Ijle, _ 17 Bicla-Kouskoi, z 10 Bratsk , zz6 BieJojarsk, ziz Brazzo di Maina, 64 Uieloyer, 185 Bri-kem 3 riv. 199 Biga, 94 Buchorefch , 13 Biliacz, v. "Wihitz. Budoa, T 6 Bijar , 305 Budziac, 10 Bikaner, jzz Bukhares, z$j Bikatunsk , zzz Bukharic (grande, Z48, Bilzicr, ,-petke, Zfč Bingo , 392 Bukor, 31$ Bifantagan, 321, Bulgar, 184 Bifnagar, 331, 333 Bulgarie, 16 Bitinia , 141 Bungo , 394 Bocca-di-Lupo , $9 Bura , riv. 11? Bodego, 348 Burates j z03 , zzy Bogdois, 164 Burfa, v. Bcrouflaiu Bogorodsk , zzi Burut , v. Beirout. Bohol, IJlet 409 Buft, 30Z Boinac , Z43 Butrinco , 61 Bokara, 149 Bydon , v. Widdin. Boli y 108 Bynkowkoi, 206 Bolzaia-Rckkoi, 154 Bomba in , 331 C Bonavilta , Ijle , 40Z f~i Bordelong, 343 abarda , z4j Borneo , l/le , 41 $ , 41 6 Cabardiniens, 144 Bofna , riv. 18 Cabona, Ijle, 411 Bofna-Seraio , 19 , 20 Cabul, 31; Bofnie, 18 Caburo. 416" Bo fra, 141 Caccres, 406 Boft, v. Buft. Caffa, t Boudroun, 104 Cagaion , 40Č Bom, iič Cai-Fong, 373 Boiiran, v. Tibet. Cai-Hoa , 179 Bouton , , 411 Caket, i7i Bouzok, 111 Calanuta, * 3» 64 r v 44* T A Calamianes , Ijle , v. Puloam. Caldcro > 407 Calicoulan, 337 Calicut , J 37 Callamaika , 322 Calmaquic, 1?; Calmoucks , 233 Caloni , 71 &ambayc , 3 20 Ca;nbodia »aCambogc, 347 Camul, v. Hami. Cananor, 337 Canara *. 337 Candahar, 303 Candi-uda, 430 Candic , Ijle , 6i , 69 Candish , 1%6 Canec ( la ) , €9 ■Canel-land , 4J0 Cangan ou Cangoa * 37* Canton, 376 Cao-Tcheou, 37* Cap d'Euiocn , 384 Capdc Paticncc, 3-84 Capul , Ijle „ 408 Capurdemo > .55 Cara-Vcria , y8 Caramanie, ir5 Cardhuel , 173 Carcfem, v. Kefem. Carewo - Kokfchaisk , i%6 Carmcl 3.A£ 147 Carnate, , 3 31 Carpaflb , 114 Carthucl ,v. Car dira;!. B L £ Carthucli, i. Cherden. Cinquel, 420 Chcn-fi, 374 Cion, 411 Cherden , Cap , 10 j Circalfes Noirs , 24; Cherefoul , v. Shere- Circaffie, 142 zour. Cizik , 94 Cheriban, 423 elementi, 60 ChcvCo, Ijle t 16 Clinovo , 17 Chiampa, Jjo ClifTa , itf Chiarcnza, 6} Cobi, Defert, xt7 Chifir, v. Segcr. Cocci, 60 Chilao, 430 Cochin, 337 Cjbimera , 60 Cochinchinc, 349 Chine , 3 5 1 Cogni, v. Konieh. Chingron , v. Tchin- Colombo, 430 Ton. Colouri, I/le, 69 Chinyang, ič>" CoIlomadoux, 436 Chio, I/le , 71 Comenolitari , v. Ma-Chiourli, 3 J cedoinc. Chioutayć,v. Kutaieh. Comonava^ J> T v j 444 TABLE Conccption ( I.i ), Ijle , Ctcfiphon, t;4 v. Amalagao. Cuadag; , 348 Cond.ipoli , 33* Cualay , 348 C ondavera, 3?^ C uma, 411 Condoma , riv. 198 CumbclIo> 4' 3 Congue , 301 Curzola, Ijle , 16 Conftance, Cuza, Ifle . 