Richard Conte Recherche et création Qui parle de recherche entre dans le champ des sciences et doit répon- dre aux objectifs généraux et aux exigences posées au jourd 'hui par celles- ci. Il s'agit de donner une description de la réalité dans et par laquelle nous existons, y-compris les êtres vivants et ceci grâce à des lois et des concepts, formulés et forgés par notre cerveau. «Connaître, c'est décrire pour retrou- ver»1 et cette description ne doit comporter ni incohérence ni contradic- tion pour être validée. On doit ainsi pouvoir, par la rigueur d ' u n dispositif d 'expérimentation, reproduire les mêmes effets à partir des mêmes causes2. De plus, les sciences, chacune dans leur branche, doivent édifier un savoir objectif et cumulatif que l 'expérience s'efforce de légitimer. Pourtant, même s'ils constituent un gain cognitif, ces savoirs se trouvent sans cesse question- nés par la recherche en cours jusqu 'à provoquer une crise des concepts qui existaient auparavant. Ayant un ensemble de vérités consensuelles et évolu- tives pour objectif de ses investigations, la repherche scientifique suppose que ce qu'elle révèle, possède une réalité en dehors d'elle. Sera donc cher- cheur celui qui tente d'établir des connaissances nouvelles, de produire cette plus-value cognitive, ayant valeur d'universalité dans son champ de réfé- rence, et souvent contre les certitudes acquises de sa propre spécialité. Mais les territoires des sciences se présentent avec des statuts variés quant à leur champ d'application et à leurs conséquences pratiques. Con- trairement aux sciences humaines, ce que l 'on qualifie de sciences de la 1 G. Bachelard, Essai sur la connaissance approchée, Paris, Vrin, sixième édition, 1987, p. 9. I l précise p. 10: «Ce qui pousse souvent à rejeter la description au rang d'une méthode de pis aller, c'est que, dans les sciences plus qu'ailleurs, on est amené à confondre la connaissance telle qu'on la transmet et la connaissance telle qu'on la crée.» 2 Dans sa fameuse «Lettre à Léo Ferrero», Valéry note en marge que «la science, au sens moderne du mot, consiste à faire dépendre le savoir du pouvoir; et va jusqu'à subordonner l'intelligible au vérifiable. La confiance repose entièrement sur la certitude de reproduire ou de revoir un certain phénomène moyennant certains actes bien définis. Quant à la manière de décrire ce phénomène, de l'expliquer, c'est là la partie muable, discutable, perfectible de l'accroissement ou de l'exposition de la science» Œuvres, T. I, Gallimard, p. 1253. De façon plus aphoristique, dans Moralités: «Il faut n'appeler Science: que l'ensemble des recettes qui réussissent toujours. Tout le reste est littérature.» Ibid. T. II, p. 522. Filozofski vestnik, XX (2/1999 - XIVICA Supplement), pp. 303-200 191 Richard Conte nature s'avère épistémologiquement moins problématique. En effet, quel que soit le moment ou le lieu, un fait d 'expérimentat ion reste valable et si tel n 'est pas le cas, c'est qu 'une erreur a dû se glisser dans le dispositif ou la procédure , ou bien que les causes ne sont pas tout à fait identiques. Pou- voir reproduire une expérience demeure un critère de base de la mise à l 'épreuve scientifique. Ceci ne va pas d'ailleurs sans quelques difficultés au jourd 'hui compte tenu de l 'extrême sophistication des instruments, de la précision des mesures et du coût des expériences. De fait, les sciences humaines en modelant (modélisant) peu ou prou leurs méthodes sur celles de l'investigation des sciences de la nature, se heur- tent d 'emblée à un problème de quantité: le nombre de paramètres à con- sidérer pour la moindre tentative d 'expérimentation est immense et la mise en relation de ces paramètres oppose au chercheur un obstacle d ' u n e com- plexité difficilement appréciable. Cette situation rend l 'expérimentat ion ra rement significative. Le mot recherche conserve donc sa force intention- nelle mais perd en efficience quant aux résultats mesurables et à valeur généralisable. En épistémologie générale, le mot recherche recouvre, si on l 'applique à la recherche scientifique, dont l'Université est l 'un des lieux de prédilec- tion, «un processus par lequel on parvient à un but, plus ou moins bien représenté à l'avance, mais dont on ignore au départ comment l 'atteindre. L'idéal est évidemment de posséder une procédure qu'il suffirait d'appli- quer pour parvenir au résultat»3. Il s'agit donc de progresser dans la con- naissance de tel domaine. Or, tout se complique déjà quand le psychisme humain et sa socialisation sont à eux-mêmes leur propre territoire d'inves- tigation et se retrouvent en quelque sorte juges et parties dans la recherche. Établir des connaissances cumulables en ces domaines n'est pas sans achop- per sur de graves difficultés et toutes les sciences «humaines» ne se