COMPTES RENDUS, RÉCENSIONS, NOTES POROČILA, OCENE, ZAPISI WILLY BAL, JEAN GERMAIN, JEAN KLEIN, PIERRE SWIGGERS, BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE DE LINGUISTIQUE FRANÇAISE ET ROMANE, 2.ème éd., Duculot, Louvain-la-Neuve, 1997, pp. 324 + 11 planches cartographiques. Les Auteurs de ce livre, éminents romanistes, offrent à un public de spécialistes avertis une nouvelle édition de la Bibliographie sélective, la précédente, parue en 1991, étant déjà épuisée. Cette nouvelle éditon a été enrichie par la mention de parutions récentes (jusqu'en 1997), ainsi que celle d'oeuvres plus anciennes qui ne figuraient pas dans l'édition précédente. Une question se pose face à cette catégorie d'ouvrage; celle de savoir à qui elle est destinée. La Bibliographie sélective est si riche et si accomplie, qu'elle ne saurait être un simple instrument pour les étudiants romanisants. Elle servira a quiconque s'occupe des langues romanes pour s'informer sur les publications des dernières décennies. Je dois me corriger tout de suite: la Bibliographie sélective présente la liste des travaux récents ou relativement récents, mais les grandes oeuvres sur les langues romanes des maîtres de notre discipline y figurent également, à commencer par celles de Friedrich Diez, de Graziadio Isaia Ascoli et de Wilhelm Meyer-Ltibke. Les auteurs soulignent, dans l'Introduction, l'orientation didactique de l'oeuvre et le fait qu'elle est un instrument de travail pour la linguistique française et romane. Ils mettent en évidence (p. 11) que l'inclusion dans la liste de travaux sur les langues romanes ne veut pas automatiquement être une évaluation: l'usager saura choisir les oeuvres qui lui seront utiles. Cette tâche sera facilitée par la structure de l'ouvrage. Les oeuvres qui se rapportent à une langue romane sont toutes classifiées selon huit parties, à savoir: bibliographies; revues; manuels, synthèses, aperçus; approche synchronique de la langue; approche historique de la langue; onomastique; versification; anthologies de textes. Certaines parmi elles sont plus détaillées encore; ainsi, celle sur la synchronie est-elle repartie en grammaire, lexique, dialectologie, sociolinguistique et, pour certaines langues, est également présent un chapitre sur la diffusion de cette langue dans le monde. La bibliographie commence par un chapitre informatif sur l'indo-européen et le latin, classique et vulgaire. La partie centrale, évidemment, est réservée aux langues romanes (pp. 33-291), suivie de l'Index des auteurs et de précieuses planches cartographiques, onze en tout, qui ne figuraient pas dans la première édition de l'ouvrage. 153 Comme j'écris ces lignes d'un pays qui a récemment accédé à son indépendance, en 1991 seulement, je ne peux que faire des louanges à cette édition parce que les Etats, nés avec la dissociation de la République Socialiste Fédérative de Yougoslavie, figurent correctement avec leurs noms, ce qui, dans le monde occidental, n'est pas toujours le cas. Les auteurs se déclarent, dans l'introduction, conservateurs dans le sens où ils ont voulu gardé la classification des langues romanes généralement acceptée; on sait, par exemple, que le monumental Lexikon der romanistischen Linguistik ne cesse de nous surprendre par la classification des langues romanes qui diffère de celle à laquelle on est habitué. Ainsi, parmi les grands problèmes, la questione ladina se trouve-t-elle dans les travaux sous la catégorie "Rhéto-roman". L'usager intéressé aura donc la possibilité d'approfondir sa connaissance dans les oeuvres, parfois très critiques envers les autres, des linguistes italiens (Battisti, Pellegrini) et des romanistes des universités de langue allemande (Alvin Kuhn, Heinrich Kuen, Goebl). Les Auteurs de la Bibliographie sélective classifient donc les trois rameaux du rhétoroman (d'Alpenromanisch, d'après la terminologie de Gamillscheg), en romanche, ladin dolomitique et frioulan. On voit la même attitude dans la présentation des langues ibéro-romanes, dont fait partie, certes, le catalan, et