17 Conftanrinople, 29 6* Cvampa , v. Ghiampa. tfuiv. Czarirzin > 1 80 CotitciTe , 58 Czcmenc 3 Copvi7a, iS Czerneft , 13 Coranto , H Czcrnoviccz, 13 Corbavia, Czukau, i* Corće , 380 Corloti, Ijle , 66 D. Corgang , v. Urgens. D abul, Coromandel , 333 331 Coromoria, 34* Daca , 313 Coron j *3 Dafar, 281, Dagcftan , Dalai , v. Coulon. 284 Coronata , Ijle , *7 242 Cos 3 Ijle, 71 Cofmi , 341 Dalmatic , 15 ĆV fuiv. Cocan, v. Choten Dalmarov/ , no Cotatis , 171 Daman, 321 ,331 Cocra , Coulan a Coulon , Lac, 430 Damar , 184 337 Damas , 139 270 Dambroviza , »3 Coulour , 33* Damiansk , 116 Courahan-Oulcn, Lac, Dankalcr y 322: 171 Daourie, 166 Cranganor, Cntovo, 2} 337 Dapito, 407 > 1S Daya , 420 Crcmes , 6 Debil, 301 Crime, 6 Dćcan , 326 Crimćc, 6 De^nizlu , 1.-2 Croatic, 13,14 , »J Dtir-el-£:rnar, 138 Croia , Crofoco, 60 Deli, 420 124 Dclly , 1*7 Crotzka, 14 Deme.nade % 59 ALPHABETIQUE. w Dcmotica, 19 Ekin , Hj Dcrbent, . jo (J Elabaff, 31Z Derindeh , 111 Elbafano, 60 Detroit du. Nord , 80 El-Bir, 119 Devano, 393 EI-Boftan , 118 Dgebele , v. Gebail. Elbours , M. 169 Dgianik-ili , 111 El-Katif", 178 Dgoumalarek, v. Gu- El-Raba, v. Maab. maleric. El-Tor, 177 Diadin, 163 Eluth* , v. Calmoucks. Diarbec , 150 Emboli, 58 Diaibekir, 131 Emenbad , 310 Digligi-Neur, 430 Emouis , v. Qucmoy. Dijaduchina , 187 Ende , Ijle, 413 Diftra, v. Siliflria. Endrene , v. Andrino- Diu , 311 plc. Divriki , m EncbećT:, 61. Dobach, io Eno , 29 Dobronika, v. Ragufe Ephefe , v. Aiafalouc. Doganhifar, i\6 Epidaure, 64 Dolcigno , 60 Erakli, 109 Dolgoi, Ijle j 179 ,180 Erbil , if9 Donskaja, 180 Erdehan, 16 f Doulporc , 319 Erden , v. Jourdain. Dragoniza,M. 39 -Pays, 138 Drufes, 138 Erckli , 116 Dulcabat , 126 Eriha, 145^ Dunlacaon , Ijle, 341 Erivan , 307 Duratzo , 60 Ememak , nz Erzerom, v. Arzroun. E. Efcrcf, 304 EEshmiafm , 161 caterimb0urg,107 Eskcbil , I I Z. Icliilb, 5? EskcrdpUi i60 Edrcaos, iok Esfci-Baba, ;s Egouii , riv. 170 Eski-hiliar , 10* Ehavas , 300 Eski-Moful , v. Bcled. Eidcrabad , 331 Eskishdier, 108 Ekerdci', 103 Eski-Scambouk, 54 44« T A Efo, v. Jcfo. Eilenide, 104 Eitacher, 301 Eftarabach, 304 F. T7 A AUO , 3 fO Famas-ouite, i*4 Farbrou, 4°1 Farima, 39L Farfa , 59 Farfiflan , 300 Fartach , 2.81 Fatlino, Ijle, 395 Fcncri, Jfo Feiliabath, 3°4 Fctipore , 319 Figalo, 61 Fihr, 301 Filippo, 37 Finda, 39 3 Firando , Ijle , 39 J Flores , Ijlev. Endc. Fokia , 106 Fokien , 370 Fong-Tchiang , 375 Foug-Yang, 3^7 Foqui, 3 9 *■ Formofc , Ijle , 399 Fort-Zelande, 400 Foulća:ig,< 37° Fou-Tcheou, 370 Fuen-Tcheou, 374 f inčima, 391 G. Oapar, 179 L £ Galata, 30 Gallipoli, a8 Gammalammc, 411 Gange, riv. 311 Garabuze, 6% Garizim, M. 14c Gaza, 145 Gebail , 136 Gehud , 3 2 l Gcldria , 33} Georgie, 166, ——Pcr- fane, 173 Geramia, 71 Ghonich, 114 Ghuerchfin, v. Kcra- foun. Gliuzelhiifar, 10; Giannaba , 301 