retrou- vent pas à égalité devant la spécificité de leur champ. On peut néanmoins parler de recherche dans ce cas, au moins en ce qui relève de la démarche utilisée, sinon de l 'universalité des résultats obtenus. Il n'existe pas, par exemple en histoire, une partition unique des objets culturels en domaines fixes. On sait que la vie d ' une culture est d ' u n e telle complexité que nous sommes probablement incapables d 'en débrouiller toutes les connexions. Ainsi les descriptions de deux historiens peuvent apparaître comme contra- dictoires sans pour autant que l 'une soit vraie et l 'autre fausse car cela dé- pend de la relativité des connaissances historiques au champ que chacun a 3 Encyclopédie philosophique universelle, T. 2, «Les notions philosophiques», Paris, PUF, 1990, art. Recherche. 304 Recherche et création défini au préalable et du rapport de leurs connaissances à la mobilité fon- damentale que constitue l'historicité. Le Vocabulaire d'esthétique considère à l'article recherche qu 'en effet, le tra- vail du chercheur consiste à «établir de nouvelles connaissances, ou d'obte- nir des résultats nouveaux». Le développement mérite d 'ê t re cité dans son intégralité car il fait la distinction entre deux cas qui é tendent la notion de recherche: «Le premier cas concerne la recherche en esthétique; elle s'ap- parente à la recherche philosophique ou scientifique, et travaille à mieux connaître tous les objets qu 'étudie l 'esthétique. Le second concerne la re- cherche de l'artiste, de l'écrivain, qui essaie des genres ou procédés neufs, ou travaille à découvrir comment réaliser certains effets; elle est souvent moins systématique et plus empirique que la première. Il ne faut pas mé- connaître le long travail de recherche qu'exige souvent l 'œuvre d 'art ; cer- taines œuvres n 'on t d'ailleurs pour but que la recherche, en ce sens que ce sont des essais, des tentatives, et non des œuvres ayant leur fin en elles-mê- mes»4. L 'auteur de l'article surligne le dessein scientifique de la recherche en esthétique, en posant le principe d 'une affinité épistémologique entre la recherche d 'ordre philosophique et la recherche scientifique. En revan- che, le travail de «recherche» des artistes est tiré du côté de la préparat ion documentaire et technique, ou de l 'expérimentation des procédés, c'est-à- dire vers les tentatives, les essais, etc., sous-entendant une distinction assez nette entre le moment où l'artiste serait un «chercheur» et celui où il en- trerait dans la singularité de son œuvre. Ceci suppose u n e parti t ion par exemple chez le même chercheur / artiste, entre celui qui cherche et celui qui crée, ou chez deux artistes différents dont l 'un dirait «je ne trouve pas, j e cherche» et l 'autre à l'instar de Picasso, «je ne cherche pas, j e trouve»!5 4 Anne Souriau, Vocabulaire d'esthétique, Dir. Etienne Souriau, Paris, PUF, 1990, art. recherche. 5 Jacques Drillon, de façon très documentée, étudie la réciproque solidarité entre «chercher» et «trouver» en ces termes: « 'Chercher' est attribut de 'trouver', et 'trouver' l'attribut de 'chercher'. Ils vont ensemble et du même pas.» Les citations qu'il tire du Dictionnaire des citations de Pierre Oster (Utilitaires Le Robert) démontrent l'ascendance philologique de la boutade de Picasso, sans parler de la formule de Jésus: «Tu ne me chercherais point si tu ne m'avais déjà trouvé.» Drillon fait remarquer que «Trouver est victime d'une irrésistible dévaluation, au profit du chercher; que l'un et l'autre ont même tendance à échanger leurs significations, ou du moins leurs positions respectives dans le déroulement chronologique. En tout cas, l'homme semble plus grand dans l'effort que dans la récompense.»Jacques Drillon, Eurêka, Généalogie et sémantique du verbe «trouver», Paris, Gallimard, Le promeneur, 1995, pp. 114-117. 305 Richard Conte En quel sens l 'artiste pourrait-il done être considéré comme cher- cheur?0 Probablement dans celui d 'une collecte et d 'une quête méthodiques aptes à fonder ou enrichir l 'élaboration d 'œuvres (études préparatoires, esquisses, réflexions théoriques), d 'une préparation expérimentale associée à un projet. Mais c'est jus tement pour les artistes qui privilégient le procès que s 'emploie le plus souvent aujourd 'hui ce terme de «recherche», qui devient presque synonyme d'expérience.7 Il y a donc très vite amalgame ent re procédure de recherche et processus créateur, qui peuvent opérer comme la chaîne et la trame d 'une même œuvre. C'est jus tement l 'un des buts que s'est fixée l 'é tude des conduites créatrices: démêler ce qui dans l 'œuvre en cours concerne une posture de recherche (avisée cognitive) et une posture créatrice (à visée singularisante). Par exemple, les savoirs tech- niques, les observations autocritiques, ou les documents