où sont classées, comme on s'y attend, sous le cadre de l'espagnol, les variétés régionales, à savoir l'aragonais et l'asturien, tandis que le galicien fait partie du portugais. On sait que le Royaume d'Espagne, dans la très louable tendance à réparer les injustices du régime franquiste, a accordé le statut de langue co-officielle dans les régions respectives au catalan, au basque et au galicien. Chose plutôt unique que rare: la politique a précédé les tendances de la science linguistique; en général, le procès a été inverse. Nous abordons avec ces considérations le domaine de la sociolinguistique. Il est hautement louable que la bibliographie des travaux publiés pour chaque langue romane est enrichie par une brève, mais concise présentation sociolinguistique. Y sont mentionnés brièvement les importants points historiques, autrement dit, les faits principaux de l'expansion du latin, c'est-à-dire de la romanisation d'un territoire, et le territoire actuel où on emploi la langue romane en question. Sur ce point, il faudrait faire une remarque concernant le nombre de locuteurs une langue romane; ou, si l'on veut, le problème qui se pose est de voir, si possible, combien de personnes parlent une langue romane donnée comme langue maternelle. Il est difficile à croire que les italiano-phones soient 60 millions, quand on sait qu'à peu près 5% des citoyens italiens parlent, comme langue maternelle (je commence par l'Italie du Nord, par la frontière orientale) une autre langue: le Slovène et le frioulan dans la région nommée Friuli-Venezia Giulia, l'allemand dans le Sud Tirol (Alto Adige dans la diction italienne), le franco-provençal en Aoste, le sarde en Sardaigne, le catalan en Alghero, et ensuite le croate, le grec, l'albanais dans quelques petits villages ruraux de l'Italie centrale (Molise) et surtout méridionale. Les chiffres concernant le français me paraissent également 154 exagérés ("Actuellement, le français est la langue maternelle d'environ 100 millions de locuteurs", p. 135). Il y a de même pour l'espagnol et le portugais, pour lesquels la formulation est légèrement différente ("L'espagnol (ou castillan) est la langue romane qui a le plus grand nombre de locuteurs: environ 330 millions", p. 241; "Le portugais est actuellement parlé par plus de 190 millions d'usagers", p. 273). Il serait peut-être prudent de faire une distinction entre la langue maternelle, de famille et la langue de la communication ou des relations de la vie habituelle ("Umgangssprache"), et de redéfinir le terme de francophone, italophone, etc. Hormis cela, ces brèves et précieuses introductions donnent aussi les caractéristiques les plus significatives des langues romanes traitées. Pour la majeure partie ce sont des phénomènes phonologiques. Cependant certains phénomènes syntaxiques sont également mentionnés, ainsi l'infinitif personnel et le maintien de la forme synthétique du plus-que-parfait latin en portugais ou bien l'objet personnifié précédé par la préposition a et l'auxiliarité du verbe haber en espagnol. Certes, la partie principale est le recueil des ouvrages publiés. Et cette liste est exhaustive, riche et précise. Chacun trouvera, pour le domaine qui l'intéresse, réunies les publications, des livres surtout, mais aussi des contributions importantes dans les revues consacrées aux études des langues romanes. La revue pour laquelle je suis en train d'écrire ces modestes lignes est fière d'y figurer, elle aussi, grâce à la citation d'un important article sur la questione ladina de G. B. Pellegrini (p. 118). La Bibliographie sélective de linguistique française et romane est, à notre avis, un manuel très riche. Ce qui nous plaît aussi est le fait d'y trouver des parlers romans "mineurs" (si jamais il y en a parmi les langues). Les oeuvres linguistiques, revues ou livres, sont dans le monde roman toujours plus nombreux; il est toujours plus difficile d'être informé sur les nouvelles parutions. La Bibliographie sélective représente par cela un instrument extrêmement précieux. Mitja Skubic 155