Giddah, 189 Gicmcre, v. Jeflelmere, Gihon, riv. 147 Giloloj Ijle , 411 Gingi , " 334 Giuftandil, xi , 39 Gleubufca , 18 Glinow , 186' Goa , 330 Goga, 321 Golconde , 331, 3>i Gombru ou Gomrom , 301 Gor, 327 Gori, 173 GoudcJour, 335 Gouro , 324 Goucah , 1 J9 Gratfchi , 180 Grece, 56 GroKa, Ijle, if ALPHAB Cuadcl, $02 Guaham , Ijle, 401 Gucrgon, 340 Gumaleric , itfj Guinuchkana, Monj. 114 Gupani, Ijle , 414 Gunia, v. Ghonieh. Gurgiftan , v. Georgie. Guria ou Guriel , 171 Gurjeve , 181 Guzurate, 310 H. H ADRAMAUT, 28l Haifo, v. Faifo. Hajar, 179 Hakiari, 163 Hamadan, 300 Ha mah , \}6 Hami, 2 j8 Hamid ( Pays d* ), 103 Hang-Cheu, 371 Han-Tchang, 375 Haoud , 322 Harcas , »33 Harduari, 317 Harran, If* Hafcc, 181 Haficar, v. Cafchgar. Haynan , Ijle , 37* Hcbsl.Af. 14* Ncbrouu , 14J Hcdcnda, 324 Heger , 178 Hejaz, v. Hidgiaz. Hcllch , if* Hclong-Kiang , voy. ETIQUE. 4*7 A m ur. Helver, 15 J Hems , 136 Hcndou-KeshjiVf. 31a Hendowne , 31» Hcndovvns , 3 *9 Heraclćc, 5 S Herat, 303 Hcrmanli , jy Hctzegovine , 17 , 19 Hcsbon, 147 Hcfn-Kaifa, ' ijx Hia-King , 371 Hidgiaz , ijS Hijaz, 188 Hin-Hoa, 371 Hing-Hiang „ 37; Hing-Hoa, 370 Hing-Tcheou, 372» Hir, < irr Hiten, 4r3 Hoai-King , 373 Hoai-Ngan, 3*7 Hoang, nv. 357 Hoang-Tchiou, 372. Hoei-Hang , 37? Hoci-Tcheou , 376 Hoe-Tcheou, 3*7,369 Hogr, v. Hajar. Hohori, v. Giuftandil, Holabaff. v. ElabafT. Holuan, 1 f J Ho-Nau , 373 Horeb , M. 277 Hormma , 416 Hougli v. Ougcly. Hou-Tciieou , 371 » J7i Huchc, ?*•} 44* T A Huškan , v. Hcsbon. Hya , 169 Hyo , 395 L I AKUTZK , **« Iamboli , 57 Iao-Tchcou , )69 laffi , 11 Ichmiazin , 308 Iemarnch , Ihor , 343 Iilgoun a 116 Ili, riv. 1-55 Uien , riv. 100 Ilimslc , 116 Imcriti ou Imirete , 170 Indaponra, v. Andra- poura. Inde j riv. jfl Indcs, 308 Indoftan ', 311 lompandam, 411 Iori , riv. j76 Irak-Agćmi , *9S ——Arabi, M4 Iran , 3°7 Irbitsk , 110 Irkutzk , 12-5} i»7 Ircisch , riv. 198 Ifaklu , 11 6 Isbartch , 105 Ifchinsk , "3 tfec, 210 Ifgaour ou Iskuriah , 170 Ific des Etats, 3»7 B L S —~des trois Rois ,399 Ifmaali , 11 Is-Nik, 93 Is-Nikmid, 91 Ifpahan, 193 Upira, 164 Icalah, 106 Icav, 319 Itchiil, 121 Itkulskaia, 208 Irzumi , 39; lu-Nhing , 373 Izmir , 94 & fuiv. J. J ABLONITZ, IJ Jacatra, 413 Jacoviza, 59 Jafanapatan, 43 r Jaffa , 145 , 146 Jagannat, 313 > 314 Jaitzkoi-Gorodoc ,181 Jakutes, 203 Jalutorousk , 213 Jamama, v. Iemameh. Jamafiiro , 392 Jamatto, 392 Jamba, 517 Jambi , 420 Jamur 3 v. Amur. Jamufcha , Lac , 196 , 214 Jamufchcwa , 214 Janagar, 325-Jangoma, 340 Janicoli, 2S Janna, 59 Jannina, 59 ALP H ABET10 UE. 449 Japara , 413 Kadas , 141 Japon , 388 Kaigorod , 1I6 Jarcoia, 301 Kainsk, 11Z Jarensk, 186 Kaifarieh , 117, 146 Jafques , 301 Kalaat-al-Acaba, *77 Java, Ifle, 411 Kalkas, 169 , 170 Jelanslov , 123 Kamenoi - Poias 3 M. Jemama , 179 101 Jenifeisk, 118, 114 Kampeloung, 13 Jenizar , 58 Kamtfchadalcs , 103 , Jenifea , riv- J99 133 Jenupar , 317, 322 Kamtschatka, »3 3" Jenva, Jepantschin , Jericho , v. Eriha 1S7 Kanduan-a , 3l7 Kang-Tcheoa , Kanobin , 372. 