iconographiques et historiographiques rassemblés par l'artiste au travail, peuvent appor ter des connaissances supplémentaires susceptibles de faire progresser, non pas la création de cet artiste en tant que telle, mais les savoirs et savoir-faire qui en sont les ingrédients nécessaires et dont l'artiste peut faire partager l'ex- périence et même généraliser les résultats. Quant à ce qui fait «l'exclusivité» de sa création, les saillies plus ou moins ardentes sorties du fond grouillant de la praxis, il est bien sûr au cen- tre de l 'entreprise poïétique, de «chercher» autant quefaire se peut, à en éclair- cir l 'événement par l 'avènement8 . Mais pour l 'heure, quand l'artiste réalise u n e œuvre, peut-on avancer qu'i l «recherche»? Ne vaut-il pas mieux dire qu'il «cherche»?1' Or cela correspond-t-il à quelque chose dans l ' idée que les sciences et l'Université se font de la recherche? Nous savons bien que la f' La réponse à cette question mériterait bien sûr un traitement historique des relations entre art et connaissance car ces deux notions s'associent ou s'opposent d'une façon toujours éclairante. Cf. Philippe Junod, Transparence et opacité, Lausanne, L'Age d'homme, 1976, pp. 149-151. 7 «La distinction (...) entre peintre à clientèle et peintre-chercheur nous apporte ici plus d'un critère de classification, (...). Comme André Lhote nous l'a bien fait sentir, le peintre-chercheur a moins tendance à faire des tableaux que le peintre à clientèle, il fait plutôt des expériences.» René Passeron, L'œuvre picturale et les fonctions de l'apparence, Paris, Vrin, sec. éd. 1974, p. 325. 8 Comme disait Goethe: «Notre opinion est qu'il sied à l'homme de supposer qu'il y a quelque chose d'inconnaissable, mais qu'il ne doit pas mettre de limite à sa recherche.» cité par Pierre Bourdieu, Les règles de l'art, Paris, Seuil, 1992, p. 12. 9 «Lorsqu'on cherche, on ne connaît pas exactement ce qu'on cherche. On sait ce qu'on cherche quand on le recherche; (...) La Chercherst donc de l'énergie pure, du désir, une appétence, un appel. (...) Ce qu'on cherche, c'est la fin du Chercher. C'est précisément la découpe du temps, la borne, le jalon, le bas de la page.» Jacques Drillon, op. cit. p. 117. 306 Recherche et création création artistique même si elle touche à une «vérité humaine», - le singu- lier et le local peuvent être à vocation universelle - et peut à ce titre être un «moyen de connaissance»10, ne veut nul lement établir des vérités «scientifi- ques», car c'est par son existence et non par ses lois généralisables q u ' u n e œuvre d 'ar t apporte un surcroît de savoir11. Nous touchons là à un problème litigieux qui est par exemple de dé- terminer ce qu 'on entend par «recherche» dans le domaine des arts plasti- ques. Mais il faut néanmoins préciser que, même sur leur terrain, et Edgar Morin12 ou Prigogine13 l 'ont bien montré, les sciences les plus «dures», on t rencontré dans leur fonct ionnement propre, la nécessité de composer avec le hasard, l'incertitude, l'indéterminisme, le pulsionnel et l 'esthétique. Il faut une imagination tenace, des efforts infructueux, des essais et erreurs inin- terrompus, avant de lancer le fameux Eurêka! Il y a aussi dans la recherche scientifique des repentirs, des recyclages, une fécondité par décent rement , bref la faculté d'articuler des connaissances sur un fond de méconnaissance. 10 Une des thèses couramment avancée par le marxisme, propose de considérer les arts comme «activité de connaissance». Elle s'appuie sur divers textes de Marx et d'Engels, du type de la célèbre lettre d'Engels à Miss Harkness (1888), disant qu'il a «plus appris, même en ce qui concerne les détails économiques (...)» chez Balzac «que dans tous les livres des historiens, économistes, statisticiens professionnels de l'époque pris ensemble» (Cf. Briefwàchsel, Berlin, Dietz Verlag, 1953, p. 481). Certes l'art peut être un moyen de connaissance mais faut-il pour autant faire entrer la pratique artistique réelle dans la définition, accommoder le mot «connaissance» à toutes les sauces? Une peinture de Kandinsky ne fait rien connaître d'autre qu'elle- même. Son intérêt est donc dans sa création, et non dans la prise de connaissance d'aspects déjà existants, mais non encore connus du monde. L'activité artistique n'est pas plus (ni moins) mode de connaissance que toute parole, tout écrit, toute fabrication. Et comme toute parole, tout écrit, toute Œuvre, elle peut jouer un rôle de désinformation, de méconnaissance. Lorsqu'en 1878, à Palo Alto (Californie), Muybridge obtint la première série d'instantanés d'un cheval de course, cela provoqua un grand émoi: ses résultats contredisaient Raphaël! 