1,6 Jcrufalem, 141 , 1 H* Kansk , 113 6' fuiv. Kan-Tcheou, 3*9,370 Jefo ou Ye(To , 384 Kaplan lih , 59 Jefo-Gafima , 386 Kaprulih , Karabafar, 59 Jefovo , 59 7 Jcffelmere, 310 Karac , 177 Jetchu , 39 i Karacoram ou Karaeum Jodfo , v. Jefo. Joni-Bafar, 171 16 Karah i far, IOi Jo rta n , 417 Karahifar de Tek ieh, Jourdain , riv. 140 , v. Kupri-bafar. 148 Kara k, 148 Judoma , riv. 100 Kara-Kalpacs, Jukaeces, v. Jakutes. Karamufal , 93 Julfa , 307 Karanlach, riv. 132. Julfar, 180 Karasbag , 307 Juncalaon, 343 , 345 Karali, 106 Jurakcs, 202 Kare is , 58 Juthia, v. Siam. Karical, 335 Karimkarsk, 116 K. Kars , 164 IC abansk , Kars-Zoulkadir, 118 130 Kafaklu, 116 Kachemirc, Kaftanavitz , 15 4fo table Kafthamouni, no Kiegan, 373 Kathifch , v. Kteifah. Kicn-Ning, i70 Kathrcbul, 155 Kien-Tching , 399 Ka\vacfii, 393 Kicou-Kiang, 369 Kazcgan , 163 Kikiai, Jjle $ 598 Kazcmbazart, 314 Kilan, 304 Kazi-Kcui, 93 Kilia , 11 KecJio , 348 Kilis , t 18 Kcda, 343 Kin-Tcheou, 371,371 Kchui , 330 King-Garij 369 Kclihiilar, 117 Kingkitao, 381 Kcmmerouf, v. Guer- King-tc-TcIiing, 370 gon. King-Tcn, 379 Kcngavar, 300 King-Yven,- 3 78 Kciitaific, M. 313 Kins, 1Ć4 Ker, 301 Kio-ring, 369 Kcrafoun, 113 KircklirTe, 33 Kerbela, 1^7 Kirensk, n La dda, 144 410 •h; Len k era , Leontari, Leou-Tcheou, Lepantc, Lecjucvo , Ijles * Lcrncca, Lero, IJlC) Lefgis , Lcucofia, Levček , v. Camboge. Lcvca, I/le, 4<»* 200 345 304 64 378 61 397 «.** 71 »•41 124 4fi T A B Liani , J 47 Libanova, j8 Lica, J 4 Licanicns, iiid. Licou-Kieou,//7<\r, 3 97 398 Licu-Tchcou, 376 ligor- 343, 345 Li-Ki.ing, 379 Lirmhan, /yfc, 403 Limilfo, 114 Ling-Kcang, 369 Ling-Ngan, 379 Ling-Tao, 373 Li-pa-fou, v. Peking. Li-Ping, 379 Liifa, Ijle , 17 Livadia, 61 Lod, 14* Long-Ngan , 373 Lon-Yang, 374 Lop , Lac, 257 ,138 Lourcbander , 323 Louvo, 343 Lov/ , 414. Lucon, Ijle , 40) Ludel , v. Lod. Lung- Hoang - Chang, Ijle, 398 M. M L JE Madar , Madras , Madtirć , Magnifa, Mane , Ma-Hou , Maina , Maja, riv. Makowskoi Malabar, aab , 148 Macao , Ijle , 377 Maca/far, 4x0. — De- troit, 80 Macedoine, 57 Machian, Ijle, 411 Mackiipa, 7 Maui, z 04 300 333 33* 106 337 375 *4 200 223 33* Malacca, 343. — Dć-troit, 80 Malathia, 33,119 Malayo, 412 Maldivcs, IJles, 432 MaleAcollon, 436 Malmvfch, 18 j Malos-Madou, 436 Malova, 3H Manar , Ijle , 431 Manar , 341.-De- troit , 80 Mancofta , 124 Mangazea, 218, 219 Mangazcisk, 214. Mangafes, 219 Mangatc, 327 Manghui , 357 Mangu, 337 Manilles, IJles , 40 3 , 405 , 406 Manincabo , 420 Mantcheous, 163, 264 Maran t , 306 Marafch , 117- 118 Marafou, 61,61 Marathon, v. Marafou. Marattcs , 331 Marava, 336 Marcb, 1S2, ALP U AB ETIO U E. 4;r Mari-Anna ? Ijle > v. Meliapur, 333 Tiniam. Melita , v. M&e"d a. Marie-Anne,//7<:.r, 401 Meloni ta, 17 Maricco , 412 Membig , 129 Markovo, 225 Menankiou , riv. 2.60 Marmara, 57 Mendali, i5S Marmora , 106 Menmen , Mentccheh , 103 . 94 M aro , 411 , 104 Marogna, Maronires , Mer Cafpienne, 80 159 Mer Morte , 8 3 , . H9 Marcaban , 341 Meragne , 306 Marubo, 4:1. Mcrbat, 282 Mafbat, Ijle , 408 Merdin, Merlan, Mafcalat, 270 , 280 17 MafilTah, v. Mcflis. Mefarea , 124 Mafoto , 124 Mefchet, Mefembria, 303 Mafnick , 302' 17 Mafjlipatan , 33* Mefghid-Ali , Mefghid-Hoifain. Macan ou Mataro, 40;, >*57 408 Meifis, 110 Mataran , Metclin, Ijle, 7i Matmanska, v. Matzu- Metfcholnaia , 189 mai. Mexat, v. Mefchet. Martavan, 343 MeZ/ifourn , in Mature , 341 Micava , 393 Matzumai , 3 84 , 3 87 .Mikalidi , 108 Maug, Ijle, Maximianopoli, 402 Milct, 105 Milladouc-Madoae,43 6 Mazandcran, 304 Milo , Ijle, 69 Meaco, 391 Mindanao, I/le, 407 Mecque (Ia), Medine, 288 Mindora , Ijle, 407 289 Mingrelic , 169 Mćeb , v. Maab. Mirabclles, 406" Megare, Meia-farckin , 61 Mifitra, Mjaskaia , 208 Mekes , 164 Mocco , v. Moggan. Mckhan , 158 Modain, iS! Mekran, 302 Modon, *3 Mcieda, Ijle , 17 Moggan, ?8r *f4 T * Moglani«4 Moglai , 20 Mogol, 319 Mogol, v. Indoftan. Mogols, v. Moungales. Moka, 284 Mokfchaisk , 18 3 Mokhrar., 158 Moldavie, iz Moldava, 13 MoIucjucs , Ijles , 409 Moncaftro, 11 Moncmbafia , 64 Mongher , 314 Mong-Hoa, 379 Mont-Royal, 148 Mome-Santo, v. Athos. Morato, 3 3 Moravč, riv. i 1 Morduas , 183 Morćc, 61 Morlamiie , 14 , 13 Moftar, 17 Moful , 1J3 Motir,/y7 . XI7 Ochotzk , 232 Ocrida , v. Giuftančlil. Oczakov/, 10 Oku-Jefo3 386 Olecma , riv. 200 Olecminsk, 231 Olonki , 228 Olutorski , 20 j OIympc, M. $9 Oman , 273 , 180 Omsk , 214 Onon , v. Amur. Onor, 3 37 On-Ting, 379 On-Zigidin, 109 Or , * Oibach , »o Orbotcc , • 7 Orel , v. Orlou. Orenbourg, 181 Orfa, iji,M2, Orixa, 324 Orlab, 94 Odow , 1.86 Ormus, I/le, }oi. 4S6 TA Detroit t 80 Oromi, 3°* Ortous, i*3 Ofacka, 391 Ofcro , Ijle , 1 6 Ofmandgik , 111 Ofokor, 180 Ofourgcti , v. Uflur- gcti. Offa , Mont. 39 Olfam , 17 Oflbro , 1 * Ofliacks, iot Oftrov/ina , v. Jablo- nitz. Otdia, v. Siam. Otrar, zji Ouc-Kiun, 373 Ouci-Ning , 37? Ouen-Tcheou ,371, 371 Oufou, Ijle, 398 Oufou-Chiraa , Ijles , 398 Ougel, jzi Oulubad, 108 Ougely , 313 Ouguan, Ijle , 401 Ourdoukent, iy8 Oufchar, 103 Ou-Tcheou , 378 Ozaca, 391 P. P aarn , v. Pahan. Paccm, 410 Pacho, 315 Padang , 410 J>adipola . 