11 On écarte habituellement avec trop de promptitude la notion de création ex-nihilo, à cause de la gangue théologique qui l'emprisonne et surtout par conformité aux acquis des sciences physiques. Pourtant, il n'est pas sûr que cette notion, certes irrecevable stricto-sensu, ait dit son dernier mot. Si créer ajoute à ce qui existe déjà en transformant par l'action humaine des matériaux en matières, il est en effet absurde de vouloir créer à partir de rien. Cependant il est certain que pour un esprit moderne, seul a vraiment d'importance, le supplément de singularité qui paraîtra venir de rien à travers le maquis des formes imitées. Aussi, défendre un ex-nihilo méthodologiquen'est- ce pas défendre la création tout court? 12 Cf. E. Morin et M. Piatelli, L'unité de l'homme. Invariants biologiques et universaux culturels, Paris, éd. du Seuil, 1974. 13 Cf. I. Prigogine et I. Stengers, La Nouvelle Alliance, Paris, Gallimard, 1980. 307 Richard Conte D'autre part, ne parle-t-on pas de «scénario» et de «simulation» con- cernant les représentations du futur en Prospective, domaine essentielle- m e n t réflexif et exploratoire? On sait que la Prospective se d o n n e pour mission d'anticiper les développements scientifiques et technologiques fu- turs en posant des questions nouvelles pour la recherche. Dans toute simu- lation, dans toute anticipation, même la plus rigoureuse, entre u n e part d ' intuit ion et de projection mentale qui interdisent de penser la recherche scientifique comme procédure purement déductive ou mécanique. Toutefois, même si faire de la recherche au sens de recherche scientifi- que, comporte toujours en tant qu'acte, une part d 'engagement du corps et de l'affect, un investissement psychologique, c'est-à-dire jus tement une part de faire humain, il n 'empêche que c'est bien l'investigation et la vérification14 qui doivent l 'emporter quant à la méthode requise. L'objectif global est bien d'établir des savoirs où la part d 'un consensus de vérités doit augmenter. C'est dire que, certes, tous les rapprochements peuvent être poïét iquement tentés entre recherche scientifique et création artistique, - cela est stimu- lant pour l 'esprit et fécond pour la recherche - mais qu 'en fin de compte, distinguer vaut mieux que confondre. Or, s'il peut y avoir par exemple, des points de convergence entre un biologiste du CNRS et un plasticien, si l 'on peut considérer que tous deux, à leur manière «font des mondes»15, les buts réels, les moyens d'agir et les résultats obtenus ne peuvent s'identifier. Même si la recherche scientifique aime à se dire «créatrice», même si les artistes 14 Cependant, sur ce point aussi il y a débat. Par exemple, Karl Popper ne demande pas aux théories scientifiques d'être vérifiables, mais réfutables, falsifiables, testables. Voir: La logique de la découverte scientifique, (1933) trad. de l'angl., Paris, Payot, 1973. 15 Goodman va même plus loin et D. Chateau pose clairement la question: «Les goodmaniens développent ainsi le paradoxe que les mondes faits par l'art nous apprennent autant que les mondes faits par la science et cela dans la mesure où il n'y a pas de monde ready-made, mais diverses versions du monde créées par divers individus. L'idée est séduisante, mais correspond-elle à l'expérience que nous avons des choses et tout particulièrement, à l'expérience de l'artiste telle qu'elle se manifeste dans son activité et sa réflexion?» in Arts plastiques, Recherches et Formation supérieure, Actes du colloque, op. cit., pp. 164-165. Voir à ce propos l'article de Catherine Z. Elgin, «Comprendre: l'art et la science», in Lire Goodman, Combas, éd. de l'Eclat, 1992, pp. 49-67 qui écrit (p.50): «Toutefois, la science et la philosophie sont manifestement des entreprises cognitives. Une épistémologie incapable de les prendre en compte est trop anémique pour servir à quelque chose. Mais une épistémologie suffisamment vigoureuse pour expliquer leurs contributions cognitives ne peut, c'est ce queje suggère, éviter de prendre en compte les arts. Car pour l'essentiel, les arts font le même genre de contributions. Si j 'a i raison, la question n'est pas de savoir si les arts fonctionnent cognitivement, mais comment ils le font.» 308 Recherche et création sont souvent fascinés par les démarches diversifiées des sciences10, leurs res- sources inventives et leurs dérivés technologiques, indifférencier serait ouvrir la voie à un syncrétisme fumeux dont ces deux approches fondamentales de l'esprit humain que sont les sciences et les arts, auraient à pâtir. Cependant , on découvre un virus, mais on crée un médicament car créer un médicament, tout en participant de la recherche scientifique, fait intervenir des mixtures comme la cuisine des recettes. La recherche d ' u n vaccin peut apparaître, par exemple, comme une création et il est indénia- ble que celui qui le découvre y met une puissance créatrice, faisant ent rer e n j e u une part d ' intuit ion, d' «imagination