43* B L E Pagan , Ijle , 401 Pago , Ijle, 1 6 Pahan, 343 , 343 Paias, 111 Palambuan , 417 Paliacate, 333 Palimban, 410 Palkati , Lac , 133 Palmofa , Ijle , jt Palo v ay , ijle , 414 Pampanga , 40Ć Panr\y ou Panayotton , Ijle , 407 Pandourcs, 14 Pao-Hing , 3"i Pao-Ning , 37; Paoting, 3 *7 Papagni, 59 Paragoya , Ijle , 407 Paranda, 330 Pario , Ijle , *? Parnafle , M. 61 PafTarowirz , 13 Pafltman , 410 Pat-chong-chan, Ijle ; Parana, 343 , 345 Pathmos , Ijle , v. Palmo fa. Parna , 311, 314 Patras, 63 Paufalca, 17 Pe-tche-li, v. Peking. Pechcric ( cote dc la) , 3 3 5 > 3 3 * Pechia, z 6 Pedir , 410 Pčgou, 341 Peking, H8,3J9 Pelimsk, ALP H AB ETIQ UE. |}f pelimsk, J/Porto d i Coftanza , Pel ion , M. S 9 v- Conftance. Pendaia, 114 Porto-Gallo, 431 Pengab, 319 Porto-Mandatoo«Man- Penfa, 185 tado, 406 Pera, U Porto novo , 335 Pera, 343 Pofolsk , 130 Pcrmie, 18*, 187 Poue-Moluque, 43 6T Peric, 290 Poulifdou Molucjue, Pctapoli , 3 3 3 43* Petigoriens , 144, 14; Poufan , 38? Pctius Dardanclks ,€1 Poutala , M. 260 Pctrella , 60 Povangheu, Lac , 3 69 Petrovsk, 18 j Previza, 6r Pliiliba , v. Philippo- Priaman , 410 poli. Proflaviza , v. Chiuf- Phiiippines, Ifles, 403 tciige. .-Nouvelles , 409 Przecop , 6 Philippopoli , 28 Pudna, ij Piafiga, 119 Pulo Condor , 347 Pic d'Adam, 419 Puloam , Ifle , 403- Picd'Antoine, 384 Pulorin , Ifle, 414 * Pighiton , v»Wihitz. Purhola, 321 Ping-Leang, 373 Pylclikorica, 187 Pinglo, 378 Ping-Yang, 374 Q. Ping-Yve, 379 Pingjang , v. Kingki- Vc,uambik, 330 tao. Quamghia, 3;o Pintados(los) v.Cebu. Quang-Nan, 379 Pirec,Port, 61 Quang-fi, 379 Pitan, 317 Quang-fin , 369 Pitefch , 13 Quang Tcheou, 376 Podgoriza, 60 Qiieda, 343 Pontichcri, 334 Quci-Ling, 378 Popiza, 53 Quci-Tcheou , 373 Port de la Sonde , 413 Qudpaerrs , Ifle , 381 Portes de Trajan , y. Quem°y , Ifle, 371 Trajanac. Quilam, 401 Tome VIL V. 45* , . Quinhin, T A B 35° R. R acca, 131 Radja, 171 Ragufe, 17 Ragufi-Vecchio , ibid. Rajapour, 331 Ramanaburan, 33; Ranila , 145 , 146 Ramfaik , 18 j Rancipore , 321 Baolcondc, 331 Ras-ain , 131 Rafca, riv* 21 Rafcic, 21 Rafcc, 302 Rebnic , 13 Reilocos, 406 Refcbc, 304 Rctimo , 6*9 Rhodcs, ljle,7 \. &fuiv. Rione, riv. 167 , 171 Ris, 13 Rifano , 16 Rilo v , 27 ,-Rifeh, . 114 Rodofto , 3 3 Roha, v. Orfa. Rom-Kala, 128 Romali ie , J S 6 Romanie, 28 Rofalgate, 280 Rofchdertv/cnsk, 211 Roftov, 7 Rota,/jfc, 401 Roum , no .Rucs, 170 L E Rudhan , 30j Ruki , v. Rucs. Runran , ' 350 Rullic Afiaticruc , 176 S. C aba , v. Marcb. Sabandgch, 93 Sabiaca, 60 Sabionccllo , 17 Sablcftan, v. Zabliftan. Sacanic, 64 Sacay , 392, 39 j Sadrafpatan, 333 Safet, 138 Saglialicn , v. Amur. Saghalien , ljle, 383 Sahar, 282 Saiansk , M. , 10i Saicza, 20 Saikokf, v. Ximo. S. Ange, v. Aguignari. S. Charles,ljle, v. Sa- rigan. S. David , 3 3 5 S. Diomidc, ljle ,233 S. Gcorge , v. Madras. S. Ignace , v. Pagan. S. Jcan , ljle , 408 S. Jean , v. Guaham. S. Joachim j v. Ana- thaban. S. Jofeph , v. Saipan. S. Laurent, ljle , 233 S. Philippe, v. Ouguan, S. Pierre & S. Paul , v. Avatcha. S. Pierre & S. Paul, v. ALPHABETlQUE. 4S9 Strielki. Sarenza, 303 S. Saba, 17.19 Sargultzar, v. Herat. S; Thome 3 v. , Mclia- Sarigan , ljle, 401 pur. Sarogo , 407 Sainte Maure , ljle, 66 Sarpana , ljle , 40 z Saime Anne, v. Sar- Sart , 105 pana. Sarukhan , 105 Saipan 3 ljle , 401 Sarvan , 303 Saiflan , Lac, 155 Satalie , v. Anthahah. Sajansk , 113 Satara, 331 Salayo, ljle 3 411 Satignan , 3*4 Salemiah , 136 Satcuma , 394 Saliieh, 140 Sava, 300 Salinc, 114 Savcock , v. Ximo. Salmas, 306 Scander , 171 Salmydis j 55 Scanderona, 118 Salona, 16 Scardonc , 16 Salone , 61 Scarpanto , ljle , 71 Salonichi, 57 Schalaginskoi , 1> Salt, »47 Schamaki, ?c6 Samanlu, M. 91 Scheitakov/, I 8rt Samarcand , 148 Schclatcs, io]j Samarovsk, 116 Schelcims k , 214 Samarsk, i8i Schilka , v. Anlur. Sambal, 311 Schio , v. Chio. Sambas, 416,417 Scliiras , 300 Samira, 1.5$ Sciiirvail , 306 Samo, ljle, 71 Schuralinsk, io<> Samojcdes, lOZ Scio , v. Chio. Samfoun, 111 Scopia, 13 > *5 5amuqui, 195 Scutari , 60 Sanaa, 183 Scutai'i, v. Uskudar. Saneh i an , ljle > 578 Se-Ming , 378 Sandar, 341 Sc-Nan , Se-Tcheou , 379 Sandor, l| 379 Sanrschursk , 186 Se-Tchin g , 378 Saransk, 183 Sc-Tchu en , 375 Sararo\v , 185 Sebalrc , H7 Sardicjuc» 16 Scbcnico , 16 Vi; 460 Secandra , Scgcr, 17 5 » 181 Scgcftan, v. Sigiftan. Scgna o// Scgni, 14^ Sclcf-Kch , Selcnti , Sduicie, Sdinginsk , Selvbria , Scmendria, Scmifac , Scmnam, Sem pala t , Sengucrhafara Senu, table 319 Si aram 13 Joi lS6 iz8 JI *I 119 3°5 113 3°4 153 Seorgia , 171 Scphaofl , v. Ifpalian. Seraio, 55 Seraio, v Bofna Seraio. Sercncgal Screport, Sereth , 317 313 13 ScrpiJati, v. Scrvic. Servat, M. 183 Scrvie, 11 Servicns, ibid. Sctincs, 61 Scydc , 137 Sham , v. Syric. Shapour, 316 Shat-ul-Arab. riv. 157 *55 158 181 375 . 378 343 1 344 37* Shcreba.-i, Sherezour , Shibam v Si Ngan , Si Ngucn . Siam , 341 , ,Siang-Yang, Siba, Siberic y Sibir , Sibirka , riv. S i ti i ga x i, Sidishcheri , Sidonaia, Sifans , Sigiftans , Sinon , riv. v. Sir. Sikokf j v Xicoco. Siliftria, 17 Simbirsk, 185 Sinai, M. 277 Sind, v. Tatta. Sinde, riv. v. Inde. Singora, 345 343 317 188 188 188 108 116 140 169 302 Sinjar j Sinub, Sior , v Sir , riv. Siraf, Silino, Sis, Sis, Sifto , Sifopoli, Sitia, Sitzu , Sivarca , Sivas, Smyr > •, v. Suamcnsk , Suchcu , Socotora , Ifle , Soczi , v. Sochcu. Soczov/a , Soglah, 110 Kingkitao. 