scientifique»17, voire m ê m e quelquefois de hasard. Dans le cas d 'un prototype d 'automobile par exem- ple, il y a aussi étroite connivence de la création et de la recherche par les effets conjugués de la science des matériaux et d 'une sorte de «génésis non naturelle» utilisant par exemple des souffleries pour créer les formes les mieux adaptées aux multiples contraintes auxquelles doit obéir le construc- teur tout en singularisant le modèle18. Le prototype sera donc à la fois un lf' I l suffit de citer Klee: «En art aussi, on trouve un champ suffisant pour la recherche exacte, et les portes qui y donnent sont ouvertes depuis quelques temps. Ce qui était déjà accompli pour la musique avant la fin du XVIIIe siècle vient enfin de commencer dans le domaine plastique.» «Recherches exactes dans le domaine des arts», in Théorie de l'art moderne, op. cit., p. 48. Mais Klee s'empresse de rétablir contre toute «loi nue», la «réalité vivante», «l'intuition» et «le génie»... Reste que la tentative de Klee est un exemple souvent cité dans l'enseignement universitaire en arts plastiques. On sait à quel point il existait un rêve de Bauhaus chez les «pères fondateurs» de l'UFR de Paris I. et la mention «sciences de l'art» le signale encore aujourd'hui discrètement. Voir aussi à propos de ce passage de Klee: Hubert Damisch, Fenêtre jaune de cadmium, Paris, Seuil, 1984, pp. 197-199. 17 En psychologie, le terme d'imagination créatrice s'oppose à celui d'imagination reproductrice et correspond à la faculté de produire de nouvelles images. Cette faculté créative désigne le processus qui permet à un sujet de dépasser le déjà-là dans n'importe quel domaine des activités humaines. Cf. aussi, Gérard Holton, L'imagination scientifique, trad. franc., Paris, Gallimard, 1982. A propos d'Einstein, il montre le rôle des «idées fixes» du savant (themata), dans ses découvertes. 18 «Entre la nature qui génère et l'homme qui 'instaure', il manque un chaînon pour rendre compte du mode de fabrication de ces objets dont le faire n'est plus décomposable en une succession de gestes humains et qui ne sont pas non plus le produit d'une croissance interne ou de la sécrétion d'un mollusque. I l s'agit du chaînon, disons mathématique: un module mathématique appliqué de façon sérielle. Entre endogénèse et poïésis, existe une génésis non naturelle qui se développe non seulement à l'aide de traceurs et de calculs mais aussi par des profilages de laboratoire. On pense aux souffleries dirigées sur des corps mous pour étudier l'aérodynamisme d'un prototype automobile par exemple. C'estjustement la perte du fil mathématique, qui me semble, en revanche de l'ordre de la poïésis.» R. Conte, «Art et téléphone», communication au séminaire Le produit de la création, 14-15 et 16 déc. 1990, Hammamet, Tunisie. 309 Richard Conte produi t de la recherche technologique et une création qui, en tant que prototype sera unique, aura un statut de pseudo-personne AonX. la disparition par exemple accidentelle affligerait ses auteurs qu'elle compromet d'ailleurs en tant que collectif, tout comme le laboratoire est compromis en tant qu 'au teur dans la création d 'un vaccin.19 Notons qu'il y a une fâcheuse tendance à galvauder aussi bien le mot création que le mot recherche et cela ne peut être considéré comme une sim- ple querelle de mots. Quand on parle de recherche, on devrait pouvoir sous- en tendre «recherche scientifique» c'est-à-dire épistémologiquement la re- cherche d 'un consensus sur des vérités alors que création se rapporte à la survenue d 'une existence singulière, ce que faute de mieux, Souriau a ap- pelé instauration.20 L'idéal institutionnel des sciences, c'est qu'i l y ait le 19 On reconnaît entre ces lignes les trois critères de la création exposés par R. Passeron. Cf. «Les critères de la création», in Pour une philosophie de la création, Paris, Klincksieck, 1989, pp. 154-163. 20 Le terme d'instauration me paraît impropre, quelles que soient les raisons de Souriau, car à connotation pompeuse et officielle. I l n'appelle pas à considérer la fragilité poïétique de l'Œuvre en cours, ses repentirs, ses destructions. I l sollicite la force et se réfère à la part édificatrice et édifiante de la création. Dire que le concept d'instauration est «le point de départ de la poïétique» est très exagéré (Vocabulaire d'esthétique, op. cit., art. «Instauration»). Pour la genèse de l'appropriation de ce concept par les recherches poïétiques, voir René Passeron: «Le concept d'instauration et le développement de la poïétique», (in L'art instaurateur, Revue d'Esthétique, 1980, n" 3-4, Paris, UGE, coll. 10/18,). Les mots certes nous manquent et s'appliquent à manquer leur cible en ce domaine. On sait le toilettage indispensable qu'il a fallu faire subir au mot «création» et combien de fois «poïétique» a suscité (mais de moins en moins) l'étonnement, voire la perplexité. Peut-être faut-il recourir aux propositions des poètes. J'aime par exemple le mot-valise de Jean-Clarence Lambert: laborinthe pour dire à la fois le travail et le dédale de la conduite créatrice. Mais pourrait-on dire, sans ridicule, «laborinther» une Œuvre? Comment circonscrire par des mots justes, le mal de créer, en conservant la précision et la rigueur indispensables à l'analyse? I l n'y a pas de place pour le corps dans ce mot et ce concept philosophiques d'instauration, i l n'a qu'une vigueur solennelle. Qu'on pense par exemple au mot «production» que proposait naguère Ricardou à la place de création! Et pourtantje me souviens combien ce terme paraissait scientifiquement supérieur à celui de création, englué dans sa gangue métaphysique et religieuse. Créer me semble donc bien meilleur que produire et instaurer car s'il véhicule un lourd passé théologique, il ouvre sur d'autres sources comme la racine crecere (de creare, croître) qu'indiquait notamment Yves Eyot («La fonction irremplaçable de la création artistique», L'Humanité, 9 Janvier 1976, p. 8. note 7.) et qui pousse création du côté de la genèse. Ce qui ne va pas non plus sans quelque inconvénient puisque, précisément il faut sauvegarder la précieuse distinction aristotélicienne entre génésis et poïésis. En se référant à creare, le danger est certes de confondre la phusis dont le principe de croissance se trouve à l'intérieur de la chose et le poïein qui «importe» son principe 310 Recherche et création moins de créadon possible dans leurs produits mais il y en a toujours, au moins un peu. Réciproquement un processus créateur peut-il s 'élaborer sans aucune accointance avec les recherches scientifiques de son temps? Y aurait- il un inconscient épistémologique de l'artiste-créateur, par exemple, qui le rendrait «absolument moderne», devançant même quelquefois par ses in- tuitions le système de certaines découvertes scientifiques? Les arts plastiques et la notion de recherche Le mot recherche doit donc être interrogé quant à sa validité dans le domaine des arts plastiques à l'université et être confronté à celui de créa- tion.21 Sans doute chercher n'est pas forcément penser et chez le «penseur» entre certainement une part importante de ce que nous entendons par créa- tion. L'Université française n 'a pas pour vocation initiale, de former des écri- vains ou des artistes et à ce titre, elle résiste à leur intrusion dès qu'il y a ex- hibition de subjectivité. Derrière les rapports entre rechercher t création, sourd un problème beaucoup plus général, dont les arts plastiques ne sont que la partie flagrante, par le fait même d 'une pratique agissant sur le visible. Mais en littérature, où écrit-on des poèmes? Où apprend-t-on à faire un roman? La tradition universitaire, sauf exceptions, (fruits de concessions historiques ou locales), tend à réduire au maximum non pas l 'étude des œuvres, même en ce qu'elles ont de singulier, mais la création matérielle d 'œuvres d 'ar t en son sein. Il y a bien entendu une part indiscutable de «créativité» dans les travaux de beaucoup d'universitaires et de chercheurs, mais elle demeure in fine au service d 'un mouvement général vers le vrai, et vise à la constitu- tion de savoirs «ajoutés» qui modifieront le cas échéant les résultats de re- cherches antérieures du même champ. humain dans l'Œuvre. Mais crearea l'insigne avantage à mon sens de l'engendrement et de ce tamisage par le corps créateur, sans lequel la peinture et l'écriture, sans parler du théâtre ou de la danse, seraient de pauvres choses sophistiquées mais privées de leur moelle. I l faut donc travailler au corps les notions de création et d'Œuvre, quitte à les mettre en crise permanente, cela me semble plus fécond que de vouloir leur substituer des notions encore plus problématiques car, à mon avis, plus crispées et plus contestables, comme «production» et «instauration». 21 Sauf bien entendu à en faire un usage strictement métaphorique, d'ailleurs largement répandu, ou encore à l'employer de façon purement stratégique pour solliciter les bonnes grâces institutionnelles et administratives des autorités de tutelle. Mais ceci ne vaudrait pas que pour les arts plastiques... 