147 301 311 118 161 17 55 69 393 384 110, iii v. Izmir. xi 1 375 181 11 9\ ALPHABETIQUE. 4*; Sohali , 321 Strielki, 118 Sohar, 280 Scroganov/, 187 Solapur, 330 Su-Tchcou, 373 Soliapur , v. Solapur. Succadano, . 416 Solkamsk , 186 Suda, 69 Solons., 166 Sughut , 108 Soltanie , 300 Sulotpfo , v. Sido. Sonde, IHes , 41? Sultan-Ei7ghuy, 108 -Dkroit, 80 Sumatra , 7/7«?, 417 Song-Kiang , 367, 369 Sungar , Detroit , 80, Songari, riv. 16 { 386" Songfon , ljle, 402 Sur, 137 Sopliie, 16 Suram > ( 173 Sorct. 32 j Stirare , 320 Soiiadou , 436 Surgursk , 216 Soumelpour, 324 Suriaon, 341 Sou-Tcheou, 3Ć7, 369 Sursk , 18? Spalato, 16 Surtingo, 3913 Spaskoi , 226 Sufler, 300 Spa/Ii, 60 Svlask, • 18 r Spatania, 60 Swinar , 2,0 Spina-longa , £8 Syrie, 125" Spintcha , riv. 303 Spoloschensk , 227 T. Sragnara, 35 r-p Sragno-Grande, .17 J. abarieh;, Lacti.i% Stalimene, ljle, 70 i^g Scamboulc , v. Conf- Tabillola, 411 . tantinoplc. Tabouc, 407 S:an-co, ljle , v. Cos. Tabriftan , v. Mazan-tapcbin, 381 deran. Starovcrfi, to6 Tabuco , 411 ScellaijV. Libanova. Tacap/i, 384 Stcphanefti, 13 Tacuxima , ljle, 395 Srevano, 33 Tadmor , |j< Stives , «5z TafFafo , 412 Stobi , 39 Tai-Ping, 367,378 Stovouschanc, 11 Tai-Tchcou ^ 371 StraviJio, 53 Jai-Tong^ 374 Vii; (n TAB Tat-Vao, 37° Tai-Yvcn , 374 Tafcnga , 31 13 Tolema, Terki , z4j- Toli, Tcrmech , riv. 111 Tolo , Ternate , Ifle , 411 Tom , riv. Ternovo j 17, 59 Tomis, Tcrralra, Ifle 3 415 Tomsk , TerrcdelaCompagnie, Tong-Gin , 384 Tcrre de !a Compagnie, 387 384 387 80 400 66 8 Tcrre des Etats, Terre de Gama, TeiToi, Dhroit, Thaiovan , Theaco, Ifle, Theodofic, Thermopiles, /9 Thonaoa , 3 50 Thous , v. Mcrchet. Tibet, Z59. — petit. 160 Ticou , 410 Tidor,//7Tc!ieou , 369 Yemen, 273 , 280,283 VourJa , v. Orlah. Ycn Ngan , 37j Ycn-Ping, 370 W. Ycn-Tcheou , 373 WYen-Yang, 371 asiligorod, l8j Yesd, 300 Vafit, it6 Ye/Io , v. Jefo. \V\:rciliiaizkaia , 209 Yo-Tch~ou , 372 Vercho-Tagilsk, 206" Youg-chai , 369 \Fiddia, 16 Yiun-y , 373 Wihitz, 13 Yun-Nan, 378,379 Vihri, riv. 100 Yung-Pc, 379 Witim , riv. 200 Yung-Pin? , 3*7 Vv (g'i TABLE. Yung-Tcliang, 379 Zcnderoud , riv. fjV Yung-Tcheou , 372 Zcng, v. Scgna. Yupi , i*5 Zcqucs, t70 Yuping , 371 Zialinskoi , zo6 Yvcn-Kiang, 379 Ziapinskoi , 217 Yven-Tcheou, 369 Zilch, Ziqucs, l4j Z. Zonchio , 6 j ZZorza, ! j abliStaNj 301 Zuchria , v. Jcnhzar. Zante, i/fc, *7 Zulfa , v. Julfa. Žara, 16 Zv/ornick, 20 Zebid, 183,188 Zywilsk, 18; Fin du Tome VII. E R R A T A. Pag. 177, lig. 11. Tolosk, lifez Tobolsk.