311 Richard Conte L'idée d ' une recherche 5wrles arts plastiques ne pose pas de problème particulier.22 En effet, les arts plastiques sont un objet d 'é tude, un champ d'investigation comme un autre. Cela va de soi. Il est autrement plus pé- rilleux de parler de recherche en arts plastiques, c'est-à-dire dans le mou- vement d 'une pratique personnelle. S'agit-il d 'une recherche sur soi-même? Auquel cas il faudrait parler de psychologie de la création. S'agit-il d ' u n e recherche sur la signification de nos propres œuvres? Sommes-nous les mieux placés pour en analyser les ressorts? Réciproquement, tout artiste-créateur est habité par un esprit de re- cherche et travaille de façon concomitante et indissociable dans le sensible et le cognitif. Peut-être la nuance se situe-t-elle au niveau du chercheur-plas- ticien-universitaire qui problématise, c'est-à-dire questionne la dissociation du faire et de l'analyse du faire à des fins extérieures à son œuvre propre, à des fins de généralisation scientifique cumulative. A ce point, nous entrons dans le problème des conditions de possibilité d 'une auto-poïétique des arts plastiques, qui me semble la position de principe la plus cohérente et que j ' a i faite mienne. En tant que peintre, c'est d 'abord en moi-même que j e dois aller pui- ser les ressources de mon «corpus», plus que dans les livres ou dans les ar- chives et en ce sens, j e ne suis pas à p roprement parler un «chercheur». Ainsi la part de moi-même la moins maîtrisable serait l 'un des maté- riaux de ma recherche. Le peintre-chercheur exercerait sa curiosité cogni- tive à l 'égard de lui-même ou de cet inqualifiable de lui-même. Pourtant, ce qui se manifeste de ce moi-même, se heurte aux résistances du faire, aux aléas et aux aspérités du médium, de sorte que j e ne sais pas à l 'avance, comment l 'œuvre s ' informera. Loin d 'être une idée qui s ' incarne, elle est souvent au contraire l 'échec d 'une intention, l 'objet d 'une volonté contra- riée, en proie à une rectification2S permanente de son approche par des ac- tes empir iquement contrôlés. 22 Sans oublier, essentiellement en dehors de l'université, la recherche pour les arts plastiques, par exemple celle en vue de la restauration des Œuvres anciennes et contemporaines. Voir par exemple le livre de Ségolène Bergeon, Science et patience ou la restauration des peintures, Paris, RMN, 1990. 23 «Alors que le détournement diverge, la rectification, en tant que détournement détourné, ramène dans le droit chemin d'un projet créateur, même flou, une conduite qui ne veut pas s'égarer. On peut certes rectifier une opération pour en améliorer la capacité détournante, quand l'intention de détourner est l'axe d'un ferme projet. La rectification semble néanmoins, à l'opposé du détournement, une conduite normative de recentrage, de réorientation et de rigueur. Or, la conduite créatrice, pleine de ratures, de repentirs, de «remords» et de reprises, est souvent rectificative. Le concept de rectification me semble même devoir prendre une position éminente dans l'étude des rapports poïétiques entre l'étant et le devant-être.» 312 Recherche et création Peindre serait la dépossession d 'un moi pensant par un moi en acte dans un présent opérationnel dont il faut coûte que coûte accommoder la contrainte pour sauver la peau du tableau. Il ne s'agit pas d 'une recherche d 'ordre psychologique, d ' u n «travail» sur soi-même, mais de la confrontation d 'un état de mon esprit avec un état de mon pouvoir sur le monde à travers le médium pictural. Seul compte mon pouvoir d 'accomplissement dans lequel l ' idée germinale se perd et mue à l 'aune du matériau. Faire de la recherche en peinture, c'est paradoxalement ne jamais lâcher prise, avoir toujours une main «trempée» dans la matière24. Il serait commode de parler ici de tâ tonnement mais je préfère penser ceci en termes d 'approche et d 'approximation, car peindre c'est souvent ajus- ter. Mais d 'où me vient ce souci d'ajustage, de quelles règles procède-t-il? Si règle il y a. C'est à ce point que le savoir sur l 'art fait obstacle à la création et en même temps lui sert de repoussoir, voire de ferment.2 5 Ce qui me paraît René Passeron, La naissance d'Icare, Paris, AE2CG éd., 1996. L'auteur y fait bien entendu directement référence au Bachelard de La formation de l'esprit scientifique, Paris, Vrin, 1938, p. 10. 24 Comme l'écrit Philippe Junod à propos de Léonard, dans un chapitre d'ailleurs très éclairant pour les recherches poïétiques et intitulé, «L'aventure créatrice»: «Fasciné par le prestige de la poésie et de la science, il [Léonard] cherche à démontrer que la peinture leur est à la fois comparable et supérieure. - Vous aussi, vous avez recours à l'exécution manuelle et matérielle, dit-il aux poètes. Et aux savants: votre pensée reste inférieure en ce qu'elle ne comporte pas cette 'operazione' matérielle qui fait tout le prix de l'expérience picturale.» Transparence et opacité, op. cit. p. 223. 25 J'écrivais le 3 décembre 90 dans En attendant que ça sèche, éd. P. Weider & Musée de Bourges, Paris, 1993: «L'histoire de l'art est-elle un danger pour le peintre? Je me plais à répéter qu'aujourd'hui, l'artiste a la chance de disposer d'une vision historique et planétaire des Œuvres créées. Mais n'est-ce pas aussi dans le même temps un terrible obstacle? L'approfondissement des connaissances historiques multiplie les plaisirs du savoir et alimente la réflexion mais en même temps nous obnubile sur plusieurs plans. (...) Mais il y a plus: les événementsde la vie des autres peintres peuvent servir d'alibi à nos propres faiblesses; à trop parcourir les biographies, à trop rêver aux fictions des historiens, on ne vit plus la 'vraie vie'. (...) II ne s'agit pas seulement de l'histoire biographique; qu'elle soit iconologique, forma- liste, sémiologique, psychanalytique, etc., l'histoire de l'art me met à l'écart, à distance de mon Œuvre propre, comme si j 'y appliquais fantasmatiquement les analyses en question! Je passe donc mon propre travail au crible des valeurs véhiculées par telle construction historique. Est-ce une attitude qui me serait particulière, comme refuge honteux? Ou bien y a-t-il là une composante non négligeable de ce qui, par exemple, attire tant de gens vers les études d'histoire de l'art?» A ce propos, cf. Recherches Poïétiques n "1, sem., aut./hiv. 94. qui contient le dossier que j 'ai préparé, intitulé «L'histoire de l'art, ferment ou obstacle pour la création?», avec notamment les communications du Colloque du 26 mai 94 (Université de Valenciennes). 313 Richard Conte «juste» ne l'est point en fonction d 'une règle, fût-elle d'or, mais plutôt en fonct ion d ' u n e continuelle accommodation (et acculturation20) de m o n regard, c'est-à-dire de ma connaissance sensible de la peinture. Il y a bien sûr des facteurs externes, les visites d'ateliers et d'expositions, les catalogues, les débats, les travaux desjeunes étudiants et toutes sortes d'autres éléments qui viennent f inalement s'écouler d 'un seul j e t oujus , par le goulot d 'étran- glement du regard générateur. Mais le plus étonnant, c'est que mes propres œuvres sont probablement les plus normatives de ma pratique de la peinture et tendent à colporter leurs coordonnées sensibles de tableau en tableau, en sorte que le principal obs- tacle à ma recherche en peinture serait d 'abord ma propre peinture. Ce déjà- là, usant de son droit d'aînesse pour certifier conforme les tableaux suivants. Il se produit ainsi une véritable politique de l 'écart par rappor t à une no rme que j 'a i moi-même instaurée. Voici donc une recherche où il n'y a rien à trouver.27 Et jamais j e n ' en finirai de chercher car il n'y a rien à trouver que précisément la recherche même. A peine faite, l 'œuvre est abandonnée et la bête s 'en va en quête d 'autres habitacles pour abriter momentanément son être nomade. Je peux accumuler les toiles, j e peux les montrer, mais elles ne m 'apprendron t rien. Peut-on encore appeler recherche ce qui de fait, procède plutôt de la créa- tion? En fait, ce ne sont pas les œuvres qui constituent la recherche, au sens que j e m'efforce de rendre à cette notion, mais la conscience des rapports qui s'accomplissent en elles, q u a n d j ' e n éprouve l'existence. En témoignant de ces rapports, en étudiant la dynamique ou l ' inertie de leurs effets, en laissant la création produire un savoir en dehors de l 'œuvre, il est possible de rassembler sur la relation au pictural, par exemple, un certain nombre 26 J'emploie ce terme de façon un peu métaphorique; pourtant, si l'acculturation se définit comme l'adaptation d'un individu à une culture étrangère avec laquelle il entre en contact, c'est bien l'intrusion exotique de ce que je crée qu'il me faut admettre, y compris contre mes «convictions» de la veille. 27 «Le peintre-chercheur lutte contre son passé, tout en y trouvant mille nourritures. Le plus important pour lui, n'est donc pas de savoir (de rêver) où il va, mais de ne pas rester trop longtemps où il est. S'il a parfois, dans ses expériences, l'impression de piétiner, son impatience est compensée par le sentiment qu'il n'y a pas de temps perdu pour qui sait tirer la leçon, même de ses pires échecs. En ceci, chercher c'est toujours trouver suffisamment pour ne pas perdre pied. Mais, par ce qu'elle trouve, l'œuvre est alors surprenante.» R. Passeron, L'œuvre picturale et les fonctions de l'apparence, op. cit., p. 325. «Chercher, c'est aller au réel à travers le labyrinthe qui nous le cache. Et quand on arrive au bout, on trouve le vide.» René Passeron, «Recherche et création», in Arts plastiques, recherches, à?Formations supérieures, op. cit. p . 1 2 9 . 314 Recherche et création de connaissances dont on peut au moins constater l 'occurrence statistique. Il ne s'agit pas de règles techniques ou formelles mais de la connaissance anthropologique d 'un enchaînement d'actes dans ses rapports avec la «cause matérielle» et la «cause formelle». Qu'y a-t-il de généralisable dans l 'opéra- tion matérielle et symbolique du faire plastique? En même temps, qu'y a-t- il de spécifique? Ma recherche poïétique se trouve aux pieds de ces ques- tions. 315